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Felman Shoshana. De Sophocle à Japrisot (via Freud), ou pourquoi le policier?. In: Littérature, n°49, 1983. Le roman policier.
pp. 23-42;
doi : 10.3406/litt.1983.2183
http://www.persee.fr/doc/litt_0047-4800_1983_num_49_1_2183
* * Le paradoxe du roman policier est que sa structure apparaît rarement lorsqu'un esprit
analytique l'examine de près, alors que c'est justement ce type d'esprit qu'il attire le plus [...]. C'est
une forme qui n'a jamais été abattue, et ceux qui ont annoncé son déclin et sa chute se sont trompés
pour cette raison. Comme sa forme n'a jamais été améliorée, elle n'a jamais été codifiée. Les
académiciens ne s'y sont jamais attaqués. Il est encore fluide, trop varié pour être facilement classé,
encore en train de pousser des rameaux dans toutes les directions. Personne ne sait exactement ce
qui le fait fonctionner, et souvent des romans policiers célèbres manquent d'une des qualités
considérées comme essentielles. Le roman policier a donné plus de mauvaise littérature que n'importe
quelle autre forme de fiction, et probablement plus de bonne littérature qu'une autre forme aussi
généralement acceptée et appréciée» (Raymond Chandler, Lettres, Christian Bourgois, 1980, trad.
Michel Doury).
23
L'intérêt théorique du policier : une perspective de
questionnement
24
ou du moins informé, par la psychanalyse, et que je considère, par ailleurs,
comme une spectaculaire réussite littéraire : Piège pour Cendrillon de
Sébastien Japrisot '.
Mon propos sur le policier transgressera donc, ici, la conception strictement
historique du genre, pour définir quelque chose comme la chose littéraire qui
fonde le genre et qui consiste, à mes yeux, en une certaine structure
d'événements et en un certain type d'effet, d'efficacité textuelle qui agit au-delà et
en deçà des limites conventionnelles du genre.
En impliquant, par ce biais de la chose textuelle - policière comme chose
avant tout efficace, la question théorique du rapport entre psychanalyse et
roman policier, ce que je proposerai, cependant, ne sera surtout pas d'entamer
une psychanalyse du roman policier, mais plutôt, de considérer la psychanalyse
elle-même comme une sorte de roman policier : de chercher donc structurel-
lement, non seulement dans la théorie, mais dans le fonctionnement singulier
de la pratique analytique, des éléments de compréhension moins du contenu,
que de la structure, du fonctionnement (narratif, dramatique, épistémologique)
du roman policier. Dans quelle mesure, et comment, la compréhension
analytique que Freud nous a donnée d'Œdipe peut-elle éclairer la structure
narrative du roman policier comme tel? Dans quelle mesure, d'autre part, une
1. Alors que Poe est considéré comme le fondateur historique du genre policier propre, on
pourrait m'objecter, bien sûr, qu' Œdipe-Roi, au point de vue strict du « genre », n'est pas, proprement,
un « récit », ni, à plus forte raison, ce qu'il est strictement convenu d'appeler un « roman policier ».
Cependant, il me paraît évident qa'Œdipe-Roi comporte une structure d'événements qui relève du
scheme policier de la détection d'un crime, voire du procès du dévoilement d'une culpabilité. En
effet, un courant critique contemporain a récemment renouvelé - en Amérique, notamment -
l'approche et la compréhension d'Œdipe-Roi en traitant, justement, le texte dans la perspective du
policier. Ce point de vue, bien qu'osé, non traditionnel ou controversial, est devenu, en même temps,
banal, c'est-à-dire a acquis en sa faveur un certain consensus critique (cf. ci-dessous, note 7).
Il est vrai que, par opposition à un récit pur et simple, Œdipe-Roi est d'abord un drame, une
pièce de théâtre, une tragédie, et l'on pourrait avec profit le considérer strictement dans la perspective
de ces genres-là. Cependant, le drame de théâtre et le récit (ou « roman ») policier ont peut-être
cela en commun, qu'ils sont tous deux fondés, non pas sur la psychologie ou sur l'évolution des
personnages (comme d'autres types de « roman »), mais, essentiellement, sur l'action, c'est-à-dire sur
une structure d'événements. C'est cette structure d'événements que je considère comme fondamentale
à la structure policière. Or, il importe de noter jque, dans le roman policier comme dans le drame
de théâtre, la structure des événements - celle-là même de l'histoire ou du récit - ne peut pas être
simplement racontée, mais doit nécessairement, par définition, être mise en acte - mise en jeu. C'est
en ce sens que l'on peut, légitimement, je crois, parler des structures narratives de la tragédie
d'Œdipe-Roi, c'est-à-dire de la mise en acte, de la mise en jeu du récit œdipien, en tant que récit
policier.
