Approche Culturelle Et Performancede La SC PDF

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LE MANAGEMENT DURABLE DE LA SUPPLY CHAIN : QUELLES
PRATIQUES POUR RÉDUIRE L'IMPACT ENVIRONNEMENTAL D'UN
SITE INDUSTRIEL ?
Valérie Fernandes et Maud Van Steenberger
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Association de recherches et publications en management | « Gestion 2000 »
2013/1 Volume 30 | pages 53 à 67

ISSN 0773-0543
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-gestion-2000-2013-1-page-53.htm
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Valérie Fernandes
Professeur associée
Responsable du Pôle Economie, Stratégie et Organisation
Groupe Sup de Co La Rochelle
Maud Van Steenberger

Groupe Sup de Co La Rochelle
Le management durable de la ??
supply chain : quelles pratiques pour
réduire l’impact environnemental I le
d’un site industriel ?

L e développement durable, décliné au sein des entreprises par le biais de la
Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), est sans conteste devenu un enjeu
majeur. La banalité de cette affirmation cache cependant de nombreuses questions et
enjeux liés à la performance et à la pérennité des entreprises. En effet, les contraintes
liées au développement durable sont de tous ordres – par exemple un cadre législatif
qui se durcit, des associations et des organisations non gouvernementales qui n’hésitent
pas à dénoncer ce qu’elles estiment être contraire à des valeurs de durabilité ou bien
encore des consommateurs qui intègrent dans leurs actes d’achat des variables liées au
développement durable. La montée en puissance de ces contraintes amène les entreprises
à intégrer dans leur stratégie et leur politique générale ladite RSE puis à la décliner au
sein des différents services, aux niveaux à la fois fonctionnels et opérationnels. Or, le
management de la supply chain et ses champs d’application se trouvent être directe-
ment concernés tant le développement durable, dans ses dimensions environnementale,
sociale et économique, impacte les modes de gestion des flux physiques et le manage-
ment des relations avec les différentes parties prenantes concernées. Notre recherche
s’intéresse à la façon dont un site industriel peut optimiser sa durabilité, dans un univers
complexe. Plus précisément, nous tenterons de répondre à la question suivante : quelles
sont les pratiques les plus pertinentes liées au management durable de la supply chain
(MDSC) pour réduire l’impact environnemental des activités d’un site industriel ?
En effet, ces pratiques sont celles qui une performance durable, équilibrée
concilient la protection de l’environ- et optimale. La première partie de cet
nement, l’optimisation des coûts glo- article s’attache à présenter ces pra-
baux et la préservation des valeurs tiques et plus globalement les enjeux
sociétales de l’entreprise pour assurer du MDSC. Puis, dans une seconde par-
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Gestion 2000 1 janvier - février 2013
tie, trois approches sont alors étudiées Si la supply chain (SC) verte est la pers-
qui, associées, permettent d’améliorer pective la plus étudiée, elle ne prend
l’efficience environnementale d’un site pas en compte la dimension sociale
industriel. Il s’agit du Value Stream de la RSE. En effet, on peut noter un
Mapping (cartographie de la chaine fréquent déséquilibre des publications
de valeur de la supply chain), des éco- dans le domaine du MDSC en faveur

conceptions et des référentiels gestion- de l’aspect environnemental. «Cela
naires. Le cas d’une grande entreprise s’explique par le fort accent mis sur
industrielle française, équipementier la protection de l’environnement et sur
dans le domaine des transports que les premiers concepts alors développés
nous nommerons ABC, permet d’ap- dès les années 80, notamment celui
porter des éléments de réponse et d’il- de l’écologie industrielle. […] Dans le
lustrer les propos. champ de la logistique et du dévelop-
pement durable, les recherches se sont
dans un premier temps essentiellement
intéressées aux transports, s’inspirant
Les enjeux du MDSC des livres blancs des transports de la
pour l’entreprise Commission des Communautés Euro-
industrielle péennes (1992-2001)» (Akono & Fer-
nandes, 2009). Carter et Roger (2008)
définissent le MDSC comme l’intégra-
tion des buts sociaux, environnemen-
Le MDSC : des contours qui
taux et économiques d’une organisa-
se définissent tion dans la coordination systémique
des processus inter-organisationnels
L’analyse de la littérature traitant du clés pour améliorer la performance
MDSC permet d’identifier trois pers- économique à long-terme de l’entre-
pectives dominantes (Akono & Fer- prise et de la SC. La SC durable peut
nandes, 2009) : la première est cen- alors être présentée comme «une forme
trée sur l’aspect environnemental (de organisationnelle étendue, regroupant
la définition des concepts au manage- des acteurs : metteurs sur le marché,
ment inter-organisationnel), la seconde détenteurs, récupérateurs, opérateurs,
porte sur l’aspect social (à travers acteurs politiques, selon un intérêt
notamment la responsabilité sociale commun de développement durable,
des entreprises) et la troisième, émer- lié à la circulation des flux physiques
gente, intègre les deux premières en y de déchets/produits et d’informations
associant l’approche économique pour associées tout au long de leurs cycles
adopter une vision globale du dévelop- de vie» (Monnet, 2009). Dans l’objec-
pement durable. tif de mettre en place une politique
54

