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THEME 7 : Pensée et pratique du droit dans la France des

temps modernes.

PISTE 36 : Présentation

La redéfinition du rapport à l'espace que nous venons d'évoquer est liée de manière complexe à une
redéfinition de l'insertion de l'Homme dans le temps. A travers ces deux ruptures, ce sont les
fondements classiquement attribués au droit universel et permanent que mettaient en œuvre les
juristes médiévaux qui sont modifiés. Certes ces catégories ne sont en aucune manière rejetée, on a
toujours besoin de droits universels et permanents mais on s'efforce de penser sur d'autres bases et
de donner d'autres fondements à l'applicabilité générale qui continue à leur être reconnu. Ce
mouvement est en outre accentué par les conséquences de la montée en puissance des États Nations
qui s'accompagne de la volonté des souverains d'appliquer sur leur territoire un droit qui soit propre
à la communauté politique qu'ils gouvernent et qui ne repose que sur l'autorité souveraine.
Cependant de manière générale, le triomphe de ces États Nations qui constitue désormais la réalité
politique essentielle du territoire européen, ne s'accompagne pas de la mise en place immédiate d'un
droit unifié, identifié avec la norme étatique. Dans les premiers siècles de leur existence, ces États
demeurent souvent en effet des communautés de communautés, ce qui fait que leur souverain laisse
subsister les règles en général coutumière qui étaient propre aux communautés ainsi rassemblés
sous leur direction.
Les raisons de fond qui avaient rendu nécessaire l'utilisation du droit romain comme droit commun
durant la période médiévales subsistent par conséquent. Dans la plupart des grands pays européens,
le monde normatif reste marqué par la pluralité. Les règles qu'il convient de mettre en œuvre
demeurent hétérogènes par leurs sources, par leurs contenus, par leur portée, pour les faire
fonctionner ensemble, il est nécessaire d'avoir recours d'une part à des règles subsidiaires, destinées
à combler les lacunes de cet ensemble qui reste nécessairement incomplet , d'autre part à servir de
principe unificateur pour harmoniser les règles différentes ou contradictoires et permettre de les
faire converger vers une solution.
Il n'est donc pas étonnant que l'on continue à rencontrer à l'intérieur des différents ordonnancements
juridiques de ce temps des normes, des lois que les juristes qualifient de droit commun, des normes
qui jouent dans le raisonnement et l'interprétation un rôle tout aussi important que celui qui était
assigné au droit romain commun durant la période médiévale.
Les permanences sont donc ici bien réelles, tant en ce qui concerne le rôle que nous verrons le
contenu. En revanche le fondement à partir duquel on peut justifier l'applicabilité générale attribuée
à ces règles est modifiée, et ces modifications ne sont pas sans conséquences car comme nous allons
le voir sur l'exemple français, sur lequel nous allons revenir plus particulièrement dans cette leçon.
Le rôle du juge et de la doctrine en sort considérablement renforcé.
A l'intérieur de cette monarchie absolue qu'est désormais l’État français, le gouvernement cherche
certes à accroître son emprise, tant sur la création que sur l'application des lois, mais malgré la
puissance théorique qu'on s'accorde à lui reconnaître dans ce domaine, il ne réussit que très
partiellement dans cette entreprise. Fondamentalement, le droit français des temps modernes peut
ainsi être caractérisé avant tout comme un droit de juge, un droit d'avocat.
Non que le principe selon lequel le droit à mettre en œuvre repose sur l'autorité de l’État, non que ce
principe ne soit remis en cause cela va sans dire. Tout au contraire, la pensée juridique des ces
siècles professe un véritable culte de la loi.
L'idée que l’État français est le royaume de la loi revient souvent dans les propos des juristes et des
juges. Mais ce qu'ils entendent par loi c'est un ensemble beaucoup plus vaste que le monde des lois
étatiques. Pour eux en effet, même s'ils ne contestent en aucune manière le fait que les règles dictées

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par l'autorité souveraine constitue l'une des meilleures expression du droit, pour eux il va de soit que
les lois en général, que les juges ont la mission de faire régner sur les sociétés humaines, ces lois ne
peuvent reposer sur la seule autorité de l’État.
Sur ce point, telles qu'elles s'expriment en particulier dans les propos des juges, dans les plaidoyers
des avocats, dans les œuvres de la doctrine, la pensée juridique française demeure largement fidèle
aux principes hérités de la vision traditionnelle qui pose qu'une loi n'est vraiment loi que si elle
exprime la raison de l'autorité.
C'est à partir de là qu'il faut tenter de caractériser la pensée et la pratique juridique française des
temps modernes , et c'est ce que nous allons faire en présentant tout d'abord les mutations
doctrinales qui au XVI ème siècle traduisent un changement dans le regard porté sur le rôle du
temps dans la vie du droit, avant de tenter de préciser quelle est la part de l’État et la part des
juristes dans la création et dans la vie du droit.

