Você está na página 1de 19

Langages

Les verbes faire, laisser, voir, etc


Ronald W. Langacker

Citer ce document / Cite this document :

Langacker Ronald W. Les verbes faire, laisser, voir, etc. In: Langages, 1ᵉ année, n°3, 1966. Linguistique française. Le verbe et
la phrase. pp. 72-89;

doi : https://doi.org/10.3406/lgge.1966.2345

https://www.persee.fr/doc/lgge_0458-726x_1966_num_1_3_2345

Fichier pdf généré le 02/05/2018


R. W. LANGACKER

LES VERBES FAIRE, LAISSER, VOIR, etc.

1. Les objectifs de cet article sont très limités. Je n'ai pas


l'intention de présenter une description complète de la syntaxe
des verbes faire, laisser, voir, entendre, sentir, etc. Je veux
simplement décrire certains mécanismes de base qui joueraient un rôle
essentiel dans une telle description. L'analyse, je l'espère, sera
approfondie plutôt qu'exhaustive. On écartera donc toutes sortes
de complications pour examiner les cas les plus simples, où ces
mécanismes se voient le plus clairement.
Deux questions théoriques assez intéressantes vont se poser
•au cours de cette discussion. L'une se rapporte à la suggestion
faite par Noam Chomsky qu'une phrase ambiguë syntaxiquement
doit être pourvue par la grammaire de deux structures différentes
(au moins). Autrement dit, la grammaire generative d'une langue
doit rendre compte de l'aptitude du sujet parlant à comprendre une
phrase donnée d'au moins deux manières, laissant à part la
possibilité d'ambiguïté lexicologique. Par exemple, puisque (1) est
ambiguë, une grammaire complète du français devrait engendrer
cette phrase de deux manières :

(1) Je ferai porter la lettre à Marie.

Il y a vraiment deux phrases ayant la structure superficielle (1).


La première serait dérivée d'une structure pareille à celle qui est
à la base de (2); la deuxième, d'une structure pareille à celle qui
est à l'origine de (3).

(2) Je ferai porter la lettre par Marie.


(3) Je ferai porter la lettre à Marie par le messager.

Par extension de cette condition qu'a proposée Chomsky, on exige


qu'une phrase non ambiguë ne soit engendrée que par l'application
73

d'une seule série de règles. Nous allons rencontrer un cas où, pour
satisfaire à cette exigence théorique, il faudrait compliquer la
grammaire.
La deuxième question théorique qui se pose concerne les
phrases au sujet desquelles on ne peut pas arriver à un jugement
définitif de grammaticalité. Pour prendre un exemple spécifique,
(4) est certainement correcte, tandis que (5) est douteuse.

(4) Je lui ferai examiner la maison.


? (5) Je le ferai examiner la maison.

Pour celui qui accepte ou rejette la phrase (5) sans aucune


hésitation, il n'y a pas de problème : la description de son dialecte
doit comprendre (5) ou non, selon le cas. Mais pour celui qui ne
sait tout simplement pas si (5) est correcte, le problème devient
intéressant. Comme dans n'importe quelle science, les données ne
sont jamais sans erreurs, sans cas douteux. Les phénomènes observés
sont d'habitude trop variés, trop nombreux pour qu'ils nous
mènent d'eux-mêmes à une théorie acceptable qui en rende compte.
Au contraire, il faut une théorie pour organiser les données, pour
juger quels phénomènes sont importants et lesquels sont plutôt
périphériques. Ceci vaut évidemment pour la linguistique
descriptive. S'il y a beaucoup de phrases douteuses du genre de (5), il
existe un ensemble de cas clairs, de suites de mots qui sont ou
grammaticales ou non grammaticales sans aucun doute. On peut
donc écrire une grammaire (une théorie des phrases bien formées
d'une langue) pour rendre compte correctement de ces cas clairs.
La description accomplie, on peut l'employer pour juger les cas
douteux. Par exemple, si les règles les plus simples pour les phrases
clairement grammaticales énumèrent (5) aussi bien que celles-ci,
nous pouvons conclure que (5) est grammaticale. Sinon, nous
pouvons conclure que (5) est incorrecte.
2. On commence par adopter une série de règles syntagma-
tiques bien simplifiées. Elles décrivent une structure syntagmatique
de base qui suffît à notre analyse transformationnelle. Cette
structure abstraite doit être formulée de telle sorte que les
transformations, qui produisent les structures dérivées qu'interprète la
phonologie, soient aussi simples que possible; une transformation
sert à convertir un « arbre syntagmatique » en un « arbre
syntagmatique dérivé ».
Contentons-nous de dire qu'une phrase (P) est constituée d'un
syntagme nominal (SN) et d'un syntagme verbal (SV).
74

(RSI) P > SN + SV

Par exemple, dans (6), je est le syntagme nominal tandis que le


syntagme verbal, c'est donne les renseignements à Marie.

