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Démocratie autoritarisme

Aucune démocratie n'est à l'abri d'une


poussée autoritaire, même en Europe
Dans un chat au Monde.fr, mardi 22 septembre, Bertrand Badie, professeur à Sciences Po,
propose de nuancer l'opposition démocratie-autoritarisme, qu'il juge "trop simple et en partie
fausse". "D'autant qu'aucun régime, même en Europe, n'est épargné par une poussée
autoritaire."
David_Miodownick : Quelle différence entre un régime autoritaire et une dictature ?
Bertrand Badie : On a pris l'habitude de définir un régime autoritaire comme caractérisé par
un pluralisme limité : la compétition pour le pouvoir est restreinte à certains candidats, la
liberté d'expression est elle-même limitée, la protection juridique est imparfaite et même
partielle, voire partiale. On est donc confronté à une logique en degrés : on dira d'un système
qu'il est plus ou moins autoritaire, mais on ne saura pas toujours comment le borner.
En aucun cas ce concept ne saurait aboutir à une dualité opposant des régimes démocratiques
à leur contraire. C'est même dans la zone grise qui sépare ces deux pôles que se situent le plus
grand nombre d'Etats.
La Russie est-elle un régime autoritaire ou une démocratie, quand on sait que la liberté y est
restreinte et que les choix politiques ne sont pas totalement libres ?
Le Venezuela est-il un régime autoritaire alors que le président Chavez a été élu et qu'il a
même accepté sa défaite devant un référendum où le "non" était majoritaire ? Israël apparaît
comme une démocratie parfaite si l'on tient compte de la libre compétition pour le pouvoir,
mais les Arabes israéliens sont des citoyens de seconde zone qui entachent ainsi gravement la
qualité de démocratie de ce régime.
En bref, la notion nous invite à réfléchir à un certain nombre de critères mais elle ne nous
conduit certainement pas à distinguer de façon tranchée entre catégories claires d'Etat.
La dictature est une notion plus restreinte. Elle implique le plein exercice du pouvoir par un
homme seul, sans contrôle, sans limitation de ses compétences, sans limitation de la durée de
son mandat. Un dictateur peut arriver au pouvoir par la force ou il peut être élu mais se
maintenir contre le droit et par l'oppression.
Mais là encore, confronté à la réalité, le concept est moins clair qu'on pourrait le croire : la
prolifération d'élections-simulacres rend difficile de distinguer entre un dictateur et un
président autoritaire réélu dans des conditions de légalité et de transparence suspectes. De
même, la suspension des libertés et des droits peut correspondre à des mécanismes
institutionnels et aboutir à la mise en place de formes de dictature légales qui, à leur tour,
viendraient brouiller les pistes. Pour nous résumer, je dirai que l'autoritarisme est davantage
une question qu'une réponse, un instrument de diagnostic qu'un outil de classement, une
problématique plus qu'une affirmation.
Exil : Peut-on opposer d'abord régime autoritaire et démocratie ? Le régime autoritaire
ne peut-il pas être une dérive de la démocratie ?
Bertrand Badie : C'est effectivement un processus que l'on constate assez couramment. A la
limite, si l'on se fie à l'étymologie de la notion d'autorité, tout Etat a une dimension autoritaire.
Qu'un leader fasse usage de son ascendant, de son charisme, de son aptitude à diriger, et on
entre dans le champ de l'autoritarisme sous des variantes très englobantes : exercice solitaire
du pouvoir, omnicompétence, "dérives présidentielles", personnalisation du pouvoir, etc.
Il ne faut pas oublier non plus que la démocratie n'est pas seulement un modèle idéal de cité.
C'est aussi une technique de gouvernement, et donc potentiellement une forme de domination.
Un usage systématique de celle-ci fait donc très vite entrer dans les logiques autoritaires,
légalement, ou par l'usage de ces procédés multiples extérieurs à toute légalité sans s'y
opposer : usage des médias, du marketing politique, techniques de manipulation, réseaux,
clientélisme, népotisme, etc. Aucune démocratie n'est à l'abri d'une poussée autoritaire qui
risque d'être d'autant plus vive que le débat public, comme en Europe aujourd'hui, tend à
mollir, et que la concurrence des politiques n'est pas clairement affichée.
