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COURS
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COURS

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collection

DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX,


DU PACS ET DU CONCUBINAGE
LMD COURS

U
2018 Collection dirigée par Bernard BEIGNIER

DROIT DES RÉGIMES


Le droit de la famille, au plein sens du terme, ce n’est pas seulement le droit des
personnes (couple et enfants) mais aussi celui du patrimoine. Celui-ci se subdivise,

DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX,


traditionnellement, en droit des régimes matrimoniaux et en droit des successions
et libéralités.
Mais le mariage n’est plus le seul mode de vie en couple. Il faut compter avec le pacte
MATRIMONIAUX,

DU PACS ET DU CONCUBINAGE
civil de solidarité (PACS) sans oublier que nombre de couples vivent, simplement, en
concubinage. Se restreindre aux seuls régimes matrimoniaux reviendrait à omettre,

DU PACS
quasiment, la moitié des familles.

O
En outre, à l’heure où les frontières ne sont plus guère (du moins en Europe) que
des traits sur une carte, il est nécessaire d’avoir une vue, même sommaire, du droit

ET DU CONCUBINAGE
régissant les couples comportant un élément international.
Ce droit va donc en se diversifiant et en se complexifiant. Il n’en est que plus riche et
plus passionnant aussi. C’est le droit de la vie ordinaire.

C
Cette législation a la réputation d’être un droit « chiffré » qui ne se comprend que par
la maîtrise de cette technique parfois rude qu’est la liquidation. Raison pour laquelle • Droit interne • Droit international privé
l’ouvrage comporte de nombreux exercices d’initiation allant du plus simple au plus
complet. Le but étant, principalement, que tout étudiant sache lire et comprendre
• Cours & schémas
une liquidation en bonne et due forme. • Exercices progressifs de liquidation
Bernard BEIGNIER est professeur des Universités, Institut de droit privé EA-1920,

B. BEIGNIER
S. TORRICELLI-CHRIFI
doyen honoraire de la Faculté de droit et de science politique de l’Université Toulouse
1 Capitole. Il est actuellement recteur de l’Académie d’Aix-Marseille et recteur de la
région académique Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Bernard BEIGNIER
Sarah TORRICELLI-CHRIFI est maître de conférences à l’Université Toulouse 1
Capitole, Institut de droit privé EA-1920. Sarah TORRICELLI-CHRIFI

LMD
Édition 2018

COURS
www.lextenso-editions.fr
ISBN 978-2-275-06062-0 35 € & TD
COURS - droit des regimes matrimoniaux - 6e ed-Dos 19 mm.indd 1 22/08/2018 10:39
1er exercice
Cas pratique
Jacques et Isabelle sont mariés depuis 20 ans et n’ont pas fait précéder leur union d’un
contrat de mariage. Depuis, ils sont installés dans un appartement rue du Taur à Toulouse
qu’ils louent. Aujourd’hui, à la suite de difficultés conjugales, ils se sont séparés.
1. Jacques a quitté le domicile conjugal. Isabelle doit faire face à différentes difficultés
financières. Elle vient vous consulter pour savoir si Jacques, récemment licencié, est
tenu de participer au paiement du loyer, de la taxe d’habitation et de l’impôt sur le
revenu. Face à l’insolvabilité éventuelle de son époux, doit-elle payer seule ces dettes
qu’ils partageaient jusqu’alors par moitié ?
2. En outre, Jacques a contracté divers petits emprunts auprès d’organismes de crédit. Il
aurait emprunté 2 500 euros afin d’acquitter une dette de traiteur, à la suite d’une récep-
tion qu’il a donnée pour son quarantième anniversaire. Il a également emprunté
4 500 euros pour acheter une voiture d’occasion. Isabelle risque-t-elle d’être inquiétée par
les créanciers de Jacques ?