Le management durable de la supply chain :
quelles pratiques pour réduire l’impact environnemental d’un site industriel ?
de développement durable, tous ces IFTIM (Castay & Lasserre, 2011), plus
acteurs ou parties prenantes vont inte- de 40% des chargeurs exigent de leurs
ragir au sein de la SC pour respecter prestataires logistiques un bilan CO2
cet intérêt commun de développement de la prestation et 20% réclament des
durable économique, social et environ- éléments pour reconstituer un bilan
nemental. La définition proposée par environnemental. En outre, une entre-

Akono et Fernandes (2009) synthétise prise sur cinq estime que la réputation
les différentes définitions présentées environnementale et sociale de leur
dans la littérature : le MDSC consiste prestation est très importante. Enfin, les
en «la planification et le management différentes règlementations adoptées
de toutes les activités d’achat, d’ap- à la fin des années 2000 au niveau
provisionnement, de transformation et européen (Reach, DEEE, RoHS) ou au
de logistique ainsi que la gestion des niveau français (Lois Grenelle 1 et 2)
relations avec les acteurs de la chaîne amènent les entreprises à reconfigurer
(fournisseurs, prestataires de services leurs modèles de pilotage des flux et
logistiques, clients) dans une optique plus globalement leurs pratiques liées
de respect de l’environnement et des au management de la supply chain.
normes sociales afin de créer de la Nous nous proposons d’en présenter
valeur durable pour les différentes quelques-unes.
parties prenantes. Ce management du-
rable suppose une approche globale Le management vert de la supply chain
et par processus afin de traquer les peut être défini comme une démarche
gaspillages et d’améliorer l’efficience visant à minimiser l’empreinte écolo-
environnementale, sociale et écono- gique d’un produit tout au long de son
mique de l’entreprise». cycle de vie, à travers l’extraction des
matières premières, la conception, les
achats, la production, la logistique et
Des leviers et des le traitement des produits en fin de vie
(Aberre & al., 2008). La majorité des
pratiques adaptées à un
entreprises européennes interrogées
environnement industriel
considèrent que la supply chain verte
pour un MDSC performant est une priorité stratégique et elles la
déclinent en actions concrètes (Donval
Les récentes études menées sur le sujet & al., 2011). L’économique et l’envi-
de la RSE et du développement durable ronnemental ne sont donc pas exclusifs
démontrent que les entreprises ont inté- mais bien complémentaires. La sup-
gré tant les préoccupations environne- ply chain verte doit alors être perçue
mentales que sociétales. Ainsi, selon comme une démarche structurante et
la dernière enquête annuelle de l’AFT- globale, car, comme le soulignent Mol-
55

lenkopf et al. (2009), la mise en place comme un tout et un ensemble d’étapes

d’une supply chain verte nécessite de : d’égale importance, car chaque phase
peut être source d’impacts négatifs sur
– travailler avec les fournisseurs et l’entreprise. Le modèle linéaire de la
les clients et toutes les parties pre- supply chain traditionnelle cède donc
nantes dans une démarche collabo- le pas à un modèle cyclique» (Aberre