(6) Je donne les renseignements à Marie.

Nous divisons le syntagme verbal en un auxiliaire (AUX)


et un verbe principal.

(RS2) SV > AUX -f- VP

L'auxiliaire se compose d'un indicateur de temps et de personne


(TMPS).
(RS3) AUX > TMPS

Dans une description plus comprehensive, il faudrait inclure aussi


le choix facultatif de avoir -f- é ou de être -f- é, é étant l'élément
qui forme le participe passé du verbe qui le suit К
Le verbe principal comprend le verbe (V) et trois éléments
facultatifs 2.

(RS4) VP > V (SN) (à+SN) (COMP)

Le premier syntagme nominal est l'objet direct. La suite à + SN,


c'est l'objet indirect. Le complément (GOMP) domine un symbole
abstrait (c) qui marque l'endroit où une transformation va insérer
une phrase subordonnée.

(RS5) COMP > с

Finalement, en ce qui concerne le syntagme nominal, nous


dirons simplement qu'il peut être constitué par l'article défini plus
un nom (N), par un pronom (PRON), ou par un nom propre
(PROPRE).
le + N
(RS6) SN PRON
PROPRE
D'après (RS1-RS6), la structure de base de (6) est la
suivante (I).

1. Cf. l'analyse de l'auxiliaire anglais proposée par Chomsky dans Syntactic


Structures (Mouton, 1957).
2. Il faudrait justifier le choix de cet ordre d'éléments, ce que je ne fais pas ici.
Si on supposait un autre ordre dans la structure de base, il serait nécessaire de changer
les détails de certaines des transformations que je propose. Pourtant, les grandes
lignes de l'analyse ne seraient pas modifiées.
75

(I)
PRON

Le choix du verbe dépend du contexte syntaxique 3. Par exemple,


on ne pourrait pas substituer exister à donner dans cette
structure, puisque le verbe exister exclut la présence de tout objet.

*(7) J'existe les renseignements à Marie.

L'astérisque indique que (7) n'est pas grammaticale.

3. Maintenant, nous allons examiner trois règles transfor-


mationnelles qui sont nécessaires indépendamment de toute
considération des verbes faire, laisser, voir, etc. Cependant, il se fait
que ces mêmes règles jouent un rôle important dans l'engendre-
ment de certaines phrases complexes comportant ces verbes.
Voyons ce qui arrive dans les phrases où les objets du verbe
sont des pronoms. Nous ne considérons que les pronoms non
réfléchis de la troisième personne.

(8) Jean aime Marie.


*(9) Jean aime la.
(10) Jean l'aime.
(11) Jean obéit à Marie.
*(12) Jean obéit à elle.
(13) Jean lui obéit.
(14) Jean donnera le livre à Marie.
*(15) Jean donnera le à elle.
(16) Jean le lui donnera.

Évidemment, on a besoin dans la grammaire d'une règle qui


transporte un objet pronominal (ou une suite d'objets pronominaux)
3. Voir Noam Chomsky, Aspects of the Theory of Syntax (M. I. T. Press, 1965).
76

de sa position après le verbe et l'insère devant le verbe dans


l'auxiliaire. Cette règle doit pouvoir opérer sur les suites d'éléments
PRON, à H- PRON, et PRON + à -f PRON pour produire (10,
13, 16) au lieu de (9, 12, 15), et elle doit être obligatoire *.

(T5) Mise en place


X, TMPS, V, (PRON) (à) PRON, Y
1, 4 + 2, 3, 5
12 3 4 5
OÙ 1 Ф0.
Obligatoire.