Proposition de corrigé
Jacques et Isabelle se sont mariés, il y a vingt ans (c’est-à-dire en 1987), sans faire
précéder leur union d’un contrat de mariage. En application des articles 1393 et 1400
du Code civil, ils se voient alors imposer le régime légal de la communauté d’acquêts
issu de la loi du 13 juillet 1965, entrée en vigueur le 1er février 1966 et régi par les arti-
cles 1400 et suivants du Code civil.
En outre, les époux vont voir s’appliquer à leur union, l’ensemble des règles du régime
primaire, en vertu de l’article 226 du Code civil. Ces dernières sont d’ordre public, on ne
peut donc y déroger par convention. Le régime primaire énoncé aux articles 212 à 226
du Code civil est un effet direct du mariage, ce dernier venant lui imprimer son carac-
tère d’ordre public.
Plusieurs questions patrimoniales se posent à ce couple en proie à la dispute. Jacques
est parti du domicile conjugal. Quelle incidence a ce départ sur le jeu normal des
régimes matrimoniaux ? Enfin, Jacques a réalisé plusieurs emprunts. Isabelle pourra-t-
elle se voir obligée par des contrats passés auxquels elle demeure étrangère ?

I. L’incidence de la séparation de fait sur les différentes dettes


Les obligations imposées par le mariage durent autant que dure celui-ci. Ainsi, elles ne
prendront, en principe fin, qu’à compter de la dissolution du mariage soit par le décès
de l’un des époux soit enfin par le divorce légalement prononcé (art. 227 C. civ.).
Cependant, dans l’hypothèse de la dissolution du mariage par divorce, la loi permet de
déplacer la date de certains effets patrimoniaux du divorce. Ainsi, l’article 262-1 du Code
civil, fait varier cette date selon le divorce choisi ou imposé par les époux. Mais notons
immédiatement que ce contrôle du temps n’a d’effet qu’entre les époux. Dès lors les
tiers, ne peuvent, en principe, se voir imposer les choix des époux dans leurs rapports

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Exercices d’apprentissage

avec ces derniers. En effet, conformément à l’article 262 du Code civil, le jugement de
divorce est opposable aux tiers, en ce qui concerne les biens des époux à partir du jour
où les formalités de mention en marge de l’état civil ont été accomplies. En l’espèce, il
n’est fait mention que d’un départ volontaire de Jacques du domicile conjugal sans autre
précision. Les époux sont par conséquent simplement séparés de fait, ce qui est sans
incidence sur le fonctionnement de leur régime matrimonial.

A. Le paiement du loyer
Le loyer visé est celui du logement de famille. Or Jacques ayant quitté le domicile
conjugal, on peut encore s’interroger sur le point de savoir si ce local peut encore rece-
voir la qualification de logement de famille.
Il faut envisager le rapport de Jacques au loyer sous deux angles : d’une part vis-à-vis
du propriétaire et d’autre part dans le rapport avec son épouse.

1. L’obligation à la dette
Le rapport d’obligation entre un époux et un tiers doit être qualifié de rapport d’obliga-
tion à la dette.
Or le régime primaire prévoit, à l’article 220 du Code civil, une règle fondamentale
concernant l’obligation à la dette : l’obligation solidaire aux dettes ménagères.
L’alinéa 1er de cet article, outre une règle de pouvoir, donne la définition de la dette
ménagère. Celle-ci a pour objet soit l’entretien du ménage soit l’éducation des enfants.
La dette ménagère peut avoir soit une origine légale (exemple : cotisation sociale) soit
une origine conventionnelle.
La dette de loyer est-elle une dette ménagère ?
Pour la Cour de cassation, le loyer d’un couple marié doit recevoir la qualification de
dette ménagère en ce qu’il participe à l’entretien du ménage en permettant au couple
marié de vivre sous le même toit (Cass. 3e civ., 2 février 2002, pourvoi no 97-18924 ;
Cass. 1re civ., 13 oct. 1992, pourvoi no 90-18404). Il ressort d’une jurisprudence désormais
constante de la Cour de cassation, que la dette de loyer engendre la solidarité des
époux, y compris dans l’hypothèse où un des époux serait parti du local loué (avec une
autorisation judiciaire ou sur séparation de fait) :
« Vu les articles 220, 262 et 1751 du Code civil ; Attendu que les époux, cotitulaires du bail du
local servant à leur habitation, sont tenus solidairement du règlement du loyer et des
charges ; que le jugement de divorce est opposable aux tiers, en ce qui concerne les biens
des époux, du jour où les formalités de publicité prescrites par les règles de l’état civil ont
été accomplies ; Attendu que, pour débouter X (le bailleur) de sa demande à l’encontre de
Mme Y... pour la période antérieure à la transcription du jugement de divorce, l’arrêt, après
avoir relevé que Mme Y... a été autorisée à résider séparément de son mari par ordonnance
de non-conciliation du 28 février 1983 et qu’elle a effectivement résidé séparément dès le
11 décembre 1982, retient que, X (le bailleur) ne pouvant ignorer le départ de Mme Y... des
lieux loués à cette date, sa demande en paiement à l’encontre de celle-ci pour des termes
de loyers postérieurs à ce départ est mal fondée ; Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé
les textes susvisés » (Cass. 2e civ., 3 oct. 1990, pourvoi no 88-18453).

