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Olivier Mathieu a été élu

à l'Académie française, le 7 avril 2011,


au trentième fauteuil laissé vacant par
le décès de Maurice Druon.
Discours de réception d'Olivier Mathieu, dit Robert Pioche (candidat
depuis le 27 janvier 2011 à l'élection du 7 avril 2011 à l'Académie
française), qui sera prononcé à Paris, le premier jour d'avril 2011, soit
six jours avant cette élection.

Par Olivier Mathieu.


Nouvelle littéraire,
mais aussi de réflexion théorique sur la morphologie, la syntaxe, la phonétique et la décadence
françaises.

Prologue en vers.

Discours de réception d'Olivier Mathieu,


en vers fleuris.
Ce poème ludique compte environ deux cents alexandrins à rimes plates ou
riches, presque toutes régulières, plus 14 octosyllabes empruntés à Charles Cros.
Emprunt d'autant plus compréhensible que l’ascendance la plus remarquable de
Maurice Druon fut bel et bien celle des Cros. Et puis, Maurice Druon était également,
si je me souviens bien, l'arrière-arrière-petit fils d’Odorico Mendes, homme de lettres
brésilien, élu au 17e fauteuil de l'Académie brésilienne des Lettres. Mendes est un
nom typiquement portugais, bien qu'on le retrouve aussi en France (cf. Catulle
Mendès, Pierre Mendès France, etc.).
Dans le poème, ont été insérées des expressions (Tourbillons Légers, Rendez-
vous aux Enfers, Tistou les Pouces Verts) qui sont des titres fameux d’œuvres. La
première est une œuvre musicale du grand-père de la première femme de Maurice
Druon, Louis Gregh, musicien « léger » et éditeur de musique, lequel ne signait pas
(ou pas toujours) ses pièces de musique de son nom, semble-t-il, mais de
pseudonymes.
Quant à "la civilisation est d'abord un langage", l'expression est évidemment
de Maurice Duon (discours de réception à l'Académie française, 1967).
Ecoutons d'abord ce poème, que vous imaginerez donc clamé par Olivier
Mathieu devant les membres - sagement assis pour l'écouter - d'une Académie
française comble de visiteurs.

La vie littéraire de Maurice Druon racontée en vers.

Mesdames et Messieurs, la noble Académie


D’Armand Jean du Plessis a, de ses voix, émis
Le vœu de m’accueillir en votre confrérie
Et d’honorer l’auteur qui fut longtemps marri
D’un silence en écho pour toute éternité.
En ce jour d'hui, merci, pour l’immortalité
Que vous me conférez en m’offrant, respectable,
Un large fauteuil en viager, à la table
Des héros demi-dieux de la littérature
Dont l’épée en airain tient vive la nature
Anoblie et sacrée, en ses airs d’outre temps,
De la pensée écrite et des valeurs d’antan
(Lorsque, châtié ou cru, le langage, autrefois,
Naissait du cœur du peuple et des hérauts, ma foi !)
Des mots enfin des mots, échafaudés en somme
Poète après poète, au fur des heurs des hommes ;
Créés pour exprimer sensations, sentiments,
Le malheur vérité et le bonheur qui ment.

« La civilisation est d’abord un langage »


Ai-je besoin de dire où j'ai trouvé l'adage ?
Des mots vivants, des mots déments, mais parlons-en !
Évoquons qui n’est plus mais qui, en alezan,
Caracolait parmi les vers d’un Charles Cros
Au pays du Midi au milieu de la Crau,
Car vous excuserez mon parti pris d’éloge
De ce qui est, pour moi, balancier de l’horloge :
Esprit de création, essence et vibrations
D’un cœur en effusion d’enfant dont la mission
S’impose à lui d’un brin de rêve et sans raison…
Mais écoutons chanter l’ancêtre en son Coffret
De Santal, mélopée au parfum encor frais :

*
Au plus grand nombre je déplais,
Car je semble tombé des nues,
Rêvant de terres inconnues
D'où j'exile les gens trop laids.

La tête au vent, je contemplais


Le ciel, les bois, les splendeurs nues.
Quelques rimes me sont venues.
Public, prends-les ou laisse-les.

Je les multiplie et les sème


Pour que, par hasard, ceux que j'aime
Puissent les trouver sous leurs pas.

Quand ceux-là diront que j'existe,


La foule, qui ne comprend pas,
Paiera. C'est l'espoir de l'artiste.

(en italiques, 14 octosyllabes empruntés à Charles Cros)

Et tout abasourdi par de si vrais propos,


Notre Druon - car c’est bien lui - chercha repos
Du côté du troisième et dernier souverain
D’un rêve de nation d’amérindiens pur crin.
Ce fut Antoine Cros, le médecin de Pierre
Empereur brésilien, qui apporta sa pierre
En la Nouvelle France, au pays exotique
Patagon, araucan et puis… si hermétique :
Antoine le second, adepte en science occulte
Rendait ainsi honneur aux Esprits dont le culte
Occupait la Pensée des indiens mapou-tchés
Les « êtres de la Terre » vénérant, abouchés
À la nature en fibre, une Gnouké Mapou,
Une Mère la Terre, dont nul ne sait l’époux.

Revenons un instant à la lignée des Cros


Qui eut depuis longtemps la culture à tous crocs.
Au philosophe ancien, grammairien homophone,
L’artiste en trichromie et du paléophone,
Ajoutons pour finir, un Henry d’Art Nouveau,
« Gentilhomme verrier » à Sèvres, un dévot
Exprimant en émaux les émotions anciennes ;
De notre antiquité d’Europe ayant fait sienne.
Ajoutons, pour corser le bouillon de culture,
L'apport oriental des Kessel ; l’aventure
De ce père Lazare, artiste en démesure ;
Puis d’un oncle Joseph (moderniste à l’usure,
Terre à terre en avion, fondateur de Gringoire)
Son goût de la Russie, seul fait ici notoire.

Adoubé par autant de tendres créateurs,


Inventeurs, prosateurs, poètes, amateurs
De langue et de beautés, Maurice eut donc un choix :
« Voilà qu’entre mes bras un lourd passé m’échoit. »
Il suivit de ses pairs enchâssés en la terre,
La lignée aux lettrés et l’attrait du mystère ;
De sa mère et son père adoptif conjuguant
La forme avec le fond, la lettre avec le gant
Du fauconnier altier, et l’antique armorial
Au jeu choisi des mots, l’histoire au mémorial
D’un long pays perclus d’écus et de trophées ;
Mêlant les faits, les vrais, aux mirages des fées.
Son chemin tout tracé l’emmena sur les pas
Des rêveurs et des vieux contes à bel appas.

Qui pourra s’étonner qu’après l’avoir montrée,


La comédie étroite et « françoise » et outrée,
La Fin des Hommes à morale, et de valeur,
Cette bourgeoisie avilie, et de malheur
(Rendez-vous aux Enfers pour Les Grandes Familles,
C’est La Chute des Corps, là-bas sous la charmille),
La seconde saga de Druon de Reyniac
Plongeât en un passé lointain plus démoniaque,
Où les templiers morts font du roi un fantoche,
Par leur malédiction, prince de la basoche,
Décaties les mœurs en écran d’anathèmes
Ont étranglé la reine, empoisonné qui aime,
Donné la louve au roi, jeté le lis aux douves,
Et pillé le pays où la révolte couve.

Parachevant le tout, en remontant le temps,


Pessimiste écrivain, conservateur d’antan
(Moquant non sans raison la sébile tendue
D’une contestation subventionnée et due),
Il nous offre le cœur d’Alexandre le Grand,
Les Mémoires de Zeus au fond d’un mazagran,
Retrouvant le bonheur des vieux mythes païens
Si loin des bénitiers, en la cupule au bien
De quelque mégalithe, ostensoir naturel,
Tabernacle de vie, esprit fort, culturel.
Oublieux de l’encens, à tous les vents d’Olympe,
Druon consent aux Dieux vieillis, aux œufs de lumps,
Le bonheur poétique et sacré d’une éthique
Parmi la mer, parmi les prés d’une esthétique…

Quand Pierre de Lagarde entame un sacerdoce,


À vouloir ranimer sur quoi le temps s’adosse
Et sauver de la mort Chefs-d’œuvre en Péril,
Notre amoureux, Druon, des fiers cailloux d’exil
Et des travaux passés d’inconnus de talent,
S’éprend d’un ancien corps avec tout son allant,
Rachète et puis restaure, à Thésée aux Maselles,
Les murs, impressionnant ancêtre et damoiselle
D’un art gallo-romain venu d’un temps où les
Romains avaient secrets des bétons bien coulés.
Attisant l'émoi de Thésée-lès-Diane,
Déroulant fermement le précieux fil d'Ariane,
Druon redonna vie aux antiques arilles
D'un if (taxé taxus) au thésaurus des drilles.

Il fit don du trésor, après quelques années,


À l’Indre et Loire ; et des âmes abandonnées
D'un Palais incendié, de la bêtise humaine
Il se souvint ; prôna que notre temps ramène
En son Jardin, parois de Tuilerie ancienne :
Ô chez son Vieux Paris, rebâtir port d’Éphèse !
Entre temps, installé dans l’abbaye de Faize,
Fortement abîmée aux jours de la bourgeoise
Révolution française, il en fit sa demeure
De vivant et de mort. Pour que jamais ne meure
L’esprit de création et de conservation,
La coule cistercienne, albe divagation
S'y coule laudative et d’un chant inaudible
Glisse discrètement sur le chant d’une Bible.

« D’ici peu, vous aurez quarante bonnes femmes


Qui nous tricoteront (Druon d’un coup s’enflamme)
Le français dictionnaire ! » Accordons-lui, mais oui,
Quelque rancœur envers le Beau Sexe qui luit.
De Crayencour n’était en cour, on l’a compris.
Il préférait sous la Coupole un mâle esprit
Incarné par Braudel, Lévi-Strauss ou Duby,
Le second rappelant : folie à grand débit,
La mort de tant de vie en l'Homme, faune et flore,
Et l’Esprit amoindri mangé, il le déplore,
De l’intérieur, ruiné ; tandis que de Reyniac
N’entend pas retomber dans le sel ammoniac
De sociétés d’insectes égalitaristes
Où, en complet esclave, il serait… méhariste.

- Comment l’Esprit devient chameau à bon escient ?


- Si tôt chargé, part au désert, esprit patient!
- Comment Chameau devient donc lion, ce solitaire ?
- En muant du « tu dois » au « je veux » sans mystère!
- Comment le Lion devient Enfant par tout Atys ?
- De la mort-dieu, puisqu'au printemps naît Adonis!
Pour "que Nature ait mis aucun en servitude",
C’est que l’enfant, en être franc, rompt l’habitude,
Régénère la vie. Il est tel chez Mendès,
L'ancêtre de Reyniac, brésilien, loin d'Hadès
Et de l'"ombre brumeuse", en son Virgile entier
Et lusophone, en son amour pour les sentiers
Où Palmeyrim affronte un Patagon à flammes
Mais "moult intelligent et grand amant de femmes".
Tant soit peu misogyne, il s’unira pourtant :
– Un ! à la poésie, à l’âge de vingt ans,
Dans un fougueux élan de jeunesse et de sang :
Il épousa des Gregh, Geneviève, inconscient,
La fille de Fernand, le poète et critique
(Le grand ami de Proust, bercé par la musique
De valse et de polka, au salon ouvragé
Des danses à papa en Tourbillons Légers).
– Deux ! il convolera, en d’autres lendemains,
Avec, noire de peau, une petite main :
Marignac Madeleine. Or, de ces deux unions
Ne naquit nul enfant si ce n’est, lumignon,
Un gamin de papier, Tistou les Pouces Verts.

Mesdames et Messieurs, à l’endroit à l’envers,


La vie entre partout, et Maurice Druon
Dit qu'enfance est bénie, oui ! si nous nous ruons,
Pleins d'espoir à connaître, en soi autant qu'en maître,
Le secret éternel de la Volupté d'Être !
Les vers que l'on vient de lire ont été adressés, par mes soins, et par voie postale, à la majorité
des académiciens, le 14 février 2011. Certains m'ont répondu, d'autres - "absents de Paris" -
m'ont fait remercier par leur secrétariat...

Chapitre I
Discours introductif: remerciement d'Olivier Mathieu à ses paires (?),
pour l'avoir élu, le 7 avril 2011, au fauteuil laissé vacant par le décès
de M. Maurice Druon. Ce qui offrira l'occasion de rappeler les
tentatives précédentes d'Olivier Mathieu, dit Robert Pioche, afin
d'asseoir la sienne (?) parmi les Quarante.

"Académiciens, académiciennes!"
Cette introduction est clairement inspirée par le fameux "Français! Françaises!"
de Mongénéral. Académiciens! Académiciennes!
Académiciens! Académiciennes!...
"Académiciens! Académiciennes!"... Ciel, que dis-je? Quel homme politique
dirait encore : "Français! Françaises" ? Non! Il dirait (comme je l'ai entendu dans la
bouche des prestigieux successeurs de Mongénéral), il dirait: "Françaises! Français!"
Commencer par les dames est très important. C'est plus politiquement correct.
Et c'est censé rapporter davantage électoralement. Ne disons plus : "Messieurs
Dames!", mais : "Dames Messieurs!"... Ou, de mieux en mieux :"Mesdames
Sieurs!"...
Rouge de honte, donc, je me corrige : Académiciennes! Académiciens!
Le 7 avril 2011, à moins que ce n'ait été (poisson d'avril) six jours auparavant,
et que personne d'autre que moi ne s'en soit aperçu, voilà qu'enfin, vous m'avez élu à
l'Académie française.
Voilà qu'enfin, on doit dire : Olivier Mathieu, dit Robert Pioche, a été élu à
l'Académie. Olivier Mathieu, dit Robert Pioche, est académicien. Olivier Mathieu, dit
Robert Pioche, est un "immortel". Olivier Mathieu, dit Robert Pioche, est au nombre
des Quarante.
Voilà qu'enfin, vous m'avez convié à m'asseoir parmi vous, voilà qu'enfin vous
consentez que je vous apostrophe: membres de l'Académie, mes paires!
Mes paires! Mes pairs! Académiciennes! Académiciens! Mon émotion est à son
comble. Après tant de tentatives malheureuses, voilà que vous avez récompensé ma
légendaire persévérance.
Déjà, en 1990, j'avais escompté que vous m'offriez votre accueil sous les
lambris du Quai de Conti, mais vous m'aviez préféré (et j'avais largement applaudi à
votre choix) Madame Hélène Carrère d'Encausse qui, depuis lors, est devenue (après
Maurice Druon) le Secrétaire perpétuel de la noble assemblée.
Plus tard, en 2003, au terme d'une lutte épique, je dus m'incliner, pour
seulement dix-huit voix de différence, afin que pénètre à l'Académie un romancier
tel que Valéry Giscard d'Estaing. Et, ici encore, je partageai votre choix et m'exaltai
de votre décision: cette consacration littéraire était évidemment indispensable et je
fus tenté, un instant, de renoncer au modeste suffrage que j'avais quant à moi reçu,
afin de l'offrir à Celui qui, dans ma jeunesse, décidait avec tant de brio et de charisme
des destins immortels (eux aussi) de la France. Oui, je le confesse. Que Valéry
Giscard devienne immortel avec seulement 19 voix, tandis que Robert Pioche devait
se contenter d'un dix-neuvième d'immortalité, m'a donné mauvaise conscience. Je
regrette que, par ma faute, M. Giscard n'ait point reçu vingt voix. Cela aurait fait plus
rond, plus unanime. Mais il est trop tard, hélas, pour revenir en arrière.
Qui ne se souvient des moments historiques et tragiques où le président
Giscard, assis à son bureau devant les caméras de télévision, prononça des adieux
larmoyants aussi touchants qu'inoubliables, en ces jours de mai 1981 où la presse
française (de droite) évoquait plus ou moins l'entrée imminente des chars soviétiques
dans Paris, à la suite de l'élection de François Mitterrand? Cet instant terrible et
formidable, cette page noire de notre histoire (je parle de M. Giscard abandonnant la
France à son mitterrandien destin) fut heureusement effacée quand M. d'Estaing fut
plébiscité (malgré la voix qu'obtint Robert Pioche) par l'Académie. J'en remerciai les
Dieux du Destin, et en fus infiniment heureux et fier pour lui.
En 1981, qui n'a senti l'amertume du président Giscard et de l'idée qu'il se
faisait d'une France – "l'entreprise France", vous vous souvenez? - soudain privée de
lui? En 2003, ce fut son retour, la revanche, son entrée dans l'immortalité littéraire
après l'immortalité politique d'un inoubliable septennat, voire dans l'immortalité tout
court. D'ailleurs Mitterrand, qui savait pourtant écrire, n'aura jamais été académicien.
Na!
En décembre 2003, il y eut des gens pour s'élever contre le fait qu'un
académicien ait choisi de voter pour Robert Pioche et non, comme il aurait été plus
que logique, pour Giscard. Quelques jours plus tard, ainsi, dans le numéro du 18
décembre 2003 du "Figaro Magazine", l'un de nos penseurs français, M. Philippe
Bouvard pour le nommer, s'en prit avec son intelligence coutumière à Robert Pioche.
Il eut bien raison. Monsieur Bouvard est un journaliste d'un grand courage, son
humour est sans égal, c'est un écrivain d'immense talent et un philosophe exquis. Que
dis-je? Bouvard est tout simplement l'un des phares de la pensée universelle de tous
les temps. Je fus confus qu'une telle autorité risque de souiller sa plume immaculée
pour s'en prendre à ce vaurien de Robert Pioche.
Ces dernières années - et puisque le règlement académique, qui est infiniment
démocratique et je m'en réjouis, prévoit que "toute personne" puisse le faire, sans
qu'il soit seulement nécessaire d'exercer la profession d'écrivain - j'ai déposé mon
humble candidature face à des géants de la littérature et de l'histoire. Chaque fois, j'ai
accepté ma défaite et, mieux encore, je l'ai comprise.
Quand M. Max Gallo, ainsi, se présenta et (à mon grand et éternel bonheur)
triompha, ma candidature ne fut pas seulement prise en considération. C'était curieux.
J'avais eu le droit de poser ma candidature en mars 2007 et voilà que, deux mois plus
tard, je n'avais plus ce droit. Le refus de ma candidature du 31 mai 2007, oui, fut d’un
caractère absolument particulier, unique en son genre, puisque je possède le courriel
de l’Académie française m’indiquant aimablement que ma candidature serait
annoncée en séance, le 29 mars 2007. On peut donc dire que ma candidature a été
rejetée lors de cette séance du 29 mars 2007. Sur ordre de qui ?
Broutilles... Je pris mon mal en patience. J'admis, très volontiers, que bien des
considérations exigeaient que je ne fusse élu qu'après les dames (par exemple
Madame Simone Veil) et les messieurs qui furent mes adversaires lors de ces
diverses élections.