rative (échange des connaissances & al., 2008, p.17).
et compétences),
– analyser les opérations internes et Pour un industriel, la déclinaison opé-
les différents processus de concep- rationnelle d’une politique verte de la
tion, d’achats, de fabrication et de supply chain suppose le déploiement
distribution, d’au moins une des démarches sui-
– considérer les enjeux environne- vantes : l’éco-conception (ou concep-
mentaux dans le processus de fabri- tion verte), le management vert des
cation du produit, et opérations et le transport vert.
– analyser les cycles de vie des pro-
duits. L’éco-conception vise à «améliorer la
qualité écologique d’un produit, en ré-
La définition de Srivastava (2007) duisant ses impacts négatifs sur l’envi-
confère à la démarche de supply ronnement tout au long de son cycle de
chain verte une dimension circulaire vie. Elle se caractérise par la prise en
et globale : «le management vert de compte de l’environnement lors de la
la supply chain intègre la pensée envi- phase de conception ou d’amélioration
ronnementale dans le SCM, incluant la d’un produit» (Aberre & al., 2008). Il
conception du produit, l’approvision- s’agit concrètement d’évaluer le cycle
nement et la sélection de la matière, de vie des produits et d’identifier des
les processus de production, la déli- moyens pour une utilisation réduite des
vrance du produit final aux consomma- ressources dans les processus de pro-
teurs ainsi que la gestion de fin de vie duction et dans la conception du pro-
du produit après sa vie économique». duit en intégrant le recyclage de tout
C’est aussi l’approche de l’Observa- ou partie du produit en fin de vie. La
toire de la Supply Chain (Aberre & al., démarche s’applique aux produits, à
2008) qui définit la supply chain verte ses composants, à son emballage ou
comme «visant à minimiser l’empreinte à son mode de production. Le mana-
écologique d’un produit, tout au long gement vert des opérations comprend
de son cycle de vie». On perçoit bien la production verte et la re-production
que l’analyse du cycle de vie est au (utilisation maximale de toutes les res-
cœur de la démarche de supply chain sources de l’entreprise), le traitement
verte et qu’elle doit «être appréhendée des déchets, les processus d’éco-sour-
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cing et d’approvisionnement, le stoc- composant la logistique socialement

kage et l’éco-logistique amont et aval responsable : les achats respon-
ainsi que la reverse logistique. Enfin, sables, le transport et l’entreposage.
le transport vert vise à rechercher la Cette approche est large au sens où
diminution des pollutions issues des elle intègre aussi bien les dimensions
transports en associant les notions sociales internes à l’entreprise qu’ex-

de déplacements indispensables en ternes. Dans la même mouvance, se
termes de qualité, coût, délai. Il s’agit situent les travaux de Murphy et Poist
par exemple de privilégier des modes (2002) qui soulignent l’importance de
de transport moins polluants et de limi- ces pratiques logistiques socialement
ter le nombre de camions par jour en responsables dans la formulation et la
déplacement sur un site par la mutua- mise en place de la RSE. Enfin, Tate et
lisation du fret et par la massification al. (2010) démontrent que, parmi les
des chargements. entreprises qui créent progressivement
des stratégies sociales et environne-
Ainsi que nous l’avons déjà souligné, mentales, le rôle du management de la
le social est l’aspect du développe- supply chain concerne tous les aspects
ment durable qui est le moins étudié des pratiques durables. Citons aussi
et développé aujourd’hui. Pourtant de l’approche de Morana (2010) qui est
nombreuses entreprises affichent leur résolument ancrée dans les ressources
politique dans le domaine comme IBM humaines et qui, s’appuyant sur les
ou HP. L’accent est mis fortement sur la travaux de Gond (2006), décline l’im-
gestion de la relation fournisseur à tra- portance du management social de la
vers par exemple des contrats éthiques supply chain au travers des ressources
affichant des engagements comme humaines internes (justice perçue par
l’interdiction du travail des enfants, le les employés, identification organisa-
respect d’une durée hebdomadaire de tionnelle, implication organisationnelle
travail ne dépassant pas les 60 heures, et satisfaction au travail) et des res-
la non-discrimination, la santé ou en- sources humaines externes (attractivité
core la sécurité. Cette vision, très en de l’entreprise, réputation et image,
cohérence avec les principes même support des syndicats et partenaires
du management de la supply chain, externes en cas de problèmes sociaux).
est reprise par l’étude commanditée
par l’Union Européenne et portant sur Les leviers d’actions du MDSC sont
le «Responsible Supply Chain Mana- donc variés et nombreux. Il convient
gement» (Van Opijnen & Oldenziel, de savoir les déployer à bon escient
2011). Plus largement, la recherche au sein d’un site industriel, afin de
menée par Carter et Jennings (2002) limiter l’impact environnemental de ce
met en avant trois grands domaines dernier.
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La mise en place d’actions état futur. Le VSM est une démarche

adaptée aux entreprises qui souhaitent
durables au sein de la
reconfigurer leurs processus, comme
SC pour limiter l’impact l’ont notamment démontré Serrano
environnemental d’un site Lasa et al. (2008) au sein de l’entre-
industriel : le tryptique prise Maier, équipementier allemand