X et Y représentent n'importe quelle suite d'éléments, y inclus


zéro (0), à moins qu'on ne spécifie autrement. 4 + 2 indique que
les éléments du terme 4 sont adjoints à côté de ceux du terme 2.
Pour prendre un cas concret, la structure (II) est engendrée
par les règles syntagmatiques.
P

SN
I
PROPRE AUX

(П)

Jean TMPS donner il

12 3 4 5
T5 traduit la structure (H) en la structure dérivée (III).
4. Les transformations sont numérotées d'après leur ordre final.
77

(Ш)

Jean à elle TMPS donner

4 + 2

(16) représente la prononciation de (III).


Dans l'impératif positif, TmjSe en place ne doit pas avoir lieu.

(17) Aimez-la!
*(18) L'aimez!
(19) Obéissez-lui!
*(20) Lui obéissez!
(21) Donnez-le-lui!
*(22) Le lui donnez!

Dans ce cas, le premier élément de la phrase est TMPS (et X = 0).


Donc, pour produire (17, 19, 21) et pour éviter la production de
(18, 20, 22), on a ajouté à T5 la condition 1 Ф 0 (c'est-à-dire :
X Ф0).
Il y a aussi des phrases simples à deux objets dont l'un est
pronominal et l'autre ne l'est pas.

(23) Jean lui donnera le livre.


(24) Jean TMPS donner le livre à elle

(23) doit être dérivée de la structure (24). Mais ici, à + PRON ne


se trouve pas à côté du verbe. A cause de cela, T5, telle qu'elle est
formulée, ne peut pas s'appliquer à (24). Nous avons donc un
choix. Ou bien nous compliquons T5 de sorte que cette règle puisse
s'appliquer à (24), ou bien nous ajoutons une règle, précédant T5,
qui change (24) en (25), cette dernière suite satisfaisant aux
conditions de T5.
78

(25) Jean TMPS donner à elle le livre

Nous choisissons la deuxième possibilité parce qu'une structure


pareille à (25) est nécessaire pour l'impératif positif.

(26) Donnez-lui le livre!

Il reste à déterminer la forme exacte de cette transformation


supplémentaire. La forme suivante ne suffit pas.

X + V, Y, à + PRON
► 1, 3, 2
1 2 3

La raison en est qu'une telle règle changerait (21) en (27).

(21) Donnez-le-lui!
*(27) Donnez-lui-le!

Pour éviter ce changement erroné, nous écrivons T4 de sorte que


l'objet direct, quand il est pronominal, se transporte avec l'objet
indirect.

(T4) Réglage .
X + V, Y, (PRON) (à) PRON
> 1, 3, 2
1 2 3
Obligatoire.

Dans le cas de (21), У est zéro.

TMPS donner 0 il à elle > TMPS donner il à elle0

La présence de à est facultative dans T4 pour une raison qui sera


donnée plus loin.
La troisième transformation, nécessaire indépendamment de
notre analyse de faire, laisser, voir, etc., concerne l'ellipse de TMPS
dans certaines phrases complexes.

(28) Je veux montrer l'auto à Marie.

(28) doit être dérivée par la combinaison de deux structures syntag-


matiques plus simples, (29) et (30) 6.

5. Nous laissons de côté l'accord de genre et de nombre, écrivant le pour l'article


défini dans toutes ses formes.
79

(29) je TMPS vouloir с


(30) je TMPS montrer le auto à Marie

Une règle transformationnelle, soumise à la condition que les sujets


des deux structures de base soient identiques, prend le syntagme
verbal de (30) et le substitue à с dans (29), produisant (IV).

PRON

(V)

je TMPS vouloir montrer le auto à Marie

Puis, T6 fait l'ellipse de TMPS dans la structure enchâssée.

(T6) Ellipse
X, TMPS, Y
^ JL, О
12 3
où TMPS est dominé par COMP.
Obligatoire.

Le résultat, (V), est traduit en (28) par la phonologie.


80

SN SV

AUX VP.

PRON V COMP

(IV)

AUX

je TMPS vouloir TMPS montrer


II y a deux choses à justifier, la dérivation de (28) par
l'enchâssement de (30) dans (29), et l'ellipse de TMPS par T6 plutôt
que par la règle d'enchâssement même.
En ce qui concerne le premier point, notons que la structure
intérieure du complément, par exemple montrer Vauto à Marie, est
identique à celle du verbe principal (VP) d'une phrase simple. Une
règle d'enchâssement rendrait compte de ce fait. Cependant, on
pourrait obtenir le même résultat au moyen d'une règle syntagma-*
tique COMP > VP (ou bien COMP > SV). Par
conséquent, il nous faut une autre justification.
Nous la trouvons dans la nécessité où nous sommes de faire
dépendre le choix du verbe du sujet de la phrase e.

