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J~ /M~

Année 1
) t BIBUQTHËQUE
DH PHtLOSOt'tHM CONTEMPORAtNE

L'ANNEE C

SQCtOLOGtQUE
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ÉMtLE DURKHEIM
~'[ofe<M)Nf de t~ei")''ttk A h t'<tcuh< 'te), tettrtt do )'UaiYet"iit<) <te Bontotmt

AVt!t;MOOLt.ttjO«*TtO'<DK!t)f.

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BtOHAHC. dMtM<'tt)<ttMt;E. t.EVV.'t"<'<M'<<hT«t)haM
aoUOLt. 'Mt'M <t' rmtttMMM t )'Ut.t'<M))< dt MmetjpttBtt
FAUCONWBT, HUeMT~AfX!, MAU66. A. M)t.WAUO, MUFFANQ. PAHOO<
S)M)AM&, )MftMmtt <~(f* <t"r~'t))<'<n)t<

ANNÉE
PRENtÈM (iMe-tMTy
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B. Btt~tetXt. – ta p~ftiMoK de MMCf~ et wt
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0. ShaMf). – CeMM<'x< <et /t)fMtM <M<<t~M M MMht-
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Des tmvaux du <" ju)))et tXM au M juin «9?. Sec~.
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Aott'MMt'~M~. – P<e)')t.
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PARIS
AMtBMKB UBBAtRtB GEttMBK BAtLLtt~B ET C"

FEUX ALCAN, ÉDtTEUR

<08, eoeLKVAttf eAtKT'o6<m*)K) <08

t898
L'ANNÉE

~'BIOLOGIQUE

Gi.
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LIBRAIRIE FÉLIX ALCAN

AUTRES TRAVAUX DE M. ÉMtLEDURKHEtM

De la division du travail social. <volumein-8", t893. 7 fr. 60


Les Règles de la méthode sooiologique. i volume in-tS,
MM. !!(-r.60
Le Suicide (étudesociologique).i vol. in-8", )89~ 7 h'. 60

C. BOUCLE.– Les Sciences sociales en Allemagne, les


méthodes actuelles. t vol. m-t2, t895. Sfr. 60
P. LAPiE. Les Cildilaations tunisiennes (MusumASs,tsKAË-
LITES, t vol. in.tS, t898
EUROPÉENS), 8 fr. 60
G. RtCHARD. Le Sooialisme et la science sociale, t vol.
in-t2,t89C. Zfr.60

~VtttUX,tttftttXtMtE PKCM*nt.<!8M~tOSStit
L'ANNÉE

SOCIOLOGIQUE C
.fUBU~ËSOUSLADtKECTtOX
A
EMtLEOURKHEtM
Pt~fesseur d~tpctoiugie & ta Faeutto de~ tettfcs de t'UniveMtK
deBordcauï.

.\Y)!CHCOLHBOMTtOSMi)M.

StMOE).,j'roffMtMft )TBittM)t<de Btriin;


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MCM<mD, M-tem
t . de muM !t )<F)(t)))ttde dm)) de ToMtouK:
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BOUO).É,mtttre de fonMrcMMt t'L'toMrtiKde Moxtjtt.~tt.r!
FAUCCNMET,HU6EHT, LAPtE,HAUaa. A. Wtt.HAUO,MUfFAttO. PAMO),
8)M)AMO, ))mfMwnf<)tj~<tde )'t'<titcr<)M.

PREMIERE ANNÉE (M96.MC7)

). MÈMOREaORtO)MAU)t
K. B<trh)tet)tt. – t« ~M/ott/MK </e /'<Mt-M~ et
Of'tj/MC~.
t!. SbMM<'L – CoMtMt'<t//M /'onMf~ MCta/M «* ttXttH-
/tMK<'M~.
Il. ANALYSES
Uea tmvat<![ du )"jui)tct t8B6 mu 30 juin t!!9T..Softo-
<09t'e f/<')t~ff<< tf/'j/tCtMc. MMfatf, jMt-Mx~Ke,<-t'tM)i-
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Kf//f, <'CaMeK«~Mf. MtMMW.

PARtS
ANC!EXXË HBRAtUtE GKKMER BAtLHËKE ET C''

FÉLIX ËDtTEUR
ALCAN,
i08, BOUm'ABO SAtST'CBnMA)!<, <08

i898
Tottt dfoih rfMtt<<.
PREFACE


L'.htKt'c Mf/o~t~Mfn'a pas pour seul ni même pour
principal objet de présenter un tabtcau annuel do l'état où
setrouve lu titt6)'aturo~<'<Mf'M~-oct'a~u< Ainsi circons-
crite, la tache serait trop restreinte et do médiocre utilité
car les travaux de ce genre sont encore trop peu nombreux
pour qu'un organe bibliographique spécial soit nécessaire aux
travailleurs. Mais ce dont tes sociologuesont, croyons-nous,
un pressant besoin, c'est d'être régulièrement informés des
recherches qui se font dans les sciences spéciaies, histoire
du droit, des tnœurs, des retirions, statistique moraie. sciences
économiques etc.. car c'est ta que se trouvent les matériaux
avec lesquels la sociologie se doit construire. Répondre à ce
besoin, tel est, avant tout, le but de la présente publication.
11 nous a paru que, dans état actuel de la science, c'était
le meilleur moyen d'eu luter tes progrès. En e)ïet, les con-
naissances qu'un sociologue doit posséder, s'il neveut pas se
iivrerà un vain exercice de diatectiquo, sont tellement éten-
dues et variées, les faits sont si nombreux, épars de tant do
côtés qu'on a grand mai a les trouver et qu'on risque tou-
jours d'en omettre d'essentiels. JI est doue désirable qu'uu
travail préliminaire les mette davantage à ta disposition
des intéressés. Sans doute, à mesure que lu sociologie se spé-
cialisera, il sera plus facile fi chaque savant d'acquérir lit
compétence et l'érudition nécessaires pour t'ordre particulier
de prohtemes auquel il se sera consacré. Mais il s'en faut
que
ce moment soit atteint. !t y a encore trop de sociologues qui
dogmatisent journellement sur le droit, la morale, la religion
avec des renseignements de rencontre ou mémoavec les seules
lumières de la philosophie naturelle, sans parattre soupçonner
'hh.t.~
,1..t
K.))UMM)!)t).–Aun<'et!M'iot.iM7.n". «
M PKKFAC)!
_1_
qu'un nombre considérable de documeMtsont été, d'ores et
déjà. réunis sur ces questions par tes écoles ttistoriques et
ethnograpttiques de t'Alternante et de l'Angleterre. Ce n'est
donc pas faire une (cuvre Inutile que de procéder
périodique-
ment ù un inventaire de toutes ces ressources, eu
indiquant, au
moins sommairement, que) profit peut eu retirer in
sociologie.
En dehors m~ne des vues et des recherches qu'eiies peuvent
suggérer, ces analyses muthodiquesd'ouvragesspéciaux, mais
qui se complètent les uns les autres, ne sont-elles pas de
nature a (tut)tter. de ce qu'est lu rcitiitc collective, une im-
pression ptus vivante et mente une notion plus juste que les
generaiitesordinairesauxt)'aitesdep)ti)osop))iesociato?Aussi
espérons-nous t-fussir à intéresser, non seulement les socio-
loguesde profession, mais tous les lecteurs éclaires que pt'Éoc.
cupeut ces problèmes. ti importe, eu ellet, que le public se
rende mieux compte de ta préparation qui est nécessaire
pour
aborder ces études, u(in qu'il devienne moins
compiaisant aux
coustructious faciles, plus exigeant en fait de preuves et d'in-
formations.
Mais notre entreprise peut être encore utile d'une autre
manière elle peut servir a rapprocher de ta
sociologie cer-
taines sciences spéciales qui s'en tiennent trop éloignées
pour
ieur plus i<'randdommage et pour le Nôtre.
C'est surtout à l'histoire que nous pensons en
partant ainsi.
Ils sont rares, même aujourd'hui, les historiens qui s'iaté-
ressent aux recherches des sociologueset sentent qu'elles les
concernent. Le caractère trop général de nos théories, leur
insuffisante documentation fait qu'on les considère comme
négligeables on ne leur reconnaît guère qu'une importance
philosophique. Et cependant, l'histoire ne peut être une
science que dans la mesure où elle explique, et i'oh ne
peut
expliquer qu'en comparant.Sterne la simple description n'est
guère possible autrement; on ne décrit pas bien un fait
unique ou dont on ne possède que de rares exemplaires parce
~M'OM nr de voit ~<Mt«'H. C'est ainsi que Fustet de Coulanges,
maigre sa profonde intelligence des choses historiques, s'est
mépris sur la nature de la ~Hs où il n'a vu qu'une vaste
famille d'aguats, et cela parce qu'i! ignorait les analogues
ethnographiques de ce type familial. Le caractère véritable
du Mcn- romain est bien difficile à apercevoir et surtout a
comprendre si on ne le rapproche du ~<w polynésien. Les
exemples que nous pourrions donner sont innombrables.
t'M)~.U:H )))

C'est donc servir la cause e.In


de Irl,iel.,l. .1r"
l'histoire que d'amener tn.a_
i'histo-
rien & dépasser son point do vue ordinaire, à étendre ses
regards ou delà du pays et do la période qu'ii so propose plus
spécialement d'étudier, ù se préoccuper des questions gêné.
rates que son lèvent tes faits particuliers qu'il observe. Or, dès
([U'ettecompare, l'histoire devient indistincte de la sociologie.
1)'un autre côte, non seulement la sociologie no peut se pas-
ser de l'histoire, mais e)te a même besoin d'historiens qui
soient en même temps des sociologues. Tant qu'elle devra
s'introduire comme une étrangère dans te domaine historique
pour y dérober, en quelque sorte, les faits qui l'intéressent,
elle ne pourra y faire que d'assez maigres provisions. Dépay-
sée dans un milieu auquel elle n'est pas accoutumée, il est
presque inévitable qu'elle ne remarque pas, ou qu'eue n'aper-
çoive que d'une vue assex trouble, les choses qu'elle aurait le
pins d'intérêt a bien observer. Seul, l'historien est assez fami-
iier avec l'histoire pour pouvoir s'en servir avec assurance.
Ainsi, bien loin qu'elles soient en antagonisme, ces deux dis.
ciplines tendent naturellement l'une vers l'autre, et tout fait
prévoir qu'elles sont appelées à se confondre en une disci-
pline commune on les éléments do t'uno et de t'autro se
retrouveront comhinés et unincs. 11paraît également impos-
sible et que celui dont le rôle est de découvrir les faits ignore
daus quelles comparaisons ils doivent entrer, et que celui
qui les compare ignore comment'ils ont été découverts. Sus-
citer des historiens qui sachent voir les faits historiques en
sociologues, ou, ce qui revient au même, des sociologues qui
possèdent toute la technique de l'histoire, voilà le but qu'il
faut poursuivre de part et d'autre. A cette condition, les for-
mules explicatives de la science pourront s'étendre progres-
sivement à toute la complexité des faits sociaux au lieu de
n'en reproduire que les contours les plus généraux, et en
même temps l'érudition historique prendra un sens puis-
qu'elle sera employée à résoudre les plus graves problèmes
que se pose l'humanité. Fustet de Coutangesaimait à répéter
que la véritable sociologie, c'est l'histoire; rien n'est plus
incontestable pourvu que l'histoire soit faite sociologiquement.
Or le seul moyen qu'aient les sociologues do préparer ce
résultat, n'est-11pas d'aller spontanément à l'histoire, d'entrer
en contact avec elle, de lui montrer quel parti peut être tiré
des matériaux qu'elle accumule, de se pénétrer de son esprit
et de la pénétrer du leur ? C'est ce que nous avons essayé de
v PH~'ACK
faire dans
daas les analyses ou'au
qu'au trouvera plus loin. Quand 00
verra que la sociologie n'imptique aucunement le dédain des
faits, qu'etie ne recule )meme pas devant le dotait, mais que
tes faits n'ont de signification pour l'intelligence que quand
ils sont'~roupfs eu types et eu lois, on soutira mieux, sans
doute, ta possibilité et la nécessite d'une conception nouvelle
où le sens do ta réalité historique, dans ce qu'elle a de plus
concret, n'exclura pas cette recherche Méthodique dessimiii-
tudes qui est ht condition de toute science. Si t'.tHH~ffocM~o-
~'<yt<('pouvait coatrihuer, si peu que ce fût, ù orienter quelques
bons esprits daus cette direction, nous M'aurions pas à regret-
ter uotre peine'.
H. Notre but ainsi défini, les cadres do notre publication
se trout'aient, par cela ntetnc,détermines.
Si uotre principe objectif est de réunir tes matériaux
nécessaires il ta science, cependant, il nousa paru qu'il serait
bon de montre)' par queiques exemples comment ces maté-
riaux peuvent <)tremis en (Buvre. Kous avons donc réserve la
première partie do !t;<Mf'f aux ~Mo«'M <M'<M«.r.Nous ne
demandons pas aux travaux que nous publierons sous ce titre
de 'se conformer a telle formule déterminée H nous suffit
qu'ils aient un objet défini et qu'ils soient faits avec méthode.
Eu nous imposant cette"douhie condition, nous n'entendons
nuitemeut exclure la sociologie gcn6ra!e on pourra s'en
assurer plus loin. C'est une branche de lit sociologie, non
moins utile que les autres, et, si eiie prête plus facilementà
l'abus des généralités et à ta fantaisie, ce n'est pas par une
nécessité de sa nature. Cependant, nous avouons que nos
.enorts tendront surtout u provoquer des études qui traitent
de sujets phts restreints et qui ressortissent aux branches
speeiates de la sociologie. Car, comme lu sociologiegéneraie
ne peut être qu'une synthèse de ces sciences particulières,
comme elle ne peut consister que dans une comparaison de
leurs résultats les plus généraux, elle n'est possible que dans
la mesure où elles sont eties-mômes avancées. C'est donc à
les constituer qu'il faut, avant tout, s'appliquer.

0) Tout< <)ui))n''r)''dnpoon-Mit
s'tppthjttcr&tftstatistique.Mit~cntK).
mhjucsoit tuomk',t)ui, ei~ fta~N,n'estitMtmctive tju'AcunditiuM d'~tM
Cf)H))))th:Si n«ns)KH-)<))~ptus .<)~<-iMiu<Ut;))t K'fst
t)Hi'hi~toim. ')ttt'.<)tttM
i'etat a'-tuetf)Mt-tK~es.<'t)~eut ))[i:uU)t't' <)et'it)VCj)ix<ttion
p)i)K'i))tt)c
et que. <)'tn)h!UM,
t!0(-it)h<xi<)Ut' ellerésistepluspai'ttcafitMMent Ht'vo)p)ot
dela méthodecmopatttth'e.
PKAfACE v

Lasecondepartie de l'ouvrage,et la ptus considérabte,est


consacréeaux analyseset aux noticesMbiiographiquea. Mais
commele domainede la sociologie est ottcorebienmatdéfini,
nousdevions,tout d'abord,circonscrire)ecercledes travaux
dont t'/tttnt'f .<!OCM<o~M/)<f
entend s'occuper,afinde prévenir
les choix et les exclusionsarbitraires.En un sens, tout cp
t~ujest historiqueest sociotogique. D'unautrecôté,tes spècu.
tations de ta philosophiesur ta morate,le droit, ia retigiou,
peuvent n'être pas sans intérêt pour le sociologue.11était
donc nécessairede nous marquer unedoublelimite.
Du cûté de la philosophie,elle était facile&déterminer.
Toutestesttoctriues qui concernentles mmurs,le droit, les
croyances religieuses, nous concernentpourvu qu'elles
admettentle postulâtqui est la conditiondetoutesociologie,
à savoir l'existencede lois que la réflexion,méthodiquement
employée,permet de découvrir. Par là, nousne voulonspas
dire qu'il faille nier toutecontingencepourêtre sociologue
la sociologie,commelesautressciencespositives,n'a pas à se
poser ce problèmemétaphysique.Ellesupposeseulementque
les phénomènessociauxsontliés suivantdes relationsintel-
ligibleset accessiblesà l'investigationscientifique.
Par suite,
elle n'a pasà tenir comptedes systèmesqui partentde l'hypo.
thèsecontraire.Les tempssont passésou il pouvaitêtreutile
de les réfuter; si peu avancéeque soit notre science,ellea
dès A présent produit assezde résultatspour n'avoir pas à
justifierperpétuetiementsesdroits à l'existence.
Du côtéde l'histoire, ta lignede démarcationest plus ilôt.
tante. Etie ne peut mêmeêtre fixéeque provisoirementet
doit, selontoute vraisemblance,se déplacerà mesureque la
science ette-mêmeavancera.Cependant,une règle tout au
moinspeut être posée..Lesseuls faitsque nousayonsà rete-
nir ici sont ceux qui paraissentsusceptiblesd'être, dans un
avenir suffisammentprochain, incorporésdans la science,
c'est'à-dire qui peuvent entrer dans des comparaisons.Ce
principe suffità"6Hminertes travaux où te rote desindivi-
dualités historiques (législateurs,hommesd'État,généraux,
prophètes,novateursde tout ordre, etc.)est l'objetprincipal
ou exclusifdela recherche.Nousendironsautantdesouvrages"
qui s'occupent uniquementà retracer,dansleurordrechro-
nologique,la suite des événementsparticuliers,des manifes-
tatioussuperficiellesqui constituentl'histoireapparented'un
peuple déterminé(suitedes dynasties,guerres,négociations,
1

V rMXfACË

histoires parlementaires). En nu mot, tout ce qui est biogra-


phie -w<f(/M «t</<t-«<<M,soit ~<'o«c<('<f('f!est, actuetiementt
sans utilité pour le sociologue. C'est ainsi, d'aitteurs,
que le
biologiste u'accorde pasgrande attentionu t'ttistoire extérieure
des péripéties par lesquelles passe, au cours de sou existence.
chaque organisme individuot. Sans doute, nul ne peut dire
que ces diverses parMcutarités soient, à jamais, réfractairesâà
la science mais le temps ou il sera peut-ôtre
possible d'en
tenter une explication, même partielle, est tellement éloigné
que c'est perdre sa peine que de s'y attacher. En définitive,
ce qu'on appelle un fait scientifique, c'est tout simplement
ua fait mur pour la science. Or, les conditions de cette matu-
rité varient naturellement suivant que la science est plus ou
moins développée. C'est ce qui fait que, à un moment donné,
tous les taits u'ont pas ce caractère et c'est
pourquoi le
savant est obligé de choisir et d'abstraire ceux qu'il lui parait
utile d'observer.
Ln matière de nos analyses ainsi délimitée, nous devions
nous faire unejnéthode de cnttque qui fut eu rapport avec le
but que nous poursuIv6ns."Xous ne pouvions nous en tenir
à la conception courante qui fait du critique une sorte de
juge
qui rend des sentences et classe les talents. La postérité seule
est compétente pour procéder à ces classilleations
qui, d'ail-
leurs, sont sans utilité pour la science. Xotre rôle doit être
d'extraire )6 résidu objectif des œuvres que nous étudions.
c'est-à-dire les faits suggestifs, les vues fécondes, qu'ettos
soient intéressantes par leur vatour intrinsèque ou par les dis-
cussions qu'elles appellent. Le critique doit se faire le colla-
borateur de son auteur, et son collaborateur reconnaissant;i
car si peu de chose qui reste d'un livre, c'est autant d'acquis
pour la science. Cette part de collaboration est rendue ptus
importante encore et plus nécessaire, en ce qui nous concerne,
par le caractère des ouvrages dont nous avons à parler.
Comme beaucoup d'entre eux ne sont pas explicitement socio-
logiques, nous ne pouvions nous contenter d'en inventorier
le contenu, de livrer à l'état brut, pour ainsi dire, les maté-
riaux qu'ils contiennent mais it nous fallait les soumettre,
autant que possible, à une première élaboration, qui indiquât
au lecteur quels enseignements s'en dégagent pour le socio-
logue. AUnque ces indications fussent plus sensibles, toutes
les analyses d'ouvrages qui se rapportent à une même ques-
tion ont été groupées ensemble de manière à se compléter et
t'M)!pA(:K Ht
A s'eetairer mutuellement. Ces rapprocltements constituent
déjà, ptu' eux-mêmes, des comparaisons qui peuvent être
utiles.
Tei est notre programme.Pour t'exécuter, ua certain nombre
de travailleurs ont réuni
leurs efforts après s'être entendus
sur les principes qui viennent d'être exposes. Et peut-être
u'estce pus un fait sans importance que cette entente spon-
tanée en vue d'une entreprise commune. Jusqu'à présent, ta
sociologie est
generatonent restée œuvre untinemment per-
sonuelle les doctrines tenaient etroitementà t'individuatitc
des savants et u'on pouvait être detac~tce. Cependant la scieuce,
parce qu'elle est objective, est chose esscntieitement imper.
sonnette et ne peut progresser que grâce a un truvait collec-
tit. Pour cette seule raison, et indépendamment des résultats
utilesqu'elle peut avoir, notre tentative mérite, croyous-Mous,
d'être accuuittie avec intérêt par tous ceux qui ont ù c'rurde
voir ta sociologie sortir de la phase et prendre
philosophique
enfin son rang parmi les sciences

~)~U).')<jUM w~ <)'t":))t)t'uUon ~r lu ~tio~' u ht.ja~)~- m)<)Mr)cn)


tL's t)'a\'uux ttnitty~ Hn prith'ijtc. )ton.< n)tun.< du jtn'tuit'r jHifh't (t'unc
ant)c<' )m jXt'tuit'rjuiUt't <)<'t'tmK<<'<)))!.<ui).Xutt:<(n-o))-.choisi ''<')))'cu«).
biotti~-un purcf <)U< p"t)t' d' mi.otU!: d'ontn- intérieur, <-))('fiK-ii!)).- tt; tm-
nti) df tvdm'tiun ~t txms )'<'n)«'ttMt)).'pumttr''r~){unt'n')u<'t)tKU(-t)tnn)t'n.
ccnh'nt ')<' <')))[()'«' nttt)' X"U!: nous n~crvons, (t'aiih'UM. lu tn"t))t)! <)t'
rc'Vf'tUt'un p);u est tn't'h'tt'. s'i) y u )i<'u. pottr t~jnu~t' )<< 'ttnx~i'ot.i invo.
tontuht' qm' nuu< puuM'h)))At-uttOtK'U~. t) ))')U:. pm-nf). <« ctM, «uf.
(-ot)tttM'))"hf but n'est paii df ptfiicah'r ))~tnK)h)t~')t)''nt )t; tdhh':m tfanf
M'it'ttc~ t':ut' Xttus 'h' n'Mttir t<'< tootMt'ioux tx't't'~sitit'M pom' fHirt' ~U<'
iit:k'Mt' t<' n'spcrt t~UjM'r~titK'))): du ))))ttt!t'))))<'est ~n~ t'aix~t) d')~))' L'es.
.<f))ti)') L'.<tt)Vt< )t' plus <'<m)j)h'tjxt~ihtt' et <)'' t'ai)')' moo.ttttt'. Mt-c-c uo
iU)''n n'tard. tout <'<'qui Xt~t-it~'dVttt' fonnu. M~mt-il ;)')))<''<) tu'rh'<?Ct'ttt'
h)))), dut)!! tt'ut!- <tH t)U)ttm <'Uf;.)h' )'<'tt)ont<'t'jus~ju')) t8'C. Max ce ~unt d('!i
<')n:upti~n'<<tMipt.'Mt'fttt !i'c\p)i'))h'r um')<rc)))i')'u attn'c, tuais n'utu'uttt ptu".
nous )'f!!)«?n)U<.M.«' tt'ttouvftt'r datts t'ttvoir.
Xott!- ))ri«us d'utUcur~ ic h'ctf'ur d'' ))c ''t)tt.<i(Mret-t'e pD'fnit'r c'oi qut)
t-otttt))'' U)h' iodicutiun d<' ce <jMfnous voudriun!) fai)'c. S'i) iw r<'nd compte
<h'i<di))i<'u)t<t )ju'' p~sentait uo'' h'tte t'Mtrcpnsc, if Mfst; ~-fu~ra p~ &
'):user d'itx't'itubtcs tûtoxn'Jtttcnti.
L'ANNEESOCIOLOGIQUE
t897

PREMIERE PARTIE

MËMOtRES ORIGINAUX

LA t'ROHtHH'ION DE L'INCESTEET SES 01(IG!J\ES


)'arM.ËM)t.6j)CHK)tË)M

Pour biencompreudreune pratiqueou uneinstitution,une


règlejuridique ou morale,il est nécessairederemonteraussi
près que possiblede ses originespremières car i~ya, entre
cequ'ette~estac.tueUejMent et ce qu'eH~j)éte~uneëf~tejtolt'
darité. Saus doute, commeelle s'esttransforméechemintai'
sant,tes causesdont elle dépendaitdansle principeontelles-
mêmesvarie: maisces transformations,a leurtour,dépendent t
de ce qu'était le point de départ. H eu est des phénomènes
sociauxcommedes phénomènesorganiques;si le sensdans
lequelils doivent se développern'est pas fataiementprédé-
termine par les propriétésqui les caractérisentà ieur nais-
sance,celles-cine laissentpas d'avoir uneinfluenceprofonde
sur toute la suite de leur développement.
C'estcette méthodequenous allonsappliquerau problème
qui fait l'objetde cette étude.La questionde savoirpourquoi
la plupart des sociétésont prohibé l'inceste,et l'ont même
ctasséparmi les plus immoralesde toutesles pratiques,a été
souvent agitée, sans que jamais aucunesolutionait paru
s'imposer. La raison de cet insuccès est peut-êtredans lit
&
manièredont la recherchea été conduite.Onest parti de ce
K.OoMMtM. t8H7.
AntXfC
i'Mtu)., )
!AKNtË !iOC!OMatQU6.
iMf
.,wt. 1 ,¿.
principe que cette prohibition devait tenir tout entière &
quelque état. actuellement observable. de la nature humaine
ou de ta société. C'est dune parmi les circonstances
pré-
sentes de ia vie, soit iudividueito soit sociate,
qu'on est at)é
cherctter ta cause détenninante do cette
réprobation. ()<
A la question aiusi posée, on ne
pouvait guère donner de
réponse satisfaisante car les croyances et les habitudes qui
semblent te ptus propres a expliquer et &justiner notre hor-
reur de l'inceste. ne s'expliquent ni ne se
justifient ettes-
mêtues, })arc-eque les causes dont elles dépendent et les
besoins auxquels elles répondent sont daus io
passe. Au lieu
donc de procéder ainsi, nous niions nous transporter d'emblée
aux origines mêmes de cette évolution,
jusque ia forme la
plus primitive que ht répression de l'inceste ait présentée
dans l'histoire. C'est la lui d'exo~antie. Quand nous t'aurons
décrite et que nous en aurons reudu
compte, nous serons
mieux en état do comprendre nos idées et nos sentiments
actuels.

Ou appetio exogamie la régie en vertu de


laquelle il est
interdit aux membres d'un même clan do s'unir sexueitement
entre eux. Mais ce mot de clan a été souvent
employé d'une
manière trop indécise pour qu'il ne soit pas nécessaire da te
définir.
Nous appelons ainsi un groupe d'individus
qui M consi.
dèrent comme parents les uns des autres, mais
qui recon*
MtssenJLËXctusivementcette parenté à ce signe très parti-
culier qu'ils sont porteurs d'un même totem. Le totem
tui-mème est un être, animé ou inanimé, plus généralement
un végéta) ou un animât, dont le groupe est censé descendu
et qui lui sert à la
fbts d'emblèmeet do nom cotieciiR Si le
totem est un loup, M~es jnembres du clan croient
qu'ils
ont un loup pour ancêtre et par
conséquent qu'ils ont en
eux quelque chose du loup. C'est
pourquoi ils s'appliquent
àeux'mômescette dénomination; its sont des
toups.j~etan
ainsi défini est donc une société domestique,
puisqu'il est
de se
composé gens qui regardent comme issus d'une même
origine. ~ais il se distingue des autres sortes de famiites par
E. DUHKUEtt). LA t'HOMMtTMN UË t'tXCKST)!

ce faitmK)
que la
)<) nf<fH)))~
parente vy est fondée ttn!ft)tnmnt<t
nat tomh'Mt
uniquement t.n.t
sur )ttla <m..
commu-
nauté du totem, non sur des relations de consanguinité déH-
nies. Ceux qui eu fout partie sont parents, non parce qu'Ua
sont frères, cousins tes uns des autres, mais parc&
qu'its portent tous te nomde tel animal ou de telle plante.
Le ctau ne se distingue pas moins nettement de lu tribu, du
village, en un mot de tous les groupes qui ont une base, non
plus verbaie eu quelque sorte, mais territoriale. Ou bien ces
sociétés ue connaissent pas du tout l'emploi du totem, ou
bieu.s'ii arrive qu'oiies.en aient un (ce qui est peu fréquent)
il n'est plus qu'une survivance et joue uu rôle enace. C&
n'est plus lui qui confère ia uaturatisatiou. de'morne que,
aujourd'hui, le fait de porter tel ou tel nom ne nous fait pas,
à lui seul, membres de telle ou telle famille. C'est donc t&
totem qui constitue la propriétc carac~éftstiqueductan.
Ce~posé, ta pratique de t'exogamie est facttoà comprendre.
L'a homme qui appartient au cian du Loup, paf exemple, n&
peut s'unir a une femme du mêmeetan ni mémoà une femme
d'un clau dinërent, si ce ctan porte le même totem. Car si tea~
clans d'une même tribu ont toujours et nécessairement des
totems distincts puisque c'est par là et par là seulement
qu'ils peuvent se distinguer tes uns des autres – il n'en est
pas de même de ceux qui appartiennent a des tribus difïé.
rentes. Par exemple, citez les tribus indiennes de t'Am6riqu&
du Nord, il y a des totems comme le toup, la tortue, l'ours,
le lièvre, qui sont d'un emploi très générât. Or, quette que-
soit la tribu, entre deux individus du morne totem, toute
relation sexuelle est interdite'.
D'après la plupart des récits, cette interdiction s'applique &
tout commerce sexuel eu général. Quelques observateurs
rap.
portent cependant que, dans certaines sociétés, les mariages
réguliers sont seuls astreints à cette règle; les unions libres
n'auraient pas en tenir compte. Ce serait le cas dans la
tribu de Port-Lincotn, chez les Kunandaburi, chez les peu-
plades du Bas-Murray et du Dariing inférieur Mais, outre
que ces témoignages sont l'exception, la question, par elle-
meme, a peu d'intérêt. A supposer que. à un momentdonne~
la toi d'exogamie ait distingué entre l'état de mariage et ce.

tt) V.Curr.~tM/<w/«M< Nm'm, n*SS.– t!htHh).Teu)on. du M«


(Mo<OM
fta~eel de <efamille,)). t<M.
(S)FfMar.TofetMMfM. p. 5'.).
4 !AN!<ËE !!OCtOLOG)QUK. t"f7

.e. 11.1 1-
qu'ondevaitappelerplus tard le concubinage,ta distinction,
à l'origine,étaitImpossible,pour l'excellenteraison qu'il n'y
avaitaucuncritèreauquelou put recouuaîtreune unionrégu-
lière d'une union libre. L'Australienprend femmede toutes
lesmanièrespossibles,par achat, par échange,par rapt vio.
lent, par enlèvementconcerté,etc. Tousles moyenssontbous
et touslui sontpermis.QuelledifMrence,dès lors, peut-ily
avoirentreune concubineet une épouselégitime? Pour qu'il
y ait mariage,encorefaut-ilque le commercedes sexes soit
tenu de remplircertainesconditionsdéterminéeset dont le
concubinages'affranchit.Par conséquent,ou ne voit pas
commentfa règlede l'exogamiene se serait pas appliquéeà
toutesles relationssexuettes.Dureste,mêmechezdes peuples
avancés,en Judée, à Rome, ta prohibitiondo l'incesteest
absolueet sans réserve,JI est donc peu probablequ'elle ait
admis de ces distinctionset de ces tempéramentsdans les
sociétésinférieures car c'est à cette phase de l'évolution
socialeque l'incestea été le ptus violemmentréprouvé.Tout
au plus peut-onse demandersi parfoisil a pu jouir d'une
certainetolérancequand il était commisau cours de ren-
contresaccidentelleset sans lendemain
Tout manquementà cette défense est très sévèrement
réprimé.Le plusgénéralement,en Australiecommeen Ame.
rique,la peineest la mort'. Cependantil arrive qu'un traite-
mentdidérentest appliquéaux coupables.Chezles Ta-ta-hi
(Nouvelle-Galles du Sud) l'homme est tué, la femmeest
simplementbattue ou blesséed'un coup de lance. Chezles
tribusde Victoria,la moindregalanterieentre gensdu même
clan est l'objetde mesuresrépressives la temmeest battue
par ses proches,et l'homme,déféréau chef, est sévèrement
réprimandé.S'ils'obstineet s'enfuit aveccelle qu'il aime, il
est seatpé Ailleurs,il ne semblepas qu'une peineeu forme
soitinfligée;maisalors c'est une croyancegénéraleet iadis.
cutéequeles coupablessont punis naturellement,c'est-à-dire
par lesdieux.Chezles Navajos,par exemple,on dit que leurs
os se dessèchentet qu'ils sont vouésà une mort prochaine.

t)<tn.<
(t) AUi.i'i. < )juis)th)-)t. h's)«t)t~!)et)))tr!ag)!.
t't)ipt<ticn)ns-n')t)s
dereMuM<'<mjtt);td' prM'jucftmttnei-ynuMymc!!
d'Mmut) sf.m)Ho.
etttwitt.A'M')<!<
(~V.!)!.<))) a"</A'«m</mo<.n.tiS. Cm')'t<M<<-<t<«M<
MacM. Ut,
(3)frM'-r.Op.cil..)).:M'.<:f.
)htW!.on./hM<<-a<tan
JtoMaMM. McH)oumc,
)8<t.
?. OUMKHHtM. UK(.'MCKSTK S
– LAt'HOHtBtTtOS 5
Ur, pour le sauvage, une telle menacen'est pas un vain mot
elle équivaut a une condamnation dont les effets sont plus
tufi)i))ib)es que si elle nvoit été prononcée par des juges
humains. Car, d'après les idées primitives, les puissances
redoutables qui peuplent !e monde réagissent contre tout ce
qui les onenso avec une nécessite automatique, tout comme
font les forces physiques. Un acte qui les lèse ne peut donc
rester impuni. La conviction que le châtiment ne peut être
Évite est même tellement abso)ue,.quo très souvent l'idée
seule do ta faute commise sufut &déterminer chez le coupable
de véritables désordres organiques et même la mort. Ainsi,
les crimes dont lu société ne poursuit pas directonent la
répression ne sont pas toujours les p)us veuieis. !i en est, au
contraire, qu'elle abandonne à icurs conséquences naturellos
parce qu'ils sont d'une exceptionnelle gravité et que, pour
cette raison, l'expiation doit se produire d'eUe-nx'tne ot
comme mécaniquement'. Les vioiations de la ici d'exogamie
sont dans ce cas; il.est peu de crimes q~i passent alors pour
plus abominables.
Dans ce qui précède, n<'ns avons décrit l'exogamie sous
sa forme la plus simple: mais eito présente des modalités
plus complexes. La prohibition s'étend souvent, non pas seu-
lement a un clan, mais à plusieurs. Ainsi, dans l'Amérique
du Nord, la tribu des-Ttinkits comprend dix ctans qui se
répartissent eu deux groupes très nettement distincts, de la
manière suivante 1
pnK)))Ktt'!))"t.'M ttKL'Xt&MH'.Mn'K
Ctandt'rOtu' (:t<)))d'')it(.t-<'nom)tt'.
<)t')'Ait:h'. –dt'i'Uic.
– du))<m)'))in. dt)t.it)nn)M)'i)).
)tuH''t)ni)). <h)t)ibuu.
d<'rA)gm'. –dt)S!H)m"n.

Or, les membres du premier groupe ne peuvent prendre


femme que duns le second et réciproquement. Les unions sont
interdites, non seulement à l'intérieur de chaque clan, mais
même entre clans d'un même groupe. On retrouve la même
organisation chez les Choctas et elle était autreh'is en vigueur

<))Ontrouvt'nt dM ('.tit-immd)tt!U!:
tt~n:' SMot~'t! JS~ttO~Metc
{!<u<<tt)t
:MfËM/<'aJ?!)<H'<cMMMj/</f)' 3t9
S<M/ tt, p. A ft suiv.
(:!)Mot'fpm.~M<'<M)< .focx~. p. tOi.
'6 t'AKKÉË SOCtOMQtOUE. <?'?

<:hMles Iroquois EuAustralie. elle est presque absolument


généruie. Ctmquetribu est divisée en deux sections que dési.
lignent des noms spéciaux chez les Kumitaroi. l'une s'ap-
pelle Kupathin et l'autre Ditbi; chez les Kiahuru (Queens.
iand), tes nomssont presque identiquement tes mémos chez
les uuandih (Austraiif du Sud Krohis et Kumites; citez tes
Wotjobattuk !Victoria), Krokttch et (.amutcth etc.
Chacune de ces sections est a sou tour divisée en un
certain nomtx'e de ctxus, et le cotmuot'ce sexuel est ixterdit
~utM tous tes c)ans d'une mOue secttou. Du moius cette
interdicUon était ta règle dans le pnucipe; aujount'hui. elle
tend u se rehtcher sur certains points, mais elle est encore
très fréquente, et, même où elle
disparu. la tradition en
conserve le sot)\'en)r.
Cette extension de )a loi d'exogatnte est simplement due a
un développement du clan. En effet, quand uactuu ~'accrott
au delà d'une certaine mesure, sa population ne
peut pas tenir
dans le même espace: elle essaime donc uutour d'eite des
colonies qui, n'occupant pas le tneme habitat,
n'ayant pas
les mêmes intérêts que le groupeinitia) donteiios sont issues,
finissent par prendre un totem qui leur
appartienne en
propre, et elles constituent dès lors des clans nouveaux.
Néanmoins, tout souvenir de l'ancienne vie commune n'est
pas aboli du même coup. Tous ces clans particuliers ardent
pendant longtemps le sentiment de.leur solidarité première
ils ont conscience qu'ils ne sont que des
parties d'un même
clan, et par conséquent tout mariage entre eux leur apparalt
comme aussi abominable qu'avant leur
séparation. C'est seu-
lement quand ie passé commence Fis'oublier
que cotte répu-
gnance diminue et qu'on voit à nouveau i'exogamiesereo.
termer dans les limites de chaque clan. L'exemple des Séné.
cas Iroquois montre que ie sentiment de l'unité
originelle
devait conserver une assez grande vivacité pour produire ses
ettets. Les huit ciansdont était formée ia tribu étaient encore
répartis on deux groupes dinérents et l'on savait très bien
que le mariage avait etf autrefois interdit entre tons les
clans d'un même groupe. Maisce n'était plus qu'une réminis-
cence historique, sanséche dans les cœurs; c'est
pourquoi
les unions étaient permises de clan à clan.

(1)MwtMH. ~<. < )).!tt)~t


)<)9.
~) !nuK't'.ro~MtfW),
(). K~)
H. CUKKUËfM. LA )'BO)t)B)T)ONBR ~t!<CH8Tt! 7

Ainsi, cette exogamie plus largo ne dinere pas en nature de


celle que nous avons observée en premier lieu; elle repose
sur le même principe. Elle dépend des idées relatives au ctan.
11y a lieu seulement de distinguer, parmi les sociétés qui
méritent d'être npnetees ainsi, deux espèces diuereutea le
-dan primaire et les ctans secondaires. Ceux-cisont des frag-
ments du premier qui s'en sont détaches, mais de telle sorte
que tous tes liens ne sont pas détruits entre les segments
(unsi formes, Inversement, on appelle primaire le ctan primi-
~U!tel qu'it était avantd'être subdivisé, ou bien encore i'agré-
gut torm' par ces différentes subdivisions, une fois qu'eites
sont constituées. On lui a aussi donné )e nom do phratrie,
parce ')uc la phratrie des tirées soutenait le même rapport
avec tes 'i' ti n'y a aucun inconvénient à se servir de cette
expression pourvu qu'il suit bien entendu que le type social
!ainsi dénomme est identique en nature au ctan proprement
dit.
Plusieursfaits démontrent que les clans, ainsi réunis dans
un même groupe exogame, ont bien cette origine. 1)'abord,
c'est partout une tradition qu'il existe entre eux des liens par.
ticuliers de parenté ils se traitent mutuellement de frères,
tandis que ceux de l'autre phratrie sont seulementtours cou-
sins'. En second lieu, la phratrie a parfois un totom qui lui
est propre tout comme le clan c'est l'indice qu'eite est elle-
m~me, on tout au moins qu'elle a et6 un clan, EnHn, dans
certains eus, le totem des clans fragmentaires est évidem-
ment dérive de celui do la phratrie ce qui prouve que le
même rapport de dérivation existe entre les groupes cor-
respondants. Par exemple, les Tliukits comptent deux
phratries. La première a pour totem ie C<x'&<'ftM <t<w;or les
ctans particuliers dont elle est composéesont te Cot'tfaMt«M'<\
la Grenouille, t'Oie, etc. La seconde a pour totem collectif le
toM/); les ctaus qu'elle renferme sont le ~«~, t'Ours, l'Aigie,
etc. En d'autres termes, le premier clan de chaque phratrie
a pour totem le totem même de ta phratrie tout entière; c'est
donc qu'il est très vraisemblablement le clan initiai d'où
tous les autres sont issus, 11est en efïet naturel que son
nom soit aussi devenu celui du groupe plus complexe auquel
il a donn~ naissance. Cette filiation est encore plus apparente
chez les Mohegans. La tribu trois phratries l'une
compr~td
(1)Mut')!)tn.
Op.cM.,p. M.
L'ANNÉESQCNLOOOUE. )M7

d'elles a pour totem la tortue; tes c!ans secondaires aoat la


Petite Tortue, la Tortue des marais, la Grande Tortue. Tous
ces totems ne sont que des aspects particuliers do celui
qui
sert a toute la phratrie. On trouve des faits analogues chez les
Tuscaruras
Ce processus de seumentatiou une fois connu, les variantes,
en apparence bizarres, que présente parfois la loi
d'exoga.
mie deviennent aisemfnt explicables. Une des plus t'tran~es
est celle que l'ou a observée chez les peuplades de New-Xor.
ciadanst'Austraiieoccidetttaie. La tribu est fornx'e do deux
clans primaires, de ctmcuu dosquets trois ct)u)s secondaires
sont descendus:

t'Mt:)ttKM<;).tH)MAUU:Ut:t\)(:MHC.HXt'KtMA)HE
.MuOtt~n.)). X"!Htf)tuk.
C).m<t'(:umt:mvs,?'f')-t<)' 7~<.f/<'u<
'T«)«)w<'j'. ~d:))'

Nui ne peut se marier dans sou clan mais, de ptus, Tira-


rop ne peut s'uuir ni à Mondorop ni ù Tondorop, taudis que
Mondorop et Tondorop peuvent s'unir outre eux quoiqu'ils
appartiennent &uuem~me phratrie. ))e mente, toute relation
sexuelle est interdite entre Jiragiok d'une part, et ~oiognoket
Palarop de Fautre. mais uon entre ces deux derniers'. La cause
de cette r~tetneutation, qui paratt si orbitraire, est des
plus
A il
simples. l'origine, n' avait que deux ctaus. Mondorop
et Koioguok. HoAtoudoropse détacha d'abord
Tirarop; puis,
après un temps plus ou moins iong, Tirarop, à son tour.
essaima Tondorop. Tirarop se trouva ainsi en étroites rela-
tions de parenté avecles deux autres ctans, puisqu'il était né
do l'un et qu'il avait engendre l'autre; c'est pourquoi toute
union fut interdite entre eux et lui. Mais comme entre Mon-
dorop et Tondorop il n'y avait, au contraire, aucun rapport
de filiation, au moins direct, ils étaient étrangers l'un
pour
l'autre, et la m~meprohibition n'avait aucune raison d'être en
ce qui les concernait. La situation
respective des clans de
l'autre phratrie s'explique de la même manière

t) V. F)-M')'.f<~fN)Mnt.
j).<i).<:t.
(~ Curr./tM~-a<t«M /tafM,). 3~0.
(:</Cf.Kuhh'r.ZMft''<~<'«-/«c/</<-
</f<-
A'/tf.)).;iu.
– M FHOntM!T<0!<
E. CUHKttEtM. t)KL'ttCESTH N

Ainsi l'exogamie est solidaire du clan. Cette solidarité est


même tellement étroite qu'elle est réciproque xotMHf con-
t)«!MO«4' /~t<!</('('h« ~M<t'~MK~ <)~<~(0<<<OM <;<</t'M)M
<~qui
/«' .fott<M~Mf. C'est dire du même coup quelle est ou quelle
a dû être la generatitc de t'exogamie; car on'sait Hquel point
l'institution du ciau est uuiverseHe. Toutos.Ies.spci~iÈsjcm
sont~assfes eites-tnômes par ceUe organisatioM,ou sont nées
d'autt'fi! sociétés qui avaient primitivement passe par i&. U
est vroi que quelques auteurs ont cru pouvoir qualifier d'en-
dogames certaines tribus australiennes qui sont pourtant
composées de dans mais c'est faute d'avoir distingue outre
les associations proprement totémiques, qui seules sont des
clans, et tes associations territoriales qui se superposent par-
fois aux précédentes. H est fréquent en effet que lu société
ait une double organisation qu'outre lesgroupes parheisdont
le totem fait t'unite elle encotnprenne d'autres, qui reposent
exclusivement sur la communauté de l'habitat et qui ne se
confondent pas avec les premiers. Une circonscription terri-
toriale do ce genre peut très bien contenir ou des clans 'ju des
fragments de cians dinerents. Par suite, les habitants d'un tel
district a'out pas besoin d'eu sortir pour observer la loi d'exo-
gamie, car ils y trouvent des femmes auxquelles ils peuvent
s'unir, précisément parce qu'elles ne sont pas du même clan
qu'eux. Autrement dit, le district est endogame, mais il doit
cette particularité à ce qu'il est fait de clans exogames.
D'un autre côté, il n'est pas douteux que tecian, tout en
ditïcrant.de la famille telle que uous t'entendons aujouj'd'Jujd.
ne laisse pas de constttuer une société domestique. Nouseu-
lement les membres qui le composent se considèrent comme
descendus d'un même ancètre, mais les rapports qu'ils sou-
tiennent tes uns avec tes autres sont identiques à ceux qui de
tout temps ont été regardes comme caractéristiques de la
parenté, Pour ne citer qu'un exemple, pendant des siècles la
vendetta a été le devoir familial par excellence l'ordre dans
lequel tes parents étaient appetés à t'exercer était l'ordre

()) v. CMM'.
f. <)< t, ton.
L'ANNÉESOOOLOMtQUE.tttCt

même des parentés. Or, dans le principe, c'est au cian


qu'etto
incombe. On peut mémo dire que. daus les sociétés infé-
rleures, les liens qui dérivent du ctaa priment de
beaucoup
tous les autres. Si un homm' dit Cunow a doux lemmes,
l'une du chm Nt;otak et t autre du clan Xagarnuk
(totems
usités chez tes tribus australiennes du sud.ouest), et s'il a de
chacune un eufant, comme la fitiationestut'rit)e, le
premier
sera un jetait comme sa mère et le second un
Xagarnuh.
Or le petit ~otak se sentira
beaucoup plus proche parent
d'un X~otak quelconque. même appartenant ù un autre dis-
trict, que de sou demifrère Xagarnuk avec lequel it a été
éievé et pourtant, it peut très bien se (aire qu'it ait eu tout
au plus l'occasion de rencontrer le premier à
quelques rares
cérémonies re)i{{ieuses.Par coust-queut, puisque l'inceste
consiste dans une union sexuetie entre individus
parents à
un degr~ prohibe, nous sommes {oud6t voir dans
t'exogamie
une prohibition de t'ioceste.
C'est même sous cette forme que cette
prohibition est
apparue pour la première fois daus l'histoire. En enct, non
seulement elle est ~'n'-raie dans toutes les sociétés inférieures
et d'autant plus rigoureuse ((a'eites sont plus
rudimentaires,
mais ou ne voit pas quel autre principe aurait
pu primitive-
ment donner naissance à des interdictions similaires. Car
toute répression de t'iueeste suppose des relations familiales
reconnues et organisées par la société. Cette-ci ne
peut
empocher des parents de s'unir que si elle attribue à cette
parente un caractère social autrement, elle s'en désintéres-
serait. Ojt_te_eta~estja_pren)ierc
sorlede fami))eqm ait et6
socialement constituée. Sans doute, le clan australien com-
prend déjà dans son sein des familles plus restremtes,
formées d'un homme, de la femme ou des femmes avec Ja-
quelles il vit, et de leurs enfants mineurs; mais ce sont des
groupes privés, que les particuliers font ou défont ù leur gré,
qui ne sont astreints à se conformer à aucune norme déunie.
La société n'intervient pas dans leur organisation. !)s sont au
clan ce que les sociétés d'amis ou les familles naturelles
que
nous pouvons fonder aujourd'hui sont à la famille
légitime'.3.
Oa-S_~uj~r_djnJionr~de combtei.)Ja..BarMté_du_ctan est
alors supcjjeure &tous jtes rapports de
consanguinité..C'est

<t)~« f<t-M<<M-/ta/'h-0)'aonho<;o))Fn
(~- .)M<w<H'~f)'.
p.
(~ V.ptusbast'at)a)y~.)M)h-re
(t.-Gro~c.
H.ttU)tK)))MM.
LAt'MtUBtTtON
DEL'tttCHSTE H
elle qui fonde les seuls devoirs domestiques que ta société
sanctionne, les seuls qui aient une importance sociato.Si donc
e~~e~ta)L~u~iUvBjnButJa~arontepa~-e)~eHce~'M~H~
ausgjH-.sub'aj)). tputo.Ki'aisetubiuuce, .qd a dàdouuer-nais-
sance aux premières règles de t'htcesto; tout au
moins, si d'autres relations n'ont pas tard)' a avoir le même
ellet, ce ne peut être que pur analogie avec les précédentes.
Cependant, nous ne pouvons nous en tenir a ces considéra-
tious trop exclusivement dialectiques. En fait, même parmi
les sociétés les plus rudimentairesque ('on connaisse, it enest
bien peu ou, à côté des interdictions caractéristiques de !'exo.
gamie, i) nes'en rencontre d'outrés qui, au premier abord, pa*
raisscnt être d'une espèce difterente. Il importe donc de tesexa.
miner afin de voit' si reeUement elles ont une autre origine.
Les plus importantes sont <'eites qui tiennent a ce qu'on
appeiie en ethnographie le systt'me des classes.
))ans un très grand Homhrede tribus australiennes. !a divi-
sion en ctans primaires et secondaires n'est pas seule :)ne''ter
les rapports des sexes. Chaque cian est de phts divise en
deux ctai:ses que désigne un nom specia). Ces noms sont tes
mêmes pour tous les ctansd'uoe même phratrie: muisiisdit-
ferent d'une pi) rotrieul'autre, Pour une tribu qui, comme c'est
la régie en Austratie, comprend deux phratries, il y a donc
en tout quatre classes nominalement distinctes. Voici, par
exemple, quelle était cette organisation chez tes Kamitaroi
<:).X!).:Cf<))A)HHi t:U~KS
HonnuM.tt'ntntpt.
iM't)')'i–M!t)n.
t.()po.su.n..
-i_K..ht.
~"t'hnm-)' < 'iMnm-))!HH.
(Ui)bi) !K.j,
J.g..n,o. ()t'tt'ti--M)t)H.
"iKuhhi-K))).))~!).
':).A.))!CO.\f).UMK!! CUi-SKS
HottmM.t'rtttnx".
tKmnhu–Xuta.
Lh.nu. ~jj,
2''I')n'att'ie..1, )K'))))))')–)<ata.
(K..p<.t).i..) J~MaHd.~t..j,~j
(Kumbo–Hntt.
Le cSerpentnon..
j,
«)V. HiKMet ttttwttt. Op. <-< p. 43.
L'ASNËK tKM
SOCIOLOGIQUE,
D'après les règles ordinaires do l'exognmie, un homme
quelconque de la première phratrie pourrait épouser une
femme quelconque de lit seconde, (lu'elle soit de t'Emu. du
Bandicot ou du Serpent noir. Mais la division en classes
apporte des restrictions nouveties. Les membres d'une classe
de ta phratrie Ditbi ne peuvent pas se marier inditteremment
dans les deux classes de ta phratrie Kupathin, mais dans
l'une d'eties scuiement. Ainsi un Murri, qu'il soit un
Opos.
sum, un Kanguroo ou uu Lexard, ne peut épouser qu'une
Huta, et une Mata qu'un Kumbo; de même, un Kubbi, a quel.
que totem qu'it appartienne, ne peut s'unir qu'a une Ippata.
et une Kubbotaqu'a un Ippai. Mais l'union d'uu Murri à une
Ippata, ou d'un fppai a une Mata, ou d'un Kubbi à une Buta,
ou d'une Kubbota il un Kumbo, apparaît comme aussi abo-
minable que celle qui serait contractée entre deux individus
d'un mëtne ciau. Yoiia donc, à ce qu'il sembte,
uneexogamie
nouvette qui se surajoute a cc)ie du clan et qui limite encore
te champdes sélections matrimoniates.
Mais on ne peut comprendre le sens et ht portée de cette
réglementation si l'on no connait ta maniera dont ces classes
sont composées. Chacune dettes correspond à une génération
dinereute du ctun. On sait en cnet que chaque c)an. comme
chaque phratrie, se recrute exclusivement par voie ou de
filiation utérine ou de filiation aguatiquo. L'entant compte ou
dans le groupe de son pore, ou dans celui de sa mère, mais
jamais dans les deux a la fois. Si, comme c'est le cas de beau-
coup le plus général, la filiation est utérine, si l'enfant, par
suite, appartient au ctau maternel, des doux classes entre
lesquelles la population de ce clan est répartie celleà. laquelle
il Mf ran<!<)<'M<c<<' </o<~sa M~'p~c /«<(pas ~'<«'. Si celle-
Ct est une Buta, ses Htsseront des Ippai, ses filles des
Ippata.
Est-elle, au contraire, une Ippata? ses enfants seront, selon
leur sexe. ou des Kumbo ou des Buta.
C/t~xe ~M<~MK
«~Mt'tX'o! ~OHC Il MMP « Mft'cc~MP <~)«? ~Mt't'<OM p~t'.
<<PMf< et comme dans chaque clan ii n'y a que deux classes,
it en résulte qu'elles aiterncnt régulièrement. Supposons
par exemple, pour simpHner notre exposé, qu'à un moment
donné tout le ctan de t'Emu ne comprenne que des Kumbo-
Buta à ]a génération suivante, it n'y en aura plus. En effet,
les descendants des Kumbo comptent dans l'autre phratrie
parce que c'est celle de leur mère, et les enfants des Buta sont
des ïppai et des Ippata. Mais, à la troisième génération, ces
F. PUBKUEM. LA t')tOt))Xn')OK ME L'tffCHSTE t3

derniers disparaissent à leur tour; car )eur&descendants


appartiennent a l'autre classe, c'est-à-dire que les Kumbo-
Buta renaii'sent. pour s'etïacer de nouveaua la quatrième
génération,et ainsi de suite indénniment.Le tableausuivant
rend sensiblece que devient!e clan à cituquegen<t'ation.
UHJ"
t:t.XS)'Kt.\ )'))KATH)K '< "H 'M"'t: nn'ATHtS
<!<ttmHo)M.
MntmHotM.
f" Mnt'ri Mata. K)))')b"hn tt'tt:).

2''
p" KUIII)I
Kuh))i Kts1lot~t.
Knt'ota. J\ 11111
tt'pai 1 jetilitgt.
))')'!)t!t.
1
(Hnfmtttdc'i))itta.)'-ht"j,u.f tKt!htt~<)!d.-t;.)"t!)
Mut-ri MaUt. Kumbu fut!).
~)fM<t<)))1"h2'f-)L)
()':Mfmt«)MKu)mt<t<)<'ht~')~t).)
4" Kuhhi Kut"'tu.! !)')'ai )~)'.))u.
'H..fM)«)Mhu)tt-)<-)a)'e<'n.;
(Ët.f<t))t'"tM~t'dch3-~n.)