de composants plastiques.
VSM/écoconception/
référentiel gestionnaire Le VSM futur permet d’intégrer, de-
puis l’offre jusqu’à la facturation, les
L’objectif de cette partie est, à partir éco-innovations tant technologiques
d’une étude empirique, de montrer que qu’organisationnelles qui réduiront
le tryptique Value Stream Mapping les différents gaspillages identifiés. Il
(VSM)/écoconception/référentiel ges- peut s’agir de changements simples
tionnaire permet de manière efficace et internes à l’organisation ou bien
de réduire l’impact environnemental des changements significatifs comme
d’un site industriel. la refonte du système productif. En
conclusion, le VSM est le moteur
de l’adoption d’éco-innovations et
du déploiement d’actions durables
Le Value Stream Mapping au sein de la SC industrielle. Il per-
met de réduire les gaspillages iden-
Selon le Lean Enterprise Institute, le tifiés et d’atteindre les objectifs de
Value Stream Mapping (VSM) permet qualité, coûts et délais. Ces actions
de cartographier la chaîne de valeur concernent les trois dimensions du dé-
actuelle d’une ligne de production puis veloppement durable : l’économique,
de l’améliorer en y associant des ou- l’environnemental et le social. Ci-des-
tils Lean pour favoriser l’amélioration sous sont présentées quelques actions
continue sur les processus de produc- déployées par l’entreprise industrielle
tion industrielle. En d’autres termes, le ABC, regroupées sous l’appellation
Value Stream Mapping (VSM) est une «Lean & Clean», politique liée au
technique ou un outil qui aide à visuali- VSM :
ser et à comprendre les flux de matière
et d’information générés par un pro- – la réduction des émissions et des
duit au sein du «value stream» (Chen & consommations d’énergie en chaîne
Meng, 2010). Il permet de comprendre de production grâce à la mise en
l’état actuel («où nous sommes»), l’état place de la démarche PDCA (Plan,
futur («où voulons-nous aller») et de Do, Check, Act) sur les différentes
dresser une carte pour atteindre cet actions à réaliser : réduction de
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l’utilisation de produits chimiques, Les éco-innovations :

de peintures toxiques, développe- leviers d’actions durables
ment de procédés de fabrication
répondant à des standards environ-
L’éco-innovation est le moteur de la
nementaux;
croissance durable. Selon Mathieu
– la mise en place de cartes KAN-

et al (2010), 2 types d’éco-innova-
BAN pour l’optimisation des flux
tions sont identifiés en entreprise pour
et la réduction des tâches inutiles :
diminuer les impacts et les risques
réduction des émissions de papiers,
sur l’environnement : l'éco-innovation
de fax et d’emails entre la produc-
technologique (techniques, procédés
tion et les magasins;
et produits) et l'éco-innovation orga-
– les mises à disposition des compo-
nisationnelle (nouvelles organisations,
sants pour répondre à l’enclenche-
règles, procédures).
ment standard des tâches avec un
management visuel du servi de pro-
Pour les entreprises industrielles, le
duction;
déploiement d’actions durables passe
– le tri et la réduction des déchets
d’abord par la mise en place de struc-
en chaîne et la mise en place des
tures pour développer les concepts
conditionnements retournables entre
d’écologie industrielle, de précaution,
les fournisseurs, les magasins et les
de gestion des risques, d’éco-efficience
chaînes de production;
et de pollution. Les éco-innovations
– la dématérialisation et la traçabili-
organisationnelles conduisent alors
té : un projet RFID est déployé pour
à la mise en place d’éco-innovations
suivre les mouvements des condi-
technologiques de produits puis de
tionnements retournables. Au sein
procédés. Le but est d’intégrer une
des magasins, des lecteurs mobiles
démarche et de la déployer en propo-
de code à barre sont utilisés pour
sant à terme des éco-innovations co-
supprimer des impressions papier
évolutives. L’entreprise ABC a adopté
de préparations de commandes et
des éco-innovations sur l’ensemble de
les résultats d’inventaires;
la supply chain (Figure 1). Elles sont de
– l’amélioration des produits et des
nature différente et de niveau de dé-
procédés de production pour une
ploiement divers. Ainsi les démarches
qualité totale.
d’éco-sourcing et d’éco-logistique sont
en déploiement (niveau 3) alors que la
Le cas de l’entreprise ABC permet
démarche d’éco-conception est très lar-
donc d’illustrer les apports bénéfiques
gement adoptée et déclinée (niveaux
du VSM en ce qu’il autorise l’identifi-
4 et 5).
cation des gaspillages et la recherche
d’un optimum.
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la supply chain (figure 1). Elles sont de nature différente et de niveau de déploiement divers.
Ainsi les démarches d’éco-sourcing et d’éco-logistique sont en déploiement (niveau 3) alors
que la démarche d’éco-conception