PISTE 37 : La jurisprudence humaniste et le mos gallicus

Durant la période moderne, le droit romain continue à jouer un rôle important voire essentiel dans la
vie juridique du royaume. Mais les fondements de son applicabilité change avec le développement
de ce que l'on va appeler le mos gallicus, entendons la manière française de considérer le droit
romain, le mos gallicus par opposition au mos italicus c'est à dire la manière italienne qui était
celle des Écoles médiévales.
Au lieu de l'envisager comme l'expression privilégiée du vrai droit, on le ramène désormais à ses
dimensions historiques et on l'explique, on le comprend à partir de cette réinsertion dans l'histoire.
Cette École historique s'enracine dans le mouvement de pensée de l'humanisme en général et au
sein de ce courant dans ce que l'on appelle plus particulièrement la jurisprudence humaniste.
Par courant humaniste on désigne un courant de pensée qui émerge et se diffuse dans l'élite cultivée
au XVIème siècle. Mouvement de pensée qui conduit ceux qui y participent à donner une place
essentielle à l'homme, à l'homme saisi à nouveau dans sa réalité terrestre et historique, ce
mouvement affecte la pensée en général, il a des répercussions importantes sur la science juridique.
En France, les représentants de ce que l'on appelle la jurisprudence humaniste sont nombreux et de
grande qualité, certains sont professeurs parmi eux, le grand Cujas, d'autres magistrats, d'autres
avocats. Ils ont en commun un goût extraordinaire pour l'érudition.
Ce sont tous, outre bien sûr leur qualité d'homme de droit, de grands lettrés qui participent au
mouvement de redécouverte d'étude des textes venus de l'Antiquité. Le XVIème siècle est en effet
caractérisé par une nouvelle naissance de l'Antiquité, c'est au reste à ce moment là qu'on forge le
terme même d'Antiquité.
D'une part on découvre de nouveaux textes qui arrivent en Occident grâce aux savants grecs qui ont
dû fuir Constantinople, lorsque la capitale de l'Ancien empire romain d'Orient tombe aux mains des
Turcs.
D'autre part on jette un nouveau regard sur les textes déjà connus. Comme pour le droit, le but
désormais c'est de saisir ces textes dans leur authenticité historique, en écartant la grille chrétienne
de lecture qui avait prévalu jusque là. Ces penseurs cependant demeurent des esprits chrétiens, tout
en cherchant à écarter les interprétations traditionnelles venues de la scolastique, ils s'efforcent de
montrer qu'il y a une convergence naturelle entre les principes de la foi chrétienne et ceux de la
philosophie antique.
Notons également pour comprendre l'ampleur de ce mouvement intellectuel que l'invention de
l'imprimerie met les grandes œuvres de l'Antiquité aux mains d'un nombre infiniment plus
important de lecteurs et de penseurs. Ce qui entraîne un élargissement remarquable du cercle de
ceux qui font la pensée et modifie les conditions de son élaboration comme de sa transmission. La
lecture, la réflexion individuelle sur les textes prennent le pas sur le travail collectif et dirigé dont
ces textes étaient l'objet durant la période médiévale, la production du savoir n'est donc plus le

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monopole des maîtres de l'Université, les règles constitutives de cette production qui durant les
siècles antérieurs donnaient une part essentielle à des discussions réglées par la dialectique et
également par l'existence d'une autorité de contrôle, ces règles constitutives anciennes commencent
à s'effacer au profit de la constitution et de la multiplication de doctrines beaucoup plus fortement
marqué par les individualités. C’est l'une des raison qui explique que l'autorité spirituelle perde pour
partie le pouvoir de direction, éventuellement de contrôle qu'elle exerçait sur la vie intellectuelle.
Cette redécouverte de la culture antique dans sa spécificité contribue à la prise de conscience de
l'historicité des cultures humaines. Ce nouveau regard sur le temps conduit nombre d'esprits à
donner une importance décisive à la formation historique des sociétés humaines et par là au concept
de nation.
On voit ainsi surgir, en particulier en France, une sorte de nationalisme culturel. Les élites
françaises se veulent avant tout française. Beaucoup de ces élites par exemple refusent de
s'exprimer en latin. Notons que l'usage du français va être imposé dans le langage des cours de
justice par une ordonnance royale de 1539. On constate, on déplore que les français n'ait pas
d'histoire véritable et par conséquent on s'efforce de forger une histoire qui serait celle de la Nation
française, saisit depuis son origine comme une sorte d'entité qui se développerait dans le temps.
Cette volonté de construire une histoire française traduit bien sûr le refus d'intégrer l'histoire
nationale dans l'histoire sacrée, de séparer donc l'histoire populaire de l'Histoire générale du peuple
de Dieu. Cette séparation rend l'Homme, seul responsable de son Histoire, elle lui donne une
véritable temporalité. Dans ce mouvement, certains juristes vont jouer un rôle essentiel, en
particulier, l'avocat Etienne Pasquier peut être considéré comme le père de l'Histoire française et
la première histoire nationale qui est écrite par cet avocat donne bien évidemment une place
essentielle aux institutions et au droit.
De même que les communautés humaines, les normes qui régissent ces sociétés sont donc
désormais penser dans leur rapport au temps. Ainsi se comprend la mise en perspective historique
du droit romain qui va donner naissance au mos gallicus, c'est à dire à l'Ecole historique
française. Ce mouvement débute très tôt , avec les travaux d'un humaniste qui au reste n'est pas un
juriste, il s'agit du grand érudit Guillaume Budé, commentant les œuvres du droit romain il montre
qu'on ne peut en comprendre les règles que si on les réinsère dans le contexte historique qui leur a
donné naissance. Par là ce qui est remis en cause c'est l'idée générale qui soutenait les méthodes du
droit commun médiéval, c'est à dire l'idée que les règles du droit romain formaient un corps, qu'elles
constituaient un système intemporel, un tout homogène dont les différents éléments pouvaient être
compris par eux-mêmes et dans leur relation réciproque comme si elle n'avaient pas été édicté en un
temps et en un lieu.
Cette méthode va être reprise par les grands professeurs de droit qui enseignent au XVIème siècle
dans des universités de renom que sont alors en particulier Bourges et Toulouse. Et ces professeurs
s'efforcent de faire ressurgir ce qu'était le droit romain dans sa spécificité historique. Ce mouvement
conduit bien sûr nombre d'esprits à mettre l'accent sur la relativité des système juridiques,
l'importance du lien qui rattache la règle de droit à l'époque, au moment, aux mœurs.
Ce relativisme ne les conduit cependant pas à rejeter toute idée de droit universel mais il les
emmène à chercher ailleurs le fondement permettant de penser ce droit comme universel.
Tout en étant désormais convaincu de la légitimité et de l'importance des particularités juridiques
propres à chaque communauté, les jurisconsultes ne rejettent pas le principe d'un droit commun.
Mais du fait que l'autorité du droit romain commun est ébranlée par la remise en perspective
historique, la réalité appelée en France droit commun devient une réalité complexe.
On va en effet voir émerger à la fin du XVIème siècle, l'idée d'un droit commun coutumier malgré
l'importance qui lui est donné par un certain nombre de jurisconsultes, le rôle de ce droit commun
coutumier est cependant sans doute moins important que ce qu'on pouvait en attendre et on constate
que la part dévolue au droit romain reste souvent essentielle, simplement ce droit romain n'est plus
envisagé que comme raison écrite, ce qui sans remettre en cause son rôle, accroît l'indépendance du