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DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX, DU PACS ET DU CONCUBINAGE

Il convient de noter qu’il importe peu que le bail se voit appliquer l’article 1751 du Code
civil.
Ainsi, concernant une dette de loyer, la solidarité des dettes ménagères énoncée à
l’article 220 alinéa 1er du Code civil, peut déployer ses effets et ce jusqu’à ce que la
dissolution du mariage soit opposable aux tiers.
L’effet de cette qualification de dette ménagère est d’entraîner la solidarité des époux
dans le paiement de la dette. Cette conséquence permet alors au bailleur de demander
l’entier paiement à n’importe lequel des époux. De manière générale, il assignera les
deux époux afin de les voir condamner solidairement. Tous les biens du couple se trou-
vent alors engagés par ce type de dette solidaire, en application combinée des arti-
cles 1413 et 220 du Code civil. Ainsi l’époux non lié contractuellement au bailleur va se
voir imposer un rapport d’obligation qui découle de la loi et non du contrat. Jacques
peut par conséquent devoir le paiement du loyer du domicile conjugal.

2. Le rapport contributif
Une fois le bailleur désintéressé, l’époux qui aura payé la dette en son entier pourra
demander une contribution à l’autre, nous passons alors du rapport d’obligation à la
dette à celui de la contribution à la dette.
La séparation de fait n’a ici encore aucune incidence sur l’application du régime
primaire.
L’article 214 du Code civil est relatif à la contribution aux charges du mariage. Cet
article règle un rapport patrimonial entre les époux, aucun tiers n’intervient alors.
La dette de loyer peut-elle être qualifiée de charge du mariage ?
Nous relèverons que la loi ne donne aucune indication quant au contenu de ces charges.
Cette notion doit être entendue plus largement que celle de dette ménagère. Il s’agit de
l’ensemble des dépenses voulues par le couple marié, à l’intérieur desquelles nous
retrouvons nécessairement les dettes ménagères de l’article 220 du Code civil. Ainsi
des dépenses de loisirs, d’agrément, de vacances sont qualifiées de charges du mariage
(Cass. 1re civ., 20 mai 1981, Bull. civ. I, no 176). En ce sens, la doctrine et la jurisprudence
s’accordent à dire que les dépenses de nourriture, de logement, d’habillement sont des
charges du mariage. Ainsi à ce titre, la dette de loyer doit être regardée comme une
charge du mariage.
La loi nous invite, dans un premier temps, à rechercher si les époux n’ont pas réglé
cette délicate question au sein du contrat de mariage. À défaut, l’article 214 du Code
civil, intervient à titre supplétif dans un second et dernier temps. Si les époux n’ont rien
prévu dans leur contrat de mariage quant à la contribution à la dette, celle-ci est réglée
en fonction des facultés respectives des époux, c’est-à-dire en fonction de leurs
revenus. En l’espèce, aucun contrat de mariage n’a été signé entre les époux. Ces
derniers peuvent convenir des modalités de cette répartition par une convention
distincte du contrat de mariage (Cass. 1re civ., 3 février 1987, JCP N 1988.II, p. 65, note
P. Simler). Un accord tacite pourrait être considéré comme valable. En l’espèce une
habitude du couple, qui peut revêtir le caractère d’un accord tacite entre eux, permettait
de répartir à égalité les charges du mariage. Toute la difficulté sera pour Isabelle de
prouver l’existence de cette convention tacite en justice. Dès lors, nous appliquerons

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Exercices d’apprentissage

les dispositions supplétives énoncées : les époux participent à la contribution à la dette


en fonction de leurs facultés respectives. Jacques ne travaille plus et Isabelle semble
être la seule personne du couple véritablement solvable, sauf à considérer que
Jacques recevrait une forte indemnité de licenciement. Par conséquent Isabelle suppor-
tera probablement à titre définitif le poids de cette dette puisque ne pouvant rien
demander à Jacques.