(31) II neige.
*(32) Je neige.
(33) Je danse.
*(34) Le fait que Jean est mort danse.
*(35) Le fait que Jean est mort montre l'auto à Marie.
*(36) L'encre montre l'auto à Marie.
(37) Je montre l'auto à Marie.

Pour éviter que la grammaire n'énumère (32, 34-36), il faut y


inclure certaines dispositions, dont le détail ne nous intéresse pas
6. Voir Noam Chomsky, Aspects of the Theory of Syntax, (M I. T. Press, 1965).
81

ici. Supposons que nous y avons ajouté les dispositions nécessaires,


c'est-à-dire, que nous avons empêché l'engendrement de (32, 34-
36). Si nous dérivons les phrases complexes du type de (28) par
enchâssement, soumis à la condition d'identité des sujets, nous
aurons évité aussi la dérivation de (38-41).

♦(38) Je vais neiger.


*(39) Le fait que Jean est mort veut danser.
*(40) Le fait que Jean est mort veut montrer l'auto à Marie.
*(41) L'encre veut montrer l'auto à Marie.

Par contre, puisque nous n'avons pas empêché l'engendrement de


(31, 33, 37), la transformation d'enchâssement va produire (42,
43, 28).
(42) II va neiger.
(43) Je veux danser.
(28) Je veux montrer l'auto à Marie.

Si ces phrases complexes n'étaient pas dérivées par une


transformation d'enchâssement, il faudrait répéter les dispositions déjà
mentionnées pour permettre le choix d'un infinitif compatible avec
le sujet. Une telle répétition augmenterait la complexité, de la
grammaire sans servir à rien.
Maintenant, nous devons justifier l'ellipse de TMPS par T6
plutôt que par la règle d'enchâssement même. On peut montrer,
en donnant des motivations indépendantes, que la règle
d'enchâssement doit précéder T5 (mise en place). Il s'ensuit que, étant
donné l'ellipse de TMPS par la transformation d'enchâssement,
T5 ne pourrait pas opérer sur la phrase enchâssée, car T5 opère par
référence à TMPS. Cela veut dire que la structure de base (44) ne
serait pas transformée par T5 en (45).

(44) je TMPS vouloir montrer il à elle


(45) je TMPS vouloir il à elle montrer

Par conséquent, c'est (46) qui serait engendrée plutôt que (47).

*(46) Je veux montrer le lui.


(47) Je veux le lui montrer.

Pourtant, si l'ellipse de TMPS se fait après l'application de T5,


donc par une nouvelle règle T6, cet élément est présent pour
l'application de T5 et c'est alors (47) qui est engendrée à l'exclusion de
(46).
82

Voici un exemple du fonctionnement des règles présentées


jusqu'ici.

RS : je TMPS vouloir с

RS : je TMPS montrer le auto à elle


Enchâssement : je TMPS vouloir TMPS montrer le auto à
elle >
T4 : je TMPS vouloir TMPS montrer à elle le auto >
T5 : je TMPS vouloir à elle TMPS montrer le auto ►
T6 : je TMPS vouloir à elle montrer le auto >
Affixe verbal : je vouloir + TMPS à elle montrer le auto >
Phonologie : Je veux lui montrer l'auto.

4. Les verbes faire, laisser, voir, entendre, sentir, etc., sont


caractérisés par le fait qu'ils prennent et un objet direct et un
complément à l'infinitif (COMP).

(48) II laisse le voleur partir.


(49) II voit le médecin examiner la femme.
(50) II entend l'avocat interroger le témoin.

Il est évident que les phrases complexes telles que (48-50) doivent
être dérivées par enchâssement, comme dans le cas de (28). Pour
construire (49), par exemple, il faut substituer à c, dans (51), le
syntagme verbal de (52).

(51) il TMPS voir le médecin с


(52) le médecin TMPS examiner le femme

Dans cette construction, c'est V objet du verbe principal qui doit


être identique au sujet de la phrase enchâssée. Autrement dit, nous
devons écrire la règle d'enchâssement de telle sorte que, en
empêchant Tengendrement de (53), nous empêchions en même temps
celui de (54).