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juge dans la mise en œuvre de ces règles.

PISTE 38 : Le droit commun coutumier

Les aspirations à l'unité du droit français se sont multipliés en même temps que se développait le
sentiment national, une nation qui n'avait qu'un roi, qu'une foi, devait également n'avoir qu'une
seule loi. Ces aspirations se sont répandues chez les lettrés, elles ont gagné une grande partie de la
doctrine et à partir principalement du XVIIème siècle, elles ont au moins partiellement convaincues
les milieux du pouvoir monarchique. Cependant bien que les efforts en ce sens ont préparé
l'unification qui aura lieu en 1804, ils n'ont fait que la moitié du chemin, partie sans doute en raison
de la puissance des obstacles rencontrés, partie aussi pour des raisons de fond.
Nombreux au XVIIIème sont les esprits pour qui une unification complète de l'ordonnancement
juridique n'est pas vraiment souhaitable et parmi ces esprits on peut citer Montesquieu lui-même.
Tout au long de cette période les coutumes continuent à jouer un rôle essentiel mais elles sont l'objet
d'une rédaction officielle qui les cristallisent et qui les dépouillent par là même d'une partie de leur
capacité créatrice.
La rédaction officielle de ces coutumes va être entreprise au sortir de la guerre de 100 ans, lorsque
la royauté se trouve suffisamment affermie pour ordonner la mise par écrit de toutes les coutumes
du royaume. En agissant ainsi le souverain répond à une demande ancienne des juges aussi bien que
des jurisconsultes. Beaucoup sentaient l'utilité, la nécessité même d'un texte clair, certain,
sanctionné par l'autorité étatique. Cette décision est donc un choix important, il s'agit non pas de
tenter d'unifier par l'édiction d'un droit valant pour tous mais de respecter une diversité qui apparaît
comme légitime parce qu'elle est née de l'Histoire et qu'elle exprime un consentement populaire.
Initié donc au début du XVIème siècle, ce mouvement de rédaction sera suivi dans la deuxième
moitié du XVIème siècle d'un mouvement dit de réformation, les premiers textes se révélant
imparfaits on doit après quelques décennies corriger voire réformer ces textes initialement rédigés.
Ce mouvement de réformation n'affecte que quelques une des grandes coutumes du pays mais il
permet l'amélioration du texte initial car on tient alors compte de la mise en œuvre qui en a été faite
par les juges et des commentaires qui ont été rédigés par les jurisconsultes.
En ce qui concerne la procédure suivie, dans ses grandes lignes elle a instauré une collaboration
entre les agents de l'administration et les représentants des populations concernées, le roi a
l'initiative, ses officiers et ses commissaires dirigent les opérations mais les habitants gardent un
rôle en ce qui concerne la détermination du contenu, puisque ce sont eux qui doivent d'abord
proposer les coutumes à valider. Ce sont eux également qui lors d'une délibération rassemblant les
gens des trois Etats doivent s'accorder sur les articles qui leurs sont proposés. On comprend que les
conséquences de cette rédaction officielle soient ambivalente.
Pour la doctrine le droit coutumier repose désormais sur de nouveaux fondements. D'une part un
fondement consensuel, les coutumes ont été rédigées disent-ils du consentement des trois ordres, le
consentement implicite qui fondait la coutume médiévale est donc devenu explicite.
Le second fondement c’est l'autorité royale, pour la doctrine la coutume tient désormais sa force
obligatoire au moins pour partie de l'autorité étatique puisque les coutumes publiées ont été publié
selon les mêmes formes que les autres lois royales et qu'elles ont désormais dans l'ordonnancement
juridique le même rang que les lois étatiques, sur ce point on peut considérer qu'il y a une sorte
d'appropriation partielle du droit coutumier.
Cependant si le texte coutumier est fixé de manière certaine, les coutumes conservent certaines
possibilités d'évolution au moins théorique. Selon les jurisconsultes de l'ancien droit qui
empruntent au reste cette règle au droit romain, toute loi peut en effet être abolie par le non-
usage.
Et naturellement on applique cette règle au droit coutumier rédigé et on considère que l'usage
peut donner lieu à la disparition de l'usage qui avait été sanctionné et à la formation de