B. La taxe d’habitation et l’impôt sur le revenu


Nous suivrons la même logique qui consiste en premier lieu à désintéresser les tiers,
en l’espèce l’administration fiscale, avant, en second lieu, d’analyser le rapport entre
époux sur ces différentes dettes.

1. L’obligation à la dette
Concernant la taxe d’habitation, l’article 1408-I du Code général des impôts énonce que
cette taxe est établie au nom des personnes qui disposent ou jouissent de locaux impo-
sables. Dès lors cette dette est personnelle. Seul sera redevable, l’époux qui jouira ou
disposera du local imposable. En l’espèce, le local est loué, il convient alors d’écarter
l’option concernant la disposition pour ne retenir que celle de la jouissance. À la
lecture du thème, il ressort que seule Isabelle jouit du local, Jacques ayant abandonné
le logement familial. Ainsi la taxe d’habitation sera une dette personnelle à Isabelle.
Cette taxe ne peut dès lors recevoir la qualification de dette ménagère. Le mécanisme
de solidarité à la dette énoncé à l’article 220 du Code civil, ne peut être mis en œuvre.
En ce sens, l’article 1685, 1o du Code général des impôts précise que chacun des époux,
lorsqu’ils vivent sous le même toit, est solidairement responsable des impositions
assises au nom de son conjoint au titre de la taxe d’habitation. Or les époux ne vivent
plus sous le même toit, la solidarité énoncée par le Code général des impôts ne peut
trouver à s’appliquer au cas d’Isabelle et de Jacques. En conséquence, Jacques ne
peut être tenu solidairement au paiement de la taxe d’habitation.
Concernant l’impôt sur le revenu, le droit fiscal pose pour fondement à l’obligation à la
dette que chaque époux est tenu solidairement au paiement de l’impôt sur le revenu
(art. 1685-2o CGI). Cette solidarité découle du principe fiscal selon lequel les personnes
mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par
chacune d’elles et ceux de leurs enfants (art. 6-1o CGI). Cependant cette solidarité peut
cesser si les époux établissent une déclaration séparée. Le droit fiscal permet ainsi
d’aboutir à des impositions distinctes dès lors qu’il y a eu abandon du domicile conjugal
par l’un ou par l’autre des époux et que chacun dispose de revenus distincts (art. 6-
4o CGI). Il appartient dès lors soit à Jacques, qui a quitté le domicile conjugal, soit à
Isabelle de faire connaître à l’administration fiscale, la date de la séparation de
fait. Ainsi la solidarité fiscale prendra fin.
Il est à noter que les textes du Code général des impôts sont d’ordre public, tout comme
l’article 220 du Code civil, siège de l’obligation à la dette ménagère. La question se pose
alors de savoir quel ordre public faire prévaloir ? Au vu de la doctrine, il semble qu’il
faille faire rejoindre ces deux ordres publics sur cette même question. Cette dette est-
elle vraiment une dette ménagère au sens de l’article 220 alinéa 1er du Code civil ? En

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DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX, DU PACS ET DU CONCUBINAGE

l’absence d’arrêt précis sur ce point, nous considérerons que la dette concernant l’impôt
sur le revenu est une dette ménagère entraînant la solidarité entre les époux. Cette soli-
darité ne pourra prendre fin qu’à compter de la déclaration de la séparation de fait à
l’administration fiscale. À cet instant le droit fiscal ne considérant plus la dette comme
solidaire, nous pourrons alors disqualifier celle-ci en lui retirant au même instant sa
qualification ménagère. Nous pourrions ainsi retenir sa qualification de dette ménagère,
en ce sens qu’elle participerait à l’entretien du ménage, lui évitant toute poursuite sur
un plan fiscal pour fraude, non-déclaration des revenus, qui engendrerait nécessaire-
ment des sanctions financières qui porteraient atteinte à la solvabilité du couple et par
là même nuiraient à son entretien.