J'utilise donc ici le terme « récit » au sens où l'écrivain américain Raymond Chandler (lui-même
un classique, et un innovateur, du genre policier) parle de « story value », c'est-à-dire, de valeur
narrative, « valeur de récit » qui fonde, à ses yeux, le roman policier comme tel : « Le roman policier,
écrit-il, doit avoir une solide valeur de récit en dehors de son élément de mystère [...]. Tous les bons
policiers sont lus et relus, et certains son relus de nombreuses fois. Cette relecture, de toute évidence,
n'aurait pas pu avoir lieu, si le puzzle était l'unique motivation de l'intérêt du lecteur. » (R. Chandler,
« Casual Notes on the Mystery Novel », in Writing Suspense and Mystery Fiction, éd. A. S. Burack,
Boston, The Writer, Inc., 1977, p. 298; je traduis). Il me paraît évident qu!'Œdipe-Roi comporte, à
la lettre, à la fois cette « valeur de récit » qui appelle et admet la relecture, et « cet élément de
puzzle » dont « la solution », précise Chandler, « doit, lorsqu'elle est révélée, apparaître comme ayant
été, tout au long, inévitable » (Ibid., p. 300). Œdipe-Roi est donc, à mes yeux (bien qu'historiquement
avant la lettre), un paradigme par excellence du genre policier.
Par ailleurs, confiner le genre aux limites de son épanouissement historique, voire de son succès
populaire, de son émergence explicite au milieu du dix-neuvième siècle, relèverait, à mes yeux, d'une
conception réifiée et réductrice, qui insisterait à voir dans le genre non l'intérêt textuel du
fonctionnement structural de la chose littéraire qui le fonde, mais l'intérêt historique, sociologique
ou sémiologique du phénomène rétréci de la commercialisation de celle-ci.
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compréhension des structures narratives du roman policier comme tel peut-
elle aiguiser, ou approfondir, notre compréhension du mythe d'Œdipe - à la
fois comme chose littéraire et comme chose analytique?
2. Japrisot, Piège pour Cendrillon, Paris, Denoël, 1965. Réimpression, collection « Folio», 1972
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Par la suite, la narratrice va passer la nuit dans une chambre d'hôtel;
remplissant sa fiche à la réception, elle signe automatiquement Domenica Loi".
La surprise de cette signature automatique ébranle sa croyance en son identité,
ce nom de Mi que le consensus du monde extérieur semble lui imposer. Par
un raisonnement analytique et interprétatif, elle déduit que Jeanne n'a cherché,
en effet, à l'enfermer et à l'isoler du monde que parce qu'elle est réellement
non pas Mi, mais Do, et parce que Jeanne le sait. Comment Jeanne le sait-
elle, et pourquoi prétend-elle aux yeux du monde qu'elle est Mi? Sans doute
parce que tout cela était prévu entre Do et Jeanne : avec la complicité de
Jeanne, Do devait avoir comploté l'assassinat de Mi pour se substituer à elle
après l'incendie, afin d'hériter à sa place la fortune de Midola. La narratrice
tire donc la conclusion qu'elle est Do : elle est la vivante qui s'est substituée
à la morte, or Do seule avait intérêt à cette substitution qui, de pauvre, la
transforme en riche.
Deuxième péripétie. Arrive alors Jeanne, qui confirme de l'extérieur (par
un récit autoritaire, à la troisième personne), cette version analytique des faits
à laquelle la narratrice est parvenue en tant que lectrice des contradictions
qu'elle décèle dans le présent qu'elle vit. Selon le récit de Jeanne, Do et Mi,
se retrouvant à vingt ans, après une longue séparation, tombent amoureuses
l'une de l'autre, ce qui gêne et éclipse à la fois François, l'amant de Mi, et
Gabriel, l'amant de Do. Cependant Mi, la riche « princesse » qui dépense
librement et largement l'argent que lui envoie sa marraine milliardaire, Midola
- marraine dont elle est la future héritière - Mi humilie Do précisément en
l'entretenant, en la faisant dépendre de l'argent qu'elle lui donne. Do écrit
des lettres rusées à Midola qu'elle cherche à séduire, dans l'espoir de l'amener
à déshériter Mi et d'hériter à la place de celle-ci. Jeanne, ayant lu ces lettres,
dont elle devine le dessein compétitif par rapport à Mi mais dont elle prévoit
l'échec, s'associe secrètement à Do, qu'elle convainc de son plan supérieur :
celui d'assassiner Mi au moyen d'un incendie apparemment accidentel, à la
suite duquel Do, physiquement transformée par une brûlure partielle, sera
reconnue par elle comme Mi et prendra donc officiellement tout à la fois
l'identité et la fortune de l'héritière. Tout s'est passé, dit Jeanne, comme
prévu, à l'exception de quelques détails inexplicables, mais peu importants.