Cette organisation ne so rencontre pas seulement chez les


Kamilaroi sans être absolument universelle, elle est d'une
très grande généralité. Les noms seuls changent d'une tribu
à l'autre. Par exemple, chex les Kogaî. les quatre classes se
nomment Urgilln et Unburri pour la première phratrie, Obur
et Wungo pour la seconde
Un Urgilla ne peut épouser qu'une Obur les enfants sont
Wungo.
Un Unbun'i ne peut épouser qu'une Wungo; les enfants
sont Obur.
Un Obur ne peut épouser qu'une t'rgitta les enfants sont
Unburri.
Un Wungo ne peut épouser qu'une Unburri les enfants
sont Urgilla.
Il est inutile de multiplier les exemples; ils se répètent
tous identiquement, aux termes près
Un arrangement à la fois aussi complexe et aussi répandu
doit tenir évidemment à des causes générâtes et profondes.
Quelles sont-ettes ?
La question a fait le désespoir des ethnographes. Les
uns ont cru résoudre la difficulté en assimilant la classe au

(i) V.Cun«w.0~. <-<<p. t. t'"ur sitt))))it)M. 't'~ n.- <htt<mn~ ')U'-la


fum"!tttttscHtitM' dt-.<)'rt)t''<'tui ~ct~'ttt&d~ign'-r)'<.-h~<.
?) t)an< seulcas, nuu~tntuvun:: MtK' o)K!mi<u)")n un)t'-tt ditfcMttt'
CtK'!les Wau)'<mM)))(!o. <
au)i'-u')<-')t-ux.-hi~t's ))ms
t'ha'jMc )<)tnt)t!il y
<'na quatre,suithuit pour t"ut'!)'t tri' Mt's )'s'unit- pntM'ijt'fxndtuneu-
t<nt!tn'nt tes tt)~)))"<. t:ha')"K'-tt~ "c p-'ut qu'à un.-(-)ttsiK.
eth' enfantssont<t'un''Mire chMi'p
<tt't''t-t)tin''<' ')Ut')<')=
)<UM'M< ).a !'<)'-
t'ASffËE SOtiMMOtOUE. MM

cian Maisil est bien certain qu'elle n'a jamais eu de totem;


elle nerentre donc pas dans la définition du cian. D'autres out
essayé d'y voir nue sorte de caste, sans qu'aucun fait justifie
!'hypothese'. Cunow est peut-Être i'uuteur qui a fait l'effort le
plus soutenu pour jeter quelque lumière sur ces étranges
combiuuisous. Pour lui, chaque classe se)'ait un groupe d'ht"
dividus seusihieuteut du même âge. Il est certain que de
l'âge dopeudeut, en grande partie, ia place occupée par cha-
cun daus le etatt, iu uature et i'eteudue de ses droits comme
de ses devoirs. On ne s'turuit doue s'etouner qu'une uomen-
ctaturc spuciate ait ctt': imagincH pour exprimer ia manière
dont lu population se repartit selou i'~gc; qu'un terme désigne
ieseufuutsqui n'ont pas encorexubiiace remaniede t'iuitiatiou;
un autre, les adultes inities et déjà maries, ou tout au moins
nubiles: un autre ennu, ceux quinoa seulement sont tnariôs,
mais ont déjà des enfants maries. Tei serait le sens dos termes
employés pour distinguer, dans chaque clan, les différentes
classes. Quaut aux prohibitions matrimoniales attachées à
cette organisation, elles seraient simplement dues à une sorte
d'iostinctque l'auteur attribue aux primitifs, saus trop on
expliquer l'origine, etqui leur inspirerait unevive répugnance
pour les mariages contractes entre individus d'âge trop inégai
Mais si les classes correspondaient à l'âge, les individus

~'<~t~)ttt')~'<p''ti).<))f)m~.t't)X!))).«).u)tt Uttt'ctMt!(!
)))U'ti<'M))U'it'\ (ti~.
tio':t~.Yuif-i,pNt-
'tt!.M)uct)t,nxotttt'ut)<<f{'utiuns st'itUct-Mfnt
''M)ttf:MPHMTMtt: Mt)][<f;Mt!)')t)tAT));)!
UM)))<X'<. t'MtMftt-f. ttotttOtM.t'Ct))t)t)'<.
)"){'~t')'fttim). J~M~M .«~«MHt-«. Kat«J) AH<«Ht.
S* – t'tt~'mi X)t)tf<tj<')i. ()))<t)u Xarih.
~:Mha~dMXN)ittmMa.) (fMfmhdm (Mmji.)
A«)j)t~)ni'rtt)ttj)!tjt);)i.t)')ttj<trd' X)i)M'Kf!aH)i
Kt)rittt)t.)MXMmj..ti.) (KnfMttitdMXtnh.)
<* –
A)m!))))))!aX)t))~n')nf<u. TuMx)i K))nx'')i.
(f.ufot)!:des Tom)mjm)i) (H))f<))t<d<tN«()0t~erdi.)
S' – ~<<tma<'a .M~mM<-«. A'at~'t ~at(U<.
(KttfOt)h .)MX~MMOtt~.) (t<t Xn~i.)
(E))6M))t

Ht )tt~t-it't.Mttt«)-n'it nomt-at) )V. nttwiH,~<«-<AM-;Yo/M<)M</te/<M<.


/)~)'aM c/CNrMin ~NMt'ttf~0~ Mf J<)/A<tpo~<ca< //)~<~<<, itMS,
)). M.4!i.
L<'t-a.«'iitd'!H))<'M)'<'t'mt<'U![;f)'twittt'Kt'MpMrti<')r):cu))!ttt'utt.)')))f<ju'i)
))<}l'u ttirfcteMMnt obi-cn't;.
(!) V. Fiiion et X'wit). Op. 0' p. TO<'t sniv.
(J)n~'t)<t))t'()m'<tit)'t)))iMiM))'))t-i<))t')')tUt-(<N)t't)<<)<UMU)K'tru<
courte nutt- <tU'M))u))tic~ te Jw~tta~ e/
~)H//«~. /;)~ t~ft.
(3t V. C<ttnw. Op. << )). tM.)<a.
E. DUKKUKtM. LA t'MHtBtTtOK M t.'tKCKSTH t8

devraient changer de classe en avançant dans lavie. Ondevrait


tes voir passer de la troisième à la seconde et de la secondeù
la première à mesure qu'ils vieillissent, Or, tout au contraire,
la ciasse u laquelle on appartient est immuablement fixée,
une fois pour toutes, des le jour de la naissance. Cunow
répond que, si les noms des classes avaient change aux difK'-
rentes périodes de l'existence, le but poursuivi n'aurait pas
été atteint. En effet, soit un homme de vingt-cinq ans, corn'
pris par conséquent dans la classe intermédiaire entre les
plus jeunes et tes plus âges. Dansta suite de sa vie, il pourrait
épouser des femmes beaucoup ptus jeunes que lui, pourvu
qu'elles eussentattointt'uge de l'initiation,c'est-à-dire pourvu
qu'elles fussent devenues adultes nvant que lui-même fut
sorti de ta catégorie des adultes: car elles se trouveraient alors
dans ta classe qui correspond il la sienne et on, par suite, ît
peut légitimement contracter mariage. Pourtant, il y aurait
toujours entre elle et lui ta même ditïerenco d'âge que dans le
principe; une union entrejeunes et vieux serait donc permise,
contrairement à la règle que notre auteur suppose avoir été
suivie. Ce serait pour prévenir ce résultat que les Australiens,
d'après Cunow, auraient conventiounettement établi que la
ciasse dechacun serait nominativement déterminée pour toute
la vie et le suivrait, sans changements, à travers toutes les
phases de sa carrière. De cette taçon, eu eCet, les différents
groupes d'âge ne peuvent plus se rejoindre et 'se confondre
sous une même rubrique, puisqu'ils portent des étiquettes
distinctes. Seulement. Cunow ue s'aperçoit pas que, de cette
manière, il ruine la base même de sa théorie car alors tes
classes ne correspondent plus àia division par couchesd'âge,
puisqu'un tel arrangement maintient dans des catégories sépa-
rées des gens qui ont également dépasse l'enfance sans
atteindre encore la vieillesse. Inversement, le même mot
pourra s'appliquer 'gaiement, ici à un enfant, ta à un vieil-
lard, puisque ta classe de l'un et de l'autre est déterminée
dès leur naissance et indépendamment de leur âge respectif.
Si le vieillard est né d'une lppatu, il sera un Kumbo, tout
comme le baby qui aura une mère de la même classe

()) Y.Ct))«t\ 0~. <-f/ )).IH:.


)t'sin!ttitMti"t)'<tK'iK)M,~Mrtt)t)t)''s)))'!titutionit
PjAj"u~ttt-t'))t<)m'j<t«))ti!!
pritnUiv' n'ont'h's au~i
orix'ne)! dt')i))Crctt)<H)t m't)n't'stptoK
ttrtitifiL'MM;
~oMhtin* it ff ~uf nousxavons<)Wdt!)p.<cx)))i<)Ut'r <)<!s
)'ttf mrnmKOttent!'
c"n<'<'ntiun!)f).'<
''o 'e ~t'Mn',
it)!!titU)?<.
(k')Mt)')i e
pri!' uvue d'Mttbutpn!cm)';u.
tC L'AKSÈE <M7
SOCtOt.OGfQt))!.
Dirat onque, en euet, ces systcmeane correspondentpas
à la distributionde ta populationpar âge, mais qu'ils ont
uniquementpour objet de prévenir le mariageentre ascen-
dants et descendants?Mais s'ils s'opposentréetiementa ce
qu'un pèreépousesa fille (puisque,par principe, elle M'ap-
partient pas a lu classeoit i) peut prendre fonxne),ils ne
mettentaucun obstacleaux unions entre grands-parentset
petits-enfants.Car, commechaque classe renait au bout de
deux générations,unefemmeet sa petite-ftiieappartiennent
a !a mêmeclasse, &celle, par conséquent,où le grand-pore
peuttibrementchoisir.Soit, purexemple, un Kubbiqui épouse
une tppata,les (ittesde ceUe-ciserontdes Buta,mais testiites
de ces Buta serontde nouveaudes tppata que le premier
Kubbipourralibrementépouser,puisqu'ilpeutlégitimement
prétendreà touteslesfemmesde cetteclassesansdistinction.
C'est dire que cette organisationdoit avoir un autre but que
d'interdireles mariagesentre parentsen lignedirecte. /cr-
fKïKfcqxtla ca/'ac~'Mfxc~<'«(.<)h'~)(M'<tUMt.
Le problème,pourtant,ne nousparait pas insoluble.Cette
réglementation,en apparencebizarre,n'est qu'une extension
de la loi ordinaired'exogamie.Pours'en convaincre,il suffit
de se reporterà certainesparticularitésqueprésentela cons-
titution des ctansaustraliens.
Posonstout d'abordque la divisionen classesa du appa-
rattro au plus tard dès que ta tribu Il compris deux clans
primaires. En ellet, partout,sans aucuneexception,les noms
desctassessontrigoureusement les mêmesdans toustesclans
d'une mêmephratrie.C'estdonc qu'ils étaient déjà en usage
dans le groupe initiai dont ces groupespartiels sont sortis
successivement. Ilest passédes premiersaux seconds.Onpeut
dire d'aitteursqu'it n'y a pas de contestationsur ce point.
Pour comprendrecommentces classesont pris naissance,
représentons-nousdoncune tribu diviséeen deuxclans pri-
maires,nonencoresubdivises.Pourfaeiiiterl'exposition.nou-!
appelleronsl'un A et l'autre B, A~et A/' les hommeset les
femmesdu premier,Bitet B/~les hommeset les femmesdu
second.A la premièregénération,le schémades deux ctaos
sera donc
<.t.X A ':HX )t

Ah' Af Mh' Hf

En vertude ta toid'exogamie,AA's'unira à B/'et A~ à B/<


B. t)UHK))MM. – LA PBOtHBtTtOMDE L'tSCKSTM Hi

La filiation se faisant en ligne utérine (c'est un postulat que


nous prions le lecteur de nous accorder provisoirement), les
enfants du couple AA'1}~seront du dan H, puisque c'est celui
de la mère, et les enfants du couple A/~ BA'seront du ctau A
pour la même raison. Nous appellerons les premiers, suivant
leur sexe, U/~et )}/ tes seconds A/t', A/
Jusqu'ici, tout se passe conformément aux régies déjà con-
nues. Mais voici un fait qui vient eu cotnpHquer et en singu-
lariser l'application. Dans toutes ces tribus, ~Ko«/M<' ~<<M<
po<~ &'~fm M«~'Me< <'f (/t<o<M'<7 < com~f/~<~ le f~<~
.« w~< celle-ci, a partir du moment où elle est mariée, vit
chez son mari, par conséquent sur k' territoire occupe par le
clan de ce dct'niet'. C'est là qu'été' met au monde ses enhmts
c'est là qu'ils sonifieves, itt que ses tits t'ésidenttoute leur vie
et ses filles jusqu'à l'époque de leur mariage. Les enfants de
B/~(c'est-à-dire HA' et t! na!tt'ont donc en A et y passeront
leur existence, ou tout entière ou en partie, parce que A est
le cian de leur père inversement, les enfants de A/~(c'cst-a
dire A/~ et A/~ nattront en B et y resteront parce que leur
mère y a suivi son mari. ii se produira ainsi un véritable
chasse-croisé entre les deux c)ans; il la deuxième génération,
tous les individus qui portent le totem A et qui perpétuent le
ctauA sont dans le cian B, et réciproquement. Le schéma des
deux groupes devient
t)).'';<< A TKim)T")MK
Tt:Htt)T"tKK )'r '.L\i H
2" ~n<~atiou. t<)~ Mf Ah' At'*

A lu troisième génération, nouveau chasse'croise, mais qui


rctabtit les choses comme elles étaient en premier lieu. Eu
enet U~ épouse A~ et i'emmune dans le ctan A où il vit. Les
enfants, héritant du totem maternot, sont A/<*et A/ et, cette
fois. iis sotrouvent bien etîectivementdans leur ctan naturel A.
De même, parce que A~ a épouse M~et s'est établi avec elle
en t) où il habite, c'est en B aussi que naissent et sont élevés
leurs enfants B/~ et B/' ceux-ci sont donc également sur )c
territoire du groupe dout ils portent le totem. Par consé-
quent. la suite des générations peut être ligurée de la
manière suivante

H.t)t!M);M)!).–A))nA'K-i<t<!)T. J
M L'AXKÈH 1891
SOCtOLOOtOUE.

i'UCLUTtM )'WL'L.\TtUS
M-cutN)))h' tcttitoin- du (~ht) A. o<cu)m)t fo tcmtwt'tht Chn Il.
'tf~ratioM.
f .~))' Af M'
2- JM' /i'<'nr..)")!f'(-t.U)')1) A~ .~(<'t))'t.(.tM))'
Ah' AP~- AP–Xh'. J~' ~t– )~–A)t"
4' /?' HP–Ah") .\h' Af'i- Ar–H)/

Ainsi, chaque génération se trouve placée dans des condi-


tions tiifîérentes de celle qui la suit immédiatement. Si la
première est étevéesur le territoire du clan dont elle porte le
nom, lu suivante vit en dehors, e'est-a-dire dans l'autre clan;
mais lu troisiètne se retrouve ù nouveau chez elle. Puisque
donc les générations d'un même clan passent leur existence
dans des milieux sociaux aussi ditïérents, it est naturel qu'on
ait pris i habitude de distinguer entre elles et de les appeler
de noms également dinerents; c'est pourquoi un mot spécial
fut attribué à celles qui naissent etqui restentsur le sol fami-
lial, un autre à celles qui, tout en continuant à porter les
insignes distinctifs du clan et tout en restant les fidèles du
même culte totemique. ne résident pourtant pas au lieu où se
trouve le foyer même de ce culte. Et puisqu'elles sont tour à
tour <w/o~«'.<,si l'on peut ainsi parler, et tour à tour <r<
~Kcs, le même roulement doit se retrouver dans les denomi*
nations qui leur sont appliquées. Autrement dit, chaque gé-
nératiou formera une classe M~MWM qui se distinguera par
son nom de celle qui suit; mais cellequi viendra en troisième
lieu aura le même nom que la première, la quatrième le
même que la secondeet ainsi de suite. Voilà d'où vient cette
atterntfuce périodique entre les classes, qui parait au pre-
mier abord si surprenante
Les causes qui expliquent la division de chaque clan en
classes alternées vont rendre également compte des probibi.
tions matrimoniales qui sont attachées à cette organisation.
En vertu de la loi d'exogamie, il est interdit aux membres
d'un même clan de s'unir entre eux. Mais, des deux séries de
générations ou de classesdont la suite constitue le clan B par
exemple, il en est une qui vit dans le clan A, ainsi que nous
avons vu. Sans doute, elle n'en a pas le totem et, en un sens,
elle eu reste distincte. Néanmoins, par cela seul qu'elle y a

()) Kooi!avunsrendui!ensi)))et't'ttctUtcntMco
dans le !'eMtM<'i.dcii.
~Ms en tt'prmenttmt par de;!MfMMn'sdifKfents.
chttjUf<')<m Onvoit))u<
il t'haqut!{s'MnttiMt,
tes<ttra<:tt'*rM
<'ht)n;nt.
X. CUHKHEtM.– LA i'BOmBmo!) CE ï/tNCHSTK t9

vu le jour, qu'ette y a été élevée, elle est on rapports continus


avec les générations de A, qui ettes-mémes vivent en A; car
les unes et les autres occupent le même sot, exploitent les
mêmes forets et les mêmes rivières, ont reçu la même édu-
cation, etc. Par suite, entre ces doux fragments do etnns dif-
férents, mais qui sont rapprochés sur un même habitat, qui
sont plongés dans !a mémo atmosphère morale, Il se noue
nécessairement des relations très étroites qui, sans être iden-
tiques à celles qui existent entre les porteurs d'un mémo
totem, ne bussent pas d'y ressembler. Si donc ces derniers
liens passent pour être exclusifs de tout commerce sexuel
futre ceux qu'ils unissent, il est inévitable que, par voie
d'extension logique, les premiers, étant de même nature, aient
fiai par produire le même effet. Quand on a pris l'habitude
de regarder comme incestueux et abominables les rapports
conjugaux de sujets qui sont nominalement du mémo ctan,
les rapports similaires d'individus qui, tout en ressortissant
verbalement a des clans différents, sont pourtant en contact
aussi ou plus inlime que les précédents, ne peuvent manquer
de prendre le même caractère. On peut en elTet prévoir dès
maintenant que la commuuauté du totem n'a de vertu que
comme symbole de ta communauté d'existence si donc celle-
c! est aussi réelle, suns que le totem soit commun, le résultat
sera le même. Ainsi, par le seul enet de ta toi d'exogamie, la
t'tat-sede A qui est née en A ne peut pas se marier avec ta
classe de M qui est née également en A, quoique les totems
soient distincts. Mais comme lit même fraternité n'existe
pas
avec la classe de B qui est née en B et qui, par suite, n~ rien
de commun avec les gens dû A, la même prohibition n'a
pas
de raison d'être et le mariage est tieite; car non seulement ces
deux clusses ressortissent à deux groupes totémiquesdiné-
rents, mais leur vie est séparée puisqu'elle s'écoule dans deux
milieux indépendants i'un de l'autre. Inversement et pour les
mornes motifs, la ctaSse de A qui est née eu B ne peut s'unir
qu'à la classe de B qui est née en A. D'une manière générale,
uue classe d'un clan ne peut contracter mariage qu'avec une

t) t'Mtt nouf:<)''voutuM.'t jMtsttiro<)m'h' tutt'otnt'uit<jtt'an<))<!), un


")!<;)()vet-tw)il ft-th- syttttx)))'(te tuut un <'M!-<')uh)t'
do t<m))Uo)ts. de
'').)yancf!de pntti')))).'sf-tinit'miM et uutrus.A!tn.< tjtumd tf!! (ti)f)''funte)!
j'.trtitM <)'mt
)<)t')MM
chu)n't vivt'nt)))Mm)!!t'tM))tcd'nnt')nt)tMvh*.Intoten)
<)'!(ptus tML )t)j{nti)('!ttiott ctUtH-rte
(trt'toifn'.qu'Mtju'i) cocon!(n'!iton~.
son 'k'
t")upif pMittigepur t'<a"t )')Mbitude.
M ).'A!<SÉK "i9T
SOOOMGtQUK.

seutedesct~ses de t'nutre, c'est u savoir avec celle qui est


placée dans des conditions correspondantes cette do A qui
est nue en Aavec celle de Ii qui est née en H. celle do A qui
est Hfeen Havec celle de 13qui est née en A. Et comme, à cet
égard. deux générations successives ne peuvent jamais 6tre
dans la n~me situation, il en résulta qu'une tctnmo ne peut
jamais prendre mari ni un homme prendre femme dans la
g6n6ration ou ciasse()ui suit ta ieur.
L'exogatnie des classes n'ciit donc que t'cxognmie dn ctan
il
qui s'est propagée partiutletnent d'uu ctan primaire l'outre,
et réciproquement; et '-ette propagation a pour cause, en
définitive. t'inconsistancc particutiÈre lit constitution du
ctan. C'est en pfîet un groupe amorphe, une masse flottante.
sans individualité très définie, dont les contours surtout ne
sont pas materiettement marques sur le sot. On lie peut pas
dire a quel point pt'fcis de l'espace il commeoce, taquet autre
il finit. Tous ceux qui ont le même totem en font partie, on
qu'ils se trouvent. X'ayant pas de base territoriale, it lie saurait
résister aux causes qui tendent à le dissocier en groupes ter-
ritoriaiement distincts. Or. t'usage qui v~ut que la femme
aille vivre uvec son mari, joint au principe de la filiation uté-
rine, rend nécessaire cette dissociation. Chaque ctan, sous
l'action de ces deux causes reunies, laisse s'établir Hors de!ui
une partie des générations qui lui reviennent de droitet reçoit
dans sou sein des ~nerotions qui lui sont etmngères. Par
suite, ils se mutent les uns aux autres, se pénètrent, échan-
gent leur population, et des combinaisons nouvelles prennent
ainsi naissance auxquelles ta toi d'exogamio s'étend, mais
sous des formes également nouvelles. On comprend du reste
qu'il en résulte un afîaibtissement du groupe proprement
totentiqne. Car les portions dedans divers qui sont ainsi reu-
nies en un tneme lieu vivent d'une même vie' et forment par
conséquent une société d'un genre nouveau, indépendante du
totem. Amesure qu'elles se développent, cites rejettent donc
au second ptan la vieitte,organisation du clan, qui peu à peu
tend à disparaître.
Cette explication, it est vrai. s'applique uniquement au cas
élémentaire où la tribu ne comprend encore que deux clans
a
primaires. Mais, une tois que chacun d'eux s'est subdivisé
son tour en clans secondaires, ceux-ci héritent de la division
en classes qui s'était établie dans le groupe initial. Elles s'y
organisent sur les mêmes bases qu'elles avaient dans les deux
H. CUBKXRtM. – LA fKOUtBmON ))H L'tNCHSfH 2<

,nln,ntfe .oa,nl~ o.
dans primitifs, puisqu'elles ne sont sous cette forme que le
prolongement de ce qu'e))es étaient tout d'abord. C'est ainsi
que se produisent les systèmes un peu plus compliques que
nous avous décrits en premier Ueu(voir p.) ))
Outre que cette théorie permet d'expliquer, jusque dans ses
détails, t'organisation des dusses australiennes. elle se trouva
confirmée par plusieurs autres fait:!
K))aimptiquc que cette organisation est en partie déter-
minée parte principe do la ntiation ut6rine. Si donc nous ne
nous sommes pas trompé, on doit voir les classes s'etïacerià
ou lu filiation se fait, au contraire, en ligue masculine. Dans
ce eus en enet, d'upt'es notre hypothèse, elles n'out plus d&
raison d'être car, comme los onhtuts portent alors le totem,
de leur père, et Mon plus celui de leur mère, ils naissent et
sont eievesdans le ciun même dont ils portent )e nom. Chaqn&
génération se trouve donc placée dans les tnemes conditions
que son ainee et que la suivante eiies sont toutes endogènes.
Toute matière manque ainsi pour distinguer entre elles. La
dualité dugroupe totémique et du groupe territorial a disparu,
soit que les deux ne fassent plus qu'un, soit que le premier
ait cessé d'exister. Or c'était cette dualité qui produisait les
combinaisons alternées auxquelles correspond le système des
classes. Celui-ci, par conséquent, ne peut plus subsister que
comme une survivance sans utilité et destinée, par suite, à
décliner progressivement.
Les faits sont conformes à la déduction. Howitt lui-même a
remarque" que partout où le clan se recrute c~ <M<MM/«; ft
<Ma<!Ct(<(M, la classe n'existe pas c'est le cas citez les Nar-
riuyeri, les Kurnai, tes Chipara. Curr remarque également

KMt)' ))' ca-t ut))<)n'' dM \VuttM)tt')t)K" (~ <M. p. t3. n')t'' 2) où il


ya')H~n't')ui!t.<(,au)tt'u<h'<tt'ux.<fan!i<-h)U)H)'phntttn'.t!i.trtttt))fn).
la <)<fr)-i)'t)u))<)U\'u u ttuntM'-t;Uowitt)'.<t ('fm-te. )-<<)ui't 'h'utcux d'ttpfM
h'stcrMt''<tu~n<dt)nttt):U!tt.'t't,t'Ut'M'i[ri<'n')'in<'t)M('it)!t)))t'!t\t't'x)t)i-
<'<ttio))()Uf xous venoMs ftf <t«nM<'f.On ;))'))), jx))-t"ft')u))t< !.u)'()tMt'rave
Cunow (0/<. ei/ [). tSO) t)Ut' <;< huit ctn~'s t-ont ttucs & t'e ))Uc <)f))-t
tribt)!<.ttytUtt des c)<t!tM ditMn'tttt's. se sont tonfunttu~ t'M~'«tt))f ''hacttne
aurait ttt'jwt't~ ses <)'))<)tuifmtiut)<'j'n'KUttm'ttt <'t~«mitcrvcf's. Mai:. t'ottn'M*
''Ufs ttM ituuvtUt'n) Mtrc qu'à t-um)iti(ttt de <)<~i);)h'r<)M f{')'imti«t)!' <tif-
f'ircntci!. il t'M tit'mit t\?:ttt)tt! (;tt<' )<'s t<t<')M~ tome)! ne SL'mifnt rt'vcnM
')u'an bout <)'' quatK' t{<'M'?M<ions '(itttf! c)))t<)M''pht-atHf. Bien d'-x t'ircuoo.
ttMftM, d'aiUeUtt. peuvent avoir dëtfnunx! ce ()eu)))f )t cufujtti'jm')' cette
tt'rotitK~iH: ot-c'ei!) !K.'u)M))).'ntj)are<H<: cou~ttication UM)'fu pta~ gMnde
'ju'H <? dhtinftUt! dus autres.
(~ F«)'<Ae)'A'o~. p, M.
~3 L'ANNE)! SOCtOKMtOM!.ttt)?

que la classede l'entant est, en principe, déterminée par cotte


de lu mère'.l,
2" Si, comme nous l'avons admis, ta division des classes
s'est produite au moment où ta tribu ne comprenait encore
que deux ctans primaires, elle doit s'altérer a mesure que le
souvenir de cette organisation primitive tend à se perdre.
C'est en effet ce qu'on observe, Chezles Kamitaroi, les liens
qui unissaient autrefois les clans d'une mente phratrie ont
fini par se détendre, et par suite le mariage a été permis entre
certains d'entre eux. L'n Emu a pu épouser une Bandicot,
quoique tous deux fussent de ia phratrie Kupathin. Mais,
pour cela, il fatiut que te mariage devint licite entre les deux
classes de cette même phratrie. Ce fut effectivement ce qui
arriva. La rcgtementatiou que nous avons exposée plus haut,
d'après laquelle un fppai ou un Kuntbo ne pouvait s'unir ni a
une Buta ni à une fppata, s'est peu il peu relâchée, et, en der-
nier lieu, il n'était plus défendu à un tppai du clan de t'Ëmu
d'épouser une tppata du e).<n Bandicot. Vu KumiM peut
prendre pour femme une Buta dans les mêmes conditions.
On nous reprochera peut-être de faire reposer toute cette
explication sur une hypothèse, en admettant que la filiation
avait 616d'abord utérine et n'était devenue agnatique que plus
tard. Mais il importe de bien comprendre le sens de notre
proposition, avant de la contester. Nous ne songeons aucune-
ment a soutenir avec Bachofonet Morganque, dans le prin'
cipe, chaque petit groupe familialeu pour centre la femme,
non le mari; que c'est chez la mère et sous la direction des
parents maternels que t'entant était ëteve.Les faitsdemontrent
avec évidence qu'en Australie un tel arrangement est contraire
à l'usage générât; c'est ce que nous venons nous même de
rappeler. Nous n'entendons parier que du groupe dont te
totem est la base. Or, nous croyonsindiscutahtB..que le totem,
à l'origine, se transmettait exclusivement en ligne utérine;
que le ctan, par conséquent, n'était composé que de descen.
dants par les femmes Sans qu'il soit nécessaire de traiter à
fond la question, les raisons qui suivent suffisent à justifier
notre postulât
1Plus tes sociétéssont rudimentairement développées, plus

(<)~M~M<«M f<«C«,). M d 111.


(2) C'est)')' <)))';tt'mntxuMt'nttn~tt' )< <m(~uf!<
t'OMXxeHro)!:i<
(jui
pourtantMtmtutUent t' tM'se<<tcMorgM(t. ptuf tMtii du
rt<aa)y~t! ih<
de GfoMe).
E. !)UM))E)M. – LA PHOHtBmON DE t.'tNCESTC 2!!

le clan maternel y est fréquent. Il est très général en Austra-


lie, où ti se rencontre ~x~'c/OM <«f cinq it est déjàplus rare
en Amérique, où la proportion n'est plus que de trois ou
même de deux pour un Or tes Peaux-Rouges sont parvenus
a un état social sensiblement supérieur à cetui des Austra-
liens.
2"Jamais on n'a vu un clan paternel se changer en un clan
utérin on no cite pas un seul cas où cette nn'tamorphose ait
été directementobservée. Ou sait, au contraire, avec certitude
que la transformation inverse s'est bien souvent effectuée.
3° Un tel changement appara!t d'ailleurs comme inexpli-
cable. Qu'est-ce qui aurait pu déterminer le groupe du père a
se dessaisir partiellement de ses enfants et à leur Imposer un
totem étranger, avec toutes les obligations morales et reli-
gteusesqui en dérivent? C'est dans ie cian paternel qu'ils
sont venus au monde, c'est iâ qu'its passent)cur existence,les
uns en totalité, les autres en grande partie. D'où pourrait être
venue l'habitude de les faire inscrire à une autre société toté-
mique? Cunow lui-même reconoatt que la réponse est a peu
près impossible
L'évolution inverse est, au contraire, facilement intelligible.
Déjà, par le seul fait que t'enfaut grandit chez son père, au
milieu de ses parents paternels, il est Inévitable qu'i) tombe
de plus en plus dans leur sphère d'action, c'est-à-dire qu'il
finisse par être totalement incorporé dans leur clan. H y a
une anomalie à ce qu'it y réside et à ce qu'il n'en porte pas le
nom. Pour que cette révolution s'accomplisse sans grandes
résistances, il suffit que les traditions et tes usages qui sont a
la base du vieux totémisme aient perdu leur autorité pre-
mière. Ce sont en effet les seuls liens qui rattachent en par-
tie t'entant & une autre communauté morale et qui, ainsi,
s'opposent à une assimilation complète. Par conséquent, à
mesure qu'ils se relâchent, l'obstacle diminue. Or, en fait, il
n'est pas contestable que, là où la filiation agnatique est éta-
blie, le totémisme est afîaibli. Chez les Kurnai, il n'y en a
plus it n'existe plus de clan du tout, mais seulement des
groupes territoriaux, divisés immédiatement en familles par-
ticulières. Chez les Narriayeri, it survit encore, mais sous
une forme atténuée. Chaque groupe local a un totem, au moins

')) V.Fmxc)'.7'o/<'tMMM),
69.H.
(~ 0/ <-< )). ):tX.
JH L'AKNÉKSOCtOt.Ot.tQUH.MOT

en générât, mois intentent territorial est devenu prépondé-


rant chacune de ces divisionsest caractérisée avant tout par
la portion du sol qu'elle occupe. Aussi est-elle désignée, non
par le nom de son totem, mais par une expression purement
géographique. Certaines ont môme plusieurs totems, ce qui
est contradictoire aveu la notion même du ctun un cian véri-
table ne peut avoir deux totems, parce qu'il no peutavoir une
double origine. De plus, t'être totémique n'est plus, chez les
Karrinyeri, l'objet d'un culte; si c'est un animal, il peut être
chasse et mange. Les individus ne s'identifient plus avec lui.
Cen'est plus guère qu'une étiquette conventionnelle
Cunow, il est vrai. tenté de soutenir que. si le totémisme
ne s'observe pas dans ces sociétés, ce n'est pas qu'il y Hit
disparu, c'est qu'il n yavaitjamais existe. Suivant lui, les
Kurnai reprcsentoraieat ta (orme la plus intérieure de ta civili-
satiou austraHenne; tes N:)rrinyeri,tout en dépassant les précé-
dents,n'auraieut pas encore atteint les autres tribus du même
continent. C'est pourquoi l'organisation totémique semit même
inconnue des premiers et seulement à t'utat naissant ettex tes
seconds. Malheureusement pour cette hypothèse, on trouve
citez les Kurnai des vestiges très évidents d'un totémisme
ancien. Chaque sexe Il son totem et ce totem est l'objet d'une
véritable vénération pour les hommes, c'est une surte d'ému
(yeeruug) pour les (entmes. une espèce de fauvette (djeetgu))).
Tous les oiseaux appelés yeerung sont considérés comme les
frères des hommes, tous ceux appelés djeetgun comme les
SŒurs des femmes, et ces deux sortes d'animaux étaient
regardés comme les ancêtres des Kurnai*. Le caractère toté-
mique de ces croyances et de ces pratiques est d'autant plus
incontestable qu'on les retrouve dans plusieurs sociétés où le
culte du totem est resté ta base de t'organisation sociale'.
D'un autre côté, il est tout fait impossible d'y voir une forme
première et comme un premier essai du totémisme; car il est
certain que, à l'origine, le totem natt du ctan dont il fait
l'individualité. Ce n'est qu'ultérieurement et par voie dérivée

()) t:tm'<w.0~).cil.. M. Cf.Curr.(~. ct< )t. iitt '.un-.


(2)H<"n ''t )~witt.0~. < p. t!'t, ~Mt<-).<uh- i)9. Xt:i.– nowiU.
t'MWAe)' A'o/M.j).:<!et :mh'.
<3)V. t'<Mi!t')-.
ru~fMX'wt.['. 51.–Cr<m)o}.M'.ttMf Ta&oMin Jo)«-M< o/
Me.~M//t. //t~ t8'Ki.
)). 2:i. AM~iu'' cmujtrcnonti-MtU:' Cun«w
jttt!tM))))<t'xt
n pu ditv(p. !i!);~u'unne ~[ruuvcpM detotcuMsexut'tiH)tttcho~dus
Kurnai.
K. DUMKUHtM. LA t'HOtUBtT)OS OB L'tNCKSTK 38

qu'ii s'est étendu aux groupes formés pur chaque sexe à t'iu-
térieurdecbaqueetan'. r.
Cesfaits, d'ailleurs, concordent avec ceux que nous avons
établis tout d'abord. Ce qui tend il renverser te principe de la
niituion utérine, c'est lu toid'exogfftnio combinée avec l'usage
d'après lequel la femme doit vivre cbex son mari; car ce sont
ces deux règles qui tont que t'entant est ptacé immédiatement
sous ta dépendance de ses parents pnternets. tandis qu'ii est
tenu tuin du ctan de sa mère. Or les mêmes causes, nous
t'avons montré, ébranlent ia société totémique et y substi-
tuent un agrégat où lit communauté du sol joue un rôle plus
important que la communauté du nom. Par conséquent,
quand tes groupes élémentaires dont est faite une tribu se
recrutent par voie de descendance masculine, il est inévitable
ou qu'ils n'aient plus rien de (otémique ou que le totémisme
n'y survive qu'auaibii. Ou bien le totem, comme dénomina-
tion collective du groupe, disparalt complètement, ou bien,
ce qui est plus fréquent, il devient nue simple étiquette, un
arrangement conveutionnel qui rappelle extérieurement l'ins-
titution disparue, mais qui n'a plus le même sens ni ta même
portée. Ce n'est plus te symbole de tou~ un ensemble do tra-
ditions séculaires, de pratiques crgatth&es et maintenues pen-
dant de longues suites degéttërations car il a été réduit à
prendre cette forme~S~Rte d'une révolution qui a emporté
ces pratiques et ces~~MtiMts.
"'h
Les explications &npré~ft~nt s'appliquent presque iden-
tiquement aux qMMquesautres interdictions sexuelles que
l'on a signalées dans les tribus australiennes et que l'on a
parto~ comme étrangères & la loi d'oxogamie,
y, .présentées
))t'))Ut')')'.)MV')wh'<Ku)'t)u!f)(p)us))n)t-))''st))'!t<))')!<itn'<)M'')<M
MtrMMt)u~uu~tM<Mttt'C''tt''wi''nK)))<t't'Nit~u~)\'t)raMty't)<)'))''
la tiœut'dt! ttUM ))t'n'Mu<))tuu)){:. n")Mt'\n)<'t)tttt''M) jmn'tttdf cetuitju'i)
<t«t)n<'à M")t~ro (Mt)MffHt);. Si ()"<)(-. <)ittx'tn' uu[t-ur.lu M'ur du ))'r"
<t tp('<;)<;t'asMundttn) t'st ()<)'jusqu'à))' t'-)ttp.<
tU)t(''t'tt''). ttSfH' )wnt!
ft
lu )t)f-rt', tjUMt')))t<)m-
t')h-t'-t)titr<i)!))et)MM[ hutnttt' pur t'ttnsMqut.'nt.
t')H)U:MHtsu suiMt' e<' 'lui it)diqu).')':ut un
('t')-)a!tn'nt!;ttt <?(Kt«"'iat<n'<pfi-
mitif.))?! e't'st o)t))))t't- ) )t-
t)U''< '-<))r'si')n)! i:<')Yt'ht pM" tt dt~))!W'r
t)Mittjtjturt!'do<'un!'<m){'"nMt!. cuntttffttou~tf )t)oH<tt'n)n!! j'ttt!-h'iKu pt'u-
))tt<du th-t'ode Kuhb'ret ~tum.'Cunuw)'- rfcutxttttttui.ot~tttt' "n n't'n
))catdunerio«cuttetun'n')<tth'n«f<Ht Mttxliens<)utKt))K ))uiUMt~t'nt «u
<t))MS)tM)tt
)<!<ox'mbre:! <h)){'f<'p)!. KoMutit'?.Mun~n ')''«! lu n'~t''m-
tiattttMxcutitto du ){mutM' jMtcmc)'lui est &c'-th'
)tt)t)it'it'Mru d f t\'t)f<mt.
<'tMutUtnUMg K)MiM))M:
t(t t"n-ti<: d<:lu ~ncMUuo'lui <"itd<tn< lesM<'u)M
<;M)t)itiuu<.
26 t'AKNKtitiOCtOt.OCtOUE.
tW

'dont e)tes sont pourtant des conséquences et des apptica'


tions. Onpeut les rameneraux deux typessuivants <° Quand
le clan est agnatique, les rapports sexuels ne sont pas seule-
ment interdits avec les membres du clan auquel ou upnar-
tient, c'est-à-dire avec les parents paternels, mais encore~ec
ceux du ctan maternel. C'est le cas, notamment, chez tes
Narrinyeri Eu d'autres termes, l'exogamie est double.
2"Montequaud le ctan est utérin, oncite des cas où le mariage
est interdit non seulement entre les individus qui on font
partie, mais encore entre eux et certains de leurs parents
pttemeis. C'est ainsi que, chez les Dyorie, un nomme ne peut
épouser ni la (!)tede son frère, ni ta sœur de son père, ni ta
fille de ta stcur de son père, ni la fille du frère de sa more
Le premier fait se comprend sans peine une fois q«'on a
reconnu l'antériorité du clan utérin sur le clan agnatique.
Car, quand ce dernier se constitua, les idées et les habitudes
que l'ancienne organisation avait tixuesdans les conscience)!.
ne disparurent pas comme par enchantement. La parenté
utérine perdit sa primauté, mais elle ne fut pas abolie, et,
puisqu'elle avait exclu si longtemps le commerce sexuel, elle
continua à avoir les mêmes eHets. Tout ce qu'il y eut de
changé, c'est quela parenté agnatique eut désormais la même
innuence. L'ancienne exogamie se maintint à côte de !a nou-
velle. Lit prohibition devint bitatérate.
Quant aux interdictions partieites et plus ou moins excep-
tionneites qu'on a signalées chez les Dyerie et quelques outres
tribus, elles correspondent à une phase de transition. Elles
ont dû s'établir à un moment où ta parenté patorneito com-
mençait à faire sentir son action, sans qu'olle tnt encore
devenue prépondérante. Car une telle transformation n'a pu
s'accomplir qu'avec la plus extrême lenteur. C'est peu à peu
que les liens qui rattachaient t'entant au totem maternel se
sont relâchés peu à peu que les caractères de la parenté ma-
ternelle so sont propagés à l'autre. Déjàle système des classes
avait pour effet d'empêcher ie mariage avecla moitié du clan
paterne), puisque, sur deux générations, il y en avait une
avec laquelle les relations coujugales étaient interdites, tt a'
a donc rien d'extraordinaire à ce que cette interdiction se
soit peu à peu communiquéeà d'autres parties du même clan.

(t) Cunow.0~. fit.. p. 8t. Curf- n.B~et 968.


?) Cuttow,il. Ht.i.
K.MtUUHM.– M t'ROtttBtTMt)
0)!t't~CKSTE 27
Une fois sortie des llmites dénnios dans lesquelles elle était
primitivement renfermée, elle na pouvait manquer de gagner
de proche en proche par une sorte de contagion iogique. Je
ne nuis épouser ias't'ur de mon père parce qu'elle appartient
a ia%~nérationqui précède la mienne. partant à la classe qui
m'est interdite. Mitis alors, comment te mariage avec la fille
do cette femme apparaitrait-it comme beaucoup moius
odieux? L'itorreur que l'un inspire se transfère natureiie-
ment à l'autre, par cela même que les sentiments de parenté
dont l'une et l'autre personne sont l'objet sont sensiblement
de mémo nature. Do même, je ne puis épouser, si je suis
femme, le frère de ma mère parce qu'il porte le ménx' totem
que moi mais alors n'est-il pas inévitable que cette même
détente s'étende aux fils de cet homme, qui lui tiennent de si
près et qui vivent sous le même toit et de la même vie que
lui '? Ce qui a du faciliter cette extension, c'est que tous les
membres d'un même clan se regardaient comme issus d'un
même ancêtre et voyaient même dans cette commune descen-
dance la source principale de leurs obligations réciproques.
!) devait doncapparattre comme naturel et logique, au bout
d'un certain temps, que ia même défense de contracter
mariage s'appliquât à des relations de consanguinité diffé-
rentes de celles qui passaient pour caractériser le cian.
D'une manière généraie, à mesure que les cians se mélent
et se pénètrent de la fa~oo que nous avons décrite, les diué-
rentes sortes de parenté font de même; elles se nivelleut.
L'ancienne parenté utérine ne peut plus, par conséquent,
garder sa prépondérance. Mais alors, du même coup, le cercle
des interdictions s'étend, 11s'étend même tellement qu'il en
vient parfois a ne plus avoir de bornes précises. Nonseule-
ment il gagne le clan paternel après le clan maternel, mais il
va plus loin; il atteint d'autres groupes, qui n'ont contracté
avec les précédents que des alliances plus ou moins passa-
gères. Surtout quand le totem tuit défaut pour distinguer les

(i)!<ua<t prenons ('es t'~jxt'~ioMit tto fH<.fith' frt'rct:. <'tf.. iittns en p)v-
<'i~'r)<'M't)Sj()«s<jU<'n<'f<)ttN'v«ya!<<'Mt'Ur,(~<n)t<)"«tK')t'YW!tt)U'
)tHh'u~h'e))''x)''<)tnt)tit)f!tH))n'uttt)Uj<)HM!!)'ttt'M)<H)<)t')'!iit-t'c!!))r<'s-
Muw<)<Mcn('ttt~indh1')usd~tt'n))in'<.)i'<tttt.'Mnt)ttm't'tt'uj<'tt)))i)e!i
ttoxHnMNiost dc< n'txtxtt))' ')'* ''onsanKuinit'~ i))''))ti<)U)'st <'cMt'~<)u<!)K'U)!
ap)M')o)~ <)<<to~mc~ nutu~. ou )<ifn si t'ttci. repundoMt & 'tes ){''uuj)cs d'in-
dh'i<)usc<)tn)m'tmMtfhafUt)))res')Met<)utt'unM)<LM'L<tn't'it<
ftHitu[)sert'atuat't! tmu~ M'niicigncnt trop mtt:)nent sur c<; putut. qui aurait
une itoportanee essentielle.
2S t'ANJfÊHSOCtOMOOUH.
)M7

relations Incestueuses des autres, on ne sait plus où ottes


cessent. C'est ce qui parait s'être produit chez les Kurnai.
Xutie part la fusion des ctans n'a dû être plus complète,
puisque ie totémisme a disparu. La société est faite de groupes
dont tous les membres se regardent comme parents, mais qui
n'ont plus d'insigne cofnmuu. Or, nulle part aussi les cas de
prohibition ne sont aussi muitiptiés. Ainsi, un Kurnai ne peut
pas épouser une femme qui appartient it un groupe où cer-
tains de ses proches sont déjà allés prendre -femmes. 11eM
résulte qu'il lui faut très souvent chercher très loiu une
femme a taquette il puisse légitimement s'unir'.l,
L'exognmie est donc bien ta forme ta plus primitive qu'ait
revêtue te système des pruhiMtiousmatrimoniaies pour cause
d~uce&ie. Toutes les iuterdtetions qu'on observe dans les
sociétés inférieures en sont dérivées. Dans son état tout à fait
6)ementaire, elle ne dupasse pai; le eian utérin. De là elle
s'étend, partieitemeat d'abord et totalement ensuite, au ctan
paternel; quelquefois, elle va plus loin encore. Mais, sous
ses modalités diverses, elle est toujours la même règle appli-
quée à des circonstances différentes.
.– On conçoit dès lors quel intérêt H y aurait à savoir quelles
causes Font déterminée. Car il n'est pas possible qu'elle n'ait
pas anecte t'évotution ultérieure des mœurs conjugales.

Un grand nombre de théories ont été proposées pour


répondre à la question. Ettes se rangent assez naturellement
en deux classes. Les unes expliquent l'exogamie par certaines
particularités spéciales aux sociétés inférieures les autres,
par quelque caractère constitutif de ia nature humaine en
générât.
Lubbock, Spencer et MacLennan ont attaché leurs noms
aux premières. Quoique leurs explications diffèrent toutes
dans le détail, elles reposent sur le même principe. Pour les
uns et pour les autres, l'exogamie consiste essentiellement

))Cunuw.< tt~ )'. M. Vuin MtM' itatru prouv).'')m' t'm')«n)!tHiti<M)


t'aotitinh'
dMKurottix'n ricMde' jtt'itoitif.Bt~'ntoin)(u<'Dtot'ft'ufdu t'tn-
<:<tesuit <'))mfux tt!<(m
tMitmuuto. ellen'Mtttuttupart aus:)!dctotupp<o.
Onpeutun~tuudirt:~u'<;)h! y ttttMiotun tMvvtuppetUfnt Monnat.
):. DUXKHH)M.-– ).A )'HO)HMT)OKDH L'tXCHSTK S~

dans un acte do violence, dans un rapt qui, d'abord spora-


diquo, se serait peu a peu génératisé et serait, par ceta môme,
devenu obligatoire. Les hommes auraient été amenés par dif-
férentes raisons à aller prendre leurs femmes dans des tribus
étrangères ptutot que dans la leur, et, avec le temps, cette
habitude se serait consolidée en régie impérativo. t'arattëte.
ment, elle aurait aussi changé do nature. Tandis que primi-
tivement elle supposaitun coup de force, une véritable t'itMia,
elle serait devenue peu il peu pacifique et contractuelle; et
voUa pourquoi c'est sous cette forme qu'on l'observe le plus
génératement aujourd'hui.
Sur la nature des 'causes qui auraient donné naissance il
cet usage, ces auteurs se séparent. four MacLennan', c'est ta
pratique de l'infanticide qui t'aurait rendu nécessaire. Le
sauvage, dit-il, tue souvent ses enfants, et ce sont les filles qui
sont sacrifiées de préfÉrence. !) eu résulte que tes femmessont
en nombre insuffisant dans ta tribu il faut douc prendre au
dehors de quoicombler ces vides. Pour Lubbock, c'esl lebesoin
do substituer des mariages individuels aux mariages coiiectifs,
seuls tolérés à l'origine, qui aurait joué le rôle décisif. Par-
tisan des théories de Morgan et do Hachofen. il admet en
euet que, dans le principe, tous les hommes do ta tribu pos-
sédaient collectivement toutes les femmes, sans que nul put
en approprier une pour son usage exclusif car une telle
appropriation eût été un attentat contre les droits de la corn"
muuaute. Mais il eu était autrement des femmes qui faisaient
partie des sociétés étrangères sur elles, ta tribu u'avait
aucun droit. Ceiui donc qui avait réussi ù en capturer une
pouvait la monopoliser, s'ii te desirait. Or ce désir ne pouvait
manquer de s'éveittor dans te cœurde l'homme, parcequetes
avantages de ces sortes d'unions sont évidents. Ainsi se serait
formé un préjugé défavorable aux mariages endogames~.
Enfin, pour Spencer, c'est le goût des sociétés primitives
pour la guerre et le pillage qui aurait été la cause détermi-
nante du phénomène. L'enlèvement des femmes est une
manière de dépouiller le vaincu. La femme capturée fait
partie du butin elle est donc un trophée glorieux et, par
suite, recherché. C'est une preuve des succès que t'en a rem-
portés dans la bataille. La possession d'une femme conquise à

()) \S/K~t'M<~ .~<tc<fH/


//M<<M't/,<-)).
tOft/MMOMt.
< V. U/tHef d< t'«'t<tf!a<KM,
)<.Mt.
SO L'AMNÊK t8K
SOMOKMtQU)!.
ta guerredevintainsiunesortede distinctionsociale,un titre
de respect, i'ar contre-coup,le mariage que l'on contracte
pacifiquementau seinde lu tribu (ut considèrecommeune
tacheté et )!6tri.Dela uétrissuroà la prohibitionformellei)
u'y a qu'un pas
Nousne mentionnonsque pour mémoireces explications
trop sommairemcutconstruites.On ne voit pns pomquoi,
dans le seul but d'obvier& l'insuffisancedes femmesindi-
gènes, tes hommes se seraient interdit, et sous peine de
mort, d'utilisercellesqu'ils avaientsous la main. D'ailleurs,
il u'ost prouveni quei'iutauticidedes fillesait en cettegéuë-
ratit6, ni qu'il ait pu produireles effetsqu'on lui attribue,tt
est vrai qu'il est fréquenten Australie;ntaison cite biendes
puysoù il n'est pas pratique Kntout cas, il y a uu fait qui
devrait retahHr t'équitibreentre les sexes, alors mêmequ'il
serait ainsi rompu au tendonainde la naissance c'est que,
tnemedans les payscivilises,tu mortaliténaturelledes gar-
çons dépasse celledes (i)!es.A plus forte raison, en doit-il
être ainsi dans les sociétésprimitivesoù un état de guerre
chronique expose l'hommeà bien des causesde mort qui
menacent moins directementles femmes.Et en edet, d'une
enquête faite par lessoinsdu gouvernementanglaissur dit-
férentspoints des ttes Fidji,où l'infanticideétait en usage,
ii résulteque si, pendant t'enfance,le nombredes garçons
dépassecelui des filles,le rapportest Inversepource quicon-
cernetes adultes'.3.
Les théories de Lubbocket de Spencersont encoreplus
dénuées de tout fondement.La premièrereposesur un pos-
tulat qui u'est plus actuellementsoutenable.Ii n'est pas uu
seul fait qui démontreta réalitéd'un mariagecollectif.Quoi
de plus étrange, d'ailleurs,que cette tribu où tes hommes
délaisseraientobligatoirementtoutestes femmesparcequ'ils
eu ont la pleine propriété? Ajouteza ceta que les femmes
faites prisonnières à ta guerre devaient',commele butin
fait en commun,appartenircollectivement a la communauté
et non leur ravisseur.Quantà Spencer,a l'appui de son
hypothèse, il cite en tout quatre faits', desquelsil résulte
(t) )). j).iMtC
f<fwt'Mo~'f.
<'<'tM<'t/)M ''t ~uh'.
/<'</<)«'<' </« M';<o.~<'At/MMO),p. 9!)T-
t' fai~ th)n!. W<<)'')-'M!)ft'):.
(ï)
.:MM.
(3) V. fi<M)t' '-t ))"wiU. <f<«'t«t<oxf A'u'Mitan)!, p. i7t.:T)i.
(t; /~<t<-<~M de -s'of-t~ )f. ~!9.
H. MMUKtM. LA fHOtHMTMtt M t.'tNCMTK 3<

que, chex les sauvages, oa exige parfois des preuves do cou-


rage comme condition préliminaire au mariage. Maisest-ce
que le seul moyen de témoigner de sa bravoure est de prendre
des femmes? On trouve au moyen âge des usages analogues;
le chevalierdevait mériter sa nancéo par quoique bel exploit.
Pourtant, il ne s'est alors rien produit qui ressemblât a
t'exogamie. Que) écart, enfin, entre le uiobiie auquel ou attri-
bue cetto régietneutation et !a peine terrible qui frappait le
violateur de la ici
Maisle vice radical de tous ces systèmes, c'est qu'ils repo.
sent sur une notiun erronée de l'exogamie. Us entendent eu
effet, par ce mot, l'obligation de n'avoir de rapports sexuels
qu'«fff «~ /<'Mm<* MO~MMf~tff' <<!H~)'c; c'est le mariage
''Mffvttx'o~fvxf<<* qui serait prohibé. Or i'exo-
la )'«'««'~'<<"<
,tmie jt'a jamais eu ce caractère. Elle défend aux individus ~<~
.i
d'un mcme ciitt)de s'unir entre eux ttt.ns. trës~cncratement,
t;'e'.t dansun autre cian de la tncme tribu, ou tout au moins
de la même confédération, que les hommes vont prendre
tours femmes et que les femmes trouvent leurs maris. Les
clans qui s'aiiient ainsi se considèrent même comme parents,
loin d'être en état constant d'hostilité. Cette malheureuse
confusion entre le clan et la tribu, due à une insuffisante
dcnnitiun de l'un et de l'autre. n contribué pour une large
part a jeter tant d'obscurité sur la question de l'exogamie. On
ne saurait trop répéter que si )e mariage est exogame par
rapport atx groupes totémiqucs dans primaires ou secon-
dai.resj~t! est généralementendo~ame par rapport a la société
politique (tribu).
MacLennan. it est vrai, reconnait que l'exogamie, telle
qu'elle existe aujourd'hui, se pratique à l'intérieur de la
tribu. Mais suivant lui, cette exogamie intérieure serait une
forme ultérieure et dérivée, dont il explique la genèse assez
ingénieusement. Soient trois tribus voisines A, B, C qui pra-
tiquent l'exogamie de tribu à tribu. Les hommes de A, ne
s'unissant qu'aux femmes de B et de C, s'eu emparent de
force et les emmènent chez eux. Quoique captives, elles gar.
dent leur nationalité; elles restent des étrangères au milieu
de leurs nouveaux maîtres. En vertu de la règle qui veut que
l'enfant suive lu condition de la mère, elles communiquent
ce caractère aux enfants qui naissent d'elles. Ceux-ci sont
donc censés appartenir à la tribu maternelle, soit B, soit C,
quoiqu'ils continuent à vivre dans la tribu A où ils sont nés.
32 L'ASNÈË!=Ot:KH.OU)()UH.
tS67

Ainsi, au sein de cette dernière société, naguère ttomogéne.


se forment deux groupes distincts, l'un B' composé des
femmes de 13et de leurs enfants, l'autre C' qui comprend les
femmes de C et leurs descendants des deux sexes. Chucun de
ces groupes constitue un clan. Une(ois qu'ils sont tonnes pat'
ce procèdeviolent, ils se recrutent regutieremeut par la voie
de )a genuratiou. les enfants qui naissent ressortissant au
ctan materne). Ils surviveut donc aux causes urtificiettes qui
leur avaient donne naissance. s'organisent et fonctionnent
comme des t'tcments normaux de lu société. Quand ce résultat
est atteint, t'exogamio extérieure devient inutile. Les hommes
de M*n'ont plus besoin d'aller conquérir hors de lit tribu des
femmes d'une autre nationalité; ils en trouvent chez eux
dans le ctaa C
Muis nous sin'uxs aujourd'hui que tes ctans se sont formés
d'une tout autre manière. Dans ta piupart des tribus austra-
liennes et fnefnc indiennes, i) n'est pas douteux qu'ils sont
nés de deux souches primitives par voie de génération spon-
tauee. Il:; Mesont. donc pas dus à une importation vioieute
d'éléments t''tran~crs et déjà différencies. L'itypothese de
Mac Lonnan pourrait tout au plus s'appliquer aux deux
cians primaires ()ont les autres sont sortis par segmentation.
Mais il est bien unprobabte que ces doux sortes de clans
resuiteut de deux processus aussi différents, alors <tu'ii M'ya.
pas entre eux de différence fondamentaie. Pourquoi d'uil-
leurs J'introduction de femmes étrangères aurait-elle donné
naissance, dans tant de cas, i( deux groupes heterog-eneset à
deux seutement? Il faudrait donc admettre que chaque tribu
a regutierement emprunte a deux seulement de ses voisines
les femmes qui lui manquaient. Mais pourquoi se serait-elle
ainsi limitée? Pourquoi enfin cette importation aurait-oHe
subitement cesse des que les deux ctans primaires commen-
cèrent. a apparaitre sur le fond primitivement homogène de
la peuplade'On ne voit pas davantage comment l'exogamie,
ainsi transformée, aurait pu se maintenir si elto avait les
causes qu'on lui attribue. Car ce n'était pas uu moyen de
diminuer la disette de femmes dont on pouvait souffrir que
de faire passer celles qu'on avait d'un ctan daus l'autre. Ces
virements ne pouvaient avoir pour effet d'accroitre, si peu
que ce ftlt, le totat de la population féminine.
n''['' n')'ti«')))n't:)Mttsh\.
0) t/<'xt))icatit)tt tfemxM.
t. Xt),p. &?,et ))M
neitwu)').~MfMwA/'cAc f«M<(7f'e,p. )!f7t't
suit.
B. CURKXEtM.– LA PMHtBmott M t'MCMt-fE 88
.1·
Plus digne d'examen est la théorie de Morgan
L'exogamie
aurait pour cause le sentiment dos mauvais résultats
qu'on a
souvent imputes aux mariages entre consanguins. Si, comme
on t'a dit, la consanguinité est par etie-méme une
source de
dégénérescence, n'est.it pas nature) que tes peuples aient
interdit des unions qui menaçaient d'affaiblir ia
vitatitujreue.
raie ?
Maisquand on cherche dans l'histoire commenttes
hommes
se sont explique & eux-mêmes ces
prohibitions, a quels
mobites paraissent avoir obéi les législateurs, ou constate
que, avant ce siècle, les considérntions utilitaires et
physio.
logiques semblent avoir été presque complètement ignorées.
Chexles peuples primitifs, il est bien dit
çù et là que ces
unions ne sauraient prospérer. Quand un homme se sera
uni it sa tante, dit le Lévitiquo', ils
porteront la peine de
teur ptieheet n'auront pas d'enfants. Mais cette steritite
est
présenK'ecomme un châtiment intUgé par Dieu, non comme
la conséquence d'une toi naturelle. La
preuve, c'est qu'au
verset suivant les mêmes expressions sont
employées dans le
cas d'un mariage qui par iui-môme ne saurait avoir de
mau.
vais ettets organiques il s'agit d'un homme
qui s'unit à la
femme de son frère. Dans l'antiquité
classique, les raisons
les plus diverses sont alléguées~ Pour
Ptaton, te croisement
serait surtout un moyen de meier les fortunes et les curac.
tères et de réaliser une homogénéité désirable
pour le bien
de t'Ktat'. Pour ((autres, il s'agit
d'empêcher que i'atïection
ne se concentre dans uu petit cercle fermé*. Suivant
Lulher,
si la consanguinité n'était pas un obstacle, ou se
marierait
trop souvent sans amour, uniquement pour maintenir l'inté-
grité du patrimoine (amitiat C'est seulement vers le
xvtt"siècto qu'apparaît cette idée que ces unions afïaibtissent
la race et doivent être prohibées pour ce motif; encore reste-
t-ette assex indécise'. Montesquieu ne semble
pas la soup-

/t))fM<)<
(t)M")'(!'t". .S'M'tC~, p. M)..
S) L. XX.!?.
(3)O~KM~Mf. Y.9; /.t,M,V).)< 1'1\')H. <
W C't~t).' mi.(t'Ari~t')).(t..ifttittt.U~u~titt.Voit)'-<)..<)..).,-i(At<)M~
ttuth. !e .WnfW<t.?<-
c/xM)-Kinip.?.).
(S)V.Jiot)),j).9(i.
(0)Y.BMr).)n. ~')<t/.M.yo/'j)f<McA< f)~)-.)n).
)(iïi, tt). M. Ctt,
))))f)p))<t.~eMoM<!)fA)«~)<tMtco,<6K).)h-.XY.
– Annue sorio). <M7.
E. DNMfHMM.
3
34 L'AKKËE )'??
SOCKM.OUtOUE.
çonner'. Maisce qui est plus intéressant,c'est qu'elleparait
avoirété presqueétrangèreà la rédactionde notreCode.Por-
talis, dans sou exposedes motifs,n'y fait pas aitusion.Onla
trouve indiquéedans le rapport fait au Tribunal parGillet,
tnais elle y est reléguéeau secondphu. 0«~'<'~«et~MM !<<<'M
~'oh~/M ««' /« ~<<'f~Y«/f'f<' il y a, dit-il, un motif
p/t~t'/Mf,
moral pour que l'engagementréciproquedu mariage soit
impossibleà ceuxentre qui le sanget t'attiniteont déjà établi
des rapports directs ou très prochains. » Il est donc bien
invraisemblableque lesAustralienset lesPeaux-Houges aient
eu comme une anticipationde cettethéoriequi ne devait se
faire jour que beaucoupplus tard.
Cependant,cette premièreconsidérationn'est pas sufRsam-
ment démonstrative.On pourrait supposerque les hommes
ont eu confusémentconsciencedes mauvaisenets de la con-
sanguinité. sans pourtant s'en rendre clairementcompte,et
que ce sentimentobscur a été assezfortpour déterminerleur
conduite.Il s'enfaut en effet quenous connaissionstoujours
avecclartétes raisonsqui noustout agir. Mais,pourque cette
hypothèsefût recevable,encorefaudrait-ilque les mauxdont
on accuse les mariagesconsanguinsfussent réels, incontes-
tables et mêmed'une évidenceassezimmédiatepourque des
mtettigeocesgrossières pussenten avoir au moinste senti-
ment. tt~audrait mêmequ'ils fussentde nature à frapper
vivementl'imagination,de quelquemanièred'ailleurs qu'on
se les expliquât car, autrement, l'extrême sévérité des
peinesque l'on dit être destinéesa les prévenirserait inin-
teUigibte.
Or, si l'onexaminesansparti pris les faits alléguéscontre
la consanguinité,le seul pointqui paraisseétabli, c'est qu'ils
u'ont aucunementce caractèredécisifSans doute, on peut
citer des casoùelleparait avoirété néfaste maislesexemples
favorablesà la thèse opposéene sont pas moinsnombreux.
On connattde petits groupessociauxdonttes membres,pour
des raisons diverses,ont été obligésdo se marier entre eux,
et cela pendantde longuessuitesde générations,sans qu'il en

(); &p~<</<MtoM,XX\). tt.