2. La contribution à la dette
La taxe d’habitation est une dette personnelle d’Isabelle. Ainsi l’article 214 du Code civil,
relatif aux charges du mariage n’a pas vocation à régir cette situation. Isabelle ne
pourra demander une contribution à son mari quand elle aura payé la taxe d’habitation
auprès de l’administration fiscale. Il y a donc un principe de solidarité énoncé par le
droit fiscal.
L’impôt sur le revenu est-il une charge du mariage ? Au vu d’un arrêt de la première
chambre civile de la Cour de cassation rendu le 22 février 1978, l’impôt sur le revenu
constitue la charge directe des revenus personnels d’un époux, étrangère à la vie fami-
liale et ne figure pas au nombre des charges du mariage auxquelles les deux époux
doivent contribuer. Dans cette hypothèse, il importe de relever que le couple était placé
sous un régime de séparation de biens, ce qui n’est pas le cas pour Isabelle et Jacques
mariés sous le régime de la communauté légale réduite aux acquêts. Cet arrêt a été
confirmé en 2002 (Cass. 1re civ., 5 mars 2002 : Dr. famille 2002, no 116). La même forma-
tion de la Cour de cassation a retenu une solution différente pour des époux communs
en biens. La Haute Juridiction a considéré que l’impôt sur le revenu était partie inté-
grante du passif définitif de la communauté et qu’à ce titre il était une charge du
mariage puisqu’étant une charge des revenus dont profite la communauté
(Cass. 1re civ., 19 févr. 1991). Ainsi deux solutions diamétralement opposées semblent se
dessiner selon que les époux sont sous un régime séparatiste ou communautariste.
Pour demeurer dans la logique que nous avions envisagée, il y a tout lieu de considérer
cette dette comme une charge du mariage dès lors que nous l’avons qualifiée de dette
ménagère. En effet, une dette ménagère est nécessairement une charge du mariage. A
contrario dès lors que les époux auront déclaré leur séparation de fait à l’administration
fiscale, la dette ménagère s’éteindra pour laisser la place à une dette personnelle. À ce
même instant, nous pouvons considérer que la dette n’est plus une charge du mariage.
Dans l’hypothèse où nous serions en présence d’une charge du mariage, il reviendrait
sûrement à Isabelle d’en supporter le poids à titre définitif puisque Jacques ne travaille
pas et ne peut dès lors contribuer.

II. Les différents emprunts


Concernant les emprunts vus sous le jour du régime primaire, il y a lieu de se référer à
l’article 220 du Code civil, puisqu’Isabelle souhaite savoir si un créancier peut l’inquiéter.