Gestion 2000 est très largement adoptée et déclinée (niveaux 4 et 5).
1 janvier - février 2013
Figure 1: positionnement durable de ABC selon le type d’éco-innovations et leur niveau

Figure 1 : positionnement durable de ABC selon le type d’éco-innovations et
de déploiement et d’intégration
leur niveau de déploiement et d’intégration.
Cette cartographie montre que l’entreprise ABC est bien engagée dans une politique de
Cette cartographie montre que l’entre- tères et indicateurs qui vont mesurer la
prise ABC
développement est bien
durable et engagée dans une de la performance
que l’ensemble environnementale
supply chain est concernéeauetsein
investie de
politique de développement durable et de chaque domaine d’actions est aussi
que l’ensemble de la supply chain est significative car il faut pouvoir traduire
11
concernée et investie de missions pour la réalité à travers les divers tableaux

déployer un ensemble d’actions du- de bord et pouvoir identifier le degré
rables (Annexe 1). Certains domaines d’estimation des chiffres. Un manque
d’actions sont plus exploités que de vision sur la performance peut
d’autres en termes de durabilité. La dif- apparaître du fait de la définition des
ficulté réside dans le compromis entre objectifs environnementaux parfois dif-
profit, réduction des coûts et réduction ficilement mesurables et quantifiables.
des impacts environnementaux pour Dans tous les cas, les impacts du déve-
mettre en place un MDSC efficace. De loppement durable sur la chaîne de va-
plus, l’intégration du nombre de cri- leur des entreprises et sur leur compéti-
60

tivité peuvent être élevés et ce jusqu’à tifs. Ce référentiel peut ensuite décliner
générer des avantages concurrentiels les diverses opérations selon la volonté
durables comme le soulignent Akono des décisionnaires, ce qui permet à
et Fernandes (2009). Ceci suppose un chaque business unit de conserver son
outil de pilotage global, résultat d’un propre référentiel métier tout en permet-
référentiel gestionnaire. tant une analyse globale du système.

De par son rôle centralisateur, il doit
s’assurer de la cohérence de tous les
éléments techniques, juridiques, nor-
Les référentiels gestionnaires matifs, sociétaux de l’entreprise avec
le référentiel financier en acte dans
Les référentiels gestionnaires consti- l’entreprise. Il se décline à partir de
tuent les cadres référents, c’est-à-dire normes, de réglementations ou même
des ensembles cohérents de valeurs de bonnes pratiques. Ce référentiel
organisationnelles et de principes va prendre en compte l’ensemble des
d’action auxquels les entreprises se processus opérationnels et leurs inte-
réfèrent, pour justifier leur positionne- ractions avec les enjeux sociétaux et
ment vis-à-vis de la durabilité et intera- environnementaux, tout en respectant
gir avec leur environnement (Mathieu les objectifs économiques et financiers
& al, 2010). Il en coexiste plusieurs des référentiels business. Les avan-
au sein d’une même entreprise, leur tages sont nombreux : passage d’une
nombre étant proportionnel à la com- certification au même moment, gains
plexité de cette dernière : entre réfé- d’efficacité, anticipation des risques,
rentiels financiers et référentiels opéra- raisonnement «Environnement Hygiène
tionnels (qualité, métiers, systèmes), la Sécurité» (EHS) pour un même produit.
cohabitation se fait tant bien que mal. Traditionnellement, les référentiels fi-
nancier et durable s’opposent, tant leur
La multiplication des référentiels sec- vision sont différentes à la fois en ce
toriels et réglementaires permet une qui concerne le comportement humain
mesure de plus en plus pointue de la que la représentation de la firme (Mar-
performance de chaque métier et des tinet & Reynaud, 2004). Prolongeant
intérêts des parties prenantes associées cette réflexion, Mathieu et al (2010)
mais elle complique la mise en avant réalisent une étude par le biais des
d’une performance globale. Il convient éco-innovations. Une carte percep-
alors de définir un référentiel opéra- tuelle (Figure 2) permet alors de posi-
tionnel unique et durable qui regroupe tionner les entreprises selon deux axes.
les différents référentiels opérationnels Le premier axe porte sur le type d’éco-
(SC, industrialisation, production, qua- innovations (plutôt de nature organisa-
lité) et qui présente un panel d’objec- tionnelle ou technologique). Le second
61

