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Dès 335/334 av. L-C. ou vers 330 au plus tard (Barker), Aristoxène se détache
des doctrines pythagoriciennes, tout en conservant son admiration pour Archytas,
dont il rédige une Vie (fr. 47-50 W.). Il devint l'un des plus éminents disciples
d'Aristote, qui aurait même envisagé de lui confier sa succession à là tête du Lycée.
Évincé au profit de Théophraste, Aristoxène rompt tout lien avec l'École' et
s'engage alors, pour son propre compte, dans un enseignement de la théorie
musicale, tout imprégné des doctrines aristotéliciennes : les auteurs anciens le
désignent toujours comme « disciple d'Aristote ». En pur péripatéticien de la
première génération, comme l'ont fait Théophraste en botanique ou Diogène de
Caryste en médecine, Aristoxène annexe à cet « atelier de tous les arts » qu'est le
Lycée une science à laquelle Aristote n'a pas consacré un grand traité : la
musique.
Aristoxène a été un écrivain prolifique, aux centres d'intérêt très diversifiés :
histoire des institutions, biographies, éducation, musique. La Souda le crédite de
453 ouvrages (un chiffre sans doute surestimé). Dé ces Mémoires, Vies,
Miscellanea^ Hy-pomnèmata et autres opuscules, ne subsistent.que 139 fragments
édités en 1944/1945 par Fritz Wehrli. Ce qui reste de ces écrits atteste l'intérêt que
portait Aristoxène non seulement à la théorie harmonique et rythmique, mais aussi
- fait rare chez les théoriciens grecs - à l'histoire de la musique, des musiciens et
des institutions musicales et à la pratique comme à la facture des instruments de
musique (fr. 69-102 W.) ou encore à la danse (fr. 103-112).
L'œuvre majeure d'Aristoxène, qui lui valut d'être considéré dans toute
l'Antiquité comme le mousikôs par excellence, est son ouvrage Sur l'Harmonique,
qui nous a été transmis sous l'intitulé probablement erroné à'Éléments
harmoniques (Harmonikà stoikheîa), rédigé dans le dernier quart du IVe s. av. J.-C.
C'est le plus ancien traité théorique sur la musique qui nous soit parvenu dans
son intégralité. Il constituait en fait le premier volet d'une grande œuvre Sur la
musique, où Aristoxène étudiait les diverses branches de la science musicale, en
particulier la rythmique. Mais de ses Éléments rythmiques, seuls nous sont connus
des fragments^ ou bien grâce à des citations faites par des auteurs postérieurs
(Aristide Quintilien et surtout Michel Psellus, auteur byzantin du XIe s.) ou bien
encore par des papyrus : son livre II nous est parvenu entièrement. Il est possible
que le papyrus d'Oxyrhynçhus 34, n° 2687 nous ait livré une partie des Éléments
rythmiques.
Dans l'histoire dé la pensée musicale antique, les doctrines d'Aristoxène ont
constitué une révolution epistemologique dont l'importance fut perçue par
l'ensemble des théoriciens postérieurs, qu'ils les aient suivies ou combattues. En
effet, avant lui, les pythagoriciens (Philolaos, Archytas) et les platoniciens
considéraient la science musicale comme partie dés mathématiques. Pour
Aristoxène, au contraire, la science harmonique doit et peut être une science
autonome, affranchie de tout lien avec l'arithmétique et l'astronomie et délivrée de
l'empirisme des « Harmoniciens » (Eratoklès, Agènor de Mytilène, Pythâgbre de
Zante, et peut-être Héraclide du Pont). N'ayant plus pour objet des entités
mathématiques, mais Uniquement les sons musicaux, distingués dés bruits ou des
sons du langage parlé, la science harmonique ne procède plus par le calcul
d'intervalles exprimés par des rapports de deux nombres. Organisés eh structures
musicales, les sons entretiennent entre eux des rapports « dynamiques »
qù'Aristoxène est le premier à situer dans ce qu'il appelle « l'espace » sonore. Les
outils du théoricien de la musique sont la pensée rationnelle (diànoïa) et la
sensation auditive (akoê, aïsthèsis). La raison identifie les structures et en dé-
terminé lés lois par des définitions, axiomatiques ou raisonnées, et par des
théorèmes (prôblêmata) qui font l'objet de démonstrations. Quant à la sensation
auditive, Aristoxène est le premier théoricien de la musique à insister sur la
nécessité de l'éduquer pour la rendre plus sûre et plus précise, tout en là
soumettant au contrôle strict de la pensée dianoé-tique. De ce point de vue,
Aristoxène a édifié une science musicale dont la méthode, la terminologie et les
principes dérivent directement des doctrines aristotéliciennes de la science.
La première partie du Traité d'harmonique procède à l'examen des doctrines des
prédécesseurs d'Aristoxène. Il se montre extrêmement critique envers eux, moins
sur les points de détail que sur les fondements mêmes de leurs doctrines.: aux
pythar goriciens (qu'il ne nomme pas), il reproche d'avoir considéré les intervalles
musicaux, non pas comme des entités musicales en tant que telles mais comme
des rapports numériques, lesquels sont superpartiels lorsqu'ils « définissent » des
intervalles consor nants (octave, 2: 1 ; quinte, 3 : 2,; quarte, 4: 3; ton, 9:8).
Contre les pythagoriciens, Aristoxène postule et démontre que le ton est divisible
en deux demi-tons justes, et non pas en un leimma de rap* port 256: 243 et une
apotomé de rapport 2187 ■ ■: 2048. Il s'oppose également à un ensemble d'écoles
\ musicales qu'il désigne sous le terme global '; d' « Harmoniciens », dont
les diagrammes subdivi- ' saient l'octave en 24 quarts de ton, dépourvus de j
toute réalité musicale, puisqu'on n'entonne jamais j plus de 2 quarts de ton
successivement.
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ARISTOXÈNE DE TARENTE