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Exercices d’apprentissage

Nous sommes alors dans un rapport entre un époux et un tiers, c’est-à-dire dans un
rapport d’obligation à la dette.
Sommes-nous en présence de dettes ménagères ? L’article 220 alinéa 1er pose la défini-
tion de la dette ménagère comme étant celle qui vise l’entretien du ménage ou l’éduca-
tion des enfants.
La dette de 2 500 euros que réclame le traiteur ne semble pas rentrer dans ces critères
car elle ne vise ni l’entretien du ménage ni l’éducation des enfants. Peu importe d’ail-
leurs, qu’elle ait été réalisée à l’occasion de l’anniversaire de Jacques. Il s’agit d’une
simple dépense d’agrément et non d’une dépense nécessaire. Cette dette ne pouvant
être qualifiée de dette ménagère, elle n’entraînera pas de solidarité entre les époux.
Ainsi, aucun lien d’obligation ne va naître entre Isabelle et le traiteur. Ce dernier ne
pourra se retourner que contre Jacques avec qui, il est contractuellement tenu. Ainsi
Isabelle n’aura pas à payer la dette du traiteur.
Concernant la dette de 4 500 euros pour acheter le véhicule, il convient de répondre à la
même problématique. La jurisprudence et la doctrine hésitent sur ce point même si
l’opinion dominante tend à considérer que cette dette ne peut être considérée comme
ménagère (voir Cass. 1re civ., 27 nov. 2001, Bull. civ. I, no 294 ; Douai 25 mars 1999,
JCP 2000.I.245, no 6 ; Paris, 9 mars 1998, JCP N 1991.II.57, obs. P. Simler). Nous pouvons
cependant imaginer que le véhicule pourrait permettre l’entretien du ménage s’il venait
à servir à l’un des époux pour se rendre à son travail ou pour aller chercher les enfants.
Dès lors Isabelle serait tenue solidairement à la dette à moins de démontrer qu’une des
exceptions à l’alinéa 1er, trouve à s’appliquer.
L’article 220 du Code civil pose à l’alinéa 1er le principe de la solidarité pour les dettes
ménagères. Or aux alinéas 2 et 3, l’article 220 énonce deux exceptions, indépendantes
l’une de l’autre, qui vont permettre d’exclure la solidarité. Ainsi dans l’hypothèse où
l’une de ces exceptions trouverait à s’appliquer, la dette demeurerait ménagère mais
non solidaire.
L’alinéa 2 de l’article 220 du Code civil énonce : « La solidarité n’a pas lieu, néanmoins,
pour des dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à
l’utilité ou à l’inutilité de l’opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant ».
Afin de savoir si la dépense peut être qualifiée de manifestement excessive, la loi pose
un faisceau d’indices qu’il importe de vérifier. Les éléments du cas pratique sont insuffi-
sants pour nous permettre de savoir si la dette est utile ou pas au couple, si elle corres-
pond à son train de vie, ses revenus habituels et enfin si le tiers est de mauvaise foi. Les
seuls indices que nous puissions exploiter sont d’une part le fait que Jacques se
retrouve sans travail et d’autre part que le véhicule soit acheté d’occasion. Il semble
délicat sur ces seuls fondements de se fonder sur l’alinéa 2 pour exclure la solidarité.
Passons alors à l’étude de la deuxième exception posée à l’alinéa 3.
Aux termes de l’alinéa 3 : « Elle (la solidarité) n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont été
conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les
emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires
aux besoins de la vie courante ». Nous ne sommes pas dans le cadre d’un achat à
tempérament car ceux-ci ne visent que les achats où le prix est payable par fractions
échelonnées. Il s’agissait alors d’un emprunt qui tombait sous le coup de l’alinéa 3. Il
convient de noter tout d’abord la règle de pouvoir posée par cet alinéa et qui est en

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opposition totale avec l’alinéa 1er du même article. En effet, pour les emprunts, les deux
époux se doivent de contracter ensemble pour que la solidarité soit engagée et ce,
quand bien même il s’agirait d’une dette ménagère. Rappelons que l’alinéa 1er prévoyait
quant à lui la possibilité pour chaque époux de contracter seul une dette ménagère qui
pouvait entraîner la solidarité quant à l’obligation à la dette. Ainsi, puisque Jacques n’a
pas contracté avec Isabelle, cette dette devrait être considérée comme ménagère mais
non solidaire.
Or l’alinéa 3 prévoit une exception à l’exception en considérant que l’emprunt contracté
par un époux seul, peut entraîner la solidarité si cet emprunt porte sur des sommes
modestes nécessaires au besoin de la vie courante. Nous pourrions considérer que la
somme de 4 500 euros n’est peut-être pas une somme modeste. Il convient d’insister
sur le fait que l’appréciation se fait, in concreto, selon les revenus du couple. Jacques
vient de perdre son emploi, la somme de 4 500 euros peut alors revêtir un caractère
important pour le couple. Enfin cet emprunt est-il nécessaire aux besoins de la vie
courante ? Cette notion sera laissée à l’appréciation souveraine des juges du fond.
Dans les travaux parlementaires qui ont servi de base à la modification de cet alinéa, il
était prévu que ce type d’emprunt ne pouvait être réalisé qu’afin d’éviter les fins de mois
difficiles, mais sûrement pas pour des opérations d’investissement. Ainsi, il est probable
que l’emprunt de Jacques pour l’acquisition du véhicule ne soit pas considéré comme
modeste et nécessaire aux besoins de la vie courante. Dès lors puisque l’emprunt a
été passé seul, par Jacques, la solidarité ne joue pas. Isabelle ne sera sans doute pas
tenue de payer l’emprunt, contracté par Jacques, pour l’acquisition du véhicule.

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des traits sur une carte, il est nécessaire d’avoir une vue, même sommaire, du droit

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plus passionnant aussi. C’est le droit de la vie ordinaire.

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