(S) Nous ne pouvons riter tou~ h~ oovmtt' ))<nn<sur lu question. On
trouvem une t)ib)iuf!t'aphi<' cmttpM)'ttittsique tous les faits iHtportentii
Mttt'gMM~de part et d'autfe <t<tnii
te)hrc de Huth <Mj& tiM (Londres,i<a7).
Une petite t)ruchnrt'd<'8)t''r)M't.BAt
:frM<'AMtB<M~t~<'t<;eH~M, Bet'tin.iSW.
cunticot auMi un aMM bon t'x{)0it!de t'etOLt la question.
<)<}
H. CUMHKtM. – LA )'HOHtBmOX OE L')t<CEST8 35

fut résultéaucunanaibtissementde la race Hsemble, it est


vrai,ressortirde certainesobservationsque lu consanguinité
accrott la tendanceaux affectionsnerveuseset &la surdi-
mutité maisd'autres statistiquesétablissentqu'elle diminue
parfois ta mortalité.C'est ce que Neuviiiea établi pour les
Juifs
Cescon dictions apparentes prouvent que la consangui-
nité, par ette-méme,n'est pas nécessairementmalfaisante.La
où il existedes taresorganiques,mémosimptementvirtuettes,
elleles aggraveparce qu'elle les additionne. Mais, pour la
mêmeraison,elle renforceles qualités que présententégale-
mentles parents.Si elle est désastreusepour les organismes
mal venus,elle confirmeet fortifieceux qui sont biendoués.
!t est vrai qu'en donnant un relief exceptionnelà certaines
dispositions,même avantageuses, elle risque de troubler
l'équilibrevital; car c'est une conditionde la santé que toutes
les fonctionsse balancent harmoniquement et se main-
tiennentmutuellementdans un état de développementmo-
déré. Mais d'abord, si ces ruptures partielles d'équilibre
sont morbidesau regard do la physiologieindividuelle,si,
dans une certainemesure, .elles mettent le sujet qui en est
atteint dans des conditions moins favorables pour lutter
contrele milieu physique, elles sont souvent pour lui une
causede supérioritésociale. Il retrouve d'un coté ce qu'il
peut avoirperdude l'autre, et parfoisdavantage car l'homme
est doubleet ses chancesde survie no dépendentpas seule-
mentde la manièredont it est adapté aux forcescosmiques,
maisencorede sa situation et do son rôle dans la société.
Ainsi,l'incontestabletendancedes Juifs à toutesles variétés
de !a neurasthénieest peut-être due, en partie, à une trop
grandefréquencedes mariagesconsanguins or, commeelle
a pourconséquenceune mentalité plus développée,elle leur
a permis de résisteraux causes socialesde destructionqui
lesassaillentdepuisdes siècles. Surtout,on ne voit paspour-
quoi lessociétéscondamneraientd'une manièreabsoluecette
culture intensivede qualités déterminées;car ettes en ont
besoin.Lesaristocraties,les élites ne peuvent pas se former
autrement. En tout cas, tes phénomènesde dégénérescence

();Y.)MMtitdtUM.
Math.p. )M-t8<t.
Mf)M<fo«e)'MH~ T'<M~<«'M<<fM,)''M)x.'f<)ft.t85X, p. tS-jO et i)t-U3.
Lcif chiffre! sont reproduits dtne Huth, là. ifc.n?.
36 L'ANNEESOOOMGtQUR. 1891
..1 _1 1- t .&
qui peuvent se produire ainsi, &quelque degré qu'ils soient
nuisibles, ne sont sensibles que si ces sortes d'unions se sont
repétées pendant plusieurs générations. H faut du temps pour
que l'énergie vitale s'épuise à force d'être spécialisée. Les
conséquences de cette spéciotisation outrée ne peuvent donc
être atteintes que par une observation patiente et prolongée.
En résume, s'i) semble bien que tes mariages consanguins
créent toujours un risque pour les individus, s'il est sage de
ne les contracter qu'avec prudence, ils n'ont certainement pas
les effets foudroyants qu'on leur a parfois attribués. Leur
influence n'est pas toujours mauvaise, et, quand elle est mau-
vaise, elle ne devient apparente qu'à la longue. Mais alors,
on ne peut admettre que cette nocivité limitée, douteuse et
si malaisément observable, ait été'aperçue d'emblée parle
primitif, ni que, une fois aperçue, elle ait pu donner naissance
a une prohibition aussi absolue et aussi impitoyable. L'ère
des discussions soulevées par ce problème est loin d'être
close; les théories les plus opposées sont encore en présence ~t
la question môme n'est soupçonnée que depuis peu les faits
ne sont donc pas d'une évidenceet d'une netteté teties qu'ils
aient pu saisir l'esprit du Muvuge. Lui qui d'ordinaire sait
si mal distinguer les causes, relativement simples, qui déter-
minent journellement la mort, comment aurait il pu isolerl'
ce facteur si complexe, enchevêtré au milieu do tant d'autres,
et dont l'action, lentement progressive, échappe par cela
même &t'observation sensible? Surtout, il y a une frappante
disproportion entre les inconvénients réels de la consan-
guinité et les sanctions terribles qui punissent tout manque-
ment à la loi d'exogamie. Unetelle causeest sans rapport avec
l'olfet qu'on lui prête. Si encore on voyait les peuples se
comporter d'ordinaire avec cette rigueur dans des circons-
tances analogues Maisles mariages entre vieillards et jeunes
filles, ou entre phtisiques, ou entre neurasthéniques avérés,
entre rachitiques, etc., sont autrement dangereux, et'pourtant
ils sont universellement tolérés.
Mais MKet'a~OM~M.<<~C&<PP encore, c'est que ~'M'O~tNM tt<'
KoM<<f)t<
<;«'«?rapport m<Mt<!< arec la coHso~ttt-
et M('<))t<<<«'r<'
t)M< Sans doute, les membres d'un même clan se croient issus
d'un même ancêtre; mais ii yaune énorme part de fiction dans
cette croyance. En réatité, on appartient au clan dès qu'on en
porte le totem, et on peut être admis à le porter pour des rai-
sons qui ne tiennent pas à la naissance. Le groupe se recrute
– t'AfROUtOTtOK
E. MHtUtKm. DEL'tKCMTE 37
presqueautant~aradon.tiotLque~Mr. gén.ératJQU.Les prison-
niersfaits~&laguerre, s'ils ne sout pas tués, sont adoptes
trèssouventmême,un eian eu incorporetotalementou par-
tiellementun autre.Toutle monden'y est donc pasdu m6m&
sang.D'aitleurs.on y comptetrès souventun minierd'indi-
vidus, et, dans une phratrie,plus encore.Lesunionsainsi
prohibéesne se nouaientdonc pasentre prochesparents, et
parsuiten'étaientpas de cellesqui risquent de compromettre
gravementune race. Ajoutezà cela que les mariagesau
dehorsn'étaient pas interdits, que des femmesétaientcer-
tainementimportéesdes tribus étrangères alors mémoque
l'exogamien'était pas de régie; il se produisaitdonc,en fait,
des croisementsavec dos élémentsétrangers, qui venaient
atténuer les effetsque pouvaientavoir tes unionsconclues
entretropprochesparents.Ainsinoyésdans l'ensemble,il ne
devaitpas être facilede les déméier.
Inversement,l'MOjsjjtL~cM'~Jf~c~N~.foKM~Mt'Hs
<~j'a~'oc~. Les enfants du frère de ma mère apparte-
nant, sousle régimede la filiationutérine, a uneautre phra-
trie que mamèreet que moi,je puis les épouser.11y a plus:
à partir du momentoù le souvenir des liens qui unissaient
entre eux les clansd'unemêmephratrie eut disparuet où.le
mariageeut lieu d'un clan à l'autre, frères et sœursde père
purentlibrements'épouser. Par exemple,chez les Iroquois,
un membrede la division du Loup.peut très bien s'unirà
unefemmede la divisionde la Tortue,et avec uneautre de
la divisionde.l'Ours.Maisalors, commel'enfantsuit la con-
ditionde la mère,lesenfantsde cesdeuxfemmesressortissent
à deuxclansdinérents l'un est un Ours,l'autre une Tortue,
et par conséquent,quoiqu'ils soient consanguins,rien ne
s'opposeà ce qu'ils s'unissent.Aussi,mêmedes peuplesrela-
tivementavancésont-ils permis le mariage entre frèreset
swursde père. Sarah, la femmed'Abraham,était sa demi*
sœur', et il est dit au livre de Samuelque Tamar eût pu
épouserlégalementson demi-frèreAmmon'.Onretrouvetes
mêmesusagescheztes Arabes°, chezles Slavesdu Sud qui
pratiquentle mahométisme A Athènes,une filledeThémis-

x!t.)S
())Gcntsc.
Samuel, Xtt), t3.
<~Smith.KOt~/t'p
<!))<< Lif<fy.tt'a&to,
Ma<')'f< p. XKt.
(~KnmM. Sille<M<<
BfftMcA )). 1.
(/<Sa<M(tt'<'K,
? L'AKKÉKMCtOMGtQL'H.ttM
tociea épouséson frère consanguin Che!:tousces peuples,
pourtant, Hncesteétait abhorr6 c'est doue que la réproba-
tiondont il était l'objetne dépendaitpasde !a consanguinité.

!V

H resteraità dire que t'exogamieest due ù un éloignement


instinctifque ressententles hommespour les mariagescon-
sanguins.Lesang, a-t-onsouventrépété,a horreur du sang.
Maisune pareilleexplicationest uu refusd'explication.Invo*
quer l'instinct pour rendre compted'une croyanceou d'une
pratique, sans rendre comptede l'instinct qu'on Invoque,
c'est poser la question, non la résoudre.C'est dire que les
hommescondamnentl'incesteparcequ'illeur parait condam-
nable. Comment croire d'ailleurs que cette réprobation
paisse tenira quelqueétat constitutifdelanaturehumaineen
général,quand on voitsousquellesformesdiverseset même
contradictoireselle s'est expriméeau cours de l'histoire.La
mêmecauseno peut expliquerpourquoi,ici, ce sont surtout
les mariagesde parents utérins qui sont interdits, tandis
qu'ailleursce sont ceuxde parentsconsanguins; pourquoi,
dans unesociété,la prohibitions'étend&t'innui, tandis que,
dans l'autre, elle ne dépassepas les collatérauxles pluspro-
ches. Pourquoi,chez les Hébreuxprimitifs,citez les anciens
Arabes.cheztesPheniciens.chextesCrecs.chezcertainsStave:
cette aversion naturelle n'empeehait-etiepas un homme
d'épousersa sœurde père? Même, il estdes cas nombreuxou
ce prétendu instinct disparut complètement.Les mariages
entre pèreset filles,frèreset sœurs,étaientfréquentschezles
Mèdes,chez les Perses touslesauteursde l'antiquité.Héro-
dote, Strabon, Quinte'Curce,sont d'accord pour dire que,
chezces derniers surtout, l'usageétait générât En Egypte,
mêmelesgens du communépousaientsouventleurs sours';
c'étaitaussita règleenPerse.Onsignalela mêmepratiquedans
les classesélevéesdu Cambodge';les écrivainsgrecs l'attri-
(t)Comelius Xt'pM, 1.
Citout),
(~ Y.nutatomott M<m<VUt.t)M.
Lu.-nit), Yfn,')ett<).
Quinte-CaMt-,
t. Cf.Ma~pem.
(3)Diodurc, CMt/f~o~af)~ ~e<)<~ aoctCNMe. p.SS.
V.
(4) MondittM. <«<'/« Coc/<«t<«w
Me<M<'t~HCM)eK<! in BM~<H dela
SM.<f~H</tMp. de fttt'M,iKS.
– LAPKOtHOn'tOS
E. t)UttK)tNM. 08L'tNCESTH 89
huaient&à neuurësà
peuprès à tousles neuntesbarbaresd'une
peuplesbarbaresd'une manière
maotèro
générale Enfin,pournousen tenir à la seuleexogamie,com-
meutrattacherà unedispositioncongénitalede l'individuun
sentiment(luidépendd'un fait aussi éminemmentsocialque
le totémisme?L'instincta ses racinesdansl'organisme;com-
mentune particularitéorganique quelconquepourrait-elle
produireune aversion pour le commercesexuelentre deux
porteursd'unmêmetotem'?
Puisque te totem est un dieu et le totémismeun cuite,
n'est-cepas plutôt dansles croyancesreligieusesdes sociétés
inférieuresqu'il convientd'aller chercherta causede l'exo-
gamie? Kten effet, nous allons montrer qu'elle n'est qu'un
cas particulierd'une institution religieuse,beaucoupplus
générale,qu'on retrouveà ta base de toutesles religionspri-
mitives,et même,en un sens, de toutesles religions.C'estle
/«~o«.
On appelle de ce nom un ensemble d'mtordtcUpns
rituettesqut ont pourobjet de prévenir tes dangereuxeNets
d'une contagionmagiqueeaempechant.tou.tcontact entre
unechose ou une catégoriede choses, où est cens6résider
un principe surnaturel, et d'autres qui n'ont pas ce même
caractèreou (luine font pas au mémodegré. Lespremières
sont dites tabouées par rapport aux ~coudes. Ainsi, il
est sévèrement défendu à un homme du vulgaire de
touchersoit un prêtre, soit un chef, soit un instrument du
culte.C'estque, on ces sujets d'élite, habite un dieu. une
force tellement supérieure à celles de l'humanité, qu'un
hommeordinaire ue peut s'y heurter sans on recevoirun
chocredoutable une telle puissancedépasseà ce point les
siennesqu'ellene peut se communiquerà lui sans te briser.
D'autrepart, elle ne peut pas ne pas se communiquerà lui
dès qu'elle entre en contact avec tu! car, d'après les

tt)Kuripid<H(/<'Mt)<t~Ke,Y.t7S..
(!) PoWtro <'o)np)<'t. )Ment«)t)))ons
un'' hypothèsede W''s(t'nnan'k (On-.
</iMt~MM<!r)<!)/<p.307):)'))on'u)'<)t')'in<teM'r<tittn!!UM('tivcctc<'t
instinct serait ut<fft't'tde la cohtthittition.Cc))c-i fiu~'t'Uut'raiLte d)!))'
soïno). L'i'teo<tv<ntetc déjà <')«)«!par Morit: \Vtf{nct'(in A~<MHH<Mt, t8M,
)).SO). Mat<c)t<*n e Mmnut à
)!'ap)))i<)Ut't't'<'xonmui<pux'jttc les pnrtBUf!'
')'nn n)'~n)otnimnne cohtthitentpt)!i''niSt'tnhh'<'t vivt'ntnx~ttu'pertoit!dans
')<<distnets torritorianx ttiMtients.Nous vcn'<)t)sp))~ ))M <)ucfeUf e)t))U-
catiun ne vaut pas dtvanta);c pour tes formes plus ~centei: de rinceittc.
(3) Lo mot est entpnttttc t la langue potynthiicnne mais la chose est
anh'o'Mttc.
40 L'AKNÉB BOC)OMt:)QU)!.<M7

croyances primitives, les propriétésd'un être se propageât


contagieusemont,surtout quand elles sont d'une certaine
intensité.Si déconcertantequepuissenousparattre cottecon-
ceptiou, le sauvageadmetsanspeinequeia naturedes choses
est capablede se diffuseret dose répandreà l'infini par voie
de coutage.Nous mettonsquelquechosede nous-mêmespar-
tout où nous passons;l'endroit où nousavons posé le pied,
où nous avonsmisla main, gardecommeunepartie de notre
substance,qui se disperseainsisanspourtants'appauvrir.JI
en est du divin commedu reste.I1se répanddanstoutce qui
J'approche; il est mêmedouéd'une contagiositésupérieurea
celle des propriétés purementhumaines,parce qu'il a une
bien plus grande puissanced'action.Seulement,it faut des
vases d'élection pour contenir de telles énergies. Si elles
viennent à passer dans un objet que ia médiocritéde sa
nature no préparait pas à un tel rôle, elles y exerceront
de véritables ravages.Le contenant,trop (aible,sera détruit
p. son contenu. C'est pourquoiquiconquedu communa
).,n.t. !'o être taboue,c'est-à-direoù habitequoiquepareeiie
<t( dignité. se condamnede tui-mémeà la mort ou à des
maux divers que lui infligeratOtoutardle dieu sous l'empire
duquel il est tombé.De ia vient la défensed'y toucher, dé.
fensesanctionnéepar des peinesqui tantôtsont censéess'ap-
ptiquerd'ettes-memesaucoupablepar unesortede mécanisme
automatique, de réactionspontanéedu dieu. tantôt lui sont
appliquées par la société,si elle juge utile d'intervenir pour
devanceret régutariserle cours uatureldes choses.
On aperçoit le rapport qu'il y a entre ces interdictions
et l'exogamie.Celle-ciconsisteégalementdansla prohibition
d'UHcontact cequ'elle défend,c'estle rapprochementsexuel
entre hommes et femmesd'un mêmectan. Les deux sexes
doiventmettreà s'éviterle mêmesoinque leprofanea fuir.le
sacré, et le sacré le protane; et toute infractionà t{trëg)e
soulèveun sentimentd'horreur qui ne diffèrepas en nature
de celui qui s'attache à toute violationd'un tabou. Comme
quand il s'agit de tabousavérés,la sanctionde cettedéfense·
est une peine qui tantôt est duea uneinterventionformelle
de la société,mais tantôtaussitombed'ette-mémesur la tête
du coupable,par t'efïet naturel desforcesen jeu. Cedernier
fait surtoutsuffiraità démontrerla naturereligieusedessen-
timents qui sont à la basede l'exogamie.Elledoit donc très
vraisemblablementdépendrede quelquecaractère religieux

B. CUBKMMM. <A PBOMtBÏTMf)DE L'INCESTE 4i

dontestempreintt'un dessexes,et qui. terendantredoutable


à l'autre,(ait te videentre eux. Nouaattans voir que, eiïecti-
vement, les femmessont alors investiespar J'opiniond'un
pouvoirisolanten quoique sorte, qui tient à distanceta
populationmasculine,non seulementpour ce qui concerne
les relationssexuettes,mais dans tous les détailsde l'exis-
tence journalière.
C'estsurtoutquand apparaissentles premierssignesde ia
pubertéque se manifestecette étrangeinnuenco.C'estdans
ces sociétésune règle généraleque, &ce moment,la jeune
fittedoitêtre misedans l'impossibilitéde communiqueravec
lesautresmembresdu clanet même avecles chosesqui peu-
vent servir à cesderniers.On l'isole aussi hermétiquement
que possible.Kttene doit pas toucherle sot que foulentles
autreshommeset les rayonsdu soleil ne doiventpas parve-
nir jusqu'àelle, parceque, par leur intermédiaire,elle pour-
rait entreren contactavecle reste du monde.Cette pratique
barbarese retrouvedans les continents les plus divers, en
Asie,en Afrique,en Oeeanie,sous des formesà peine dine-
rentcs.Citezles nègresdu Loaugo,les jeunes filles,à la pré.
mièremanifestationde la puberté, étaient confinéesdans
des cabanesséparées,et il leur était défendude toucherle sol
avecuuepartiedécouvertede teur corps. ChexlesZoulouset
les tribus du sud de l'Afrique,si les signes apparaissent
pour la première fois au momentoù la jeune ntte est aux
champsou dans la forêt, elle court à la rivière, 'se cache
dans les roseaux de façonà n'être vue par aucun homme,
et se couvresoigneusementla tête avec un voile, afin que
le soleilne la touche pas. La nuit venue,elle retourne à
la maisonet oitoest enferméedans une cabanepour quelque
temps. A la Nouvette-Zétande, il y a un bâtiment spécial
réservépour cet oMce.A t'entrée, est suspendue une botte
d'herbessèches;c'est le signeque l'accèsd'un lieu est strie.
tementtabou.A troispiedsdu sol, se trouve uue ptate-forme
de bambous;c'est là-dessusque viventces jeunes fillesqui
se trouventainsi sans communicationdirecte avec la terre.
Ces prisons sont si étroitementcloses que la lumière n'y
pénètrepas.C'esta peines'it y arrive un peud'air respirante.
On retrouveéxactementla même organisationchez les Ot
Uanomsde Bornéo.Leurs parents ne peuvent mêmepas par-
ter à cesmalheureusesrecluses une vieilleesclaveest pré-
poséeà Jeur service. Ce confinementdure quelquefoissept,
43 L'ASIE SOCNMCtQUE.
«M
<ms aussi leur croissance est-elle arrêtée pnr ce manque pro-
longé d'exercice, et leur santé reste cbrantee. Mûme usage,
avec des variantes insignifiantes, a la Xouvette-Cuinee, à
Ceram, chez les Indieusde l'lie de Yaneouver, chex les Tjinttits.
tes Haïdas, les Chippcouais, etc., etc.
Chex les Macusis de la Guyane anglaise, la jeune fille est
hissée dans un ttamac au point le plus eteve de la maison.
Pendant les premiers jours, elle ne peut en descendre que la
nuit etelle observe un jeune rigoureux. Quand les symptômes
commencent à disparaître, elle se retire dans un comparti-
ment de ta maison, construit spécialement pour otto dans le
coin le plus obscur. Le matin, elle peut faire cuire sa nourri-
ture, mais sur un feu et avec des instruments qui ne servent
qu'à elle. C'est seulement au bout de dix jours qu'elle
recouvre sa liberté, et alors toute la vaisselle qu'elle a em-
ployée est brisée et les morceaux en sont soigneusement
enterres. L'emploi du hamnc. en pareil cas, est très fréquent
cette suspension entre ciel et terre est en ellet un moyeu
commode d'obtenir un isolement hermétique, it est également
:jsit< h. les Indiens du Rio de la Ptata. dans certaines trl-
f'tts'!wottvie, du Brésil. Otex les premiers, on va môme
jusqu'à ensevelir la jeune ntto comme si elle était morte on
ne lui laisse que la bouche de libre
Cette pratique a cte tellement répandue et cite est si persis
tante qu'on en trouve des traces très apparentes dans le t'oth.
lore d'uu très grand nombre de sociétés. Fraxer*a a recueilli
plusieurs légendes populaires de lu Sibérie, de la Grèce, du
Tyrol, qui toutes s'inspirent de la même idée. Oa y prête au
soleil un goût particulier pour de jeunes mortettes que leurs
parents tiennent reufermées pour les soustraire à ses atteintes.
L'antique histoire de Danac n'est peut-être que l'un do ces
ressouvenirs. On s'explique en eftet qu'au bout d'un certain
temps on ait donné ce sens aux précautions traditionnelles
qui étaient prises pour isoler les jeunes NUes des rayons
solaires.~
Mais ce n'est pas seulement au moment de la puberté que

«) Y. [Mtur).' th'hti)<h'sfoits.Fmxt'r.~MfMNo«~/t.tt. ).. MM38:


Kohtfr.M' ~ec/t/e < f~ot-Mw A'<Mf/
~tNprMfMht M~c/f.y. Mt-~Mc/f.
XH,<))!)?; Muss.Û«tU'f.ttMt~Vo<f«-«M</
HMA<ttet.M<.«i)t-/t«/'<, )-'e<<'
AMK~.t. ni3.t6<).
<2)Pmxcf.Op.c)< tt. !?.
13)?«/ tt. 236.
E. MHKn)!tM. LAt'MmemoN UEt'tKCKSTË 4N
les femmesexercentcette espèced'actionrépulsivequi rejette
loin d'elles l'autre sexe. Le même phénomènese reproduit,
quoiqueavecunemoindreintensité,u chaque retourmensuel
desmêmesmanifestations.Partout, te commercesexuelest
alors sévèrementinterdit. Citezles Maoris, si un homme
toucheune femmedans cette situation, it devienttabou,et le
tabou est encore renforcés'ii a eu des rapports avecelle ou
s'il a mangédes alimentscuits par elle. Un Australien,trou-
vant que sa femme,en périodede menstrues,a couchésursa
couverture,la tue et meurt tui.memode terreur La femme
est obligéedovivre à part. Elle ne peut partager le repasde
personneet personnene peut mangerdes aliments qu'elle a
touches'.Les hommesne doiventmême pus mettre le pied
sur tes tracesque les femmesont pu laisser sur le chemin,et,
inversement,ettesdoiventfuir lesendroits fréquentespar les
hommes.Pour prévenir un contact accidentel, ellesdoivent
porter ua signe visible qui avertisse de leur état". Pour
atteindreplus sûrement ce résultat, elles sont contraintesa
une réclusiondo plusieursjours. Parfois, elles sont tenues
d'habiter en dehors du village, dans des cabanesséparées,
au risque d'être surprisespar tes ennemisi. D'aprèsle Zend-
avesta,ellesdoiventse tenir dans un lieu séparé et foin de
tout ce qui est eau et feu. afinque la vertu redoutéequi est
en ellesne se communiqueà rien de ce qui sert à t'atitnenta-
tion.Cheztes THnkits,pour s'isolerdu soleil, ellessont obli-
géesde se noircirla figure".L'usage s'est maintenu dans la
législationmosaïque.Pendant sept jours, ]a Juive ne devait
avoirde contactavec personne, et aucun des objetsqu'elle
avaittouchésno pouvaitêtre touché par d'autres Quant aux
rapportssexuels, ils étaient sévèrementinterdits; la peine
était celle du retranchement*.De là tant de préjugésqui
règnent encore dans nos campagnes sur la dangereuse
influenceque la femmeexercealorsautour d'elle.

Crawtey.<)tM< in J-
f«&etM, )8' p.
~) Ct'ttwtcy.
p.tït.
t3) )')<jfi!. Op. <-< t. (<. t70.
(t) LM titits M'nt innumbmbte~. Y. )')<)!?. toc. <-<<.
(5)Pluss.Op.Cf~là.Ht.
(6)KohhT. MeftecA/fd.r<-M,cM'. )<.)?.
</<?\Mt~-Mw,
t?)Mvititju'xv,t9et suiv.
(<) Lévitique, <)t, 18.
44 1891
t/ANKJ~RSOCtOLOCtOUK.

Les pratiques sont les mêmes au moment de l'accouche-


ment. C))Mles Esquimaux, la femmeen couches doit rester
entorméedaus lu maison, quelquefois pendant deux mois. A
sa première sortie, elle doit mettre des vêtements qu'elle n*a
jamais portes. Ct<exles Uroëntandais, elle no doit pas manger
a l'air libre et nul ne doit se servir de ta vaisselle qu'etto a
employée. Chez tes Chippeouais. le foyer sur lequel elle fait
cuire ses aliments no doitêtre ulilisé par personne. Des jeunes
gens, ayant par mégardo mangé d'un piat qui avait été pré-
paré sur le feu d'une accouchée, erraient il travers champs
en se tameutant des douteurs qu'ils ressentaient déjà. Dans
un grand nombre de tribus, ta femme est exilée dans des
cabanes éloignées où une ou deux femmes vont ta servir
Chez les Damaras, t'homme ne peut même pas voir sa femme
en couches~. D'après le Lévitique,ta séquestration dela more
durait cluarauto ou quatre-vingts jours, selon te sexe do l'en-
tant. Pendant les premiers sept jours, la réclusion étuit aussi
complète qu'en temps de menstrues -l.
Un sentiment d'horreur religieuse qui peut atteindre un tel
degré d'intensité, que tant de circonstances réveillent, qui
reuait réguHet'ement chaque mois pendant une semaine au
moins, ne pouvait pas manquer d'étendre son influence au
delà des périodes où il avait primitivement pris naissance et
d'aflecter tout te coursde ta vie. Unêtre qu'on éloigne ou dont
on s'éloigne pondant des semaines, des mois ou des années,
selon les cas, garde quelque chose du caractère qui l'isole,
même en dehors de ces époques spéciales. Et en effet, dans
ces sociétés, la séparation des sexesn'est pas seulement inter-
mittente, elle est devenue chronique. Chaque partie de la
population vit à part de l'autre.
C'est tout d'abord un usage très répandu que les hommes
et les femmes ue doivent pas manger à la même table, ut
même en présence l'un de l'autre. Chaque sexe prend ses
repas dans un endroit spécial. Le fait, pour une femme, de
pénétrer dans ta partie de ta maison qui est réservéeau repas
des hommes, est parfois puni de mort La nourriture des
uns n'est même pas celle des autres. Chez les Kuraai, par

V.dusf<tit< tn'ii nutubfcuxdans )'toss,Op.c<< If,t56et suiv.


(: Crawtt'y,p. Mt.
XM,1 et suiv.
t~ L);vitit)tM',
(~ Cmwtey, M8.
H. DUH)())f!tM. LA t'ROHtNTtON )tE t'tNCESTE 46

exemple, les garçons doivent ne manger que des animaux


mûtes, les filles que des (émettes'. Les occupations sont
rigoureusement distinctes; tout ce qui est fonction de lu
femme est interdit à l'homme, et réciproquement. Ainsi, dans
certaines tribus du Nicaragua, tout ce qui concerne le marche
est affaire de femmes; uus~i un homme ne peut-il pénétrer
dans un mareh6 sans risquer d'être battu'. Inversement, la
femme ne peut toucher uux vaches, aux canots, etc. H y a
également deux vies religieuses, parattetesen quelque sorte.
Citez tes Ateoutiens, il y a une danse nocturne célébrée p!)r tes
femmes, d'où les hommes sont exclus, et réciproquement. Aux
lies ttervey, les sexes ne se meteut jamais dans tes danses'.
Ce qui démontre mieux encore cette dualité de ta vie reli-
gieuse, c'est cette duatite des totems dont ))ousavons eu déjà
l'occasion de mentionner l'existence. Car le totem, en même
temps qu'il est t'ancetre, est aussi le dieu protecteur du
groupe. C'est le centre du cutte primitif; dire que chaque
sexe a son totem spécial, c'est donc dire que chacun a son
culte. A d'autres égards encore, ce même fait démontre com-
bien est alors profonde la séparation des deux sexes. On sait
on ettot que le clan s'identifie avec son totem; chaque indi-
vidu se croit fait de la même substance que t'être totémique
qu'il vénère. Là donc où il existe des totems sexuels, les sexes
se considèrent comme faits de deux substances difîft'entes et
comme issus de deux origines distinctes. C'est même une tra-
dition assez géneraio que les deux totems en présence sont
rivaux et même ennemis. Cette hostilité ne symbotise-t-ctte
pas l'espèce d'antagonisme qui existe entre les deux parties
de ta population ?
Ce n'est pas seulement dans les occasions solennelles
qu'hommes et femmes sont tenus de s'éviter; il arrive que,

(i) CMwh-y.<~tt-t Mt.t32.


<) MM..2~7.
(3)7tM..S26.
que h vie tt'))K"s)' ttt'vint ch')M'c~~ftttic)-
(t) A\'fe h' ton))! il )n<;su)'<'
)em<'n)n)«M'M)in< cette <hm))Mabnutit & <'<n~ottat <;Mt'la fcHttttt!se
tt~uvtt<<) grande partie cxctup <)ela )t'ti)!)"t<.Mt' <'ctt)'cxctusion n'tt
pas dû t~tn'le faitt)t'i)))itif.putsqm' nous Vt'yun:!que pritottivetucot tu
h'ttttU)'mune vie n')tH"'usec))p. Si )'«n n'))mr<)M~' qu'' <'<<
<-u)h'.pour s<-
dMrobft'aux regardsdes hutnttK' s'fnt-ctupjmitt)atnt'<')h't)h'ut du tuyitKirp,
on en vient il < (k'mmndprsi co ne serait p<H!)'«)it(i'"i 't'*)! tuyères
Matinitts, fmottM'ott en ohiM'n't'dans un grand numtx'c de j'ay! Nous
nous contcntunsde pM"frlu question.
4t! L'ASSÉH <X97
SOCtOMCtQUE.
même dans les circonstancesles plus ordinairesde la vie
journalière, le moindrecontactest sévèrementprohibé.Chez
les Samoyèdes,tes Ostiaks,tes hommesdoivents'abstenirde
toucher ti un objet quelconquedont une femmes'est servie
quiconquea enfreint cettedéfensepar mégardedoit se puri.
fier par une fumigation.Aiiieurs, je seul fait d'entrer dans
une hutte de femme entraîne la dégradationA la tribu
Wiraijuri. il estdéfenduaux garçonsde joueravecles flUes
Citezles Indiensde la Californie,en Métanésie,à ia Nouvelle-
Calédonie. en Corée,etc., frères et sœurs, à partir de la
puberté, ne doiventplus causerensemble.A Tonga,un chef
témoigneà sa sœuratnéete ptus grand respectet nopénètre
jamais dans sa tente. A Ceylan,citezles Todas,un père ne
doit même ptus voir sa filledès qu'ciie est pubère. Chezles
Lethasde Burma,garçonset filles,quandils se rencontrent,
détournentleurs regards pour ne pas se voir.Dans tes ites
Tenimber, il est défendua un jeune hommede toucher la
main ou la tête d'une jeune fille, et à celle-cido toucherla
cheveluredu première
Cesdeux existencessont tellementdistinctesque chaque
sexe finit dans certains cas par se faireune languespéciale.
Chezles Cuaycurus,les femmesont desmotset des tours de
phrase qui leur appartiennenten propreet qui ne peuvent
pas être employéspar les hommes.Demêmeà Surinam. En
Micronésie,beaucoupde mots sont tabou pour les hommes
quand ils conversentavecdes femmes.Au Japon,il y a deux
sortes d'alphabet, un pour chaque sexeLes Caraïbesont
deux vocabulairesdistincts Ousignaledes faits semblables
à Madagascar.
Commeconséquenceet en quelque sorte commeconsé-
cration de toutesces pratiques,il arrive, dans un très grand
nombre de tribus, que chaque sexea son habitat spécial.
Aux tics Mortlock,par exemple,il y a danschaqueclan une
grande maisonoùle chef passela nuit avec tousles habitants
mates.Cettemaisonest entouréede petiteshuttes où.vivent

ïtu.
(t)Cntwtt'y,
(~ /tM.,t2t.
(3)/&M..~ti.
(t) /M< ~M.
(St Y. Lucien Athuo. /7« p~t'/c;- (~ A<w)MtM </M~a~' f/M ~MM~
<~a'M <<!/<tM~«e<'a't)!tf. t'ari)!, ))!'?.
M. MttKtttitH. LA )'M)M)Bt'nOt) t))i jL'tMCESTE 47

les femmeset les jeunes filles du clan. Les premièresy


habitentavectours maris;nt«Mc<'M~<'tM<f(<<')(M
e~Ht'<<'(tn~<
Lesdeuxsexesd'unmêmectan soutdoncstrictementséparas.
La même organisationse retrouve aux ttes Yiti. aux Mes
l'ataos', aux ticsde l'Amirauté,chez certains Indiensde la
Californie,aux lies Satomon,aux tics Marquises,etc. Dans
ces dernières,toutefemmequi pénètre dans le local réservé
ouxhommesest puniede mort*.

A la lumièredeces faits, h) questionde t'exogamiechange


d'aspect.Hestévidenten effetque tesjjniBfdiciions-SBXuatles
ne dinèreut pas ou natnre.des-interdictions rituelles que
nousvenons~ierapporter,et doivents'expliquerde la même
manière.Les premièresne sont qu'unevariétédes secondes.
La cause qui empêchehommeset femmesd'un mômeclan
decontracterdes relationsconjugalesest aussi celle qui tes
oblige à réduire au minimum possible leurs relationsde
toutessortes.Par conséquent,nous ne la trouveronspas dans
telle ou telle propriétédes rapports matrimoniaux; seule,
quelque vertu occulte, attribuée à l'organismefémininen
générât,peutavoirdéterminécette miseen quarantaineréci-
proque.
Unpremierfait est certain c'est que tout ce systèmede
prohibitionsdoit tenir etroitement'aTfxidéesque le primitif
se fait de la menstruationet du sang menstruel.Cartousces
tabouscommencentseulementà l'époque de la puberté; et
c'est lorsqueles premièresmanifestationssanglantesappa-
raissentqu'ilsatteignentù leur maximumde rigueur. Nous
savonsmémoque, danscertainestribus, ils sont levésaprès
la ménopause Lerenforcementqu'ils subissentlors de l'ac-
couchementn'a rien qui contredisecette proposition car la
délivrance,elleaussi, neva pas sans une émissionsanglante.
Les textes mêmes du LéWtiquequi se rapportent à cette
matièreindiquentque c'est dans la nature de ce liquideque

(t)HcUwtt).). )'. ~)8.2tt.


~MtM/<<tcAefatM)<«,
~)Y.CmwK'y.
M).
(:t)CMwtt'y.
48 L'AKKÉE MCKH~UtOUE. tM?

se trouve ta raison de l'isolement prescrit'. De mémo, nous


savons que, dons un certain nombre de cas. ce sang est l'objet
de tabous particutierement graves. Les hommes qui le voient
perdent tours forces ou deviennent incapables de combattre'.
Comment a-t-on pu lui attribuer un pareil pouvoir?`!
Nous ne nous arrêterons pas a discuter l'hypothèse d'après
laquelle il inspirerait un tel eioignemont à cause de son
impureté. Sans doute, au bout d'un certain temps, une (ois
que le sens origine) de ces pratiques fut perdu. c'est ainsi
qu'un se les expliqua mais ce n'est certainement pas sous
t'innuence de simples préoccupations hygiéniques qu'elles se
constituèrent. Outre que, par elles-mêmes, les propriétés
mnterioites de ce sang n'ont rien d'exceptionnellement dan-
gereux, les nègres de l'Australie ou de )'Amerique ne sont
pasteitementdeticats qu'un pareil contact puisse teurpara!tre
aussi into)<irab!e,.a)Antequand il est très indirect. Ce n'est
pas parce que ce sang leur répugne qu'ils refusent de poser le
pied ta où uue femme a mis le sien, de manger en sa présence
ou do vivre sous le même toit. Surtout, une telle cause ue sau-
rait rendre compte des peines sevcres qu'encourent souvent
les violateurs de ces interdictions. On ne condamne pas à
mort un individu parce qu'il s'est exposé il une maladie pat'
un contact malpropre.
Mais ce qui doit faire dennitivement écarter cotte explica-
tiou, c'est que toute espèce de sang est l'objet de sentiments
analogues. Tout sang est redouté et toutesorte da.tahou&soat
institues pouFen'prevcnir le contact. Certains Esthoniens se
refusent à toucher du sang et ils en donnent comme raison
qu'i) contient un principe surnaturel, t'amo du vivant, qui
pénétrerait en eux s'iis s'en approchaient et qui pourrait y
causer toute sorte de désordres. Pour le même motif, quand
une goutte de sang tombe sur la terre, cette force mystérieuse
qui est en lui se communique au sol contamine et en fait un
endroit tabou, c'est-à-dire inabordable. Aussi, toutes les fois
que l'Australien verse du sang humain, toute sorte de précau-
tions sont prises pour qu'il ne s'écoule pas par terre Alors
que cet usage a disparu pour ce qui concernele commun des
(t) Silu f'.ttttoe<'nfuot''
un ))tA)f,'')t<*
!nt !<"ui))M't'ottttnt'uu tOMpi
<)eMiimoi! et t't)'*tk't<n'ur''nt tn'ntc-tn)i<
))'*n<)ant juMM pMtt''~tt' pufiMe
<)eK«M Mnt!. tL'h' X)), t.) <'t
? Fmzff.~oMMBet~/f,tt, 338.Ctttwicy, t2t, 2t8.Cf.f. ~M<tV,StS.
(S)fJeMeM Be<~<,), f. tM.
E.Dt'HKNKtH.
LAPKOtnBtTtOS
UH!tNC68TK 49
hommes, it se maintient encore quand il s'agit d'un roi ou
d'un chef. C'est uu principe que le sang royat ne doit pas être
répandu sur le sot 1. Certains peuples usent des mêmes pré-
cautions quand ii s'agit de simples animaux. La bête est
otoufïéoou assomméeafin que le sang ne s'écoule pus.
Mais ce qui est surtout défendu, c'est d'employer te sang
comme atiment. Précisément parce (lue dans ce cas le contact
est plus intime, il est aussi plus sévèrement prohibe. Chez-
certains Peaux-Hougesde l'Amérique du Nord, c'est une abomi
nation que de manger le sang des animaux: on passe le gibier
a la itammo pour que le sang eu soit détruit. Aittours, on le
recueittodansta peau même de ta bête quet'en enseveliteusuite.
Chez les Juifs, )a même interdiction est sanctionnée par la
peine terrible du retranchement, et te texte en donne comme
raison que le sang contient le principe vital La même
croyance existait chex les Homains chez les Arabes etc.
Il est probable que ta défense de boire du vin, que l'on
observe dans un certain nombre do sociétés, a pour origine la
ressemblance extérieure du vin et du sang. Le vin est regardé
comme le sang du raisin. Très souvent, dans les sacrifices, le
vin parait être employé comme un substitut du sang. Aussi
était-il défenduau Ftamen Diatis de passer sous une vigne,
parce que ta proximité du principe qui était censé y résider
pouvait constituer un danger pour une aussi précieuse exis-
tence. Pour la môme raison, il lui était interdit de toucher et
même do nommer de h) viande crue'.1.
Enfin, toutes les fuis que le sang d'un membre du clan est
versé, il en résulte un véritable danger public car uue force
redoutable est ainsi libérée qui menace le voisinage. C'est
pourquoi divers procédés sout employés pour )a contenir ou
la désarmer. Ces expressionssi souvent employées < Lesang
appelle le sang. Le sang de ta victime crie vengeance. »
doivent être prises dans leur sens tittéra). Parce que le prin-
cipe qui est dans chaque goutte de sang répandu tend de lui-
même à produire dans l'entourage immédiat des effets des-

th Mf/M Bot~A. j). )?!''-) snh'.


f~)t~viti')a<xv)).te.)t. ))<'ut<'runu«)t't). :M,:Ki.
V.7f '-t «t. C7.
(:))Sftvin! ~t'M..
(t) V.WcMtxHUt't).Mrn~</m.t~t~cAfM HfMcn/KW'M. ~)7.
(5)rtuttn~a".CtMM<. ««M..))~; Auht.t!t-)).X. tH'-t t!).t/ttypotM~'
est de Friiter;y. CoMeo NeM~/t. ), p. t8t et suh'.
H. Domxtim. – AttoA' wciu). i!9T. t
60 L'AKNËE SOCIOLOGIQUE,
189i

tructifs, le seul moyen de tes éviter est d'aller chercher au


dehors une victime expiatoire qui les supporte. En d<'timtive,
veuger le sang, c'est anticiper les violences que le sang
engendrerait de iui-mème si un le laissait taire, et it est
nécessaire do tes anticiper pour pouvoir les diriger avec dis-
cernement et les canaliser.
On commence à entrevoir les origines de t'exogumie.J~-
saugest tabou d'une manière gencruh)et il taboue tout ce qui
entre en rapports avec lui. 11repousse le contact et lait te
vide, dans un rayon ptus ou moins étendu, autour des points
où il apparaît. Or ta femme est, d'une manière chronique, le
théâtre de manifestations sanglantes. Les sentiments que le
sang éveille se reportent donc sur elle; nous savons en ellet
avec quelle facilite extraordinaire la nature du tabou se
propage. La femme est donc, elle aussi, et d'une Manière
également chronique, tabou pour les autres membres du
clan. Une inquiétude plus ou moins consciente, une cer-
taine crainte religieuse ne peut pas n'être pas présente a
toutes les relations que ses compagnons peuvent avoir avec
elle, et c'est pourquoi elles sont réduites au minimum, Mais
celles qui ont un caractère sexuel sont encore plus fortement
exclues que les autres. D'abord, parce qu'elles sont plus
intimes, elles sont aussi plus incompatibles avec l'espèce de
répulsion que les deux sexes ont t'uu pour l'autre la barrière
qui les sépare ne leur permet pas de s'unir aussi étroitement.
Puis, l'organe qu'elles intéressent immédiatement se trouve
justement être le foyer de ces manifestations redoutées. tt est
donc naturel que les sentiments d utoignement que la femme
inspire atteignent sur ce point particulier leur pins grande
intensité. Voita pourquoi, de toutes les parties de l'organisme
féminin. eette-tà est le plus sévèrement soustraite à tout
commerce De là viennent l'exogamie e). les peines graves
qui la sanctionnent. Quiconque viole cette toi se trouve dans
le même état que le meurtrier. !t est entré en contact avec le
sang et les vertus redoutables du sang sont passées sur lui
il est devenu un danger et pour tui-meme et pour les antres.
Il a viole un tabou.