MALY : Si l'autoritarisme arrive au pouvoir par des voies démocratiques, peut-on
toujours le considérer comme non démocratique ?
Bertrand Badie : Encore une fois, l'opposition démocratie-autoritarisme est trop simple et en
partie fausse. La démocratie étant une technique de gouvernement et l'autoritarisme une
posture plus ou moins affirmée, les deux concepts peuvent se combiner dans la pratique.
Un président élu le sera d'abord dans des conditions plus ou moins contestables. Mais même à
la faveur d'une élection totalement libre, les dérives autoritaires peuvent être fréquentes, et
conduire à des formes d'exercice de pouvoir qui n'ont plus grand-chose de démocratique.
Lorsque les institutions sont fortes, ces dérives sont contrôlées ; lorsqu'elles sont incertaines,
elles ne sont plus maîtrisées. Donc les deux variables dont nous devons tenir compte sont,
d'une part, la qualité des institutions et la manière dont elles sont respectées, ainsi que
l'intensité du débat public qui est seul en mesure de maintenir une vie démocratique ordinaire.
Denis : Les régimes autoritaires sont-ils durables comme a priori les démocraties ?
Bertrand Badie : Certains, à l'instar des empires, ont traversé plusieurs millénaires… Ce
n'est pas l'autoritarisme qui est précaire, ce sont les mécanismes de sa personnalisation. Un
régime trop personnalisé dépend de la pérennité des succès de son dirigeant. Un échec sur le
plan national ou international conduit à des logiques d'usure qui s'observent également dans le
jeu démocratique, mais qui sont évidemment beaucoup plus corrosives dans un contexte
autoritaire.

Rachid : Les régimes autoritaires ne sont-ils pas au contraire des facteurs de stabilité
dans la mesure où ils sont synonymes, le plus souvent, d'ordre et de sécurité ?
Bertrand Badie : On entre ici dans un vaste débat. Aucune des thèses qui s'y affrontent n'a pu
clairement l'emporter sur les autres.
Dans une tradition wilsonienne, on a pu établir, notamment depuis 1945, que la démocratie
était facteur de paix là où les régimes les plus autoritaires conduisaient naturellement à la
guerre. Cette thèse a même reçu un nom, celui de la "paix positive". Elle a en sa faveur des
arguments forts : l'hostilité des opinions publiques à la guerre et à la violence internationale ;
la corrélation entre les valeurs démocratiques et les valeurs de paix et de tolérance ; le jeu des
contre-pouvoirs qui limitent les prétentions belliqueuses d'un dirigeant. Mais en même temps,
cette thèse a été démentie par les faits.
Même si les démocraties ont tendance à faire davantage la guerre aux régimes autoritaires
qu'à leurs semblables, elles sont loin de s'imposer comme des forces de paix. L'exemple du
conflit israélo-palestinien est également là pour le rappeler. La seule bombe atomique qui ait
été utilisée était également l'instrument militaire de la plus grande démocratie du monde
d'alors.
Certains, dans ce sillage, ont fait valoir que la versatilité des opinions publiques pouvait
conduire à la guerre plus qu'à la paix, tandis qu'effectivement, un régime autoritaire, ayant
moins de comptes à rendre, peut prendre davantage de risques pour construire et imposer une
diplomatie de paix.
En fait, les exemples abondent dans les deux sens : c'est bien pour se relégitimer que la
dictature argentine s'est lancée dans la guerre des Malouines ; c'est aussi pour renforcer sa
propre équation que le régime militaire grec s'est lancé dans une aventure militaire à Chypre.
Et on pourrait continuer cette longue énumération, qui nous ramènerait au constat élémentaire
que le point idéal serait la dictature platonicienne du sage qui imposerait la vertu à ses sujets
et à ses voisins.
En réalité, une analyse internationale du sujet nous conduit à regarder ailleurs : à prendre en
compte d'abord les conjonctures internationales, certaines favorisant les régimes dictatoriaux,
d'autres promouvant de façon active la démocratie. Il faut regarder également les usages
diplomatiques et stratégiques qui sont faits des régimes politiques en fonction des intérêts des
uns et des autres.