axe porte sur le référentiel gestionnaire bilité (adaptative ou proactive). Quatre

d’appartenance de l’entreprise : finan- cadrans composent alors cette carte,
cier ou durable et du type de stratégie selon un continuum que les auteurs pré-
alors mise en place vis-à-vis de la dura- cisent.
Figure 2 : Type d’éco-innovations adopté par l’entreprise ABC suivant son mode
d’intégration stratégique du DD.
Source : adaptée de la cartographie de Chandon et al. (2009)

Source : adaptée de la cartographie de Chandon et al. (2009)
L’entreprise ABC se situe dans le cadran 4 (en bas et à droite de ce cadran). Le référentiel
L’entreprise ABC se situe dans le cadran environnementales dans les activités.
4 (en bas et à droite de ce cadran). Le
financier y est dominant par rapport au référentiel L’entreprise ABC adopte pourtant
durable. L’éco-innovation une
est appréciée
référentiel financier y est dominant par démarche proactive en matière de
rapport
sous au de
l’angle référentiel durable.
la performance et lesL’éco- durabilité
bénéfices liés avec
constituent uneses chartes
source d’éthique,à
de motivation
innovation est appréciée sous l’angle d’éco-design, des engagements EHS,
l’intégration des contraintes environnementales dans les activités. L’entreprise ABC adopte
de la performance et les bénéfices des certifications ISO14001. Elle met
liés constituent
pourtant une proactive
une démarche source de moti- de durabilité
en matière en placeavecdesseséco-innovations d’abord
chartes d’éthique, d’éco-
vation à l’intégration des contraintes organisationnelles pour initier la dé-
design, des engagements EHS, des certifications ISO14001. Elle met en place des éco-
62
innovations d’abord organisationnelles pour initier la démarche et prévenir des risques, puis
des éco-innovations technologiques sur les produits et procédés pour pouvoir à terme
proposer un nouveau système productif durable. Le positionnement de l’entreprise montre que

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 62
la démarche durable est de plus en plus intégrée mais le compromis financier s’exerce malgré 19/02/13 08:16
marche et prévenir des risques, puis vironnementaux en chaîne de produc-

des éco-innovations technologiques sur tion, le % de conditionnements retour-
les produits et procédés pour pouvoir nables réduisant l’émission de déchets
à terme proposer un nouveau système ou encore la gestion des livraisons en
productif durable. Le positionnement mutualisant le fret et en réduisant le
de l’entreprise montre que la démarche nombre de camions en déplacement

durable est de plus en plus intégrée sur le site. L’étude réalisée a permis de
mais le compromis financier s’exerce montrer que les référentiels financiers
malgré tout. Tout investissement est et durables ne sont pas antagonistes
possible pourvu qu’il soit rentable. mais complémentaires et, selon le ca-
L’entreprise ABC se situe entre Rho- ractère de l’éco-innovation, l’entreprise
dia et La Poste et évolue selon la ligne exerce un compromis entre financier et
de force représentée sur le schéma, durable pour bâtir sa stratégie et exé-
soit vers le cadran 3. Dans notre cas, cuter ses plans d’actions.
l’entreprise a établi son propre réfé-
rentiel opérationnel basé sur plusieurs En effet, la stratégie des entreprises in-
indicateurs permettant l’analyse de la dustrielles (dont le référentiel financier
performance des différents domaines est généralement prédominant dans les
de la supply chain, comme l’industria- choix stratégiques par la recherche des
lisation, la qualité et la production à opportunités de profit) tend vers la du-
travers des séries annuelles d’audits. rabilité par l’intermédiaire d’intentions
Sur une même base d’indicateurs, stratégiques fortes dans ce domaine.
l’entreprise compare ses différents sites Les entreprises recherchent alors un
en établissant une note allant de 1 à 5 compromis entre compétitivité et dura-
par domaine d’activité puis une note bilité par l’adoption d’éco-innovations.
globale pour le site. Chaque domaine Les référentiels financiers et durables
d’activité doit répondre à un certain ne sont donc pas antagonistes mais
nombre d’engagements et d’objectifs à complémentaires et orientent la stra-
court et moyen terme. Le référentiel et tégie vers un management proactif du
les audits associés permettent de suivre développement durable.
et de mesurer le respect des bonnes
pratiques préalablement définies par En d’autres termes, le management
l’analyse VSM pour réduire les impacts proactif de la durabilité permet aux
négatifs sur l’environnement et globa- entreprises d’enclencher un cycle ver-
lement tous les gaspillages identifiés. tueux grâce à une vision à long-terme
Des indicateurs environnementaux sont favorisant l’innovation. Cela permet
systématiquement repris, comme le l’éradication ou la diminution des ex-
respect des règles 5S dans les ateliers ternalités négatives et de leur cause
réduisant les risques sécuritaires et en- par les éco-innovations organisation-
63