Le plébiscite du 7 avril 2001 (Académie française, trentième


fauteuil).
L'élection académique du 7 avril 2011 m'a opposé, de nouveau, à de grands
esprits. Or, j'ai vaincu. Ce n'est pas, cette fois, un dix-neuvième de mon insécable
fessier, un dix-neuvième de ma paire que l'on invite à prendre ses aises sur un fauteuil
académique, mais bel et bien l'intégralité de mon fessier. Je ne méritais pas tant
d'honneur. Et c'est bien pourquoi ma surprise est énorme d'avoir été – à ce que l'on
me dit, et je désire m'efforcer d'y croire – élu, et, plus étrangement encore, élu six
jours avant ladite élection. Comment donc peut-on m'élire, moi qui ne suis pas né au
nombre des élus, avant l'organisation d'une élection? Voilà un grand mystère.
Est-il donc écrit que je doive entrer dans l'Histoire non seulement pour avoir
été (comme le relate l'encyclopédie du "Quid") le "premier écrivain à avoir déposé sa
candidature à l'Académie française sous deux identités diverses", mais aussi,
désormais, pour avoir rédigé et publié mon discours de réception six jours avant le
7avril 2011?

Chapitre II

De la toute première contribution combative qu'apportera Olivier


Mathieu, exemple parfait d'imbécillité, aux éminents et utiles travaux
de ses paires.

Mais quelle contribution pourrai-je donc apporter – moi qui, à en croire


certains, probablement bien informés, serais un imbécile combatif mais notoire, une
sorte de crétin congénital - à l'institution qui m'abrite désormais pour l'éternité sous
son aile immortelle?
Académiciennes! Académiciens!
M'est avis, pour commencer, qu'il serait bon de nous asseoir autour d'une
table, et de nous livrer tous, vous et moi, à l'exercice d'une dictée de français. Vous le
savez, c'est là une idée à laquelle je tiens. Il y a quelque temps, ainsi, le "Figaro
Magazine" a aimablement rédigé un article pour rappeler ma proposition. Qui sait
combien de lecteurs du "Figaro Magazine" auront souri? Qui sait combien
d'internautes (cet article du Fig Mag est "en ligne" sur Internet) auront souri? Avouez-
le, chères académiciennes et chers académiciens! Proposer une dictée aux Quarante,
et donner à sourire au peuple, n'est-ce pas là une innovation?
Académiciennes! Académiciens! Sans doute n'ignorez-vous pas –
Académiciennes! Académiciens! - que la langue française ne va pas bien.
La langue française ne va pas bien, si j'en juge par les difficultés que je
rencontre, chaque fois que je me promène dedans Paris, la bonne ville de Pontoise ou
leurs banlieues, pour comprendre le sens des borborygmes qui frappent mes oreilles.
Je suis né à Paris mais aujourd'hui, à Paris, la langue française m'est étrangère. Elle
m'est étrangère par le nombre des anglicismes qui la défigurent, elle m'est étrangère
par ses syllabes disparues, elle m'est étrangère par les subtiles influences dialectales
venues de pays et de continents dont, hélas, je ne parle pas les idiomes.
C'est très frappant. Quand je me rends dans la ville italienne de Bari, je
comprends le dialecte de cette cité, qui est un des plus ardus des environ 121
dialectes italiens. A Paris, je ne pige plus un mot.
Dans mon enfance, tiens, on m'a enseigné à dire : "Je ne sais pas". Au cours des
décennies, on est passé à "Je n'sais pas", puis à "J'sais pas", puis à "Ch'sais pas".
Aujourd'hui, j'entends des "Chpa!" qui nous rapprochent de plus en plus d'un
langage que les hommes des cavernes de la préhistoire eussent jugé quelque peu
rudimentaire.
Une de mes amies (elle s'appelle Hélène et a 17 ans), à laquelle je demandais
son avis sur un livre, m'a répondu :
– Sépatété.
J'ai rencontré quelque vague difficulté à comprendre le sens de ces ésotériques
syllabes. S'agissait-il d'un dialecte guadeloupéen, africain, asiatique, indo-européen?
On m'a renseigné. "Sépatété" signifie, m'a-t-on juré, "c'est pas terrible". C'est du
français. Au moins depuis J. Halliday, la France ne sait plus le sens du mot "terrible".
Moi, j'ai rangé dans un coin de mon cerveau la signification de "sépatété".
Mes contemporains sont en nette difficulté dès qu'il s'agit pour eux de
construire une phrase qui compte plus de trois mots, ou plus de cinq syllabes,
frontière au-delà de laquelle ils craignent probablement une atroce (et infondée)
accusation d'élitisme.

Quelques exemples.
On pourrait citer, parmi bien d'autres, ces indécrottables "tchalèn'ge" et
"désolé", qui sont des calques nés d'une anglomanie étroite de journalistes. Si vous
avez du temps à perdre, branchez-vous sur n'importe quel feuilleton de la télévision et
attendez le moment, qui ne saura tarder, où l'un des protagonistes dira, pour tout et
pour rien, un "désolé" qui ne signifie nullement qu'il soit désolé, mais seulement que
le dialogue a été traduit mot à mot d'un "sorry" anglais ou, s'il s'agit d'une "oeuvre du
cru", qu'il a été intégré par le cerveau d'un dialoguiste "français"...
Tous nos écrivains de talent ne furent pas de la brillante Académie, et certains
tout simplement parce qu'ils étaient déjà morts depuis longtemps à sa naissance ;
j'aime à comparer les styles, les lexiques des uns et des autres, la richesse et la
luxuriance d'un Alcofribas Nasier, d'un Léon Marchenoir ou d'un Ferdinand Bardamu
qui sont parmi les gloires de notre littérature, et de notre prose poétique et jubilatoire.
Et je dois dire, même si je n'ai pas l'heur de plaire à mes contemporains, ce qui
ne me tracasse pas trop d'ailleurs, que l'enflure des mots ou les périphrases
contemporaines sont de la roupie de sansonnet à côté du vocabulaire, des
vocabulaires de ses géants. "Y a où rire", comme disait Céline en haut breton, il y a
de quoi rire (de tristesse ou de colère?) devant les néologismes affligeants qui font
par exemple des aveugles des "non-voyants". Mes auteurs, eux, appellent un chat un
chat, en tout respect pour les mots et les individus, en toute franchise et sans
pudibonderie. Et ne sont pas des "non-pensants" pour ça.
Et "y a où pleurer" lorsque "social" veut dire que tout va mal, que les gens sont
mis à la porte d'une entreprise (mesures sociales) ou sont en grève (conflit social).
Autres euphémisme, ceux qui font de lâches et criminels bombardements de civils (et
de militaires aussi) des "frappes chirurgicales ratées, à dégats collatéraux".
Mes auteurs ont également un second talent, celui de l'extrême richesse
lexicale et expressive. Ils sont donc, en leurs oeuvres, à l'opposé du langage
contemporain des media, et de la réclame en particulier, qui est d'une dramatique
pauvreté, d'une telle bassesse ou d'une si incommensurable niaiserie et vacuité.
Comment ne pas rire devant des expressions quotidiennes, galvaudées à hue et à dia,
telles (j'en oublie) : "c'est une véritable révolution dans la lessive", "ce but (d'un
match de foot-ball) est historique", "il joue à l'ancienne", "je vous vends du pain
traditionnel" (que je n'ai jamais connu lorsque j'étais enfant), "c'est un rap
emblématique de toute une jeunesse", "c'est un rendez-vous mythique", "le concept
en est simple et les opérateurs ne manquent pas", et pour finir les "atypique", "hors-
norme", "rebelle" et "provocateur": parlant d'individus qui sont tout sauf provocateur,
rebelle, hors norme et atypique. Et ce n'est là qu'une petite partie des jargons
contemporains et "chébrans".
La langue française, encore, m'est étrangère à cause de l'hilarante habitude que
semblent avoir les Français de faire suivre la moindre de leurs phrases, comme
l'éminente linguiste (?) Vanessa Paradis, par un "quoi" ou par un "hein"!
Ce "quoi" est appelé à remplir, en quelque sorte, les phrases très courtes de mes
très aimés compatriotes. Vu que leurs phrases sont de plus en plus vides, ce fameux et
seyant "quoi!" y ajoute, au moins dans leur esprit et dans leurs intentions, un
important concept. Enfin, c'est ce que je suppose, quoi!
La langue française ne va pas bien, si j'en juge par les fautes de français – qui
me font sursauter - des plus éminents journalistes de la télévision ou de la presse
écrite - lamentablement écrite.
- Chpa sépatété kwa!
Le Français moderne, après avoir produit l'effort de prononcer une phrase aussi
complexe, a le cerveau pressé comme un citron, jusqu'au dernier de ses
extraordinaires neurones. Il a épuisé les ultimes de ses ressources langagières et
intellectuelles. Sa dialectique a donné le meilleur d'elle. Chpa sépatété kwa!
Je m'amuse, quelquefois, à interroger des gens de mon entourage. Les réponses
qu'ils hasardent me permettent hélas de conclure qu'il y a cent ans, ils n'auraient pas
obtenu leur certificat d'études primaires. Les journalistes, les présentateurs de télé
prennent des airs intelligents, on sent qu'ils abondent en sens critique, et puis ils
balancent : "Après que tel ministre soit allé"... Nul ne les reprend, nul ne hausse le
sourcil. Peu, très peu de téléspectateurs doivent encore s'apercevoir de l'horreur que
l'un ou l'autre vient de proférer. Après que, pour qui l'ignorerait, exige l'indicatif.
Un de mes amis m'affirme que son épouse (qui - selon certaines sources -
publierait aux PUF, Presses Universitaires de France) n'est pas en mesure de
conjuguer par écrit les verbes auxiliaires français, à tous les temps et tous les
modes, sans des erreurs grossières.
Mieux encore, cet ami me prétend que sa moitié, toujours elle, lui envoie des
lettres qui contiennent de véritables perles. Par exemple, "Avant qu'il n'est" au lieu
de: "Avant qu'il n'ait". Et que de telles fautes se retrouveraient également dans les
correspondances de la directrice de thèse de cette épouse, directrice de thèse qu'il
surnomme humoristiquement: "une fontaine d'illettrisme". Horresco referens...
Je possède, si quelqu'un ne me croyait pas, des photocopies des prouesses
orthographiques de ces dames (dont j'aurai évidemment la bonté de ne pas citer les
noms, sauf - naturellement - si elles y tiennent). Je me dis que si une universitaire
française, titulaire d'un nombre incalculable de doctorats, et une directrice de thèse,
ne savent point conjuguer le verbe "avoir", les choses ne doivent guère aller mieux
dans les nouvelles générations, et pas davantage parmi leurs enseignants. (Je crois
qu'il est question, ou qu'il a parfois été question de faire passer des examens de
français aux immigrés. Je me demande sérieusement s'il ne faudrait pas penser à en
faire passer d'abord aux Franchouillards "de souche").
Que faire (je suis toujours dans le domaine de la réalité et non du roman)
lorsque j'entends une directrice d'école (maternelle) me dire : "Je fais des fautes". Ce
qu'elle veut dire, c'est qu'elle fait des fautes non pas dans l'écriture de mots
compliqués ou rares, mais dans l'analyse logique d'une phrase française simple, et
qu'elle ne sait pas conjuguer des verbes courants, et qu'elle est incapable de voir ses
erreurs. Je me souviens du temps où elle préparait son concours d'entrée à ce qui
s'appelait autrefois l'École normale, qui comme son nom l'indique relevait juste de la
norme courante de l'enseignement. Et je me dis : "Mais comment a-t-elle réussi ce
concours ? Et si tous les enseignants étaient de son acabit?" Las! Comment corriger
des erreurs qui remontent à la petite enfance ?
Que faire encore, me dit un ami, qui lui-même reconnaît faire des fautes
d'orthographe (surtout depuis qu'il se fie un peu trop à son correcteur d'orthographe
d'ordinateur, me précise-t-il, comme l'élève qui ne connaît plus ses tables et ne sait
plus compter qu'avec l'aide d'une calculette et encore moins faire une règle de trois ou
du calcul mental), lorsqu'une enseignante, à qui il avait demandé les devoirs du jour
pour son fils malade (c'était à la fin des années 80),lui donna la copie où se trouvaient
des perles du genre de : "conjuguer : je pleurs, tu pleurs, il pleurt".
Que faire enfin, me dit ce même ami, lorsqu'un professeur principal de
collège ne cesse de répéter : "Lorsque les élèves auront acquéri ceci et cela" ?
On n'en est pas ici au niveau de problèmes liés à "l'évolution" de toute langue,
mais dans un mal bien plus profond. Or, à qui en vouloir quand, du haut en bas de la
société, les Français abandonnent leur langue et leur culture? Celles-ci sont davantage
respectées par certains "étrangers", comme j'en ai parmi mes amis.

Face au drame d'une langue, jadis appelée langue française, qui meurt peu à
peu (traduisons : qui crève avec une extraordinaire rapidité), ne serait-il pas utile que
les académiciens, tout comme moi bien entendu, se soumettent publiquement à une
dictée?
Ne faudrait-il pas qu'ils montrent le bon exemple? Ne faudrait-il pas qu'ils
fassent comprendre aux jeunes gens, et au public, que les dictées sont un important
instrument didactique? Et qu'ils connaissent sur le bout des doigts - puisqu'ils sont
académiciennes et académiciens - au moins les règles les plus élémentaires de la
grammaire française?
La dictée à laquelle je désirerais respectueusement vous soumettre –
Académiciennes! Académiciens! - ne serait pas celle de Mérimée. Elle ressemblerait
encore moins aux dictées que quelques épiciers de la littérature (enfin, de ce que l'on
appelle, de nos jours, "littérature") s'amusaient à proposer, il y a quelques années, à la
télé. De telles initiatives me semblent vaines. Elles donnent l'impression que savoir
sa langue serve à gagner du fric au cours d'un jeu télévisé. Le vainqueur de telles
pitreries passe sans doute, quand il fait retour dans sa ville ou son quartier, pour un
génie des temps modernes. Ses proches s'extasient: il a répondu aux questions les
plus épineuses ! Miracle! Alleluia!
Or, savoir le français ne devrait pas susciter tant de clameur ou d'admiration.
Clameur et admiration qui renseignent, justemement, sur le fait que le grand public
(jadis, on aurait dit : le peuple) n'a plus aucune connaissance de sa propre langue! Le
français, comme plusieurs autres langues européennes, sera d'ici quelques décennies
une langue morte, mille fois plus morte que le latin. (Et, ceci soit dit entre
parenthèses, si le latin fut la première langue d'Europe, s'il donna à l'Europe son
unification linguistique, la dernière langue d'Europe qui mourra sera l'italien. En
Italie, en effet, maintes raisons veulent que les enfants emploient encore le subjonctif
imparfait, et sachent - certes, plus ou moins! - lire et écrire. On ne peut en dire autant,
je le déplore, de la France).
Ce qui est scandaleux, à mon avis (j'ai reçu une éducation intellectuelle et
littéraire semblable à celle qui avait cours il y a environ deux cents ans), est que des
journalistes, des écrivains (et, pourquoi pas, des académiciennes et des
académiciens!) soient incapables d'employer la langue française.
Voilà quelque chose sur quoi l'Académie française ne peut me donner tort, j'en
ai la certitude. Songeons-y. Est-ce que vous appelleriez un plombier, si vous aviez
une fuite d'eau chez vous, tout en sachant que ce plombier n'a pas suivi une formation
de plombier? Est-ce que vous vous feriez opérer par un médecin privé de titres, ou
qui aurait d'ores et déjà tué une centaine de ses patients?
Pourquoi et comment, dès lors, beaucoup de gens écoutent-ils des émissions de
télévision, ou lisent-ils des livres ou des journaux emplis de fautes d'orthographe ou
de syntaxe? Ils ne confieraient pas les tuyaux de leurs cuisines à des plombiers
maladroits ou incompétents. Ils ne feraient pas construire une maison par un maçon
qui confondrait un tournevis avec un marteau. En revanche, ils accordent leur
confiance à des journalistes, à des écrivains, à des "Prix Goncourt", j'en passe et j'en
oublie, qui sont - je les en suspecte, je les en accuse, je les défie de démontrer que je
me trompe - incapables de distinguer un subjonctif d'un indicatif.
Je doute d'une façon absolue que ces gens aient une connaissance profonde,
mais je doute surtout qu'ils aient une connaissance superficielle de maintes
orthographes de passés simples, de subjonctifs présents, de subjonctifs imparfaits.
Voilà un monde – le monde moderne – où les intellos sont non pas l'unique,
mais la première et principale catégorie de gens qui ne possèdent pas les bases les
plus élémentaires pour exercer décemment leur métier ou leur profession...
Ils prétendent penser et donner à penser, mais ne savent pas écrire.
Un pauvre type de ma connaissance, qui se dit journaliste et écrivain (il se dit
aussi, je crois bien, "esthète" ou philosophe!) m'écrit (rarement, par bonheur) des
courriels qui témoignent avant tout d'un fait indéniable: c'est qu'il est incapable
d'établir la moindre différence entre un futur et un conditionnel.
- "Je te le dirais", m'écrit-il....
En vérité, ce qu'il veut exprimer, c'est qu'il me le dira.
Mais, textuellement, il m'écrit qu'il me le dirait.
Je retrouve une telle orthographe prodigieuse chez des dizaines (oui, des
dizaines) de personnes que je connais ou que je croise. Essayez de demander, si ça
vous amuse, à vos interlocuteurs, s'ils viennent d'employer un futur ou un
conditionnel. Vous serez stupéfaits. A condition cependant - naturellement - d'avoir
une vague idée, quant à vous, sur la question.
Je dis que le "peuple français", dans sa majorité, perd - aussi bien dans le
langage oral qu'écrit - la distinction entre le futur et le conditionnel. Et ce n'est là que
l'un des aspects du drame. Si vous employez un subjonctif imparfait, ou un futur
antérieur de l'indicatif, votre interlocuteur risque d'éclater de rire, ou d'ouvrir des
yeux vides et ronds, ou de croire que vous vous payez sa tronche.
Académiciennes! Académiciens!
Voilà la raison de la proposition de dictée d'Olivier Mathieu alias Robert
Pioche, comme vous avez pu l'apprendre dans le "Figaro Magazine" : "Le farfelu
Robert Pioche sera-t-il élu, lui qui a proposé à l'Académie une épreuve de dictée,
chaque académicien battu s'engageant à voter pour lui?"...

