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François Colle Ipag - MAP

« La laïcité : un enjeu de souveraineté et Le débat du voile comme révélateur


d’enjeux politiques généraux. »

Simone Lafont et Jeanne Bénigne.


"La loi de séparation, c’est la marche délibérée de l'esprit vers la pleine
lumière, la pleine science et l'entière raison." Jean Jaurès

La Laïcité est l’un des principes forts de notre république, principe selon lequel l’Etat
est détaché de toute appartenance cléricale afin d’exprimer un pouvoir libre de toute influence
religieuse, laquelle pourrait être à l’origine de troubles et plus grave d’un détournement de
l’action étatique vers une chose autre que l’intérêt général.

L’application du principe de laïcité touche de nombreux secteurs dont le plus


médiatique est sans doute l’éducation. En effet depuis les années 1980, les nombreuses
affaires dîtes du « voile islamique » ont révélé une certaine crispation autour du concept de
laïcité en ce sens que ce principe, pourtant corollaire de l’unité républicaine, souffre
d’incompréhensions multiples et devient même selon certains un vecteur de stigmatisation et
d’exclusion.

Cela vient du fait que nombreux des adversaires, mais même des partisans, de lois
laïques ignorent et ne perçoivent pas toujours quels sont les enjeux pour la république de la
défense de la laïcité. Il y a généralement deux perceptions de la laïcité, soit elle est associée à
la défense des religions comme protectrice de l’égalité des moyens d’expression des
différentes religions, soit elle est considérée comme un devoir de neutralité de l’Etat à l’égard
des religions. Ainsi le sens profond de la laïcité est souvent méconnu, cette méconnaissance
est source de conflit autour de ce qui fait pourtant partie des instruments de cohésion
nationale. A cet égard il apparaît plus que jamais nécessaire de faire le point sur l’esprit qui
sous-tend la notion et le concept de laïcité, de sorte que la laïcité redevienne (à considérer
qu’elle le fût) source de cohésion et de concorde plutôt que d’éclatement et de discorde.

Ce court ouvrage qui est en fait la réunion de deux articles, s’attelle à cette tâche, en
mettant en lumière la laïcité comme un enjeu de souveraineté (II) et explique comment le
débat autour du « voile » est révélateur d’enjeux politiques plus généraux mais pas moins
importants (II).

***

I LA LAÏCITE : UN ENJEU DE SOUVERAINETE

Les partisans de la loi sur la laïcité ainsi que ses détracteurs tirent généralement profit de la
méconnaissance des enjeux qui gravitent autour de l’application du principe de laïcité. En
effet beaucoup ont intérêt à ce que la laïcité soit, à tort, identifiée comme un combat contre la
religion. Et ce sont de telles acceptions sur la laïcité qui conduisent à en faire un vecteur de
discorde, alors qu’elle a pour but exactement le contraire. Il faut donc ressaisir les enjeux de
la laïcité (A) et comprendre dans une continuité logique que cette laïcité est la condition d’une
liberté de conscience individuelle (B) et donc d’une souveraineté du peuple contre les
emprises communautaires.
B Ressaisir les enjeux de la laïcité

Une des critiques principale contre la loi actuelle sur la laïcité tient à présenter l’interdiction
du port d’insignes religieux ostensibles comme une loi digne du régime de Vichy, loi dont le
but serait de « stigmatiser les musulmans ». Pour la clarté du débat laïque il faut situer
historiquement le processus laïque et saisir la signification sociale et politique du principe, qui
à ses débuts a suscité tant de haine et de passion.

Le principe laïc naît d’une lutte opposant les tenants de l’église catholique romaine, « les
ultramontains » à la république. En effet jusqu’en 1888 la Papauté condamne ouvertement la
forme politique républicaine bien qu’elle résultait de la volonté du peuple français.

Les partisans de la laïcité voulaient en premier lieu le rétablissement du pouvoir républicain


dans des matières relevant de son domaine. Il s’agissait de remettre en question le pouvoir
clérical, qui tirait son origine dans l’organisation sociale archaïque de l’Ancien Régime. En
somme cette conquête républicaine de domaines qui lui revenaient de droit, s’inscrivait dans
la droite ligne des idées de la révolution de 1789. L’Eglise depuis 1789 avaient connu
plusieurs retour en grâce, sous la restauration d’abord mais aussi beaucoup sous l’empire.
Aussi et bien que paradoxalement l’Eglise bénéficia à nouveau de certaines de ses
prérogatives sous la république (par exemple la loi Falloux), notamment en matière
d’éducation, il s’agissait de lui redonner une part du contrôle de l’enseignement afin d’écarter
les instituteurs qui alimentaient certains mouvements populaires comme le tragique épisode
de la commune en 1848.

Ainsi le rôle de l’Eglise en matière d’affaires publiques ne fut jamais coupé brutalement et
définitivement ; la situation que l’on connaît actuellement est donc née d’avancées
conséquentes en matière de laïcisation mais aussi de brusques retours en arrière.