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nouvelles règles qui peuvent soit déroger au droit ancien soit le compléter.
Cependant si ce droit coutumier conserve des possibilités d'évolution, force est de constater que les
modifications spontanées sont désormais beaucoup plus rare ce qui veut dire que l'évolution va
venir à partir de ce moment là pour l'essentiel de la doctrine, des tribunaux et bien sûr de l’État.
La rédaction officielle a figée les coutumes dans leur diversité mais elle a également permis
l'acheminement du droit coutumier vers une forme d'unité.
Ceci d'abord parce que cette rédaction a entraîné une diminution du nombre de coutumes. Ceci en
outre parce qu'elle a permis un travail doctrinal important qui va donner naissance à ce que l'on
appelle le droit commun coutumier.
Réduction tout d'abord du nombre des coutumes.
Au Moyen-Age, le nombre avoisinait des milliers, au terme du processus, il y aura une soixantaine
de coutumes générales, et un peu plus de trois cent coutumes locales.
Une conséquence ici importante, jurisconsultes et juges vont devoir distinguer entre coutume
générale d'application large qui doivent s'appliquer en principe, et coutumes locales d'interprétation
étroite à considérer comme des exceptions donc ici ce qui s'esquisse c'est une hiérarchie des règles
coutumières.
Dans les pays du midi, l'absence de rédaction facilite la pénétration du droit romain. Les coutumes
n'étant pas constatées, n'étant pas établies par un texte officiel, elles se montrent incapables de
résister à la pénétration du droit romain. Par conséquent, dans ces pays du midi, dans tous les cas où
la règle est incertaine ou objet de critique, les tribunaux en viennent à appliquer la règle romaine.
De sorte que la règle coutumière devient la règle d'exception tandis que le droit romain s'affirme
sans ambages comme le droit commun de l'ensemble de ces pays qu'on va appeler les pays de droit
écrit.
Dans le Nord, la rédaction permet aux coutumes de mieux résister et les progrès vers l'unification
vont se faire à la fois autour des règles romaines mais également autour de règles dont les
jurisconsultes montrent qu'elles constituent le fond des différentes coutumes, et c’est ainsi que se
dessine et prend forme , le fameux droit commun coutumier qui n'est en fait qu'un élément du droit
commun utilisé par les jurisconsultes et le juges de ce temps. Droit commun qu'on peut qualifier de
droit commun doctrinal et jurisprudentiel.
La rédaction des coutumes coïncident, elle aussi avec les premiers développements de l'industrie.
Les juristes vont donc avoir désormais, les moyens matériels de comparer l'ensemble des coutumes
françaises et par là même de relever ce qui les rapproche et ce qui les différencie. Ils peuvent ainsi
remarquer qu'au delà des différences qui marquent leur spécificité, on peut voir en elles des règles
qui se ressemblent et qui vont être considérées comme mettant en œuvre des principes généraux
communs à toutes les coutumes et ce sont les résultats de cette analyse comparée qui vont permettre
la constitution du droit commun coutumier. Ce qu'on entend par droit commun coutumier, ce n'est
donc pas une sorte de coutume officielle commune à tout le royaume, c'est un ensemble de
principes généraux dont la doctrine réussit à montrer qu'ils sont communs à toutes les coutumes ou
en tout cas à une partie importante d'entre elles.
La volonté de ces juristes qui œuvrent à l'édification de ce droit commun qu'ils prétendent tirés des
coutumes, c'est bien souvent d'écarter le droit romain.
Cette volonté qui s'affirme comme un programme au XVIème siècle, suscite de vifs débats au sein
du monde des jurisconsultes. A partir du XVIIème siècle, ce débat théorique s'atténue et on
s'accorde pour ranger dans un droit commun qu'on s'abstient souvent de qualifier, un certain nombre
de règles dont on constate qu'elles sont simplement généralement reçues. Ce droit commun fournit
aux juges une certain nombres de principes généraux dont ils peuvent s'inspirer quand ils sont
confrontés aux difficultés d'interprétation de la règle concrète. La jurisprudence joue en effet un rôle
essentiel en ce domaine, le travail interprétatif mené par les avocats et par les juges est essentiel
dans l'émergence et la diffusion de ces principes communs du droit français.