*(53) Le médecin neige.


*(54) II voit le médecin neiger.
83

(Tl) Enchâssement
X + V, SN, с
1 2 3
1,2,5
SN, SV
4 5
où 2 = 4.

Nous n'allons considérer que les structures subordonnées les plus


simples. Notamment, pour nous, SV (terme 5) est toujours ou bien
TMPS + V ou bien TMPS + V + SN.
Tl marche bien pour les verbes laisser, voir, etc., mais dans le
cas de faire il y a un problème. De (55) et (56), Tl produit (57).
(55) il TMPS faire le avocat с
(56) le avocat TMPS partir
*(57) II fait l'avocat partir.
(58) II fait partir l'avocat.
Nous voulons dériver (58) plutôt que (57). Au lieu de limiter Tl
de sorte que le verbe principal ne soit pas faire et de donner une
deuxième règle d'enchâssement pour le cas de faire, il est
beaucoup plus simple d'ajouter une transformation subsidiaire qui fait
l'inversion de COMP et de l'objet de faire. Cette règle (T2)
transformerait (VI) en (VII).

PRON COMP

(VI)

N AUX VP

il TMPS faire le avocat TMPS partir


84

PRON
(VU)

il TMPS faire TMPS le avocat


En regardant plus loin, on voit que cette même règle est
nécessaire indépendamment du cas de faire. Tl produit (59-61), mais on
a besoin d'une autre règle pour en dériver (62-64).

(59) Je laisse la femme partir.


(60) Je vois la femme partir.
(61) J'entends la femme partir.
(62) Je laisse partir la femme.
(63) Je vois partir la femme.
(64) J'entends partir la femme.

La seule différence, c'est que T2 est obligatoire quand le verbe est


faire, et facultative dans les autres cas.

(T2) Inversion
X, V, SN, COMP
► 1, 2, 4, 3
12 3 4
Obligatoire si 2 = faire.

Ayant résolu ce problème, nous en rencontrons tout de suite


un autre. Quand le syntagme verbal enchâssé est TMPS + V 4- SN,
au lieu de TMPS + V, le résultat de l'application de Tl et de T2
n'est pas acceptable.
*(65) Je fais examiner la femme le médecin.
*(66) Je laisse examiner la femme le médecin.
*(67) Je vois examiner la femme le médecin.
85

Mais en même temps, nous n'avons pas encore tenu compte des
phrases grammaticales (68-70).

(68) Je fais examiner la femme au médecin.


(69) Je laisse examiner la femme au médecin.
(70) Je vois examiner la femme au médecin.

Donc, il semble bien raisonnable de donner une transformation


obligatoire qui insère la préposition à dans (65-67) pour former
(68-70) 7.
(T3) Formation d'objet indirect
X + SN, SN, Y
► 1, à + 2, 3
1 2 3
Obligatoire.
En guise d'illustration, voici la dérivation de (68).
RS : je TMPS faire le médecin с

RS : le médecin TMPS examiner le femme


Tl : je TMPS faire le médecin TMPS examiner le femme >
T2 : je TMPS faire TMPS examiner le femme le médecin >
T3 : je TMPS faire TMPS examiner le femme à le médecin ►
T6 : je TMPS faire examiner le femme à le médecin >
Affixe verbal : je faire + TMPS examiner le femme à le
médecin >
Phonologie : Je fais examiner la femme au médecin.

5. Maintenant, voyons ce qui arrive avec un objet pronominal.


Tl produit la structure abstraite (73) à. partir de (71-72).

(71) je TMPS laisser il с


(72) il TMPS examiner le femme
(73) je TMPS laisser il TMPS examiner le femme

T2 est facultatif, parce que le verbe principal n'est pas faire.


Alors,'
Supposons d'abord que T2 ne s'applique pas. T5 et T6 sont
obligatoires, le résultat étant (74).

(74) je il TMPS laisser examiner le femme.

La représentation phonologique de (74), c'est (75), qui est correcte.


7. Quelquefois cette préposition est représentée par. Cela explique les phrases (2-3).
86

(75) Je le laisse examiner la femme.