Parmi ces détails, il apparaissait que la rescapée, en risquant sa propre vie,
avait essayé - mais sans succès - de sauver son amie, de la tirer de sa chambre
en feu, avant de s'écrouler et de perdre conscience elle-même.
Troisième péripétie. La narratrice, qui visiblement s'attache à Jeanne de
plus en plus et accepte sa complicité avec elle - qui se croit donc secrètement
être Do (en accord avec le récit de Jeanne), mais prétend officiellement être
Mi (suivant l'instigation de Jeanne) -, rencontre alors un nouveau personnage,
un nommé Serge Reppo, qui la suit pour lui faire part de renseignements
nouveaux et pour lui imposer encore une autre version de l'histoire : travaillant
à la poste, il avait lu un télégramme de Jeanne à Do, à la suite duquel il avait
écouté, intercepté leurs conversations téléphoniques qui mettaient au point le
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projet du meurtre; et, ayant fini par comprendre de quoi il s'agissait, il était
allé prévenir Mi. Avertie du complot contre sa vie qui ne pouvait plus la
surprendre, Mi a-t-elle renversé les cartes, renversé le complot contre Do pour
se venger de celle-ci? C'est ce qu'a déduit Serge Reppo, qui fait chanter la
narratrice, réclamant de l'argent pour son silence : « J'ai compris, lui dit-il,
que l'autre ne s'en était pas tirée, que vous étiez Micky ».
Revenant par compulsion dans la chambre incendiée, la narratrice y
rencontre l'ex-amant de Do, Gabriel, qui la traite lui aussi d'assassin de son
amie Domenica, et lui promet qu'il trouvera des preuves qui l'incrimineront
de cet assassinat. Le mobile du crime, prétend-il, s'était éclairci depuis la
veille : le testament de Midola a été ouvert en Italie : or, en raison d'un
changement de dernier moment du testament, c'était non pas Mi - comme
prévu - mais Do qui héritait! Mi devait être au courant du changement du
testament : elle a donc tué Do pour se substituer à elle et pour récupérer son
héritage.
Quatrième péripétie. Abattue et confuse, la narratrice ne sait plus qui
croire, ni qui elle est en réalité. Si elle croit la version de Jeanne, elle est Do,
qui a inutilement tué Mi (puisque c'est elle-même qui héritait), Si elle croit
la version de Serge Reppo, elle est Mi, qui a tué Do polir récupérer son
héritage (également en vain, puisqu'elle a oublié de prendre l'identité de Do);
si Serge Reppo dit la vérité, cela veut dire, par ailleurs, que Jeanne, en lui
racontant son histoire, s'est trompée ou bien l'a trompée. Angoissée et déroutée,
la narratrice va trouver Serge Reppo et le tue compulsivement - pour le
réduire au silence et, ce faisant, pour protéger Jeanne : pour empêcher le
maître-chanteur de parler du rôle de Jeanne dans l'histoire. Mais lorsque la
narratrice est enfin arrêtée pour ce dernier meurtre, Jeanne se dénonce elle-
même, probablement pour, à son tour, protéger la narratrice.
Elle obtint un non-lieu dans l'affaire Serge Reppo, en raison de son état au
moment du meurtre. Elle fut condamnée à dix ans de réclusion criminelle
pour complicité dans l'assassinat commis par Jeanne Murneau sur la personne
de Domenica Loi.
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Ce bref dénouement, en raison même de sa sécheresse elliptique, invite
à un examen attentif qui admet - on le découvre - plusieurs lectures
successives. Or, ces lectures sont de telle nature que leur diversité ne se cumule
pas : loin de s'additionner l'une à l'autre, elles se renversent l'une l'autre. Le
dessein du dénouement est d'engendrer, de la sorte, des péripéties de la lecture.
Si la structure de l'intrigue était faite des péripéties de la lecture de la
narratrice (sa lecture de sa propre histoire et de sa propre identité), le
dénouement fait acte de ces mêmes péripéties par rapport au lecteur également,
faisant éprouver à celui-ci la même série d'incertitudes et de vicissitudes
analytiques, la même « douche écossaise » de satisfactions et de frustrations
du désir de comprendre et du désir de savoir.
Première péripétie. La première lecture du dénouement, la plus
élémentaire, doit trouver le nom propre de la narratrice par une simple déduction
littérale au niveau des faits rapportés : puisque « la détenue », après la
confession de son identité retrouvée, est inculpée pour complicité dans le meurtre
de Dominica Loi, la détenue n'est pas Do, mais Mi, qui a dû officiellement
déclarer s'être rappelée qu'elle est Mi.