On remarquera par exemple que les Etats-Unis ont favorisé l'essor des dictatures dans
l'Amérique latine des années 1960 et 1970, pour au contraire favoriser le retour à la
démocratie à la fin des années 1980 et jusque dans la période néoconservatrice récemment
éprouvée.
La même remarque vaudrait à propos de la Méditerranée : durant la guerre froide, les Etats-
Unis y ont joué la carte de la dictature avec les généraux turcs, les colonels grecs et le caudillo
Franco.
Depuis, leur politique a changé, mais davantage au nord qu'au sud de la Méditerranée.
Washington laisse s'accomplir la dictature du Tunisien Ben Ali, et ne donne de coup de patte
à celle d'Hosni Moubarak que quand celui-ci présente des signes de faiblesse… La dialectique
est ainsi fort compliquée, ce qui est tenu pour facteur de stabilité un jour est dénoncé comme
facteur d'instabilité le lendemain, et encore, de manière sélective, au risque de se contredire
dans la politique menée à l'égard de deux Etats voisins.
Excalibur : Dans ce monde où les Occidentaux, incarnation de la démocratie, perdent de
plus en plus leur place au centre du jeu international, au profit des régimes non
occidentaux, plus autoritaires et aux ressources immenses (richesses naturelles, marchés
immenses), est-ce que l'avenir appartient à ces derniers ?
Bertrand Badie : Les choses me paraissent en réalité beaucoup plus compliquées. D'abord,
l'assimilation forcée de la démocratie et du monde occidental ne me semble pas être un guide
convaincant d'analyse.
Après tout, l'Europe du XXe siècle était largement partagée entre les démocraties et les
dictatures.
On vient de voir ce qu'il en était encore récemment de l'Amérique latine et du monde
méditerranéen, pourtant l'un et l'autre de "souche" occidentale.
On ne progressera pas si on reste vissé à ce postulat beaucoup trop simpliste. Maintenant, la
prise en compte du reste du monde demanderait aussi beaucoup de nuance. Le monde "non
occidental" n'est pas monolithique, ni dans sa sociologie, ni dans son histoire, ni dans sa
culture, ni dans son aménagement institutionnel. Il y a pourtant – et je vous l'accorde – un
dénominateur commun : tous ces pays entrent plus ou moins vite dans la mondialisation.
C'est-à-dire dans une communication beaucoup plus intense, mettant en échec toute forme de
censure trop marquée. Ce processus vient également modifier les comportements sociaux : les
populations sont plus actives, demandent avec plus d'insistance d'être associées au pouvoir, de
le contrôler et de le sanctionner. Jamais les aspirations populaires à la démocratie n'ont été
aussi fortement affichées. En Iran, en Chine, dans le Caucase, en Europe centrale, en Afrique
subsaharienne, en Amérique centrale, etc.
Si tous ces Etats veulent entrer dans la mondialisation, leurs dirigeants sont nécessairement
condamnés à faire de plus en plus de concessions à ces demandes de participation. Entrer dans
la mondialisation signifie en même temps s'exposer au regard et à la critique des autres, et
laisser les populations concernées entrer en contact avec les autres.
Donc partout dans le monde, et jusqu'en Birmanie, les processus de transformation des
systèmes politiques sont en marche, tranchant de façon évidente avec des siècles
d'immobilisme politique. La question est maintenant de savoir ce qu'il en sera de cette
dynamique.
Elle peut être adroitement gérée par des dirigeants autrefois dictatoriaux qui se recyclent avec
douceur dans la démocratie. C'était par exemple le pari de Mikhaïl Gorbatchev, plus ou moins
prolongé par l'ancienne nomenklatura soviétique aujourd'hui au pouvoir.
On se demandera également quelle forme institutionnelle prendra cette transformation des
régimes : assisterons-nous à une pâle copie de la démocratie occidentale, au demeurant mal
adaptée, ou à des inventions institutionnelles inédites ? La logique fait penser que seule la
deuxième option a une chance de trouver les moyens de sa pérennisation.
Ajoutez à cela une double erreur dans la gestion internationale du problème : l'expérience a
montré qu'aucune démocratie ne pouvait être imposée de l'extérieur ; le résultat est même
catastrophique lorsque l'on explique que la gestion de cette transformation passe
nécessairement par l'alignement sur le modèle occidental. On fait évidemment violence au
nationalisme le plus élémentaire.