Le combat laïc, visait à enrayer toute tentative de subordination du civil au pouvoir religieux,
il n’est donc pas question dans le principe d’une lutte contre la religion. D’ailleurs anticlérical
ne signifie pas une opposition au clergé dans sa globalité, par le terme d’anticlérical il faut
entendre une opposition au pouvoir clérical qui entend déborder de la sphère spirituelle pour
s’immiscer dans les questions temporelles, et déposséder la république de sa souveraineté.

De fait, le combat laïc est un combat direct en faveur de la souveraineté de la république, mais
plus encore ce combat laïc en protégeant la souveraineté républicaine, protège la
« souveraineté personnelle » en amenant la condition pour une liberté de conscience
individuelle.

B La condition pour une liberté de conscience individuelle

« La relation entre laïcité et forme républicaine s’affirme aussi par la garantie de la liberté de
conscience » écrit Simone Lafont. En effet par le biais de l’affirmation de l’autorité de la
république sur les domaines temporels, l’individu ou plutôt le citoyen peut jouir d’une liberté
de conscience dont il ne disposerait pas dans un contexte ou le religieux aurait tout pouvoir.
La loi de 1905 dispose en son premier article que la République « assure la liberté de
conscience » et « garantit le libre exercice des cultes », il est évident que ces droits s’exercent
sous certaines conditions, dans le but d’en permettre un exercice profitant à tous, dans la
globalité de la nation. Le libre exercice des cultes ne sous-tend pas l’ingérence du spirituel
dans la sphère temporelle des affaires publiques, il induit que l’adhésion à un culte soit libre et
non pas dictée par une contrainte institutionnelle religieuse.

Pour que l’adhésion au culte soit libre et non viciée par l’influence malhonnête d’une
quelconque contrainte, le citoyen doit être suffisamment averti. Et c’est ici que le rôle de
l’école prend toute son importance. Ferdinand Buisson, grand commis de l’Etat et proche de
Jule Ferry, faisait remarquer que le quasi monopole du clergé sur l’éducation produisait des
« citoyens passifs » et assujettis aux prises de position politique des cléricaux, ce qui va à
l’encontre de l’idéal républicain qui lui requiert des citoyens libres et responsables car guidés
par croyance en la raison (sans pour autant sombrer dans le St Simonisme).

Ferdinand Buisson, assigne à l’école la mission d’éduquer le citoyen à la critique comme ces
propos le montre : « Pour faire un républicain il faut prendre l’être, si petit, si humble qu’il
soit, et lui donner l’idée qu’il peut penser par lui-même, qu’il ne doit obéissance à personne,
que c’est à lui de chercher la vérité et non pas à la recevoir toute faite d’un maître, d’un
directeur, d’un chef, quel qu’il soit, temporel ou spirituel ». L’objectif voulu par le principe de
laïcité, est donc de produire des hommes libres, on est donc loin des critiques de certains
détracteurs de la laïcité qui n’hésitent pas pour les plus ultras, à la présenter comme une loi
digne du régime de Vichy (lequel soit dit en passant avait rétablis une part de l’influence du
clergé dans l’enseignement).

***

Ainsi, à travers la laïcité c’est une lutte pour la souveraineté républicaine qui est mise en
lumière, de plus c’est précisément l’accomplissement de cette souveraineté républicaine dans
les sphères temporelles qui permet au citoyen de jouir d’une liberté de conscience, laquelle est
assurément un des moteurs du progrès.

Toutefois, se limiter à ces deux constats sur la laïcité, serait méconnaître des enjeux politiques
plus généraux (II), qui découlent du principe, et plus précisément de son application
contemporaine. Car en effet depuis maintenant la fin des années 80, la multiplication des
affaires concernant le port du voile, a été la source d’un débat passionné autour du principe de
laïcité, dépassé et étriqué pour les uns ou au contraire qu’il faudrait appliquer avec d’autant
plus de sévérité pour les autres.

***

II LE DEBAT AUTOUR DU VOILE COMME REVELATEUR D’ENJEUX POLITIQUES


GENERAUX
Le débat autour du port du voile, fut - au moment des discussions relatives à l’adoption d’une
nouvelle loi destinée à compléter ou adapter la loi de 1905 aux évolutions sociétales –
passionné à tel point qu’il était et qu’il est encore difficile de saisir l’enjeu véritable du débat.
La difficulté à comprendre le vrai sens du débat résulte de deux choses : d’une part de la
pléthore d’arguments hétéroclites (A) présentés par les anti- loi, et d’autre part parce la
position des partisans de la loi semblait être une position de principe (B) plus qu’une
conviction intime.

A Les anti- loi : un kit d’arguments hétéroclites

Le premier groupe d’argument contre la loi sur le port d’insigne religieuse, consistait à
dénoncer son caractère inefficace. Mais pire encore cette loi risquerait selon les anti- loi,
d’être (ou au moins d’être perçue) comme une lutte anti religieuse et une cause de
stigmatisation. Cet argument est partagé par beaucoup des sphères dirigeantes des Eglises
chrétiennes, l’auteur Jeanne Bénigne dénonce « une confusion des registres » car il pense que
le coté prohibitionniste de la loi a été, de façon fallacieuse, agité comme en étant la substance
profonde. Alors que le respect de la laïcité à précisément comme objectif la liberté.