Supposons maintenant que T2 s'applique à (73), produisant
(76).
(76) je TMPS laisser TMPS examiner le femme il
Par l'application obligatoire de T3, nous obtenons (77).
(77) je TMPS laisser TMPS examiner le femme à il
T4 donne (78) 8.
(78) je TMPS laisser à il TMPS examiner le femme
Les règles suivantes produisent (79), qui est correcte aussi bien
que (75).
(79) Je lui laisse examiner la femme.
Nous avons donc trouvé une explication pour l'alternance lejlui
dans de telles phrases.
Arrivé à ce point, on peut enfin répondre à. la question posée
au commencement. Est-ce que (5) est acceptable aussi bien que
(4)?
(4) Je lui ferai examiner la maison.
?(5) Je le ferai examiner la maison.
Répétons-le, la question ne se pose pas pour ceux qui ont une
opinion ferme à ce sujet. Si (5) est acceptable sans aucun doute pour
un certain locuteur, la grammaire de son dialecte doit engendrer
cette phrase, même si cela entraîne des complications dans la
description. Cependant, pour les locuteurs qui n'ont pas de jugement
ferme à ce sujet, on peut laisser la décision à la grammaire même,
qui est formulée pour tenir compte des cas clairs examinés ci-dessus.
L«s règles que nous avons écrites pour la description de ces cas
clairs jugent que (5) n'est pas grammaticale. Autrement dit, ces
règles produisent (4) sans produire (5). Il faudrait compliquer la
description pour engendrer (5) aussi. Voici la dérivation de (4).
Remarquez que (5) est exclue parce que T2 est obligatoire quand le
verbe principal est faire.
RS : je TMPS faire il с

RS : il TMPS examiner le maison


Tl : je TMPS faire il TMPS examiner le maison
T2 : je TMPS faire TMPS examiner le maison il >

8. T4, telle qu'elle est formulée, ne suffit pas tout à fait. П faudrait soumettre
son opération à certaines contraintes, en sorte que à + PRON ne soit pas mis à côté
du verbe enchâssé, donnant je + TMPS + laisser + TMPS + examiner + à + il
+ le + femme, qui deviendrait *Je laisse lui examiner la femme.
87

ТЗ : je TMPS faire TMPS examiner le maison à il >


T4 : je TMPS faire à il TMPS examiner le maison >
T5 : je à il TMPS faire TMPS examiner le maison >-
T6 : je à il TMPS faire examiner le maison >
Affixe verbal : je à il faire + TMPS examiner le maison >
Phonologie : Je lui ferai examiner la maison.

6. En somme, cette analyse va soulever plus de questions


qu'elle n'en résout. Nous avons exclu les pronoms des deux
premières personnes et tous les pronoms réfléchis. Nous n'avons
considéré que TMPS + V (+ SN) pour la structure enchâssée. Même
avec ces restrictions assez sévères, il nous reste des problèmes.
Donc, l'analyse n'est offerte que comme le premier pas vers un
traitement suffisant de faire, laisser, voir, etc. Mentionnons
certaines des difficultés qui subsistent, même dans le cadre des
limitations qu'on a adoptées.
D'abord, il faudrait ajouter des conditions à Tl. Quand le
verbe principal est faire et l'objet du verbe enchâssé est
pronominal, l'objet de faire doit être pronominal aussi. Autrement dit,
il faut inclure (80) et exclure (81).

(80) vous TMPS faire il TMPS interroger elle


*(81) vous TMPS faire Jean TMPS interroger elle
Pour pouvoir dériver (82-83), on a besoin de la structure de base
(80).
(82) Vous la lui ferez interroger.
(83) Faites-la-lui interroger!
Considérons la dérivation de l'impératif e.
Tl : vous TMPS faire il TMPS interroger elle ►
T2 : vous TMPS faire TMPS interroger elle il >
T3 : vous TMPS faire TMPS interroger elle à il >
T4 : vous TMPS faire elle à il TMPS interroger >
T-Impératif : TMPS faire elle à il TMPS interroger >
T6 : TMPS faire elle à il interroger >
Affixe verbal : faire -f- TMPS elle à il interroger >
Phonologie : Faites-la-lui interroger!
Après l'ellipse du sujet par T-Impératif, T5 (qui suit) ne peut pas
s'appliquer (car 1 = 0).
Mais que faire de (81)? Aucun résultat possible n'est
acceptable.
9. Cf. la note 8.
88

*(84) Vous faites Jean l'interroger.