<t) K<* HicxMixinM


<)')tit-t'fp!is )«pudeurM')tt))vc
<t<* auxparUM MtmcUe~ Ï
On&<)ûft'!ivoitct'trfs Mt ))uurftnp~hfr k'st'tHay's<hm)!WM f~t s'en
d'att''indn'
<)<'gttj.tt')tt rcutom-a~f.Lf toitt-f.<t
: !f)u\t'nt
un «Myo))d'tntM'-
ceptMr une Mtiun tuHK")' L'u''foi'.)« pmti'jUH cOcxe ocmit
nMtstttucc.
maintenueon s'' tKtnstorntant. NouslieMM)t)<- <)'xiUfHM t'hy-
<ju't')nc(tM
qui
j,f)UK'H'. t~i.tc&v~ritit')'.
K. UUnKOKtM. LA )'MO)))BmON M t.'tKCMTK B~

ci Ina var.fnu
Maissi les vertus n,nrrS..wesn oil..tl.n.l.nn r.1:v
moques attribuées au sang expliquent
l'exogamie, d'où viennent-elles ettes mêmes?Qu'est-ce qui a
pu déterminer tes sociétt''sprimitives à prêter au liquide san-
guin de si étranges propriétés' – La réponse cette question
se trouve dans le principe même sur lequel repose tout le
système religieux dont l'exogamie dépend, a savoir le toté-
misme.
Le totem, avons-nous dit, est l'ancêtre du ctan et cet
ancêtre n'est pas une espèce animate ou végétale, mais tel
individu en particulier. tel loup, tel corbeau déterminé'. Pat-
conséquent, tous tes membres du chu), étant dérives de cet
être unique, sont faits de la même substance que lui. Cette
identité substantielle est même entendue dans un sons beau-
coup plus littéral que nous ne pourrions imaginer. En enet,
pour le sauvage, les fragments qui peuvent se détacher d'un
organisme ne laissent pas d'en faire partie, maigre cette sépa-
ration matérietto. Grâce etune action u distance dont la réalité
n'est pas mise en doute, un membre coupé continue, croit-on,
a vivre de la vie du corps auquel il appartenait. Tout ce qui
atteint l'un retentit dans l'autre. C'est que ln substance vi-
vante, tout en se divisatit, garde sonunUé. Elle est tout entière
en chacune do ses parties, puisqu'çn agissant sur la partie on
produit tes mêmesenets que si l'on avait agi sur le tout. Toutes
les forces vitales d'un homme se retrouvent dans chaque par-
celle de son corps, puisque t'enchi'ntcur qui en tient une (les
cheveux, par exemple, ou les ongles) et qui ta détruit peut,
pense-t-on, déterminer la mort c'est le principe de la magie
sympathique. H en est de même de chaque individu par rap-
port à t'être totémique. Celui-ci n'a pu donner naissance à sa
postérité qu'en se fragmentant, mais il est tout entier dans
chacun de ses fragmenta et il reste identique dans toutes ses
divisions et subdivisions à t'innni. C'est donc à ta lettre que
les membresdu clan se considèrent comme formant une seule
chair, une seu)e viande un seul sang', et cette chair est
celle de t'être mythique d'où ils sont tous descendus. Ces con-

ft) Il faut c'ncfft'tM't<!U'')''t'<)<onf"n'h'<' reipf'L'f tminmtt- nu \'cgu(<t)'


)t taquctteest ccuiiv<ip))'t)-tctUt' i'Mr<'t<tui')Mv.et cft <tr)')ai-)tt(-)n< C"
demK't',c'e~tt'Mct'tre. t 'tfrc tuythi'ju' t)'")'t
! !f)t)t
sorf~H);;foiset les
tnftxhres<)uelnn('t/tc~)U)it)'Mtmu)t'~phoUM'))' t'Mpf't'ctott')nii)t!<
C't.'titdoncun mais~uicottticntuHlui,en pui~sanc' fcHfciiptee.
in'tivittu.
etM)outt'etouttoélan.
(i) SidtM'y Hat-Uan't.Me tf~H~ of FeMOM. tt, ft). xx et xm.Cf.
Smith,~t'MAtpaK<M<!n'MjirC M Jt'W~atx!, p. tUt.
M t'AKSÈË iM~
SOaOMGtQUH.
ne sont pas
ceptions, si étranges qu'elles nous paraissent,
d'ailleurs sans fondement objectif; car elles ne font qu'ex-
est
primer, sous une tonne materieUo, t'unité collective qui
et compacte où il n'existe
propre au c!nn. Masse homo~ne
vit
pas, pour ainsi dire, de parties dittérenciees, où chacun
commf tous, ressemble à tous, un tel groupe se représente il
lui-même cette tuibte individuatiop. dont !t a contusément
conscience, en imaginant que ses membres sont des incarna-
tions à peine ditMrentes d'un seul et même principe, des
âme en plusieurs
aspects divers d'une même réalité, une même
corps.
Une pratique, eu particulier, démontre avec évidence 4'hn-
cette cansubstantiahté. et,
portnnce qui est alors attribuée a
en même temps, eHe.va nous {aire voir ce qu'est cette com-
mune substance. L'unie physiologique du clan est, nous
l'avons dit, loin d'être absolue c'est une société où t'pn peut
entrer autrement que par droit de naissance. Or, la formante
naturalisé dans te clan
par laquelle un étranger est adopté et
consiste à introduire dans ies veines du néophyte quelques
les
gouttes du sang (atni'.iai c'est ce qu'on appette, depuis l,
travaux de Smith, to~oo~ffWtHf, t'atHaneo san~ante'.
C'est donc que !'on ne peut appartenir auc)an si~'on n'est fait
d'une cet-taiue matière, la même pour tous d'un autre côté,
à fonder cette identité
puisque la communauté du sans sunit
de nature, c'est donc que le sang contient éminemmentte prin-
et de chacun de ses
cipe commun qui est fume du groupe
membres. Rien d'uitkars n'est plus logique que cette con-
le dans
ception. Car les {onctions capitales que sang remplit
vie
Forganisme le designaien.tpour un tel rôle. La finit quand
il s'écoule; c'est donc qu'il en est le véhicule. Comme dit la
Par
Bible, le sang, c'est la vie, c'est t'ame de la chair
suite, c'est aussi par son intermédiaire quêta vie de l'ancêtre
s'est propagée et dispersée it travers ses descondarntsy.
AinsiJ~M4eté<H~ue..(iSt.imnMuentjtttc;an; il est incarné
d.nR <.hnq.M~djivtdujBtc'est dans le sanx qu'it réside. H est
tJç.i-
lui-même le sang. Mais, en'même temps qu'un ancêtre ~est
un dieu protecteur né du groupe. il est l'objet d'un véritable
culte il est le centre de la religion propre au clan. C'est de
lui que dépendent les destinées tant des particuliers que de la

p. ~0 et suiv.
0) Y.rAfM'9'ox of</«S<'Mt«<-<.
tit L<?vi<ttju'
xvu.it.
E. OUHKXEtM. LA PKomBtTMK DE L'tNCKSTt! ?

f.l. 1 IS.A.
cottectivitc'. Par conséquent, 2!il y.Iim.
a un dieu win..n ..hnrrnn
dans chaque
organisme individuel (car H est tout entier dans chacun;, et
c'est dans le sang que ce dieu réside; d'où it suit que le sang
est chosedivine. Quand il s'écoute, c'est te dieu qui se répand.
D'un autre eôtS,noussavons que le tabou est la marquemise
suc tout ce qui est divin it est donc naturel que le sang et ce
qui !econcernesoient égalementtabous, c'est-à-dire retirés du
commercevulgaire et de ta circulation. C'est un principe dans
toutes les sociétés totémiques que nul ne doit manger d'un
animal ou d'une plante qui appartient à tu même espèce que
le totem on ne doit pas même y fouetter parfois il est
défendu d'en prononcer te nom'. Puisque te sang soutient
avec t<' totem des relations tout aussi étroites, it n'est pas
surprenant qu'il soit l'objet des mêmes prohibitions. Voilà
pourquoi il est défendu d'en manger, d'y toucher, pourquoi
le sol ensanglanté devient tabou. Le respect religieux qu'il
inspire proscrit toute idée de contact, et, puisque ta femme
passe pour ainsi dire une partie de sa vie dans le sang, ce
mémo sentiment remonte jusqu'à elle, la marque de son
empreinte et t'isole.
Une raison accessoirea. probablementcontribue à renforcer
encore ce caractère religieux de la femme et l'isolementqui en
résultait. Dansles clans primitifs, ta Mtiationétait exclusive-
ment utérine. C'est le totem de ta mère que recevaient les
enfants. C'est donc par les femmes et par elles seules que se
propageait ce sang dout ta commune possession faisait l'unité
du groupe. A cet égard, ta situation de l'homme était à pou
près cette quele droit romain fit plus tard à ia femme le clan
dont it faisait partie s'arrêtait à lui il était /!M<xM~OMM)!
/<!?<<<?<!«?. Donc,puisque ie sexe féminin servait seul à per-
pétuer le totem, le sang de ta femme devait sembler plus
étroitement en rapport avec la substance divine que celui de
l'homme par conséquent, il est vraisemblable qu'il acquit
aussi une valeur religieuse ptus haute, qui se communiqua
naturellement à la femme elle-même et la mit complètement
à part.
On peut maintenant s'expliquer d'où vient que les interdic-
tions sexuelless'appliquent exclusivement aux membres d'un

() Voit-surle <'o)tetntOttfquft'- fivrc<)<!Fraia't-.yo~m~m.tM)i<u'


hou));,ttMtf.
ro<<'MM<M,H et t7.
S4 L'ANNUËSOCKHOGt~UE.~SM

même clan. Le totem, en cttet, n'est sacré que pour ses fidèles;
ceux-ta seuls sout tenus de le respecter qui croient en des-
cendre et portent ses insignes. Mais un totem étranger n'a
rien do divin. Un homme qui appartient au clan du Lièvre
doit s'abstenir de manger de lu viande de lièvre et se tenir &
distance de tout ce qui rappelle même la forme extérieure de
cet animât mais il u'a aucune obligation vis-à-vis des ani-
maux qui sont adorés par tes ctans voisins. Il ne reconnaît
pas leur divinité, parceia seul qu'il n'y voit pasdesancétres.
U n'a rien à en craindre, de même qu'ii n'a rien à en attendre.
JI est hors (te leur sphère d'action. Si donc l'exogamie lient,
comme uous avons essayé de le prouver, aux croyances qui
sont la hase du totémisme, il est naturel qu'elle aussi se soit
renfermée dans l'intérieur du clan.
Sans doute, avec le temps, surtout quand les raisons pre-
mières de ces prohibitions cesseront d'être senties par les
consciences, le sentitn"nt qu inspiraient spécialement les
femmes du ctau se généralisa en partie et s'étendit, dans une
certaine mesure, jusqu'aux étrangères. Les manifestations
menstruelles des unes et des autres sont trop sensiblement
les mêmes pour que les unes apparaissent comme indifférentes
et inoneusives quand les autres sont à ce point redoutées.
C'est pourquoi plusieurs des interdictions qui concernent tes
premières se communiquèrent aux secondes, et la femme
en gênerai, quel que fut son ctan, devint.l'objet do certains
tabous. Cette extension se produisit d'autant plus facilement
que ces consciences rudimentaires sont un terrain de prédi-
lection pour tous les phénomènes de transfert psychique les
états émotionnels passent instantanément d'un objet à un
autre, pourvu qu'il y ait entre le premier et le second' le
moindre rapport de ressemblance ou même de voisinage.
Mais, précisément parce que cette assimilation était due à un
simple rayonnement secondaire des croyances qui étaient à
la racine de l'exogamie, elle ne fut que partielle. La sépara-
tion des sexes ne fut complètequ'entre hommes et femmes du
même ctau notamment, ce tut seulement dans ce cas qu'elle
atta jusqu'à l'interdiction de tout commercesexuel.
On objectera peut-être que généralement te sang menstruel
passe pour être plutôt en rapports avec des puissances mal-
faisantes qu'avec des divinités protectrices; que le primitif,
en s'écartant de la femme, se donne à tui-meme comme raison
qu'elle est un foyer d'impureté, loin qu'il en fasse un être
H. CUKKHHtM. t.A t'HOtttBmON DE t.'mCKSTH 85

1- -1-- A 1- t_&ilu- 1_- _ve__


sacre. Maisil faut se garder de prendre In lettre les explica-
tions populttires que les hommes imaginent pour se rendre
compte des usages qu'ils suivent, mais dont tes causes reoDes
leur échappent. Onsuit commentces titeoriessont construites
on leur demande, non d'être adéquates et objectives, muis de
justifier ia pratique. Or des raisons très contraires peuvent éga-
lemeut donner un sens ri un même système do mouvements.
Quand le primitit, pour pouvoir comprendre le culte qu'il
voue à son totem, en foit l'ancêtre do son clan, nul Hosonge
a admettre la réalité de cette généalogie. U n'est pas plus digne
de crédit quand il dote la femme de tello ou telle vertu pour
s'expliquer l'isolement où il ta tient. En l'espèce, il avait le
choix entre deux interprétations Il fallait voir dans la femme
ou une magiciennedangereuse ou une prêtresse née. La situa-
tion inférieure qu'elle occupait dans )a vie publique ne per-
mettait guère qu'on s'arrêtât u la seconde hypothèse; la pre-
mière s'imposa donc Encore y a il nombre de peuples qui,
quand on leur demande quelles sont les origines de ces pro-
hibitions, se contentent de répondre qu'ils n'en savent rien,
mais que c'est une tradition respectée de tout temps. Du reste,
tout ce qui se rattache it la religion totemique subit, par t'eCet
du temps, une déchéance analogue. Quand on no sut plus
pourquoi il était défendu de manger de la viande de tel ou
tel animal, on imagina qu'il devait être impur. C'est ainsi
que des êtres dont on fuyait le contact par respect religieux
finirent par apparaître comme immondes, et les rites existants
s'accommodèrenttout aussi bien de la seconde conception que
de la première.
Si donc nous voulons savoir quelle est la cause véritable
des interdictions dont le sang menstruel est l'objet, il nous
faut les observer en elles-mêmes, abstraction faite de toutes
les théories forgées après coup pour en rendre la survivance
intelligible. Or, ainsi considérées, bien loin qu'elles dénotent
je ne sais quel dégotit et quelle répulsion, elles apparaissent
comme absolument indiscernables d'autres pratiques qui
pourtant concernent des êtres manifestement privilégiés et

<t)Cmwtfy.i~ms.~tf' ff qui))f''c'dt'.i) estinoti)'*'h'di~'oter['<-)[.


~Hctti'tn))n))n))ieup)t)'Untw)''))Mi-tt'<')M< <)a)Ht'slui, <'Mpr<)hit)i(i"M
la f.t)h)('S!M'
tmntx'tttpour"))j)'t<)'f't)t[M~'))''r ttc eurotntouttiquct'
f't))it)in<*
Ii)'h')))t)<)t'.
& 1'11011111110, 414!
Laclilloititif
Lm (Mti)tt'!
<)<'la
htf''t)))M)\
f"/IIIII< t?llM.'
)'n III!tnt)MtMftt)mt,
ng~ n"MOftiit
IIltllrullllél,r-
d<!t<*r-
tttinp)'h tttortM ta u«tMi''cmnmeh) faittoutntunquKtnent &cesprohi'
bitioo):.Con'Mtpus0) tant (ju'ftt-M t)m' f<;u))' tabou,nxtis
d~bih' h t e<t
rn tant qu'ellet~ttt source(faneactionm<t({i<jm.
M ).'At<XÉE tMt
SOCMMGtQCE.

vraiment divins. Cette même règle qui défend à la jeune fille,


parvenue &la puberté, de toucher le sol ou de se laisser tou-
cher par les rayons solaires, s'applique identiquement à des
rois, à (tes prêtres vénérés. Le Mikado, au Japon, ue doit pas
fouler le sol avec ses pieds; autrement, il encourrait h) dégra.
dation, tt ne doit pas davantage laisser les rayons solaires
arriver jusqu'à lui, ni exposer sa tête à l'air fibre. L'itéritier
du troue de ttogota, en Cototnhie, doit, à partir de seize ans,
vivre dans une chambre obscure où le soleil ne pénètre pas.
Le prince qui était destiné à devenir un tnca, au Pérou, était
tenu de jeûner pendant un mois sans voir ta lumière. Comme
le Mikado, le souverain pontife des Xapotecs, à Mexico, ne
pouvait entrer en contact ni avec ln terre ni avec la tnmicre
solaire. l,a première défense s'applique élément au roi et à
la reine de Tahiti, et jadis elle s'appliquait au roi de Perse
De même dans toute ta t'utynesie, les chefs et les nobles
doivent, tout comme la femme a l'époque des menstrues,
prendre leurs repas à part, ne se nourrir que d'alimeuts cuits
sur un leu spédai. etc. Or, ces tabous n'ont évidemment pas
pour cause la répulsion que peut inspirer quelque odieuse
impureté on n'est donc pas fondé à attribuer & une telle
origine les tabous similaires dont la femmeest l'objet.
D'ailleurs, le sang menstruel était très souvent employé
comme une utile médication. On s'en servait contre toute
espèce de maladies,maladies de peau, furoncles, gâte.gourme,
fièvre de tait. inHammationdes ~tandes sativaires.etc. mais
c'est surtout contre la tépre qu'il passait pour être efficace.
Strack a bien montré que cette pratique avait été aussi géné-
rale que persistante. On ta retrouve en Arabie aussi bien
qu'en Germanie ou en Italie, et elle était encore très en vogue
pendant te moyeu age~. On employait également le sang qui
s'écoule au moment de la délivrance et l'on cherchait de pré-
férence celui d'une primipare. De même aussi le premier
sang qui apparaissait h la puberté passait pour avoir des ver-
tus curatives tout à fait exceptionnelles, en même temps qu'il
donnait lieu, comme nous t'avons vu, à des tabous parti-
culièrement sévères. C'est donc que, même sans s'en rendre

f))RaMt'MN"</S/<t).Rt-
(~t'ht~Mtt'Wt.).)~.
~:t)Strm-k. ~<-rWM/<!tf<Y//aM&«f/<MfKf!<'A/f<'f/.MMtti')),)8NS.p. )t-M.
Cr.t:rttw).'y.j).!U.
B. MHKMEtM. LA PHOHMITMS DE t-'tKCKSTE 87

compte, ces peuples y voyaient autre chose qu'une source


d'eiltuves Impurs et dévirHisauts.
Quant aux raisons qui tout que le divin a pu donner nais-
sauce à un système d'interdictions de ce genre (que nous
serions tenté d'attribuer à l'aversion plutôt qu'au respect),
elles sont de deux sortes, tt en est de communes à toute l'hu-
manité, d'autres qui sont spéciales aux peuples primitifs.
D'abord, tout ce qui inspire un respect exceptionnel tient le
vulgaire à distance, tout comme les êtres ou les objets dont
le contact est odieux. C'est que dans le respect il entre de
la crainte et t'être respecte lui-même, pour entretenir tes
sentiments qu'il inspire, est obligé de rester d'accord avec.
son caractère et de se tenir a part. En se metant aux autres
êtres, il leur connnuftiquerait sa nature et participerait à la
leur il tomberait donc au niveau commun. Ainsi, quelque
dincrcnce qu'il y ait au regard de la conscience entre ces
deux émotions, le dégoût et la vénération, elles se traduisent
par les mêmes signes extérieurs. Vues du dehors, ou peut
difftcitement tes distinguer. Mais la confusion était surtout
facile dans les sociétés intérieures, à cause de l'extrême am-
biguïté qu'y a la notion du divin. Comme t'a montré Smith,
les dieux sont des forces redoutables et aveugles; elles ne
sont liées par aucun engagement morat suivant tes circons-
tances ou leur simple caprice, elles peuvent être bienfaisantes
ou terribles. On conçoit dès lors qu'on ne les aborde qu'uvec
les plus grandes précautions c'est par des détours qu'on peut
sans danger entrer en relations avec cites. L'abstention est
ta règle, tout comme s'il s'agissait d'êtres abhorres. Or le
tabou n'est pas autre chose que cette abstention organisée et
élevée à la hauteur d'une institution.

Vi1

Telles sont tes origines de l'exogamie.


Ainsi déterminées, elles paraissent d'abord être sans rap-
port avec notre conception actuelle de l'inceste. Il nous
répugne d'admettre qu'un principe de notre morale contem-
poraine, un de ceux qui sont le plus fortement invétérés en
nous, puisse être placé sous la dépendance, même lointaine,
de préjugés absurdes dont l'humanité s'est depuis longtemps
? L'ANKÈE t'M7
SO<:Mt.OC)<)UH.
affranchie.Cependant,en fait, il n'est pas douteux que les
dispositionsdonoscodesrelativesauxmariagesentre parents
ne se rattachent aux pratiquesexogamiquespar une série
continued'intermédiaires,de mêmeque notre organisation
domestiqueactuelle se roUeà ceiledu cian. L'exogamie,en
effet,a évoluacommela famille.Tantquecolle-cise contond
avec le clan, et plus spécialementavecle ciau utérin, c'est
à la parenté utérine que s'appliquentou exclusivementou
priucipaiement les interdictionssexuelles.Quand le clan
paternelfait recounattresesdroits,l'exogamie s'étendjusqu'à
lui. Quandle totémismedisparalt,et aveclui iu parentespé-
ciale auclan, t'exogamiedevient solidairedes nouveauxtypes
do famille qui se constituentet qui reposentsur d'autres
JMses,et commeces famillessont plusrestreintesque n'était
le clan, elle se circonscrit,elle aussi,dans un cerclemoins
étendu le nombredes individusentre lesquelsle mariage
est prohibé diminue.C'estainsi que,par une évolutiongra.
duelle. elleen est arrivéeà t'étatactueloùles mariagesentre
ascendantsetdesccndants,entre frères et sœurs, sont à peu
près les seuls qui soientradicalementinterdits.Mais,s'il en
est ainsi, si notre réglementationde l'incesten'est qu'une
transformationde l'exogamieprimitive,il est impossibleque
les causes déterminantesde celle-ciaientété sans influence
sur ceiic-iM.Ces deux institutions, nées t'une do l'autre,
doiventnécessairementtenir l'une l'autre.
Les raisons mêmesqu'on a donnéespourjustifier notre
réprobationprésente de l'inceste,vontnous aiderà trouver
le lien qui tes unit.
Oa s'accorde généralementaujourd'huipour reconnaltre
que si le droit et les mmurss'opposentaux mariagesentre
parents, ce n'est pas à causedes inconvénients hygiéniques
que peuvent avoir ces unions maisc'est, dit-on, qu'elles
seraient subversivesde l'ordre domestique.Onentend d'or-
dinaire par là que, commela vie de (amitié,à causedes rap-
prochementsdont elle est l'occasion,risque d'éveiller les
désirs sexuelsen mêmetempsqu'elle en facilitela satisfac-
tion, le désordreet la débauchey seraientà t'état endémique
si lé mariageentre prochesétait licite.Onne voit pas qu'on
prête ainsi aux législateursle plus étrangeraisonnement;
car ce serait un singuliermoyen,pourprévenirles unions
irrégutieres entre parents,que de refuserà ces derniersle
droit de s'épouserrégulièrement.Onne combatpas le conçu'
– LAPHOMBmON
E. BUHKMEtM. DHL'MCfSME 69
m eu
binage ea défendant
défendant le marinee c'est ntutAt
mariage c'ext plutôt l'inverse
l'inverae (m'it
qu'il
eût faitu faire. Or,justement,dans presquetoutesles tégisla-
tions,c'estsurtoutle mariagequi estconsidérécommeineon-
ciliubleavecla parenté.Lesimplecommercesexuel,quoique
souventputti.estplusfréquemmentl'objetd'unecertainetoté-
rance notredroit pénail'iguoresi notremorale!e condamne.
D'ailteurs,l'éloignementque nous inspirel'inceste est trop
spontanéet tropirréfléchipourteniradescatcuisaussisavaats.
Lesrepercussionsprobtématiquesquepourrait avoir, sur le
bon ordrede la famille,la suppressionde toute règlerestric-
tive,sont chosescomplexeset lointainesquele vulgaireaper-
çoit maiet qui le touchent faibtemout.Desconsidérations
aussi généralesne sauraient doncavoirdéterminéun senti-
ment aussiuniverselet d'unetelle énergie.Knftn,cette théo-
rie prête a la loi un pouvoirqu'elle n'a pas. La toi ne peut
empêcherles chosesde produire tours conséquencesnatu-
relles; si vraimentlu vie do famille nous inclinait à l'in-
cesto, les défensesdu législateur resforaientimpuissantes.
L'actiondu milieudomestiqueest trop forteet trop continue
pourque le précepteabstraitde la loi puisse en neutraliser
les eiïets.
Cependant,la propositionqui sert de base à cette explica-
tion ne doit pas être rejetée. Elle exprime, quoique d'une
manièreInadéquate,ce sent.imentobscur de !a fouleque, si
l'incesteétait permis,la famillene serait plus la famille,do
mêmeque le mariagene serait plus le mariage.Seulement,
cetétat de l'opialouvientde ce que la viedomestiquenous
semblerepoussernaturellementl'inceste, loin qu'elle passe
pourle stimuler.Sansque nous réfléchissions,sonsque nous
calculionsles effets possiblesdes unions incestueusessur
l'avenirde la familleou de ta race, elles nous sont odieuses,
par cola seul que. nousy trouvons confonduce (lui nous
parait devoirêtre séparé.L'horreur qu'elles nous inspirent
est identiqueà cellequ'éprouvele sauvage&l'idée d'un mé-
langepossibleentre ce qui est tabouet ce qui est profane;et
cettehorreurest fondée.Entreles fonctionsconjugaleset les
fonctionsde parenté, <e«M~x'e~ MMfacfxcH<'n)~K< cotM«-
il
<M~, y a en effetune réelle incompatibilité,et par suite
on ne peut en autoriserla confusionsans ruiner les uneset
les autres.
Tout ce qui concernela vie de famille est dominé par
l'idée de devoir. Nosrapports avec nos frères, nos sœars,
60 t.'A)<NËKSOC)OM)C!0);H.<M7

nos parents, sont étroitemeutrégtéspar ta morale;c'est un


réseau d'obligationsdont nous pouvonsnousacquitteravec
joie si nous sommes sainementconstitués,mais qui ne
laissent pas do s'imposerà nous aveccette imporsonuntité
impérativequi est la caractéristiquede la toi morale.Assu-
rément, la sympathie,les inclinationsparticulièressontloin
d'en être bannies cependant les affectionsdomestiques
ont toujours cette propriété distinctiveque t'amour y est
fortementcoloré de respect. C'est que l'amour, Ici, n'est
pas simplementun mouvementspontané de la sensibilité
privée c'est, en partie, un devoir.t) est exigible,dans la
mesureoù un sentimentpeut t'être: c'est un principede la
moralecommunequ'on n'a pas le droit de ne pas aimer ses
parents. Une nuance de respect se retrouvejusquedans le
commercefraternel. Quoiquefrères et Sfcurssoient égaux
entre eux, ils sentent bien que ce qu'ils éprouventtes uns
pour lesautres ne dépendpas seulement,ni mêmeprincipa-
lement,do leurs quatités individuelles,maistientavanttout
à quelqueinfluencequi les dépasseet qui les domine.C'estla
famillequi exigequ'ils soient unis; c'est elle qu'ils aiment
en s'aimant, qu'ils respectenten se respectant.Présenteà
toutestours relations,elle teur imprimeune marquespéciale
et les élève au-dessusde ce que sont de simplesrapports
indivMuets.Yoi)àaussi pourquoite foyera toujours,aujour-
d'hui commeautrefois,un caractèrereligieux.S'il n'y a plus
d'autels domestiques,ni de divinitésfamiliales,la famille
n'en est pas moins restée tout imprégnéede religiosité!
ette est toujours t'arche sainte a laquelleil est interdit de
toucher, précisémentparce qu'elle est t'écoledu respect et
le respect est le sentiment religieuxpar excellence,
que
Ajoutonsque c'est aussi le nerf de toute disciplinecollec-
tive.
lien est toutautrementdesrotationssexuettes,<eM<M ~MtKMM
<Mconrecons.L'hommeet la femmequi s'unissentcherchent
dans cette union leur plaisir, et ta sociétéqu'ils iorment
dépendexclusivement,au moins en principe,doleurs an!-
nités électives.Ils s'associentparce qu'ils se plaisent,alors
que frèreset sœurs doiventse plaire parcequ'ils sont asso-
ciésau sein de la famille.L'amour,dans ce cas, ne peut être
lui-mêmequ'a conditiond'être spontané.!t excluttouteidée
d'obligationet de règle. C'est le domainede la liberté, où
l'imaginationse meutsansentraves,où l'intérêtdespartieset
E. PUHKUMM. LA PBOtHBnMS CE l'tKCHSf~ M

leur bon plaisir sont presque la loi dominante. Ô)~ là où


cessent l'obligation et ta règle, cesse aussi la morale. ~ussi,
comme toute sphère de l'activité humaine où l'idée de devoir
et de contrainte morale n'est pas sutUsammeut présente est
une voie ouverte au dérèglement. il n'est pas étonnant que
l'attrait mutuel des sexes et ce qui en résulte ait été souvent
présente comme un danger pour ta moralité. 11est vrai qu'il
n'en est pas tout à fait ainsi de cette union réglementée qui
constitue le mariage. Le mariage, en elTet,vient de ce que,
comme le commerce des sexes affecte la famille, oelle-ci,
à son tour, réagit sur lui et lui impose certaines règles,
destinées à le mettre en harmonie avec les intérêts domes-
tiques. Elle lui communique ainsi quelque chose de sa nature
morale. Seulement, cette réglementation atteint les consé-
quences du rapprochement sexuel, non ce rapprochement
iui-meme. Ëite oblige les individus qui se sont uuis il certains
devoirs, elle ne les oblige pas à s'unir. Surtout, tant qu'its ne
sont pas encore légalement et moralementtics, ils sout dans
ta même situation que des amants et ils se traitent comme
tels. Le mariage suppose donc une période préliminaire ait
les sentiments que ies futurs époux se témoignent sont iden-
tiques en nature &ceux qui se manifestent dans les unions
libres, Même l'influence morale de ta famille ne peut guère
se laire sentir que quand le couple conjugal est devenu une
famille proprement dite, c'est-à-dire quand les enfants sont
venus le compléter. Aussi, le mariage a beau être la lorme
lu plus morale de ta société soxuelle, it n'est pas d'une autre
nature que les sociétés de ce genre il met en jeu les mêmes
instincts. Mais alors, si ces deux états tl'esprit s'opposent
entre eux aussi radicalement que te bien et le plaisir, le
devoir et la passion, le sacre et le profane, it est impossible
qu'ils se confondent et s'abtment t'un dans l'autre sans pro-
duire un véritable chaos moral dont ta pensée seule nous est
intolérable. Parce qu'ils se repoussent violemment t'uo l'autre,
nous repoussons aussi avec horreur t'idée qu'ils puissent se
combiner en un innomabto méhmge, où ils perdraient tous
deux leurs qualités distinctives et d'où ils sortiraient égale-
ment méconnaissables. Or, c'est ce qui arriverait si une seule
et même personne pouvait les inspirer ù la fois. La dignité
du commerce qui nous unit a nos proches exclut doue tout
autre lien qui n'aurait pas la même valeur. On ne peut cour-
tiser une personne à qui on doit et qui vous doit une respec-
? t'ANN&B <M?
MCMMGtOUt}.
tueuse affection, sans que ce dernier sentiment se corrompe
ou s'évanouisse de part et d'autre. En un mot, étant </ottM~
MO):idées <«'«t<'<un homme ne peut faire sa femme de sa
\Bœur sans qu'eue cesse d'être sa smur. C'est ce qui nous fuit
reprouver i'inceste.y
Seulement, cette réponse n'est pas une solution, la question
n'est que reculée. ti reste a chercher quelle est l'origine de ces
idées. Comme nous ysomutesitabitués, eiies nous semblent
très naturettes; elles n'ont pourtant rien de logiquement
nécessaire. Assurément, étant donné que notre amour pour
nos femmes nous pf~'a~ <'oH(t'f<<<'t'<! ce point avec celui que
nos sœurs doivent nous inspirer, nous ne saurions admettre
que ces df'ux personnages se confondent en un seul. Mais
le contraste que nous voyons entre ces deux sortes d'auec-
tiomest si peu commandé par leur nature intrinsèque qu'il
y a eu bien des cas où il n'a pas été reconnu. Nous savons
en effet que, chez nombre de peuples, non pas primitifs,
mais parvenus à un lissez haut degré de civilisation, t'inceste
a été permis et môme prescrit c'est dire que ia fusion
des rapports de parente et (tes rapports conjugaux y était
une règle presque obligatoire. Ailleurs, si frères et smurs ne
peuvent pas s'épouser, le mariage entre cousins et cousines
est au contraire recommande les exemptes sont innom-
brables. Pourtant, s'i! y avait une antipathie conjugale, réelle-
ment irréductible, entre coiiateraux du premier de~ré.oUe ne
se transformerait pas en une sorte d'aHinito au degré immé-
diatement suivant. Ue mOne à Athènes, quand la fiite était
héritière, elle était tenue de prendre pour mari son plus
proche parent. Le ievirat, c'est-à-dire l'obligation pour un
beau-frère d'épouser sa beiie-sœur devenue veuvo,la potyau-
drie fraternelle sont des phénomènes du même genre. Car, si
la parenté par alliance n'implique pas la consanguinité, elle
a tous les caractères moraux de !a parenté naturelle; or l'in-
compatibilité dont il s'agit ici est toute morale. Elle devrait
donc se produire dans un cas comme dans t'autro*. Enun,
bien des faits tendent à prouver que, au début des sociétés
humaines, l'inceste n'a pas été défendu. Hien en effet n'auto-

)t) 'v. p)u!ihaut, )).?.


<) thuM)f' <'Mth- )K))\n)n))-ic fmU't'nt-Uc.')'' tfvifa).)<-<
M~s vivent.
t'ttM'ttthh'<)tt))~ tf
i)!it)t) plusjt'mx'<t<)'))«'\'Mt)an ''ontpagom
i'indh (t<!
)<t)))'))'<)'u)'.tt h<)uc))<'il s'unit)' tuuttf'n)Y<)u,("ut antaotc( de la
«t~tnumatttft'c<tu xw=i<t 'Ent'.
6. OOMHMM. LA PftOMtKTtMt BB t.'tXCBSTt! 08

rise à supposer qu'il ait été prohibe avant que chaque peu-
plade se fut divisée en deux ctans primaires au moins; car la
première forme de cette proinbition que nous connaissions, à
savoir l'exogamie,apparaît partout comme corrélative à cette
organisation. Or, cetie'ci n'est certainement pas primitive.
La société a du former une masse compacte et indivise avant
de se scinder en deux }<t'oupesdistincts et certains des
tableaux de nomeneiature dressés par Morgan confirment
cette hypothèse. Mais alors, si tes relations familiales et tes
relations sexuelles ont commence par <!treindistinctes, et si
elles sont retournées tant de fois à cet état d'indistinction, on
n'est pas fondé à croire que, d'elles-mêmes et pour des rai-
sous internes, elles Étaient nécessitées a se différencier. Si
l'opinion les oppose, il faut que quelque cause, étraugëre à
leurs attributs constitutifs, ait déterminé cette manière de
voir.
Et on effet, on no voit pas comment cette différenciation se
serait produite, si !e mariage et ta famille n'avaient été préa-
lablemeut contraints de se constituer dans deux milieux dif-
férents. Supposez que, en règle (;<*n6rafe,les hommes se
soient unis n leurs procites parentes, notre conception du
mariage serait tout autre; car la vie sexuelle ne serait pas
devenue ce qu'elle est. Elle aurait uu caractère moins pas-
sionnel, par cela seul que le goût des individus y jouerait un
moindre rôle. Elle laisserait moins de place aux libres jeux
de l'imagination, aux rêves, aux spontanéités du désir, puis-
que l'avenir matrimonial de chacun serait presque tixe dès sa
naissance. En un mot, par cela seul qu'il se serait élabore au
sein de la famille et que la raison do famille lui eût fait la
loi, le sentiment sexuel se serait tempère et amorti il eut
pris quelque chose de cette impersonnalité imperative qui
caractérise les sentiments domestiques, li en serait devenu un
aspect particulier. Mais, par cela même, il s'eu serait rap-
proche, et, étant a peu près de môme nature, il n'aurait ou
aucun mal à se concilier avec eux. Qu'est-cedonc qui a pu
mettre obstacle à cette assimilation ? Certes, la question ne
se pose pas une fois qu'on suppose l'inceste prohibe car
l'ordre conjugal, étant dès lors excentrique à l'ordre domes-
tique, devait nécessairement se développer dans un sens
divergent. Mais on ne peut évidemment expliquer cette prohi-
bition par des idées qui, manifestement, en dérivent.
Dira t onque, de lui-même,ce penchant se refuse à ces tem-
M ~'ANt<É8S(M:)M.(M)OU)!.t)tM
péraments? Mais ce qui prouve bien qu'il N'y est nullement
réh'actaire, c'est qu'il les a docilement subis toutes les fois
que cela s'est trouvé nécessaire, c'est-à-dire toutes les fois que
l'inceste a été permis et usité. Car certainement, dans tous
ces cas, ce ou sout pas les relations domestiques qui out cédé
et qui se sont mises au ton des relations sexuelles la famille,
ne pouvant s'accommoder d'une discipline aussi retâchée,
n'eût pu se maintenir dans cesconditions, ui, parconsequent,
la société. Ht d'aittcurs d'où viendraient ces résistances)' On a
dit parfois, il est vrai, que l'appétit sexuel fuit instinctive-
ment la famitte parce que )a cohabitation prolongée a
pour euet de t'endormir. Mais c'est oublier que l'accoutu-
mance n'est pas moindre entre époux qu'entre parents Elle
ne devrait donc pas produire ptus d'effet dans un cas que
dans l'autre Et puis qu'aurait pu cette vague veiteité du
désir contre les raisons impérieuses qui poussaient lu famille
à se recruter dans son propre sein'? Car on a trop perdu de
vue les complications et les difficultés iufinies au milieu des-
quelles l'humanité a du se débattre pour avoir prohibé
l'inceste. I! (attut d'abord que les familles s'arrangeassent
pour échanger mutuellement leurs membres. Or des siècles
se passèrent avant que cet échange tût devenu pacifique et
régulier. Que de vendettas, que de sang verse, que de négo-
ciations laborieuses furent pendant longtemps la consé-
quence de ce régime! Mais alors même qu'il fonctionna
sans violence, il eut pour effet de rompre, à chaque généra-
tion. l'unité matériettc et morate de la famille, puisque les
deux sexes, parvenus à ta puberté, étaient obligés de se séparer,
et que i'ua d'eux (ce fut généralement la femme) s'en allait
vivre chez des étrangers. Cettescission périodique mit notam'
ment les sociétés en présence do cette douloureuse alterna-
tive ou refuser à la femme toute partdu patrimoine commun,
et ta laisser par conséquent à la charge et sous la dépendance
de la famille où elle entrait ou, si on lui accordait des droits
plus ou moins étendus, la soumettre à un contrôle laborieux,
a une surveillance compliquée, pour empêcher que tes biens
dont elle avait la jouissance pussent passer dénutUvemeat

)'id<h;
)t; Xo))t.oupt'uoto))!' ù M. SimMtt.'),~fe H't'ftMMM~ox'/te(UMcttt:
du \'uss. 3 MtlUjum ttM)4).
ji!)Uui))'*ur!un )t pu, ttvt'ettutanttt'ojtpan'nrt',fuMtt'nh'
))tthusocon-
)min', n sa~voit-')Ut'h' contact')f tous~'siuitant~stimuletesd<)rs eo
leurutfnmtdesuccastune.
K. nUBKMMM. LA PKOfttBtTtONCE L'tNCESTH C8

aux parents de son mari. La tutelle des tignats, l'obligation


pour ta fille épicièred'épouserson plus proche parent, la
constitution du douaire, t'oxttérédationpure et simple et
sansgarantie)!d'aucunesorte, avecta situation incertainequi
eu résultait pour la femme,telles turent tes combinaisons
diversespar )esquet)eson essityade concilierces nécessités
opposées.Or toutes ces oppositionset tous ces coMHits,tes
hommesse les seraientépargnés,s'ils ne s'étaient pas tait
uueloide chercherleursfemmesen dehorsde leurs parontei).
Ainsi, d'unepart, pour que les rotationssexuettosaient pu
s'opposeraussi radicalementaux relationsdo parenté, it a
fallu qu'elles fussent préalablementrejetées hors de cette
atmosphèremoraleoa vit la {amitié;de l'autre, il n'y avait
rien en elles qui rendit nécessairecette séparation.I) semble
mêmequêta lignedola moindrerésistanceétait dirigée dans
un tuut autre sens. H faut donc bien que cette dissociation
leur ait été imposéepar uneforceextérieureet particulière-
ment puissante.Autrementdit, t'incompatibititémorale au
nom de laquelle nous prohibonsactuellementl'inceste est
eiie-tnemoune conséquencede cetteprohibition,qui par con-
séquentdoit avoir existéd'abordpour une tout autre cause.
Cettecause, c'est l'ensemblede croyanceset de rites d'où
l'exogamieest résultée.
En effet, une fois que les préjugésrelatifs au sang eurent
amenéles hommesa s'interdire touteunion entre parents, le
sentimentsexuel fut bien obligé de chercher en dehors du
ceretefamilial un milieuoù it pot se satisfaire ot c'est ce
qui le fit se différenciertrès tôt des sentimentsde parenté.
Deux sphères différentesfurentdès lors ouvertesà t'activité
et &ta sensibilitéhumaine. L'une, ie clan, c'est-à-dire la
famille,était et restale foyerde la moralité l'autre, lui étant
extérieure, ne prit de caractère moral qu'accessoirement,
dans la mesureoù elle affectaitles intérêts domestiques.Le
clan, c'étaitte centredela viereligieuse,et toutesles relations
du clanavaientquelquechosede religieux par celaseul que
les rapports des sexes durent se contracterau dehors, ils se
trouvèrenten dehorsdu domainereligieuxet furent classés
parmi les chosesprofanes.Par suite, toutel'activité passion-
nette, qui ne pouvaitse développerd'un côté à cause de la
sévoredisciplinequi y régnait,se portade l'autreet s'y donna
librecarrière.Car l'individunose soumetà la contraintecol-
lectiveque quandc'est nécessaire dès que ses appétits natu.
H.Dt)mf)WM.–Ant)t'eM('M.<)H)7. S
<M (.'ANNÉESOCtOhOGtQCK. <S9T
rels trouvent devant eux une pente .s, qu'ils peuventsuivre
librement, ils s'y précipitent. Ainsi, gr&co&l'exogamie,la
sensualité,c'est-a-dirct'ensembledes instinctset des désirs
individuelsqui se rapportent aux relationsdes sexes, fut
affranchiedu joug de la famillequi l'eut contenueet ptus ou
moinsétouffée,et ellese constituaù part.Mais,parcetamême,
elle se trouva en oppositionavecla moralitéfamiliale.Avec
le temps, elle s'enrichit d'idées et de sentimentsnouveaux
ellese compliquaet se spiritualisa.Toutce qui,dans l'ordre
intellectuel ou dans l'ordre émotif, est naturellementimpa-
tient de tout freinet de toute règle, tout ce qui a besoinde
liberté vint se greffersur cette base première;c'estaiusique
les idées relativesu la vie sexuellese sont étroitomentiiées
au développementde i'art, dela poésie,à toutcequi est rêves
et aspirationsvaguesde l'espritet du cffur,à touteslesmani-
festationsindividuellesou collectivesoù l'imaginationentre
pour la plus large part. C'est pour cettemêmeraisonque la
femmea été si souventconsidéréecommele centrede la vie
esthétique. Maisces additions et ces transformationssont
des phénomènessecondaires, maigre leur importance.Dès
qu'il fut interdit aux membres d'un mêmeclan do s'unir
entre eux, la séparationfut consommée.
Or, une foisentréedans tes mœurs,elleduraet survécutà
sa propre cause. Quand les croyancestotémiquesqui avaient
donnénaissanceà l'exogamiese furentéteintes,lesétatsmen-
taux qu'elles avaient suscités subsistèrent.Les habitudes,
priseset gardéespendantdes siècles,ne purentpasse perdre
ainsi, non seulementparceque la répétitiontes avaitfortifiées
et enracinées,mais parce que, chemin faisant,ettess'étaient
solidariséesavecd'autres habitudes et qu'oo ne pouvaittou-
cherauxunes sanstoucheraux autres,c'està direàtout.Toute
la vie morales'étant organiséeen conséquence, il eût fallula
bouleverserpour revenirsur ce qui avait été(ait.Ni l'homme
ne pouvait aisémentrenoncerà ceslibresjoiesdont il avait
conquis la jouissance,ni il ne pouvaitles confondreavecles
joies plus sévèresde la famille, sans que les unes ou tes
autrescessassentd'être eites-mémesi~D'un autrecoté,comme
l'organisationà basede clansa été un stadepar lequelparais-
sent avoir passé toutes les sociétéshumaines,et que l'exo-
gamieétait liéeétroitementà la constitutiondu clan, il n'est
pas étonnant que l'état moral qu'elle 1 issait derrièreelle
ait été lui-mêmegénérât dans l'humanité Dumoinsil fallut,
K. OURKUH)! LA)'HO)))B)T<0!<
t)K L*t!<CM'tK 67

pour Ailen tt'intnnitf'r


triompher, dM des n~feRsitf's
nécessités )!nfin)as
sociales nHrtif)t)i<<'ftY)ant
particulièrement
pressantes; c'est ce qui explique et comment l'inceste fut
légitimé chez certains peuples et comment ces peuples sont
restés l'exception.
!t ne semble pas que rien soit survenu dans l'histoire qui
puisse rendre cette totérance plus générale dans l'avenir que
dans le passé. Ce n'est certes pas sans cause qu'une religion
aussi répandue que !o catholicismea formellement mis l'acte
sexuel en dehors de la morale, s'i) n'a pas la famitto pour fin.
Ht encore, même sous cette forme, le déclare t-etto inconci-
liable avec tout ce qui est investi d'un caractère sacré'. Un
sentiment comme celui-là, dont dépendent tant d'usages et
d'institutions qui se retrouvent chez tous les peuples euro-
péens, est trop générât pour qu'on puisse y voir un phéno-
mène morbide, dû à je ne sais quelles aberrations mystiques.
t) est plus naturel de supposer que la nature amorale de ta
vie sexuette s'est réellement accentuée, que la divergence
entre ce qu'on pourrait appeler l'état d'esprit conjugal et
l'état d'esprit domestique est devenue plus marquée. La cause
en est peut-être que la sensualité sexuelle s'est développée
alors que la vie morale, au contraire, tend de plus en plus ù
exclure tout élément passionnel. Notre morale n'est-elle pas
celle do l'impératif catégorique?
Toujours est-it que, si les peuples ont maintenant une
raison nouvelle pour s'opposer aux mariages entre proches,
cette raison est en réalité une résultante de la réglementa-
tion qu'elle justifie. Elle en est un effet, avant d'en être une
cause. Elle peut donc bien expliquer comment la régie s'est
maintenue, non comment otte est née. Si l'on veut répondre
à cette dernière question, il faut remonter jusqu'à l'exogamie,
dont l'action par conséquent s'étend jusqu'à nous. Sans les
croyances dont elle dérive, rien ne permet d'assurer que
nous aurions du mariage t'idée que nous en avons et que
l'inceste serait prohibé par nos codes Sans doute, t'éter-
nelle antithèse entre la passion et le devoir eût toujours

(ti Nousne fai~oni.pas seulementallusionau <'<!fih«t


<)Mpn'tnM,mais
ft la t<'f<)'!
canoniquequi d~fcudl e mpprufhetncntdcs dans]<!sj')an<
sexes
'on~cn'tt.
?) En faisantcette));'potM':w,
not)~n'cntcndonj!pasdiref))tel'exogamie
ait )itt!un accidentcontingent.Elleest Irop~troitmotint
liée(tut~MtnitnM
~-tauchu, qui sontde!!pMnnn~nmunivet'M)! pourqu'onpui~Mt.'an'Me)'
Mune tcUe supposition.Qu'onne voienoncdansnott'efonnuiequ'on
)'roevd)! destinéIlisolerla part de chaquefacteur.
tt'titpoemon,
€8 L'ASKÉE SOaOLOGtQUH. )89!

trouvé moyen de se produire; mais elle eût pris une


autre forme. Ce n'est pas au sein do la vie sexuette que ta
passion aurait pour ainsi dire étabti sou centre d'action.
Passion et amour des sexes ne seraient pas devenus syno-
nymes.
Ainsi, cette superstition grossière qui faisait attribuer au
sang toute sorte de vertus surnuturelles, a eu sur le dévetop-
poment moral de l'humanité une influence considérante. On
a môme pu voir au cours de ce trayait que cette action ne
s'est pas seulement fait sentir dans lu question de l'inceste.
!t est un autre ordre de phénomènes qui est placé sous la
dépendance de la môme cause ce sont les moiurs relatives a
la séparation des sexes en général. Le lecteur n'a pus pu
n'être pas frappé do la ressemblance qu'il y a entre les faits
que nous avons rapportés plus haut et ce qui se passe encore
aujourd'hui sous nos yeux. Suivant toute vraisemblance si,
dans nos écoles, dans nos réunions mondaines, une sorte
de barrière existe entre tes deux sexes, si chacun d'eux a
une forme déterminée de vêtements qui lui est imposée par
l'usage ou même pur la loi, si l'homme a des fonctions qui
sont interdites à ta femme ators même qu'elle serait apte
à les remplir, et réciproquement; si, dans nos rapports
avec les femmes, nous avons adopté une langue spéciale,
des manières spéciales, etc., c'est en partie parce que, il y
a des milliers d'années, nos pères se sont fait du sang en
généra), et du sang menstruel en particulier, la représenta.
tion que nous avons dite. Non sans doute que, par une
inexplicable routine, nous obéissions encore, sans nous en
rendre compte, à ces antiques préjugés, depuis si longtemps
dépourvus de toute raison d'être. Seulement, avant de dispa-
raître, ils ont donné naissance à des manières de hure qui
leur ont survécu et auxquelles nous nous sommesattachés.
Ce mystère dont, à tort ou à raison, nous aimons à entourer
la femme, cet inconnu que chaque sexe est pour l'autre et
qui fait peut-être le charme principal de leurcommerce, cette
curiosité très spéciale qui est un des plus puissants stimu-
lants de la brigue amoureuse, toute sorte d'idées et d'usages
qui sont devenus un des délassements de l'existence pour-
raient difttcitement se maintenir, si hommes et femmes
mêlaient trop complètement leur vie; et c'est pourquoi l'opi-
nion résiste aux novateurs qui voudraient faire cesser ce dua-
lisme. Mais, d'un autre coté, nous n'aurions pas connu ces
E. ))URKf)K)M.– H t'HOtHemox DE L'tNCHSTH 0!)

i!n< ai
besoins' si <)na
des M)i)tnns
rtilsons ftMnotH
depuis tonetamna
longtemps ffubUées n'avaient ¿
oubliées n'avaient
déterminé les sexes à se séparer et &tonner en quelque sorte
deux sociétés dans la société; car rien, ni dans la constitu-
tiou de t'uu ni danscelle de l'antre, ne rendait nécessaire une
semblable séparation.
La présente étude, en dehors do ses résultats immédiats,
peut donc servir à montrer, par lui exemple topique, l'erreur
radicale de ta méthode qui considère les faits sociaux comme
le développement logique et tétéoiogique do coucopts déter-
mines. Ou aura beau snaiyser les rapports de parente, t'«a<M-
~'«t'<o,on n'y trouvera rien qui implique entre eux et les
rapports sexuels uue aussi profonde incompatibilité. Les
causes qui ont détermine cet antagonisme leur sont exté.
rieures. Assurément, on ne saurait trop le répéter, tout ce
qui est social consiste en représentations, par conséquent
est un produit de représentations. Seulement, ce devenir des
représentations collectives, qui est la matière même de la
sociologie, ne consiste pas dans une réalisation progressive
de certaines idées fondamentales qui. d'abord obscurcies et
voilées par des idées adventices, s'en afïranchiraient peu à
peu pour devenir de plus en plus complètement eties-mémes.
Si des états nouveaux se produisent, c'est, en grande partie
parce que des états anciens se sont groupés et combinés.
Mais nous venons de voir, et dans des cas essentiels, comment
ces groupements pouvaient avoir une tout autre cause que la
représentation anticipée de la résultante qui s'en dégage.
L'idée de cette résultante n'est donnée que quand la combi-
naison est faite; elle no peut donc eu rendre compte. C'est un
euet plus qu'une cause, quoiqu'elle puisse réagir sur les.
causes dont elle dérive elle a besoin d'être expliquée plus
dans les propriétés du sang
qu'elle n'explique". 11n'y a rien
(t) Hi~t n'' dit d'ai)t<m'! ')u'-'< ))'Muin< tM-~oifttt))U!)<tf<tiuMrt~tm
par ')Mbciiuins
n''utra)i'!<~ IlssutMt)t<'Mt
<'onh)iir'"). ))!« ~[t-<omms j)t'o-
fund!!qMccouxqui ttxnt
! t)'t)':< <)'"<
i'h''Mn'tiUivc~ &rhK'Mt'
)a)LestitatsnouveauxpNU'cn) <~n'(hxuussiaux <'))an){fm''nts f;nt sn
jtfoduiM'nt (t)in<)eeub~Mtsu<-iu)<?t'n'hx'ptus Krandfdu ~-n-ituin'.
ptui!numttn'Ui't',
)f<tpo))tti"n phts d'n!it',~'tt'.!<ou<huions de ''ôt'i('e<
de n"uvaut<i Mxqucfh' h' t'on~idt'tttUutM
)'uu!<ea cxpo~c~ ci-dessM
!app)i<)oent Mteofo plust'vidt'nxMfnt.
(3)Voilàco<)annou:!avot):;voutudire,<tnandnousavo«)!'t v"'nt a)))t'un)
</e/a .M«/f.mcM..p. 30)'t'h- notn:iduode ta.nx'm)'-
)«<'</<<? 'tes
n'xte<tnomtMqui fonctiontx'nt ~<msnos yeux.Cesn'-ft)' sontdunu<!B<
daix dM n'pn'Mttttttion! mai!)tmtn' concuption f~ncmto(tela <))om)')
MM pr~idcpas à )&co)M.h'u''ti))n e~mcntairt's,u))«
dt*ces r''prt's'n)atit)n<
70 t'AN~ÉH SOCtOMOQUE. ~9?

qui le prédestinenécessairementà acquériruncaractèrereli.


gieux.Maisla notionvulgairedu liquidesanguin,ou s'asso-
ciant avec les croyancestotémiques,a donnénaissanceaux
rites dont nousavons parlé. Ces rites, tt leur tour, associés
avec lu notioncourantedu commercesexuel, ont engendré
les idées relatives à t'exogamic.Sur la basede t'exogamie,
toute sorte d'habitudes se sont prises qui font maintenant
partie de notre tentperameutmoral.Aucuneanalysedialec-
tique ne sauraitretrouverlesloisde ces synthèsesà la forma-
tion desquellesaucunedialectiquehumainen'a préside.Sans
doute, à mesureque le jugement collectifse développeet
vientéclairer davantageta volontésociale, celle-cidevient
aussi plus apte à diriger le cours desévénementset à leur
imprimerune marcherationuetto.Maisles fonctionsintellec-
tuellessupérieuressont encorebeaucoupplus rudimentaires
dansla sociétéque dans l'individu,et les casoù leur iuftueuce
est prépondéranten'ont été jusqu'à présentqu'une infime
exception.
ËNtU! DUKKHNM.

n~utt'! df foMt'cutxbinai~jn, & ntcstnv ~tt'<'))(' x~ funt~'ut. !)u tuotns. si,


une f'ttsht'ttttk'. c))('exerce une )n't!un!!Uf)t'<tU'd'uùe)h')t'sutt)',
KCtten'Mtion est sm'ondaht). Ht fe tjuo nous <ti<!)t)~de la notiun j{t''n~<'ft)c
du la moralité [Mtt' tuppft-t il <'tt<t'tU<')TL'(t)e
)'<trti<'u)it'tf))cut M ttit't' de <'ht')))<*
rtgk' parU':u)i'')t;pt)'M)'puFt MUXtvpr~t'otaHott~h'tWtttitinM d'oftette n<'
sulle.
J1

COMMENT LES FOHMES SOCIALES


SKMAtNTtHNNKNT

t'xrM.i-fMMKf.

Lessciencesen voiedeformationont le privilège, médio-


crement enviable,de servircommed'un asile provisoire a
tous les problèmesqui flottentdans l'air, sans avoir encore
trouvé leur véritableplace. Par l'indéterminationet l'accès
facilede leurs frontières,ellesattirenttous les « sans patrie ·
de la science,jusqu'à ce qu'elles aient pris assez de force
pour rejeterhors d'ellestousces élémentsétrangers t'opéra-
tion est parfoiscruelle,maiselleépargne bien des déceptions
pour l'avenir.C'estainsi que la sociologie,cette science nou-
velle, commenceà se débarrasserde la masse confusede
problèmesqui s'attachaientà elle; elleprend le parti de ne
plus naturaliserle premiervenu,et. quoiqu'ondiscute encore
sur l'étendue de son domaine,d'évidents euorts sont faits
pour en marquerlescontours.Pendantlongtemps,il semblait
que le motde sociologieeut une vertu magique; c'était la
clefde toutesles énigmesde l'histoirecommede la pratique,
de la moralecommede l'esthétique,etc. C'est qu'on donnait
pourobjetà la sociologietoutce qui se passe dans la société
par suite, tous les faits qui ne sont pas de l'ordre physique
semblaientêtre de son ressort.Maiscela même démontre
l'erreur qu'on commettaiten procédantainsi. Car c'est évi-
demmentun non-sensque de réunir tous les sujets d'étude
dont traitentdéjà l'économie politiqueet l'histoirede la civi-
lisation, la philosophieet la politique, la statistique et la
démographie,dans unesorte de péio-méteauquel on accole
cette étiquette de sociologie.On y gagne un nom nouveau,
L'ASMKH «M
SOCK)LOO)QU)!.
n_
mais pas une connaissance nouvelle. Sans doute, H n'y a pas
de recherche sociologique qui n'intéresse quelqu'une des
sciences déjà existantes; car, dans ce qui fuit la matière df
ia vie humaine. il n'est rien qui uo soit déjà l'objet de quei-
qu'une de ces sciences. Alais c'est justement la prouve que,
pour avoir un sens défini, ia sociologie doit chercher ses
problèmes, non dans la matière de la vie sociale, mais dans sa
tonne et c'est cette forme qui donne leur caractère social :t
tous ces faits dont s'occupent les sciences particulières. C'est
sur cette considération abstraite des formes sociales que
repose tout te droit que ia sociologie a d'exister c'est ainsi
que la géométrie doit sonexistence a ta possibilité d'abstraire,.
des choses matcriettos, leurs tonnes spatiales. et la linguis-
tique ta sienne, à la possibilité d'isoler, des pensées qu'expri-
ment tes hommes, la forme même de l'expression.
Les formes qu'anecteut les groupes d'hommes unis pour
vivre les uns it côte des autres, ou les uns pour tes autres, ou
les uus avec les autres, voilà donc le domaine de ta sociologie.
Quant aux fins économiques, religieuses, politiques, etc., en
vue desquelles ces associations prennent naissance, c'est a
d'autres sciences qu'il appartient d'en parler. Maisators.
puisque toute association humaine se fait en vue do telles
fins, comment connaitrons-nous les formes et les lois propres
de l'association? Kn rapprochant tes associations destinées
aux buts les plus difïereuts et eu dégageant ce qu'elles ont de
commun. Do cette façon, toutes les différences que présentent
les (ius spéciales autour desquels los sociétés se constituent,
se neutraliseront mutuellement, et la forme sociale sera seule
à ressortir. C'est ainsi qu'un phénomène comme la formation
des partis se remarque aussi bien dans le monde artistique
que dans les milieux politiques, dans l'industrie que dans la
religion. Si donc on recherche ce qui se retrouve dans tous
ces cas en dépit de la diversité des fins et des intérêts, ou
obtiendra les espèces et tes lois de ce mode particulier de
groupement. Lu même méthode nous permettrait d'étudier
de la même manière la domination et la subordination, lu
formation des hiérarchies, la division du travail, ta concur-
rence, etc. Quand ces nombreuses formes de l'association
humaine auront été établies inductivement et qu'on aura
trouvé leur signification psychologique, alors seulement ou
pourra penser à résoudre la question Qu'est-ce qu'une
société ? Car il est bien sur que la société n'est pas un être
suffit.. – COMMENT LKS FOXMKS MOALKS SK M.UNTtKXNKNT 7X

ulmnln rlnni i~n nnfwnn mnioan hfnu nvnnianaia inni an·ihoa tlwna
simple, dont la nature puisse être exprima tout entière dans
une seule formule. t'uur en avoiria définition, il faut sommer
toutou ces formes spécialesdo l'association et toutes los forces
qui en tiennent unis les éléments. n ne peut pus y avoir de
société où ces combinaisons variées ne se rencontrent. S'~ns
doute, chacune d'elles, prise à part, peut disparattre sans que
le groupe total disparaisse mais c'est que, citez tous les
peuples connus, il un subsiste toujours un nombrf sufMsant.
Que si ou tes supprime toutes par la pensée, il u'y Il plus de
société du tout'.l,
Afin d'illustrer par un exempte la méthode ainsi définie,
jo voudrais, dans cet urlicle, rocttorciter les formes spécifiques
par iesfjueties les sociétés, en tant que telles, se conservent.
Par société, je n'entends pas seulement t'enscmbte comptexe
des individus et dos groupes unis dans une même commu-
nauté politique, Je vois une société partout on des hommes
se trouvent en réciprocité d'action et constituent une unité )Î
permanente ou passagère. Or, dans chacune de ces unions
se produit un phénomène qui caractérise égnlement h vie
individneUe; à chaque instant, des forces perturbatrices,
exterues ou non, s'attaquent au groupement, et, s'H était livré
à leur seule action, eties uo tarderaient pas a le dissoudre,
c'ost-a direaon transférer les éléments dans des groupements
('trangers. Mais a ces causes de destruction s'opposent des
forces conservatrices qui )))!)intiem)C))teusetnbte ces été-
monts, assurent leur cohésion, et par là garantissent l'unité
du tout jusqu'au moment o~'t,comme toutes les choses ter-
restres, ils s'abaudoum'Mttaux puissances dissolvantes qui les
assiègent.
A cette occasion, on peut voir combien il est juste de pré-
senter lu société comme une unité ~t« ~t'«t'<'< distincte de
ses éléments individuels. Car les énergies qu'elle m'<ton jeu
pour se conserver n'ont rien do commun avec l'instinct de
conservation des individus. EUe emploie pour cela des pro-
cédés tellement différents que très souvent ta vie des indi-
vidus reste intacte et prospère aiors que celle du groupe
s'afïaibHt, et inversemeut. Pins que tous les autres, ces faits

0) Cf.<t)t'cott"nom")' ')'' ))~.«'rt'' ))t«bt''ttt<'


stM'itt)ttK)'f<<))t)n<n'ti<'t')
~ttt-<<-~'o&MKtc <fe<««wM~ic in ~ft-MC </c<W<~A.. t. t), li. M7.t))t
tMMVcrit
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Lt'i)<<){. /tKK«<e< de <M«/M<de <toe«)<<~i<
vol.t, .~H«'f<c<!« o~ecta/o~y, U, n'"~ct3.
<'t 7e«''«< v ol.
7~ t-'ANNËHSOCIOLOGIQUE.
)?;

ont contribuéà faire tenir la société pour un être d'une réa-


litéautonome,qui muerait, suivantdes tois propres,unevie
indépendantede cellede ses membres.Et eu réattte,si t'on
considèreht nature intrinsèqueet l'évolutiondes langueset
des mœurs,de t'Ugiiseet du droit, de l'organisationpolitique
et sociate,cette conceptions'impose.Cartouscesphénomènes
apparaissentcommetes produits et les fonctionsd'un être
impersonnelauquel les individus participent sans doute,
commeà un bien public, mais sans qu'on puissedesigner
Nommémentun particulierqui en soit la cause productrice
ou ta raison déterminante pas un tnémedonton puissedire
quellepart préciseil a priseà leur production.Eitesse posent
en facedes particulierscommequelque chosequi lesdomine
et qui uo dépendpas desmêmesconditionsque la vieindivi-
duelle.
D'unautre cote, il est certain qu'il n'existequedes indivi-
dus, que les produitshumaiusn'ont do réalitéen dehorsdes
hommesque s'ils sont de nature materieito,et que lescréa-
tions dont nous parions, étant spirituelles, ne vivent que
dans des intelligencespersouncites.Commentdonc, si les
êtres individuelsexistentseuls,expliquer te caractèresupra-
individuetdes phénomènescollectifs, l'objectivitéet l'auto-
nomie des formes sociales? tt n'y a qu'une manièrede
résoudrecette antinomie.Pour une connaissanceparfaite,il
faut admettrequ'il n'existerienque des individus.Pour un
regard qui pém'trerait le fond des choses, tout phénomène
qui parait constituer au-dessusdes individusquelqueunité
nouvelleet indépendante,se résoudraitdans les actionsréci-
proqueséchangéespar tes individus. Malheureusement, cette
connaissanceparfaite nous est interdite. Les rapportsqui
s'établissententre les hommessont si complexesqu'il est
chimériquede les vouloirramenerà leurs élémentsultimes.
Nous devons plutôt les traiter comme des réalitésqui se
suffisentà cités-mêmes.C'estdonc seulementpar un procédé
de méthode que nous parlons de l'état, du droit, de la
mode, etc., comme si c'étaientdes êtres indivis.C'estainsi
encoreque nous parlonsdeia viecommed'unechoseunique,
tout en admettant qu'ellese réduità un complexusd'actions
et de réactionsphysico-chimiques échangéesentretesderniers
élémentsde l'organisme.Ainsi se résout le conflitsoulevé
entrela conceptionindividualisteet ce qu'on pourraitappeler
la conceptionmonistede la société cette-!àcorrespondà ia
MMMt: COMMENT
LESFORMES
SOOAtRS f!:là
SEMA)XTtESMt!!<T
réalité, celle-cià i'état bornéde nostacuitésd'analyse l'une
est l'idéal de la coanaissuace,l'autre exprimesa situation
actuelle.
Celaposé,de mêmeque le t)totogistea déjà pu substitue)'
à lit force vitale, qui paraissaitplaner au-dessusdes diffé-
rents organes, l'actionréciproquede ces derniers, le socio-
logue,à sontour, doitchercherde plusen plus &atteindreces
processusparticuliersqui produisentréetiementles choses
sociales,à quelquedistanced'ailleurs qu'il doive rester de
son idéat. Voicidonc,pour ce qui concernel'objet spécial
de cet article, commentle problèmedoitse formuler.Nous
croyonsvoir que les associationsles plusditïérentesmettent
en jeu,pourpersévérerdansleur être, des forcesspécifiques
en quels processusplus simplesce phénomènepeut-il se
résoudre?Bienque le groupe,une fois qu'il existe, paraisse
faire preuve,dansses effortspourse maintenir,d'une énergie
vitaleetd'uno foreederésistancequi semblentprovenird'une
sourceunique, elle n'est cependantque la conséquence,ou
mieuxla résuitantedo phénomènes,particulierset variés,de
nature sociale.Ce sont ces phénomènesqu'il faut recher-
cher.