François : Même s'ils sont un facteur d'instabilité, les régimes autoritaires n'ont-ils pas
la caractéristique d'avoir une politique étrangère beaucoup plus claire que les
démocraties ? Je pense notamment à la Chine, qui sur la question du Tibet est très claire
dans ses positions, accusant les Occidentaux d'être des facteurs d'instabilité dans ses
frontières, tandis que les Occidentaux ne savent pas comment gérer le problème du dalaï
lama (incertitudes sur la participation aux JO, etc.) .
Bertrand Badie : Je ne crois pas que la variable soit aussi pertinente qu'on le dit. Les
politiques étrangères des systèmes dits autoritaires sont souvent obscures. Obscures d'abord
dans les conditions de leur élaboration, dans l'identité des acteurs qui y participent.
Mais obscures aussi dans leur logique. La Chine, par exemple, a peut-être une politique claire
sur la question tibétaine, mais, par parenthèse, elle ne la tient pas pour un sujet de nature
internationale, mais pour une question intérieure.
En revanche, la politique étrangère chinoise est beaucoup moins claire au niveau mondial :
par rapport aux conflits actuels qui ensanglantent la planète, par rapport au multilatéralisme et
à ses réformes, et même par rapport à ses voisins, notamment l'Inde et la Russie. Tout cela est
normal : il n'y a jamais de débat public en Chine sur ce que devrait être une bonne politique
étrangère. Ce qui permet au représentant de la Chine au Conseil de sécurité de se distinguer
par son silence et sa discrétion.
On pourrait dire la même chose de beaucoup d'autres régimes de même nature. Les dictatures
ont même une capacité de revirement tout à fait spectaculaire, comme le suggérait déjà le
pacte Molotov-Ribbentrop. En fait, les régimes autoritaires ont contre eux l'incertitude de leur
avenir : peut-on miser sur l'alliance avec un dictateur lorsqu'il risque d'être renversé le
lendemain ? Ils ont contre eux aussi l'absence de débat public, qui peut conduire à se tromper
sur la ligne choisie.
Bien malin sera celui qui définira clairement ce qu'est la diplomatie saoudienne ou, pour
changer de continent, ce qu'est aujourd'hui celle du Bélarus.
Melanie_Monjean : Les pays démocratiques peuvent-ils légitimement prétendre à un
droit de regard sur les activités, même internes, des régimes autoritaires sans verser
dans l'ingérence ?
Bertrand Badie : Je crois personnellement, en prenant des risques, que la messe est dite.
Nous sommes sortis de la période d'euphorie qui auréolait l'intervention extérieure. Celle-ci se
faisait d'abord par conviction : la démocratie se parait des vertus du prosélytisme et du
messianisme. Elle se faisait aussi par opportunité : la chute de l'URSS laissait aux
"démocraties occidentales" le champ libre pour devenir le gendarme vertueux du monde et
envoyer partout ce que François Mitterrand appelait les "soldats du droit". On a en fait trop
vite confondu vertu et efficacité, solidarité et intervention, et on a tout simplement oublié
qu'une démocratie ne pouvait dériver que d'un contrat social construit par les acteurs locaux
eux-mêmes. Le pitoyable destin de l'élection récente en Afghanistan l'a rappelé d'une façon
désormais indélébile.
En réalité, c'est tout le contraire de ce qui avait été souhaité qui est en train de se produire :
une intervention mal maîtrisée est en train de ranimer partout dans le monde des fibres
nationalistes, identitaristes et particularistes qui recomposent une violence internationale sans
cesse plus forte.
On peut certes cyniquement jouer avec le régime de l'autre, mais on ne peut pas le
transformer. C'est cette opposition mal comprise qui redevient aujourd'hui le facteur essentiel
de l'échec des diplomaties occidentales. La démocratie ou la dictature peuvent être un
paramètre de l'action diplomatique, mais certainement pas une finalité de celle-ci.