Académiciennes! Académiciens!
Certains d'entre vous - académiciennes, académiciens ! - sont en quelque sorte
issus de l'immigration, ce sont des "Français de la deuxième (ou de la troisième)
génération". Moi aussi. Et si, donc, certains d'entre vous ne sont pas nés en France,
ou n'ont pas eu le français pour langue maternelle, je ne doute néanmoins pas une
seconde de votre désir immense de vous soumettre, vous et moi - moi qui suis né
immigré en France, moi qui suis un Français de la seconde génération, moi qui suis
né avec une carte d'identité belge - à une telle dictée.
Comme vous le savez, on révise les voitures. On révise les avions. On révise
les extincteurs. Vous ne voudriez pas habiter dans un immeuble dont les extincteurs
ne fonctionnent pas. Dans certains pays d'Europe, on refait passer le permis de
conduire aux personnes de plus de quatre-vingts ans. Etant académiciens, vous avez
forcément l'amour de la langue française. L'amour et la défense de la langue française
sont votre raison d'exister. Révisons les académiciens! En effet, pourquoi pas?
Et voilà, je vous le redis, pourquoi – académiciennes et académiciens! – vous
allez accepter, j'en suis certain, cette dictée que l'on appellera, et qui restera à la
micro-histoire littéraire comme "la dictée de Robert Pioche".
Certains risquent de penser que je me sois adressé à vous - Académiciennes!
Académiciens! - en ces termes :
– "Nous pourrions nous livrer à un troc. Je vous enseigne le français, et vous
me rétribuez mes leçons par une voix, lors des élections académiques. Si je
vous enseigne le français en général et l'ortographe en particulier, vous
m'élisez ".

Merci donc - académiciennes, académiciens! - de m'avoir élu à l'unanimité.


Maintenant, l'heure de l'examen est venue. Il n'est d'autre solution qu'une dictée
finale. Il convient de démontrer à la France, pays auquel vous enseignez
l'orthographe, que vous la connaissez. Et en cas d'erreurs orthographiques,
syntaxiques ou autres, académiciennes et académiciens, vous vous démettrez
humblement de votre fauteuil.
Le promettez-vous? Me le promettez-vous? En échange, je jure de présenter
ma démission de l'Académie française, si je fais plus d'erreurs que vous.
Pour prendre des exemples parfaitement élémentaires, voici quelques-unes des
questions que je pourrais vous poser. Préparez-vous. Voici une phrase simple.

Phrase A.
"Nous nous sommes repenti, parce qu'ils se sont parlés".

Cette phrase est-elle correctement orthographiée?


Ou faut-il écrire ce qui suit?

Phrase B.
"Nous nous sommes repentis, parce qu'ils se sont parlé".

Ou faut-il écrire ce qui suit?

Phrase C.
"Nous nous sommes repentis, parce qu'ils se sont parlés".

Académiciennes Académiciens! Voici une autre phrase.

Phrase A.
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédé sur la route, et que nous avons vus
passer".

Phrase B.
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédés sur la route, et que nous avons vu
passer".

Phrase C.
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédés sur la route, et que nous avons vus
passer".

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?


Phrase A.
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédé sur la route, que nous avons vus
passer sur l'avenue, sous les arbres que nous avons vu abattre".

Phrase B.
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédé sur la route, que nous avons vu
passer sur l'avenue, sous les arbres que nous avons vu abattre".

Phrase C.
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédés sur la route, que nous avons vus
passer sur l'avenue, sous les arbres que nous avons vus abattre".

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
"Que de fautes ce pécheur a commises! Hier encore, il a vu des roses et il en a
achetées, pour les offrir à Madame Dupont qui, pourtant, est mariée. Le peu de
volonté qu'il a montrée, de la sorte, nous a découragés. Visiblement, le peu de leçons
que le professeur lui a données ne lui ont pas été utiles!"

Phrase B.
"Que de fautes ce pécheur a commis ! Hier encore, il a vu des roses et il en a acheté,
pour les offrir à Madame Dupont qui, pourtant, est mariée. Le peu de volonté qu'il a
montrée, de la sorte, nous a découragés. Visiblement, le peu de leçons que le
professeur lui a donné ne lui ont pas été utiles!"

Phrase C
"Que de fautes ce pécheur a commises! Hier encore, il a vu des roses et il en a acheté,
pour les offrir à Madame Dupont qui, pourtant, est mariée. Le peu de volonté qu'il a
montré, de la sorte, nous a découragés. Visiblement, le peu de leçons que le
professeur lui a données ne lui ont pas été utiles!"

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Quelque difficiles que soient vos devoirs, je compte sur vous.

Phrase B.
Quels que difficiles que soient vos devoirs, je compte sur vous.

Phrase C.
Quelques difficiles que soient vos devoirs, je compte sur vous.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?


Phrase A.
Quelles que douleurs qui vous affligent, ayez confiance en votre médecin.

Phrase B.
Quelques douleurs qui vous affligent, ayez confiance en votre médecin.

Phrase C.
Quelle que douleur qui vous affligent, ayez confiance en votre médecin.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Quelles que soient les conséquences, il faut agir.

Phrase B.
Quelques soient les conséquences, il faut agir.

Phrase C.
Quelque soient les conséquences, il faut agir.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
L'esclave romp ses entraves.

Phrase B.
L'esclave rompd ses entraves.

Phrase C.
L'esclave rompt ses entraves.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Si je vaincs, il vainc aussi!

Phrase B.
Si je vainc, il vainc aussi.

Phrase C.
Si je vainc, il vainct aussi.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?


Phrase A.
Vous disez et vous redisez des choses que vous contredites tout de suite.

Phrase B.
Vous dites et vous redisez des choses que vous contredites tout de suite.

Phrase C.
Vous dites et vous redites des choses que vous contredisez tout de suite.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Je couds une robe et, de la sorte, je résouds mon problème

Phrase B.
Je cous une robe et, de la sorte, je résous mon problème.

Phrase C.
Je couds une robe et, de la sorte, je résous mon problème.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Les enfants se sont lavés, nous nous sommes parlés et Simone s'est blessée le bras.

Phrase B.
Les enfants se sont lavés, nous nous sommes parlé et Simone s'est blessé le bras.

Phrase C.
Les enfants se sont lavé, nous nous sommes parlé et Simone s'est blessée le bras.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Quand les maisons se sont écroulées, Simone s'est écriée de frayeur, et quant à nous,
nous nous sommes religieusement tus.

Phrase B.
Quand les maisons se sont écroulé, Simone s'est écrié de frayeur, et quant à nous,
nous nous sommes religieusement tu.

Phrase C.
Quand les maisons se sont écroulées, Simone s'est écriée de frayeur, et quant à nous,
nous nous sommes religieusement tu.
Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Exceptée la table que j'ai faite faire, vous pouvez tout emporter.

Phrase B.
Excepté la table que j'ai faite faire, vous pouvez tout emporter.

Phrase C.
Excepté la table que j'ai fait faire, vous pouvez tout emporter.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Ce peintre a peint de petits amours dans tous ses tableaux. Certes, il a vécu de folles
amours jusqu'à sa vieillesse. Cependant, il disait que le plus beau de tous les amours
est l'amour maternel.

Phrase B.
Ce peintre a peint de petites amours dans tous ses tableaux. Certes, il a vécu de folles
amours jusqu'à sa vieillesse. Cependant, il disait que la plus belle de toutes les
amours est l'amour maternel.

Phrase C
Ce peintre a peint de petites amours dans tous ses tableaux. Certes, il a vécu de fols
amours jusqu'à sa vieillesse. Cependant, il disait que le plus beau de tous les amours
est l'amour maternel.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
On a frappé à la porte. Simone s'écrie : "Quels sont ces gens?"... On fait
connaissance. Une heure plus tard, Simone est convaincue. "Quels braves gens", dit-
elle, "quelles braves et bonnes gens! Quels bons et braves gens!"

Phrase B.
On a frappé à la porte. Simone s'écrie : "Quelles sont ces gens?"... On fait
connaissance. Une heure plus tard, Simone est convaincue. "Quelles braves gens",
dit-elle, "quelles braves et bonnes gens! Quelles bons et braves gens!"

Phrase C.
On a frappé à la porte. Simone s'écrie : "Quels sont ces gens?"... On fait
connaissance. Une heure plus tard, Simone est convaincue. "Quels braves gens", dit-
elle, "quels braves et bonnes gens! Quels bons et braves gens!"
Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Simone s'est imposé des sacrifices, particulièrement le jour où elle s'est absenté et
s'est blessé un pied. Mais elle ne s'était nullement trompé, et ni elle ni sa soeur ne se
sont repentis de leur choix.

Phrase B.
Simone s'est imposée des sacrifices, particulièrement le jour où elle s'est absentée et
s'est blessée un pied. Mais elle ne s'était nullement trompée, et ni elle ni sa soeur ne
se sont repenties de leur choix.

Phrase C.
Simone s'est imposé des sacrifices, particulièrement le jour où elle s'est absentée et
s'est blessé un pied. Mais elle ne s'était nullement trompée, et ni elle ni sa soeur ne se
sont repenties de leur choix.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Ne penses-tu pas que Robert Pioche a raison de déposer sa candidature? Non, je ne
crois pas qu'il ait raison.

Phrase B.
Ne penses-tu pas que Robert Pioche ait raison de déposer sa candidature? Non, je ne
crois pas qu'il ait raison.

Phrase C.
Ne penses-tu pas que Robert Pioche a raison de déposer sa candidature? Non, je ne
crois pas qu'il a raison.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Il ne fait pas de voyages. Plus exactement, il ne fait pas des voyages trop longs.

Phrase B
Il ne fait pas de voyages. Plus exactement, il ne fait pas de voyages trop longs.

Phrase C.
Il ne fait pas des voyages. Plus exactement, il ne fait pas des voyages trop longs.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
J'espèrerai.

Phrase B.
J'espêrerai.

Phrase C.
J'espérerai.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
J'emploirai.

Phrase B.
J'emploierai.

Phrase C.
J'employerai.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Je voudrais que vous appuyez.

Phrase B.
Je voudrais que vous appuiez.

Phrase C.
Je voudrais que vous appuyiez.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Papa voudrait que nous étudions.

Phrase B.
Papa voudrait que nous étudyons.

Phrase C
Papa voudrait que nous étudiions.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Le brouillard s'est résolu en pluie.
Phrase B.
Le brouillard s'est résolvé en pluie.

Phrase C.
Le brouillard s'est résous en pluie.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Vous médites de lui, parce que vous le maudisez.

Phrase B.
Vous médisez de lui, parce que vous le maudites.

Phrase C.
Vous médisez de lui, parce que vous le maudissez.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Nous conclurons notre discours, celui que vous vouliez que nous concluions.

Phrase B.
Nous concluerons notre discours, celui que vous vouliez que nous concluions.

Phrase C.
Nos concluerons notre discours, celui que vous vouliez que nous concluyons.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Y avait-il du pain? Non, il n'y en n'avait pas.

Phrase B.
Y avait-il du pain? Non, il y en n'avait pas.

Phrase C.
Y avait-il du pain? Non, il n'y en avait pas.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Y eut-il des accidents ce jour-là sur l'autoroute? Oui, il y en n'a eu.
Phrase B.
Y eut-il des accidents ce jour-là sur l'autoroute? Oui, il y en n'a eut.

Phrase C.
Y eut-il des accidents ce jour-là sur l'autoroute? Oui, il y en a eu.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Ces clairs-obscur sont des chefs-d'oeuvre.

Phrase B.
Ces clair-obscurs sont des chef-d'oeuvres.

Phrase C.
Ces clairs-obscurs sont des chefs-d'oeuvre.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Les femmes de la ville toute entière étaient toutes peureuses.

Phrase B.
Les femmes de la ville tout entière étaient toutes peureuses.

Phrase C.
Les femmes de la ville toute entière étaient tout peureuses.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
On voyait des robes bleues, des robes gris foncé; et des cheveux blonds, et des
cheveux châtain clair.

Phrase B.
On voyait des robes bleues, des robes grises foncées; et des cheveux blonds, et des
cheveux châtains clairs.

Phrase C.
On voyait des robes bleu, des robes gris foncé; et des cheveux blond, et des cheveux
châtain clair.

Une seule phrase est entièrement correcte. Laquelle? A, B ou C?

Phrase A.
Je n'oublierai jamais les conseils que m'ont donnés mes parents et, surtout, la vie de
sacrifices à laquelle s'est vouée ma mère.

Phrase B.
Je n'oublierai jamais les conseils que m'ont donné mes parents et, surtout, la vie de
sacrifices à laquelle s'est voué ma mère.

Phrase C.
Je n'oublierai jamais les conseils que m'ont donnés mes parents et, surtout, la vie de
sacrifices à laquelle s'est voué ma mère.

Académiciens! Académiciennes!
Comme vous le voyez, nous sommes réellement, ici, au niveau du certificat
d'études primaires d'il y a cent ans.
Je serais curieux, infiniment curieux de savoir combien de personnes, prises au
hasard dans la rue, ou parmi les lecteurs du présent texte, trouveront mes exemples
(j'insiste, élémentaires) difficiles voire épineux, ou auront une hésitation.

Inventons une phrase de quelques mots: "Insensé que je suis! C'est un homme
que j'estime. Je crois qu'il a raison, mais je suis ce que je suis. Oui, je ne parle que de
moi, mais je me suis montré tel que je suis!"
Je serais curieux de savoir, dans la phrase qui précède, combien de personnes,
membres de l'Académie ou pas, sont encore capables de dire en une minute la nature
et la fonction grammaticale des divers "que". Pour vous aider: que pronom relatif,
que conjonction, que "restrictif"...