nelles. Cela passe par la mise en place De nombreux outils (bilans sociaux,
de pôles dédiés, par un système de codes d’éthique, labels, audits, ni-
management de l’énergie et par le dé- veaux de consommation) sont à la
veloppement de technologies propres disposition des entreprises afin de me-
dès la conception des produits. surer leur performance dans leur enga-
gement durable.
La mise en place d’un référentiel opéra-
tionnel durable va prendre en compte
les objectifs de durabilité et y répondre Discussion et conclusion
en assurant la cohérence de tous les
éléments opérationnels de chaque do- Cette recherche a permis de souligner
maine d’activité avec le référentiel fi- le rôle prépondérant de la supply chain
nancier de l’entreprise. De nombreuses dans l’intégration d’une démarche en-
études comme celle de l’OCDE (2009) vironnementale sur un site industriel.
vont en ce sens et promettent des béné- Son originalité repose sur la mise en
fices économiques durables par l’intro- évidence du bon fonctionnement du
duction et l’adoption d’éco-innovations tryptique VSM – écoconception – ré-
au sein des grands groupes industriels. férentiel gestionnaire (Figure 3) pour
La mise en place d’un tel référentiel réduire l’impact environnemental d’un
suppose d’intégrer un ensemble d’in- site industriel. Les trois démarches
dicateurs permettant d’identifier le ni- sont complémentaires : le VSM permet
veau d’intégration du développement d’analyser la situation et de projeter un
durable au sein de l’entreprise (par la état futur, les écoconceptions permettent
prise en compte de normes et de règle- la mise en œuvre et le déploiement de
mentations). Ces indicateurs mesurent cet état futur grâce à leur approche
l’impact du développement durable sur cyclique et le référentiel gestionnaire,
les modes de gestion et aident à éva- épine dorsale du système, permet de
luer la performance globale de l’entre- piloter l’ensemble des actions liées au
prise et des actions mises en place. MDSC à travers sa grille d’indicateurs.
64

projeter un état futur, les écoconceptions permettent la mise en œuvre et le déploiement de cet
état futur grâce à leur approche cyclique et le référentiel gestionnaire, épine dorsale du
système, permet de piloter l’ensemble des actions liées au MDSC à travers sa grille
d’indicateurs.
Figure 3 : Modèle intégrateur pour réduire l’impact environnemental d’un site

Figure 3 : Modèle intégrateur pour réduire l’impact environnemental d’un site industriel :
industriel : le tryptique
le tryptique VSM/Eco-innovations/Référentiel
VSM/Eco-innovations/Référentiel gestionnaire
gestionnaire.
La combinaison de ces trois démarches nous semble vertueuse et permet de couvrir à la fois
La
les combinaison de ces trois
domaines stratégiques, démarches
opérationnels (plus de
et fonctionnels oulamoins
supply large selonaussi
chain mais le secteur
les trois
nous semble vertueuse et permet de d’activité et la taille de l’entreprise), le
couvrir à la foisdulesdéveloppement
piliers fondateurs domaines straté- référentielenvironnemental
durable (économique, gestionnaire durable estSien
et social). le
giques, opérationnels et fonctionnels phase de construction dans beaucoup
VSM et les éco-innovations sont des pratiques qui sont aujourd’hui en phase de diffusion
de la supply chain mais aussi les trois d’entreprises. Il conviendrait dans une
piliers
(plus oufondateurs
moins largedu développement
selon le secteur d’activité recherche
et la taillefuture de s’intéresser
de l’entreprise), au pro-
le référentiel
durable (économique, environnemen- cessus de développement et de mise en
gestionnaire durable est en phase de construction dans beaucoup d’entreprises. Il conviendrait
tal et social). Si le VSM et les éco-in- place d’un tel outil global de pilotage,
novations sont des pratiques qui sont au-delà de la simple agrégation d’ou-
aujourd’hui en phase de diffusion tils existants.
17