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Mais d'où viennent ces principes ?
Un certain nombre de ces principes généraux vient c'est évident du fond coutumier, souvent on les
désigne par l'expression maximes générales du droit français et dès les premières décennies du
XVIIème siècle, certains jurisconsultes s'attachent à les relever et à les rassembler mais pour
importantes que soit ces maximes générales, elles demeurent relativement rares et elles sont en
nombre insuffisant pour répondre aux besoins de la vie juridique.
Souvent par conséquent, c’est à la coutume de Paris que l'on a recours. Ces dispositions sont
souvent présentées comme l'expression du droit commun. Elles le sont en particulier par les juges
du Parlement de Paris qui par leur situation sont amenés à la connaître fort bien et qui ont une sorte
de tendance naturelle à considérer que l'interprétation de toutes les coutumes du royaume doit se
faire par référence à ce qui est pour eux la coutume maîtresse du royaume. La prépondérance de
cette coutume, outre son rattachement bien sur au droit de la ville capitale tient aussi à sa qualité,
c'est une coutume qui a été réformée, et lors de cette réformation on a utilisée les commentaires
des meilleurs jurisconsultes en particulier du grand Charles Dumoulin, ce qui a permis de donner
aux règles du droit parisien, plus de rationalité, plus d'universalité et dit-on plus de modération.
Mais malgré les affirmations du parlement de Paris, la question de l'applicabilité de la coutume de
Paris, hors de son territoire, hors de son détroit qui est fort étroit, cette applicabilité suscite de vifs
débats. Malgré le désir beaucoup, le fond coutumier se révèle par conséquent assez nettement
insuffisant pour constituer le droit commun dont la pratique a besoin, ainsi s'explique que le recours
au droit romain demeure fréquent même s'il est utilisé désormais comme « raison écrite ».

PISTE 39 : Le droit romain comme « raison écrite »

Durant cette période moderne, le droit romain garde un rôle essentiel dans la formation du juriste
même si un enseignement de droit français est organisé par un Edit de Louis XIV à la fin du
XVIIème siècle, le droit romain reste une grammaire du droit, il fournit les concepts, les règles, les
principes. Dans la vie pratique, on constate qu'il reste constamment allégué dans les plaidoiries et
qu'il semble bien conserver une fonction très proche de celle qui était la sienne durant la période
médiévale, entendons qu'il bénéficie d'une sorte d'applicabilité universelle, les règles de son
utilisation semblent toutefois plus précises en particulier, on constate qu'il peut être écarter si on
constate une contrariété manifeste entre la règle de droit positif à appliquer et la règle romaine, le
droit romain sera écarté comme étant étranger c'est ce que disent les avocats.
Cette applicabilité traditionnelle n'est donc pas toujours justifiée, il faut cependant distinguer selon
les lieux. Dans les pays du Sud, pays de droit écrit les règles romaines sont directement appliquées
mais il faut noter qu'elles sont appliquées selon l'interprétation qui en est donné par le parlement du
lieu, ce qui entraîne une certaine diversité, en gros il y a autant d'interprétation, d'usages du droit
romain que de parlements dans la France des pays de droit écrit.
Dans la France dite de coutume, le droit romain n'est pas présenté comme une règle directement
applicable mais dès qu'il y a problème d'interprétation soit parce que le texte de la coutume est
obscure, soit parce que les règles à appliquer se contredisent, on constate que le recours au droit
romain est fréquent, voire systématique. Le droit romain est ainsi appelé à fournir des règles
supplétives, il comble les lacunes du droit, on constate également que c'est dans bien des cas lui qui
présente les principes généraux qui vont être utilisés pour harmoniser les règles contradictoires.
Même si en ce domaine, il subit la concurrence du droit commun coutumier, le rôle du droit romain,
reste primordial. En ce qui concerne les fondements de cette utilisation, lorsque la question est
abordée et il faut constater qu'elle ne l'est que rarement, là aussi on peut noter l'importance des
fondements traditionnels.
On voit ainsi réapparaître la volonté divine, la raison, l'usage, l'autorité étatique avec cependant
entre ces différents fondements, des différences d'accentuation qui ont deux ordres de

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conséquences. D'un côté donc ils tendent à accroître l'autonomie du juge, d'un autre côté il favorise
une certaine mainmise de l’État. La volonté divine reste souvent évoquées. On peut ici suivre
l'analyse du grand jurisconsulte qu'est Jean Domat qui publie les lois civiles dans leur ordre
naturel en 1689. Rappelons au passage que par ce terme « lois civiles », Domat désigne le droit
romain c’est donc bien à partir du droit romain qu'il tente de faire un système du droit naturel.
Pour justifier l'utilisation qu'il fait du droit romain, Domat fait donc appel à la providence divine et
il note que c'est Dieu lui-même qui a permis qu'un peuple d'infidèle ait composé ce droit dont les
sociétés humaines avait besoin.