Je serais curieux de voir l'expression qui se peindrait sur les visages de mes
contemporains, y compris des universitaires chargés de doctorats, face à des
questions de ce genre :
- Les verbes intransitifs ont-ils des formes verbales passives?
Ou :
- "Envoyer" est-il un verbe régulier? A quel "groupe verbal" appartient-il?
Ou :
- A quel groupe appartiennent les verbes "avoir" et "s'en aller"? Au premier
groupe des verbes en -er, au deuxième des verbes en - ir, ou au "troisième groupe",
celui de la conjugaison irrégulière ou morte?
Ou :
- Combien de modes verbaux y a-t-il en français?
Vous aurez de la chance si quelqu'un vous répond : six.
- Et pouvez-vous les indiquer?
Vous aurez de la chance, beaucoup de chance, si quelqu'un vous répond:
indicatif, conditionnel, impératif, subjonctif, infinitif, participe. Vous aurez de la
chance si quelqu'un vous indique, parmi ces modes, lesquels sont personnels ou
impersonnels. Ce que je savais à quatre ans.
Ou :
- Pouvez-vous me dire ce qu'est un verbe transitif et un verbe intransitif?
Pouvez-vous me citer un verbe transitif direct? Un verbe transitif indirect? Des
exemples de verbes à la fois transitifs et intransitifs?
Guère d'espoir, enfin, si vous demandez si tel ou tel temps fait partie des temps
simples, composés, primitifs ou dérivés.
Je serais curieux de demander à l'improviste - tiens, par exemple au dernier
Prix Goncourt, Monsieur Houellebecq, en m'adressant à lui avec défèrence ça va sans
dire - ce qu'est un substantif déverbal.
Vous me direz que de telles questions sont inutiles.Je suis d'accord avec vous.
Je vous dirai que pour les intellos modernes, c'est inutile: la plupart des temps
verbaux, pour eux, sont totalement morts et très probablement absents de l'ensemble
de leurs ouvrages, livres, enfin feuilles de papier imprimé réunies ensemble. Au
demeurant, livres indigestes, ennuyeux, vides, quand d'autres sont, pire, pédants,
jargonneux, ou carrément illisibles. Tendance que l'on retrouve dans toute la poésie
contemporaine et aussi dans tant d'ouvrages dits scientifiques : généralement dans les
sciences "légères", autrement exprimé : les sciences humaines.
Je serais curieux, question de secours, de demander à nos élites de conjuguer
le passé antérieur de l'indicatif, ou le conditionnel passé, ou le subjonctif plus-que-
parfait de tel ou tel verbe. Par exemple :
- Peux-tu me conjuguer le subjonctif imparfait de "mouvoir"? De "coudre"? De
"suffire"?
Ou (la chose n'a strictement aucune difficulté, mais la formulation "subjonctif
plus-que-parfait" va effrayer votre interlocuteur):
- Peux-tu me conjuguer le subjonctif plus-que-parfait de "convoquer"?
Ou :
- Peux-tu me conjuguer le passé antérieur de l'indicatif du verbe "assujettir"?
Essayez encore plus simple (vous aurez des surprises) :
- Peux-tu me conjuguer par écrit le conditionnel présent du verbe "appuyer"?
Ce sont là des choses élémentaires, dont la simplicité fait rougir. Des choses
que savaient, il y a cent ans, les fils des paysans et des ouvriers de France. Or, je mets
ma main au feu que de banales questions de ce genre mettraient en difficulté
énormément des grands écrivains français du XXIe siècle.
Demandez à vos enfants, à vos parents, à vos copains, à vos proches :
- Peux-tu me conjuguer le passé antérieur de l'indicatif, le subjontif plus-que-parfait
du verbe être? Quel est l'infinitif passé, le conditionnel passé, le gérondif du verbe
finir?
Si votre interlocuteur s'embrouille dans "être" et dans "finir", vous n'aurez
d'autre possibilité que d'admettre qu'il ignore le français. Et que, s'il emploie ces
formes, il les emploie sans savoir ce qu'elles représentent grammaticalement. Il ne
maîtrise pas, pour exprimer une (éventuelle) pensée, toute la palette que lui offre sa
propre langue. Un peu comme un chanteur d'opéra qui ne saurait pas lire une partition
(aujourd'hui, c'est très courant: voyez Pavarotti). Un peuple qui ne sait plus parler ne
sait plus penser.
Je suis certain que la grande majorité de vos interlocuteurs vous démontreront
que les Français aujourd'hui n'ont plus une connaissance formelle élémentaire (j'ai
dit: formelle et élémentaire) des verbes être, avoir, parler ou finir. Et si vous ne
trouvez pas ça grave...
"Les choses sont très simples", aurait dit feue ma maman, et je le redis avec
elle. Si quelqu'un a hésité, plus haut, si quiconque a hésité à répondre en une et une
seule seconde, après lecture, "la phrase correcte est celle-ci", alors ce quelqu'un ne
sait pas le français, et est un illettré.
"Illettré", je reprends de la définition du Littré le sens premier : "Qui n'est pas
lettré, qui n'a point de connaissances en littérature. C'est un homme illettré. Il est tout
à fait illettré". Et du Robert le troisième sens : "qui est partiellement incapable de lire
et d'écrire." En revanche un "analphabète" est "qui ne sait ni lire ni écrire", sans
jugement de valeur ici, parce que pour diverses raisons l'analphabète n'a jamais
fréquenté les bancs de l'école, jamais appris à lire et à écrire, ce qui existe encore de
nos jours en France. Mais la définition de l'illettré que je préfère ("vieillie", disent les
dictionnaires) est celle du Trévoux : "qui n'a aucune connaissance des Belles
Lettres".
Heureusement, j'en conviens démocratiquement, personne n'est obligé de
savoir le français. Je ne demande pas cela, non, à mon plombier. Je lui demande de
s'y entendre en plomberie. Mais, vu que je refuserais de me faire opérer par un
médecin qui ne saurait pas trop si le coeur se trouve à la place de l'estomac, ou le foie
à celle du cerveau, je serais tenté d'émettre des doutes quant aux qualités de l'écrivain,
du journaliste, de l'universitaire, de l'intello qui se serait trompé dans mes petits
exercices ludiques et, au fond, sans nulle difficulté réelle. Parce que si quelqu'un ne
sait pas écrire, il ne sait pas ce qu'il dit. Il ne sait pas penser. Et s'il ne sait pas penser,
il est curieux de voir tant de livres de tels "maîtres à penser" dans les vitrines des
"bonnes librairies", tant de livres auxquels ses copains "critiques littéraires"
consacrent des recensions apologétiques copiées sur la "quatrième de couverture".
Curieux monde, vraiment, que le monde éditorial, où sept livres sur dix ne sont pas
écrits par ceux qui les signent. Où une majorité de livres sont signés par des illettrés,
encensés par d'autres illettrés, avant de finir entre les mains de malheureux et
innocents écoliers, ou du public des acheteurs-consommateurs...
Et c'est pourquoi, chères académiciennes, chers académiciens, dans l'hypothèse
où vous ne sortiriez pas triomphalement de mes minuscules questions (et des
élémentaires dictées, peaufinées à votre intention, que je tiens amoureusement à votre
disposition), vous auriez l'humilité de vous démettre de votre fauteuil, ou de supplier
pour qu'une procédure d'expulsion soit entreprise contre vous. Afin de choisir des
professions manuelles dans lesquelles, j'ose l'espérer, vous excellerez.
Quant à moi je jure, si je connais moins bien le français que mes collègues de
l'Académie, de me faire animateur de télé.
Ma dictée, ce n'est pas qu'aux académiciens qu'il faudrait la proposer, voire
l'imposer. Mais à tout intellectuel proclamé.
J'ai tant de souvenirs de mes années de journalisme... Tiens, vers 1983, une
directrice de publication me fit lire un article d'elle. J'y lus les mots : "Maître queue".
Je lui fis remarquer que, à moins d'un lapsus freudien, elle avait confondu
"queue" et "queux". Je pensais alors l'entendre me dire qu'il s'agissait d'une "faute
d'inattention".
- "La faute d'inattention", disait ma maman, "est le prétexte et l'excuse des
imbéciles. Il n'existe pas de fautes d'inattention".
Non, ma directrice de publication ne chercha pas l'excuse de "l'inattention".
Elle protesta:
– Mais enfin, Olivier!
Elle prétendait avoir raison... C'est très amusant, le nombre de gens qui
commettent une faute et qui, quand je la leur fais remarquer, protestent. Tel célèbre
crétin a dit, m'assurent-ils, la même chose à la télé ou à la radio... Je n'en doute
nullement! Or, ce n'est pas - par exemple - parce que Monsieur Dechavanne, le 6
février 1990, parlait de "Sallustre" que Salluste, même illustre, doit désormais
s'appeler Sallustre...
Pour en revenir à Maître queue, voilà comment j'enseignai à cette dame
(soucieuse de défendre "l'identité" non seulement de la France mais - modestement -
de l'Europe entière) à ne pas confondre une queue et un cuisinier. A démonstration du
fait que lorsque l'on s'est trompé ou que l'on a hésité une fois, on risque de récidiver.
Les choses bien ou mal apprises dans la petite enfance restent ancrées.
J'ai épouillé de leurs fautes d'orthographe et de syntaxe des dizaines de livres
(que j'ai rédigés et que d'autres ont signés), et des centaines voire des milliers
d'articles que mes petits collègues, dans tant de rédactions, me soumettaient avant de
se présenter en tremblant devant le rédacteur en chef...
Tout au long des vingt dernières années, je n'ai cessé de me délecter des
articles, des livres, des courriels où l'homme moderne, avec une infinie fierté, tire
visiblement son orgueil de me faire savoir ce qu'il est : un illettré.
Les fachos sont particulièrement des génies (sic). Ils "défendent la France" et
ne savent pas le français. Ils "défendent" l'Europe... dont ils ne parlent pas une seule
langue. C'est cocasse. Un crétin, depuis vingt ans, affirme ainsi qu'il "apprécie Arno
Brecker". En vérité, ce crétin - qui n'a aucune connaissance artistique, littéraire ou
autre - n'apprécie nullement Arno Breker. Mais voilà, "apprécier Arno Breker" (quitte
à ne l'avoir jamais rencontré, et à ne rien savoir de l'artiste) fait "très chic" dans
certains micro-milieux. Ce qui est encore plus amusant est que depuis vingt ans, mon
crétin orthographie le nom de Breker : "Brecker". Il le confond sans doute avec le
joueur de tennis Boris Becker?
Etonnant, le nombre de gens qui m'écrivent des choses comme : "C'est toi qui
le fera", et qui sont très étonnés d'apprendre (mais, le front plissé par l'esprit critique,
commencent par le mettre en doute) qu'il faut : "C'est toi qui le feras".
Etonnant, le nombre de gens qui m'écrivent des choses comme : "soit-disant",
et qui sont très étonnés d'apprendre qu'il faut : "soi-disant".
Etonnant, le nombre de gens qui m'écrivent des choses comme : "après que tu
sois venu", et qui sont très étonnés d'apprendre qu'il faut : "après que tu seras venu".
Etonnant, cet écrivain de mes amis, directeur de revue, éditorialiste,
philosophe, chef d'une "école" philosophique (diantre!), qui m'a écrit il y a quelques
années : "que nous soyions", et qui a été très étonné d'apprendre qu'il faut :
"soyons"... Chef de je ne sais quelle nouvelle école, mais incapable - lui comme les
autres - d'orthographier le verbe être...!
Etonnant, voire absolument stupéfiant, le nombre de gens (et qui, plus est, de
braves gogos qui se proclament "anti-américains"!) qui, sur l'enveloppe de leurs
lettres, rédigent: "Mr Olivier Mathieu", alors que je ne suis ni anglais, ni américain,
eux non plus, et que nous nous trouvons en France. Et que, en français, "Monsieur"
s'abrège en : "M." et pas en "Mr" (Mister). "Mr", c'est l'abréviation... anglo-
américaine. Les crétins "anti-américains", qui sont américanisés jusqu'au trognon,
devraient l'apprendre.
Etonnant, absolument étonnant, le nombre de gens qui ignorent que le "X" de
Bruxelles se prononce comme deux S (-ss), ainsi que celui d'Auxerre. Ils prononcent
BruCSelles. Mais, si l'on prononçait BruCSelles, il faudrait prononcer 60:
"soiCSante"...
Etonnant, absolument étonnant, absolument consternant, le nombre de gens qui
m'écrivent : "la gente féminine", à la place de: "la gent féminine"!

De l'incapacité de mes contemporains à orthographier


correctement un impératif (deuxième personne du singulier).

Etonnant, absolument étonnant, le nombre de gens strictement incapables de


savoir quand un impératif prend, ou ne prend pas, à la deuxième personne du
singulier, un S final. Etonnant, le nombre de gens qui m'écrivent des choses comme :
"N'en parles pas", et qui sont très étonnés d'apprendre qu'en français on écrit "n'en
parle pas", ou "parle à ton père", mais "parles-en".
Ce n'est pourtant pas difficile : d'une part, les verbes avec désinence en "-er";
d'autre part, "assaillir", "défaillir", "tressaillir", "cueillir", "offrir", souffrir",
"ouvrir" et "couvrir", qui ont l'infinitif présent en "-ir" et le participe présent en "-
ant" et font partie de la conjugaison irrégulière, dite "troisième groupe"; enfin,
"vouloir" et "savoir" ne prennent pas de "s" à l'impératif (sauf, pour des raisons
euphoniques, devant "en" et "y", à la condition qu'à leur tour ces pronoms ou
adverbes ne soient pas immédiatement suivis par un infinitif), mais un "e" (sauf
"aller", qui fait "va").
On écrit donc (deuxième personne du singulier de l'impératif) : "va", "vas-y",
"va y comprendre quelque chose".
Tous les autres verbes de tous les autres groupes prennent un "-s". C'est
élémentaire. Non? (Non, pour mes contemporains, l'impératif n'est pas élémentaire.
Sépatété kwa).

De l'incapacité de mes contemporains à orthographier


correctement un présent de l'indicatif (troisième personne du
singulier)!!!

Etonnant, absolument étonnant, le nombre de gens qui ne comprennent pas que


l'on écrive "il tient" (avec un "t" final), "il coud" (avec un "d" final), "il résout" (avec
un "-t" final), il "vainc" (avec un "c" final). Pourtant, où est la difficulté?
Les verbes français ont la troisième personne du singulier, au présent de
l'indicatif, en "e" (verbes en "-er"; verbes irréguliers en "-ir", formant le participe
présent en "-ant": "cueillir", "offrir", "souffrir", "ouvrir","couvrir"...) ou en "t"
(verbes irréguliers en "-oir" et "-re"; autres verbes irréguliers formant le participe
présent en "-ant", s'achevant en "-ir"; verbes en "-oindre", "-aindre", "-eindre";
"résoudre", "absoudre", "dissoudre").
Les seuls et uniques verbes français qui ne prennent donc pas soit "-e", soit "-
t", sont l'auxiliaire "avoir" et l'irrégulier "(s'en) aller" (qui prennent "-a"), et les
verbes en "-dre" (prendre et ses composés; perdre, rendre, coudre, moudre...),
lesquels s'achèvent en "d". Tandis que "vaincre" (et son dérivé "convaincre")
s'achève - à la troisième personne du singulier, au présent de l'indicatif - par un "c".

En un paragraphe, tout est dit.


Ou en un tableau.
Verbes s'achevant en - er (sauf "aller") troisième personne du singulier en- e
Verbes réguliers s'achevant en - "ir" troisième personne du singulier en- t
Verbes irréguliers s'achevant en "-ir", formant le troisième personne du singulier en- t
participe passé en - "ant"
cueillir, offrir, souffrir, ouvrir, couvrir... troisième personne du singulier en- e
verbes s'achevant en "-dre" (prendre, perdre, troisième personne du singulier en- d
coudre, rendre, moudre)
"résoudre", "absoudre", "dissoudre" troisième personne du singulier en- t
verbes irréguliers en "-oir" et "-re" (p. ex. troisième personne du singulier en- t
"rompre")
avoir, aller, s'en aller troisième personne du singulier en- a
"vaincre", "convaincre" troisième personne du singulier en - c