Deuxième péripétie. Mais, dans un deuxième temps, le lecteur est invité
à se poser la question : cet aveu de la détenue concernant sa mémoire retrouvée
est-il à prendre au pied de la lettre? La question du mensonge possible, voire
de la bonne foi de la narratrice, était, en effet, posée par Jeanne au courant
du récit lui-même en rapport, précisément, à la question de la mémoire. « Je
ne vois plus* disait Jeanne, ce que tu sais ou ce que tu ne sais pas » :
Elle raconta tout ce qu'on voulut et même davantage, mais elle ne dit jamais,
personne ne sut jamais que c'était avec Domenica Loi qu'elle avait conclu
un pacte. Je savais pourquoi : si je me taisais là-dessus, si j'étais Micky, la
peine qu'on m'infligerait serait plus légère. Elle était ma gouvernante. Ce
serait donc elle la vraie coupable.
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En effet, le rapport final, tout en décrivant les événements et les gestes
exclusivement de l'extérieur, suggère une connivence, et donc une entente
stratégique, entre Jeanne et la détenue : celle-ci, dit le texte,
se montra très effacée durant les débats, laissant le plus souvent son ancienne
gouvernante répondre aux questions qui leur étaient posées à titre commun.
Or, bien avant la fin du roman, Serge Reppo dit à la narratrice, qu'il identifie
comme Mi, et à qui il rapporte justement sa conversation passée avec Mi :
Même que vous m'avez demandé ce que je me mettais sur les cheveux. C'est
un truc spécial, ça vient d'Algérie, j'ai fait mon service là-bas. Vous voyez,
je n'inventerais pas ça!
Et la narratrice d'enchaîner :
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Mi, puisque Mi seule connaissait, nous dit-on, le nom de l'eau de Cologne :
pour Do, comme pour celle qui est sans mémoire, « ça n'avait pas de nom ».
Par cet indice du nom du parfum, le roman, sans nommer la détenue, semble
donc néanmoins couronner de succès l'attention, la mémoire et l'intelligence
analytique du lecteur-détective, lui donnant une preuve concluante du fait que
la narratrice est réellement Mi et qu'elle a réellement retrouvé sa mémoire.
Quatrième péripétie. Seulement, dans le nom du parfum, « Piège pour
Cendrillon », il y a, dans les mots mêmes du texte, quelque chose « d'aussi
infect que l'odeur ». Le nom du parfum sent trop le roman, dont il reprend
justement le titre, mettant la fiction en abyme. Et si le nom du parfum sent
trop le roman, la fiction, ne pourrait-il pas être, non pas une preuve - un réel
recouvré par la mémoire de Mi -, mais un nom fictif inventé de toutes pièces,
inventé, après-coup, par Do, pour titrer ironiquement son histoire? Pourquoi,
de tous les noms possibles, « Piège pour Cendrillon »? Car c'est Do, nous disait
l'ouverture du texte, qui « se prend pour Cendrillon ». Et c'est Do, disait aussi
l'ouverture, qui, précisément, invente ce conte :
et c'est Do qui invente ce conte, dont elle sait bien, parce qu'elle n'est plus
une petite fille, qu'il est faux.
Il est juste assez vrai pour l'empêcher de dormir.
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du lecteur. Il est vrai que, dans une certaine mesure, tout roman policier tend
un piège au lecteur dans la mesure où il tâche de capter, de celui-ci, tout à
la fois l'intérêt et la naïveté : tout roman policier constitue donc, en quelque
sorte, une école de soupçon, dont l'instruction est un avertissement contre la
lecture naïve. Tout récit policier est fondé, par ailleurs, sur une structure
narrative conventionnelle de piègement : le piègement du criminel. Ce qu'il y
a, cependant, de distinctif et de communément remarquable dans la structure
policière d' Œdipe-Roi et de Piège pour Cendrillon, c'est le fait que le
piègement du lecteur et celui du criminel y sont superposés, imbriqués l'un
dans l'autre : le fait que le criminel piégé dans et par les deux textes, est lui-
même, d'abord, un lecteur: un lecteur qui déchiffre son propre crime; un
lecteur qui lui-même ne cesse de se prendre au piège de sa propre lecture.
L'originalité subversive des textes de Sophocle et de Japrisot réside, autrement
dit, dans le fait que le détective et le criminel s'avèrent être, dans ces deux
cas remarquables, une seule et même personne \
De même que la narratrice amnésique, Œdipe travaille, lui aussi, à
reconstruire une scène du passé - scène antérieure au début de la narration.