Quel est ce droit qui était nécessaire aux sociétés humaines selon Domat ?
C'est en relation avec la providence divine que Domat marque les qualités qui justifient en raison le
recours au droit romain, il met ainsi l'accent sur sa complétude, milles règles dit-il sont nécessaires
pour que fonctionne les sociétés humaines, or ces règles ne peuvent être découvertes par
l'expérience. Le droit romain résulte d'une infinité d'expérience et par conséquent dit Domat c'est
une chance sans pareil de trouver la chose faite car une vie entière ne suffit pas pour édicter les
règles nécessaires aux Hommes.
Mais c'est un droit également qui est fondé sur la raison. Alors même qu'il ne connaissait pas les
vrais principes du droit, les romains ont réussi à dégager les règles les plus proches de l'équité. Par
conséquent dit Domat, on peut discerner dans les règles du droit romain, l'expression détaillée du
droit naturel. Ici donc c’est l'idée que le droit romain est un droit de raison. La meilleur expression
de la raison qui demeure essentielle, cependant si le droit romain reste indispensable c'est avec un
statut différent. En effet, on peut dire en se fiant d'ailleurs à l'analyse de Domat que c'est la raison
du juriste qui lui confère le statut de droit, de « raison écrite ». Et si elle le lui confère c'est parce
qu'elle découvre cette raison qui existe dans le droit romain, seule au fond la raison juridique
reconnaît la raison du droit qui est dans la règle romaine. D'où une question qui va susciter pas mal
de débats : est ce que dans ce cas, ce n'est pas la raison du juge, la raison de l'avocat qui est appelé à
jouer un rôle essentiel ? on comprend dès lors la force des critiques qui se développent à l'égard de
ce nouveau statut, on a trop accentué le rôle de la raison, on finit disent-ils par « déjuridiciser » le
droit romain, par lui faire perdre sa qualité de droit et cette évolution ouvre la porte à une forme
d'arbitraire judiciaire substantielle. A cela bien sûr on répond que ce n'est pas n'importe quelle
raison qui est ainsi mise en avant mais celle qu'on découvre, qu'on lit dans les livres du droit
romain. Le droit romain, c'est la raison qui est écrite dans les livres du droit romain, la raison écrite
est donc constamment accolées au droit romain dès qu'on cherche à s'interroger sur le fondement du
rôle qu'il continue à jouer dans la vie juridique. Donc il reste un instrument nécessaire. En outre,
l'usage universel dont ces règles sont l'objet chez tous les peuples confirme ce caractère rationnel.
Cet usage, qu'est le dernier fondement sur lequel on s'appuie, cet usage se traduit par une réception
généralisée chez tous les peuples de l'Europe et force est de reconnaître que cette réception qui n'a
pas été imposée par les armes, traduit une forme de consentement implicite.
Ici les esprits restent sensibles au caractère exceptionnel du droit romain, ce destin exceptionnel leur
apparaît comme la preuve de la valeur rationnelle des règles qui y sont contenues. L'importance que
conservent les universalités de l'usage pour justifier l'autorité du droit romain, permet en outre c'est
le dernier point, de le rattacher à l'autorité de l’État.
Cette justification est ancienne, dès le Moyen-Age, dans certaines ordonnances, il était indiqué que
si les populations du Sud usaient des règles romaines c'était à titre coutumier et parce que le
souverain voulait bien autoriser ces populations à suivre ces coutumes romanisées donc c'était là le
moyen qu'on avait imaginé pour concilier la souveraineté étatique et l'utilisation d'un droit venu
d'ailleurs, durant les périodes modernes c'est en gros la même solution qui continue à être présentée
par la doctrine. Simplement on commence à s'interroger sur la portée de l'usage et par là à mettre
l'accent sur l'autorité qui reste au roi à l'égard de l'usage et par là même du droit romain. De plus en
plus souvent on rencontre l'idée que certes l'usage peut valoir comme droit mais qu'il n'engendre un

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droit qu'en vertu d'une permission venant de l’État. L’État veut bien , l’État tolère, par là même on
suggère que l’État pourrait dépouiller ces règles de leur valeur juridique pour y substituer d'autres
règles. Dans certaines présentations par conséquent on constate une progression de l'idée que le
droit appliqué à l'intérieur du territoire doit avant tout reposer sur l'autorité du souverain de ce
territoire donc c'est une forme d'étatisation du droit qui peu à peu se profile. Mais bien évidemment
on est encore loin du but qui ne sera atteint qu'avec la codification.
Le droit romain en effet, reste utilisé par permission disent les jurisconsultes cependant dans sa mise
en œuvre il est certain que les juristes gardent une grande liberté, il est donc un instrument de la
puissance considérable que garde les juges, s'il joue le rôle de droit commun c'est parce que la
doctrine et les tribunaux lui confère ce rôle. La part des juges et des juristes reste donc essentielle
même si la part de l’État dans la création et dans la surveillance de la mise en œuvre des normes, la
part de l’État tend à s’accroître.