Cequi posele plus ordinairementle problème de la per-


manencepropre aux groupessociaux,c'est ce fait qu'ils se
maintiennent identiquesà eux-mêmes,tandis que leurs
membreschangentou disparaissent.Nousdisonsque c'est le
même État, la mêmearmée,la mêmeassociationqui existe
aujourd'hui et qui existait déjà il y a des dizaineset peut-
être descentainesd'années cependant,parmi les membres
actuelsdu groupe,il n'enest pas un qui soit le mêmequ'au-
trefois.Nousavonsaffaireici à l'unde ces cas où ta disposi-
tion des chosesdans le tempsprésente une remarquable
analogieavecleur dispositiondans l'espace.Le fait que les
individussont&cotélesunsdesautres, par conséquentexté-
rieurs les unsaux autres, n'empêchepas l'unité socialede se
constituer l'unionspirituelledes hommestriomphede leur
séparationspatiale. De morne,la séparationtemporelledes
générations n'empêchepas que leur suite ne forme, pour
?0 t/ANti&E SOCtOt.OOQUË.1897

notre représentation, un tout


ininterrompu. Chez les ott-es
que l'espace sépare, l'unité résulte des actions et dos réactions
qu'ils écttangent entre eux car l'unité d'uu tout complexe
Mesignifie rien autre chose que la cohésion des
étéments, et
cette cohésion ne peut être obtenue que
par le concours
mutuel des forces en présence. Mais pour un tout
composé
d'éléments qui sont séparés par !Gtemps, l'unité ne
peut être
réalisée de cette manière, parce qu'i) n'y a pas entre eux de
réciprocité d'action; tes plus anciens peuvent bien agir sur
ceux qui viennent ensuite, mais non ceux-ci sur ceux-là.
C'est pourquoi lu survivance de l'unité sociale au milieu du
flux perpétuel des individus reste un problème &résoudre.
alors même que la genèse de cotte unité a
déjà été expliquée.
Le facteur dont l'idée se présente le plus immédiatement à
l'esprit pour rendre contpte de la continuité des êtres collec-
tifs, c'est la permanence du sol sm- !eqnet ils vivent. L'unité,
non pas seulement do t'j~at, mats de la ville et de bien d'autres
associations, tient d'abord au territoire qui sert de substrat
durable à tous les changements que subit t'eneetit de la
société. A vrai dire, la permanence du lieu ne
produit pas à
elle seule la permanence de l'unité sociale; car,
quand la
popntation est expulsée ou asservie par un peuple conqué-
rant, nous disons que l'État a change, bleu que le territoire
reste le même. En outre, l'unité dont il s'agit ici est toute
psychique, et c'est cette unité psychique qui fait vraiment
l'unité territoriale, loin d'eu dériver. Cependant, une fois
que
celle-ci s'est constituée, elle devient à son tour un soutien pour
la première et l'aide à se maintenir, Mais bien d'autres con-
ditions sont nécessaires. La preuve, c'est que nombre de
groupes n'ont aucun besoin de cette base matérielle. Ce sont
d'abord les petites sociétés comme la famille qui peuvent
rester sensiblement identiques à elles-mêmes, tout en chan-
geant de résidence; mais ce sont aussi les très grandes,
comme les associations internationales de lettrés, d'artistes
et de savants, ou comme ces sociétés commerciales qui s'éten-
dent à tout l'univers, et qui consistent essentiellement dans
une négation de tout ce qui attache la viosociale à des loca.
Mtésdéterminées.
En définitive, cette première condition n'assure guère que
d'une manière formelle la persistance du groupe à travers le
temps. Un facteur incomparablement plus efficace, c'est la
liaison physiologique des générations, c'est la chaîne formée
– COMMENT
StMMEL. LESFORMES
SOCtAt.HS
M MAtKTtEKSEftT
'?7
entre tes individus par les relations de parenté en général.
Sans doute, la communauté du sang ne suffit pas toujours à
garantir bien longtemps l'unité de la vie collective; il faut
très souvent qu'elle soit complétée par la communauté de
territoire. L'unité socialedes Juifs, malgré tour unité physio-
logique et confessionnelle, s'est singulièrement détendue
depuis leur dispersion; elle ne s'est plus jamais solidement
renouée que tu où un de leurs groupes est resté fixé pendant
assez longtemps sur un même territoire. Mais, d'un autre
côté, partout où les autres tiens fout défaut. Je lien physiolo-
gique est )'«~<wKmy'M~'«M de ):) continuité sociale. Ainsi,
quand ta corporation allemande '~«t<<)dégénéra et s'aftaihtit
intérieurement, elle se ferma d'autant plus ètroitetm'nt au
dettors que sa force de cohésion se remettait davantage de là
vint lit r<)e que les fits de mattre, les gendres de mattre,
tes maris de veuve de mattre pourraient seuls être admis à
la mattrise.
Ce qui fait l'efficacitéde ce facteur, c'est que les générations
ne se remplacent pas d'un seul coup. De cette façott, l'im-
mense majorité des individus qui vivent ensemble à un mo-
ment donné existent encore au moment qui suit, et le passage
de t'un à l'autre est continu. Les personnes qui changeât entre
deux instants voisins, soit qu'ettessortfnt de la société, soit
qu'elles y entrent, sont toujours en très petit nombre, com-
parées :t celles qui demeurent. Le fait que l'homme n'est pas,
conxne tes animaux, assujetti à une saison d'accouplement,
et que par suite ses enfants peuvent naître en tout temps,
est ici d'une particulière importance, it en résulte en effet
qu'on ne peut jamais fixer un moment déterminé ou une
génération nouvelle commence. La sortie des éléments
anciens et l'entrée des nouveaux s'opèrent si progressi-
vement que le groupe fait t'onet d'un être unique, tout
comme un organisme au mitieu dci'écouiemont incessant do
ses atomes. Si cette substitution s'effectuait d'un seul coup,
si à une sortie en masse succédait brusquement une entrée en
masse, alors on ne serait guère fondé à dire que le groupe,
malgré la mobilité de ses membres, subsiste dans son unité.
Mais que, à chaque moment, les nouveaux venus soient une
infime minorité par rapport à ceux qui composaient déjà la
société au moment antérieur, voilà ce qui lui permet de res-
ter identique à elle-même, quand m&me.àdeux époques plus.
éloignées, le personnet social serait entièrement reuouveté.
7~ t/ASSÈHSOCtOLOG!QUK. ~897
~!f~tta~f.Mft!~t.t<A~Mt~t~––t-tA
Si cette continuité est surtout frappante là ou elle a pour
base la génération. elle ue laisse pas d'exercer une action très
sensible dans certains cas ou pourtant cet iotermédiaire
physique mamjue totutement. C'est ce (lui arrive pour te
clergé eatttotique. Lu continuité y résulte de ce {ait qu'il
reste toujours assez de membres anciens en fonctions
pour
initier les nouveaux. L'importance de ce p))énoménesocioto-
giqueestcousidérabte, car c'est ce qui rend si stables, par
exemple, les corps de fonctionnaires; c'est ce qui tour permet
de maintenir invariable. a travers tous les changements indivi-
duels, l'esprit objectif qui fait leur essence. Dans tous ces cas,
le fondement ptiysiotogique de la continuité socialeest rem-
place par un fondement psychologique. Sans doute, à parler
à ta rigueur, cette continuité n'existe qu'autant
que les
individus ne changent point. Mais, en fait. tes membres
qui
le
composent groupe a un moment donné y restent toujoursun
temps suffisant pour pouvoir façonner leurssuccesseurs à leur
image, c'est-à-dire selon l'esprit et les tendancesdelu société.
C'est ce renouvellement lent et progressif du groupe qui en
fait t'immortatite. et cette immortalité est un phénomène
sociologique d'une très haute portée. La conservation de
t'unie collective pondant un temps théoriquement muni
donne ù t'être social une valeur qui, cefct'MpHt'~Ms.est inn-
niment supérieure à celle de chaque individu. La vie indivi-
duelle est tout entière organisée pour finir dans un
temps
donné, et, dans une certaine mesure, chaque individu com-
mence tui-meme, a nouveaux frais, sa propre existence. La
société, au contraire, M'est pas enfermée f<priori dans une
durée limitée elle semble instituée pour l'éternité, et c'est
pourquoi elle arrive à totaliser des conquêtes, des forces, des
expériences qui Fétèvent bien au-dessus des existences par-
ticulières et de leurs perpétuels recommencements. C'est là
ce qui fit ta force des corporations urbaines de l'Angleterre,
depuis le moyen âge. Dès cette époque, dit Stubbs, elles
avaient le droit < de perpétuer leur existence en combtant,
au fur et à mesure, les vacances qui se produisaient dans
leur sein Sans doute, tes anciens privilèges ne visaient
que tes bourgeois et leurs héritiers. Mais, en fait, ce principe
fut appliqué comme conférant le droit d'adopter des mem-
bres nouveaux. C'est pourquoi, quel que fut le sort de ses
membres et de leurs descendants proprement dits, la corpo-
ration, en tant que telle, se conservait toujours <H<H~ro.
– COMMtiXT
S)MMKL. !.KSFOMMKS
SOUAÏ.KS
SRMAtttT!Ë!!SHNT
7~
Toutefois ce résultat n'est obtenu que par t'enacenx'nt de
l'individu son rôle personnel est eu effet rejeté au second
ptau par les fonctions qu'il remplit comme représentant et
continuateur du groupe. Car h société court d'autant plus de
risques qu'ai )o dépend davantage de l'éphémère individualité
de ses membres. Inversement, ptus l'individu est un être
impersonnel et anonyme, plus aussi il est apte à prendre tout
uniment ta piacc d'un autre et à assurer ainsi la conservation
ininterrompue de la personnalité collective. C'est ce précieux
privilège qui, dans la guerre des deux Roses, permit aux
Communes d'abaisser la suprématie de !a Chambre haute.
En effet, une bataille qui supprimait ia moitié de ia noblesse
du pays enlevait aussi à la Chambredes iords ia moitié do sa
puissance, parce que celle-ci était tiée au sort d'un certain
nombre de personnalités particulières. Au contraire, les
Communes étaient soustraites à cette caused'aitaibtissement
comme elles jouissaient d'une sorte d'immortalité grâce au
nivellement de tours membres,elles devaient finir par s'em-
parer du pouvoir. Cette même circonstance donne aux
groupes un avantage dans les luttes qu'ils soutiennent avec
les particuliers. On a pu dire de la Compagnie des Indes que,
pour fonder sa domination sur les indigènes, elle n'avait pas
employé d'autres moyens que le Grand Mogot. Seulement
die eut cette supériorité sur les autres conquérants de l'Inde
qu'ette ne pouvait jamais être assassinée.

Il

Ce qui précède explique pourquoi, dans tes cas contraires,


c'e8t-a-dire'.quand la vie sociale se trouve être intimement
liée cette d'un individu, directeur et dominateur du groupe,
des institutions très spéciales sont indispensables pour qu'il
puisse se maintenir. Quels dangers cette forme sociotogiquo
peut faire courir a la conservation des sociétés, l'histoire de
tous les interrègnes est là pour nous l'apprendre. Mais ces
périls sont naturellement d'autant ptus grands que le souve-
rain concentre plus complètement entre ses mains les fonc-
tions par lesquelles se recrée à chaque instant l'unité collec-
tive. C'est pourquoi il peut être assez indiiîérent que l'exercice
du pouvoir soit un instant suspendu ta où la domination
<K) t-'AMNÉK '«?7
"OCMMCtOUE.
du prince n'est que nominale, où it régne, mais ne gouverne
pus; au contraire, un État d'abeilles tombe dans une anar-
chie complète dès qu'on t'a privé de sa reine. Sans doute, ou
ne doit pas se représenter cotte royauté sous la forme d'un
gouvernement humain, puisqu'il n'eu émane pas d'ordres. a
proprement parier. Cependant, c'est ia reine qui est le centre
de l'activité de h) ruche; car, se tenant par ses antennes en
communication perpétue)ie avec les travailleuses, elle est au
courant de tout ce qui se passe dans son royaume, et c'est ce
qui permet à la société de prendre conscience do son unitf.
Mais aussi ce sentiment s'évanouit des que cet organe cen-
tral, grâce auquel il s'élabore, a disparu.
L'inconvénient du cette concentration n'est pas seulement
de subordonner ia conservation du groupe à l'existence con-
tiugente d'un individu; !e caractère personne! que prend
alors le pouvoir peut, par lui-même, devenir un danger. Par
exemple, si ta société merovingienue maintint intactes, à
bien des fgards. tes vieilles institutions romaines, cependant,
sur un point essentiel, elle innova la puissance publique
devint chose personnelle, transmissible et partageable. Or ce
principe, sur lequel se fondait le pouvoir du roi, se tourna
contre lui car les grands, qui contribuaient à lu constitution
de l'empire, réclamèrent eux aussi une part porsonneUe de
domination.
Les sociétés politiques ont essayé de conjurer ces différents
dangers, surtout ceux qui résultent des interrègnes, en pro-
clamant te principe que le roi ne meurt pas. Tandis qu'aux
premiers temps du moyen âge la paix du roi mourait avec
!f roi. grâce a ce principe nouveau, lit tendancedu groupe .'<
persévérer dans son être prit corps. En effet, une idée, très
importante au point de vue sociologique,y est impliquée, c'est
que le roi n'est pas roi en tant qu'individu. Au contraire, sa
personnalité est par elle-même indiuerente. Elle n'a plus df
valeur que comme incarnation de la royauté abstraite,.imp('-
rissable comme le groupe même dont elle est ta tôte. Celui-ci
projette son immortalité sur le prince, qui en revanche ta
renforce par cela même qu'il la symbolise.
Le procédé le plus simple pour exprimer la permanence du
groupe parcelle du pouvoir, c'est la transmission héréditaire
de la dignité suprême. La continuité physiologique de ta
famille souveraine renèchit alors celle de la société. Celle-ci
trouve son expression, aussi adéquate que possible, dans cette
StMMEL. COMMENTLES fOHtttM SOCIALKSSE MAtNTtKKNMNT8t

toi au!
toi qui fait
fait succéder
succÈdet' au père le
au nère le Ois désignédanui)!
n)sd6st<rné depuistnnctxmnc
longtemps
pour le trône et à
toujoursprêt l'occuper. En tant qu'il se
transmet héréditairement,le gouvernement est indépendant
des qualitéspersonnoiiesdu prince or, c'est le signeque la
cohésionsocialeest devenueune réalité objective,pourvue
d'une consistanceet d'une durée propres,et qui n'est plus
subordonnéeà tous les hasardsdes existencesindividuelles.
Cequ'on a justementtrouvéd'absurdeet de nuisibledansle
principe de l'hérédité, à savoirce formalismequi permet
d'appelerau pouvoiraussibien le moinscapableque le plus
méritant, cela mêmea un sens profond car c'est la preuve
que la forme du groupement,que le rapport entre gouver-
nantset gouvernéss'est nxé et objective.Tant que la consti-
tution du groupe est incertaineet vacillante,les fonctions
directricesexigentdesqualitéspersonnellestrès déterminées.
Ainsi,le roi grec des tempshéroïquesnedevaitpas seulement
être brave, sage et éloquent; il fallait encore qu'il fut un
athlète distinguéet même,dansia mesuredu possible,excet-
lent laboureur, charpentier et constructeurde vaisseaux.
D'unemanièregénérale,là oùl'associationest encoreinstaMe,
elle veille,commec'estson intérêt, à ce que le pouvoirne
soit donné qu'après une lutte et une concurrenceentre les
individus.Maislà où ia formede l'organisationsocialeest
déjà solideet définitive,alorsles considérationspersonnelles
deviennentsecondaires.C'est le maintien de cette forme
abstraitequi importe, et le meiHeurgouvernementest celui
qui exprime le mieux la continuitéet l'éternitédu groupe
ainsi constitué.Or c'est le gouvernementhéréditaire,car il
n'enest pas qui réalisepluscomplètementle principed'après
lequel le roi ne meurtpas.

Ht

Unautre moyenpour l'unité socialede s'objectiverest de


s'incorporerdans des objetsimpersonnelsqui la symbolisent.
Le rôlede cessymbolesestsurtoutconsidérablequand,outre
leur sens figuré, ils possèdentencoreune valeurintrinsèque,
qui leur permetde servir,en quelquesorte,de centrede rallie-
mcnt aux intérêts matérieisdes individus.Dans ce cas, il
importetout particulièrementà laconservationdu groupe
a.j. de
E. t)Mti))M)). Annce swiu). 18!17, o
M t'ANKÉE SOCtOt.OG!Qf)S.<??

e.ew~o~a
soustrairece f,t~
bien commuaàa toute cause a,de destruction,à
peu prèscommeon soustraitle pouvoirpersonne!aux acci.
dentsdepersonnesen proclamantl'immortalitéduprince. Le
moyenle pius fréquemmentemployédans ce but c'est la
mainmorte,ce systèmed'après lequel les biens de l'associa-
tion, qui,en tant que tels, doiventêtre éternels,sontdéclarés
inaiiénabies.De mêmeque la natureéphémèrede l'individu
se reflètedansle caractèrepérissabledesa fortune,à la péren-
nitédu groupecorrespondl'inaliénabilitédu patrimoinecol-
lectif.En particulier, le domainedes corporationsecclésias-
tiquesressemblalongtempsà la cavernedu lionon tout peut
entrer, maisd'oùrienne sort.L'éternitédeleursbienssymbo-
lisaitl'éternitédu principequifaisaitleurunité.Ajoutezà cela
que les biens de mainmorteconsistaientessoutietiementen
biensfonciers.Or,contrairementaux meubleset, en particu-
lier, à l'argent,lesbiensen terre jouissentd'une stabilité,d'une
perpétuitéqui en faisaitla matièredésignéede la mainmorte.
En même temps, grâce à leur situation déterminéedans
l'espace,ils servaientcommede pointfixeautourduquelgra-
vitaienttous leurs copropriétaires,tant par dévouementà la
chosecommunequeparsoucideleursintérêtsbien entendus.
C'estainsi que la mainmorten'était pas seulementunesource
d'avantagesmatériels;c'étaitencoreun procédégénial pour
consoliderl'unité collectiveet en assurerla conservation.
Cette objectivité que la mainmorte et le ftdéicommis
donnentaux biens collectifsen les soustrayantà l'arbitraire
desindividus,lesassociationsmodernesessaientde la réaliser
par d'autres moyens,maisqui tendentau mêmebut. Ainsi,
nombred'entreelleslient leurs membresen établissantque,
s'ils se retirentde l'association,ils ne pourrontrecouvrerce
qu'ilsauraientverséà la caissecommune.C'estla prouveque
la sphèredes intérêtssociauxs'est constituéeen dehorsde
celleoùse meuventles individus,quele groupevit d'une vie
propre,qu'il s'appropriedéfinitivementles élémentsqu'il a
unefoisreçus et rompt tousles liens par lesquelsils se rat-
tachaientà des propriétairesindividuels.Désormais,11ne
peutpas plus les rendre à ces derniersqu'un organismene
peut restituerles aliments,qu'il s'est une foisassimilés,aux
êtres qui les lui ont fournis.Ce mo<<)M ~'of~fK<<tne favorise
pas seulementpar ses résultats directs l'auto-conservation
de la société,mais il y aide aussiet surtout en faisantvivre
dans l'esprit de chacun de ses membresl'idée d'une unité
– COHMEffT
StMXEL. LESfOHMES
XOOAUM
SBMAtKTtKttNEttT
83
sociale, supérieure aux particuliers et indépendantedes
capricesindividuels.
Cettemémotechniquesociologique seretrouve,maisencore
reuforcée,dans uneautre règleadoptéepar certainesassocia-
tions eu cas da dissolution,elless'interdisentde partagerla
fortunecommuneentre leurs membres,mais la lèguent à
quelque société qui poursuit un but analogue. De cette
manière, ce n'est plus seulementl'existence physique du
groupequi se maintient,c'estsonidée,qui se réincarnedans
le groupehéritier et dont la continuitéest garantie et, pour
ainsi dire, manifestéepar cette transmissiondes biens.C'est
particulièrementsensibledansunassezgrand nombred'asso-
ciationsde travaiHeursqui se formèrenteu Francolors de la
révolutionde 1848.Dansleurs statuts, le principe on vertu
duquel le partage est défendureçut uneextensionnouvelle.
Lesassociationsd'un mêmemétierformaiententreelles un
syndicat auquel chacuneléguait éventuellementce fonds
qu'elles ne pouvaientpas partager. Ainsise constituaitun
nouveaufondssocialof)lescontributionsdes sociétésparticu-
lièresvenaient se fondreen une unité objectived'un genre
nouveau,commelescontributionsdes individusétaientvenues
se perdre dans le fondsparticulierde chaqueassociation.Par
là, l'idée qui était i'âmede ces groupesélémentairesse trou-
vait commesublimée.Le syndicatdonnait un corps et une
substanceà ces intérêtssociauxqui, jusque'ta, n'avaienteu
de réalitéque dans cesassociationsplus restreintes; le prin-
cipe sur lequelelles reposaientétait éiovéàune hauteur où,
si des forces perturbatricesne s'étaient rencontrées,il se
serait maintenu invariable,au-dessusde toutes les fluctua-
tionsqui pouvaientsurvenirdansles personnescommedans
leschoses.

!V

Nousavonsconsidérélescasoù les formessociales,pourse


maintenir, se solidarisentsoit avecune personne, soit avec
une chose.Voyonsmaintenantcequi arrivequand elless'ap-
puientsur un organeformé par une pluralité de personnes.
Dansce cas, l'unité du groupes'objectiveelle-mêmedansun
groupe c'est ainsi que la communautéreligieuses'incarne
84 L'ASKËE
SOCMi.OOtQUË.
)ttt)?
dans le ctergé la société politique, dans l'administration ou
dans l'année selon qu'it s'agit de sa vie intérieure ou de ses
relations avec le dehors' )'armée, à son tour, dans le corps
des officiers, toute association durable dans son comité, toute
réunion passagère dans son bureau, tout parti politique dans
sa représentation parlementaire.
La constitution de ces organes est le résultat d'une division
du travail sociologique. Les rotations inter-individuettes. qui
sont la trame de la vie socialeet dont ta forme spéciale déter-
mine le caractère du groupe, s'exercent primitivement sans
intermédiaire, de particulier a particulier. L'unité d'action
se dégage alors de débats directs entre tes agents et d'une
mutuelle adaptation désintérêts; t'unité religieuse, du besoin
qui pousse chacun à communierduns une croyance; l'organi-
sation militaire, de l'intérêt qu'a tout homme valide soit à se
défendre, soit à attaquer; ta justice publique, des sentences
immédiates de la fouleassemblée; ln subordination politique.
de ta supériorité personnelle d'uu Individu sur ses associes:
l'harmonie économique, des échanges directs entre produc-
teurs'. Mais bientôt, ces fonctions, au lieu d'être exercées par
tes intéresséseux-memes, deviennent l'office propredégroupes
spéciaux et détermines. Chaque individu, au lieu d'agir direc-
tement sur tes autres, entre en relations immédiates avec ces
organes nouvellement formes. En d'autres termes, tandis que,
là ou ces organes ne se sont pas formés, tes éléments indivi-
duels ont seuls une existence substantielle et ne peuvent se
combiner que suivant des rapports purement fonctionnels,
leur combinaison, en s'organisant ainsi, acquiert une exis-
tence .<«)'~H~'M elle est désormais indépendante, non pas
seulement des membres du groupe auxquels cette organisa-
tion s'applique, mais encore des personnalités particulières
qui ont pour tache de la représenter et d'en assurer le fonc-
tionnement. Ainsi, la classe des commerçants, une fois consti-
tuée, est une réalité autonome qui, en dépit de la mobilité des
individus, remplit d'une manière uniforme son rôle d'inter-
médiaire entre tes producteurs. Le corps des fonctionnaires
apparaît plus clairement encore comme une sorte de moule

~)tJ'' tt~-eux)'«.<xtThmer <)uecet ~tat.)<:p)u~situ)))*'tt))ji')Me<ttfnt,<tit


t'tf rM)<t)Mnt tt-
pat-tout pointttf départhhtm'ittUM'<<!toattiMVet~exMot
ti'K-iutuHt'rieur.Mais, pour uetenninerm ')ui ''t-tdt jt la eoMtitntio))
tt'«rf{)mt-s mctau):<tifr<Sr<n''iM.
i) fautMj.pMO)' cett'tat anMriear. nefùt-it
tju'ttnt-f ft-tit-n.
Ht.dansbien tles cai!.c'e~tuno t~atitc.
– COXMKtn'
StMMËL. US FORMES
SOOALM
SEMAMTtBNKHK')'
8S
objectifoù losindividusne font quepasseret qui réduit assez
souventa rien leur personnalité.Demême,i'Ètat se chargede
faire collectivementles sacrificespécuniairesque les difïé-
rentes parties de lu sociétéexigent les unesdes autres et,
inversement,par l'intermédiaired'agentsspéciaux,il astreint
les uneset les autres auxmêmesobligationsfiscales.Demême
encore,l'église est un organismeimpersonneldont les fonc-
tionssont exercéespar les prêtres, sans être crééespar eux.
En un mot, l'idéequ'ona cruefaussedesotresvivants,à savoir
que iesinter-actionsdemoléculesmatérielles,dontl'ensemble
constituela vie, ont pour supportun principevital distinct,
cetteidéeest expressémentvraiedes êtres sociaux.Ce qui, ù
l'origine,consistaitsimplementenéchangesinter-individueis,
se façonneù la longuedes organesspéciauxqui, en un sens,
existentpar eux-mêmes.Usreprésententies idéeset les forces
qui maintiennentle groupedanstelleou telleformedétermi-
née et, par une sorte de condensation,ils font passer cette
formede l'état purementfonctionnelà celuide réalitésubs-
tantielle.
C'estun desfaitsles pluscaractéristiquesde l'humanité et
des plus profondémentinvétérésdansnotrenature que cette
faculté qu'ont les individuscomme les groupes de tirer
des forces nouvellesde closes qui tiennent d'eux-mêmes
toute leur énergie. Les forces vitales du sujet prennent
souventce détour pour mieuxservir à sa conservationet à
son développementellesse construisentun objet fictif d'où
elles reviennent, en quelque sorte, sur io sujet d'où elles
émanent.C'est ainsi que, danscertainesguerres,on voit un
des belligérantscontracterune alliance,maisen prêtant au
préalableà son allié les forcesavec lesquellesil en sera
secouru. Qu'on se rappelle ces dieuxque les hommes ont
créés en sublimantles qualités qu'ils trouvaienten eux-
mêmes,et dont ils attendentensuiteet unemoraleet la force
de la pratiquer Qu'onse rappellecespaysagesdans lesquels
nous projetons nos états d'âme de toute sorte, pour en
recevoir un peu après des consolationset des encoura-
gements Combiende fois encoredes amis, des femmesne
nous paraissent-ilspas singulièrementrichesde sentiments
et d'idées,jusqu'au momentoù nous nous apercevonsque
toutecetterichessemoralevientde nous et n'est qu'un reflet
dola nôtre 1Si nousnous duponsde la sorte, ce n'est sure*
mentpas sans raison.Beaucoupdes forcesde notre être ont
t-'ASNËE SOMtOMOQUB. )?'')
hoa"
besoin de se projeter, de J- se
métamorphoser, de s'objectiver
ainsi pour produire leur Mt~t'Mxw
d'ellet; il faut que nous
les placions à une certaine distance de nous
pour qu'elles
agissent sur nous avec leur plus grande force, et l'illusion o&
nous sommes sur leur origine a
justement pour utilité de no
pas troubler leur action. Or les organes différenciés
que crée
la société sont souvent des produits de ce
genre. Les énergies
collectives s'y trouvent concentrées sous une forme
spéciale
qui, en vertu de ses caractères propres, résiste au
groupe
dans son ensemble si l'intérêt social
l'exige, des forces wt
generis semblent s'en dégager, qui ne sont pourtant qu'une
transformation de ces forces élémentaires sur
lesquelles elles
réagissent.
Quelle est l'importance de ces organes pour la conservation
des groupes ? C'est ce qu'un
exemple va montrer. La déca-
dence des anciennes corporations de
l'Allemagne vint en par-
tie de ce qu'elles ne surent pas se constituer
d'organes. Eties
resteront identiques ù la somme de leurs
membres elles ne
à
parvinrent pas élever au-dessus des individus une organi-
sation objective en qui s'incarnât l'unie sociale. Elles avaient
bien des représentants, munis do
pouvoirs spéciaux, mois
qui avaient un caractère trop étroitement individuel c'étaient
simplement des personnes sures à qui l'on confiait )es fone.
tions les plus indispensables ù l'existence commune. Sans
doute, il arriva cà et lir que ces délégations se transformèrent
plus tard eu organes permanents de la vie publique mais,
a l'origine, cette transformation n'eut
pas lieu. L'unité du
groupe resta sous la dépendance immédiate des inter-actions
individueiies elle ne se condensa ni en un t:tat dont l'idée
aurait plané au-dessus des générations
appelées successive.
ment à le représenter, ni en organes
particuliers qui. chargés
de fonctions déterminées, en auraient, du
moins, débarrassé
l'ensemble des travailleurs. Or, les
dangers qui résultent de
cette situation peuvent être classés sous trois chefs
t" Là of)il y a des organes
différenciés, le corps social est
plus mobile. Tant que, pour chaque mesure
politique.
juridique, administrative, il doit tout entier se mettre
en branle, son actiou pèche par la
lourdeur, et cela dou-
blement. 1)'abord, en un sens tout matériel. En
enet. pour
que le groupe entier puisse agir collectivement, il faut, avant
tout, qu'il soit assemblé et la difnculté, parfois même l'im-
posstbiiité d'un rassembiement total empêche mille décisions
SMHEt.– COMMENT MCtAtES
tE! FORMES SEMAtt<TH!t<!<Et(T
8t

ou en diffère d'autres jusqu'au moment ou il est trop tard.


Mais supposons levée cette difficultéextérieure de la concen-
tration physique, alors se dresse celle de la concentration
monde. Comment arriver, dans une masse si considérable, à
l'unanimité? Quand uuo foule se meut, ses mouvements sont
alourdis par toute sorte d'hésitations, de considérations qui
tiennent soit à la divergence dos intérêts particuliers, soit à
l'indifférence des individus. Au contraire, un organe social
peut s'affranchir de tous ces <mp<'<MM«'K<«. parce qu'il est fait
pour un but défini et qu'il est composé d'un nombre de per-
sonnes relativement restreint, et ainsi il contribue à la con-
servation du groupe en rendant l'action sociale plus précise
et plus rapide.
C'est à ces difticultés que doit être attribuée l'inaptitude de
la foule à agir dans les cas on, pourtant, l'action n'exige ni
connaissances ni qualités spéciales. Par exemple, un règle-
ment d'administration, rendu vers la fin du xv. siècle pour
le cercle de Durkheim, parle d'affaires a trop nombreuses et
trop compliquées pour pouvoir être traitées par la commune
tout entière; huit personnes capables avaient alors été choi-
sies dans le sein de la commune et chargées d'agir en ses lieu
et place Ainsi, dans un grand nombre de circonstances,
l'intérêt qu'il y a à faire représenter une multitude par une
minorité vient tout entier de ce qu'un groupe plus restreint,
simplement parce qu'il est plus restreint et indépendamment
de toute supériorité qualitative, a plus de liberté dans ses
mouvements, plus de facilité pour se réunir, plus de préci-
sion dans ses actes.
La même cause peut ralentir les relations économiques
quoique, dans ce cas, le groupe n'ait pas besoin de se réunir
en corps pour agir. Tant que l'achat et la vente ont lieu direc-
tement entre producteurs et consommateurs, les échanges
sont considérablement gênés par cette nécessité où sont les
individus de se rencontrer en un même lieu. Mais une fois
que le commerçant commence à jouer son rote d'intermé-
diaire. une fois surtout que la classe des commerçants, systé-
matisant l'échange, met les intérêts économiques en contact
d'une manière continue, la cohésionsociale devient beaucoup
plus forte. L'organe nouveau, qui s'intercale ainsi entre les
éléments primaires du groupe, est. comme ia mer eutre deux
pays, principe d'union, non de séparation: car, par ta manière
dont elle agit, la classe des commerçants met chacun plus
88 L'ANNÉB <C9?
SOCtOMOQUE.
étroitement en rapports avec tous. De plus, en durant, cette
activité donne naissance à un système de fonctions
régulières
qui se balancent burmonlquement, sorte de forme abstraite
qui enveloppe les faits particuliers de consommation et
de production, mais les dépasse, comme t'Ëtat
dépasse les
et
citoyens l'Église les croyants. L'a cadre est ainsi constitué
danstequet les relations économiques se développent et qui
est susceptible d'une extension
presque indéfinie et la
manière dout ces relations se multiplient,
jointe a la persis-
tance de cette organisation à mesure
que le mouvement
économique s'accélère, prouve assez combien ces organes
spéciaux importent a la durée de l'unité collective et combien
sont insuffisantes, dans ce but, des inter-actions
purement
individuelles.
En second Heu. dans tous les cas ou la totalité du
groupe
doit se mettre en mouvement pour
chaque (tu sociale parti.
cutière. sans qu'aucune de ses parties soit encore différenciée, i
des tiraillements intérieurs ne peuvent manquer de se
pro-
duire, car, comme tous les éléments ont a pnoW la même
valeur et la même influence, tout moyen de décider entre eux
fait défaut. Cet état se trouve réalisé d'une manière tout à fait
typique dans ces sociétés où la majorité elle-même n'a pas
le pouvoir d'imposer ses volontés, où chaque
opposant a le
droit ou d'empêcher par son n'fo toute résolution commune
d'une façon générate ou de ne pas s'y soumettre personnelle-
ment. A ce péril qui menace jusqu'à l'unité intérieure du
groupe, la création d'orgaues spéciaux remédie, pour le
moins, de deux manières. D'abord, un corps de fonction- )
naires, une commission aura plus de connaissances spéciales <
que ta foule et, par ce moyen déjà, les frottements et tes con-
flits qui résultent simplement de l'incompétence seront
atténués. L'action est toujours plus une quand une connais-
sanee objective de la situation ne laisse pas de place aux
hésitations de l'agent. Mais un autre avantage, lié pourtant
au premier, est moins aisé à découvrir. Si une insufflsante
objectivité empêchesouvent la multitude d'agir avec ensemble
(car les erreurs subjectives sont en nombre infini, tandis
que la vérité, étant une, ne peut être l'objet d'opinions diver-
gentes), lacause n'en estpas toujoursla pureet simpte incom-
pétence. Un autre facteur, fort important, peut intervenir. La
division des partis, qui se fait d'abord sur un petit nombre de
questionsessentielles, s'étend ensuite à d'autres qui sont sans
– COMMENT
StMMEL. SOCtAtKS
MS FORNKi! 89
SEMAtNTtKSKEST

liens avec les précédentes, et l'accord des esprits devient


impossible eu principe. Ainsi, les partis politiques forment à
propos des questions religieuses, esthétiques, etc., des camps
opposés, quaud même leur opposition sur ce terrain serai
sans rapport avec l'objet de leur opposition première. Les
luttes des partis ont donc pour conséquence un monstrueux
gaspillage de forces qui cesse dès que, au lieu d'abandonner
toutes les questions aux discussions confuses de la foule, on
les fait résoudre, toutes les fois qu'elles s'y prêtent, par des
organes particuliers.
3" Hnfin, un troisième avantage de cette organisation con-
siste dans la meilleure direction qu'elle donne aux forces
collectives.
En eiïet, les foules, dans leurs manières d'agir, ne peuvent
jamais s'élever au-dessus d'un niveau intellectuel assez bas,
car le point où se rencontrent un grand nombre d'esprits ne
saurait être situé très au-dessus de celui où s'arrêtent les
plus médiocres. Qui peut le plus peut te moins, dit-on mais
la réciproque n'est pas vraie, et c'est pourquoi ce sont tes
éléments tes plus intérieurs, et non les plus élevés, qui
donnent le ton à l'ensemble. Cette règle, il est vrai, ne s'ap-
plique pas à ce qui concerne l'intensité de la vie afïec-
tive car, dans une foute assemblée, il se produit comme
une nervosité collective, une surexcitation mutuelle des indi-
vidus qui peut momentanément élever la passion commune
au-dessus de l'intensité moyenne des passions individuelles.
Mais les sentiments ainsi renforcés sont-ils ou non adaptés à
telle fin, sont-ils sages ou fous? C'est une tout autre question.
Le caractère plus ou moins intelligent des décisions prises
ainsi ne peut pas dépasser une moyenne où les mieux doués
viennent rejoindre les moins capables. La réunion des indi-
vidus peut bien accroltre les puissances du sentiment et du
vouloir, non celles de l'entendement. Sans doute, quand la
société, pour se maintenir, n'a besoin que des actions et
réactions directement échangées entre individus, il sunit que
chaque intelligence particulière donne tout ce qu'elle peut
donner. Mais il en va tout autrement quand te groupe doit
agir comme unité. Là, c'était d'un mouvement moléculaire,
ici, c'est d'un mouvement en masse qu'il s'agit dans te
ni désirable que les indi-
premier cas, il n'était ni possible
vidus se fissent représenter dans le second, cette représen-
tation devient possible et nécessaire. Quandun groupe étendu
<? t'AMNÊE BOCtOMOtOft:. )S9?
_uL_I--+u 1
veut conduire iui-meme et directement ses affaires, il est
indispensable que chacun de ses membres comprenne et
approuve, dans une certaine mesure, tes règles d'action qu'U
suit elles sont donc condamnées à une sorte de trivialité.
C'est seulement lorsque tes questions sont laissées à une
organisation composée d'un nombre restreint do personnes,
que ie talent peut se donner carrière. A mettre les choses au
mieux, comme tes aptitudes spéciales et tes compétences ne
sont jamais communes qu'à uue minorité,
quand elles se
produisent au sein d'une assemblée un peu vaste, it leur faut
conquérir do haute lutte une influence qui leur est accordée
sans conteste dans un organe difîërencié
Ces inconvénients réunis n'ont pas seulement pour résultat
de livrer une société, dépourvue d'organes dinérenciés, aux
causes de dissolution que toute structure sociale porte en
ette-mcme; ils la mettent aussi en état d'infériorité toutes les
fois qu'elle entre en lutte contre de puissantes individualités.
C'est co qui perdit ces vieilles corporations allemandes dont
nous parlions tout a l'heure elles furent incapables de tenir
tête à ces pouvoirs personnels qui, pendant ou
après le
moyen a):e, se constituèrent soit au centre du pays soit sur
des points secondaires. Elles périrent parce qu'il
leurmanqua
ce que seules des forces individuelles, constituées à l'état
d'organes sociaux, peuvent assurer à une société, je veux dire
la rapidité des décisions, la concentration absolue de toutes
tes puissances de l'esprit, et cette intelligence
supérieure
dont tes individus sont seuls capables, que ce soit l'ambition
qui tes pousse ou le sentiment de leur responsabilité.
Toutefois,it importe également à la conservation du groupe
que ces organes ne se spécialisent pas au point de parvenir à
une absolue autonomie. Il faut qu'on sente toujours avec
force, au moins d'une manière sourde, ce qu'ils sont vérita-
blement; à savoir, qu'ils ne représentent en définitive que dos
abstractions réalisées, que tes inter-actions individuelles en

(tt Sansdnutc.)'-st'hu~ n'' pa'!<n( ))M<)o))j'))tt< <tin<i.nttns an


<'W))<! f)<-f"t)'-)h'nnait-<.
)a ja)"nsi.;<'<)).-«' .<.n\)'~)Httutt'Htt')M<)Ut'n<'<'
(luidft'ruitlui f~t-ttit-.tuM'ti~ fj)t'ut)Mfou)' r"W)n<:tmt t tout jt)f:ftu<'nt
pM')t)H').suh't-it)t)i«''))<t')tt
Mntot-nt'tt)'<)''f{.'ni<nf~t in<!vit)tbt<;qu'un''
s'-it'xH'at)!.tt'.)it'<-«)))<)))'
lit !.ut'i<t)t)~i.
x'; )tMi" )t<t!iépuiser lu eut))-
ptuxiM d)' f<tit.<
h~tontjtx'i!.Qm'Uu ))u<'-ixitlitf'~titM<)<'<
)ux (ju'xtjet'ttt-
)')it. f<<<!n!nt'n)''nt.<t-f)n<-n:ts <)<'<
tuojoxM !nex d'ttutn's
i)t))))i<)m'nt))t
(-M~<< <)<)))t
t'int)uc(t'-cpt'ut, dans t'ftret lutal, ')i~it)tu)ft'ractiond)' la
))r<')))i'r<
StMHEt.. – LES FOHMESMCtAt-HS8<! MAtKTtKNSKUT 9<
COMMCNT

sont tout le contenu concret, qu'Ils sont simplement lu (orme


sous laquelle se sont pratiquement organisées ces forces éte-
meutaires, au cours de leur dévetoppement.Tout ce qu'ils
expriment, c'est la manière dont les unités primaires du
groupe mettent en ouvre leurs énergies latentes, quand elles
atteignent leur plus grande puissance d'action. Si donc, en
se différenciant, ils se détachent de l'ensemble, leur action,
de conservatrice, devient destructive.
Deux raisons principales peuvent déterminer cette trans-
formation. D'abord, si l'organe développe avec excès sa vie
personnelle, s'il s'attache moins si l'intérêt social qu'au sieu
propre, ses ettorts pour se conserver entreront natureiiement
en conflit avec ceux de la société. La bureaucratie nous offre
do cet antagonisme un exemple, relativement inutfensif, mais
significatif. Les bureaux, ces organes nécessaires de toute
administration un peu étendue, forment par eux-mêmes un
système qui entre souvent en collision avec les besoins
variables de la vie sociale, et cela pour plusieurs raisons.
D'abord, la compétence des bureaux ne peut s'étendre à la
complexité de tous les cas individuets, même de ceux qui sont
de leur ressort. Ensuite, entre le temps employé il mettre en
branle la machine bureaucratique et le caractère urgent des
mesures a prendre, il y a souvent une criante disproportion.
Si donc un organe, qui fonctionne si lourdemeut, en vient,
de plus, à oublier son rote d'organe et se pose comme une fin
en soi, alors il n'y a plus seulement différence, mais opposi-
tion directe entre ses intérêts et ceux de ta société. La partie
ne peut plus se maintenir qu'aux dépens du tout, et récipro.
quement. Onpourrait comparer sur ce point la forme bureau-
cratique aux formes logiques de l'entendement. Ceites-ci sont
à la connaissance du réet ce que cette-ta est si l'administra-
tion de t'Htat; c'est un instrument destiné a organiser les
données de l'expérience, mais qui, précisément, n'en peut ctre
séparé sans perdre tout sens et toute raison d'être. Quand la
logique, perdant le contact avec la matière des faits dont
elle n'est que l'expression schématique, prétend tirer d'elle-
meme une science qui se suffise,le monde qu'elle construit et
le monde réct se contredisent nécessairement.Par elle-mème,
elle est seulement un moyen pour arriver à la connaissance
des choses; si donc, oubliant son rote de moyen, elle veut
s'ériger enun système completde la connaissance, ettc devient
UHobstacle aux progrès de la science, comme la bureau.
92 L'AKSÉË tftf
SOCtOMOtOUK.
cratie, quand elle perd de vue sa véritable fonction, devient
une gêne pour la société dontetie est l'organe.
Le droit lui-même n'échappe pas toujours à cette excessive
cristallisation. Primitivement, il n'est rien de plus que la
forme des inter.actions individuelles; il exprime ce qu'elles
sont tenues d'être pour que le lien social puisse se maintenir.
A lui seul, il ne suffit nullement à assurer ia vie et, encore
moins, le progrès de la société; mais il est le minimum indis-
pensable il la conservation du groupe. Il résulte d'une orga-
Nisationa deux degrés. D'abord, des actes que les individus
réctamcut les uns des autres et qu'ils accotnpiissent réelle-
ment, au moins ia plupart du temps, se dégage ie précepte
juridique, forme abstraite de la conduite, qui en devient, dans
t'aveotr, la norme régulatrice. Muis ce premier organe, tout
idéal en quelque sorte, a besoin, pour pouvoir résister aux
forces qui t'assaiiient, de se comploter par un autre,
plus con-
cret et plus matériel. Des raisons purement techniques
mettent Ou à cet état d'homogénéité primitive où c'était soit
le p«<«w<7«M soit ia
foula assemblée qui disaient le droit;
dès lors, il devient nécessaire qu'une classe se constitue
pour
imposer ces normes aux relations individuelles. Matssi utile,
si indispensable même que soit cette double organisation, elle
expose les sociétés à un grave danger la fixité d'un tel sys-
tème peut se trouver en opposition avec la complexité crois-
sante des rapports individuels et avec les besoins plus mo-
biles de la société. Tant par sa cohésion interne que par le
prestige de ceux qui l'appliquent, le Droit acquiert plus que la
juste indépendance qui est conforme à sa fin par un véritable
cercle vicieux, il s'arroge ù tui-méme je ne sais quel droit à
rester tel que), envers et contre tout. Or il peut se faire qu'au
même moment la société, pour se maintenir, ait besoin que le
droit varie; c'est alors que naissent ces situations fausses dont
les formules connues ~'<«f/««<«, pereat M«K(/<M, ou ~«MMMm
~tM, iWMMM sont l'expression. C'est pour assurer au
t'M/'tn-M
droit la plasticité indispensable a son rôle d'organe,
qu'on laisse
au juge une sorte de marge dans l'interprétation et l'applica-
tion des lois; et c'est à la limite de cette marge que se trouvent
les cas où il faut résolument choisir entre le salut du droit et
celui de i'Htat. Nous n'en rappelons ici l'existence que pour
montrer, par un nouvel exemple, comment un organe social,
en s'immobilisant dans son autonomie, en se considérant lui-
même comme un tout, peut devenir un danger pour le tout.
StMMH.. COMM)!t<T
LES FORMESMCtALE!!SE MAMTHiKHHKT93

Qu'il s'agisse de la bureaucratie ou duformalismejuridique,


cette transformation d'un moyen en fin est d'autant plus dan-
gereuse que le moyen est, d'après les appareuces, plus utile à
la société. La situation sociale des militaires nous eu offre un
exemple. Instituée pour des fonctiousspéciaies, t'armée, pour
des raisons techniques, doit former un organisme aussi indé-
pendant que possible. Pour obtenir de ses membres les qua-
lités qu'elle réclame et, principalement, une étroite solida-
rité, il faut qu'elle tes sépareradicaiemeut de toutes tes autres
classes c'est à quoi servent et l'uniforme et l'honueurspécial
au corps des officiers. Or, quoique cette indépendance soit
exigée par l'intérêt gênerai, elle peut devenir tellement abso-
lue et exclusive que l'armée finit par constituer un État dans
l'État, détaché du reste de la nation, sans contact, par consé-
quent, avec la source dernière de sa force. C'est ce péril que
l'on cherche à conjurer aujourd'hui par l'institution d'armées
nationales; le service temporaire de tous les citoyens est cer-
tainement un bon moyen pour obliger l'armée à se renfermer
dans son rôle d'organe.
Mais pour éviter les antagonismes possibles entre le groupe
et ses organes, il ne suffit pas do ne laisser à ces derniers
qu'une indépendance limitée; il faut encore qu'en cas de
nécessité ils puissent rétrocéder ù l'ensemble la fonction
qu'ils en ont, en quelque sorte, détachée.
L'évolution des sociétés a ceci de particulier que leur con-
servation exige parfois la régression momentanée d'organes
déjà différenciés. Cette régression, toutefois, diffère de celle
que subissent les organes des êtres vivants ù la suite de chan-
gements dans leurs conditions d'existence, comme l'atrophie
des yeux chez les animaux qui restent longtemps dans des
lieux obscurs. En effet, dans des cas de ce genre, c'est l'inu-
tilité de la fonction qui entraîne la disparition progressive de
l'organe; au contraire, dans le cas des sociétés, c'est parce
que la fonction est nécessaire et l'organe insuffisant qu'il faut
revenir aux actions et réactions immédiatement échangées
entre les individus. Parfois même, ta société est, dès l'origine,
constituée de manière à ce que la même fonction soit alterna-
tivement exercée par les éléments primaires et par l'organe
différencie. Telles sont les sociétés d'actionnaires dans les-
quelles la partie technique des affaires est remiseà des direc-
teurs, que l'assemblée générale a pourtant le droit de déposer
et auxquels elle peut prescrire certaines mesures dont ils
M L'AK?)~ )m?
SMMt.OM~UE.
n'auraientmêmepas eu l'idéeou qu'Ils n'étaientpasautori-
sés à prendre spontanément. D'autres associations, plus
petites, tout enconfiantù nu président ouà un comitéle soin
de leurs atlaires, prennent leurs dispositionspour que, au
besoin,dogré ou de force,ces fonctionnairesse démettentde
leurs fonctionsdés qu'ils ne sontplus en état des'enacquitter.
Toutesles révolutionspar lesquelles un groupepolitique,
renversantson gouvernement,replace la législationet l'ad-
ministrationsous la dépendance immédiatedes initiatives
individuelles,sont des phénomènessociologiquesdu même
genre.
H est évident, d'ailleurs, que de pareilles régressionsne
peuvent se produire indifféremmentdans toute espèce de
sociétés.Quandles sociétéssont très grandesou très com-
plexes,ce retourdu gouvernementà la masseest absolument
Impossible.L'existenced'organesditïérenciésest un fait sur
lequel il n'y a plus moyende revenir; tout ce qu'onpeut
souhaiter,c'est qu'ils restentassezplastiquespour permettre
la substitutiond'autres personnesà celtesqui sont eu fonc-
tion, si cesdernièresse montrent incapables.Toutefois,ii y a
dessociétésqui sont déjàparvenues à un assexhaut dévelop-
pementet où, néanmoins,on observede cesfaits d'évolution
régressive,maisseulementa titre transitoireet tandisqu'une
organisation nouvelle est en train de s'élaborer. Ainsi.
l'égliseépiscopaie,dans l'Amérique du Nord, souffritjus-
qu'à la fin du siècle dernier de l'absence d'évoqué.L'ÈgUse
mère d'Angleterrequi, seule, pouvait en consacrer,se refu-
sait à le faire pour des motifs politiques. Alors l'urgence
extrême,le dangerd'une dispersionirrémédiabiedécidèrent
les lidèlesà se tirer d'anaireeux-mêmes.En i78t, ils nom-
mèrentdes dé!égués,prêtreset laïques,dont la réunioncons-
titua uue Églisesuprême,organe central et directeur de
touteslesL-'glises particulières.Unhistoriende l'époquedécrit
la chose ainsi Ce fut un spectacle vraiment étrange,et
sans analoguedans l'histoiredu christianisme,que cetteas-
sembléed'individusconstituantd'eux-mêmesuneunitéspiri-
tuellesousla pressionde la nécessite.Danstouslesautrescas,
c'est l'unitéde l'épiscopatqui faisaitcelle des fidèles;chacun
ressortissaitmanifestementà la communautédont i'éveque
étaitla tête. Ainsil'union des croyants, qui jusque-làavait
trouvé dans l'organisationépiscopale une sorte de substrat
indépendant,retournaà son essenceprimitive. Leséléments
StMMEL. OMOMST
LE"FOHMHX SE MA)!<T)E!<)<RST
MCtAt-KS 93
ressaisirent cette force
ressaisirentcette qu'ik avaient
torce qu'ilsavaient tiréed'eux-mêmes
ttr6ed'eux-m6meB et
et qui
qui
paraissaitmaintenantleur revenirdu dehors.
Lecasest d'autant plusintéressantquela qualiténécessaire
pour maintenirl'unité dos fidèles, révoquela reçoit par la
consécration,c'est-à-dire d'uue source qui paraît située en
dehorset au-dessusde toutes les fonctionssociales.Maisle
fait qu'elle a pu être remplacéepar un procédépurement
sociologiquemontre bien d'où elle venaiten réalité.Cefut
simplementune preuve de la merveilleusesauté politique
et religieusede ces populationsque la facititéavec laquelle
elles remplacèrentuneorganisationaussiancienne,en se res-
saisissantdes forcessocialesqui avaientservia la faireet en
les mettanten n~n'resansintermédiaire.Beaucoupdesociétés
ont, au contraire, péri parce que les relations entre leurs
forc-osélémentaires etlesorganesqui enétaientsortisn'avaient
pas gardéassezde plasticitépourque lesfonctionsde cesder-
niers pussent,en cas de disparitionou de décadence,faire
retourà la masse.