Partant du désir d'éclaircir la vérité du « crime ancien » du meurtre de Laïos,
Œdipe finit par découvrir la vérité de ses origines. Inversement, mais
parallèlement, la narratrice amnésique commence par vouloir éclaircir le mystère
de ses origines, pour découvrir, en cherchant à reconstruire celles-ci, qu'un
meurtre est inséparable de son enquête originelle. L'énigme policière
traditionnelle, « qui est le meurtrier? » (qui a tué Laïos? Qui a allumé l'incendie
et tué la jeune fille brûlée?) se dédouble - ainsi - dans les deux textes par
une autre énigme, qui obscurcit et complique davantage la première : qui est
l'enquêteur? (Qui est Œdipe? Qui est la narratrice?) « Mon nom est Michèle
Isola », dit le je-narrateur de Japrisot, mais l'on pourrait, en changeant de
nom, mettre ces mêmes propos dans la bouche d'Œdipe également : « J'ai
vingt ans; l'histoire que je raconte est l'histoire d'un meurtre; je suis l'enquêteur;
3. Il existe d'autres cas de ce genre - bien que rares dans la littérature policière - où c'est le
détective et, plus généralement, l'instance de la loi et de l'autorité, qui s'avère être à l'origine du
crime. Ces solutions, bien qu'exceptionnelles, voire non traditionnelles, sont pourtant reléguées par
Dorothy Sayers (elle-même, comme on sait, écrivain majeur de la littérature policière) à l'injonction
fondamentale à la tradition du genre, qui veut que le criminel soit « le personnage le plus improbable »
(« the most unlikely person »). « D'autres développements, écrit Sayers, de la formule du personnage
le plus improbable font du coupable un juré dans l'enquête judiciaire ou dans le procès (Robert Orr
Chipperfield, The Man in the Jury-Box); le détective lui-même (Bernard Capes, The Skeleton Key;
Gaston Leroux, Mystère de la chambre jaune, etc.); le procureur de la république (G. K. Chesterton,
The Mirror of the Magistrate, in Innocence of Father Brown); et, dans un suprême effort
d'improbabilité, le narrateur lui-même du récit (Agatha Christie, The Murder of Roger Ackroid). » (Dorothy
Sayers, « Detective Fiction : Origins and Development », in Writing Suspense and Mystery Fiction,
éd. cit., p. 260; je traduis). C'est ainsi à cette catégorie de romans policiers (un sous-genre du genre)
qu'appartiennent Œdipe-Roi et Piège pour Cendrillon. Il importe cependant de noter que, pour
l'impact spécifique de ces deux textes, il faut que la détection nous soit communiquée à la première
personne. De ce point de vue, seul Le Meurtre de Roger Ackroyd, d' Agatha Christie, est structu-
rellement apparenté aux textes qui nous préoccupent; avec, cependant, là encore, une différence
cruciale, qui met à part nos deux textes : alors que le narrateur (le docteur/détectiye/criminel) du
Meurtre de Roger Ackroyd sait tout au long du récit que le criminel, c'est lui-même, et par
conséquent, il ne dupe que les autres (y compris le lecteur), Œdipe et la narratrice amnésique ne
savent réellement pas qui est le coupable, se trouvant, de la sorte, dupes d'eux-mêmes.
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je suis le témoin; je suis la victime; je suis l'assassin; je suis tous les quatre
ensemble, mais qui suis-je? 4? »
Bien qu'à première vue, le meurtre lui-même commis par la jeune fille
n'a apparemment rien à voir avec le parricide œdipien, en réalité, comme
figure narrative (par opposition au simple contenu thématique ou anecdotique),
le meurtre relève de la même structure dramatique et logique : de même
qu'Œdipe, en tuant son père, prend sans le savoir la place du mort - qui est
en même temps une place de roi -, la narratrice, qu'elle soit Mi ou Do, n'a
tué que pour prendre la place de la morte, qu'elle convoite justement comme
une place royale - place de la « princesse » - héritière :
Cela portait un nom : assassinat. C'était avant l'incendie que la vivante avait
voulu prendre la place de la morte! Mi n'ayant aucun intérêt à cette
substitution, la vivante était Do. J'étais la vivante. J'étais Do.
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les deux énigmes traitent de la double question de la place et du changement
de place : parce que les deux énigmes posent la question de la place du sujet
dans un mouvement narratif de déplacement aveugle, et dans une structure
dramatique à positions changeantes, réversibles. Déclenchant le mouvement
de la substitution, la mort ou le meurtre figure la case vide qui fait fonctionner
le système du récit : le récit n'est dès lors lui-même qu'une dynamique de la
substitution qui essaie de comprendre - au sens spatial, c'est-à-dire d'arrêter,
de totaliser, de dire le mouvement de la substitution.