PISTE 40 : Le rôle de l’État

Malgré la persistance de la pluralité des sources, le droit étatique joue un rôle de plus en plus
important dans la France des temps modernes. Certes la loi édictée par l’État est loin d'être la
source unique mais il est clair que désormais c'est de l’État que viennent une partie des
innovations. De plus cet État par ses interventions contribue à préparer l'unification du droit
français et on peut dire même que dans certains domaines il parvient à quelques réalisations.
A partir du XVIème siècle, les définitions du penseur français Jean Bodin ont joué sur ce point un
rôle essentiel, le droit de faire des lois devient l'attribut essentiel de la puissance publique. En ce
qui concerne le vocabulaire utilisé, notons que le terme loi, nous l'avons dit tout à l'heure garde
un sens très général et que contrairement à notre usage, il n'est en aucune manière spécifique de
la norme imposée par la puissance publique .
Dans le vocabulaire de la chancellerie monarchique, on parle d'ordonnance en général pour qualifier
ce que nous appelons loi aujourd'hui et les jurisconsultes aiment à expliquer que ce mot ordonnance
est le terme qui convient car ces mesures disent-ils visent à introduire de l'ordre en mettant chaque
chose à sa place.
Au sein de ces textes édictés donc par le pouvoir souverain, une hiérarchie existe puisqu'au sommet
se trouve les édits ou ordonnance au sens étroit qui désigne donc les mesures par lesquelles le droit
vise l'ensemble ou la plus grande partie de ces sujets. Ces mesures d'ordre supérieur peuvent être
précisées par des déclarations lesquelles doivent toujours être interprétées à la lumière des mesures
à vocation générale c'est à dire à la lumière des volontés générales, le terme apparaît dans la langue
des jurisconsultes à la fin du XVIème siècle qu'exprime les édits et les ordonnances.
L'édiction de mesures d'ordre général, exprimant la souveraineté étatique ne constitue certes pas une
nouveauté mais le domaine dans lequel elles interviennent tend alors à s’accroître.
Traditionnellement c’est le droit public du royaume, le droit privé pour sa part relève plutôt de la
coutume.
On considère en effet en doctrine que les coutumes constituent des droits acquis, c’est le terme qui
est de plus en plus souvent utilisé, mis en place par le consentement des trois ordres, en sorte qu'il
faudrait selon les auteurs réunir les trois ordres pour toute modification importante.
Donc au Roi le domaine du droit public, aux coutumes le domaine du droit privé mais la
distinction est beaucoup moins tranchée qu'il n'y paraît, les coutumes contiennent en effet des
dispositions de droit public et les ordonnances peuvent éventuellement toucher au droit privé.
Cependant cette distinction qui limite tout de même la portée d'une intervention étatique est
globalement respectée au moins jusqu'au XVIIème siècle.
A la loi d’État revient tout ce qui concerne le droit public du royaume, l'organisation de la justice, le
déroulement de la procédure, les interventions dans le domaine de la police, le maintien de l'ordre

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public, également puisqu'ils font partie du droit public, le droit pénal et le droit commercial.
En matière de droit privé, les interventions qui sont nettement plus rares, portent essentiellement sur
le droit de la famille et des successions. Ces interventions dans le domaine du droit privé vont être
beaucoup plus nombreuses au XVIIIème siècle et prendre un tour plus systématique.
En ce qui concerne la légitimité du pouvoir législatif du souverain, le principe jamais contesté de
manière frontale c'est que le roi dispose de la plénitude du pouvoir législatif puisque la souveraineté
appartient au monarque, le pouvoir législatif qui en est la prérogative essentielle, lui appartient
nécessairement et sous les mêmes conditions que la souveraineté, entendons qu'il peut l'exercer sans
dépendance et sans partage. Différentes institutions s'efforcent sur ce point de contrôler l'action du
monarque, on peut évoquer donc le chancelier, les États généraux, les parlements, mais toutes ces
institutions admettent le principe que nous venons de rappeler, d'une pleine souveraineté législative
tout en mettant l'accent sur son corollaire c'est à dire l'obligation pour le monarque de prendre
conseil avant de légiférer et c'est sur la portée de ce conseil que peuvent apparaître éventuellement
des désaccords qui seront de plus en plus importants, en particulier au XVIIIème siècle entre les
droits et les parlements.
A partir du règne de Louis XIV c'est à dire la deuxième moitié du XVII ème siècle, ce sont les
membres du gouvernement monarchique qui joue un rôle essentiel dans l'initiative et la préparation
des lois royales. Donc on constate une sorte de montée en puissance des politiques qui se fait au
détriment des juristes, cette évolution dans les modes de préparation accompagne l'évolution qui
marque le statut et le rôle de la loi étatique. Il faut marquer ici la différence avec la période
médiévale, pour l'Homme du Moyen-Age, le droit est l'instrument de la recherche du juste, ce n’est
donc pas une création humaine, la loi qui exprime la volonté du souverain n'est que l'une des voies
de connaissance du droit. Elle intervient certes mais elle intervient à la marge pour corriger, pour
compléter en fonction des besoins du temps, les règles existantes. Durant les temps modernes, la loi
change de statut, elle n'est plus considérée comme un simple moyen au service du juste, elle tend à
apparaître comme un moyen au service d'une politique.
Elle tend par conséquent à s'instrumentaliser et on comprend ainsi qu'elle échappe pour partie au
juriste.
Le conflit du roi et de ses juges qui va se développer sur ce point et qui semble interminable voire
insoluble, il sera l'une des origines de la chute de la monarchie, et qui exprime en fait une
opposition de fond entre deux conceptions de la loi, dont aucune n'a véritablement triomphé. Par
conséquent, le rôle des juristes tend à diminuer dans la procédure d'élaboration des lois, cependant il
est évident qu'on ne saurait se passer d'eux et que donc on fait appel à eux.
La loi donc en théorie prime la volonté du Prince mais il est bien évident que la part effective du
souverain est extrêmement réduite et que les techniques d'élaboration et de préparation de la loi
font intervenir un grand nombre de personnes.
Dans un premier temps au XVI ème siècle, c'est le règne des lois sur requêtes, entendons des
mesures qui interviennent sur demande des populations. Au XVème et XVIème siècle, les
principales ordonnances sont ainsi prises pour répondre aux fameuses doléances des États généraux
et au constat que les différents articles de ces ordonnances répondent point par point à ces
catalogues de demande, de sorte que le texte final est une sorte de catalogue qui n'a aucun caractère
systématique. D'autres ordonnances peuvent être prises à la demande d'un ordre, à la demande de
pays, à la demande des villes, à la demande des corps de métiers. Et ce type de législation qui est
prioritaire au XVIème siècle va persister bien évidemment jusqu'à la fin de la monarchie, mais un
autre grand type de mesure apparaît.
Lors de l'élaboration des grandes ordonnances qui vont marquées les règles de Louis XIV et de
Louis XV, on constate que ce sont les ministres qui sont appelés à jouer le rôle essentiel. En
général, ces grandes ordonnances répondent à un plan systématique élaboré par avance. Leur
élaboration se fait sur la base de mémoires qui ont été préparé par les gens du Conseil du roi, sur la
base également d'enquêtes qui ont été faites dans les provinces auprès en particulier des tribunaux