Est-il donc possible de ne pas réusir à enseigner cela aux élèves de "l'école
gratuite et obligatoire", dans les vingt ans de supplice qui vont de la maternelle
jusqu'au baccalauréat voire au doctorat?... C'est possible!!! L'Education Nationale
française a été capable (depuis au moins soixante ans) de ne l'enseigner à personne
puisque je reçois de mes correspondants, intellos et universitaires français, des
courriels qui manifestent leur ignorance de l'orthographe des impératifs et des
troisièmes personnes du singulier du présent de l'indicatif. Puisque je reçois d'eux,
chaque semaine, des courriels qui manifestent leur ignorance profonde et
irrémédiable de l'orthographe de tous les temps et de tous les modes de tous les
verbes de tous les groupes! Il n'y a pas de quoi s'inquiéter, vous dites?...
Je renonce, la plupart du temps, à expliquer quoi que ce soit. Je ne peux pas
suppléer - à moi seul, et en cinq minutes - aux vingt ans qu'ils ont sacrifiés en suivant
l'enseignement parfaitement inutile, parfaitement délétère, parfaitement abrutissant,
parfaitement analphabétique quant à la forme et parfaitement décervelant quant à la
substance, des écoles et des universités de France. Mongénéral avait compris les
Français, mais les Français, eux, n'ont pas compris leur Bled.
Récemment, j'ai signalé à un autre génie (sic) une grossière faute de français,
sur son site. Loin de me remercier, il me répondit que "cela n'avait aucune
importance". Et que, d'ailleurs, cette faute "n'interdisait pas de comprendre son texte".
(Il avait raison : ledit texte était d'une telle crétinerie que n'importe quelle andouille
devait en saisir l'insanité). J'ai entendu cela des milliers de fois, au cours de ma vie :
l'orthographe "n'a aucune importance". Ce qui compte, c'est de "se faire comprendre".
Probablement, mes contemporains se comprennent, donc, en jarvillant : Chpa
sépatété kwa!
Il est toujours amusant et suave d'observer ceux qui ont à la bouche la défense
de "l'identité nationale". Je n'arrive pas à comprendre ce qu'ils veulent ou ce qu'ils
pourraient "défendre", dès lors que le français qu'ils baragouinent, ou qu'ils
gribouillent, est un champ de bataille sur lequel gisent toutes les règles, qu'ils ont
massacrées, de l'orthographe et de la syntaxe.
Je n'arrive pas à comprendre, quand je lis trois pages des "grands écrivains"
actuels, publiés par les "grandes" maisons d'édition, et qui reçoivent pour ça des prix
"littéraires" (et le chèque qui va avec), où diantre ils puisent le talent nécessaire à
démontrer en trois pages leur absence de style et leur absence de pensée, leur
ignorance totale et absolue de l'orthographe, de la morphologie, de la syntaxe ou de
la ponctuation françaises. Les "grands romans contemporains" de ces immenses
maîtres du barbarisme et du solécisme sont des anthologies vivantes de l'illettrisme.
Les lettrés du monde moderne sont des illettrés!
Une langue meurt : la langue française. Qui parle encore français? Plus
personne... Certaines langues meurent, d'autres naissent ou renaissent. Le phénomène
historique récent le plus remarquable et digne d'éloges fut la reconstruction, après
1948, de la langue hébraïque dans l'Etat d'Israël. Je suis rarement un partisan de la
politique étrangère de cet Etat. Je ne suis pas d'accord avec maints épisodes dont ont
à souffrir les populations palestiniennes des "territoires occupés". Mais tel n'est pas
le sujet, ici. La cohérence me pousse à féliciter l'Etat juif au moins pour une chose :
ses dirigeants ont compris qu'un pays, qu'une culture ne peuvent survivre sans une
langue. Cet aspect de défense de la langue, je le vois en Israël; je ne l'ai jamais vu,
ou je ne le vois plus nulle part en France. Ni à l'Académie française, ni dans le jargon
des histrions snobinards et incultes de la télé, ni chez les enseignants provenant de
Mai 68. Ni chez les enfants de mes (rares) amis "franchouillards", lesquels causent
aussi mal voire encore plus mal que dans les "cités" de banlieue. Une chose que je
constate, en effet, est que les jeunes immigrés - ceux qui étudient, naturellement -
parlent souvent mieux le français que les fils à papa de maints petits bourgeois. C'est
un phénomène significatif. Si la langue française crève, ce n'est nullement à
l'immigration, c'est d'abord à l'abandon des études gréco-latines, au laxisme soixante-
huitard, à l'américanisation, à la télévision et à l'informatique (Internet, le partage de
l'ignorance!) qu'elle le doit.
Je répète. Elle le doit à l'instauration démagogique et contre-productive du
collège unique et pour tous, à l'abaissement de niveau programmé, au refus des
parents et des enseignants d'imposer un effort aux chères "têtes blondes" dans
l'apprentissage de la langue, et plus généralement à l'américanisation qui abaisse et
uniformise, à la télévision délétère et vulgaire, aux gadgets "modernistes" qui
banalisent la médiocrité. Il s'agit, il faut le dire franchement, de la démission de toute
une société qui n'a plus la fierté de sa langue et de ses langages, et plus généralement
de sa culture, dont les formes savantes et populaires sont moribondes. Ou pour le dire
autrement, dont les arts liés comme jamais à l'argent sont devenus grotesques et bas.
Les premiers surpris du lamentable niveau de notre École et de notre culture sont les
francophones et francophiles de l'Est de l'Europe.
Il serait quasi banal d'insister sur les responsabilités de la télévision (et de la
radio). Il y a encore cent ans, toute nouveauté langagière venait du peuple, montait du
peuple. Une faute de français, prononcée par un inculte ou par un ignorant au fond
d'une province, n'avait aucun écho. Elle ne se reproduisait pas à une vitesse
vertigineuse. Comme toute amélioration et toute régression, elle devait subir
l'examen, qui était réellement démocratique, du grand nombre. Aujourd'hui, les
choses ont changé. Des millions d'individus - notamment le matin, à l'heure qui était
jadis celle des pensées les plus belles - allument leur télé, ou leur radio, et subissent
un véritable bombardement cacophonique.Ce bombardement non seulement les prive
de leurs propres pensées, leur ôte toute capacité de choix, leur fait oublier les vertus
du silence propice à la réflexion, mais propage la même faute de français, en un seul
instant, "en temps réel" comme on cause, partout à la fois. L'usage, aujourd'hui, le
bon et le mauvais usage ne proviennent plus du peuple, ils ne montent plus du "bas".
L'usage se précipite du "haut", il descend des fausses élites. Hier, il fallait des années,
voire des décennies pour qu'un bouleversement de langage ait lieu, et qu'un usage se
forme. Aujourd'hui il suffit d'une seconde, d'une seule seconde pour qu'un mauvais
usage, pour que quelque chose qui n'est pas un usage s'introduise dans toutes les
consciences, et dans toutes les mémoires. La télévision et la radio imposent
dictatorialement de faux usages, de mauvais usages. Un seul présentateur de
télévision est en mesure de diffuser massivement une erreur de français, erreur qui
n'est nullement née d'un usage mais seulement et exclusivement de son ignorance à
lui. Et, les présentateurs se copiant les uns les autres et une émission étant
parfaitement identique à une autre, les hommes modernes - quelque télévision qu'ils
allument, quelque radio qu'ils écoutent - sont soumis 24 heures sur 24 à un feu nourri,
à un mitraillement incessant de paroles, d'expressions, de tournures grammaticales
impropres; d'américanismes qui ne sont que des calques abusifs d'expressions
anglaises et qui, à ce titre, sont contraires à la sémantique, à la morphologie, à la
syntaxe de notre défunte et aimée langue française; de subjonctifs fautifs;
d'abréviations laides et stériles; d'argots privés de bases étymologiques ou
historiques. Toutes choses qui sont le contraire de l'usage. Résultat, les différences
linguistiques provinciales disparaissent. Une seule phrase de mauvais français,
prononcée dans un studio à Paris par un illettré, diffuse ses métastases et son mauvais
exemple partout, de Lille à Perpignan, de Brest à Nice. "L'usage" a été exterminé,
nié, détruit. Ce que l'on appelle désormais "usage", c'est celui des journalistes qui,
consciemment ou non, volontairement ou non, influencent les jeunes gens et
analphabétisent le peuple. Or c'est à cet "usage"-là que se réfère, à la fin, l'Académie.
La faute de français, répandue par des journalistes que je dis criminels, parce qu'ils se
rendent coupables de crimes contre la langue française, est à la fin "légalisée",
autorisée et légitimée par l'Académie française. La faute de français est d'abord
bombardée par les télés, puis, "entrée dans l'usage", elle est académisée...
Je préférerais, à tout prendre, que la langue française soit remplacée - je
persiste et je signe: remplacée - par l'arabe, par exemple, plutôt qu'elle ne devienne
une caricature indécente et pathétique de ce qu'elle fut, ou un jargon phonétique
américain. Il n'est que logique, historiquement, de voir s'imposer et dominer les
langues des peuples dynamiques et en expansion. La langue française, elle, n'est plus
ni dynamique ni en expansion. Les Français, au moins au point de vue du langage,
ont abandonné le champ de bataille, ils ont livré les donjons aux assaillants. Ou alors,
ils s'enferment dans des "tours d'ivoire" qui ne les protègent nullement, tout au
contraie, de la contamination du langage parlé comme du langage écrit. Si la langue
française est remplacée, donc, par l'arabe, alors elle restera l'apanage d'un petit
nombre; elle ne sera plus forcément parlée, mais, en tant que langue écrite, elle
pourra éventuellement demeurer intacte. En revanche, si sa contamination actuelle
continue, sa mort finale est imminente.
L'Histoire enseigne qu'un Etat et un système politique ont besoin pour survivre,
entre autres, d'une langue. Mais aussi qu'une langue peut survivre, dans certains
milieux ou comme langue savante, sans Etat et sans système politique. C'est pourquoi
je trouverais parfaitement logique que l'on parle marocain en France, dans cent ans.
Mieux vaut bien parler marocain que mal causer français. Je ne crois pas, en
revanche, à une langue qui serait à moitié française et à moitié ceci ou cela, et encore
moins à moitié française et à moitié américaine car, dans de tels métissages
linguistiques, tout le monde y perd. Est grandement digne d'estime, selon moi,
l'immigré marocain, tunisien, algérien qui lutte - à juste titre - pour la sauvegarde de
sa propre langue. Je ne crois pas en revanche à une langue, le français actuel, qui
meurt et que ni les Français, ni leurs autorités politiques et académiques ne défendent
réellement. En vérité, dès aujourd'hui, la langue française n'existe plus.

Quelques citations d'un "ange blanc".


Comme disait un "ange blanc" - Jean Dutourd avait pour second prénom :
Gwenaël, prénom breton signifiant ange (aël) blanc (gwen) - dans le numéro 8 de la
Nouvelle Revue de Paris: « L’humanité ne vit plus sur des civilisations agraires et
littéraires, mais dans une civilisation scientifique et industrielle. Il est probable que
l’art et l’agriculture sont liés. (...) Il est probable aussi que la science et l’industrie,
dont le but est de donner à l’homme le confort physique, n’ont rien à faire avec la
littérature. (...) Depuis des années, on nous parle des « mutants », c’est-à-dire de gens
qui ne nous ressembleront plus, qui composeront une humanité supérieure, etc. Je
crains que la mutation ne se fasse pas dans ce sens-là. Le mutant, c’est l’imbécile
analphabète très fort sur l’informatique qui accomplira toute sorte d’exploits
inutiles avec ses joujoux et qui sera incapable de faire tout seul une
soustraction. Les mutants ne liront plus par conséquent, ils ne sauront rien… Ils
ne sauront même pas ce que c’est que l’amour. (...) J’ai toujours plus ou moins eu la
certitude qu’une idée devenait fausse à la minute où elle était adoptée par le plus
grand nombre. Car à ce moment-la, elle devient incolore, schématique, sans nuances.
Quand une idée est reçue, elle est fichue. (...) L’esprit de contradiction est l’une de
mes armes qui s’appuie sur un goût que j’ai pour les minorités, de préférences
souffrantes… La France est-elle une cause perdue ? Si elle l’est, l’esprit de
contradiction qui marque le réveil de l’honneur, commande de s’y dévouer… La
cause perdue est la grande tentation des âmes généreuses. Le culte du martyr est une
perversion de la démocratie"...

Une parenthèse sur le mot : "combatif".


Que fait l'Académie française? L'Académie française ne s'aperçoit-elle pas de
la situation? Que fait l'Académie française sinon édicter, de temps en temps, des
arrêtés et des décrets par lesquels elle consent d'écrire "événement" avec un accent
grave à la place du second accent aigu? Ou "combatif" avec deux "t"? Ou
"imbécillité" avec un seul "l"?
Il y a longtemps que ça dure. Qui se souvient du décret académique (par
exemple) du 26 février 1901, autorisant à dire aussi bien "j'ai de bons fruits" que "j'ai
des bons fruits", ou à employer dans tous les cas "c'est" à la place de "ce sont"?...
Avec "combattif" (que l'Académie permet ou conseille d'écrire avec deux "t",
donc), on a un véritable sommet de l'intelligence des modernes grammairiens de la
moderne Académie, à la fin du XXe siècle.
On n'enseigne plus, dans les écoles, à orthographier le verbe être. Mais
l'Académie ajoute un "t" à combatif.
Les arguments de l'Académie sont cocasses. N'écrit-on point "combattre", avec
deux "t"? "Combattant", avec deux "t"? Vous voyez bien qu'il faut écrire "combattif"!
"Combattif" ne va pas, non, et je vais vous dire pourquoi. Le mot "combatif"
est apparu, avec un seul "t", au XIXe siècle. Ainsi que "combativité". Ce n'est pas,
contrairement à ce que l'on prétend, une question d'usage. Ce qu'il faut souligner, c'est
que si vous écrivez "combattif", alors vous employez un adjectif qui s'achève en "-
attif". Seulement, il n'existe dans la langue française AUCUN adjectif qui s'achève en
"-attif". Voire il n'existe aucun mot se terminant en "-attif".
En d'autres termes, quand "combatif" est entré dans les dictionnaires au XIXe
siècle, les grammairiens ou académiciens de l'époque ont sans doute voulu éviter de
créer un mot qui s'achève en "attif".
La langue française, par ailleurs, n'aime pas les consonnes redoublées. En
français, à ma connaissance, on trouve peu de mots contenant "bb" (à l'exception
principale d'abbé, abbesse, abbaye...), très peu de mots contenant "dd" (à l'exception
principale d'addition, et dérivés), pas beaucoup de mots contenant "gg" (à l'exception
principale d'agglomérer, de suggestif et des dérivés de ces mots), et absolument
aucun mot contenant "qq" (le "q", en français et en corps de mot, est toujours suivi
d'un "u"), "vv", "hh", "jj", "kk", "xx", ou "zz" ("razzia", "razzier", "puzzle", "jazz" et
"pizza" ne sont pas des mots français). Le redoublement de maintes consonnes (par
exemple "pp") n'a aucune conséquence phonétique et, dans les exemples de paroles
étrangères contenant "zz", ce "z" est toujours prononcé, phonétiquement, comme un
"s doux".
Quant à "-tt", on trouve parfois en français cette consonne double. Mais, je le
répète, on ne trouve jamais le suffixe "-attif". Les grammairiens de jadis ont donc
préféré opter pour une terminaison en "atif".
Si aucun mot de la langue française ne s'achève en "-attif"; si le français a, à
la fin, à peu près la moitié de ses consonnes qui n'admettent pas de redoublement; et
si - en général - on pourrait énoncer une règle selon laquelle "quand une consonne
est géminée en italien, elle est simple en français, et réciproquement, y compris dans
des mots qui partagent une origine latine identique", il y a des raisons (qui ne sont
pas des raisons d'usage) à tout cela.
Ces raisons naissent entre autres, pour le dire brièvement, des règles de
l'étymologie (il est bon de toujours distinguer entre les mots qui sont issus du latin
par voie phonétique, et ceux qui sont des emprunts savants) et de la dérivation
étymologique et phonétique du latin. Au demeurant, "battre" a deux "t", certes, mais
le mot provient non seulement de "batto" mais aussi de "batuo" ("u" bref, accent sur
le "a").

Tableau qui démontre que le plus grand nombre des consonnes françaises ne sont jamais (7
consonnes : H, J, K, Q, V, W, Z) ou pratiquement jamais ou rarement (4 consonnes : B, D, G, M)
géminées; dans un grand nombre de cas, ces consonnes sont simples en français quand elles sont
géminées en italien, et réciproquement (D, V).

Ce tableau est dédié aux très puissants génies qui ont inventé "combattif" (avec deux T); bien que
le français n'aime pas redoubler les consonnes; et bien que n'existe aucun mot finissant en "attif"!

Italien Français
La consonne B est soit géminée, soit simple. La lettre B, en français, n'est pratiquement
jamais géminée. Quand l'italien a deux "b", le
français n'en a qu'un (italien "pubblico", français
"public"). Quand l'italien a un seul "b", le
français en a deux (italien "abate", français
"abbé")
La consonne C est soit géminée, soit simple. La consonne C est soit géminée, soit simple (au
demeurant, "cc" se prononce généralement "cs",
comme dans "accent")
La consonne D est soit géminée, soit simple. On trouve très rarement "DD" en français. Au
demeurant, généralement, quand un mot italien a
un seul "D", le français en a deux. Quand un mot
italien a deux "D", le mot français correspondant
n'en a qu'un ("addio" / "adieu").
La consonne F est soit géminée, soit simple. La consonne F est soit géminée, soit simple.
La consonne G est soit géminée, soit simple. La consonne G, en français, est très peu sovent
géminée.
La consonne H n'existe pratiquement pas en Aucun mot français ne contient les lettres "HH"
italien. qui se suivent.
La lettre J n'existe pratiquement pas en italien. Aucun mot français ne contient les lettres "JJ"
qui se suivent.
La consonne K n'existe pas en italien. Aucun mot français ne contient les lettres "KK"
qui se suivent.
La consonne L est soit géminée, soit simple. La consonne L est soit géminée, soit simple.
Mais le redoublement du L ne se prononce que
dans trois mots (mille, ville, tranquille)!
La consonne M est soit géminée, soit simple. La consonne M est soit simple, soit
(relativement rarement) géminée. Elle est
notament géminée dans les mots commençant
par "- com".
La consonne N est soit géminée, soit simple. La consonne N est soit géminée, soit simple.
La consonne P est soit géminée, soit simple. La consonne P est soit géminée, soit simple,
sans conséquences phonétiques particulières.
La consonne Q est soit géminée, soit simple. La consonne Q n'est jamais géminée. Elle est
toujours suivie d'un "U", sauf en fin de mot
(cinq, coq...).
La consonne R est soit géminée, soit simple. La consonne R est soit géminée, soit simple.
La consonne S est soit géminée, soit simple. La consonne S est soit géminée, soit simple.
La consonne T est soit géminée, soit simple. La consonne T est soit géminée, soit simple,
mais, selon moi, ou en certaines occasions, avec
des conséquences phonétiques. De plus, il
n'existe aucun mot s'achevant par "-attif".
Ou, miex encore, par "- ttif".
La consonne V est soit géminée, soit simple. La consonne V n'est strictement jamais
géminée. Quand l'italien a deux "V" (avventura),
le français en a un seul (aventure).
La consonne W, qui ne fait d'ailleurs pas partie, La consonne W n'est jamais géminée.
historiquement, de l'alphabet italien, entre
exclusivement dans des paroles anglaises ou
allemandes.
La consonne Z est soit géminée, soit simple. La consonne Z n'est jamais géminée. Sinon en
de rarissimes paroles étrangères.