Les organes dinérenciés sont comme des substrats qui


aidentà la consolidationdesgroupes;ta société,en les acqué-
n.nt, s'enrichitde membresnouveaux.Mais,si l'ou se place
au pointde vue de la fonctionet non plus au point de vue
de l'organe,commentl'instinctde conservationdes groupes
détermine-t-illeur activité? C'est une tout autre question.
Quecette activité s'exercepar la masseindistinctedes indi-
vidusou par des organesspéciaux,c'est,à cet égard, un point
secondaire.Ce qui importeici, c'est la tonne généraleet le
rythmeselon lesquelsont lieu les processusvitauxde la so'
cieté. Deuxcas principaux se présentent.Le groupe peut se
maintenirsoit en conservantle plusfermementpossiblesest
formes, une fois fixées,de tellesortequ'il opposeune résis-
tance quasi matérielleaux dangersqui lemenacentet garde,
au milieudescirconstancesles plus variées,la mêmeconsti-
tutioninterne.Maisil peutarriverau mêmerésuttatcnvariant)1
ses formes,de tellesortequ'ellesrépondentaux changements
descirconstancesexternespar leurschangementsintérieurset
puissent,grâce à cette mobilité,se plier il tous les besoins.
96 L'AKKËB SOCtOt.Of.tQUK. tM'7

de nnnn6rido
Cette dualité rln
(~AttA rlunlifd
procédés 'n..nnll aon., e~ln~
correspond sans doute à quelque
trait générai de la nature, car on en retrouve l'aualogue
jusque dans )e monde physique. Un corps résiste &ta disper-
sion dont le meaaceut tes chocs, soit par sa dureté et une
cohésion tettement massive de ses cléments que l'assaut des
forces extérieures ue change rien a leurs rapports, soit par sa
plasticité et son élasticité, qui cède, sans doute. &la moindre
pression, mais, en revanche, permet au corps de reprendre
aussitôt après sa forme première. Étudions donc t'un et
l'autre de ces procédés d'auto.euuservation sociale.
Le procédé purement conservateur parait surtout convenir
aux sociétés faites d'éléments disparates et travaiiiées par des
hostilités latentes ou déclarées. t)ans ce cas, toute secousse,
d'où qu'elle vienne, est un danger; même tes mesures tes plus
utiles, s'il en doit résulter un ébramement quelconque,
doivent être évitées. C'est ainsi qu'un t~tat très compliqué et
dont l'équilibre est perpétuetiemeut instable, comme l'Au-
triche, doit être, en principe, fortement conservateur, tout
changement pouvant y entratuer des troubles irréparables.
C'est même, d'une manière générale, l'effet que produit i'hé-
térogunéité desétonents dans tes grandes sociétés, tant que
cette hétérogénéité ne sert pas, au contraire, a renforcer.
grâce à une harmonieuse division du travail, l'unité inté-
rieure. Le danger vient de ce que, dans les couchesdii!éreotes,
et parfois même de tendances opposées, dont est fait un
pareil État, le moindre ébrantement doit nécessairement avoir
tes contre coupsles plus variés, t'ius la cohésion intérieure du
groupe est faible, plus aussi toute nouvelle excitation de la
consciencesociale, tout appel a uxréformes publiques, risquent
d'augmenter encore tes oppositions; car il ya a milleroutes
par où tes hommes peuvent diverger tes uns des autres et,
très souvent, une seule qui leur permette de se rencontrer.
C'est pourquoi, ators mêmequ'un changement, par tui-méme,
pourrait être utile, it aurait toujours i'mconvéaient de mettre
en relief l'hétérogénéité des éléments, comme la simple pro-
longation de lignes divergentes rend plus sensible leur diver-
gence'.1.
t)) Quet')''))ran)en)t't)t))rm)H)t pur h"!t!t)''tn'.<~'r\'esouvent&f'itMfcr
ta <-t)ht'.<ion~<M-im)<!
t't. par fonsutjm.'nt. ?)ttatnt''nir)tMfot'tne!'')'' )'Ht!tt.
)')'t-t'))ti')nn't'st <)u'Nj)pa<t'ntf tvatit' <'u))()rt)n'
<4,'-t) lu ti't;)t;.Carta
ftM)'))'fait jtt\i''t'<ftt'ntttj))«')
aux <i<K'r!;it'quisottt'-«tutnanc!! aux <!)'
)t«.'nts,tn~xte )<'s du
p)t<o)())'t.«~ t{')" )" M'tt't c)t'' nift si bienen
tamitw h'urcatm'tcn'vitulfjue'la stftjU! Sofia)); annutM<)'e))e-nx'tt)e.
!<)MMEL.– COMMENTMS FORMESSOCfAtS! 8K MA)f)TtHN!<KNT97

Le même
Le m6me conservatisme
conservatisme s'impose toutes
s'hnnose toutes tes
les fois
fois au'une
qu'une
forme sociale survit tout en ayant perdu sn raison d'être et
quoique tes éléments, qui en étaient la matière, soient tout
pr'~ts &entrer dans des combinaisons socialesd'autres sortes.
A partir de ln fin du moyen âge, les corporations, en Atte-
magne, turent peu à peu dépouillées do teur influence et do
teurs droits par tes progrès des puissances centrales. Elles
perdirent ta force de cohésion qu'elles avaient eue jusque-là
et qu'elles devaient & l'importance de leur rôle social mais
elles en gardaient encore t'upparence et le masque. Dans ces
conditions, elles ne pouvaient attendre leur salut que d'un
exclusivisme étroit qui en fermâtl'accès. Eneffet, tout accrois-
sement quantitatif d'une société entratuo des modifications
qualitatives, nécessite des adaptations nouvelles qu'un être
social vieilli ne peut supporter, Les formesdes groupes dépen-
dent étroitement du nombre des éléments; telle structure qui
convient à nue société d'un effectifdétermine, perd sa valeur
si cet effectif augmente. Maisces transformations internes et
tout le travail nécessaire pourassitniler les membresnouveaux
ne vont pas sans de grandes consommationsde forces. Or des
groupes qui ont perdu toute signification n'ont plus de force
disponible pour une pareille tache: ils ont besoin de tout
ce qui leur en reste pour protéger contre tes dangers du dehors
et ceux du dedans la forme sous laquelle ils existent. Voilà
pourquoi les corporations s'interdirentd'accepter des membres
nouveaux. Ce n'était pas seulement pour fixer directement
tes dimensions du groupe en le limitant aux membres alors
existants et à leur postérité mais encore pour éviter ces chan-
gements de structure qu'implique indirectement tout accrois.
sement de grandeur et qu'une sociétésans raison d'être est
hors d'état de supporter. Quand une association quelconque
est dans cette situation, l'instinct de conservation suffit à la
rendre étroitement conservatrice.
Cette tendance se rencontre surtout dans des groupes inca-
pables de soutenir la concurrence de leurs riv aux.Car, pendant

'))t))A
ci' <t.<.<-<')ui lu f'ttd dMM~'MU! & ~avwla dit'ct'K'm'cd':s été-
<n''nts.Mai:! htou ';))<: tts~ fort'*pourtri'xnphL'r
))'<<)))«'. desdissensioM
alorsht XMctw
in(<'nt''<, Merct;la tot'tnotietiun'ju'' tousles(mtfM~t)ran-
tement''iMK'iitu'c. Quo<h'fuis cUfa ftonn~h' demi'ffcoup&de;)Htati!
tth'iiit~ Qt«' d~'ft"P~s. tn~tt' en dehortdt!!)soeieMx
int)?rieurc)))<'))t
()o)iti<jM)' se snnt trouv' )nu'tuit);deteuMconnitstntCrteur:dans
'-cUettttct'nttiv'n)) d'onbtier.pum'eptohaHte, )eurs (;aeMt)es ou
intestines,
'tf <cttiMCt'tnuttt'ir sans r'ii~tM~~H~y/
h
nuttKMNM.Ann~c~.u~ i~7. 7
(~
.M L'AKSKE MOOMOQUK. tM
u
quêteur forme est en train de muer, qu'ils sont en vole de
devenir, ils prêtent le ttanc aux coups de l'adversaire. C'est
dans la période intermédiaire entre deux états d'équitibro que
les Mcietés, comme les individus, sont le moins en état de se
défendre. Quand on est en mouvement, ou ne peut pas se
protéger de tous eûtes comme quand on est au.repos. C'est
pourquoi un groupe, qui se sent menace par ses concurrents.
évitera, pour se conserver, toute espèce de transformation.
~«f'~tt«OHMorcrfsera sa devise.
Nousarrivons maintenant à l'examen des cas où c'est, tout
au contraire, l'extraordinaire plasticité des formes sociales
qui est nécessairea leur permanence. C'est ce qui arrive, par
exemple, Aces corcles (tout l'existence, au sein d'un groupe
plus étendu, n'est que toiéree ou même ne se maintient que
par des procédés illicites. C'est seulement grâce A une
extrême élasticité que de pareilles sociétés peuvent, tout en
gardant une consistance suffisante, vivre dans un état de per-
pétuelle défensive ou même, à l'occasion, passer rapidement
de ta défensive à l'offensive et réciproquement. Il faut, en
quelque sorte, qu'elles se glissent dans toutes les fissures,
s'étendent ou se contractent suivant les circonstances et,
comme un fluide, prennent toutes les formes possibles. Ainsi,
les sociétésde conspirateurs ou d'escrocs doivent acquérir la
facutté de se partager instantanément et d'agir par groupes
séparés, de se subordonner pleinement tantôt à un chef et
tantôt a un autre, de conserver le même esprit commun, que
tous leurs membres soient immédiatement en contact ou non,
de se reconstituer sous une forme quelconque après une dis-
persion, etc. Yoità comment elles arrivent à se maintenir avec
une persistance qui faisait dire aux Bohémiens < Inutile de
nous pendre, car nous lie mourrons jamais. Ou a tenu le
même langage à propos des Juifs. Si, dit-on, le sentiment de
solidarité qui les rattache si étroitement tes uns aux autres,
si cet esprit d'exclusivisme à t'égard des autres cultes, qui
leur est propre quoiqu'il se soit souvent retaché, si tous ces
liens sociaux ont perdu, depuis l'émancipation du Judaïsme,
leur couleur confessionneite, c'est pour eu prendre une autre
c'est maintenant lecapitalisme qui les unit. Leur organisation
est indestructible précisément parce qu'elle n'a pas de formes
définies et tangibles. On aura beau, répète-t'on, leur retirer
!a puissance de la presse, celle du capital, l'égalité des droits
avec les autres citoyens; la société juive ne sera pas abattue
8!MME! COMMENT MB MHMKS !!OC!At.)!S 8K M.U!tTtËNH)!!<T 9H

n_- -_u.£o. 't_- 11. n_ -&at_


pour cela. Ou pourra bien lour enlever ainsi leur organisation
politique et sociale mais on restaurera du même coup leur
union confessionnelle.Cejeu de baseute, qui leur a réussi sur
plus d'un point, est parfaitement susceptible de se généraliser.
On pourrait encore aller plus loin et montrer dans ia plasti-
cité personneiie du Juif, dans sa remarquante aptitude à se
faire aux tacites les plus diverses, a s'adapter aux conditions
d'existence les plus opposées,comme un rollet individuel des
caractères généraux du groupe. Maisquoi qu'il ou soitet que
ces affirmations s'appliquent réetiement ou non à l'histoire
du peuple juif, le fuit qu'on a pu les croire vraies est déjà
pour nous un enseignement. H nous rappelle que lu mobilité
des formes sociales peut être une condition do leur porma-
nence.
Si nous cherchons maintenant quels rapports ces deux
procèdes contraires soutiennent avec les (orn)es les plus
générales de t'organisation sociale, nous ations voir se
dérouler une série d'oppositions caractéristiques. On sait que
l'existence d'un groupe est souvent fiée il celle d'uue classe
déterminée, au point de ne pouvoirse maintenirsi cette classe
ne se maintient et avec tous ses caractères spécifiques c'est
tantôt la plus élevée, tantôt la plus nombreuse, tantôt enfin
la classe intermédiaire qui joue ce rôle. Or, dans les deux
premiers cas. c'est l'immobilité des formes sociales qui s'im-
pose dans le troisième, c'est, au contraire, leur élasticité.
Les aristocraties sont gcneraiemcnt conservatrices. Suppo-
sons, en cifet, qu'elles soient réellement ce que leur nom
signifie, c'est-à-dire la domination des meilleurs; elles
expriment alors sous la forme la plus adéquate possible l'iné-
galité de fait qui existe entre les hommes. Or, dans ce cas
– je ne recherche
pas s'il s'est jamais réalisé, sauf très par-
tiellement l'aiguillon qui pousse aux révolutions fait
défaut; c'est, à savoir, cette disproportion entre la valeur
intfinsèque des personnes et leur situation sociale, qui peut
susciter aussi bien les plus nobles que les plus folles entre-
prises. Par conséquent, même dans cette hypothèse, c'est-à-
dire quand l'aristocratie est placée dans les conditions .tes
plus favorables où elle puisse être. elle ne peut durer qu'en
fixant d'une manière rigide et l'étendue de ses cadres et leur
mode d'organisation. Le moindre essai de dérangement mena-
cerait, sinon en reaUte, du moins dans l'esprit des intéressés,
cette rare et exquise proportion qui existe par hypothèse entre
100 L'AKSÉH SOCtOM'CICUE. t)!')T

les qualités des individus et leur place dans la société par


suite, un premier germe de révolution serait constitue. Mais
ce qui sera toujours, dans toutes tes aristocraties, tu causeprin-
cipale de ces révolutions, c'est que cette absolue justice dans
la distribution des pouvoirs ne se rencontre pour ainsi dire
pas. Quand une minorité est souveraine, la suprématie qu'elle
exerce repose presque toujours sur do tout autres principes
que cette proportiouuaiitô idéale. Dansces conditions,la classe
dirigeante a tout intérêt à éviter les nouveautés, car elles
éveilleraient les prétentions, justes ou soi-disant telles, des
classes dirigées, et il y aurait à craindre alors non seulement
un changement de personnes, mais, et c'est ce qui importe a
l'objet de notre recherche, un changement de constitution.
Déjà le seul fait que l'ou a parfois change violemment le
personnel gouvernementul avec l'appui de la masse, suffit a
donner l'idée que le principe même de l'aristocratie pourrait
être renverse pur la même occasion.
Ainsi, la meilleure façon de se maintenir, pour une consti-
tution aristocratique, est de s'immobiliser le plus possible.
Cette proposition ne s'applique pas seulement aux groupes
politiques, mais aux associations religieuses, aux sociétés
familiaies ou mondaines qui peuvent prendre la forme aris-
tocratique. Partout où elle s'établit, ce n'est pas seulement
pour le maintien de certaines personnes au pouvoir, mais
pour le maintien de son principe môme qu'un conservatisme
rigide est nécessaire.C'est ce que montre clairementl'histoire
des mouvements réformistes dans les constitutions aristocra-
tiques. Quand ces sociétés s'eiïorcent de s'adapter à des forces
sociales nouvelleset à un idéal nouveau, quand, par exemple.
elles adoucissent l'exploitation à laquelle étaient soumises
les classes inférieures, on réglementant les privilèges par la
loi au lieu de les abandonner M l'arbitraire, toutes «es
réformes, dans la mesure ou elles sont volontairement cou-
cédées, ont pour but final, non les changements mêmes qui
en résultent, mais la stabilité qu'elles donnent aux institu-
tions qui sont conservées sans changement. La diminution
des prérogatives aristocratiques n'est qu'un moyen pour
sauver le régime dans son ensemble. Mais une fois que les
choses en sont arrivées là, ces concessions sont, d'ordinaire,
insuffisantes. Toute réforme met en lumière de nouveaux
points à réformer et le mouvement, auquel on avait accédé
pour maintenir l'ordre existant, mène, comme par une
-– COMMENT
StMMEL. LESt-'OHMES
SOCtAUSS
SRMAtttTtf!NNt!!)T
~Ot

pente douce, ù la ruiue de tout le système. Dans ce cas, la


seule chance de salut est que, les prétentions nouvelles ne se
laissant pas réduire au silence, une réaction radicale se pro-
duise et qu'on revienne même sur les changements antérieu-
rement concédés. Le bouleversement générât auquel s'expose
ainsi t'aristocratie, quand elle se laisse modifier, explique
qu'un immobilisme à outrance soit pour elle le meilleur
instrument de défense.
Lorsque la forme du groupe est caractérisée, non par la
suprématie d'une minorité, mais par t'autonoinio de la
majorité, c'est encore une stabilité radicale qui en assure le
mieux la survie. Cela tient d'abord Mce que les masses,
quand elles forment une unité sociale durable, ont un esprit
essentiellement conservateur. Par là, elles s'opposent aux
groupes temporaires que forment les foules assembiées.
Cettes-ci, au contraire, montrent, dans leurs dispositions
comme dans leurs décisions, lit plus grande mobilité; a ta
moindre impulsion, cties passent d'un extrême à l'autre.
Mais quand la masse M'estpassons le coup d'une excitation
immédiate, quand une stimulation mutuelle de ses membres
et une sorte de suggestion réciproque ne la met pas dans un
état d'instabilité nerveuse qui read impossible toute direc-
tion ferme et la laisse à la merci de la première impulsion,
quand, en un mot, ses. caractères profonds et durables peu-
vent produire leurs cnets, alors on la voit dominée par la
force d'inertie; etto ne change pas d'ette-meme son état
de repos ou de. mouvement, mais seulement quand des
forces nouvelles entrent en ligne et l'y contraignent. C'est
pourquoi, quand des mouvements sociaux sont t'ouvre des
masses et leur sont abandonnes sans direction, ils vont faci-
lement jusqu'aux extrêmes, tandis qu'inversement un équi-
libre social qui repose sur les masses se rompt difficilement.
t)e là cet instinct salutaire qni les pousse, pour garantir leur
unité sociale contre la mobilité des circonstances, à garder
leurs formes telles quelles, dans une immobilité opiniâtre, au
lieu de les plier incessamment à tous les changements du
milieu.
Dans les sociétés politiques, une circonstance particulière
contribue à produire.ce résultat c'est que celles qui ont pour
base la classe la.plus nombreuse et où t'égattté des individus
est la plus complète, sont surtout des sociétés agricoles. C'est
le cas de la société de paysans que formait la Rome primitive
102 L'ANNÉE SOCtOMCt~UK. ttMff

n!
et dna
des nnm",unnn
communes d~lmmmna
d'hommes lil.wna
libres ~nJnm nn.
qu'on rencontre duns
l'ancienne Germanie. Ici, la matière de la vie sociale déter-
mine la manière dont la forme se comporte. L'agriculteur est
un conservateur a pn'o~. Son travail, pour produire ses fruits,
a besoin de temps et, pa)' conséquent, d'institutions durables
et d'une stabilité parfaite. L'impossibilité de prévoir ces
caprices de la température (tout il est si étroitement dépen-
dant, l'incline-vers une sorte de fatalisme qui se traduit par
une résignation patiente vis-à-vis des forces extérieure!; plu-
tôt que par de la dextérité à éviter ieurs.coups. Sa technique,
d'une maniére.générale, no peut répondre aux variatious du
milieu par des variations correspondantes avec ia prompti-
tude dont sont tapantes l'industriel et le commerçant; et
ainsi, par suite des conditions mêmes de l'art agricole, une
organisation sociale qui s'appuie sur une vaste classe d'agri-
culteurs tend naturellement à i'immobiiité~-
Mais il en est tout autrement quand la classe directrice.est
la ctasse moyenne et.que d'elle dépend la forme du groupe.
La raison en est dans une particularité qui lui est spéciale
seule, elle a, à la fois, une limite supérieure et inférieure.
Par suite, elle reçoit sans cesse des éléments de la classe
inférieure comme de la classe supérieure et elle en donne à
son tour et à l'une et à l'autre.' II en résulte qu'elle a pour
caractéristique un état de flottement- qui fait que, pour se
maintenir, elle a surtout besoin d'une grande aptitude à
s'adapter, à varier, à se plier aux circonstances car c'est à
cette condition qu'elle peut diriger ou prévenir les inévitables
mouvements de l'ensemble, de manière à garder intact, maigre
les changements qu"elle traverse, tout l'essentiel de ses
formes et do ses forces.
t!ne société do ce genre a pour caractère distinctif la coHft-
?))<)< Elle n'implique, en enet, ni une égalité absolue entre
les individus, ni la division du groupe en deux parties radi-
calement hétérogènes, l'une supérieure et l'autre inférieure.
La classe moyenneapporte avec e,lle un élément sociologique
entièrement nouveau. Ce n'est pas seulement une troisième
classe ajoutée aux deux autres et qui n'en ditïere qu'en
degrés, commeelles diffèrent elles-mêmes l'une de l'autre. Ce
qu'elle a de vraiment original, c'est qu'elle fait de continuels
échanges avec les deux autres classes et que ces fluctuations
perpétuelles effacentles frontières et les remplacent par des
transitions parfaitement continues. Car ce qui fait la vraie
– COMMENT
MMMËL. LESt'OHMHS
SOCtALK!)
SEHAtNTttiSfEKT
't0~
continuité de h) vie collective, ce n'est pas que les degrés
de l'échelle sociale soient peu distants les uns des autres
ce qui serait encore de la discontinuité – c'est que les indi-
vidus puissent librement circuler du haut ou bas de cette
échelle. A cette seule condition, il n'y aura pas de vides entre
les classes. H faut que les carrières individuelles puissent
successivement passer par les plus ltitutes et par les plus
basses situations, pour que le sommetet in base do la hié-
rarchie soient vraiment reliés l'uu a l'autre. Hest aisé de voir
qu'it en est de même à l'intérieur de la classe moyenne elle-
mémo; qu'il s'agisse de considération, d'éducation, de for-
tune, do fonctions, les conditions n'y sont continues que dans
ia mesure où une même personne peuten changer.facitement.
Telles sont les raisons qui font qu'une société où lit classe
moyenne est prédominante se caractérise par une grande
élasticité c'est que, les éléments y étant très mobiles, il lui
est plus facile dese maintenir en variant si le milieu varie,
qu'en restant obstinément immuable. Inversement, on pour-.
rait montrer qu'un groupe où les conditions sont nombreuses
et rapprochées les unes des autres doit rester plastique et
variabie, s'il ne veut pas qu'il se produise d'importantes rup.
tures dans sa masse. Là. oùles situations possibles sont inn-
uiment diverses, les chances pour que chacun soit ù sa véri-
table piaco sont bien moindres que dans une société ou il
existe un système de classes nettement définies et où, par
suite, chaque individu est encadré dans un groupe étendu et
à l'intérieur duquel ii peut se mouvoir avec une certaine
liberté. Dans ce dernier cas, en enet, comme la société ne
contient qu'un petit nombre de conditions trancliées,
chacun, au moins en règle générale, est naturetiement
dressé eu vne du cercle particulier dans lequel it doit
entrer. Car comme ces cercles sont assez vastes et n'exigent
de teurs membres que des qualités assezgénérâtes. l'hérédité,
l'éducation, l'exemple snnisent a y adapter par avance les
individus, ttse produit ainsi une .harmonie préétablie entre
les qualités individuelles et tes conditions sociales. Maista
au contraire où, grâce à l'existence d'une classe moyenne, il
y a toute une gamme de situations variées et graduées, ces
mêmesforces ne peuvent plus prédéterminer tes particuliers
avec la même sûreté; l'harmonie qui, tout à l'heure, était
préétablie, doit, maintenant, être retrouvée a p<M<M'<on et,
par des moyens empiriques pour cela, il faut que chaque
104 L'ARMÉE ~)7
SOC!OLOC)QUR.
:~jt..t.).
individu t
puisse sortir de sa situation si elle ne lui convient
pas et que l'accès de celle à laquelle il est apte lui soit ouvert.
Par conséquent, dans ce cas, ce qui est nécessaire au main-
tien du groupe, c'est que les frontières des classes puissent
être aisément déptacées. constamment rectifiées, que les
situations n'aient rien de définitivement fixé. C'est seulement
de cette manière que chacun pourra arriver a rencontrer la
position spéciale qui convient à ses qualités spéciales. C'est
pourquoi une société où la classe moyenne domine doit
empioyer, pour se conserver, des procédés contraires à ceux
qui servent a une aristocratie.

V!I

Dans ce qui précède, ia variabilité des groupes a été étudiée


comme un moyenpour eux de s'adapter aux nécessités de ia
vie elle consisteà plier pour empêcher que tout ne se brise,
et cette souplesse s;impose toutes les fois que les .{ormes
sociales ne sont pas assez fortement consolidées pour défier
toutes les forces destructives. La société répond ainsi aux
variations qui se produisent dans les circonstances, tout en
maintenant sou existence propre. Mais on peut se demander
maintenant si cette aptitude à passer par des états variés, et
même opposés, ne sert a la conservation du groupe que
comme un moyen do réagir contre les changements du
milieu, ou si elle n'est pas également impliquée dans le prin-
cipe même de sa constitution interne..
En effet, abstraction faite de ce que peuvent être les cir-
constances extérieures, ta santé du corps social considérée
comme le simple développementde ses énergies internes, ne
réctame-t-eiie pas sans cesse des changements de conduite,
des déplacements d'intérêts, de continueiies variations de
formes? Déjà les individus ne peuvent se conserver qu'en
changeant; ils ne maintiennent pas l'unité de leur vie par un
équilibre immobile entre le dedans, et le dehors, mais, pour
des raisons d'ordre interne, ils sont déterminés à un mouve.
ment perpétuel qui les fait passer incessamment non pas seu-
lement de l'action à la passion et réciproquement, mais
encore d'une formè de l'action ou de la passion à une autre.
De même, il n'est pas impossible que les forces d'où résulte
– COMMEST
StMHKL. tE8 FORMES
HMtALES
SBMAttn'ttSNttHST
108
la cohésion de la société aient besoin de changement pour
garder toute leur action sur les consciences. C'est ce qu'on
peut notamment observer toutes les fols que l'unité collective;
est devenue trop étroitement solidaire d'un état social détet-
miné, ce qui arrive par cela seul que cet état dure depuis~
très longtemps et sans changement. Qu'un événement exté-'
rieur vienne alors à l'ébranler, et l'unité sociale risque d'être
emportée du mêmecoup. Parexemple, lorsque les sentiments
moraux ont été, pendant longtemps, intimement unis cer-
taines conceptions religieuses, le libre examen, en ruinant la
religion, menace la morale. I)e même, l'unité d'une famille
riche se brise parfois, si cette famille s'appauvrit, comme,
d'ailleurs, l'unité d'une famille pauvre qui vient il s'enrichir.
Me même encore, dans un, État jusqu'alors libre, les'pires
divisions éclatent si la liberté vient à se perdre (qu'on se
rappelle Athènes à l'époque macédonienne) mais le même
phénomène se produit dans les États despotiquesqui devien-
nent libres brusquement, comme i'histuire des révolutions
l'a souvent prouvé. Il semble dpncqu'uue certaine variabilité
empêche le groupe do se solidariser trop complètement avec
telle ou telle particularité. Les changements fréquents par
lesquels il passe, l'immunisent, pour ainsi parler; beaucoup
de ses parties peuvent tomber, sans que le nerf de la vie soit
atteint, sans que le maintien du groupe soit en péril.
Xous sommes, il est vrai. porté à croire que la paix, l'har-
monie des intérêts servent seuls dansce but; toute opposi-
tion nous paraît créer un danger et gaspiller stérilement des
forces qui pourraient être employéesà une ouvre positive ae
coordination et. d'organisation. Et cependant, l'opinion coq-
traire semble mieux fondée les sociétés ont intérêt à ce
que
la paix et .la guerre alternent d'après une sorte de
rythme.
Cela est vrai-dés guerres étrangères succédant &des périodes
de paix Internationale, comme des guerres intestines, des
conflits de partis, des oppositions de toute sorte qui se font
jour au sein même de l'entente et de l'harmonie toute la
différence entre -ces deux ordres de. faits, c'est que, dans le*e
premier cas, l'alternance est successive,dansle second, simul-
tanée. Mais le but poursuivi est le même; seuls, les moyens
par lesquels 11se réalise sont .diiïérents.La lutte contre une
puissance étrangère donne au groupe un vif sentiment de
son unité et de l'urgence qu'il y a à la défendre envers et
contre tout. La commune opposition contre un tiers agit
~S L'ANNÉESOCtOtOOQUË. XaT

comme principe d'union, et cela beaucoup plus sûrement


que
la commune alliance avec un tiers; c'est un fait
qui se véri-
ne presque sans exception. !t n'est, pour aiusi dire,
pas de
gMUpe, domestique, religieux, économique. politique, qui
fuisse se passer complètement do ce ciment. La conscience
Htus nette qu'une société prend do sou unité, par l'effet de lu
tutte, renforc~cette unité,.et réciproquement. Ou dirait que,
pour nous autres hommes, dont fi facutte essentielle est de
percevoir des difïérences'.le sentiment de ce qui est- un et
harmonique ne puisse prendre de .forces que par contraste
avec le sentiment contraire. Mais les antagonismes qui
sépa.
t'eut tesétémeuts mêmes du groupe peuvent avoir les mêmes
effets; ils donnent plus de fetief a son unité, parce que, eu
teudant, eu resserraut les liens sociaux, ils tes rendent plus
sensibles, Il est vrai que c'est aussi un moyen de les briser;
mais tant que cette limite extrôtne n'est pas atteinte, ces con-
ilits, q.ui, d'ailleurs, supposent un premier fonds do solidarité,
lit rendent plus agissante, que les sujets eu aient ou non cons-
cience. Aiusi, les attaques auxquelles les différentes
parties
d'une société se livrent les une'; contre les autres ont souvent
pour cqn~quence des mesures législatives qui sont destinées
a y mettre un terme et qui. tout en ayantpour origine
i'egofstHc
et la guerre, donnent ù ia communauté un sentiment plus
vit de son unité et de sa soiidaritt' Aiusi encore, ia coucur-
rence économique, par les actions-et les réactions
qu'elle
détermine, met plus étroitement eu rapports les clients et les
marchands même qui so font concurrence, et elle accroit leur
dépendance réciproque. Ëutin &tsurtout, le désir de prévenir
les oppositions-et d'en adoucir les conséquences conduit à
des ententes, a des conventions .commerciates ou autres qui,
quoique nées d'antagonismes actuets ou latents, contribuent.
d'une manière positive a la cohésion du tout.
Cette doublefonction de l'opposition, selon qu'elle est tour-
née vers le dehors ou vers le dedans, se retrouve dans les
relations les plus intimes des particuliers et elle y a tous les
caractères d'un phénomène sociologique; car les individus
eux aussi ont besoin do s'opposer pour rester unis. Cette
opposition peut so manifester également, ou bien par te con-
traste que présentent les phases successives de leur corn'
merce, ou bien par la manière dont le tout qu'ils forment
sedittérenciedu milieu moral qui les enveloppe. On a sou-
vent dit que l'amitié et l'amour ont besoin parfois de diC6.
SMM~. COMMENT M!St'OKHHS80CtAt.KS
!;CMMSTfËKNEKT ~O?
rends, parce que la réconciliationleur donnetout leur sens
et toute leur force.Maisces mêmesassociations, sans présen-
ter de ces dit!érencesexternes, peuventdeveuir plus cons-
cientesde leur bonheur,en s'opposantau restedu monde,
Atoutcequi s'y passeet à toutce qu'on ou sait.Cetteseconde
formed'oppositionest certainementta plus hauteet la plus
efficace.La première a d'autant moins de valeur que les
périodesattentéesd'accordet de conflitsont plus courteset
se suiventde plus pn''s. A son degré te plus bas, elle est
caractéristiqued'un état où la nature des relationsinternes
entre les individus n'a, pour ainsi dire, plusd'importance,
où leurs dispositionsrespectivessontà la mercides accidents
extérieurs,qui tantôt les rapprochentet tantôtles tournent
les uus contreles autres. Et cependant,mêmealors, ellea
quelquechosede profondémentutile à la conservationdu
lieu social..Carlà où les parties sont rarementincitéesa
prendre consciencede leur solidaritéet où, par suite,elles
n'enont qu'un faiblesentiment,rienne peutêtreplus propre
à l'éveiller que ces chocs et ces conflitsperpétuels,suivis
de perpétuellesrécoucitiatiMts. C'estde la lutte mêmeque
natt l'unité.
Nousrevenonsainsi au pointde départ de ces considéra-
tions.Le fait que l'oppositionpeut servirit la conservation
du groupeest t'exemptele plus topiquede futilité que pré-
sente, dans ce même but, la variabilitésocialeen générât.
Cars'il est vrai que l'antagonismene meurt jamais çompte-
tement,il est cependantdanssa naturedo n'êtrejamaisqu'un
intervalleentre deux périodesd'accord. Par définition,ce
n'est qu'unecrise,aprèslaquellel'unionsocialesereconstitue
par suite des nécessitesmêmedo la vie; et il eu est ainsi
sans doute, parce que, ici commepartout, ce qui dure n'a
de reliefet ne prendtoutesa forceau regardde la conscience
que par contrasteavec ce qui change. L'unitésociale est
l'étémentconstantqui persiste identiqueà soi-même,alors
quelesformesparticulièresqu'ellereçoitet lesrapportsqu'elle
soutientavecles intérêtssociauxsontinfinimentmobiles et
cette constanceest d'autant plus accuséeque cettemobilité
est plusgrande.Par exemple,la soliditéd'une union conju-
gale varie certainement,ce/MMy<«'<&)M, suivantla diversité
plus ou moinsgrandedes situationspar lesquellesont passe
les époux car ces changementsmettenten sailliel'inaltéra-
bilitéde leur union.11est dans lanature deschoseshumaines
'!08 L'AXSÈRSOCtOMUtOUE.
~M~
-&
que les contrairesse conditionnentmutuellement.Si la varia-
bilité importetellementà la conservationdu groupe, ce n'est
pas seulementparceque, il chaquephase déterminée, l'unité
s'oppose à ces variationspassagères,mais parce que, dans
toute la suite deces transformations,qui ne sont jamais les
mêmesd'une foisà l'autre, elle seule se répète sans change.
ment. Elleacquiert ainsi, vis-à-visde ces états discontinus,
ce caractèrede fixitéet cetteréalité que la vérité possèdepar
oppositiona l'erreur.La véritén'a pas, dans chaque cas par-
ticulier, une sorte de privilège,un avantage mystique sur
l'erreur; et oependantelle a ptus de chancesde triompher.
pour cette raison qu'elle est une.tandis que les erreurs pos-
sibles à propos d'un mêmeobjet sont en nombreinfini. Elle
revient doncplus souventdans le cours des pensées, Mon
ox*'
<'<'<T<'tu'
<< ~t<<r«<,MtaM ~p
~Mc fn-< (.M~-«ct<<<'<C'est
ainsi que l'unité socialea des chancesde se mainteniret de
se renforceril traverstouteslesvariations,parceque celles-ci
diffèrent toujours l'une de l'autre, tandis qu'eito réparait
toujours identique.Par suitede cette dispositiondes choses,
lesavantagesdela variabilité,qui ontété-énumérespiushaut,
peuventêtre conservés,sans que les variations qui se pro-
duisent entamentsérieusementle principe mêmede l'unité.
Nous terminonsici cetteétude qui, de par la nature même
du sujet, ne vise nullementà être complète, mais
plutôt
pour but de donner un do
exemple la méthode,qui seule,
d'après nous,peut fairede la sociologieunescienceindépen-
dante, et qui consisteà abstrairela tournede l'associationdes
états concrets, des intérêts, des sentiments qui eu sont le
contenu. Nila.faim.ni l'amour,ni le travail, ni la religiosité,
ni la technique,ni tes produitsintettectuetsne sont par eux-
mêmesde naturesociale;maisc'est le fait mêmedo l'associa-
tion qui donneà toutesces choses leur réalité. Quoiqueia
réciprocitéd'action,l'union, l'opposition des hommesn'ap-
paraissejamaisquecommela formede quelque contenucon-
cret, ce n'est-cependantqu'cn.isotantcette forme par,l'abs-
traction, qu'on pourra constituer une sciencede la société,
au sensétroit du mot. Que le contenu réagissetoujours sur
le contenant,cela ne changerien à la question. L'étudegéo-
métrique des formesdes cristaux est un problème dont ta
spécificitén'est nullementdiminuéepar ce fait que ta manière
dont cesformesse réalisentdans les corps particuliersvarie
suivant la constitutionchimiquede cesderniers. La quantité
!<)X)t6t.. COMMHSTLES t'OOMK!!SOCtAt-M SE MAtNTtEttNENT ~09

de problèmesque ce pointdo vue permet de dégager paratt


hors de doute. Seulement,étant donné que, jusqu'àposent,
on n'a pas encore su le faire servir à déterminerun champ
d'études qui soit sprint à la sociologie,il importe avant
tout d'habituer les esprits a discerner,dans les phénomènes
particuliers,ce qui est proprementsociologique et ce qui res-
sortità d'autresdiscipiines;c'est lu seuletnaniored'empêcher
notre sciencede glauer perpétuellenietit dans !e chantp des
voisins.C'està ce but propcdeutiqueque repondtu présente
recherche.
(!. StMME).
DEUXIÈME PARTIE
ANALYSES

PnEMtÈM)-:SECTION

SOCIOLOGIE GMNHMALH

PnrM.tmL'GLÉ

Que peut être une sociotogie proprement dite? C'est ce que


nous uous proposons de meUre en lumière, en résumant les
récentes publications de sociologiegénérale. Nous irons doue
des auteurs qui entendent ta sociologie~o .wt.f«. comme une
philosophie (tes sciences sociales particulières ou comme une
philosophie de l'histoire, à ceux qui l'entendent ~'«~o wn~x,
comme une science spéciale, devant se dégager des analogies
biologiques pour envisager directement les phénomènes qui
lui appartiennent en propre, – phénomènes qui sont encore
en leur fond, sans doute, des phénomènes psychologiques,
puisqu'ils résultent de )' c inter-uctioa des consciences indi-
viduelles, mais qui sont du moins des phénomènes psycholo-
giques d'une espèce spéciale, puisqu'il faut, pour en rendre
compte, considérer les consciences, non pas à part et en tant
qu'individueDes, mais dans leurs rapports mêmes.
Ainsi s'expliquent les trois ctasses d'tBuvressocioto~iques
que nous distinguons et l'ordre danslequel nous les rangeons
) ° sociologie philosophique 8"sociologie biologique 3" so-
ciologie psychologique et spécifique.

t. – 8Ut:tO).0<URt'tUt.OSOt'ntQL'K

C. TARDE.– L'opposition universelle. Essai d'une théorie


des contraires. 4!!)-vmp., Alcan, Paris. 1897.
C'est par accident, si t'ou peut dire, et sans la préméditation
de son auteur que le nouveau livre de M. Tarde revient à la
!!32 t'AtMÊE SOCIOLOGIQUE.tX97

sociologie. M. Tarde se proposait d'échapper aux < questions


sociales en suivant, où elle voudrait le conduire, 1 idée
généraie d'opposition elle n':) pas tardé A le ramener a ses
préoccupations habitue))es, accident heureux et d'uilleurs
facile a prévoir.
Xous laisserons les mathématiciens, les physiciens, les
naturalistes et les psychologues suivre pas a pas l'auteur dans
cette < promenaded'esprit' pendant iaquelie il regardepasser,
a tous les étages superposes de la réaiité physique, vivante,
mentate, !a procession de couples enchaînés de contraires qui
s'y déroute eterneiiement Ce qui importe à lu sociologie,
c'est la défiance que cette revue générale doit lui inspirer.
selon l'auteur, tant a l'égard de la nécessité qu'à l'égard de la
fécondité de l'opposition. Trop souvent, qu'il s'agisse des
quantités imaginaires,de la loi de la reaction égale l'action,
ou de l'anabolisme et du eatabolisme, on a forgé des opposi-
tions toutes subjectives, pour repondre au < vœu de symé-
trie. on a imaginé que toute évolution était suivie d'une
dissolution inverse, que tout progrès était du à l'entrecboc
soit physique, soit physiologique, soit mental: l'examen
rapide des faits sur lesquels on a bâti ces hypothèses conduit
M. Tarde à cette conclusion qu'on a fait, à tort, honneur à
l'opposition de ce qui est i'œuvre de l'adaptation et de la
variation.
La même conclusionse dégagera, plus évidente encore, des
faits sociaux directement interrogés. Examinons en enot les
difîérentes espècesd'oppositions sociales, les oppositions c de
séries celles de degré et enfin, les plus importantes à
vrai dire. racines des précédentes, les oppositions de sens
Parce que la croissanced'une langue, d'une religion, d'une
constitution s'est effectuéesuivant un certain ordre, doivent'
elles nécessairement décroître dans l'ordre inverse ? En un
mot, les évolutionssociales sont-elles assujetties, comme on le
croit souvent sur la foidcl'idéed'opposition.àla réversibilité?
– Au contraire, la réversion n'est dans tous les ordres de
phénomènes sociaux qu'un accident ou, pour mieux dire,
qu'une apparence; et plus leur tracé est logique et orienté
vers un but, moins il y a de chances pour qu'ils reviennent
sur leurs pas (p. 303).Imagiue-t-on que, dans une soctéte en
train de se dissoudre, la perte graduelle des connaissances et
des théories s'opérerait dans l'ordre précisément inverse de
celui de leur acquisition? Le travail de décomposition des
ANALYSES.–SOCtOLOGtKPMX.OSOPMtOUE ~3

formesgrammaticaleset syntaxiquesn'est,do même,nulle-


mentt'inversede celuiqui lesa etaboréeit.Lasuccessiondes
nuancesde beautéqu'ongoûte cheztes grandsécrivainsou
des aspectsde vérité qu'on découvrechezles grands phito.
sopttesNe parait pas susceptiblede se retourner.C'estenfin
s'en teniraux apparencesou mêmeaux coïncidences de mots
que de croire que les transformationséconomiquesnous
ramènentau collectivismeou au troc primitif. Eu réalité,
l'ordre des phénomèneséconomiques,commecelui de tous
les phénomènessociaux,est déterminépar l'ordrede l'appa-
rition des découverteset par celuide leur propagationimi-
tative(p. 324) or it n'y a aucune raison pour que les imi-
tations cessent,ou pour que les inventionsse perdentdans
l'ordreinversede celui de leur adoptionou de leur création.
Cesont les initiativesfécondeset leur rayonnementimitatif,
et non les oppositionsstériles, qui mènent révolution ou
plutôt les évolutionssociales(p. 33~).
La régressionest-elleplus nécessaireque la réversibilité?
Considéronsles quantités sociales,et demandons-nouss'il
est indispensable,commel'idée d'oppositiontendrait à te
faire admettre,qu'après avoircra ellesdécroissent? Sui-
vantli. Tarde,les deuxprincipalesquantitéssocialessonties
< lumières. ettes richesses ou encoreta < vérité dis-
tinctede la convictionpersonnelle,et ta < valeura, distincte
de l'utilité individuelle.Eties sont vraimentsocialesen ce
sens qu'onpourrait, mômes'it n'y avaitrien dans les indivi-
dus eux-mêmesqui tut mesurable,mesurerau nombredes
individus qui s'entre-renëteutles variationspropres de la
valeur ou de la vérité.Si la valeur est, en fait, plusaisée à
mesurer, c'est que la naturemêmedes richesses,qui ne peu-
vent s'échangerquemoyennantlesacrificedesunesauxautres,
a exigéta constitutiond'uumètresur lequelou s'accordepour
régler l'étenduede ce sacrifice,tandisque la naturedes véri.
tés, qui s'additionnent(ouse contredisent),maisne s'échan-
gentpas,n'a pas faitéprouverle besoind'unemesurequi leur
soit commune(p. 340). Il n'empêcheque la quantité des
vérités est au moins aussi importanteaux sociétésque la
quantité des richesses.L'unecommel'autretendent norma.
lementà s'accroître,en vertu de cette ambitionuniverselle
qui poussetoute inventionà se propageret, autant qu'il est
en ette, à conquérir le monde.Si elle est arrêtée dans sa
marcheconquérante,ce n'estnullementen vertud'une néces-
H.BcMtMM.–AnnM'Mtwt.tjM~. <
D)4 t/AMtÉE tM)7
<=O~OMG)<));K.
sité interne. qui la contraindrait & décliner par cela seul
qu'elle a progressé, c'est qu'elle est heurtée et refoulée par
quelque autre lu décadencede la première est la conséquence
et l'image t't'tn'ersec, non de sou propre progrès, mais du pru.
grès de lit secoude. C'est ainsi que le déclin de la consomma-
tion du seigle correspond au progrès de la consommation du
froment, et ledéctin de ta marine a voile, ait progrès de ta
marine à vapeur. En un mot, qu'il s'agisse du progrès des
lumières ou de celui des richesses, la progression a sa cause
interne; ta régression,quand ettea lieu, a une causeextérieure.
La progression est la régie, ta régression l'accident p. 348~.
Si l'on passe enfin de ta considération de ces oppositions de
degré à celle de ces oppositions de sens dont toutes les autres
dérivent, fuut-it croire que la lutte sous toutes ses formes est
absolument nécessaire et, en tout cas, éminemment utile à ta
vie des sociétés? Question vitale, puisqu'elle nous amène a
nous interroger sur la valeur de la concurrence et de lit guerre.
Et d'abord la concurrence ne crée rien par elle-même. C'est
par l'invention des procédés nouveaux, qui n'est pas toujours
déterminée par la concurrence, – l'invention de la charrue,
par exemple. n'a pas jaitti certainement de la concurrence des
agriculteurs primitifs, –que progresse l'industrie (p.~70). Et
c'est encore ta propagation imitative de ces procédés comme
des besoins qu'ils suscitent qui rend !a concurrence possible.
Sans l'imitation et d'abord sans l'invention imitée, dues, en
somme, non à la mêlée des égoïsmes, mais à l'instinctive
sympathie qui rend l'homme sociable, la concurrence est
impuissante ou malfaisante, tandis que, même sans concur-
rence, l'invention et l'imitation sont toutes puissantes et
finalement bienfaisantes (p. 37~. Loin, par suite, que le pro.
grès ne puisse s'accomplir que par l'exaspération de la con-
currence et l'entrechoe des intérêts, le progrès consiste à
substituer, à la rivalité confusedes intérêts qui s'opposent, la
délimitation précise des droits qui s'accordent.
Si !a lutte, sous cette forme atténuée qui est la concurrence,
nous paraitdéja inféconde en elle-même, que dirons-nousde
la guerre < confluent et consommation de toutes les opposi-
tions sociales poussées à bout et s'exprimant par toutes les
oppositions physiques '? – A un certain point de vue, la
guerre apparaît bien comme une osuvre directe de la sociali-
sation elle-même. Unepassion commune de nombre d'indivi-
dus pour un même objet, et la conscienc vive de cette com-
A~LYStM. – SOCMt-OGtKt')t)MMO('tUQU)! ~t8

munauté de passions, telles paraissait'ntbtcuétrc, encuft, tes


conditions de lu conversiondes conflits d'individus en conflits
de masses. Mais pourquoi ces conflits sociaux prenm'ut.its,
encore aujourd'hui, la forme de guerres proprement dites
fi n'y a là, suivantM.Tardp.aucnne nécessite, mais uneha))!-
tude. Ouse but parce qu'on s'est battu. La guerre est une sur-
vivance (p. 3!t0). Mais, du moins A l'origine, ce proccdé sau-
vage n'était-it pas nécessaire? Sans la guerre, mère de la dis.
ciptine, le progrès humain était-il possible? – Pourquoi
non ? La religion, aussi bien et mieux que la guerre, fait les
sociétés. Si t'humanité.autieude préférer décidément la pre-
mière a la seconde, a usé à ta fois de l'une et de l'autre par
un compromis fâcheux, c'est là, suivant fauteur, une sorte
d'accident qu'on peut supprimer par la pensée sans avoir à
supposer du même coup ta marche des sociétés arrêtée.
En fait. ta où la guerre n'entraîne pas, comme elle te fait le
plus souvent, cet élargissement du groupe social qui est le
vrai progrès de t'hunumite, elle ne fait que consacrer, et sou.
vent en les mutilant, les pacifiques conquêtes opérées par
l'expansion imitative de la religion combinée avec celle de la
langue, des usages, des mmurs (p. 40~.
En un mot, le progrès social n'est pas dû a t'hostitite,
quelque forme qu'ctie revête, mais à l'ambition et a t'amour
pères de l'invention et de l'imitation. La lutte en elle-même
n'est paf plus utile que n'étaient nécessaires la régression ou
la reversion. Ce n'est donc pas daus l'opposition, c'est dans
la variation – dont l'opposition est parfois une cause occa-
sionnelle, mais dont elle n'est nuttement ta raison suttisante,
– et dans la répetttion dont l'opposition est un cas parti-
culier, mais non la forme génerate – qu'il faut chercher les
principes bienfaisants des transformations de l'univers.
Et ainsi le nouveau livre de M. Tarde se trouve apporter une
preuve indirecte et inattendue, mais par ta, sembte-ti), d'au-
tant plus probante, de la vérité des idées défendues par ses
livres antérieurs.
Danscetui-ci, aussi bien que dans les précédents, les tec-
teurs savent d'avance qu'ils trouveront une profusion.d'indi-
cations fécondes, de remarques pénétrantes, de vues larges et
hardies. En même temps, dans cetui-ci peut-être plus encore
que dans les précédents, il leur sera parfois dtnicitede distin-
guer nettement les hypothèses des vérités, les rapprochements
des explications, l'utopie de l'histoire, et l'idéal de la réalité.
HU L'ANNÉESOt:tOLOG!QL'E.

Ceux qui souhaitent la constitution d'une sociologie propre-


ment scientifique, objective et spécifique, ne trouveront pas
toujours leur compte à ce séduisant entre-croisement d'idées
et de rêves qui caractérise l'O~Mt«OMMM<rc~p«<
Toutefois ceux-ci même sauront gré à M. Tarde d'avoir
montré nettement, sinon en quoi les faits sociaux se dis-
tinguent des faits individuels, du moins en quoi ies faits
sociaux se distinguent des faits biologiques. En dénonçant, à
maintes reprises, t'ailiance du naturalisme et du militarisme,
en rappelant &quelles erreurs à la fois théoriques et pratiques
entralne i'idée que les sociétés sont des organismes, nécessai-
rement soumis, comme les organismes individuels, à une
évolution prédéterminée qui, après un déclin inverse de
leur croissance, aboutirait a la mort, M. Tarde contribue,
pour sa large part, a dissiper les équivoques qui résultent,
le plus souvent, des transpositions sociologiques de concepts
tout biologiques.

P. BARTH. – Die Philosophie def Geschichte ftïs Sooio-


logie. (/.<tpAt'~o~tx' ~c <<o)r<' f/K po<Mtf/f n«' itoc<o<o.
~Mf.) Erster Teil. Einleitung und Kritische Ubersiclit.
396-n- p. Reisland, Leipzig, )897.