6. Œdipe-roi, traduit par Maurice Véricel, Paris, Bordas, collection « Univers des lettres »,
1970, p. 47. Sauf indication contraire, les références à Œdipe-Roi renverront à cette édition.
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térieur, qu'Œdipe se découvre la cible du coup qu'il destine à l'autre - au
criminel qu'il maudit-, se prenant sans le savoir au piège de sa propre
malédiction, dont il devient la victime. De même, la protagoniste de Japrisot
est prise, elle aussi, au piège de son propre jeu, en devenant à son tour la
cible du coup qu'elle destine à l'autre : l'assassinat par incendie.
La question « qui suis-je? » se complique, de la sorte, de la question « qui
est l'autre?» Combien autre est l'autre? L'autre est-il à l'extérieur ou à
l'intérieur du « je »? Le piègement narratif interne de Finterprète-détective
procède, en effet, chez Sophocle comme chez Japrisot, du fait paradoxal que
l'interprète se découvre lui-même autre qu'il ne croit : soit, comme le « je »
- amnésique, extérieur à sa propre énigme, extérieur à soi; soit, comme le roi
Œdipe, intérieur à l'énigme de l'autre, intérieur à l'autre. Ce que par définition
l'intelligence même de l'interprète toujours méconnaît, c'est sa propre place
par rapport à la case vide de l'énigme. Et c'est au travers, à partir de cette
tache aveugle de l'interprète que s'opère, précisément, le déplacement narratif
des énigmes. Déplacement infini, indéfini; tache aveugle irrémédiable,
symbolisée, chez Sophocle, par les yeux littéralement aveuglés de l'interprète qui
voit - Tirésias au début, Œdipe-Roi à la fin -, et chez Japrisot par la métaphore
(implicitement œdipienne) de la lumière qui aveugle - dès la première phrase
du récit :
II y a tout à coup un grand éclat de lumière blanche qui me crève les yeux.
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question, et mettent en doute, la justesse de l'inculpation d'Œdipe pour le
meurtre de Laïos 7?
En effet, lorsqu'on suit un raisonnement rigoureusement policier - un
raisonnement pour lequel tous les discours, quels qu'ils soient, sont suspects,
et qui scrute la seule logique de l'action pour chercher la consistance des
faits -, on constate que le texte de Sophocle n'établit aucune vérité factuelle
quant au crime qui est en son centre : l'histoire, autrement dit, ne fournit pas
de preuve juridique concluante qui permette de déduire, sans l'ombre d'un
doute, que ce fut effectivement Œdipe qui tua Laïos. Il existe même, à
l'intérieur du récit sophocléen, des contradictions factuelles quant à l'identité
du meurtrier; contradictions que Voltaire, avec sa logique implacable, a été
d'ailleurs le premier à relever : « Ce qui suit », écrit Voltaire, « me paraît [...]
déraisonnable » :
Œdipe demande s'il ne revint personne de la suite de Laïus à qui l'on puisse
en demander des nouvelles; on lui répond « qu'un de ceux qui accompagnaient
ce malheureux roi s'étant sauvé, vint dire dans Thèbes que Laïus avait été
assassiné par des voleurs, qui n'étaient pas en petit, mais en grand nombre ».
Comment se peut-il faire qu'un témoin de la mort de Laïus dise que son
maître a été accablé sous le nombre, lorsqu'il est pourtant vrai que c'est un
homme seul qui a tué Laïus et toute sa suite? [...]
Les Thébains auraient été bien à plaindre, si l'énigme du sphinx n'avait
pas été plus aisée à deviner que toutes ces contradictions 8.
7. Cf. William Chase Grée, « The Murderers of Laïus », in TAPA (60 91929); Karl Harshbarger,
«Laïus'
Who Many
Killed Murderers»,
Laïus? », in Tulane
in Diacritics
Drama(printemps
Review, 9 1978).
(été 1965); et Sandor Goodhart, « Œdipus and
8. Voltaire, « Lettres sur Œdipe » (A M. de Genonville), Lettre III, in Œuvres Complètes. II,
éd. A. Beuchot, Paris, 1877.
36
Jocaste. - Mais c'est bien ce qu'il a dit, sache-le; il ne peut plus dire le
contraire, car la ville entière Ta entendu, et non pas moi seule... [...]
Œdipe. - Tu as raison; mais, malgré tout, envoie quelqu'un chercher ce
travailleur; n'y manque pas.
Jocaste. - Je vais envoyer tout de suite (épisode II, v. 755-862, pp. 70-74).