Le français académico-moderne impose donc des mots comme "combattif" et


"combattivité"... Ici encore, je voudrais savoir des puissants génies de l'Académie
quel mot français finirait en "-attivité". "Combattif" et "combattivité" sont des mots
IMPOSSIBLES!
Mais nos braves Français, nos pauvres Français, nos excellents Français, que ce
soit la faute de l'Académie ou celle de la paresse des enseignants, des écoliers et des
"étudiants", vont cependant répétant : N'écrit-on point "combattre", avec deux "t"?
"Combattant", avec deux "t"? Vous voyez bien qu'il faut écrire "combattif"!
Et puisqu'on écrit "battu", il faudra aussi "courbattu" à la place de "courbatu",
"courbatture" à la place de "courbature"...?
Le français est une langue morte. D'autant plus qu'elle intègre des néologismes
académiques qui contredisent l'étymologie, la règle, l'usage. Ainsi le français – celui
que baragouinent les "Jeunes" d'aujourd'hui – est-il un baragouinage qui se réduit à
quelques borborygmes primitifs. Au détriment et de la belle et bonne langue littéraire,
et aussi des merveilleux argots populaires d'autrefois.
L'Académie française n'a-t-elle pas une part de responsabilité, quand elle
encourage à écrire et à prononcer le français, en quelque sorte, "comme chacun
veut"?
Que peut comprendre un écolier, si on le laisse "libre" d'écrire "combatif" ou
"combattif"? Si l'on écrit "combattif", devrait se demander cet écolier, pourquoi pas
"hâttif" pour "hâtif"?... "Nattif" pour "natif"? "Laxattif" pour "laxatif"? "Dattif" pour
"datif"? "Ablattif" pour "ablatif"? "Sédattif" pour "sédatif"?
Ne suffisait-il pas d'enseigner aux jeunes générations qu'on écrit "combattant"
avec deux T, mais "combatif" avec un seul?
Sous couvert de simplifier, on abâtardit et on complexifie.
Que peut comprendre un écolier, si on le laisse "libre" d'écrire "événement" ou
"évènement", et pourquoi pas alors "aivénment"?
Epargnez-moi, si vous voulez bien, les blablas sur "l'évolution de la langue"...
Certaines langues évoluent, d'autres régressent. Le français n'évolue pas. Le français
régresse. L'évolution de la langue est une nécessité, une richesse. A condition
toutefois que cette évolution, comme cela a toujours été, vienne du peuple et de
l'usage populaire, et pas des fausses élites. Et qu'elle suive des règles naturelles
(étymologiques et phonétiques) précises. Or, les règles de l'étymologie et de la
phonétique sont bouleversées, niées, exterminées et par l'intrusion du langage télévisé
des histrions illettrés, et par les "décrets" de l'Académie. On ne fait évoluer
positivement une langue ni par la vulgarité globalisante de la télé, ni par des décrets
académico-administratifs, démagogiques et présomptueux qui, en vérité, ne servent
qu'à donner la permission à tout un chacun de ne pas savoir sa langue. J'engage mon
lecteur à consulter, y compris sur le site officiel de l'Académie, ces fameux "décrets".
Dont je m'offre à prouver, démonstration à l''appui, cas par cas, l'insondable
imbécillité. J'ai dit :imbécillité.

Parenthèse sur "imbécillité".


Imbécillité avec deux "l", y compris si l'Académie désire écrire "imbécilité"...
Le mot "imbécillité" est apparu (avec deux L) au XIVe siècle, probablement
avant "imbécile" (avec un seul L).
"Imbécillité" doit avoir deux "l", étymologiquement, parce qu'il provient du
latin "imbecillitas".
"Imbécile" provient du latin "imbecillus", plus rarement "imbecillis", mais il
n'a qu'un seul "L": notamment pour éviter des doutes de prononciation (les mots en "-
ille", en français, ont généralement un -LL "mouillé", ou "liquide", comme dans
"famille, fille, papillon, habillement, grille, briller, anguille..."; les exceptions étant
"tranquille; mille; ville").
Or, l'Académie a décrété qu'il fallait écrire "imbécile" et "imbécilité". Ce qui
est d'une ineptie assez impressionnante.
On doit avoir "imbécillité" (avec deux L) et "imbécile" (avec un seul L). Il n'y
avait strictement rien à changer, ici.
Au lieu d'enlever un "l" à "imbécillité", et d'ajouter un "t" à "combatif",
l'Académie ferait mieux de se montrer plus combative dans la lutte contre
l'imbécillité.
Le poids historique de la proposition lancée par Olivier Mathieu, dit
Robert Pioche, de soumettre les académiciens à une dictée publique de
langue française.

Académiciens! Académiciennes!
J'éviterai de vous dire ce que je proposerais si j'étais au pouvoir, ou Ministre de
l'Education, ou Ministre de la Culture, ou seulement... académicien.
J'éviterai de vous dire que je supprimerais la télévision, vu que l'idée de
supprimer la télévision semblera une absurdité à la plupart des lecteurs de ces lignes.
Il n'y a pourtant rien d'absurde à proposer de supprimer quelque chose qui existe
depuis moins de cent petites années, dont l'absence n'a pas interdit des millénaires de
civilisation. Mais dont l'existence a provoqué des dommages irréparables, à travers la
diffusion d'une sous-culture globalisante. Sans parler d'éventuelles (ou pas si
éventuelles qe ça) expériences de messages subliminaux, ou des conséquences
physiologiques que peuvent avoir ou avoir eu les ondes sur les cerveaux humains.
J'éviterai de vous dire, tout pareillement, comment je réformerais - à tout le
moins - cette télévision. Et comment je réformerais le système éducatif (en
commençant notamment par rétablir les humanités gréco-latines).
Bref, j'éviterai de vous dire comment, en cent ans, en commençant à former
(chose oubliée depuis des dizaines d'années) les instituteurs et les professeurs, on
pourrait rendre à la langue française sa dignité, après une profonde purge de ses
américanismes et de l'illettrisme dont elle est aujourd'hui victime.
J'éviterai de vous dire les mesures politiques - au sens le plus large de ce mot -
qu'il conviendrait évidemment d'adopter et d'imposer. Mesures éducatives; élitisme et
méritocratie; qualité de l'enseignement; formation de moins d'intellectuels, mais
formation de meilleurs intellectuels; revalorisation du travail manuel et agricole.
En vérité, mes mesures ne sont nullement utopiques. Elles sont simplement
irréalisables. Il n'est pas possible, en effet, y compris au meilleur des médecins, de
soigner ou de guérir un malade qui ignore son état de maladie ou le confond avec
l'exellente santé.
Je dirai donc, à tous ceux que j'entends déjà hululer que "ce n'est pas possible",
qu'il a été possible à ma mère de m'élever sans m'imposer le supplice de
l'apprentissage de la langue, de la non langue anglaise; sans m'imposer le supplice de
l'apprentissage des mathématiques modernes; sans m'imposer le supplice, fût-il
hilarant, de divers baratins; sans que j'allume, toute mon enfance puis toute ma vie
durant, une télévision.
Je dirai qu'il a été possible à ma mère de m'enseigner à lire et à écrire, les deux
choses les plus difficiles qui soient; il a été possible à ma mère (laquelle, en outre,
n'était pas riche, mais pauvre) de m'élever à la maison et de faire en sorte que je ne
sois pas un illettré. Il a été possible à ma mère de faire, pour un enfant, ce qu'il n'a pas
été possible de faire, à des centaines de ministres de l'Education, pour des générations
entières. Or si cela a été possible à ma mère, cela aurait pu se produire non seulement
pour un enfant, moi; mais pour deux enfants, pour dix enfants, pour cent enfants,
pour mille enfants.
Cela n'a visiblement pas été possible. Il est donc inutile à qui que ce soit de se
plaindre, désormais. Il est inutile aux fachos "identitaires", notamment, de se
lamenter: puisque leurs parents les ont envoyés à l'école: à l'école du Système qu'ils
étaient censés ne pas aimer, rejeter voire combattre. Et puisque, maintenant, ce sont
eux qui, à leur tour, envoient leurs progénitures dans le moule éducatif de ce
Système. Qu'ils continuent donc à publier leurs revues malingres et leurs journaux de
"défense de l'identité française", qui ont avant tout en commun avec les fanzines
soixante-huitards les fautes d'orthographe et de français.
Voilà tout ce qu'il y a dans la proposition de Robert Pioche de vous soumettre,
académiciens, publiquement, sous les yeux du public, à ma dictée. Vous refuserez,
c'est certain. Vous refuserez en disant, vieille chanson, que vous ne voulez pas céder à
une "provocation". Mais qu'on le veuille ou non, ma proposition de dictée est
historique. Vous vous défilerez, académiciens, un par un, parce que vous avez peur.
Il y a quelques années, Umberto Eco, l'un des "grands intellectuels" italiens
actuels, démontra, au moins en une occasion, qu'il ne savait pas employer le
subjonctif. La chose fut dénoncée par un article du professeur Giuliano Bonfante.
Lequel était quant à lui un éminent linguiste dont peu connaissent le nom, sinon dans
des milieux circonscrits. Je n'ai pas de raisons de croire que les choses aillent mieux
en France qu'en Italie. Je n'ai pas de raisons de le croire, pour chacun d'entre vous,
académiciens, tant que vous n'aurez pas le courage d'accepter ma proposition.
Ma proposition est historique, oui, parce que je n'ai pas connaisance que
quiconque, jamais, ait "osé" proposer une dictée aux quarante "Immortels" de son
époque. Ma proposition est historique parce que quelqu'un, demain, devra noter que
quand cela advint, et quand donc un joyeux luron du nom de Robert Pioche proposa
une "dictée de langue française aux académiciens", cela dut signifier quelque chose
sur l'état de la France, et de l'Académie française, et de la langue française!
Vous refuserez, mais soyez attentifs à ce que la postérité ne comprenne les
vraies raisons de votre dérobade. La postérité risque de rigoler parce que, d'une façon
ou d'une autre, vous aurez repoussé - un par un, chacun d'entre vous - mon invitation
à un tel "duel" intellectuel.
Vous aurez fait semblant d'ignorer l'existence de ma proposition de dictée. Vous
fuirez, mais vous laisserez à chacun le soupçon que cette dictée de Robert Pioche
aurait démontré que les académiciens d'aujourd'hui, les faiseurs de dictionnaire, les
dicteurs de modes, les tireurs de ficelles des milieux éditoriaux, les Prix Goncourt
(distribués comme des cacahuètes dans les cinémas) ne connaissent pas leur propre
langue. Et je vous assure - vous tous, que vous soyez académiciens, journalistes,
intellos, "écrivains" - que j'ai pour vous d'autres questions que celles - élémentaires -
dont j'ai parsemé mon si plaisant discours d'aujourd'hui.
C'est vous, écoliers, écolières de France et des lycées de province et de
banlieue (vous qui lirez ces lignes, vous à qui vos profs reprochent de ne pas avoir
d'orthographe, cette orthographe qu'ils sont incapables de vous enseigner parce qu'ils
en ont encore moins que vous), qui devriez rigolez et faire savoir autour de vous :
- Les adémiciens ont refusé la dictée de Robert Pioche!... Sépatété kwa!
Ou encore :
- L'idée de la dictée de Robert Pioche aux académiciens, c'est une idée tété!!!!
Elèves des lycées de France, proposez vous aussi à vos "profs de français" de
les soumettre à une dictée!
Et vous, académiciennes, académiciens - et vous, "auteures" et auteurs - cette
élémentaire révision de notre bonne vieille grammaire ? Chiche?...

Une parenthèse sur "l'académisme". POUR RAPPELER QU'OLIVIER


MATHIEU POURRAIT ÊTRE ACADEMICIEN, MAIS JAMAIS
ACADEMIQUE...

Académiciennes! Académiciens!
Je ne suis pas académique.
Qu'entends-je par là? J'entends par là que "l'académisme", en peinture ou en
littérature, est quelque chose de relativement déplorable. Encore qu'il y ait eu de bons
écrivains "académiques".
Car c'est dans les époques "d'académisme" que naissent aussi les grands génies
et les vrais novateurs. C'est d'un "terreau" d'écrivains académiques que naissent les
écrivains non académiques!
Aujourd'hui, l'académisme, c'est la fausse avant-garde. C'est l'académisme de
ceux qui ne peuvent plus rien détruire parce que, avant de détruire, il faut savoir
construire. Parce que, avant de songer à appartenir à une avant-garde, il faudrait faire
ses preuves académiques!
Picasso, qui a eu du succès quand il commença à faire n'importe quoi, savait
initialement peindre. Mais aujourd'hui, l'académisme des gribouilleurs des galeries
"d'art" (grands Dieux!) consiste à déverser au hasard leurs pots de peinture sur
d'innocentes toiles. Le public se pâme devant tant de hardiesse et de beauté... Et des
collectionneurs d'art (sic! sic! sic!) achètent ça, payent ça des milliers de dollars!...
Les plus grands génies de la musique composent des oeuvres faites de silence; les
peintres exposent des toiles vierges... On attend (ou l'on n'attend plus) le premier livre
fait de pages blanches...
Aujourd'hui, les "écrivains" sont - et restent - des nullards et dans
l'académisme, et dans l'avant-garde. Aujourd'hui, règne partout la médiocrité. On se
"cultive" non plus en lisant des livres, mais en cliquant sur Google, où le premier
venu peut écrire n'importe quoi sur n'importe quoi et sur n'importe qui. Moins on lit
de livres, et plus on en écrit. Médiocrité de "l'académisme", médiocrité de "l'avant-
garde". L'académisme et l'avant-garde ont copulé; ils ont accouché d'une infinie
médiocrité.
Aujourd'hui, les "écrivains" enregistrent leurs livres sur des cassettes, qu'ils
confient ensuite à leurs "nègres" littéraires. Aujourd'hui, les vitrines des "bonnes"
librairies sont remplies de livres plagiés et/ou mal écrits, recopiés sur Internet, écrits à
chier.
Hier encore, la France avait des écrivains. Les uns étaient fascistes, les autres
communistes, d'autres apolitiques. Peu importe. Abel Bonnard savait écrire, Drieu
La Rochelle savait écrire, Céline savait écrire, Aragon savait écrire. La
Collaboration eut de grands écrivains, et d'autres qui étaient nuls. Le C.N.E., Comité
National d'Epuration qui mit par exemple Céline, Giraudoux et Jouhandeau à l'Index,
compta dans ses rangs des écrivains, ou des écrivains proclamés, dont tout souvenir
est effacé. Pourtant la Résistance, elle aussi, eut quelques bons écrivains. Maurice
Druon, ainsi, a laissé une oeuvre intéressante à plus d'un titre.
En 2011, l'écrivain de "droite" et celui de "gauche" sont peut-être de droite ou
de gauche (si cela a encore un sens pour eux, grand bien leur fasse), mais ils ne sont
certes écrivains que dans leur imagination ou dans celle de quelques milliers (ou
millions) de gogos abusés par la propagande de la publicité. Qui sait encore écrire? Et
écrire pour dire quelque chose? Ecrire quelque chose qui ne soit pas "commercial",
qui ne soit pas démagogique, qui ne participe pas directement ou indirectement des
célébrations de mémoires de plus en plus foireuses, qui ne soit pas à la fois
individualiste et grégaire? Quelque chose qui ne pue pas d'illettrisme, de mensonge,
de banalité, de conformisme? Des livres peu épais, à larges interlignes, qui ne disent
rien ou si peu de vrai, rien de beau...
Droite? Gauche? Tiens! Ces mots vagues me rappellent Romain Motier, au
temps (1947) où il publia son Traité de l'Intolérance (page 174) : "La séparation des
deux camps est facile à établir. On est de gauche quand on a supprimé la ponctuation,
la grammaire et même l'orthographe. On est de droite quand on préfère Racine à M.
Gumpel, dit Éluard et Voltaire à M. Martin-Fauchier."
De nos jours, Romain Motier n'aurait plus qu'à constater que la gauche et la
droite n'ont plus de réalité tangible, si ce n'est dans d'infimes détails. Qu'en tant que
mots, elles ont perdu tout sens ; tout sens commun plus exactement. Que partout et
en tout, en gauche, en centre et en droite, la décadence est patente. Que le
"modernisme" et le "progrès" ont vaincu. Mais qu'avant toute chose, la "modernité" a
vaincu l'Homme en ses vraies valeurs, ses vrais élans, sa vraie culture. En son
humanité même. Fait patent. Romain Motier ajoutait: "On est classé patriote quand
on est de gauche, traître et espion quand on est de droite."
Mes chers confrères académiciens, je vous laisse seuls juges de décider, en
cette année 2011, où se trouveraient les espions... et les traîtres à la cause académique
"françoise"!