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ou des administrateurs de la monarchie.
Le texte ainsi préparé , en général par le chancelier est ensuite soumis à un conseil qui rassemble en
présence du chancelier ou du ministre initiateur de la réforme, tout ceux qui ont participé à ce
travail et dans certains cas, on adjoint à ce conseil, les membres les plus importants du Parlement de
Paris qui est la principale cour du royaume.
Sur tous ces points donc de l'élaboration de la loi, on constate un certain nombre de rupture, certes à
partir du XVIIème siècle, les ordonnances répondent par définition à un besoin du corps social mais
ce besoin est implicite et c'est le gouvernement qui prend l'initiative c'est pourquoi on parle de loi
du propre mouvement, en reprenant le vocabulaire de la chancellerie pontificale.
Il y a certes consultation mais cette consultation se fait auprès des gens compétents, auprès des
hommes du métier, les hommes du roi jouent un rôle déterminant, les membres du conseil, les
ministres également. Chacune de ces ordonnances traite une matière et elle a vocation à la traiter
dans son entier. De ce point de vue, la mesure tend à ressembler à une codification même si cette
codification est partielle.
Ces évolutions dont nous venons de marquer le caractère en ce qui concerne la préparation se
retrouvent en ce qui concerne le contenu.
Conformément à leur visée qui est de supprimer ou de réformer les abus qui ont été dénoncé, les
ordonnances de réforme générale prise jusqu'aux premières décennies du XVIIème siècle, sont des
textes fourre-tout, qui traitent pêle-mêle les sujets les plus divers, abordent milles questions de
détail , sans réussir le plus souvent à vraiment s'imposer. Ces ordonnances ne comportent pas de
plan systématique, pas de hiérarchie entre les articles, pas d'ordre.
A partir du XVIIème siècle, les grandes ordonnances se présentent désormais sous une forme
systématique et c'est une innovation bien évidemment importante voire essentielle. Elle traite un
domaine déterminé de la vie juridique dans le cadre ainsi définit, les mutations qu'elles opèrent
tendent à ressembler à ce que l'on appellera plus tard une codification. S'agit-il véritablement d'une
codification ? Beaucoup d'historiens en parlent pour désigner les plus importantes de ces
ordonnances, ils parlent donc de codification partielle, le terme de code va être couramment utilisé
dans la pratique au XVIIème pour les désigner.
Cette qualification peut se comprendre, elle n'est toutefois qu'à demi justifiée, la question cruciale
sur ce point est en effet posée lors des célèbres conférences réunissant les membres du Conseil royal
et les membres du Parlement qui sont organisés pour mettre au point la plus célèbre des
ordonnances de Louis XIV, l’ordonnance de 1667 qui réforme la procédure civile.
A plusieurs reprises le représentant du gouvernement indique que son projet c'est d'abolir l'ensemble
des règles antérieures, et cette abolition est nécessaire car de cette manière les nouvelles règles qui
sont contenues dans l'ordonnance apparaîtront comme des règles nouvelles et devront être
interprétées comme telles sans qu'il soit fait référence aux normes anciennes. Cependant après débat
avec les magistrats et en particulier avec le premier président, le représentant du gouvernement doit
reculer et admettre que seules sont abolis les règles qui sont en contradiction avec les lois
anciennes. Donc c'est la mesure traditionnelle à laquelle finalement on est obligé de se plier, et bien
évidemment la conséquence n'est pas négligeable et cette abolition partielle signifie que la loi
nouvelle ne fait que s'ajouter au droit ancien sans l'écarter définitivement. Bien que par conséquent,
il s'agisse de réformer l'ensemble d'un domaine par un texte complet, bien que de ce point de vue on
s'approche d'une codification, l'absence de ce que l'on appellera plus tard, la clause d'abolition
générale montre qu'il ne s'agit pas vraiment d'une codification.

Les textes dont nous venons d'évoquer la préparation, le contenu, la portée, ces textes sont des
étapes importantes, ils seront largement utilisé pour la confection des différents codes
napoléoniens, en outre, ils ont ceci de commun avec les textes de la période napoléonienne
qu'ils réalisent à la fois une unification, au moins dans certains domaines, mais également une
étatisation du droit.

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Cependant, il ne faut pas exagérer la portée de ce travail législatif d'unification du droit. D'une part,
il demeure partiel, d'autre part dans les domaines dans lesquels il intervient, force est de constater
que le législateur, se contente souvent de rendre manifeste une unité qui est déjà en suspension.
Globalement donc malgré la part croissante qui est attribué aux règles édictées par l’État, le droit
français pendant les siècles de la période moderne demeure un droit dominé par la doctrine et la
jurisprudence.

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