Arthurscpo : les régimes autoritaires ne sont-ils pas un facteur de mouvement dans le
monde plutôt que d'instabilité ? Je pense par exemple à la création d'une société civile,
par le biais d'Internet (Twitter en Iran), en opposition avec ce système de gouvernement.
Bertrand Badie : Je crois effectivement que vous touchez là du doigt ce que je repérais tout à
l'heure comme effet induit de la mondialisation. Le dictateur a aujourd'hui perdu un énorme
avantage, qui faisait sa fortune autrefois : il n'a plus de paravent, il ne peut plus agir à l'insu
des autres. Il se construit un espace public international que même les censures les plus
virulentes ne peuvent pas défaire.
Franco : Comment les sociétés peuvent réorienter, agir sur les choix politiques de leur
régime autoritaire ?
Bertrand Badie : Par définition, une société est un organisme vivant. Le totalitarisme absolu
n'est heureusement pas possible, mais ce qui n'était autrefois qu'un léger amendement prend
sans cesse des proportions plus grandes. Plus les sociétés communiquent, échangent,
interagissent, plus elles bousculent et façonnent en même temps les régimes en place.
Cette incompressible vitalité du jeu social fait beaucoup plus que l'intervention extérieure.
Au contraire, celle-ci peut servir d'argument aux régimes les plus autoritaires, gêner les
sociétés qui viennent à s'ouvrir et à s'épanouir. Au plus chaud de la crise iranienne,
Ahmadinejad semblait attendre avec impatience une intervention américaine, qu'il aurait
utilisée comme trophée populiste, comme moyen de jouer de la fibre nationaliste de la société
iranienne. Cette intervention, Obama n'a pas voulu la faire. C'est peut-être à ce niveau que la
société iranienne a capitalisé le plus d'avantages.
JSL : Les régimes autoritaires ne permettent-ils pas aussi parfois en interne d'étouffer
les conflits ethniques qui, lorsqu'ils éclatent, concernent souvent plusieurs pays?
Bertrand Badie : Oui et non. A nouveau, la variable n'est pas probante. Combien de régimes
autoritaires se sont construits sur le privilège accordé à une ethnie et la consolidation de son
rôle dominant ?
Prenez l'Irak de Saddam Hussein. Le jeu du dictateur était de renforcer la prédominance des
sunnites, n'hésitant pas à persécuter les Kurdes et les chiites, et même, en période de crise, à
aviver les conflits interethniques.
Ce sont bien les Kurdes irakiens qui ont été les premières victimes de la défaite de Saddam
Hussein en 1991 et qui ont servi d'instrument de reprise en main du pouvoir par le dictateur
irakien.
En face, la Turquie, qui a nettement évolué vers un régime de plus en plus démocratique, fait
preuve d'une intolérance peut-être moins cruelle, mais souvent forte, à l'encontre de cette
même minorité.
Tour à tour, le chah d'Iran et Khomeini ont développé une politique qui n'allait certainement
pas dans le sens de l'intégration des Kurdes au sein de leur régime. Et on pourrait continuer…
Le président rwandais Habiyarimana a avivé l'hostilité entre Tutsis et Hutus au moment où il
perdait ses capacités politiques et où il avait besoin d'un bouc émissaire pour réunir la
population Hutu autour de son pouvoir.
En revanche, combien de démocraties ont également joué la carte des particularismes ?
La construction, d'ailleurs problématique et contestable, d'une démocratie en Géorgie n'a pas
empêché la montée des antagonismes ethniques et identitaires.
C'est bien lorsque les élections sont devenues libres dans les Balkans que les tensions et les
conflits identitaires ont été le plus avivés : regardez les élections en Macédoine, en Bosnie,
sans parler bien entendu du Kosovo…
Encore une fois, et je maintiens cet argument que j'ai développé tout au long de ce "chat", il
ne faut pas faire de la démocratie ou de l'autoritarisme un facteur en soi explicatif des
processus politiques nationaux ou internationaux, mais les considérer comme des instruments
manipulables ou utilisables par le pouvoir dans son face-à-face avec la société.
Instruments de gouvernement ou instruments de diplomatie mondiale, les régimes n'ont pas de
rationalité en soi, mais doivent être compris dans l'usage qu'on en fait et dans le contexte au
sein duquel ils se perpétuent.

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