Je ne suis pas académique. Je ne reproche cependant rien à l'académisme. Je


voudrais, parfois, que perdure un académisme, mais de qualité, parce que cela
permettrait de le renverser ou de le dépasser. Or aujoud'hui, il ne reste rien. Et
comment renverser le Rien? Aujourd'hui, l'avant-garde du Rien fait semblant de lutter
contre l'académisme du Rien. Et le résultat de tout cela s'appelle : Rien. L'avant-
garde du Rien et l'académisme du Rien s'épaulent et s'interpénètrent - pour ne pas
employer un terme moins courtois et plus explicite.
Je me désole du fait que l'académisme ait, comme l'avant-garde et comme tout
le reste, sacrifié l'esprit à la lettre. Sacrifié l'esprit à l'illettrisme.
Je me désole - et je m'en désole pour vous, et pour la France tant qu'on y est -
du fait, par exemple, qu'un seul académien ait eu le courage de voter pour Robert
Pioche, en décembre 2003.
Je me désole du fait que si peu d'académiciens aient la courtoisie de me
répondre, quand je leur écris.
Je me désole du fait que si peu d'académiciens aient le courage de dire -
notamment quand ils me connaissent très bien - qu'Olivier Mathieu, plus que tant
d'autres, mériterait au moins quelques voix à l'Académie française.
Je me désole du fait que, s'ils ne votent pas pour moi, c'est qu'ils ont peur de le
faire, et l'on sait ou l'on subodore pourquoi...
Je me désole, pour eux, de la façon dont la postérité les jugera, quand elle
comparera mes oeuvres avec celles de divers gribouilleurs dont les candidatures ne
sont pas, comme les miennes, saluées par le silence ou les insultes.
Je "reproche" à l'académisme et à l'Académie de refuser - malgré les
proclamations sur le nécessaire "rajeunissement" de cette institution - le seul écrivain
(je parle de moi, merci) qui, par son oeuvre et par son existence, parce que son
oeuvre est vécue, pourrait apporter, quai de Conti, à la fois du talent et, au sens
étymologique, de la "provocation": provoquer, c'est lancer un "appel vers le haut".
Je "reproche" à la Compagnie de l'Académie d'élire des gens seulement parce
qu'ils font ou croient faire partie de la "bonne compagnie", parce qu'ils pensent
"comme il faut", parce que leur talent consiste à se retrouver devant les petits fours
des maisons d'édition et à participer à toutes les petites et grandes combines des
maisons d'édition, des prix littéraires, des plumitifs tartineurs d'éloges attachés à leur
service.
Je reproche à l'Académie française d'avoir oublié ou trahi la littérature.
Je reproche à l'Académie d'élire des modernistes du Rien. Affligeante
"modernité". Affligeant "progrès". Affligeant "bonheur".
Je reproche à l'Académie son union des académiciens académiques du Rien et
des académiciens modernistes du Rien. Je reproche à l'Académie d'élire des gens qui
n'ont rien ou pas grand-chose, littérairement parlant, à y faire et qui n'y sont donc, la
plupart du temps, que pour des motifs politiques ou mondains. Je n'ai jamais trop
compris ce que des gens sans destin littéraire,ou dont rien ne les destine à veiller sur
notre pauvre langue mise à mal, y font.
Rien n'interdit l'Académie à un ministre écrivain. Mais qui est nommé ministre
n'est pas automatiquement écrivain. Je reproche à l'Académie sa surabondance
d'anciens (ou de futurs) ministres. Je reproche à l'Académie sa paucité en esprits
vraiment jeunes et vifs, et sa paucité en anciens (ou futurs) écrivains.
Toutes choses dont surgit (forcément) un monde nouveau, le monde moderne,
le monde du nouvel ordre mondial, le monde de la pensée unique (un monde qui
englobe les adversaires proclamés de cette pensée unique), le monde de la non-
pensée. Un monde sans pensée, sans génie, sans talent, sans vérité. Un monde de fric.
Un monde où, à tout coin de rue et sur tout plateau de télé, on dresse en revanche un
piédestal à la première andouille venue. Un monde où, chaque semaine, un critique
"littéraire" découvre le plus grand génie de tous les temps, que tout le monde aura
oublié une heure plus tard. Un monde où BHL nous entretient du philosophe "Botul".
Je reproche à l'Académie française de n'avoir pas eu, en mai 2007, le courage
d'accepter la candidature d'Olivier Mathieu.
Je reproche à l'Académie de ne pas avoir le courage de refuser définitivement la
candidature d'Olivier Mahieu, à supposer que la chose soit facile : il suffirait soit
qu'elle établisse une loi "ad personam", une loi contre Olivier Mathieu, soit qu'elle
change son règlement, dans le passage qui dit que "toute personne" peut s'y présenter.
Or, tant que le règlement de l'Académie dira que "toute personne" peut s'y
présenter, je m'y présenterai. Tant que le règlement de l'Académie ne dira pas que
"toute personne sauf Olivier Mathieu" peut s'y présenter, je m'y présenterai. Et si ma
candidature est refusée, et donc que je suis victime d'une discrimination, je remuerai
terre et ciel, voire les tribunaux ... ou alors - puisque je suis un homme et que j'ai
donc des droits de l'Homme - je mobiliserai en ma faveur la Ligue des Droits de
l'Homme !
L'Académie semble avoir compris: en refusant ma candidature du 31 mai 2007,
elle a obtenu pour résultat de faire de moi, cette fois-là, un candidat interdit de
candidature. L'Académie française, l'Académie qui est à Paris (Paris capitale de la
France, la France patrie de la Liberté et de la Déclaration des Droits de l'Homme, la
France par bonheur ennemie de toutes les discriminations), l'Académie française m'a
censuré. Elle m'a interdit de poser ma candidature, comme ce Chinois - vous savez ?
- auquel on a interdit de retirer son Nobel à Oslo. Si la presse occidentale a parlé
récemment du Chinois nobélisé, elle n'a pas dit un mot sur une évidente entorse - dont
je fus victime, moi - au règlement de l'Académie française, en 2007. Curieux, non?
Le seul avantage du Chinois, c'est qu'il est "dissident" en Chine, mais très défendu en
Occident. Tandis que moi, je suis "dissident" en France et sans le moindre soutien en
Orient.
Depuis mai 2007, heureusement, l'Académie française a évité de refuser ma
candidature. La plus récente en date, celle au fauteuil laissé vacant par le dècès de M.
Maurice Druon, a été enregistée le 27 janvier 2011. Merci.

Chapitre III

Quelques mots sur M. Maurice Druon.

Je dois le relever: ce fut Maurice Druon qui, en tant que Secrétaire perpétuel de
l'Académie, m'écrivit (et cela, notons-le, à la fin de 1990, année pour moi assez
turbulente) pour me faire part de ce que ma candidature à l'Académie - c'était la
première en date - avait été enregistrée. J'ai conservé sa lettre, en souvenir.
Maurice Druon, dans le paysage intellectuel contemporain, me fut et me reste
littérairement sympathique. Il laisse une oeuvre. Il aima la langue française; il écrivit
- en général - de bons livres; et surtout, en quelques occasions, il manifesta un
courage certain (et fort rare de nos jours). Enfin, alors qu'il approchait du terme de sa
longue existence, ce fut Maurice Dron qui se montra, disons, le plus perplexe, ou le
plus hostile à la candidature (décembre 2003) de celui qui obtint dix-neuf voix contre
ma toute petite voix à moi, j'ai nommé M. Valéry Giscard d'Estaing.
A ce point, si quelque historien, dans l'avenir, ou si quelque curieux se
demande (combien de fois ne m'a-t-on pas posé la question?) qui fut l'académicien
qui vota pour Robert Pioche (alias Olivier Mathieu) en décembre 2003, les paris
restent ouverts.
Un tout petit bulletin portant mon nom dans l'urne, deux petits bulletins dans
l'urne, trois petits bulletins, ... vingt petits bulletins... de petits bulletins qui seraient
amusants, surprenants (voire scandaleux aux yeux de certains) vu les temps que nous
vivons, qui seraient anticonformistes et surtout littérairement mérités... On verra d'ici
peu, le 7 avril 2011, si plus de zéro académicien a le courage, la témérité ou l'envie
d'unir la facétie au littéraire, en votant pour Olivier Mathieu. On verra si un ou
plusieurs académiciens, retrouvant un instant - qui sait? - l'ironie et la verve de leurs
jeunesses, désirent faire à la fois une "bonne blague" et une chose infiniment sérieuse:
voter pour Olivier Mathieu.

Chapitre pénultième.
Olivier Mathieu n'est nullement le "candidat inconnu" que décrivent
certains journalistes...
Où Olivier Mathieu, dit Robert Pioche, et Robert Pioche, dit Olivier
Mathieu, élus à l'Académie française, mettent un point final à leur
discours de réception. Poisson d'avril (premier avril 2001).

Académiciennes!Académiciens!
Je vous remercie de m'avoir élu parmi vous, ce 7 avril 2011, au trentième
fauteuil, en remplacement de M. Maurice Druon.
Ce fut un véritable plébiscite. Diantre! Olivier Mathieu, lis-je sur Internet, a été
élu à l'unanimité? Lui qui n'était jusque-là qu'un dix-neuvième d'académicien, il
n'espérait pas tant! Un dix-neuvième d'académicien qui, d'un coup de baguette
magique, devient un académicien complet!
Les académiciens, face à l'urne et dans le secret de leur conscience, n'ont pas
eu la moindre hésitation. Le bruit en avait couru dans Paris, le premier avril. D'une
voix unanime, les académiciens ont clamé, avec des intonations pour ainsi dire
bibliques : "Olivier Mathieu! Olivier Mathieu parmi nous!"
Vous m'avez réclamé à grande voix. Votre amour pour moi est sans limites.
Maintenant, je le sais.
Académiciens, voilà que vous vous souvenez, enfin, des innombrables
occasions au cours desquelles je rencontrais certains d'entre vous, à la fin des années
80 du siècle passé, au restaurant "Voltaire". Nous y mangions ensemble, vous
souvient-il? Quelquefois, c'était en compagnie d'un richissime assureur et armateur
qui se piquait de littérature et aux romans (si j'ose dire) duquel je consacrais des
articles qui feignaient d'être élogieux. Il en était ravi, le pauvre homme.
Académiciens! Voilà que, parmi vous, la mémoire doit être revenue à ceux que
je croisais, place Saint-Sulpice, ou aux Editions du Rocher, ou dans le salon du comte
Jacques de Ricaumont... Pas mal d'entre vous me connaissaient, en ce temps-là,
académiciens! Faut-il vous dire jusqu'à quelle date précise?...
Vous et moi, chers académiciens, nous collaborions par exemple à la "Nouvelle
Revue de Paris" dirigée par M. Michel Bulteau et placée sous le haut patronage de
Jean Mistler, de l'Académie française. Je suis apparu, si vous avez bonne mémoire, au
sommaire des numéros 5, 6 et 8 tandis que, dans le numéro 7, Michel Bulteau voulut
bien dire tout le bien qu'il pensait de ma réédition des "Modérés" de l'ancien
académicien Abel Bonnard, réédition qui venait de sortir aux éditions du Labyrinthe
dirigées par Alain de Benoist.
J'ai publié, sur mon site, la couverture du numéro 8 de la "Nouvelle Revue de
Paris". Allez voir. Oui, quels beaux souvenirs j'ai du "Voltaire" et de la revue qui, ces
années-là, lançait Houellebecq: il suffira aux curieux d'en retrouver des collections, je
ne m'y attarderai pas davantage - aujourd'hui.
Après vingt années pendant lesquelles vous avez semblé perdre tout souvenir
de moi, académiciens, voilà que vous m'avez élu et j'en ai les larmes aux yeux!
Je suis académicien.
Je signerai, désormais : de l'Académie française.
On dira, sur mon passage : mais c'est l'académien Olivier Mathieu!...
Mais c'est O-li-vier-Ma-thieu-de-l'A-ca-dé-mi-e-fran-çai-se!!!
J'aurai ma table (cela me sera fort utile, je ne mange pas tous les jours à ma
faim), au "Voltaire": la table des académiciens.
Tous les jeudis, je vous rendrai visite, sous la Coupole, et on s'amusera
follement. Moi qui suis SDF, cela me sera fort utile, un toit... Tiens, académiciennes
et académiciens, puisque vous m'avez élu, je vais élire moi aussi domicile quai de
Conti. Mon fauteuil sera aussi mon lit et ce sera bonnard et je vous parlerai d'Abel.
A-ca-dé-mi-ci-en. Je suis académicien!
J'aurai, à la place de l'épée que vous désirez m'offrir, une pioche, je me le
permets. J'aurai un habit vert (cela me sera fort utile, moi qui suis en hardes, un habit
neuf). Je publierai chez les immenses éditeurs. J'aurai l'immense prix Goncourt,
comme mon confrère à la "Nouvelle Revue de Paris", l'immense Houellebecq!
Les immenses journalistes diront, si le vent tourne, que je suis un génie. Je serai
immensément flatté. Je suis élu et j'irai chez Sarko, le garant de l'Académie, pour
recevoir - ainsi le veut le règlement! - son immense bénédiction à mon entrée sous
la Coupole! Je serai immensément flatté.
Et si vous ne m'élisez pas, bien des académiciens sauront d'avance, ainsi, le
nom d'un candidat - Olivier Mathieu - qui briguera, tout en leur souhaitant longue vie,
leur fauteuil. Parfois, je déclarerai "avoir aboli l'Académie" (comme je l'ai proclamé
après ma candidature refusée contre M. Max Gallo); parfois, j'adresserai mes
"félicitations" au vainqueur (comme je l'ai fait vis-à-vis de Mme Simone Veil);
parfois, je proposerai "une dictée" aux académiciens.
Et gageons que mon esprit, qui a été nourri par mes maîtres à penser - parmi
lesquels Jaroslav Hašek et Lucien, les pères de Chveik et de Ménippe - me suggérera
encore mille autres délicieuses et hilarantes facéties mémorables et charmantes.
Je parie que, chaque fois, quelque encyclopédie et quelque journal s'en feront
l'écho. Ah! Il faut en faire, des efforts, pour briser la loi du silence, pas vrai?
Et, ma foi, il y aura bien dix personnes en France pour rire avec moi, et ce sera
déjà beaucoup. Le sens critique et le sens de l'humour se font rares. Comme sont
rares ceux qui ont encore la capacité, la sensibilité, le courage de comprendre qui sont
ou furent les derniers, les tout derniers, les ultimes, les vrais provocateurs. Une
certitude : Jean-Edern Hallier, qui s'amusait beaucoup à poser devant l'Académie en
habit vert, et qui en d'autres circonstances avait mis en scène son propre enlèvement,
aurait apprécié mon "auto-couronnement", aujourd'hui premier avril 2011, à
l'Académie.
Qui sait si, dans l'avenir, chaque premier avril, il ne se trouvera pas quelques-
uns de mes amis pour rappeler l'épisode de ma farceuse (non) élection?..
Je propose de faire du premier avril "le jour anniversaire du poisson d'avril
académique d'Olivier Mathieu".

Maurice DRUON en flagrant délit de subjonctifs hasardeux...

Voici ce qu'écrivait Maurice Druon. Son texte est fort fameux. Vous le trouverez
facilement aussi sur Internet. (C'est un article publié dans le journal Le Figaro du
24/02/2004). Extraits.

"Le langage est le meilleur, le plus immédiat révélateur du caractère des individus.
C'est à son parler que l'on reconnaît, tout de suite, le timide, l'autoritaire, le vantard,
le généreux, l'égoïste. Mais le langage est tout aussi révélateur de la mentalité
générale d'un peuple. Les Français ne respectent plus leur langue parce qu'ils ne
sont plus fiers d'eux-mêmes ni de leur pays. Ils ne s'aiment plus, et ne s'aimant
plus, ils n'aiment plus ce qui était l'outil de leur gloire".
"Le professeur de collège qui a marqué, dans le coin d'une rédaction, «Ne fais pas le
malin avec ton passé défini» méritait les galères. Responsables sont les manuels, où
les questions sont formulées sans respecter l'inversion de la proposition
interrogative : «Tu as fait quoi ? Tu es allé où ?» Démagogie, démagogie. Que le
maître ne s'étonne pas si, à parler le langage de la cour de récréation et à toujours
tutoyer l'élève, celui-ci finit par lui répondre : «Tu m'emm...»
"L'élocution, la prononciation, la diction sont des enseignements oubliés. Où es-tu,
Quintilien, dont les préceptes servirent de base, pendant tant de siècles, à la formation
de la jeunesse ? On apprenait autrefois à parler comme on doit écrire ;
aujourd'hui, on apprend à écrire comme on ne doit pas parler. Les nouvelles
générations bredouillent, et même les jeunes acteurs sont souvent inaudibles".
"La télévision, pour sa part, est responsable de la perte de la «politesse de la
langue». Les émissions dites «de société» sont la plupart du temps des bouillies de
paroles où l'on touille ensemble la vulgarité, le pédantisme, les énormités
grammaticales, les formulations inachevées, les faux-sens, les liaisons malheureuses
et l'obscénité. Et c'est là ce qu'on a osé appeler l'école parallèle !"
"La maladie égalitaire, conséquence du pire défaut français, l'envie, et moteur de
toutes les révolutions, sanglantes ou non, exige qu'on aligne tout sur le bas. On a
commencé par couper les têtes ; on a continué en rasant les fortunes ; on en est
maintenant à décapiter le langage".
"Il faudrait, pour arrêter ce fléau, un grand sursaut national. Il faudrait une volonté
prioritaire des pouvoirs publics, à tous étages, à partir du plus haut. Il faudrait qu'un
mouvement d'opinion naquît et s'amplifiât. Il faudrait que des comités de restauration
du français se formassent dans chaque ville, région ou département. Il faudrait que les
candidats aux élections fussent sommés d'inscrire la défense de la langue dans leurs
programmes. Il faudrait que se constituassent dans les deux assemblées des
intergroupes pour le français. Il faudrait que les ministres fussent accablés
d'interpellations. Il faudrait que soient imposés, dès la maternelle, des méthodes, des
horaires, des exigences qui rendent place première à l'enseignement de la langue. Et
en plus, ce serait sans aucune incidence budgétaire !"
"Il faudrait qu'une commission des manuels écartât ceux qui préconisent les
relâchements. Il faudrait que les instituts de formation des maîtres fussent réformés.
Il faudrait que dans le secondaire fussent dispensés des cours d'étymologie
grecque et latine afin que les lycéens, et particulièrement ceux des filières
scientifiques, apprissent le sens des mots. Il faudrait que les familles où l'on sait
encore à peu près parler fassent des remontrances aux maîtres dont la parole se
laisse aller. Il faudrait que les directeurs de journaux, accablés de courriers signalant
toutes les fautes commises dans leurs colonnes, engageassent des correcteurs plus
compétents et plus vigilants. Il faudrait que le Conseil supérieur de l'audiovisuel, doté
de pouvoirs spéciaux, plaçât des observateurs du langage auprès des chaînes de radio
et de télévision, et pût distribuer éloges et blâmes publics, allant jusqu'à interdire de
soutiens publicitaires les émissions trop offensantes pour l'honnêteté de la langue."
"Mais il faudrait, d'abord, pour tout cela, que les Français se remissent à aimer
la France. Si chevillée que soit en moi l'espérance, il y a des moments où je me
prends à en douter".
Fin de ces citations de Maurice Druon.