Pour M. Hnrth, la sociologieet ta philosophie de l'histoire


se confondent. Les véritables objets de l'histoire sont, non
les accidents individuels mais les transformations sociales.
Ainsi la philosophie de l'histoire, qui n'en est après tout que
la science élevée à une plus haute puissance, n'ayant pour
spécialité que l'universalité même des phénomènes histo-
riques, ne saurait expliquer l'évolution de l'humanité, sans
connaître les transformations des sociétés, Inversement, la
sociologie ne saurait expliquer les transformations des
sociétés sans connaltre l'évolution de l'humanité. C'est en
vain que Wundt prétend réduire la sociologie à une sorte de
statique des sociétés dont la philosophie de l'histoire consti-
tuerait la dy namique outre que c'est méconnaître le carac-
tère fuyant et tout relatif de la distinction établie entre le sta-
tique et le dynamique, c'est réduire arbitrairement la socio-
logie à un rôle descriptif, et lui refuser d'avance ce pouvoir
explicatif sans lequel il n'est pas de véritable science. Il
importe donc de réunir sociologieet philosophie de l'histoire
pour obtenir cette explication à la fois précise et complète de
– SOCtOMOtE
ANALYSES. PMtMSOPtttQUE ~7
toutes les transformations sociales que tu tes phiiosophieBde
l'histoire d'une part, ni les systèmes sociologiquesde l'autre,
n'ont pu jusqu'ici formuler.
M. Harth. pour le prouver, examine les unes et les autres.
tt commence l'exanten des systèmes sociologiques, par le
résumé de celui de Comte (dont il note les tendances plus
d'une fois téiéotogiques'. C'est en effet de la sociologie de
Comte, qui ne fait d'ailleurs que développer et systématiser
les idées de Saint Simon, que dérivent les principales ten.
dances des sociologies contemporaines. C'est sur le modèle
de sa classification des sciences que la sociologiectassinante
(Littré. Itoberty, de Greef, Lacombe, Wagner) cherche à éta-
blir la hiérarchie des forces sociales. La sociologiebiologique
'Spencer, Litienfetd, SchiUne, t-'outtiee. R. Worms) poursuit
lit comparaison qu'il a instituée eutre l'organisme et la société.
Rnnn, de la sociologie dualiste elle-même (Ward, Mackenzie,
ttauriou. Giddings),qui naît de la réaction contre la sociologie
naturaliste, on pourrait peut-être dire (bien que l'auteur
ne le dise nulle part expressément) qu'elle met encore en
valeur une idée comtiste, puisque, quelles que fussent les
opinions de Comte sur tes rapports de la psychologie avec
la biologie, sa toi des trois états mettait en relief l'impor-
tance sociale des transformations de l'esprit. Que ces
trois sortes de sociologies n'aient pas d'ailleurs donné une
explication satisfaisante des transformations sociales, l'auteur
le prouve, et par des critiques de détait et par des objec-
tions de principes. Les premiers systèmes n'ont offert que
des classifications descriptives, ou, si elles ont prétendu
être reconstructives, elles se sont montrées contraires à
l'histoire. Les seconds ont méconnu le rôle propre de
l'esprit, par suite l'importance des idées qui unissent les
hommes, et qui créent entre eux des distinctions toutes
spéciales. Les troisièmes, s'ils ont eu conscience plus
nette de cette importance, n'ont pas su montrer comment
l'esprit, dans la réalité historique, a constitué ta société ils
n'ont pas su user de cette méthode historique que l'auteur
appelle, avec Vanni, la route royale de la sociologie.– En
somme, aucune de ces sociologies n'est suuisamment explica-
tive, parce qu'aucune n'a su unir intimement la psychologie
et l'histoire.
Plus manifeste encore est t'insutïisancede ces conceptions
unilatérales do l'histoire que l'auteur étudie après les
~!8 L'AfKËBiiOCtOt.OGtQUtt.tMT

'systèmes sociotogiques Passant en revue les théories indi.


viduatistesfBourdeau, Tarde), anthropo-géographiquestnitter
Hutze), Mougeotie, ctttootogiques (Gobineau, Putt, Cum-
ptowicx). puis celles qui fout tout dépendre du progrès de ta
culture (Humbo)dt, Tytor), ou des transformations do t'~tat
''Lorenz, Schafer), ou du mouvement des idées (hanke, Laxa-
rus, Steinthat), il n'a pas de peine a montrer qu'elles
prennent la partie pour le tout, et que, faute de distinguer
nettement les ditlércutes forces concourantes de l'histoire,
chacune d'entre elles laisse inexptiqm'e une grande part des
transformations sociales.
Le chapitre le pins remitrquabie, et de cette partie et du
livre tout entier, est celui daus lequel M. Barth étudie la
conception économique de i'histoire 'p. ~«S-H64).Après avoir
brièventent réfuté, comme trop extérieures et manquant de
psychologie, les théories de M. Durkheim et celles de M. Put-
teu. il s'attaque enfin a cette philosophie de l'histoire dite
matérialiste, qui prétend conférer ausocialisme la vateur d'un
système scientifique fondé sur les faits eux-mêmes. M. Barth
ta soumet à nue critique, non plus toute dialectique, comme
l'avait fait Stanuntcr, mais historique et psychologique.
Les preuves, peu nombreuses, comme on sait, aphorismes,
métaphores ou exemples jetés en passant sur lesquels Marx
établit ta théorie, sont d'abord rassemblés, puis passés au
crible. En parcourant un à un les étages de eetto < super-
structure juridique, politique, religieuse dont, suivant
Marx et Kngets, les phénomènes économiques formeraient ta
base, ou s'aperçoit que, si les transformations des moyens do
production sont une des conditions de certaines transtornoa-
tions sociales, ettcs sont toia d'en être la cause unique. Déjà
elles ne sont pas seules à agir sur les formes du droit de pro-
priété. Ce n'est pas un progrès technique qui a changé la pro-
priété collective dt' lit yfMsen propriétés individuelles ou tes
latifundia en propriétés parcettaires. Les institutions de la
féodalité obéissent à l'influence des souvenirs romains aussi
bien qu'à ta pression des rapports économiques Et ce
sont des idées égatitaires bien plutôt que des procédés tech-
niques qui ont amené leur ruine. A fortiori, si l'on cherche
les raisons de t'évotutiou du droit criminel, et, par exemple,
de l'adoucissement progressif des peines, est on obligé de tes
demander à l'histoire des idées. Que si l'on essaie enHn de
déduire, de la considérationdes transformations économiques,
ASAMiM. – SOCtOUKUËt'tKMSOt'MQU)! tt9

l'histoire des retigiotM ou


des religions ou encore
encore celle
celle des
des matMmattques,
mathématiques,
t'étroitessede ta théorie éclate. Si l'Ëgiisc a possédéau moyen
âge uu tiers des biens fonciers, la moitié des revenus et deux
tiers des capitaux, c'est là une preuve, donnée par des faits
écouotniques, de la puissance des idées.
Mtqu'on ne dise pas (lue ses idées sont suggéréesù l'homme
par le seul milieu économique. C'est bien plutôt du milieu
naturel (lue dérivent ces idées des hommes pnmitifs
qui,
synthétisées dans les religions, doivent exercer tant d'action
sur ta marche des sociétés. D'aitteurs, des impressions qu'il
reçoit de l'extérieur, l'esprit tire des synthèsesoriginales qui
assurent justement à t'hotnme lu forcederésister l'intluonce
des milieux soit naturels, soit économiques. Htptus les socié.
tés sont développées, plus elles portent en elles-mêmesde ces
(Buvresde t'espht qui, transmises de génération en généra-
tion ou transportées de groupe en groupe, persévérant elles
aussi daus leur être et accroissant leur forceparleur mouve-
ment, assurent à l'homme cette indépendance à l'égard des
choses(lue lui refuse cette sorte d'a utomatisme
économique'.
Avrai dire, ce sont e!ies qui, parce qu'elles seules unissent
véritablement les individus, fuut la véritable force des socié-
tés des sociétés fondéessuriesseuts rapports économiques
sont forcément caduques, – tant il est vrai que cette philoso-
phie dite matérialiste, exprimant des préoccupations tout
actuelles et pratiques, cédant à l'influence de l'hegélianisme
en même temps qu'elle réagit contre lui, n'unifie l'histoire
qu'en la simplifiant abusivement. Tenant pour l'Océan tout
entier de l'histoire un seul de ses courants, c'est une abstrac-
tion qui s'ignore et qu'on peut qualifier de < simpliste ·
(p. 303).
Par ces critiques et celles qu'il adresse tant aux autres con-
ceptions uaiïateraies de l'histoire qu'aux systèmes de socio-
logie, l'auteur a démontré lu nécessité d'une nouvelle Œuvre
systématique, destinée à uuir la sociologieavec la philosophie
de l'histoire, Il lui reste à prouver qu'elle est possible. C'estce
qu'il fait brièvement en discutant les opinions de Ditthey, qui
lui aussi a fait une Introduction aux sciences sociales'. Que
les philosophies de l'histoire aient en effet le plus souvent
usé de concepts métaphysiques trop généraux, cela no prouve
pas qu'on ne puisse, ea tenant compte méthodiquement des

() t'<«/<'</«t)~
<))</<<' Lcip:!g,)8M.
tM~MK't'Me/tt'M/~t.
~0 t/AKM~ îîOCtOMGtQ~'K. !8!'7

transformations Enf*in~Mc
tf:tnafnt*Tnnttnna
sociales, ~tt~Mt*
dégager c~~ttt!nt<t<t~Mt
scientifiquement ce qu'elles
ont de commun. Que les systèmes sociologiques aient le plus
souvent, par leurs tendances naturalistes, méconnu ta valeur
et les caractères propres de l'esprit, cela ne prouve pas qu'on
ne puisse déterminer scientifiquement le rôle social de cet
esprit même. H importe seulement de distinguer ici les cou-
cepts et les métitodes des sciences naturelles. Lorsqu'il
reproche aux sociologuesde transposer sans critique, duos le
domaine de l'esprit, les concepts qui ne valent que pour celui
de la nature, M. Ditthey a raison mais non lorsqu'il leur
reproche de vouloir appliquer aux sciences de l'esprit les me.
thodes des sciences natm'eiies, cor les méthodes coM)pat'ative,
inductive et deductive peuvent et doivent s'apptiquer aux
choses de l'esprit, sans impliquer ia méconnaissance de leur
originalité. L'insuffisancedes phitosophiosde t'histoire comme
des systèmes sociologiquesqu'on a passes en revue, ne tient
donc pas à la nature des choses, et par exemple aux carac-
tères propres de leur objet M.Barth peut enfin entreprendre,
la conscience tranquille, son œuvre propre, après en avoir
démontré non seulement la nécessité, mais ia possibilité.
De cette (cuvre. le voiutne que nous analysons nous donne
seulement un avant.gout dans les quinze dernières pages ou
l'auteur esquisse sa théorie personneiie. La horde, à iaqueite
correspond h) croyance aux esprits, puis le ctan conçu sur le
type des familles décrites par Morgan (des (cuvn's duquel
rauteurpantit faire grand cas)auquei correspond i'animistne,
puis ia ~c~s. à laquelle correspond le potytiteisme, telles sont
les premières phases de t'organisation sociaie. L'intervention
des tegisiateurs substitue les divisions par classes aux divi-
sions par ~c~cs, en mémo temps qu'elle substitue les reli-
gions tégates aux religions naturelles. Cette société de classes,
l'absolutisme ta dissout, dissous ilsou tour par le libéralisme.
Et, dansées dissolutions successives, il faut reconnaitre que
le patrimoine deseroyaneescomntunes, sans lesquelles il n'est
pas de véritable société, s'est singulièrement amoindri. C'est
pourquoi la société moderne attend un nouvel idéalisme qui,
unissant les esprits et les volonté", lui rende sa force d'action
morate, en même temps que de création esthétique. Et, ù
vrai dire, il est difficile de voir jusqu'ici, dans cette rapide
esquisse, autre chosequ'uaede ces descriptions schématiques
de révolution sociale comme l'auteur en a tui-meme passé
beaucoupen revue; on n'y aperçoit pas qu'ette soit plus expti-
– SOCIOLOGIE
ANALYSES. PMMMPBtCtiE
cativcque beaucoup d'autres, et elle ne nécessite pas rigou-
reusemeut la suite des types sociaux qu'elle énumere. Mais
jusqu'à ce que l'auteur ait étaburé sou système, destiné à
prouver sans nul doute ce que son esquisse aMrme, et à expli-
quer ce qu'elle constate, il n'est que juste de retouir tout
jugementsursit sociologie.
A prendre ce premier volume pour ce qu'il veut être, c'est.
à-dire pour un exposé critique des conceptions
sociologiques
actuelles, on reconnattra sans peine que le résume de
M. Barth, ramenant les systèmes a leurs
principes, en m~me
temps qu'il donne une idée de leur détait, indiquant presque
à chaque phrase, tant pour l'analyse que pour
t'apprcciutioa
des auteurs, les pages auxquelles il fait allusion, est un des
mieux ordonnés en même temps qu'un des plus
précis que
noua possédions.
Toutefois, puisque l'auteur paratt se piquer d'être complet
et de faire juste place aux auteurs les plus récents,
propor-
tinnnettement à leur importance pour l'histoire générale des
conceptions sociologiques, on pourra naturettcment lui cher-
cher chicane. Si l'on ne saurait lui en vouloir de n'avoir
pas
cité après Cobinoau, dans le chapitre de t'ethnoto~e. des
auteurs commeVacher de Lapougeou Otto Ammon,qui pour-
tant, après tout, ont des élèves et manifestent une tendance
assez définie, ou lui reprochera pfut-étrc avec plus de raison
de n'avoir pas justement marqué le sens d'muvres comme
celles de Simmel ou de Tarde ou de Durkheim.
PourSimmet.on regrettera que M. Barth ne l'ait citéqu'en
note. et encore pour t'éearter sommairement en une seule
phrase (p. )2S). La .~cwW~njwwfy méritait mieux.II
n'eût pas été !uutHe de rappeler, entre tant de recherches
d'inégale valeur, celle qui, appeiant l'attention sur les pro-
grès de la dinérenciation qui correspondent eux-mêmes il la
multiplication et à t'entre croisement des sociétés auxquelles
appartient un même individu, axpiique. par un fait réellement
social, beaucoup de faits sociaux, et donne ainsi l'exemple
d'une théorie qui veut être proprement sociologique.
Pour Tarde, bien (lue M. Barth lui ait fait meilleure mesure,
on se plaindra qu'il n'ait pas douné une idée exacte de la
fécondité de sa théorie de l'imitation. C'est la rétrécir que de
la présenter en effet comme consistant essentiellementdans
l'adoration de l'homme de génie, de l'inventeur, et comme
représentant par suite, à peu près seule contre l'esprit cottec.
~33 t.'AKKË)! MC)OLO(i!QUË. <8'~

a:l..a.1.
tiviste des LJ.
idées _.t_iL_- cW oa 1'
régnantes en France p. 2)!i), l'esprit indivi-
dualiste. ft ue faut pas oublier que si Tarde fait une place
u part à l'invention, h mettant à l'origine des mouvements
sociaux, comme les naturalistes la variation A l'origine des
mouvements biologiques, c'est pour mieux délhniter ce qui,
dans les phénomèneshistoriques, reste objet de science sueiate;
et, sans parle)'desessais d'expiicatiou qu'il propose des inven-
tions métMes.entes représentantcommedes croisements d'imi-
tation qui se fécondent, les phénomènes qu'il juge sociologi-
quement explicables, et qu'ii explique en fait, restent assez
nombreux et varies pour qu'où puisse dire qu'il a apporté une
théorie achevée (v. p. ~t) de la société.
Pour M. Durkheim eniin, on jugera, avec quelque soin que
M. Barth l'ait critique, que c'est matcaractériser ses concep-
tions, que de les ranger d'emblée parmi les conceptions éco-
notuistes de l'histoire. H est à craindre ici que le titre mcme
de l'ouvrage do M. Uurhheitn, ia/rt«'<w </« 7'~<t-f«~ait fait
illusion. Parce que ce sont surtout les économistes qui ont
mis ce phénomène en lumière, il n'est pas dit que. de prouver
son importance sociale, ce soit forcément adopter leurs con-
ceptions. Cela est si vrai que M. Durkhoim déclare dès t'abord
étudier, non la fonction économique, mais plutôt la fonction
morale de la division du travail, et montrer que celle-ci con-
siste essentiellement, non dans la production de biens maté-
riels, mais dans la création d'une nouvelle forme de ta soli-
darité. Et, bit'u toiu de se représenter la société comme n'ayant
d'autre but que ta production des biens, il réfute au contraire
la théorie des économistes te désir de l'accroissement
des biens matériels qui serait, suivant eux, le but déter-
minant de tout le mouvement social, est bien plutôt pour
lui un résultat qu'une fin de la division du travail ce
qui ta provoque, c'est l'accroissement de Ja densité et du
volume des sociétés, forçaut les hommes à dinérencier, non
pas seulement, comme parait le penser M. Barth. leur activité
économique, mais leur activité scientifique, artistique, poli-
tique. Ainsi, ni les conséquences de la division du travail'ne
sont pour M. Durkheim purement économiques, ni ses causes.
On peut donc juger que sa théorie reste extérieure ou méca-
niste, non qu'elle est économiste elle veut être purement
sociologique.

\t~M;K!(0<)
<<«~(t)-M<<,
)'. ~M'U.
AX.tLÏSKS. – SOCIOLOGIEP)))MSO)'Mt<)UB 123

Si nous avons relevé ces quelques erreurs d'interprétation,


c'est qu'elles ont peut-être plus d'importance doctrinale qu'on
ne le croirait au premier abord. Et est enet, nos brèves
remarques ont suffi à le rappeler deux au moinsdes auteurs
en question, M. Simmel et M. Durkheim, semblent caracté-
risés par un vit souci de mettre en lumière ce qu'il y a de
proprement social dans le compiexus des phénomènes his-
toriques. et de spécifier le point de vue particulier a la socio.
logie. Pour eux, il semble que ia tacite propre du sociologue
ne soit pas de faire une sorte de synthèse des sciences parti-
cuiicres, mais de démêler, dans tous les ordres de phéno-
mènes historiques, économiques ou politique! l'influence
spécifique de la société, c'est-à-dire le résultat des rapports
qui unissent les individus, et l'action de tous sur chacun. –
Hnun mot, il semble que ces auteurs dont il plus ou moins
méconnu le roie sont justement ceux qui représentent cette
conception de ia sociologie que M. Barth devait par-dessus
tout définir, car elle est tout justement à l'antipode do ia
sienne c'est la conception suivant laquelle il faut autant que
possible spécifier, délimiter l'œuvre propre de la sociologie,
au lieu de l'identifier avec la philosophie de l'histoire elle-
même. C'est aveccette conception de la sociologieproprement
dite ou spécifique qu'il eut d& engager uu corps a corps.
Héussira-t-ità en triompher, en prouvant par le fait qu'une
sociologie synthétique, expliquant l'évolution de l'humanité
en même temps que les transformations des sociétés, est dès
a présent possible? Son prochain volume nous le dira.

Tx. FUNCK-BREXTA.KO. – La Science sociale, morale,


politique, 47K.XHp. Ptou, Paris, 1897.
On trouvera mélangées dans le livre de M. Brentano des
vues sur la question sociale dans l'histoire et des réflexions
sur les principes de la science sociale.
Pour M. Brentano,la désorganisation des peuples s'explique
par le déclassement des classes moyennes si l'on veut
éviter à la fois l' < anarchie d'en haut et l' anarchie d'en
bas il faut relever ces classes et, on les instruisant, les
rendre vraiment directrices~
Elles devront, naturellement, perfectionner surtout leur
connaissance scientifique des phénomènes sociaux. Celle-ci
progressera, non par la prépondérance abusive, soit de l'in-
t2t t'ANtf&E HOCtOMCtQUK.t8f7

duction, soit de la déduction, mais par l'usage de « jugements


justes c'est-à-dire de jugements dans lesquels le sujet soit
pris dans toute son extension et l'attribut dans toute sa com-
préhension. Ainsi ta science des faits sociaux passera du rang
de science spéculative à celui de science exacte Ce ne
sera plus une sociologie(l'auteur parait mettre la sociologie
sur le même plan que l'astrotogie); mais une science
sociate
It est difficilede classer les tendances de ce livre, tant les
prescriptions, soit pratiques, soit méthodologiques, qu'il nous
ottre sont générâtes et indéterminées. Peut-être le caractërp
même du Collègelibre des sciencessociales où les concep-
tions les plus différentes devaient être exposées côte à côte,
et ou M. Brentano a donné, en conférences, les principaux
chapitres de son livre, l'obligeait-il à cette sorte d'éclectisme
sociologique.

M. VtUXES. La Solence sociale, d'après les prin-


cipes de Le Play et de ses continuateurs, 3 vol. 4tM).
4SS p. Bibliothèque sociologique internationale. Giard et
Brière, Paris, )8U7.
M. Vignes s'est propose de mettre en lumière, dans leur
principe et dansquetques-uaes au moins de tours principales
applications, un certain nombre d'idées dont l'importance
historique et sociale ne lui parait pas toujours suffisamment
comprise les idées de Le Play et do ses continuateurs.
Conformément à tet.rs principes, auxquels d'ailleurs it ne
s'astreint pas servilement (Voyezt. Il, p. te, ce qu'it dit de
i'égaiité; il montre comment l'évolution des modes de
production du pain quotidien traversant trois phases, qu'il
appeite < t'age des productions spontanées !'age des
machines < l'âge de la houiito a déterminé tes transfor-
mations de la famille et, par suite, – la famille étant, comme
on sait, pour l'école de Le Play la véritable unité sociale, –
les transformations de la société tout entière.
Et il n'était peut-être pas Inutileen euet de concentrer dans
un exposé d'ensemble, en les appuyant d'ailleurs d'exemples
empruntés aux plus récentes publications, des idées déj&
anciennes, et dont l'influence s'est fait sentir dans un si
grand nombre de monographies.
Cet exposé est précédé de quelques considérations théo-
ANAU'SHS. – SOtiîOMGtE PtHMSOt'HtQUE 13&
l~e..v.oe..t" a., axn."t.. ~a_
riques. L'auteur y essaie de définir le domaine propre do la
sociologie < philosophie générale des sciences socialesparti-
culières a (t, p. M), elle étudierait les sociétés non pas sous
un seul de leurs aspects, comme le font la
potitique, ta
morale, l'esthétique par exemple, .mais sous tous leurs
aspects &la fois. Définition qui reste ambiguë car comment
la sociologie serait-elle autre chose alors que la collection
des sciences sociales particulières? Ht comment concilier
eetto obligation d'étudier < tous les aspects de la société à la
fois (t,p. 32) avec ce culte de." l'observation
analytique
(t, p. 19) que nous recommande fauteur? Ses idées, sur la
méthode paraissent d'ailleurs sujettes à caution il assimile
au pur raisonnement a priori la méthode déductive préconisée
par St. Miti et lui reproche d' écarter systématiquement
l'observation (ï, p. <2).Mais on sait qu'en montrant que les
lois des phénomènes sociaux devaient être autant que
pos-
sible rattachées aux lois plus générâtes do la nature
humaine, St. Miti n'a nullement voulu dire qu'il fallait cons-
truire à priori les sciences sociales la déduction, suivant lui,
ne peut rien sans l'observation qui, ici, la vérifie, et, ta, la
suggère; sans compter que la science à taqueite elle doit
emprunter ses prémisses, la psychologie, est elle-même,
St. Mit)le dit expressément (p. 71 de la traduction Belot), une
science expérimentale.

STUART MtLL. – La Logique des soienoes morales.


Traduction nouvelle, par G. Belot, 2t8-xo p. Delagrave,
Paris, 897.
Il faut citer ici cette petite édition scolaire du Vf livre de
ia Logique de St. Mill. Car, d'abord, ces chapitres restent en
somme, suivant la remarque de Giddiugs, les fondements
solides de la méthodologie sociologique on éviterait, en
s'y
reportant, bien des discussions par lesquelles on oppose
vainement déduction et induction, abstraction et expérience.
De plus, l'introduction et les notes que M. Belot a ajoutées
à sa traduction nouvelle onrent plus d'une indication utile
aux sociologues. M. Belot y montre, par exemple, plus nette-
ment qu'on ne le fait d'ordinaire, sur quel principe devrait
reposer la distinction entre une sociologie générate
science d'ensemble, sorte de philosophie de l'histoire
opérant
autant que possibte la combinaison concrète des lois sociales
126 L'ANSE)-:SOOOtOetQUt:. t8''7

spéciales (p. mxv', et une sociologie < pure isolant le côte


proprement socialdes phénomèneshistoriques, etqui ne serait
ni la somme ni mêmela synthèse des sciences sociales particu-
lières p. t~); contre h sociologiequ'it appelle < mecaniste ·
it insiste sur le rôle de la psychologiedans la constitution des
sciences sociales (p. 8~), tout en imposant une limite ù l'ex-
ptication individualiste du tout social par les éléments p. t t.
tt9) puisque, jusqu'à un certain point, les éléments eux-
mêmes, dans toute organisation, s'expliquent par le tout

E. MtGOLACE.– La sociologie par Aug. Comte.


Résume, 472-x\' p. Atcan, Paris, )8U7.
Résume aussi < objectif <jnepossible, suivant, dévetoppe-
ment par devetoppement,l'ordre du Co)M-j< (/<-p/x/(Mop/t<eposi-
tire. Si t'en se souvient de la lourdeur avec laquelle le fonda-
teur du positivisme y présente trop souvent ses propres
idées, on conviendra que, mat~r6ta réédition réceutc de ce
CoMr.< édition, 't8!)3),te résume de M. Kigoiage, clair et
précis, n'est pas sans quelque utilité. On se rappettera, eu le
lisant, tout ce que la sociologiecontemporaine doit .& Aug.
Comte (voir plus haut, p. iiï). Et sans doute on ue. pourra
s'empêcher de remarquer en même temps le caractère souvent
hypothétique des f~enéraiisationsdu fondateur du poshivisme.
–Mais. ainsi que tui-memol'a plus d'une fois noté, il est peut-
être à la fois inévitable et indispensable que l'esprit; pour
prendre possession d'un domaine encore Inexploré, com-
mence par un système d'hypothèses générâtes. It importe
seulement qu'à cet âge de la sociologie philosophique et gêné-
rate. qui a vraisemblablement rendu la plupart des services
qu'on pouvait en attendre, succèdeenfin t'age de la sociologie
spécifique et positive.

H.–S<)t:«)).<H:tKMtO).<'<:t~CH t:

J. NOVtCOW.– Conscienceet volonté sociales, 380p.


Bibliothèquesociologiqueinternationale,Ciardet Brière
Paris, i8;)7.
Lelivredo M.Xovicow présente,juxtaposées,des réHexions
sur la théorieorganiquedessociétéset des considérationssur
la psychologiesociale.
AXAtYSHS. «OCMLOOË
BtOLOG~UR )27
On pouvait croire que la théorie organique avait, en ces
dernières années, dit son dernier mot, et qu'en se poussant
jusqu'à l'extrême. elle s'était elle-même réfutée par l'absurde.
M.Xovico\vte reeounatt. t)es analogies état-tic!)d'une façon
trop superficielle, trop factice, et parfois même un peu pué-
riie, l'out beaucoup déconsidérée. tt tient cependant que le
salut de ta sociologie est en elle. Par elle seule la sociologie,
rattacttée enfin a une science ptus générate, cessera de
ptauer dans le vide et de nager dans la fantaisie.
En vain on rappelle que les unités sof.iatessont discontinues
et conscientes, et les cettutes du corps contigues et incons'
cientes. Cesoppositions sont toutes relatives et se fondent en
différencesde degrés.
Mais, dira-t-on, tandis que. dans ta société, toutes les
unités, qu'ettes appartiennent à t'etite ou à la masse, sont de
même nature, tandis que dans le corps, tes cellules cérébrales
diffèrent totalement des autres? Kttes teur ressemblaient pri-
mitivement, elles ne s'en sont différenciées que petit à petit
p. ~4). Demême devra se différencier t'étite de la masse. Si
l'opération n'est pas encore faite, ceta prouve que les sociétés
sont des organismes moins parfaits quête corps humain par
exemple, et non qu'elles ne sont pas des organismes. Leur
effortdevra justement être de se perfectionner à l'image des
organismes les plus étevcs, en se constituant" un sensorium
social.
C'est l'importance de ce sensorium que M. Novicow se
proposede mettre en lumière. – Demandons,nous en effet ce
qu'est une volition vraiment sociale. C'est une votition portant
sur l'ensemble de ia soeiét.)', ayantpour objet, par exemple,
non telles réformes locales, mais tettes transformations
générâtes des lois, des mœurs, des idées. A quelle condition
est-on capable de pan'ittes volitions? A la condition de pos-
séder, au préalable, une représentation d'ensemble de la
société, et non pas seulement de sa place dans l'espace et
dans le temps, de sa géographieet de son histoire, mais, jus-
qu'à un certain point, de sa structure. Le rayon des volitions
socialesse mesure à celui de cette vision interne des sociétés.
Or, à de pareilles visions, toutes les unités sociales parti-
cipent-elles? On ne trouverait dans les consciencesde la plu-
part, que des vues bornées, toutes locales et matérielles.
Seule une minorité a assez de loisir, de liberté et de largeur
d'esprit pour embrasser du regard tout l'horizon social. C'est
~8 t'ANKÉE SOCtOMCtQU)!.tM7

l'élite, c'est l'aristocratie. Et sans doute ces deux tenues ne


sont pas synonymes. Oupeut être richf et notable suns
agir
sur les idées sociales, comme ou peut agir sur les idées
sociales sans être riche et notable. Cependant, l'élite et raris-
tocratie se côtoient constamment. Si l'aristocratie a besoin
d'une élite qui élabore la culture intellectuelle, l'élite ne
peut
presque pus vivre et produire sans le secours matériel d'une
aristocratie. Celle-cine doit assurément reposer ni sur i'ex-
clusivisme, ni sur le privttége. Une aristocratie fermée est
une contradiction «t ~'w«(M p. La véritabte aristocratie
devrait avoir horreur du privilège comme d'une souillure
p. 48). II n'en est pas moins vrai que, eu s'unissant aussi
étroitement que possible à l'élite. textes deux doivent former
une classe aussi < nettement dinérenciée que possible du
reste de la nation. Le sensorium social les comprend en
même temps et dans une mesure semblable. Mais le
gouver-
nement proprement dit est loin d'y tenir la même place.
Sans doute, leur métier même donne bien forcemeut aux
gouvernants certaines vues d'eusemble sur la structure
sociale. ii est rare cependant que les gouvernants soient on
même temps les élaborateurs de ces idées sur lesquelles les
sociétés vivent. Dans le cerveau, les cellules qui élaborent la
pensée et le sentiment ne se confondent pas avec celles qui
président aux mouvements des corps les cellules sensitives
sont distinctes des cellules motrices (p. 66, 100). Ainsi
devons-nous distinguer le gouvernement de l'étite.
Pour mesurer l'importance des fonctions de ce cerveau
social, analysonste mécanisme de l'action sociale. Sensation,
perception, idée, désir, volition, action consciente, puis
renexe, tel est le cycle du phénomène psychique Pour
que telle action s'impose à ta société, il faut donc que la
société ait préatabiement agréé telle idée. Or, qu'il s'agisse
d'un mot nouveau, d'une théorie philosophique ou d'une
mesure politique, une idée ne sera agréée de la masse que si
elle a été consacrée par une étite. Et sans doute une idée peut
na!tre partout, l'esprit souflle où it veut, mais en tout cas il
faudra qu'elle monte jusqu'à FéUte pour devenir action
sociale, consciente ou réflexe. Ce sont ainsi les o~<<M)e(M qui,
grâce à leur notoriété même, dictent à la masse le vrai et le
faux, le juste et l'injuste, le vulgaire et le distingué. L'idéal
social est leur œuvre.
Que leur action, en ce sens, soit singulièrement plus etu.
ANALYSES.– SOCMMGtK BMMfitQM!

caeoque J'action des gouvernements, que cette-ci môme sup-


pose toujours cette-ta, on ne s'en rend pas assez compte. On
parattcroireque, par ta force dont ils disposent, les gouverne-
ments sont capables de modifier tes sociétés & leur idée. Mais
d'abord cette idée même, i)s ta reçoivent ptus qu'ils ne la
créent: ta tradition ou la mode la tour impose. Et puis, cette
forceà son tour ne peut exercer une action sociale que si elle
est aidée par certaines idées reçues dans la société. Comment
les gouvernements pourrnient-ils réprimer les rébellions, si
l'idée n'était tacitement admise par l'ensemble, qu'il faut
obéir aux autorités. En ce sons il est vrai do dire que les.
muscles lie sont nullement les moteurs des actions sociales
~p.~0~); toute action sociale s'accomplit par t'intermédiaire
de la persuasion, directe ou indirecte (p. i42;. Usse trompent
donc ceux qui, pour agir sur la société, regardent ta coercition
comme le moyen le plus sur et le plus rapide. Hnréatité, par
la résistance qu'elle provoque, et le choc qu'elle donne & la
conscience sociale, elle retarde le succès de ce qu'elle veut
imposer. La force ne peut rien suus les idées, presque rien
sur les idées.
Si l'on est parfois porté à oublier leur primauté sociale, c'est
qu'en effet il vient un moment of) les idées se cachent en
quelque sorte: sans cesser d'agir, elles descendent dans t'in-
conscient. Lorsque t'éttte a fait accepter définitivement, tant
par la foi que par le raisonnement, une opinion au groupe
social tout entier, cette-ci. ne rencontrant plus de discussion,
continue de pot-terses enets, sans éveitter désormais la sensi-
bilité publique. Elle paraît juste, c'est-à-dire conforme à
l'ordre des choses, et l'on ne comprend plus qu'elle oit pu ne
pas régner. Les individus lui obéissent alors sans raisonner,
instinctivement, automatiquement. C'est un réflexe social.
Par l'adoption pleine et entière de la masse, l'idée retourne à
la nuit dont l'élite l'avait un instant tirée. Ainsi, de l'incons-
cience à l'inconscience, tel est le cycle complet des idées
sociales. Le sensorium de la société qui est t'eiite s'attache à
elles, puis il s'en détache, soit parce qu'elles ont été démon-
trées fausses, soit parce qu'elles ont été universellement
admises comme vraies.
Ainsi l'idée du fédéralisme européen, chère à t'autour, qui
ne préoccupe aujourd'hui qu'un trop petit nombre de gens,
seuls capables d'avec une représentation complète de l'Eu-
rope et une science exacte de ses véritables intérêts, s'impo-
Ë.t)UMfMnt.–Ann<'esoei')t.)8')7. 9
130 L'ANNÉE SOKtOt.O(:)QL'E.)t'J7

sera peu à peu à tous les esprits, et un jour viendra où elle


ne préoccupera plus personne. Elle ne fera plus question. Ce
sera. pour ainsi dire une affaire entendue. L'idée aura vécu.
Cette évolution peut d'aitteursétre plus ou moins rapide.
Cela dépend et des caractères intrinsèques des idées, de leur
simplicité ou de leur complexité relatives, et des moyens
extérieurs de propagation dont elles disposent. Toutes les
inventions industrielles, depuis ta locomotive jusqu'à la
presse, par lesquelles l'homme s'tulranehit progressivement
de t'espace et du temps, contribuent en même temps qu'à la
durée de la mémoire a la vitesse de la pensée sociale.
Mais, plus encore (lue la quantité et lu qualité de ces
moyens matériels, importent a ta vitesse des idées sociales ta
quantité et la qualité des cousciences capables de les former
ou de les comprendre, c'est à-dire, en même temps que ta
proportion numérique de l'élite au regard de l'ensemble,, la
façon dont cette élite entend ses devoirs à l'égard de cet
ensemble.
Il n'y n pas de volitions proprement sociales, et par consé-
quent, à vrai dire, il n'y a pas de vie collective là où les
sociétés n'ont pas la force de se constituer ou cette de se con-
server une aristocratie assez nombreuse qui leur serve de
cerveau. La même anémie cérébrale se produit quand l'or-
gane, bien qu'existant, no fonctionne pas, c'est-à-dire quand
l'aristocratie est écartée par les constitutions politiques de
son œuvre naturelle, ou quand, ce qui est pis encore, elle s'en
détourne d'ette-méme, perdant la notion de ses devoirs. C'est
ainsi que toutes les conquêtes de la civilisation moderne ont
été faites contre l'aristocratie. Le sensorium social a mal
compris son rôle; l'organe s'est atrophié.
Et c'est en vain (lue, pour remédier à cette atonie de la
conscience sociale abandonnée par l'aristocratie, tes gouver-
nements s'évertuent. Les cettutes de l'organe régulateur ne
sauraient se substituer aux cellules de t'organe sensoriel.
L'hypertrophie de celles-là, loin de remédier à. l'atrophie de
celles-ci, t'aggrave, et l'organisme général se trouve deux fois
malade. Un gouvernement qui entend bien ses fonctions doit
se borner à faire respecter la justice. Dans un monde de
libertés réglées par la seule justice, une élite saura bien se
former et prendre la direction de la masse.
Ce n'est pas seulement le nombre et la vitalité des unités
acttves de la conscience sociale (lui varie; c'est encore la
ANALYSHS.
SOCMt.OGtK
B)OLOf:t~UE
nature des objets auxquels elle s'applique, et ta connaissance
des variations de ces objets principaux, aussi bien que celle
des variations de ses éléments constituants, est nécessaire a
l'explication de l'histoifG. Comme ta conscience individuelle,
quoique a un moindre degré, la conscience sociale, est con-
damnée à ne concevoir clairement qu'une grande idée à ia
fois. C'est pourquoi elle < série tout spontanément les
diftéreates questions qui nttcndont leur tour, en quelque
sorte, pour passer a l'ordre du jour. Suivant M. Novicow,
Il serait possible do formuler d'une façon générale ia loi de
leur succession devant l'esprit de l'humanité. L'évolution
biologique élève peu à peu les êtres du physique au mental.
Ainsi révolution sociale substitue peu &peu, aux questions
d'ordre matériel qui occupent d'abord tout le premier plan
de la conscience publique, les questions d'ordre moral. Les
volitions économiques cèdent le pas aux volitions politiques,
celles-ci aux volitions intellectuelle! L'auteur, repreuaut ici
et illustrant a nouveau les idées avec lesquelles ses livres
sur les 7.M~M<'«~'<'socM<~ /tMM««'HM et sur les ~Mpt~M
f/M .for~~ HtOf~f'Mp.t nous ont fantiiiarises, en déduit le
sens des volitions de l'avenir. Les sociétés poursuivront
toujours leur intérêt, car c'est une loi de nature, mais elles
l'entendront enfin raisonnablement. Elles abandonneront
enfin la folie protectionniste ou la folie kilométrique,
elles se tasseront enfin d'élever des barricres inutiles et
coûteuses, comme de s'annexer des territoires coûteux et
inutiles. Elles comprendront que les vraies luttes fécondes
sont les luttes mentales, et qu'il faut abandonner, pour les
mener, les procédés grossiers tels que les guerres à coups de
tarifs ou à coups de canon, bons tout au plus pour les phases
inférieures de la lutte. Il appar:)!tra alors que les nationalités
ne sont que des ensembles d'institutions économiques, poli-
tiques et judiciaires au service d'une culture inteliectuelte
(p. 33)). Et l'on peut même prévoir le moment où la culture
intellectuelle générale, devenant enfin sa fin &ette-méme, se
débarrassera do la tutelle des nations et rejettera définitive-
ment leurs lisières dans le passé. Alors l'humanité tout
entière agira enfin scientifiquement, guidée par une élite de
gentilshommes sociologues (p. 61,3t!2).
Et qu'on ne voie pas là un idéal quasi surhumain ou du
moins surnaturel, qu'on ne pourrait atteindre qu'en combat-
tant, comme dit Huxley, le processus cosmique. Cetteréforme.
{32 L'ANiOSËSOC)OtO(!tQ(!e. <MT

de l'humanité rencontre bien des obstacles, mais dans les


idées humaines, et non dans les lois naturelles. C'est un con-
traire imiter servilement ht nature que de transformer l'hu-
manité dans le sens que nous avons marque; car c'est cette
transformation qui fera d'elle uu véritable organisme, dont
toutes les parties seront solidaires, en même temps que son
cerveau sera nettetneatdinérenciédurestedesoncorps. Veut-
on savoir eu un mot sur quel modèle régler les rapports inter-
nationaux comme ta structure interne des sociétés ? Il suMt
d'en revenir à la théorie organique (p. 358).
– Tel est, dans ses grandeslignes, l'ouvrage de M. Novicow.
Mais, s'il a pu en indiquer l'esprit, notre bref résumé n'a
donné aucune idée ni de l'ingéniosité des aperçus que l'au-
teur propose en passant, ui de l'aisance avec laquelle il se
meut travers l'histoire et la géographie, depuis les consi-
dérations sur l'antiquité jusqu'aux statistiques modernes, ni
de la verve enfin avec laquelle il met au service d'une idée
généreuse les matériaux les plus divers. 11faudrait analyser
chaque chapitre en détail pour rendre justice à cet ensemble
de qualités qui font de M. Novicow, après M. Tarde, un des
plus vivants, on pourrait dire en l'entendant, bien, un des
plus amusants parmi ies sociologuescontemporains.
Il nous reste seutemeutà nousdemander, puisque M. !<ovi-
cow nous a annoncé qu'il voulait, en les appuyant à la biolo-
gie, fonder scientifiquement,ses considérations sociologiques
et rattacher ainsi la sociologie a cette science plus générale
sans laquelle elle flotterait dans le vide, si vraiment la théo-
rie organique lui a rendu les services qu'il en attendait.
Et d'abord, on regrettera peut-être que, en le préoccupant
en effet de vérités plus générales elle ait détourné son
esprit de la recherche des vérités spécifiques, propres &la
sociologie. Si c'est en efïet une chimère que d'essayer do cons-
tituer de pied en cap une sociologie « indépendante puis-
que, quel que soit leur objet, les sciences no peuvent s'élever
qu'en s'appuyant, it un certain moment, les unes sur les
autres, ce n'en est peut-être pas une que d'essayer de délimi-
ter une sociologie distincte capable de définir, avant de
le réduire, son objet propre. Il n'eût pas été mauvais, par
exemple, que dans un livre traitant de la conscience et
volonté sociales, on trouvât un efîort pour formuler avec pré-
cision ce en quoi une volontésoriale se distingue des volontés
purement individuelles, si elle en est seulement une somme
ASA).YSKS.– SOCIOLOGIEMOMGtQUE 1:~

ou nue synthèse .<<)«'~KCt'M, pouf classer méthodiquement les


influences que les formes proprement Mc<«~, c'est-à-dire,
par exemple, le nombre ou la densité des individus mis en
relation, le degré ou la nature de leur organisation, peuvent
exercer sur )a genèse et l'orientation de ces mêmes volontés.
C'eût été sans doute une démarche scientifique que la recher-
che préalable de ces rotations spécifiques.
Et que ces relations spécifiques, qu'on pourrait peut-être
découvrir, par exemple, en comparant méthodiquement la
marche des volontés socialesdans les sociétésde formes ana.
togueset différentes puissentet doivent être ù leur tour expli-
quéespar des lois plusgénérâtes, nous on sommes pour notre
part persuades. Mais il reste à savoir si, ces lois plus gêne.
rates, explicatives des lois sociologiques, il faut les chercher
dans la biologie.
Demandons-nous donc en quoi les connaissances biolo-
giques dont il s'est servi ont précise les conceptions sociales
de l'auteur et explique les faits qu'il constatait. Est-ce
expliquer scientifiquement le fait qu'une représentation nette
de ta patrie provoque ordinairement le patriotisme que de
rappeler que la reaction du muscle est en raison directe de
l'énergie de l'excitation (p. 2ÛH)?Est-ce donner une raison
suffisante pour commander la distinction du gouvernement
et de fétitc que d'affirmer la distinction des cellules motrices
et des cettutes sensitives? Est-ce préciser les idées que d'as-
similer l'aristocratie an cerveau pour prouver que cette-tà,
comme celui-ci, doit être < nettement différenciée du reste
de l'organisme ? Par cette différenciation nette fauteur,
puisqu'il ne veut pas entendre parler de privilèges ot de
castes, comprend-il donc que les individus composant l'élite
sont, ou doivent être physiologiquement différents des autres
comme sont différentes des autres les cellules qui composent
te cerveau? Ses comparaisons biologiques ne nous renseignent
nullement ni sur ia façon dont on doit distinguer dans la
société l'élite de la masse, ni même sur la nécessitede la dis.
tinguer. Et lorsque l'auteur, môtant la constatation des faits
avecl'indication de t'idéai, nous dit que les États de l'Europe
doivent so fédérer parce que dans les organismes en générai
toutes les parties sont solidaires, ou que, dans les nations
modernes, les aristocraties doivent se différencier de plus en
plus, parce que, dans certains organismes, te cerveau est très
distinct du reste du corps, il e<t difficile de voir dans ces
i34 L'AXÉE SOCtOMOQUK. tXtT

comparaisonsqui relient des phénomènes sociaux quelconques


avec des phénomènes biologiques quelconques, autre chose
que ces choix arbitraires que fauteur se promettait justement
d'éviter par son recours u ta théorie organique.
C'est que les phénomènes biologiques sont trop etoigoés
des phénomènes sociaux pour sunire à tes déterminer. Entre
eeux-t&et ceux-ci se trouvent des intermédiaires dont la con-
naissance peut découvrir au sociologue des causes plus pro-
chaines des relations qu'il constate, et ce sont les phéno-
mènes psychologiques. Par cela même que les phénomènes
proprement sociaux résultent directement des relations qui
s'établissent entre les consciences individuelles, c'est la
science des faits de conscience qui importe le plus au socio-
logue. Et de fait, notre auteur en a le vif sentiment. Sans
compter les nombreuses explications toutes psychologiques
dont son livre est rempli, n'affirme-t-it pas tui-meme, en
principe, que les phénomènes sociaux sont conditionnés
directement par des phénomènes psychiques, non par des
agents chimiques ou physiques (p. 356;, que le moteur immé-
diat des actions sociales restera toujours un acte psychique ?
Ne va-t'it pas même beaucoup plus loin que n'iraient tels
sociologues, persuades pourtant de l'importance de ta psycho-
logie sociale, lorsqu'il anirme que tout acte social se résout
en un certain nombre d'actes psychiques (p. 3H4), ou encore
que les idées proprement dites mènent le monde comme ettes
voûtent 'p. MC)? Ne sommes-nousdonc pas obligés de cons-
tater la juxtaposition dans le livre de M. Novicow de deux
tendances contraires, l'une qui t'entraîne à rattacher la socio-
logie à la biologie, l'autre, à la rattacher à la psychologie?
Contradiction, dira-t-on, pour qui regarde la psychologie
comme distincte de la biologie,mais non pour qui les regarde,
ainsi que le fait sans doute M. Novicow, comme identiques.
Nous répondrons que cette identification des faits de cons-
cience avec leurs conditions organiques suppose une théorie
métaphysique à laquelle lit sociologie n'a nul besoin de s'in-
féoder, et dont elle a au contraire toutes sortes de bonnes
raisons de se défendre, comme étant maîtresse de vague et de
confusion. Le livre de M. Novicowtui-meme en donne plus
d'une fois la preuve. Pour n'avoir pas regardé les phénomènes
psychologiques en face, pour ainsi dire, et cherché leurs
caractères propres, a combiende notions vagues n'est on pas
exposé?
– SOCtOLOGtË
AKALYaEi!. ntOLOOQUH ~38
Est-cedéfinir la nature propre de l'erreur que do déclarer
qu'ettë est < un discordance entre le monde externe et le
moiinterne, doucunosoufh'unce '(p.)2~? Ou encore sommes-
nous bien avancés (M. Novicow parait prêt à se le demander
lui-même) quand on nous Mdit du sentiment qu'il est un
état particulier du cerveau (p. tt)K.? Ht réciproquement, à
cette identification dela psycitoiogieavecla biologie,celle-cine
perd-ellepas souventen précision? Quand M. Novicowaffirme
que chaque cellule do notre corps possède un certain degré
de cousctence'p, t6), n'est-ce pas confondre les vérités méta-
physiquement vraisembtaMesavectes vérités scientifiquement
démontrées? Et quand il affirmeencore, à plusieurs reprises
(p. 93, 97, <13.que le triomphe d'une idée dans le cerveau
dépend do l'adhésion d'une cellule qui fait pencher la balance,
comme ta victoire d'une proposition dépend de l'adhésion
d'un député qui lui assure la majorité, ou peut se demander
si labiologiesurtaquettoM.Novicow veut fonder scientifique-
ment sa sociologie n'est pas eiie-méme plus métaphorique
que scientifique.
En un mot, outre qu'elle fait oublier les caractères distinc-
tifs des phénomènes sociaux, cette bio-psycho-sociologiefait
oublier encore ici les caractères distinctifs des phénomènes
psychologiques,et ta les caractères distinctits des phénomènes
biologiques. Ktte aboutit à un mélange de notions dont ne
voudraient sans doute ni les spécialistes de la psychologie,
ni ceux de la biologie. Pourquoi dès lors les spécialistes de la
sociologie s'en contenteraient-ils?

DEMOOR,MASSARTET VANDERVELDE.– L'évolution


régressive en biologie et en sociologie. 3~4p. Atcan,
Paris, 1897.
Celivre a été présenté à l'Institut des sciences sociales de
Bruxelles, dont le fondateur, dt. Ernest Sotvay, attendait,
nous disent les auteurs, du retentissement des progrès des
sciencesnaturelles sur les sciencessociales, les plus fructueux
résultats. MM.Dcmoor, Massart et Vandervetde ne nient pas
ce qu'on a appelé la banqueroute de la sociologie biolo-
gique mais ils l'attribuent au fait que trop souvent les
recherches bio-sociologiquesont été poursuivies, soit par des
naturalistes peu au courant des questions sociales, soit par
des sociologues dont les connaissances biologique! étaient
!3S L'ASKËE SOCMLOfitOUH.)<)T
i.tav.:e wo.n,.i,.m. nm"~.v.
incomplètes et superficielles. C'est pour obvier ù ce danger
<)u'its se sont associes, coordonnant fes résultats de leurs
recherches spéciales.
Sans s'arrêter a cette question de n)ots <Lessociétés
<toivpnt-ettes être considérées comme des organismes, ou les
organismes comme des sociétés", ils se contentent de cons-
tater que les organismes et les sociétés présentent des carac-
tères communs en même temps que des caractères ditïéren-
tieis. Cttex les unes comme chei! les autres, il y a concours
entre les unités composantes. Mais, tandis que dans les
agrégats organiques il y a entre ces unités continuité physio-
logique, dans les agrégats proprement sociaux leur concours
est exclusivement dti Ades relations d'ordre psychique.
t)e ta découlent d'importantes diiïerences. Tandis qu'en
biologie la notion d'organisme correspond, au moins en
générât, à quelque chose de précis, en sociologie il n'y a
guère de démarcations précises entre les groupes sociaux
coexistants. Tandis qu'une cellule ne peut pas faire partie de
deux organismes, rien n'empêche les membres d'un groupe
social d'appartenir en même temps à d'autres groupes. Plus
vite enfin et plus aisément que les organismes se trans-
forment les sociétés, leur structure dépendant, non des liens
physiologiques, mais des liens contractuels qui existent
eutre leurs membres. Et c'est pourquoi les méthodes com-
paratives, en sociologie, doivent céder le pas il ia méthode
historique.
On voit que les auteurs abandonnent lestement la plupart
des thèses chères à la théorie organique, tts n'en jugent pas
moins qu'il peut être utile de comparer méthodiquement, sur
un point spécial, les organismes et les sociétés ù la lumière
de cette comparaison, ils éprouveront cette idée qui, partie
de la Motogie,a si rapidement envahi la sociologie, l'idée
de l'évolution régressive.
L'examen, soit des organes homodynames dans un même
individu, soit, chez des individus différents, des organes
homologues prouve que toute transformation proprement
dite de certains étéments entrulne nécessairement ta régres-
sion de certains autres. Hn s'adaptant, les uns à ta mastica-
tion, les autres à ta préhension, les appendices de l'écrevisse
voient se réduire, les uns leurexopodite. les autres leur basi-
podite. En s'adaptant, qui au vol, qui a la course, qui au
rouissage, différentes espèces animâtes voient se réduire qui
ANALYSM. – SOmOMMtK BH)LOfi)QUH )3t

leurs avant-bras, qui leurs ongles, qui leurs poils. Qu'on


examine maintenant tes transformations d'institutions simi-
laires dans une même société, ou les transformations d'une
même institution dans des sociétés ditferentes. on aboutit a
des constatations anatogues. Ledéveloppement progressif des
impôts et des taxes en Mexique Il été accompagttK d'une
régression corrélative du domaine communal. La régression
de ta propriété (amiiiate dans le Monténégro, de la propriété
vittageoiseen Hussie. communaie en Suisse, a partout accom-
pagne le progrès de t'individuutisme 'tivre t, t'* partie'.
Mais, dans l'ordre biologique, lorsqu'un organe tend ainsi
à disparaître, il arrive souvent que. sans disparaître complè-
tement, il laisse des traces, images réduites de tui-mOne.
Tous les organismes portent ainsi des organes réduits tels
sont, chez l'homme, ht glande pineate, le ntum terminale,
l'appendice vermiforme, le tubercute de Darwiu. L'examen
non pas seulement des plus ttautes. mais des plus basses
classes des animaux et des végétaux eux-mêmes prouve que
l'existence de ces organes réduits n'est pas l'exception, mais la
règle. Ainsi eu est-il, dans les soci''tes. pour les survivances.
Il est possible de prouver que, de même que les groupes
sociaux les plus primitifs, comme les hordes des Fuegiens
ou des Veddahs, portent déjà en eux des reliquats du passe.
les groupes les moins nusoncistes.connne les États-Unis, en
portent encore, tt suffit d'aiiteurs d'un coup d'mii sur tes us
et coutumesdu mariage, par exemple, dans i'Hurope moderne,
pour se rendre compte des traces qu'y laissent encore les
formes de mariage les plus primitives. Dans les sociétés
comme dans les organismes, les survivances sont de régie,
prouves vivantes de t'universatite de la régression (livre
'2' partie
Maisce phénomène universel obeit-ii a une loi nécessaire.
et, commeson nom parait l'indiquer, suit i), dans son evoiu-
tion, l'ordre exactement inverse de celui de l'évolution pro-
gressive? En un mot. cette idée que les psycho-physioiogistes
et après eux les sociologues ont récemment mise en honneur
on se réclamant do la biologie, et suivant laquelle les phéuo.
mènes tendraient a disparaître dans l'ordre inverse de leur
ordre d'apparition, les derniers s'eftaçant les premiers, est-
elle veriuee par les faits? Si, dans l'ordre biologique, elle
parait s'appliquer il quelques cas, comme la régression de
l'organe pinçai chez les Lacertiliens, elle est bien plus sou-
L'AKNÉR SOC!OLOmQUR. <~T

veut f~mpntitt
vant chez toc
démentie nhc~ les ffttuti~'t~tt fth~ooattv
crustacés abyssaux, t~n
par exemple, la
régression des organes visuels ne s'est nullement faite en
sens inverse de leur évolution phytogénétique. Les organes
les derniers acquis ne sont pas toujours, quoi qu'on en ait
dit, les moins stables, et s'ils se trouvent être les plus utiles,
la sélection naturette, bien loin de les éliminer, les conserve
soigneusement.
Dans l'ordre sociologique, l'idée que le < regrôs comme
dit M. de Greef, s'aecomptitdans l'ordre inverse du progrès
est encore plus difficile à établir. Pour quelques faits qui
semblent i'autot'iser. comme la disparition des cours do jus-
tice des dizaines, des centaines et des comtés en Angleterre,
qui s'est accomplie en ellet suivant l'ordre renversé de leur
apparition, ou la dégénérescence de certaines corporations
dans la West-Flandre, dont les dernières nées ont été en
ellet les prenuères mortes, combien lui sont défavorables!
Les lois les plus récentes sont loin de tomber toujours les
premières en désuétude. Les usages survivent aux idées qui
les out pourtant entantes. La noblesse meurt avant les titres
et les armoiries qui sont nés d'elle. Maint système religieux
ou politique, ou juridique, postérieur cependant à telle
organisation sociale, vit encore longtemps après qu'elle a
vécu. Eu un mot, il n'est pas vrai que les institutions sociales
les plus récentes soient toujours les plus fragiles incons-
ciemment ou consciemment, capables d'ajouter à la situation
naturelle la sélection artificielle, les sociétés se règlent, pour
conserver ou abandonner leurs institutions, sur le degré de
leur utilité, non sur l'ordre de leur ancienneté (livre JI,
P" partie).
Si donc les structures organiques ou sociaios les dernières
acquises ne sont nullement toujours les premières perdues,
rien n'autorise à penser que l'évolution des organismes et des
sociétés soit réversible et que les uns ou les autres doivent
nécessairement, en partant des formes les plus récentes,
revenir à leurs tonnes primitives. Et, en effet, dans le règne
auimal ou végétât, sauf quetques exceptions qui ne paraissent
aucunement montrer dans la réversibilité une nécessité natu-
relle, on ne voit pas un organe disparu réapparaître, ou un
organe réduit reprendre sa fonction primitive. La socio-
logie devra se montrer plus défiante encore à l'égard de ces
apparents <wo<'<tde l'histoire. Les phénomènes en réalité les
plus différents peuvent se cacher sous l'identité des noms.
ANAtA'HS. – sOCtOH)Ut6 BIOLOGIQUE ~H

Les sénats.l''a.modernes -III. .1


n'ont avec les sénats antiques que le
nom de commun. Au fond, rien n'est plus éteigne du com-
munisme archaïque que tecotkctivisme moderne, du troc
que
le cteariug-house. Si parfois quelques institutions
antiques
rfapparaissent réettement. comme le contubernium des
ttonains chez les esclaves des Antittef), ce sont là des cas de
convergence l'aualogie des conditions a produit dos institu-
tions analogues. Pour que de pareilles reviviscences fussent
une régie générale, il faudrait que les milieux sociaux rede-
vinssent exactement ce qu'ils étaient jadis, ce qui est
impossible (livre tt, partie;.
On s'expliquera aisément cette indétermination relative de
l'évolution régressive si t'en recherche les causes soit de
l'atrophie, soit de la survivance des organes ou des iustitu-
tions, et si l'on se rend compte qu'elle ne se déroule pas fata-
lement suivant une loi fixée d'avance, mais qu'elle ne fait, ou
se développant, qu'obéira t'actionde difïérents facteurs, don-
nés ou non suivant les circonstances. Ainsi
l'atrophie des
organes s'expliquera tantôt par le défaut de place, comme
dans le cas des dents, dont le nombreet le volumediminuent.
chez certains animaux, par l'amoindrissement des maxil-
laires,– tantôt par le défaut d'usage, comme dans le cas des
arcs branchiaux chez les mammifères ou des muscles fléchis-
seurs et extenseurs de la main chez les cétacés, – tantôt par
le défaut de nutrition, comme dans le cas du pistil et des éta-
mines chez certaines fleurs. Si. malgré qu'Usaient été exposés
à ces causes d'atrophie, certains organes réduits subsistent
cependantàt'état réduit et sans fonction, c'est, ou bien qu'au-
cune variation individuelle ne s'est produite pour assurer un
avantage à ceux qui se seraient débarrassés de ces organes, ou
bien qu'à raison de leur insignifiance la sélection a pour ainsi
dire oublié de les éliminer.
Des causes analogues d'atrophie et de survivance poussent
et retiennent dans leur régression les institutions sociales.
Dans la société aussi, le défaut d'usage atrophie voyez la
décadence de ta corporation des débardeurs dans le port de
Bruges, ou celle des cours forestières en Angleterre. Dans la
société aussi, atrophie le défaut de ressources voyezla déca-
dence desadministrations locales à la fin de t'Hmpire romain,
ou des zadrugas dans le Monténégro. En revanche, reconnais-
sent nos auteurs (p. 27S), il faudrait sacrilier au désir des
analogies quand même pour trouver dans les sociétés quoi que
!40 t'ANSÉE <f't7
SOCtOMOtOUE.

..w
ce m.7!
soit qui Aressemble ·a 1'1_ .1. v
l'atrophie par défaut déplace. Ils font
d'aitteurs remarquer, d'une façon plus générale, que litsociété
emploie souvent, pour atrophier les institutions, des moyens
propres dont lu nature ne dispose pus; ses inventions sont
plus riches que les variations accidentettes, ses imitations
plus souples que les transmissions ttéréditaires ses seiee-
tions artificielles eaHn plus complexes que les sétections
naturelles, De même donc qu'eHeest capable de condamneraà
mort, brutalement, telle institution, de même la société est
capable de prolonger artificiettement t'agoaie de telle autre.
Et s'il eu est qui se maintiennent parce qu'elles sont insigni-
fiantes, comme le régime des substitutions à la Martinique,
d'autres parce qu'elles ont une utilité indirecte, comme ces
sinécures qui ne sont qu'un mode détourné de rémunération
pour les artistes ou les savants, il en est aussi qui se main-
tiennent, comme la plupart des pratiques cérémonielles, pur
le seul amour (tes traditions, ou, comme les avoueries ta tin
du moyen âge, par la seule contrainte de t't~tat. En un mot Ja
société modine & sa manière, dans certains cas, Ja vie de ses
institutions. ti n'en est pas moins vrai que, à prendre les
choses en gros, les causes qui entratnent leur évolution
régressive sont les mêmes que celles qui entratnent l'évolu-
tion régressive des organes elles se réduisent en dernière
analyse à lit limitation des moyens do subsistance qui, provo-'
quant la lutte des éléments en présence, amène la régression
de certains d'entre eux.
tt est donc prouvé et expliqué, par t'énoncé de ces causes
mêmes, que la régression, pour universelle qu'elle est, ne
s'opère cependant pas dans un ordre déterminé, inverse de
celui de 1'évolution progressive, et en ce sens on peut dire
que le livre aboutit, en somme, à démontrer que son titre
l'Évolution régressive est un terme impropre (p. ~())et
propice aux équivoques.
– Si nous avons fidèlement indiqué dansée résumét'ordrect
la marche des idées de MM.Demonr, Massartet Yandervetde,
on a pu se rendre compte que l'association de ses différents
auteurs n'a nullement nui à la clarté du livre. Cette division
du travail a au contraire contribué, sans doute, à la netteté
des divisions de ffauvre, dans laquelle apparaissent tour à
tour, méthodiquement comparés à propos de t'universa!ité.
puis de l'ordre, puis des causes de l'évolution régressive, les
organes, puis les institutions. Si parfois tes observations qui
ASA~'SKS. SOCMMUtE BIOLOGIQUE ~4~
concernent celles-ci nous paraissent moins riches ou moins
précises que les autres, il est juste d'attribuer tant à l'état
actuei qu'à l'objet propre delà sociologie,cotte intériorité rein-
tive. Les faits constates de part et d'autre suffisent
d'uiiieurs
amplement à prouver la réalité desanalogiesque les auteurs
se proposent d'établir.
Il importe seulement de s'entendre sur ia
portée scientifique
de pareils rapprochements et de rappeler une fois do
si méthodiquement qu'elles soient piusque
conduites, les comparai-
sons ne sont pas des raisons. Ce n'est
pas parce qu'il y a
des organes atrophiés dans ia
nature qu'il y a des survivances
dansiu société. Et i'anatogie peut sans doute, ici comme
par-
tout, mettre sur le chemin de l'explication en sucrant des
hypothèses directrices de la recherche mais elle ne saurait
se substituer à l'explication même. Apres comme avant la
constatation de l'analogie, il reste a chercher les causes des
deux phfnomënea comparés et il n'est pas dit
que les causes
de l'uu et de l'autre soient forcément
identiques, ii faut Jouer
nos auteurs de l'avoir plus d'une fois
signalé eux-mêmes,en
reconnaissantque, dans lit société, certaines causes
d'atrophie
ou de survivance opèrent, qui n'opèrent
pas dans la nature,
et réciproquement. Toutefois un peut se demander si la
pré-
occupation des analogies ne ies a pas empêchés, parfois, de
saisir, sous tes causes générales, les causes plus
prochaines
des phénomènes sociaux. La survivance d'un
grand nombre
d'institutions ne s'explique+elle pis tout naturellement
cette loi du transfert psychologique, dont la par
biologie ne
nous donne aucune idée et suivant laquelle ce
qui n'était que
moyendevient peu à peu, aux yeux des hommes, fin en soi?
C'étaitdonc à la psychologie bien plutôt
qu'à la biologie
fallait s'adresser directement, pour trouver les causes qu'il
pro.
chaines des transformations propres aux sociétés humaines.
Quoiqu'il en soit, et tout en regrettant que la poursuite des
analogies biologiques leur ait fait plus d'une fois perdre de
vue les explications psychologiques, il faut savoir
gré aux
auteurs d'avoir tenté l'analyse des causes de l'évolution
qu'ils
étudiaient. En montrant que cette évolution ne
s'opère pas
suivant un ordre déterminé, fixé d'avance
parTévotution pro-
gressive, mais s'infléchit dans un sens ou dans l'autre, s arrête
ou s'accélèresuivant que certaines causes sont
présentes ou
absentes, ils contribuent à dissiper cette confusion des lois
d'évolution avec les lois de causation qui a si souvent
dévoyé
ï/Att~K MCtOMOtQUR. <7

la sociologie.Décrire les phases du développementdes sociétés


n'est pas expliquer leur successionet croire que leurs phases
se succèdent suivant un ordre nécessaire, en quelque sorte
prédétermine dans leur germe, c'est encore se laisser abuser
par une idée biologique malcomprise outre que c'est oublier
l'influence des milieux sur les organismes, c'est assimiler à
tort, à ces organismes que t'bérédite astreint en enot, dans
une certaine mesure, à uu cursus détermine, ces êtres singu-
lièrement plus variables et plus souples, qui ont leurs façons
propres de naître, de vivre et de mourir, et qui sont les socié-
tés.
En un mot, tant par sa partie négative que par sa partie
positive, le livre de MM.Demoor, Massart et l'andervelde
nous paraît fait pour rappeler le danger en même temps, ou
peut-être plus encore que la fécondité du rapprochement des
sciences naturelles avec les sciences sociales il prouve on
enet que si ce rapprochement, méthodiquement conduit, nous
révèle des analogies lointaines, nous risquons, en nous y
fiant, d'oublier tes explications prochaines. Et en ce sens, de
même qu'il démontre l'impropriété de son titre, < t'evotution
régressive il nous paraît, démontrer l'iitégitimite de cette
croyance sous l'invocation de laquelle ses auteurs le plaçaient
pourtant, la croyance à t'heureuse influence de la biologie
sur la sociologie.