En outre l’auteur montre combien les termes employés par les adversaires de la loi, sont
communautaristes. Ces termes assignent aux individus, des appartenances ou identités
culturelles, qui à en entendre les auteurs, prédétermineraient les identités personnelles, alors
que l’esprit républicain sous-tend tout le contraire. En effet le citoyen est celui appartient en
premier lieu a une communauté de valeurs, ce qui ne l’empêche pas bien entendu d’adhérer à
un culte, il doit seulement veiller à ce que cette adhésion ne porte pas atteinte par son
expression aux valeurs de la communauté républicaine dont il fait partie.

Il y a aussi l’argument consistant à dire que le port du voile, dans les établissements
d’enseignement public, dans l’administration et plus généralement dans les services publics,
n’est pas un problème finalement. Et qu’une législation prohibitive risquerait de générer et de
faire du port du voile un problème. Car en effet la stigmatisation pourrait donner de la vigueur
au phénomène, en ce sens que des jeunes filles pourraient revêtir le voile, non pas tant par
religion, mais plutôt pour exprimer leur appartenance à une catégorie défavorisée et faire ainsi
un acte profondément militant.

Pour Jeanne Bénigne ce risque n’est que peu probable, d’abord parce que « les héroïnes
emblématiques du port du voile », après enquête, se sont révélées être issues de milieux
favorisés. Ensuite parce que dans la plupart des cas, l’efficacité d’un dialogue constructif
entre les établissements et les familles des élèves porteuses du foulard à été prouvé.

En dernier lieu l’auteur fait remarquer que les enjeux politiques gravitant autour du débat sur
le voile, a été occulté en partie du fait que la position des partisans de la loi sur la laïcité était
plus une position de principe qu’une position reposant sur des convictions profondes.

B Les partisans de la loi : une défense de principe


Beaucoup des partisans de la loi ont défendu l’idée que la préservation d’un espace public
gouverné par des principes laïcs ne revenait pas à stigmatiser une partie de la population par
apport à une autre. C’est donc l’idée qu’un faux procès en discrimination a été fait. Mais une
grande majorité de ces partisans ont fait ressortir l’idée fausse selon laquelle la question
devait être envisagée comme un problème religieux à l’école, le risque était de donner au
principe laïc une connotation exclusivement religieuse, ce qu’il n’a pas.

En effet lors du débat public sur le voile, une confusion entre laïcité et anticléricalisme a été
opérée, de sorte que l’application du principe de laïcité s’est vu attribuée une dimension
politico-religieuse, en ce sens que l’idée qui prédominait était que la laïcité était un instrument
de combat politique contre l’Islam. Paul Thibaud dans un article du Figaro refusait cette
confusion et de fait la laïcité devait à son sens être également défendue par les chrétiens, et
l’Eglise catholique est pour lui tombée dans le piège de la « confusion conceptuelle » en
critiquant la loi.

Il y avait une différence très nette à observer, entre la liberté de conscience qui doit faire
l’objet d’une grande protection, et le « marquage » identitaire des élèves qui lui est, ou peut
être perçu, comme un projet théocratique. Et cette différence peu des partisans de la loi sur la
laïcité en on fait état dans leurs argumentations. En outre la « récupération » par les
mouvements féministes n’aurait fait qu’accentuer cette confusion. En effet les mouvements
féministes se focalisaient sur le voile en dénonçant son caractère liberticide voir archaïque
pour la femme obligé de le porter. Ainsi l’idée qui s’est répandue était celle d’une lutte contre
une pratique socio-religieuse considérée comme mauvaise, par le biais de ce qui serait un outil
politique : le principe de laïcité.

Donc en occultant les missions originelles du principe de laïcité, lesquelles visent pour
l’essentiel à garantir la liberté de conscience, les partisans de la loi, ont donné l’idée d’une
simple lutte politique ou religieuse, alors que la lutte pour la laïcité est avant tout une lutte
pour l’intérêt général. C’est donc pourquoi les partisans de la loi, avaient et ont encore une
position de principe qui s’éloigne grandement du véritable but du principe de laïcité, mais pire
encore, conduit à le décrédibiliser en lui donnant une acception purement anti –religieuse.

***

En conclusion, le principe de laïcité découle d’une longue évolution dans son application et
n’est donc pas apparu brutalement. Aussi ce principe est une des composantes majeures du
mécanisme destiné à satisfaire l’idéal républicain, parce qu’il permet la liberté de conscience
et mène à une tolérance réciproque des religions. De fait le principe de laïcité est dans sa
savante exécution un vecteur de cohésion et de concorde.

Malheureusement, la philosophie qui fait la substance du principe est souvent oubliée voir
occultée. Alors le principe de laïcité devient un outil de stigmatisation et un outil politico –
religieux destiné à combattre une religion en particulier, le principe devient exactement tout le
contraire de ce qu’il est, par le biais d’une confusion conceptuelle, confusion qui est faîte tant
par les partisans du principe que par ses opposants. En somme la laïcité souffre d’un déficit de
compréhension, déficit que seul peut combler le dialogue et la pédagogie.

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