Ici comme dans Piège pour Cendrillon, « tout s'explique », mais c'est, en
même temps, ce qui s'explique qui, précisément, fait éclater le tout; « tout est
clair », mais c'est précisément l'évidence, la clarté, la « lumière » elle-même
qui est littéralement aveuglante :
Ainsi, tout est clair. Ô lumière, puissé-je maintenant te voir pour la dernière
fois...
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Il y a tout à coup un grand éclat de lumière blanche qui me crève les yeux.
C'est ainsi que, sans s'être prouvé coupable, Œdipe prend la place du coupable :
aveuglé par la lumière de sa filiation à Laïos et se trouvant donc, structurel-
lement, à la place prophétisée du meurtrier de son père, Œdipe anticipe sur
les preuves empiriques et se hâte ^assumer cette place - non pas empirique
mais oraculaire.
Une telle conclusion, on le voit, est tout aussi ambiguë que le dénouement
elliptique, réversible, essentiellement indécidable de Piège pour Cendrillon.
Puisque les contradictions factuelles ne sont pas dissipées à la fin $ Œdipe-
Roi, Œdipe, par rapport à la mort de Laïos, pourrait être non coupable;
comme il pourrait ne pas l'être. Il nous est difficile d'imaginer une innocence
possible d'Œdipe : cependant, en termes de preuves empiriques, en termes de
logique policière, le dénouement de Sophocle n'exclut pas cette hypothèse,
bien qu'Œdipe, lui, l'ait exclue. Le récit a, en d'autres termes, démontré la
capture non pas tant du criminel, que du détective.
L'originalité subversive de Sophocle et de Japrisot réside, autrement dit,
dans le fait qu'ils mettent en scène, tous deux, non seulement un piège pour
le criminel, mais surtout un piège pour le détective. A l'instar de Piège pour
Cendrillon, Œdipe-Roi, lui aussi, est avant tout la tragédie de l'interprète,
c'est-à-dire, le roman policier du piègement du détective.
En effet, si les deux récits policiers écrivent le piègement du détective,
ce n'est pas simplement en tant que le détective est peut-être lui-même le
criminel - que l'interprète est lui-même un coupable -, mais en tant que le
détective est plus radicalement subverti en son désir même de détective, voire
en son désir d'interprète : le désir de produire la fin de la quête, c'est-à-dire,
la vérité, la certitude du savoir absolu. Or, ce qui tranche le dénouement, ce
qui arrête l'enquête, chez Sophocle comme chez Japrisot, ce n'est pas la
complétude cognitive du savoir ou de la vérité, mais la décision performative
d'un jugement non fondé, le décret d'un verdict non adéquat aux faits. Ainsi,
chez Japrisot, si la détenue est Mi, elle est seule responsable du meurtre de
son amie brûlée; si elle est Do, elle partage la responsabilité avec Jeanne. Et
elle est, à elle seule, responsable du meurtre de Serge Reppo. Or, quelle que
soit la solution, le verdict est injuste : puisque c'est Jeanne qui, par amour, se
dénonce et prend sur elle la culpabilité, le verdict - comme l'amour - est
aveugle :
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Condamnée à trente ans de la même peine, Jeanne Murneau, par un réflexe
habituel, lui fit doucement baisser le bras et lui dit quelques mots en italien.
Ainsi, le verdict est produit, à la fois chez Sophocle et chez Japrisot, non à
l'intérieur, mais à l'extérieur de la case vide de la vérité : non à l'intérieur,
mais à l'extérieur de l'énigme policière, dont la structure narrative est
dramatisée, par les deux écrivains, comme radicalement interminable.
10. Cf.: «Le détective lui-même, ou l'un des enquêteurs officiels, ne devrait en aucun cas
s'avérer être le malfaiteur. » (S. S. Van Dine, « Twenty Rules for Writing Detective Stories », in
Writing Suspense and Mystery Fiction, éd. cit., p. 267; je traduis.)
11. Freud, L'Interprétation des rêves, chapitre V, traduction française par I. Meyerson, Paris,
P.U.F., 1971, p. 228; traduction entièrement modifiée.
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c'est à la structure narrative et dramatique de l'action de la pièce - au ressort
dramatiquement, spécifiquement policier du suspense - que Freud s'attache,
pour suggérer leur analogie structurale avec le « travail », le « procès », le
fonctionnement d'une psychanalyse.
En effet, la structure énigmatique du roman policier peut être comprise
comme l'emblème de l'énigme de l'inconscient : si le savoir du criminel
emblematise le savoir inconscient dont le propre est de chercher à échapper
à la détection, la victoire du détective, en revanche, est la victoire même de
la conscience. Or, en subvertissant à la fois la frontière et l'opposition entre
le détective et le criminel, Japrisot et Sophocle textualisent la subversion de
la limite qui sépare la conscience de l'inconscient. L'inconscient ne s'oppose
pas à la conscience de l'extérieur : il la traverse, l'habite de l'intérieur. Le
piègement du détective ne symbolise, dès lors, rien d'autre que la subversion
même de la conscience.