Las! Ce texte fameux de Maurice Druon témoigne d'une conception à


tout le moins étrange de la concordance des temps.

Relisons.

"Il faudrait qu'une commission des manuels écartât ceux qui préconisent les
relâchements. Il faudrait que les instituts de formation des maîtres fussent réformés.
Il faudrait que dans le secondaire fussent dispensés des cours d'étymologie grecque
et latine afin que les lycéens, et particulièrement ceux des filières scientifiques,
apprissent le sens des mots. Il faudrait que les familles où l'on sait encore à peu près
parler fassent des remontrances aux maîtres dont la parole se laisse aller. Il faudrait
que les directeurs de journaux, accablés de courriers signalant toutes les fautes
commises dans leurs colonnes, engageassent des correcteurs plus compétents et plus
vigilants. Il faudrait que le Conseil supérieur de l'audiovisuel, doté de pouvoirs
spéciaux, plaçât des observateurs du langage auprès des chaînes de radio et de
télévision, et pût distribuer éloges et blâmes publics, allant jusqu'à interdire de
soutiens publicitaires les émissions trop offensantes pour l'honnêteté de la langue."
(Maurice Druon).
De deux choses l'une : ou bien Maurice Druon savait mal employer le
subjonctif, ou alors qui a retranscrit ce texte ignore tout de la langue française, et a
donc ajouté des fautes non imputables à Maurice Druon. Je serais curieux,
vraiment très curieux de le savoir...
Dans ce texte, l'auteur privilégie le subjonctif imparfait. Il emploie "il faudrait"
dans la proposition principale puis le subjonctif imparfait (le premier est "écartât").
Dès lors, on ne comprend pas pourquoi il a employé partout - dans le
paragraphe cité - le subjonctif imparfait mais, en une et une seule occasion
("fassent"), le subjonctif présent. (Dans les autres paragraphes, idem, c'est un
mélange incessant de subjonctifs imparfaits de subjonctifs présents).
Je suis un partisan du subjonctif imparfait. Pour cette raison, je souhaite qu'il
soit employé oui, mais correctement. L'emploi du subjonctif imparfait, ici, est-il
correct?...
Si l'on a une principale : "Il fallait qu'une commission des manuels", on doit
avoir ensuite : "écartât ceux qui préconisent les relâchements". Et cela, parce que "il
fallait" (verbe essentiellement impersonnel, à l'imparfait de l'indicatif) est un temps
du passé. La concordance des temps veut donc ce subjonctif imparfait: écartât.
Or, ici, Maurice Druon emploie, dans la principale, "il faudrait", qui est un
temps non pas du passé, mais du présent (c'est un conditionnel présent).
ON DOIT ECRIRE :
Il fallait (imparfait, indicatif) qu'une commission écartât...
Il fallut (passé simple, indicatif) qu'une commission écartât...
Il a fallu (passé composé, indicatif) qu'une commission écartât...
Il avait fallu (plus-que-parfait, indicatif) qu'une commission écartât...
Il eût fallu (passé antérieur "deuxième forme", indicatif; avec un sens de mode
conditionnel et un accent circonflexe sur le "u") qu'une commission écartât...
Il aurait fallu (conditionnel passé) qu'une commission écartât...
Certes, on me renverra aux observations - qui sont diverses des miennes - de
Grevisse, sur l'emploi des modes et des temps (§ 869 du Bon usage, 12e édition), qui
admet dans certains cas l'imparfait du subjonctif hors de toute concordance des
temps.
Il n'en reste pas moins que, en italien moderne - je dis bien en italien - ces
phrases de Maurice Druon seraient correctes. En italien, oui, on aurait le conditionnel
(il faudrait) suivi d'un subjonctif imparfait (écartât). Mais - y compris, s'il le faut,
contre Grevisse - je maintiens quant à moi qu'en français, on doit écrire: "Il faudrait"
[ou "il faudra"] qu'une commission des manuels écarte (subjonctif présent) ceux qui
préconisent les relâchements"!
Il n'y a guère de raisons à "admettre" l'imparfait du subjonctif "hors de toute
concordance des temps", sinon à nier cette concordance des temps. Maurice Druon
avait parfaitement - sur le fond - raison dans ce qu'il disait ici, mais il employait d'une
façon des plus douteuses, des plus ampoulées aussi, le subjonctif imparfait et la
concordance des temps.
Si l'académicien Druon se trompait, imagine-t-on comment ça cause dans les
banlieues? Comprend-on mieux le nombre de "bloggers" qui annoncent, sur leurs
blogs (leurs blogs pathétiques), qu'ils "se moquent de l'orthographe"?... Ils ne se
moquent nullement de l'orthographe! Ils l'ignorent de A jusqu'à Z. Ils ignorent
l'orthographe; ils ignorent la grammaire; ils ignorent tout!
Olivier Mathieu n'aura nullement déposé des "candidatures fantaisistes" à
l'Académie. Olivier Mathieu est certainement un écrivain moins fantaisiste, un
connaisseur de la langue française moins fantaisiste, un candidat moins fantaisiste
que beaucoup d'autres. Tant d'autres...

Chapitre ultime.

Des sérieux doutes qu'Olivier Mathieu - ce fantaisiste - nourrit quant


àla véridicité de l'élection de Robert Pioche à l'Académie française, et,
tout pareillement, des doutes sérieux que Robert Pioche nourrit quant
à la véridicité de l'élection d'Olivier Mathieu à l'Académie française, à
quelque date que ce soit et en remplacement de quelque "immortel"
que ce soit.

Académiciens! Mes paires!

Ciel, mon académicien!... Olivier Mathieu a écrit : "Académiciens, mes


paires?"
Ouh! L'illettré!!!
Euh... Fallait-il : "Académiciens, mes pairs"?
Euh... Ou: "Académiciennes, mes paires"?
Tiens, je crois bien me souvenir que c'est M. Maurice Druon en personne qui
insista afin que la parole "prie-Dieu", au pluriel, reste invariable. Et puis on lit
désormais, partout, "Madame LA ministre". Ou: "l'écrivaine".
Une de mes concurrentes candidates, le 7 avril, se définit (ne riez pas!) comme
"auteure"... O mes grands Dieux, "une" "auteure", voilà qui a de la hauteur, à moins
qu'il ne faille écrire désormais, "hauteur" étant un mot féminin, "hauteure" !!!
La vieille règle de grammaire, désuète et anachronique, pour ne pas dire
patriarcale, qui énonçait que "le masculin prime", n'est-elle pas une offense aux
Droits de la Femme ? La règle du monde nouveau, et de la grammaire nouvelle, sera
que le féminin prime. Puisque l'on doit dire "LA ministre" et "l'écrivaine", alors moi,
Robert Pioche, je décide, énonce et édicte - pour donner ma modeste contribution au
féminisme - que le féminin de "mes pairs!" sera dorénavant: "mes paires!" Ceci en
marque de respect pour la gent féminine, et pour effacer la sinistre et sombre
mémoire de millénaires souillés par une horrible patriarcalité.
Si "Dieu", au pluriel d'un nom composé, fait "Dieu" et pas "Dieux" - c'est
l'Académie qui le dit - et si certains de mes concurrents à l'élection du 7 avril sont des
"auteures", alors pourquoi "pairs" n'aurait-il pas pour féminin "paires"? "Paires", à sa
façon, est lui aussi un "mot composé"... de deux demi-lunes!
Puisque ces questions de "masculin" et de "féminin" sont évidemment
destinées à cesser d'exister (depuis le bon Paul, on devait savoir "qu'il n'y a plus
d'hommes ni de femmes", mais la race humaine, aujourd'hui de plus en plus unisexe
et uniforme), les académiciens sont: mes PAIRES!
Vous direz et répéterez : les académiciens sont les paires de Robert Pioche.
Je ne permettrai à personne de dire les paires de quoi.

Mes paires de vers: supplique de Robert Pioche, en vers alternés et


fleuris, malicieux et ludiques de mirliton, aux académiciens :
Dites-moi donc, braves gens à l'envers,
Vous qui vivez du bonheur de vous taire,
Qui vous terrez, esclaves encor verts,
Sous l'édredon de vos dons délétères,
Dites-moi donc comment je vis sur Terre
(La Bonne Mère aux élans prodigieux
Sous le plafond de l'infini des cieux),
Jusqu'au tréfonds d'un art ptérodactyle,
Quand l'hiver tend vers un froid religieux,
En mon exil, où la vie est… subtile ?

Je siffle au vent la ballade des vers :


Rythmes d'antan, instants de vieux mystères
Lorsqu'émouvant, vibrait sous les couverts
L'esprit latent des âmes qui s'atterrent ;
Je siffle au vent des refrains sursitaires.
Pris à revers, par le jeu si pouilleux
D'intolérants culs-bénis fallacieux
(Petits pervers, en rangs, sûrs d'eux, futiles,
Tels des harengs n'ayant pas froid aux yeux),
En mon exil, où la vie est… subtile !

Quand mon esquif prend l'eau par le travers,


J'écope ferme, en route vers Cythère
Qui est mon terme, absolu et de vair :
Loin des récifs, l'amour pour seul critère,
Je souque à vif, vers Ourania l'austère.
La Belle Mer, qu'Éole agite envieux,
Écume en sperme aux rayons d'or précieux :
C’est Rê qui germe en Vérité tactile.
Point de commère, à faux bruit, à faux vieux,
En mon exil, où la vie est… subtile.

Prince des Vers, dans le bois des épieux


D’un temps tyran, sculpte en vers malicieux
Sur leurs avers : que l’homme est versatile,
Esprit errant, de bêtise en vœux pieux ;
En mon exil, où la vie est… subtile !

Olivier Mathieu, dit Robert Pioche,


de l'Académie (précisons : l'académie robert-piochéenne).
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REPONSES du jeu des trois phrases.

Les phrases correctes, dans mes tout petits exercices élémentaires à l'usage des
académiciennes et des académiciens, et des autres, sont:

Phrase correcte:
"Nous nous sommes repentis, parce qu'ils se sont parlé".

Phrase correcte:
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédé sur la route, et que nous avons vus passer".

Phrase correcte:
"Nous avons salué les soldats qui se sont succédé sur la route, que nous avons vus passer sur
l'avenue, sous les arbres que nous avons vu abattre".

Phrase correcte:
"Que de fautes ce pécheur a commises! Hier encore, il a vu des roses et il en a acheté, pour les offrir
à Madame Dupont qui, pourtant, est mariée. Le peu de volonté qu'il a montré, de la sorte, nous a
découragés. Visiblement, le peu de leçons que le professeur lui a données ne lui ont pas été utiles!"

Phrase correcte:
"Quelque difficiles que soient vos devoirs, je compte sur vous".

Phrase correcte:
"Quelles que soient les douleurs qui vous affligent, ayez confiance en votre médecin".

Phrase correcte:
"Quelles que soient les conséquences, il faut agir".

Phrase correcte:
"L'esclave rompt ses entraves".

Phrase correcte:
"Si je vaincs, il vainc aussi!"
Phrase correcte:
"Vous dites et vous redites des choses que vous contredisez tout de suite".

Phrase correcte:
"Je couds une robe et, de la sorte, je résous mon problème".

Phrase correcte:
"Les enfants se sont lavés, nous nous sommes parlé et Simone s'est blessé le bras".

Phrase correcte:
"Quand les maisons se sont écroulées, Simone s'est écriée de frayeur, et quant à nous, nous nous
sommes religieusement tus".

Phrase correcte:
"Excepté la table que j'ai fait faire, vous pouvez tout emporter".

Phrase correcte:
"Ce peintre a peint de petits amours dans tous ses tableaux. Certes, il a vécu de folles amours
jusqu'à sa vieillesse. Cependant, il disait que le plus beau de tous les amours est l'amour maternel".

Phrase correcte:
On a frappé à la porte. Simone s'écrie : "Quels sont ces gens?"... On fait connaissance. Une heure
plus tard, Simone est convaincue. "Quels braves gens", dit-elle, "quelles braves et bonnes gens!
Quels bons et braves gens!"

Phrase correcte:
"Simone s'est imposé des sacrifices, particulièrement le jour où elle s'est absentée et s'est blessé un
pied. Mais elle ne s'était nullement trompée, et ni elle ni sa soeur ne se sont repenties de leur choix".

Phrase correcte:
"Ne penses-tu pas que Robert Pioche a raison de déposer sa candidature? Non, je ne crois pas qu'il
ait raison."

Phrase correcte.
Il ne fait pas de voyages. Plus exactement, il ne fait pas des voyages trop longs.

Phrase correcte.
J'espérerai:

Phrase correcte.
J'emploierai.

Phrase correcte.
Je voudrais que vous appuyiez.

Phrase correcte.
Papa voudrait que nous étudiions.

Phrase correcte.
Le brouillard s'est résous en pluie.
Phrase correcte.
Vous médisez de lui, parce que vous le maudissez.

Phrase correcte.
Nous conclurons notre discours, celui que vous vouliez que nous concluions.

Phrase correcte.
Y avait-il du pain? Non, il n'y en avait pas.

Phrase correcte.
Y eut-il des accidents ce jour-là sur l'autoroute? Oui, il y en a eu.

Phrase correcte.
Ces clairs-obscurs sont des chefs-d'oeuvre.

Phrase correcte.
Les femmes de la ville tout entière étaient toutes peureuses.

Phrase correcte.
On voyait des robes bleues, des robes gris foncé; et des cheveux blonds, et des cheveux châtain
clair.

Phrase correcte.
Je n'oublierai jamais les conseils que m'ont donnés mes parents et, surtout, la vie de sacrifices à
laquelle s'est vouée ma mère.

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SOURCES académiques (ou pas académiques du tout)

- Site officiel de l'Académie française, année 2011: innombrables candidatures (élection du


7 avril 2011)...

- Journal « Rivarol » (décembre 2003), annonçant - quelque temps avant l’élection


académique de 2003 (celle où j’ai obtenu une voix face à Giscard) - qu’Olivier Mathieu se
présentait à l’Académie sous le pseudonyme de Robert Pioche ;

- Encyclopédie du QUID, au sujet de la voix que j’ai obtenue, en décembre 2003, contre M.
Giscard ;

- Editorial de M. Philippe Bouvard, plein d'animosité contre Robert Pioche, dans le


« FIGARO MAGAZINE » (numéro du 18 décembre 2003) ;

- Site officiel DE L’ACADEMIE FRANÇAISE, rubrique « ACTUALITES », notamment


aux dates de décembre 2003 (Robert Pioche); mars 2007, novembre 2008, 27 janvier 2011
(Olivier Mathieu), etc.

- « Olivier Mathieu, dit Robert Pioche », article paru dans le journal « ELEMENTS »
(numéro de juin 2008).
- Article de Stéphane HOFFMANN, en 2009, dans "LE FIGARO MAGAZINE" (ce texte
se trouve aussi, naturellement, sur Internet). "Le farfelu Robert Pioche sera-t-il élu, lui qui a
proposé à l'Académie une épreuve de dictée, chaque académicien battu s'engageant à voter
pour lui?"...

- Article de M. Moudenc paru assez récemment dans le journal "Rivarol", confirmant que
c'est à tort que la mort d'Olivier Mathieu a parfois été annoncée (en 2006). N.B. Cet article
de M. Moudenc recense la biographie d'Oivier Mathieu, "Olivier Mathieu dit Robert
Pioche, le dernier romantique", écrite par M Jean-Pierre Fleury, docteur en sociologie de
l'Université de Nantes (400 pages).

- Pour finir, signalons la parution (février 2011), aux éditions des Petits Bonheurs, d'un livre
d'Olivier Mathieu, "Mon coeur hors du temps". Sur les rabats de ce livre, la candidature d'Olivier
Mathieu à l'élection du 7 avril 2011 est rappelée, et, tout pareillement, le présent texte est annoncé
(les lecteurs des Editions des Petits Bonheurs en auront donc été les premiers informés).

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