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INDUITE
Juillet 2014
par A.BEHAR
LES FAITS: Voici l’application concrète par l’Euratom (décembre
2013) de la déclaration de la commission internationale pour la
protection contre les rayonnements ionisants (CIPR) du 21 avril
2011 souhaitant un abaissement du seuil d’apparition des cataractes
induites à 0,5 Gray, et la limite annuelle de dose équivalente à 20
mSv:
“Pour les travailleurs susceptibles d’être exposés, la directive introduit une
limite annuelle de dose efficace de 20 millisieverts (mSv), en
remplacement de la valeur de 100 mSv sur cinq années consécutives. Dès
2003, cette limite avait été inscrite dans le code du travail (20
millisieverts sur 12 mois consécutifs). Toutefois, la limite de dose
équivalente de 150 mSv sur 12 mois consécutifs pour le cristallin (œil),
devra être modifiée et réduite à 20 mSv par an”. (1)
La directive de l’Euratom sera intégré dans notre code du travail en 2014
sauf la révision du délai maximal d’apparition de la cataracte après
irradiation toujours fixé à dix ans et sans modification de la liste actuelle
des maladies retenues pour indemniser les vétérans.
RAPPEL DES ÉPISODES ANTÉRIEURS.
La cataracte radio induite est reconnue depuis longtemps, elle figure dans
le tableau N°6 des maladies potentiellement liées à l’exposition aux
rayons ionisants de 1946, mais elle n’est retenue que pour des irradiations
massives (2 à 5 Gray) avec destruction totale du cristallin. Donc, les
vétérans exposés aux essais atmosphériques ne peuvent pas faire valoir
leurs droits même s’ils ont une atteinte particulière du cristallin (ou par
ailleurs une rétinopathie).
Figure 1 : cataracte sous capsulaire postérieure.
A partir d’une constatation,(2) c’est à dire la différence entre les
cataractes usuelles du vieillissement par dégénérescence fibreuse du
noyau protéique et les cataractes imputées aux rayons ionisants de type
sous capsulaire postérieure, 2 séries de données vont bousculer l’ancienne
certitude.
- L’épidémiologie tout d’abord. Toutes les études récentes confirment les
différences profondes entre cataracte des sujets âgés, proportionnelle à
l’âge, et les cataractes sous capsulaire postérieure des irradiés, d’autant
plus fréquentes que la victime est plus jeune.
Par exemple, l’étude des survivants d’Hiroshima et Nagasaki exposés à
1gray au cristallin (3) montre que 12% ont une cataracte nucléaire
(comme la population témoin à cet âge), 29% une cataracte corticale,
mais 41% une cataracte sous corticale postérieure, ce qui est
considérable. Une autre étude sur les mêmes sujets (4) retrouve des
fréquences similaires mais avec une irradiation estimée à 700 mGy, et cet
auteur soulève l’hypothèse d’un effet sur le cristallin sans seuil !
La grande enquête sur les liquidateurs de Tchernobyl (5-6) portant sur
l’incidence des cataractes, apporte un éclairage nouveau. L’étude porte
sur 8607 liquidateurs (8292 hommes et 315 femmes). La grande majorité
avait moins de 30 ans au moment du désastre et moins de 50 ans
pendant l’enquête. L’idée de base est la constatation de 5 stades dans
l’opacification du cristallin : depuis le stade 1 avec détection de quelques
agrégats ou granulations corticales, une opacité de 25 mm et une vision
normale jusqu’au stade 5 avec opacité totale et donc une cataracte
constituée. Les examens ophtalmologiques ont été répétés deux fois pour
évaluer l’incidence. Les résultats montrent une incidence forte de
cataractes bilatérales quelque soit le stade dans cette population jeune
(moyenne de 30%). Plus intéressant encore, l’étude de la corrélation
entre la survenue de la cataracte et la dose de rayonnements estimée au
cristallin montre qu’il existe au stade 1 un risque significatif en dessous de
400 mGy (en moyenne 340 mGy) ; ce risque relatif stagne ou diminue
aux plus fortes doses. Ils retrouvent aussi la fréquence élevée de
cataracte sous corticale postérieure ; comparée à la prévalence d’une
population américaine (âge moyen de 53 ans) qui est de 5%, la
prévalence est de 17% pour leur population (âge moyen de 45 ans) !!
Pour la première fois, le caractère déterministe strictement
dose/effet dans la survenue des cataractes radio induites est
remis en cause, et pour la première fois le mécanisme biologique
(c’est à dire le mode d’accumulation des déchets cellulaires dans
le cristallin du stade 1 au stade 5) est privilégié au détriment du
mécanisme physique (action directe et quantitative du dépôt
d’énergie sur les cellules germinatives).
Figure 2 : cataracte-sous-capsulaire-postérieure-évoluée
BIBLIOGRAPHIE
1- ASN (autorité de sûreté nucléaire): 24/01/2014 16:45 Note
d’information
2- MERRIAM GR JR WORGUL BV : Expérimental radiation cataract, its
clinical relevance, Bul. NY ac.med. 1983, 59, 372-392
3. MINAMOTO et al : Cataract in atomic bomb survivors, Int.J.Rad.Biol.
2004, 80, 339-345
4.NAKASHIMA et al : A reanalysis of atomic bomb cataract data. He. Phys.
2002, 90, 154-160
5. OMS : Health Effects of the Chernobyl Accident and Special Health Care
Prog. (2006)
6. B.V.WORGUL et al: Cataracts among Chernobyl clean-up workers :
implications regarding permissible eye exposures Rad. Res. 2007,167,
233-243.
7. B.V.WORGUL et al: Evidence of genotoxic damage in human
cataractous lenses, Mutagenesis 1991, 6, N°6, 495-499
8-IRSN, Synthèse des rapports de l’UNSCEAR 2003-2007, IRSN/DOC 2006
Ed.
9. WASSILIEFF : Cataracte et rayonnements ionisants, Radioprotection,
2009, 44, 4, 505-517.
10. DURAN D et al: Cataracts in interventional cardiology personnel,
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2009, 30, 872