65

Annexe 1
Déclinaison des éco-innovations en actions chez ABC
Eco-conception Bilan carbone, Recyclabilité et revalorisation des produits, optimisation des

durées de vie, réduction des substances dangereuses, technologies propres
et validations, Normes et règlementations, groupes de travail et réseaux de

recherche
Reverse logistique Gestion des retours et déchêts : collecte, tri, transformation ou élimination,
revalorisation des produits usagés et reconditionnement
Eco-manufacturing Tableau de bord EHS pour suivre l’efficacité du système productif durable :
déchets, produits dangereux, consommations d’énergie, précaution et
prévention
Certifications : OHSAS 18001, ISO14001, ISO 9001,
Eco-logistique Optimisation des flux, mutualisation de fret et transport combiné, flux tirés
pour réduire les stocks, packaging réutilisable, refonte des schémas logistiques
(plateformes), EDI, utilisation de sources d’approvisionnement proches de sites
productifs
Eco-sourcing Appréciations & Audits fournisseurs sur le respect des engagements durables
(conditions de travail, éthique…), Exigences processus et produits, Bilan
carbone, Chartes éco-sourcing, Prise en compte du coût global, incitations et
contrôles, co-développement fournisseurs
Bibliographie CASTAY, V, LASSERRE, J,A, 2011, 16ème en-

quête annuelle sur les besoins en emplois et en
formations dans la logistique, AFT-IFTIM.
ABERRE, A, CARBONE, V, DONVAL, Y, MOATI,
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pp. 241-255. Observatoire de la supply chain.
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mework», Journal of Business Logistics, vol. 23, E, (Eds), Le développement durable au cœur de
n° 1, pp. 145-180. l’entreprise, Ed. Dunod, pp. 83-116.
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chains», International Journal of Physical Distri-

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portation Journal, vol. 41, n° 4, pp. 23-35. Union.
67

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2013/1 Volume 30 | pages 53 à 67

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Maud Van Steenberger

d’un site industriel ?

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 53 19/02/13 08:16

de valeur de la supply chain), des éco- dans le domaine du MDSC en faveur

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 54 19/02/13 08:16

nemental. La définition proposée par environnemental. En outre, une entre-

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 55 19/02/13 08:16

lenkopf et al. (2009), la mise en place comme un tout et un ensemble d’étapes

nantes dans une démarche collabo- le pas à un modèle cyclique» (Aberre

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 56 19/02/13 08:16

cing et d’approvisionnement, le stoc- composant la logistique socialement

transports en associant les notions sociales internes à l’entreprise qu’ex-

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 57 19/02/13 08:16

La mise en place d’actions état futur. Le VSM est une démarche

industriel : le tryptique prise Maier, équipementier allemand

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 58 19/02/13 08:16

l’utilisation de produits chimiques, Les éco-innovations :

– la mise en place de cartes KAN-

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 59 19/02/13 08:16

Ainsi les démarches d’éco-sourcing et d’éco-logistique sont en déploiement (niveau 3) alors

que la démarche d’éco-conception

Figure 1: positionnement durable de ABC selon le type d’éco-innovations et leur niveau

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 60 19/02/13 08:16

référentiel gestionnaire. tant une analyse globale du système.

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 61 19/02/13 08:16

axe porte sur le référentiel gestionnaire bilité (adaptative ou proactive). Quatre

Source : adaptée de la cartographie de Chandon et al. (2009)

proposer un nouveau système productif durable. Le positionnement de l’entreprise montre que

marche et prévenir des risques, puis vironnementaux en chaîne de produc-

de l’entreprise montre que la démarche nombre de camions en déplacement

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 63 19/02/13 08:16

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 64 19/02/13 08:16

Figure 3 : Modèle intégrateur pour réduire l’impact environnemental d’un site

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 65 19/02/13 08:16

Eco-conception Bilan carbone, Recyclabilité et revalorisation des produits, optimisation des

et validations, Normes et règlementations, groupes de travail et réseaux de

Bibliographie CASTAY, V, LASSERRE, J,A, 2011, 16ème en-

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 66 19/02/13 08:16

chains», International Journal of Physical Distri-

06_Fernandes&VanSteenberger 1 2103.indd 67 19/02/13 08:16

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