Le génie de la forme policière chez Sophocle comme chez Japrisot nous
montre, ainsi, en quel sens il faut prendre la suggestion de Freud, selon laquelle
la structure de suspense œdipien ressemble à une psychanalyse : comme le
procès d'une psychanalyse, le roman policier n'est en fait rien d'autre que le
récit du déplacement de la tache aveugle de l'interprète; le récit de l'auto-
subversion de l'interprétation.
Le récit analytique
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J'appellerai désormais ce récit policier dont la logique narrative est fondée
sur sa propre auto-subversion - voire sur la subversion de la conscience du
détective, comme de la maîtrise du lecteur - le récit analytique. C'est le type
de récit que racontent, d'une part, Japrisot et Sophocle, mais aussi, d'autre
part, Freud lui-même, en tant qu'il se fait détective des rêves, en tant qu'il
raconte sa lecture é'Œdipe-Roi à partir de cette position singulière de policier
de son propre sommeil. Et c'est aussi le même type narratif de récit policier
d'auto-subversion - de piègement du lecteur-détective - que fait Lacan,
lorsqu'il prend à son tour la position du lecteur-détective de La Lettre volée
de Poe, et lorsque à partir de cette position il ne laisse pas d'insister sur la
fin auto-subversive de l'histoire, sur le fait que Dupin - « l'analyste » - détective
- est sans le savoir piégé, précisément, par sa propre victoire, par la lettre
énigmatique qu'il croit posséder, alors qu'elle le possède u.
Je dirai donc que le récit analytique est, structurellement, l'histoire non
pas tant de la solution, que de la leçon, de l'énigme. En effet, la lumière de
l'énigme, telle que la psychanalyse en procède - la leçon de l'énigme, telle
que la psychanalyse l'illumine - est avant tout la leçon structurale des
conséquences théoriques inédites d'une certaine modalité narrative : une leçon
qui elle-même ne peut s'articuler comme sens propre ou comme un message
immédiat, mais seulement comme le procès narratif d'une pratique temporelle,
discursive, de suspense: comme le procès narratif, autrement dit, d'une
découverte dont le propre est d'être entièrement dépendante des modes mêmes
de sa suspension, dont, paradoxalement, elle procède. Si le suspense est, en
d'autres termes, ce que la psychanalyse - comme le souligne Freud - a
structurellement en commun avec la figure narrative de la révélation œdipienne
(« l'action de la pièce n'est autre chose qu'un procès de révélation tissée
d'astucieux retardements et d'une excitation croissante, un procès que l'on
peut comparer au travail d'une psychanalyse.. »), c'est dans la mesure où cette
révélation, sous la figure même de ce « procès » dont elle est inséparable,
révèle, avant tout, la nature radicale du suspense en tant que tel : le suspense
comme la suspension de la présence à soi du récit; le suspense comme le
corollaire narratif de l'inconscient du lecteur en tant que condition du récit,
l'habitant de l'intérieur; le suspense, en d'autres termes, comme la suspension
radicale de la possibilité théorique (et non simplement empirique) de la
totalisation du savoir narratif ou interprétatif. « Les éléments ne répondent
pas là où on les interroge », dit Lacan, en reformulant, comme une intuition
psychanalytique, le principe dit « d'incertitude » de la physique moderne 13;
12. Cf. Jacques Lacan, «Le Séminaire sur La Lettre volée», in Écrits, Paris, Seuil, 1966,
notamment pp. 39-41.
13. «C'est à quoi se ramène le principe d'Heisenberg. Quand on peut préciser un des points
du système, on ne peut formuler les autres. Quand on parle de la place des électrons, quand on leur
dit de se tenir là, de rester toujours à la même place, on ne sait plus du tout où en est ce que nous
appelons couramment leur vitesse. Inversement, si on leur dit - eh bien, entendu, vous vous déplacez
tout le temps de la même façon -, on ne sait plus du tout où ils sont. » J. Lacan, Le Séminaire,
livre II, Le Moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse, Paris, Seuil,
1978, p. 281.
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mais c'est exactement le principe textuel, la loi narrative originale du récit
analytique, tel que l'illustrent, précisément, Œdipe-Roi et Piège pour Cen-
drillon : « Les éléments ne répondent pas là où on les interroge. Plus
exactement, si on les interroge quelque part, il est impossible de les saisir dans
l'ensemble l4. »
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