*(85) Vous faites l'interroger (à) Jean.
Si le verbe principal est autre que faire, l'équivalent de (81) doit
être permis, étant donné l'acceptabilité de (86).
(86) Vous laisserez Jean l'interroger.
Dans ce cas, il faut empêcher l'application de T2 pour éviter (87).

*(87) Vous laisserez l'interroger (à) Jean.


Finalement, considérons les phrases où l'objet du verbe
principal est un pronom tandis que le verbe enchâssé est intransitif.

(88) Je le vois partir.


(89) Je le fais partir.
*(90) Je lui vois partir.
♦(91) Je lui fais partir.
Nos règles prédisent correctement que (88-89) sont grammaticales
à l'exclusion de (90-91). Puisque l'infinitif n'a pas d'objet, T3 ne
peut pas s'appliquer pour produire un objet indirect. Le problème,
c'est que la dérivation de (88) est ambiguë tandis que (88) ne l'est
pas. D'après Chomsky, une phrase non ambiguë ne devrait être
dérivée que par l'application d'une seule séquence de règles.
Étant donné la structure de base (92), en sautant T2 (qui est
facultatif sauf pour faire), on peut dériver (88) par T5 et T6.

(92) je TMPS voir il TMPS partir


Cependant, en appliquant T2, (88) est toujours le résultat.
Tl : je TMPS voir il TMPS partir >
T2 : je TMPS voir TMPS partir il ►
T4 : je TMPS voir il TMPS partir ►
T5 : je il TMPS voir TMPS partir >
T6 : je il TMPS voir partir >
Affîxe verbal : je il voir + TMPS partir >
Phonologie : Je le vois partir.
L'élément à doit être facultatif dans T4 pour éviter (93-94).
*(93) Je vois le partir.
*(94) Je fais le partir.
La dérivation de (89) n'est pas ambiguë, parce que T2 est
obligatoire pour faire. On pourrait rendre la dérivation de (88) non
ambiguë aussi. Il s'agit tout simplement d'ajouter à T2 la condition
que cette transformation est obligatoire (ou bien qu'elle n'est pas
applicable) quand l'objet du verbe principal est pronominal et
89

que le verbe enchâssé n'a pas d'objet. Cependant, cette restriction


reviendrait à compliquer la description sans autre motivation que
celle de préserver le principe proposé par Chomsky.
Peut-être trouvera-t-on un moyen non arbitraire d'éviter ce
problème dans une description plus comprehensive de la syntaxe
de faire, laisser, voir, etc. Mais à présent, il semble que nous avons
ici un choix. Ou bien il faut compliquer la grammaire sans
justification; ou bien il faut adopter le principe de Chomsky dans une
forme plus faible 10. Peut-être faut-il dire tout simplement qu'une
phrase qui a n interprétations doit avoir au moins n dérivations.
APPENDICE
Règles syntagmatiques et transformations utilisées.
RS1 : P -> SN + SV
RS2:SV->Aux 4- VP
RS3: Aux->-TMPS
RS4 : VP -> V (SN) (à + SN) (COMP)
RS5 : COMP -» с
RS6 : ( le + N )
SN -> { PRON }
( PROPRE )

Tx : Enchâssement
X +1 V, SN,
2 3с

1, 2, 5 où 2 =4
SN, SV
4 5
To : Inversion
X, V, SN, COMP
>• 1, 2, 4, 3 obligatoire si 2 = faire
12 3 4
T3 : Construction d'objet indirect
X + SN, SN, Y
> 1, à -f 2, 3 obligatoire
1 2 3
T4 : Réglage
X + V, Y, (PRON) (à) PRON
>» 1, 3, 2 obligatoire
12 3
T6 : Mise en place
X, TPS, V, (PRON) (à) PRON, Y
> 1, 4 + 2, 3, 5 où 1 ф 0;
12 3 A 5 obligatoire
Te : Ellipse
X, TPS, Y
1, 3, où TPS est dominé par COMP obligatoire
12 3
10. Cf. Erica С. Garcia, compte rendu de Manfred Bierwisch, Grammatik des
deuischen Verbs, Word 21, 1 (avril 1965), p. 109, note 7.

Você também pode gostar