V. SAXTAMARtAbi-: PARRDES.– E! Concepto de Or~a.-


nismo social «.<' <'onccp<
(ror~oxfiMtfMc<a<,t,~to p. Fer-
nando Fe. Madrid, )89C.

i~tudeà la fois historique et critique du concept de l'orga-


nisme social. Après avoir brièvement rappelé tes avatars de
ce concept et signale son apparition dans le code de Mauou,
dans les dialogues de Ptaton, dans les epttres de saint Paul,
l'auteur le montre renaissant dans toute sa torce au milieu de
notre siècle, comme au point de convergence de la plupart de
nos tendances théoriques et pratiques, tt est l'aboutissant
naturel de tant d'efforts dilIéreuts pour concilier l'individuel
et te social, le rationncl et l'historique, le physique et le
moral (p. 15). La réaction contre le libéralisme abstrait de ia
Révolution, les influences combinées de l'école historique et
de l'école philosophique allemandes, des sciences naturelles
et du positivisme devaient le mettre en honneur. !1n'est pas
ANALYSES.SOMtOMOK
BtOMG~UE iM
étonnant par suite que les penseurs les plus difïérents eu
aient égalementuse.
Quel usage en ont fuit les Btuutsehti, les Sctt'ifHe, les
Spencer, les Fouittée. et jusqu'aux plus récents sociologues,
comme doGreefet Kovicow, Benjamin Kidd et Hené
Worms,
l'auteur )e rappelle avec patience, en des résumés clairs et
corn modes.
JI se demande ensuite ce qu'il faut garder de ce
concept st
répandu. I) coustate d'abord que ta muttipticité des types
sociaux, commela multiplicité des types organiques que les
différents auteurs ont essayé d'assimiler, donne
déjà à penser
que !a société n'est pas réductible à tel ou tel terme de la
série des organismes biologiques, mais qu'elle a sa structure
propre (p.)'!<)).Maispeut on qualifier cette structure d'orga-
nique ? Oui, si t'on se souvient que l'idée d'organisme n'im-
plique nullement celle de l'existence séparée d'un être
unique, mais celle d'un concours entre diverses parties dont
chacune sert tetout qu'elle représente, eu un mot une viecom-
mune d'etémentsdifférents. Unce seus.quaiinertasoeiété d'or-
ganisme, ce n'est nullement iuféoder la sociologieà lit biolo.
gie, c'est user d'une sorte de catégorie très générale qui peut
s'appliquer aux objets les plus di)Mrents. Le concept d'orga-
nisme apparatt dés lors comme un concept xou
plus spéciale-
ment biologique, mais plutôt métaphysique (p. HH). Kt, si
l'on passe du point de vue théorique au point de vue
pratique,
on s'aperçoit que cette idée épurée de l'organisme social
n'exclut nullement l'idée de la liberté indtvidette
(p. ~<)f)).
telle qu'elle convient à la vraie nature de l'homme et a sa
place privitégiée dans l'univers.
Et il est bien évident que si l'on élargit ainsi le
concept
d'organisme, jusqu'au point où it n'est plus autre chose, à
vrai dire, que l'idée même d'un rapport
quelconque cotre des
éléments quels qu'ils soient, il n'y a plus aucun inconvénient
a traiter les sociétésd'organismes. Nous
rappelons seulement
qu'une science spéciale ne saurait se constituer par la seule
application d'idées si générales. Entre l'excès des généralités
qui la confondrait avec la philosophie et l'excès des particu-
larités qui la confondrait avec l'histoire, la
sociologie doit
trouver un moyenterme, en cherchant à dénnir ce
qui con.
vient en propre aux sociétés et ne convient qu'à elles.
t44 L'ANKÈE SOCMt.OCtQUiS.

))).–S()t:hj ).<<(:))-: t'SYt:Hut.<)<:)~tHHT iU'ËCtt'tQt-H

t''HANKL!XIl. CiDMNtiS. The Principles of Sooio.


logy, 4fH.v)tp. Macmiiian et C' Xow-Yorit-London,i89M.
Traduits par ie vicomte Combesde Lestrade /<t<e<pM</<'
St)~-xtp. Uiard et Briëre, Paris, !?)'!
M(.')'ojo~tc,
M. Giddiugs est un des sociologues les mieux pénétres de
la nfcessite de spt'ciner ia sociologie.Elle doit bien être, sui-
vantlui, ia science généraie de la société, mais cela ne veut
nullement dire qu'elle ne puisse être que lit collection des
sciences sociales particulières. Elle peut faire sa spécialité de
l'étude de ce qui est commun aux phénomènes qu'étudient
l'économie politique, la science politique, l'histoire des reli-
gions. Elle prendra comme problèmes ce que celies-ci pren-
nent comme données, i'associatiou en eite-meme avec ses
conséquences et ses causes propres; elle sera une science de
principes, isolant les phénomènes proprement sociaux pour
en faire la description, l'histoire et l'explication.
Ni l'alliance, ni le contrat, ni l'imitation, ni ia contrainte
ne sunisent il les deunir. Car il y a des sociétés sans alliance
et sans contrat, comme il y et, hors des sociétés, des imita-
tions et des contraintes. Le chat-huant imite le rouge-gorge.
Le serpent impose son vouloir à l'oiseau, sans qu'H y ait
entre eux de lien social. Le lien social élémentaire et original
est constitue par lit < conscienced'espèce (consciousness of
kind). Unêtre en reconnait un autre comme étant de ta même
espèce que lui cet état de conscience spécial peut bien être
un ettet de l'imitation ou de la contrainte, mais n'en est pas
le scuieitet. H peut bien être cause de contrats ou d'alliances,
mais d'autres chosesen même temps. En un mot, plus généra!
que le contrat et l'alliance, plus spécial que l'imitation et la
contrainte, le phénomène de lit conscience d'espèce parait
propre à déthur, par un caractère qui convienne tl toutes ses
formes et no convienne qu'à elles, ia société.
Mais n'est-ce pas lit un phénomène psychologique, et par
suite votre sociologie ne va-t-etie pas se confondre avec la
psychologie? La sociologie est bien en eiïet une partie de
la psychologie, mais une partie qui s'en dUTérenciecomme

(t) Susfitttmn!!renvoientau tMt<- on~ioa),littntttactiut)


taisant )M)tt-
heareaMt))t!nt
<tdusitof.(V.Rer.p/tt/MO~A.,
tifST, p. SM.)
ANALYMS. – SOCMLOGtKSt'ÊOHOUE ~48
.1'1- 11
cotte-ci se diiîérencie de la biologie, Elle étudie à part ces
phénomènes psychologiques plus complexes et créateurs d'un
milieu spécia!, qui résultent de i'intcr.action des consciences
Individuelles. Elle est la science de l'association des esprits,
tandis que la psychologie t'esto la science de l'association des
idées (p. du texte)..
Intermédiaire entre les sciences organiques et les sciences
historiques, et usant d'ailleurs, comme toutes les sciences
concrètes, d'une méthode à ia fois déductive et inductive,
elle est capable de décrire les éléments et la structure de la
société, de retracer les phases de son développement, d'en
indiquer enfin ia loi et tes causes. Ainsi se formera une socio-
logie gcnérate et pourtant spécifique – science descriptive,
historique et explicative.
La première condition de la formation des sociétés est
l'agglomération prenable des individus, tt faut, pour que
puissent s échanger entre eux ces miiie actions psychiques
qui constituent ia vie sociale, qu'ils soient matériellement
réunis dans un môme lieu et forment une population Les
conditious extérieures de toutes sortes, l'altitude, le climat,
l'orientation des lieux, et par-dessus tout la fertiiité du sol,
déterminent la place comme l'étendue des agglomérations
humaines. Les sables sahariens, les montagnes rocheuses, ne
peuvent porter que des populations ciairsemées. tandis que
les riches vaiiées du Xii, de t'Huphrato ou les ptaines du Pu
font vivre les populations les plus denses. Le mode de déve-
loppement des populations est d'ailleurs double ou bien elles
résultent de lit croissance biologique de groupes qu un même
sol nourrit, c'est-à-dire de la muttipUcation de ses individus
par la reproduction c'est i' « agrégation génétique ou bien
elles résuitent de ia rencontre d'individus non apparentés
qu'un même lien attire c'est ia congrégation Celle-ci
n'est d'ailleurs pas moins normale quecette'ià elle a pu dès
les origines contribuer au rassemblement des hommes, puis-
qu'elle contribue déjà parfois, ou fait, à celui des animaux.
Mais cette agglomération n'est encore que la condition phy-
sique de la société. L'association apparait avec t'inter-action
psychique des individus. Et c'est sans doute par un conflit
– car M Giddings pense, contrairement à M. Tarde,
que le
conflit est partout, et que l'homme de science n'a pas à perdre
son temps à discuter avec ceux qui cherchent à éliminer la
lutte des choses humaines (p. t(M), que commence l'action
K.))))mfMË)M.–AMtcc!m<;«)).tSQ7. lU
L'ANNE): SOCtOt.OOQUE.M'T

.1.,
de tn"w
t'homme sur t'bomme. Mais, dans ce conflit même, les
individus de morne espèce apprennent à se reconnaître et à
prendre conscience de teur similarité. Kt puis, du sein du
conflit natt l'imitation qui élargit cette conscience
d'espèce.
Et sans doute encore l'imitation ne saurait détruire les causes
persistantes d'antagonisme bien plus, par la diversité ou
l'opposition de ses courants, on peut dire qu'elle en crée de
nouvelles. Mais l'antagonisme se limite lui-même et se ter-
mine dans l'équilibre. Les forces opposées, ne
pouvant se
supprimer, apprennent à se tolérer. Par lit tolérance, fonde-
ment de t'organisation juridique, sont rendues possibles ia
coopération, fondement de l'organisation économique, et
l'alliance, fondement de l'organisation politique une veri-
table association est née. Toutefois elle n'est parfaite que
lorsqu'elle est sympathique. H faut que les individus trou-
vent ptaisir au développement de cette conscience
d'espèce
qui natt de leur rencontre. C'est :') quoi servent les jeux et
les fêtes, sous toutes leurs formes. Leur utititf sociale est la
culture de ces sentiments sociaux par la vertu
desquels le
groupement n'apparaît pas seulement aux individus comme
utile, mais comme agréable.
A mesure que l'association se constitue, elle transforme les
esprits individuels, par cela seul qu'elle les socialise. Mais lit
ne se borne pas son action. Elle donne, de plus, naissance a
un esprit d'une nouvelle sorte c'est l'esprit social.
qui ne
siège pas sans doute en dehors des consciences particulières,
qui cependant tes domine et les maltrise. It comprend les
idées et les impressions communes à toutes, et qui s'imposent
à chacune d'elles. Déjà le simple assemblage des individus
en foule provoque parfois spontanément cette intégration des
sentiments qui est lit condition de l'esprit social. Mais cette
intégration peut aussi se faire délibérément par une discus-
sion rationnelle, après laquelle chaque individu pensera et
agira avec la pleine conscience que ses associés penseront
et agiront comme lui. Tout contact intellectuel la favorise; et
c'est pourquoi la concentration des Individus dans un même
lieu, ou, par le progrès des moyens de communication, le rap-
prochement moral des individus matérieHement tes plus éloi-
goes. contribueront à la genèse d'une opinion publique. Par
elle, la communauté prend pour ainsi dire conscience d'elle-
même, et trouve dans cette auto-conscience un lien nouveau,
une nouvelle raison d'être.
ANALYSES. – SOCIOLOGIE SFËOFtQUE i47

A vrai 1- Il--
dire, le lien _1
serait fragile si "1.
cette auto-conscience
était toute momentanée. Mais l'esprit social a une mémoire.
Au-dessous des idées qui unissent les hommes au moment
présent, se retrouvent celles qui tes ont uni:*dans les siècles
passés, la tradition sous toutes ses fonnes. Traditions d'uti-
lisatiou ou traditions économiques, traditions de totérance
ou traditions juridiques, traditions d'attianco ou traditions
politiques, puis, sur ce trépied des traditions primaires, i'en-
seMbtecomptoxe dos traditions secondaires, celles qui disent
ce qu'il faut penser de l'individu, do la nature, de lit divinité,
tout un mondede croyances anciennesvient pénétrer le monde
des opinions courantes. JI se fait une perpétuelle intégration
des idées traditionuettes et des idées nouvelles qui cons-
tituent ia vie, incessamment mobile, do l'esprit sociat ;p. ~4~.J.
Étant donnés, d'une part ta population, d'autre part l'esprit
social, d'une part les conditions physiques, d'autre part les
conditions psychiques de la vie des sociétés, comment vont-
elles s'organiser? Il importe de distinguer nettement deux
types d'organisation, !a composition et la constitution
t'ne société sera dite < composée iorsqu'otte n'unira ua
nombre plus ou moins gt'and de groupes similaires, réunis-
sant eux-mêmes des individus différents réunion d'ailleurs
naturettement produite par tes activités physiotogiquos et
psychotoniques des individus, et sans intervention réHechie
de l'esprit social. Les hordes des Fuégiens et des Mincopis,
tes tribus des Potatucks ou des Onondagas,les confédérations
des Iroquois ou des Tougans, enfin les grandes sociétés
modernes, non plus ethniques, mais démotiques, et qui ne se
composent déjà plus sans l'intervention d'un esprit social,
allient ainsi, en quantités très diverses, des groupes sociaux
semblables a l'intérieur desquels des individus dissemblables
se totereut.
Tout autres sont les sociétés < constituées Dans celles-ci,
organisées eu vue d'un but, les individus, non plus introduits
par un hasard de naissance, mais admis après un droit cons-
ciemment donné et reçu. sont plus semblables entre eux que
ne le sont entre elles les sociétés dont ils font partie. Entre
elles il n'y a plus seulement réunion, mais distribution et
coordination des fonctions. Non seulement les États, mais les
associations particulières poursuivent, sous l'impulsion direc-
trice de la conscience d'espèce, des fins soit économiques,
soit politiques, soit juridiques, soit morales, donnant ainsi
~8 L'AVER SOC)OLOOtQUB.i8''7

l'exemple de tu coordination de groupements dissemblables


qui se tolèrent, lundis qu'à l'intérieur de ctmeun d'entre eux,
les individus semblables s'aHient. Ainsi, tandis
que les
sociétés composées sont connue les cettutes vivantes d'un
grand organisme, les sociétés constituées sont comme ses
tissus et ses organes spécialises. Et
psychotoRiquementelles
sont l'inverse les unes des autres, la composition réunissant
des individus dissemblables en des
groupes semblables, ta
constitution, des individus sembtabtes eu des groupes dis-
semblables (p. 70, tHOi.
En étudiant ainsi, tour à tour, les éléments,
physique ou
psychique, et la structure, composante ou constituante de ia
société, il se trouve que nous avons, en gros, indiqué du
même coup les phases de son développement à l'ordre de
uotre analyse, un ordre historique
correspond. Et en ellet
c'est bien peu à peu, du sein de t'aggtomération même,
grâce
aux contacts qu'eite provoque et par
lesquels c l'homme
aiguise l'homme comme le fer aiguise le fer que nous
voyonsse formert'espritsociat pariui, la société, si puissante
déjà comme instrument de conservation, de variation et de
sélection dans le monde animal, devient vraiment humaine
l'association devient, de < zoogénique », <
anthropogénique
De même, c'est eu faisant prédominer lit constitution sur lit
composition, qu'ette devient, d' < ethnogenique < démo-
génique ». La civilisation substitue aux confédérations plus
ou moins spontanées de tribus homogènes
l'organisation
plus ou moins délibérée de sociétés dinerenciées, intégrées
en de grands États. Elle fait prédominer l'ordonnance volon-
taire sur l'arrangement spontané. Elle efface les différences
ethniques pour tendre vers la démocratie.
S'interroge-t-on maintenant sur les causes de cotte évolu-
tion dont on a déterminé le sens? 11importe de n'oublier ni
l'aspect objectif ni l'aspect subjectif du processus social. La
véritable association commence à la naissance de la cons-
cience d'espèce. Et ce sont les impulsions de cette même
conscience qui, agissant soit sur les tendances
spontanées
soit sur les choix volontaires de ces personnahtés
qui se
constituent dans et par la société, déterminent les transfor-
mations de cette société même. En ce sens la société,
qui n'est
pas un organisme, mais une organisation résultant, en
parue d'une évolution inconsciente, en partie d'un plan
conscient, obéit à un processus psychique. Maisit ne faut pas
– SOCtOMGtt!
AftAUÏKS. SPË<:tt'tQ).'R i49'
oublier que sa vie n'est qu'une phase de l'évolution eos'
mique. et que, comme telle, elle est assujettie aux conditions.
naturelles. D'abord les lois générales de la persistance et d&
la distribution de la force déterminent les mouvements de la
population, sa cohérence ou sa dispersion et le rythme
même de son activité. Puis, alors même que les sociétés s'or-
ganisent sous lit direction do choix volontaires, guidés par les.
valeurs subjectives, c'est encore la nature qui, assurant ou
contrariant leur succès, décide de la valeur objective de telle.
ou telle organisation, et, par ses processus physiques, choisit
a son tour entre elles. Et enfin, ces choix volontaires eux-
mêmes ne sont pas hors la loi naturelle ils no sont causes
que parce qu'ils sont euets. Ce ne sont que des modes parti-
culiers de ta force totale. Et en ce sens on peut dire que toute
énergie sociale est une énergie physique transformée. En un
mot, la sociologiepeut et doit rattacher les causes propres de
la vie sociale aux causes les plus générales du mouvement
même de l'univers et apparaît alors comme une science non
plus seulement descriptive, mais réellement explicative.
On le voit, si M. Giddings se fait une idée précise de la
sociologie, it s'en fait en même temps une idée extrêmement
large; et son.livre, ordonnant par rapport aux phénomènes
proprement sociaux les matériaux les plus divers, prouve
que, pour s'en tenir à un point de vue particulier, la socio-
logie n'entend nullement se condamnera t'étroitessedevues.
Gonsidérora-tette toutefois comme des acquisitions défi-
nitives et sur lesquelles on puisse dorénavant bâtir, sans
avoir à chercher de fondements nouveaux, ces distinctions
essentielles que nous propose M. Giddings, celle de la
composition et de la constitution sociales, par exemple, ou ta:
conception même-de la conscience d'espèce*?-
Au premier abord, on peut croire que, en distinguant fOtM-
~<M(7<oK et eot)~x«o)t sociales, M. Giddings entend à peu-
près la même chose que M. T<innies lorsqu'il disting)t&
CemeoMc/M~ et GM<'<bcAa~. et Ai.Durkheim lorsqu'il distingue
ffoMtu'tMMtt'Mn~Me et M<«~'<ff'or~H~uf, et qu'on se trouve
enfin en présence d'une de ces distinctions vraiment univer-
selles, consacrées par l'accord imprévu de sociologues difïé-
rents. Comme M. Giddings, MM. Dnrkheim et T&nnies dis-
tinguent à peu près du type des sociétés non dinëreneiées~
dont les éléments ressemblent aux cellules homogènes des
organismes primitifs, celui des sociétés différenciées. dan&
~SO L'AtfSÉESOt:MMG)Q(.'t!.
<??

lequel les éléments spécialisés pour des fonctions différentes


ressembteut plutôt à des organes hétérogènes. Mais, par élé-
ments de la société, M. Giddings paraît entendre les groupes
composas ou reconstitues à l'intérieur d'un groupeutent plus
large. Quant au rapport des individus à t'intérieur des
groupes. il ue le cousit pas du tout de la même manière que
les précédents sociologues il s'eu fait môme. semble-t-il, une
conception précisément inverse de lu leur. t) tient les indi-
vidus pour ptus dissemblables à t'mtérieur des groupes
qui
font partie d'une société composée, pour plus semblables à
l'intérieur des groupes qui font partie d'une société cons-
tituée. En quoi. il faut reconnaître que sa distinction parait
moins conforme aux faits que .cette de M. TOnuies ou de
M. Dut'kheim. Car, s'il.est vraisemMaMequ'on a parfois exa-
géré, – en cédant à un penchant à la symétrie favorisé .par
l'insuffisance des documents – i'honto~encitt!primitive des
individus il l'intérieur des groupes, il n'en est pas moins
vrai que le progrès de ta civilisation, correspondant à la
substitution des sociétés constituées aux soci6tés composées,
a partout eu pour résultat de difïérenciertes individus eux-
mêmes. Et, dans ces sociétés organisées en vue d'un but
soit économique, soit morat que M. Giddings nous
présente
comme le type des sociétés constituées, il n'est pas rare que
la spécialisation des fonctions, avec lit différenciation inous
ne disons pas l'inégalité) des individus qui en résulte, soit
commandée par lit consciencede ce but Jui mêmeet croisse a
mesure que les sociétés deviennent pins auto-eonseientes.
Nous sommes donc en droit de suspecter lit vérité de l'auti-
these a taquet te aboutit M.
Giddings.lorsqu'il nousprésente
les individus des sociétés composées plus dissemblables, las
individus des sociétés constituées plus sembtabies
que ne le
sont entre eux les groupes dont la réunion forme ces sociétés.
Peut-être cette antithèse a-t-elle été, d'ailleurs, incons-
ciemment construite par M. Ciddings pour les besoins.de sa
conception centrale, la notion de la conscience d'espèce. En
effet, cherchant le fondement même de la société dans cette
conscience et, dans son développement, la mesure du
progrès
social, il devait être naturellement porté à admettre que la
substitution de la constitution sociale à la
composition, autre
aspect du progrès, augmente entre les individus cette ressem.
blance qui favorise la conscience
d'espèce.
De cette conscience même, dont il signale
justement t'im-
ANALYSES. SOCtOLOGtHSPËCO-'tQUË J81

portance, on eût voulu que l'auteur définit plus nettement


l'essence et distinguât les formes. Il paraît le plus souvent
l'entendre comme une ressemblance on quelque sorte exté-
rieure.autre, parexempie, que la ressemhtance des croyances
religieuses ou des opinions politiques, et commes'it fallait,
pour que réellement les individus fussent associés, qu'ils se
sentissent réellement de même espèce, au sens presque phy.
siquedu mot. Maisit importe de remarquer quasi, à l'origine,
les ressemblances extérieures et comme sensibles déter-
minent en effet l'attitude des hommes vis-à-vis les uns des
autres, si même elles conservent, jusque dans les sociétés les
plus civilisées, une influence prépondérante – comme le
prouve cette répugnance presque physique des Américains
pour les nègres, et dont il est permis de penser que le spec-
tacto a influe sur les conceptions de notre auteur, it n'en
est pas moins vrai que la vie sociale elle-même habitue les
hommes à juger importantes tes ressemblances intérieures
plus que les ressemblances extérieures, les morales plus que
tes sensibles; et c'est ainsi qu'il arrive que le sentiment de la
communauté des opinions fonde, malgré les différences d'es-
pèces biologiques, une conscience d'espèce nouvelle. En un
mot, la conscienced'espèce ne s'étargit pas seulement, elle se
transforme, et les caractères que les hommes prennent en
considération pour se déclarer semblables varient avec le
temps et les lieux. La conscience d'espèce n'est donc pas un
phénomène social immuable demeurant identique à lui.
mcme et ne variant que quantitativement au milieu de la
diversité des sociétés it varie, dans une certaine mesure,
qualitativement, comme varient leurs phaseset tours formes.
la, d'ailleurs, est-il davantage un phénomène social univer-
sel, c'est-à-dire tel que, sans lui, il n'y ait pas de société ?
Accompagne t-il toujours les relations qui s'établissent entre
les individus? N'arrive-t-il pas que des sujets considèrent
leur mattre comme c d'une autre espèce En s'ontils moins
liés à lui par des rapports sociaux constants et définis? Et,
sans s'arrêter &ces rapports de subordination, ne voit-on pas
maint rapport de coordination s'installer entre individus
sans s'appuyersur la conscience d'espèce? Elle intervient peu,
de l'aveu de M. Giddings, dans les associations économiques.
Que dire d'une dénnition de la société qui n'englobe pas tes
formes économiques de l'association, et qui, d'autre part,
nous oblige à regarder les indigents comme hors la société?
tM L'AKNËK HHH
SOCtO~Ut~UK.

t<).––Att-«.––AM -H t*~ 1.
Malgré t'ef!ort métttodiquo de M. (..iddings pour trouver le
fait social ft ta fois universel et spécifique, il semble donc
bien que, si la conscience d'espèce n'est pus, comme lu con-
trainte ou l'imitation, plus générale que la société, elle est &
son tour, comme t'attianee ou le contrat, plus spéciale.
Peut-être, si l'on veut échapper a cette étroitesso des
concepts pur lesquels ou essaie de définir, eu même temps
que ce qui convient aux seuls faits sociaux, ce qui convient
à tous les faits sociaux, faut-il remonter jusque l'idée m6me
de rapport, et teuir pour un fait social tout ce qui resntto des
rapports quels qu'ils soient qui s'établissent outre les indi-
vidus. Quelles que soient les idées que les individus se font
les uns des autres, les sentiments qu'ils éprouvent vis-à-vis
les uns des autres, qu'ils se regardent comme de la même
espèce ou comme d'espèces différentes, qu'ils s'imitent ou se
contredisent, qu'ils se contraignent ou coopèrent librement,
du mutneut que leurs états d'esprit sont modifiés par leur
coexistence même et leur « inter-aetion nous tenons un
phénomène dont les individus sont le théâtre sans en être,
en tant qu'individus, la raison suffisante. En partant des
formes tes plus générales de ces inter-actions, seuls phéno-
mènes véritublerneut communs à toutes les espèces de
sociétés, peut-être serait-it possible d'expliquer, de « dériver 1,
plus d'un fait social que l'on semble tenir pour premier, et
de prouver par exemple que lit conscience d'espèce est bien
plutôt une conséquence que la cause même de la vie sociale.

U. SiMMEL. Superiority and subordination %s


subject-matter of Soclology.s'M~'n'on7<' .<fM<wv/<M«~'oM
<<«~ocif )'<«';KM'<o/o~)«'),M p. Extrait de t'~m<'r<c«tt
~MMM«<o/s<M'«~t/. Cttica~o, )8{)C.
Plus encore que M. Ciddings, M. Simmel panttt avoir à
ccBur de prouver qu'une sociologie ~'<c«! MH<:tt a droit H
l'existence. Elle n'a pas besoin, pour se donner un champ
d'études, de se forger des réalités substantielles il lui suffit
d'étudier spécialement tes formes dans lesquelles s'exerce
l'action (tes individus les uns sur les autres. Et sans doute,
ces iuter-actions, naissant des impulsions et tendant vers les
fins les ptus diverses, ne s'exercent pas toutes dans un même
domaine ettes diffèrent par leurs contenus, par tes objets
auxquels elles s'appliquent. Les différents contenus de ces
AXALYSES.
– MCtOMMtESt'HOHQUS ~M

inter-actious, les sciences sociales spéciales les étudieront


individuellement. Mais on peut en concevoir une qui, de
même que lu géométrie fait abstraction de la matière des
cubes pour ne considérer que leur figure (p. 168), fasse abs.
traction de ces « matières de l'activité sociale pour s'atta-
cher à l'observation des formes suivant lesquelles elle se
réalise ce sera la sociologie proprement dite.
C'est ainsi qu'elle pourra étudier à part la supériorité et
ia subordination, formes sociales générâtes qui se rencontrent
aussi bien dans les sociétés économiques ou morales que
dans les sociétés religieuses ou politiques, et prouver que,
quelle que soit lit matière à iaquette ils s'appliquent, les
dinerents types de supériorité ou do subordination qu'elle
distinguera entraîneront différents effets qui leur sont
propres.
La supériorité peut être exercée soit par un individu, soit
par un groupe, soit par un principe collectif supérieur aux
individus.
La subordination d'un groupe a un seul individu, que
cet individu représente d'ailleurs les aspirations du groupe
ou les contrarie. – a pour conséquence ordinaire t'uninca-
tiou du groupe. Par là s'explique le principal avantage des
monarchies elles font l'unité des peuples. La décadence des
cités grecques fut peut-être duo à l'absence d'une autorité
supérieure qui eut uniné leurs partis en les dominant.
Cette unité peut d'ailleurs s'opérer de deux façons soit par
nivellement, soit par gradation. Tantôt l'individu domina-
teur s'efforce d'imposer a tous ses sujets un abaissement uni-
forme ainsi s'explique la relation bien connue du despotisme
avec t'égatitarismo. Tantôt les diverses couches de la popu-
lation, inégales en largeur, participent, à des degrés inégaux,
à ta puissance, soit que son détenteur leur en ait octroyé des
parcelles, soit qu'elles lui en aient arrache par leur propre
progrès. Dans les deux cas, sa supériorité s'explique par le
fait que, tandis que les individus subordonnés ne lui subor-
donnent qu'une partie de leur personnalité, l'individu domi-
nateur les domine avec sa personnalité tout entière. Supério-
rité et personnalité sont intimement liées.
Lorsque la domination est exercée non plus par une per-
sonne, mais par un groupe de personnes, le caractère des rela*
tions entre supérieurs et subordonnés en est notablement
modiMé.Ceux-cis'en trouvent parfois plus durement traités,
~S4 t/ANNEE SOOOLOCtQUE. 1M7

_r_f.. a""
parfois aussi plus justement. La domination d'un groupe est
impersonnette comme telle, moins arbitraire, elle tient aussi
moins de compte de la personnalité môme des subordonnes.
Lorsqu'elle s'exerce par l'intermédiaire d'un agent, – phéno-
mène sociologique très particulier et qui n'apparatt que dans
les sociétés déjà développées la subordination revêt un
caractère tout spécial la domination se fait, ici, plus raide
et ta, plus retaehée en s'exerçant administrativement. t
Lorsque la supériorité appartient non plus à un groupe
d'individus, mais a deux, alors les subordonnés diminuent
ptus aisément le poids de leur dépendance. Et sans doute, s'ils
sont absolument privés de toute initiative, il arrive
qu'ils
pâtissent davantage de la dualité de leurs supérieurs < Hne
fait pas bon servir deux maîtres. Mais pour peu
que
quoique liberté d'action leur soit laissée, il leur est toisibte
d'utiliser les divisions mêmes de leurs supérieurs < ««o&xs
/<~<~«f( ~«M ~<«f~ Le tiers Htat sous l'ancien régime,
entre ta royauté et la féodalité, a été ce tertius gaudens ».
ft est d'ailleurs rare que les groupes supérieurs à un autre
groupe soient absolument égaux entre eux; le plus souvent
ils sont subordonnés eux-mêmes les uns aux autres; alors se
produit ce phénomène sociotogiqueessentiel, ta hiérarchie
par le recours qu'elle donne au subordonné contre son supé-
rieur immédiat, tes subordinations s'adoucissent en même
temps qu'elles se régularisent.
La supériorité d'un principe, d'un idéal impersonnel, qui
s'étéve au-dessus de tous les individus, reud d'ailleurs lit
sujétion moins pesante aux assujettis. Elle a en euet pour
résultat de faire passer les supérieurs eux-mêmesau rang de
subordonnés ils deviennent eux-mêmes obligés envers
l'ordre qu'ils font respecter le prestige se détaciteen
quelque
sorte d'eux-mêmes pour s'attacher à l'idée qu'ils repré-
sentent, à la fonction qu'its remptissent. Sous l'empire, de
plus en plus développé, de t'idée que les supériorités ne sont
que des fonctions commandées par t'ouvre commune, l'infé-
rieur a le sentiment de collaborer avec son supérieur le rap-
port de subordination se change, subjectivement, en rapport
de coopération.
Lorsque, surtout, le développement des sociétés est têt
que, d'une part, les mêmes places supérieures pourraient être
remplies et le sont en fait par des individus différents, que
d'autre part, comme it arrive par la multiplication des
AXtt.Y<ES. – SOCIOLOGIE SP~Ctt'tQUE !SK

nm.. Inn nsAn,un in~iiwirlmu nnnl 6 mn nnnl<nin


cercles sociaux, les mêmes individus sont, à un certain nnGn!
point
de vue, supérieurs, et, a un certain autre, subordonnés, on
comprend que les individus en arrivent à se sentir é(;aux.
Ce n'est pas à dire que le rapport de subordination doive,
ou même puisse disparaître car il est essentiel a la consti-
tution des sociétés il perd seulementet on peut espérer qu'il
perdra de plus en plus ce qu'it peut avoir d'humiliant pour
les inférieurs, puisque la supériorité s'abstrait en quelque
sorte de la personnalité taquetteetteétaitoriginairementtiée.
Telles sont – autant du moins qu'on peut. les résumer
les ingénieuses considérations que M. Slrnmel tire de l'étude
directe des diftérents types de supériorité et de subordina-
tiou. Les lecteurs qui réclament des faits regretteront
peut-être qu'elles ne soient pas toujours illustrées d'exemples
historiques assez précis, datés, tocatisés et comme patentés.
Mais il faut se souvenir qu'il n'y a rien d'étonnant à ce que
la sociologie, telle que l'entend M. Simmel, ne puisse pas
toujours montrer, réalisés dans l'histoire à l'état de pureté,
les rapports dont elle fait ses objets propres i p. tT?'. Ette n'a
pas lit prétention en effet d'expliquer tout ce qui arrive dans
ta société mais seulement ce qui arrive par la société
c'est-à-dire ce qui est du à l'influence déterminée de telles ou
telles formes sociales. Elle a donc conscience de n'étudier
qu'un des facteurs de l'histoire, dont il n'est pas étonnant
que l'action soit souvent, en fait. obscurcie par celle des fac.
teurs collatéraux interférences dont Il faudrait tenir compte
si J'on voulait expliquer l'évolution totale de l'humanité, mais
dont it faut faire abstraction si t'en veut constituer une science
spéciale de la société fp. 413). En ce sens, on peut dire que.
pour M. Simmel, la sociologie doit être une science abstraite.
Cette expression, pourtant claire, a un inconvénient elle
éveille des associations d'idées toutes faites recherche des
< quintessences culte des idées a priori retour a la
< métaphysique mépris des < faits etc., telles sont les
accusations qu'on ne craint pas de rééditer contre ceux qui
insistent sur la nécessité de l'abstraction en sociologie, its ne
fout pourtant que recommander un procédé commun à tontes
les sciences en rappelant que lit sociologie, pour se cons-
truire, doit, non pas « spéculer » sur des idées en l'air, mais
< isoler du complexus de la réalité historique les faits qui
lui sont propres. En ce sens la sociologie doit être abstraite
pour être spécifique.
<S6 L'AGEE SOOOMUtQUE.
<??

fC. nftt'f'rt*'e,
BOUCLÉ. – <– –
Qu'est-ce que la Sooioloarie ? dans la
/<Muc</<' ~< du t~ août t8;)7, p. 3:M-SS(!.
AvecM. Simmot. l'auteur de cet article estime que la soeio.
logie, devant être, non pus toute une philosophie de l'histoire,
mais une science sociale spéciale, se constituera en dégageant
des diiJérentes matières dans lesquelles elles se réalisent, les
< formes sociales Capables de rester
identiques lors mémo
que changent les individus qu'elles unissent, ces différentes
formes août des réalités propres, que l'abstraction
peut isoler
de l'histoire. Mais une science ne saurait se contenter de clas-
ser des formes, elle veut découvrir, entre certains
phéno-
mènes donnés, certaines relations constantes, et prouver que
les uns varient en fonction des autres. C'est pourquoi le
sociologue devra étudier d'une part tes conséquences et
d'autre part tes causes des formes qu'il aura une fois déunies.
Ainsi il se trouvera amené à mesurer l'inl1uence que peuvent
exercer la densité des sociétés, leur homogénéité ou leur
hétérogénéité, te degré et la nature do teur organisation sur
l'économie, sur le droit, sur tes mmurs, sur tes religions, sur
tes arts, et inversement. – Se placer au point de vue
géographique c'est observer tes formes terrestres, leurs
conséquences et leurs causes observer les formes sociales.
leurs conséquences et leurs causes,ce sera se placer au point
de vue sociologique

StMos N. PATTEX. The relation of Sooioto~y to


Psychology. fltelutious < la Sociologieet <~ ~c/<«h.
~'f. ) Extrait des .tMMaho/'<A<'a<M~-t<'<~lca~emf/ o/' po/<7<.
cal <t<t<<
social .fc«'Kt-c,? p. Philadelphie, t896.
Pour M. Patten la méthode analogique dont la sociologie a
tant usé jusqu'ici, n'est féconde qu'en équivoques. Elle peut
avoir ses avantages dans l'enfance de la science lorsqu'il
s'agit d'habituer les esprits à t'idëe que les sociétés humaines
sont, elles aussi, soumises à des lois naturettes; mais, cette
idée une fois acquise, tes notions empruntées aux autres
sciences ne peuvent qu'entraver la marche de la sociologie.
II faut la délivrer, non seulement do la biologie, ce qu'on
paratt généralement admettre aujourd'hui (une des précé-
dentes brochures de l'auteur est intitutéo ~<<Mt-fo/Mo~~
Socto~), mais, ce qui paraîtra plus difficileà admettre après
les f<'<MC<~de Giddings, de la psychologie même.
AttAU'SKS. – 80CMKM!E SPÉCtFtQUE IS?

A vrai dire, nous ne trouvons pas, dansl'article do M. Pat.


ten, la distinction formelle et précise entre faits sociaux et
faits psychotoniques que suppose cet effort pour ériger la
sociologie, non seulement eu science spéciale, mais en science
indépendante.
M. Patten entend-il rappeler que lit sociologie n'est pas
réductible directement à la psychologie individuelle, et qu'il
ne nous suturait pas, par exompie, pour découvrir les formes
des Institutions, d'un simple examen de conscience? Nous
sommes alors d'accord avec lui puisque nous tenons que lit
mise en rapport des individus fait apparaître des phéno-
mènes originaux. Mais veut-il dire que ces phénoméues ne
supposent rien de psychique, et que faction des milieux r
s'exerce directement, sans l'intermédiaire des faits de cons-
cience? Alors faction de ces milieux nous parait aussi inex-
piicabie que ia réalité de ces phénomènes est indéfiuissabie.
Les mitieux, quels qu'ils soient, n'agissent pas sur tes rotations
dos individus autrement que par les impressions qu'ils font
sur teurs consciences. Ce qui unit les hommes, nous dit
M. Patten, ce n'est pas quelque idée subjective, mais une
condition objective ~p. 13i; ce n'est pas la communauté de
race ou d'idées, c'est la communauté du lieu dans lequel ils
se réfugient. Maiscette communauté d'habitat peut etie exer-
cer une action sociale autrement que par tes sentiments réci-
proques auxquels elle invite les individus qu'ette rapproche'?
Et lorsque, pour maintenir leur association, s'organise cette
contrainte sociale (social control) à taquette M. Patten attri-
bue une si grande importance, ne nous dit-il pas que sa puis-
sance repose sur les plaisirs qu'elle est capable d'assurer ou
de retirer aux individus? Si l'on se souvient d'ailleurs que
M. Patten explique l'évolution sociale par le passage do
l' économie de la peine à f l' économie de la jouissance
passage iui-méme expliqué, sembte-t-ii, par la prépondérance
que prennent les fonctions motrices sur les fonctions sensi-
tives, on s'étonnera qu'il veuille détacher radicalement la
sociologie de la psychologie, alors qn'it a construit, pour sa
o/'jMC<f<<
ï'Ae<M')/ ~rrc~, tout un système psychologique.
Pour notre part, il nous parait sans doute impossible que
le soriologue explique les relations qu'il constate, entre les
formes de l'économie par exempleet les formes de ia famille,
ou entre la densité de la population et la division du travail,
sans faire de la psychologie. Tout phénomène social, résul-
iM t.'ANK&EMOM.OOtoUH.tMT
tant dece que Ciddings ou Simme)appellent t' < intercourse
ou i* inter-action des individus, suppose une communica-
tion préatubte des oons'-iences.C'est pourquoi on a r:)ison de
dire que la simple juxtaposition des individus ne constitue
pas en ette.meme uue société pour qu'une société se consti-
tue il faut que les individus juxtaposés aient réagi tes uns
sur les autres – et que par cette réaction réciproque t'hacun
d'entre eux se soit trouvé modifié.
Mais est-ce & dire que t'analyse des faits de ]a conscience
individuelle rende inutile l'étude spéciale de ceux qui resut-
tent de l' u interaction des consciences? Que la psychologie
rende inutile tu sociologie? Depuis quand une science, parce
qu'elle se laisse rattacher à une science plus générale, perd-
elle toute raison d'être ? On reconnaît qu'on ne peut pas faire
la biologie sans physique et sans chimie est ce à dire pour
cela qu'on dénie il )a biologie son droit a l'existence ? Hxiger,
pour qu'une science se constitue a part, qu'elle prouve qu'elle
n'a pas besoin des autres, ce serait méconnaître tout l'en sei-
gnement de l'histoire des sciences elles s'élèvent en s'ap-
puyant les unes aux autres. Les plus complexes n'ont nul
besoin, pour se constituer, de « couper les ponts entre elles
et les plus simples il leur suffit do montrer que, de !a com-
binaison des phénomènes étudiés par celles-ci, résultent des
phénomènes nouveaux, dont il faut chercher directement les
ellets propres et les causes prochaines.
C). Hernard t'a dit avec la plus grande netteté Quand on
réunit des étéments physiologiques, on voit apparattre des
propriétés qui n'étaient pas appréciables dans ces éléments
isolés. Des phénomènes tout ù fait spéciaux peuvent être le
résultat de l'union ou de l'association de plus en plus com-
plexe des éléments organisés. Leur union exprime plus que
l'addition de leurs propriétés séparées. Ainsi, la connais.
sance de t'homme isolé ne nous apporterait pas la connais-
sance de toutes les institutions qui résultent de son associa-
tion et qui lie peuvent se manifester que par la vie sociale.
La « connaissance de l'homme isolé la psychologie indi-
viduelle ne saurait donc suffire à nous renseigner sur les
formes, les conséquences et les causes sociales do la subor-
dination par exemple, ou de la coopérationou de l'opposition.
Et sans doute on peut dire que ces phénomènes sont encore
en dernière analyse des phénomènes psychologiques mais
ce sont du moins des phénomènes psychologiques originaux,
ANALY8KS. SOCtOMOtK SP~O~tQUB !5H

que ta simple inspection des données de !a conscience indi-


viduelle ne pouvait faire prévoir, ti importe don'' de les Étu-
dier a part 'est pourquoi nous pensons que la sociologie
peut et doit être il lu fois psychotonique et spefifique.

FtX.~LKS
XHMAXQUHS
A quelles lois obt'it le mouvement des sociétés et le con-
sensus de leurs parties? Sont-ettes soumises dans leur
cnscmbteauneevotution qui sera nécessairement régressive
après qu'elle aura été progressive? Ou la régression n'atteint-
elle que certains de leurs étéments? Ht)devenant plus denses,
plus complexes, mieux organisées deviennent-elles, ou non.
plus semblables les unes aux autres? La transformation de
leur structure a-t-elle pour résultat d'assimiler les indivi-
dus qu'elles rcunissent, ou de les différencier? Cette trans-
formation est eifo i'œuvro de la pression quasi mécanique
des faits économiques ou de l'influence des idées ? Leur orga.
nisation s'élabore-t-elle tout inconsciemment, ou se con-
forme't-eite à des volontés sociales conscientes? Tous les
individus participent-ils également à ces volontés, ou la
société ne prend-ette jamais conscience d'etto-meme que par
une élite? La subordination des masses aux otites est-elle un
fait passager ou un fait constant, essentiel à la constitution
des sociétés? Dans quelle mesure tes formes de cette subor-
dination réagissent-ettes sur les individus qu'elles mettent en
rapport ?
Mieux qu'aucune discussion de mots, t'6num6ration rapide
de ces différentes thèses, qui se dégagent des travaux que
nous avons résumes, nous paratt propre à prouver qu'il existe
bien toute une série de problèmes, intimement liés d'ailleurs
les uns aux autres, qu'aucune science spéciato ne s'est jus-
qu'ici attachée et que ta sociologie doit spécialement s'atta-
cher à résoudre. Ce sont ceux qui résultent des formes origi-
nales, des conséquencespropres et des causes prochaines des
rapports qui s'établissent entre les individus pour faire
nattre, de leur juxtaposition, une association.
DEUXiRMESHC'DOX

SOCIOLOGIE MËLI&tMUSH

h –TKArr~t:~t:K.\t.'X,)')ttt.t'St)t'n));, )))::)-))<)))).'
)'?)')). MACiiii.

F. BYRO?!,JEVONS. – An Introduction to the History


of Religions. (/M/o~Ke//o/i « ~7«s/on'<'des ;'e/~t'OMS.)Me-
thuenand Co, !8!<C,tV, 44!<p.
M. J. nous donne un véritabte manue) de la science des
religions telle que la conçoivent les savaots de la nouveitc
Ècote anthropologique H. Smith, MA!.Tyior, Lang, t-'raxer.
< Il veut résume)' IHSrésultats de
t'anthropofogie récente,
apprécier leur xnportaHce pour les pt'obtmnes retigieux.
Ainsi, le livre s'adresse d'abord aux étudiants en histoire des
retigions; mais H présente encore de riuteret pour les folk-
ioristes, et en gênerai pour le grand public. Exposer l'état
actuel des questions, et, à propos de chacune, montrer dans
quel sens la recherche devra s'orienter, voita les deux buts
de l'auteur.
M. J. résume et a joute sa méthode est exactement celle de
ses prédécesseurs ses principes sont ceux qu'ils ont adop.
tés. H iui arrive de se proclamer leur disciple (ex. p. 2oQ).Il
est donc resté Mets à ce qui est l'esprit même de ce que nous
pouvons appeler t'Hcote anglaise, ou plutôt encore (car elle a
déjà souvent dépassé tes Jhnites de la science anglaise) l'École
anthropologique de ta sciencecomparée des religions. Il serait
long d'exposer les résultats généraux de tous ces travaux.
Mais il est indispensable de montrer, à grands traits, pour le
public socioiogique et à propos de ce livre, ce qu'est essen-
tiellement cette école. Historiquement, elle dérive de
J'évolutionnisme Spencerien, et la continuité de l'évolution
ANAHSBS. – MCMMGtE RSUOtEU~ti 16i

religieuse est t)n


B att un f)a
de Kfa
ses th&mae
thèmes fn~npie
favoris. N«!~ttt!ft<tttnm«~t
Scientifiquement,
d'une part, elle s'oppose&l'Écoiophilologiqueallemandeet
fraaçuise (tout particulièrementavec M. Lang), et, d'autre
part ellese rattacheà la sciencerécentede l'anthropologie.
Elle tacitede retrouverles principes humains, et non plus
historiquesotphilologiques, desfaits religieux.L'explication,
commetoutesles explicationsde l'anthropologie,consisteà
découvririe fond psychiquede l'humanitétout entière sous
la variété des phénomènes.Eu .étroits rapports avec tes
recherchessur les origines de la famitto,de la société,du
droit, l'anthropologie religieusea doncconsistéà introduire
l'étude des religionsprimitivesdans le cadredes anciennes
études historiques, phitotogiqueset fotktoristes.Les faits
qu'étudiaientl'histoireclassiqueou bien la philologiecom-
parée, ou bien le folklore,reçoivent,eu effet, un jour tout
nouveaude leur constantrapprochementavec les faits des
religionsprimitives.Alorsl'identitéfondamentaledocestrois
ordres de faits apparatt religiousprimitives,religionsdes
anciens peuplescivilisés,survivancesdes croyanceset des
rites dans les usageslocauxet les traditionsde l'Europeet
de l'Asie.
Maisce sont là, en quelque sorte, les procédésextérieurs
de l'école.L'espriten apparaitavecdeux caractèresconstants
depuis M. Tylorjusqu'à MM.Harttandet Jevons.L'anthro-
pologieest une sciencevague,sous grandeprécision, où la
comparaisonn'est pasgouvernéepar des canons rigoureux,
où la recherchedu fait contraire n'est nullementcapitale.
L'étudedes concordancesest tout, celle des différencesest
secondaire,fi y a à cela une raison l'anthropologieest une
branche de la psychologieindividuelle; la méthodede la
religioncomparéeest donc du mêmegenre. 11s'agit toujours
de retrouverles processusmentaux individuelsqui sont &ta
base des faits croyancesou actes religieux.La découverte
des principespsychiquesépuisela rechercheet l'explication.
Quandon a rapprochéles régiesdu tabouet teslois de l'asso-
ciationdes idées,quandon a rapportél'originedes culteset
de la magieà unenotionprimitivede la causalité,le but est
atteint. Un certainintellectualismeest le principecachéde
cette méthode.Lesactionsde l'hommesont censéesdépendre
de ses vuessur le monde.Cen'estpaspar les besoinssociaux,
ni par les institutionsconcomitantesqu'on expliquela forme
des phénomènesreligieux,mais par des conceptionstout
Is. UKtmMEM.Ann<K:
fiucM.~97. )t
tG2 Î'ANK)}RSOCtOMCtQCE. itK)7

individuelles.Je sais bien que R. Smith a fait la part plus


grande aux rites qu'aux croyances,que M. Fraxera ambi-
tionnésurtout de constitueruue sciencedes rites. Mah)tou-
jours et partout, même cheznotre auteur, commeon .verra,
ce sontencoreles Idéesqui gouvernenttout.
Le caractère générât des résultats s'en ressent. L'emploi
principalde la psychologieindividuelleet de l'anthropologie
aboutit surtout &constituer des schèmestrès généraux,où
tous les faits fusionnentles uns avec les autres, mêmeavec
leursopposés,detelle sorte qu'on aboutita une sorted'image
générique,et non pasà un systèmerationneldes phénomènes
constates. Certes rien ne se répèteplus, et chez les divers
peuples et aux dittérentsmomentsde l'histoire,que les faits
religieux. La constitution de genres n'est nulle part plus
facile et sur bien des points,les travauxdes savantsanglais
ont abouti du moinsà cela, Mais l'intérêt consisteprécisé-
ment à voir l'évolution, la déformationde ces genres, leur
division historique en espèces distinctes.En résumé, tous
les caractèresde ces travaux proviennentd'un mêmefait la
méthoden'est pas sociologique.Entout cas, des considéra-
tionsde cet ordre ne sont qu'accidentelles ou accessoires.Or
c'est en rattachant, une foispour toutes,lesfaits religieuxà
leur substratum social, qu'on leur donneraleur véritable
physionomie.leur place,et qu'on les verrado la façonréelle-
ment objectivequi convient.
Lesouci de l'histoire, la directionde l'étude versles pro-
blèmesde l'évotutiou religieuse,lostendancesvers une vue
volontaristeet sociologique(p. S.40U.4t)) sont des.qualités
précieusesde la pensée de M. J. Il est un des savants de
l'Écoleanthropologiquequi ont le plus rénéchiaux principes
de leur science.Il a apportésoitdescritiquesà desthéories
admises,soitdes conclusionsnouvelles.Commeou n'analyse
pas uu manuel, nous allons nousbornerà l'étudedes ques-
tions les plus importantes où M. J. nous semble avoir
innové,savoir les rapports do la religionet de la magie,le
totémisme,la théoriedu tabou.

I. – M. Frazer avait aboutià cette conclusiongénérale,


d'uue identitéfoncièrede la religionprimitiveet de la magie
dite sympathique, qui subsiste dans le folklore identité
d'originepuisque toutes deuxdériventd'unemêmeconcep.
tion de la nature, oa n'existentni la notiondu naturel, ni
– SOQOMGtB
ANAUSES. !<M.tGt)!USt! 16&
celledu surnaturel,où toutse mêio, et où un départ n'est pas~
fait entre les pouvoirsmagiquesdes hommeset lespuissances
divfues identitéde nature, puisquela magieet le culte sont
des applicationsdu mAmeprincipe, suivant lequel le sem-
blante engendrele semblable.L'actedu sorcierou du prêtre
est censé,on etïet,produiresympathiquementuu phénomène
similaire, correspondant et attendu (Ct.p. 281).– Contreune..
telle théorieM.J. s'élèveavecla plus grandeénergie. Loin
d'être lu sourcede lit religion,ou de lui être identique,la
magie,pense-t-il,en estl'opposé.Elleest différented'origine.
Cetteconceptiondeia natureque AI.Frazerdécrit,où hommes
et dieux M confondaient, où le mélangedu surnaturel et du
naturel fournissaitde l'actiondivineet humainedes notions
fantasmagoriques, cetteconception,soutientM.J., n'a jamais
existé. Aulieud'avoirpourprincipeles capricespossiblesde la
nature.la magiedu primitifreposesur la croyanceà i'unifor*
mitéde seslois(p. L'animisme,suivant lequeltoutdans te
mondeestanimé,n'est nullementunevuereligieuse c'estune
théoriescientifiquedes choses.La magie sympathiquen'est
que la scienceappliquéedu sauvage(p. 33). Si le primitif
croit à son efficacité,c'est qu'il a la certitudeque des lois
naturelleset uniformesexistent (p. 291,4 H).La religion a
toujours eu une autre origine.Sans parler de sescausessen-
timentaleset de ce sensreligieuxqui est au fond même de
l'humanité,la religionreposesur la foi en desêtres surnatu-
rels. Leur existenceest déduitede la constatationde faits ou
de chosessurnaturels,e'est'a-diresitués en dehorsdu pou-
voir de l'homme.Lanécessitéd'entrer en relationsamicales
aveceux, par un culteouune religion,dérivedelà. Dèsl'ori-
gine les deux notionssemblentavoir existé. Les confusions
que, dans l'histoire,lespeuplesont souventfaitesentreelles,
en Chaldée,à Rome,ontconstituéde véritablesrégressions
dans l'évolutionreligieuse(40-42).– La différencede nature
n'est pas moinsradicale.Quandellea été religieuse,la magie
n'a été qu'uneparodiede la religion, une imitationfuneste.
La religiona pourbut lebien dela communauté;il s'agit de
conciliercesêtressupérieursqui peuventêtre terriblesfaute
d'accordaveceux.Lamagiea, au contraire, pour but, le mal
de tel ou tel individu,mêmedé parents. Souventelle est une
véritableinfidélitéà l'égarddes dieux du clan; ellese sert
d'autres esprits, emploieun autre culte (p. 179).Enfln la
magie a un caractèreéminemmentcoercitif tes esprits sont
i64 L'ANNÉESOaOMOQUË. <89?
forcésd'agir dans le sens qu'indiquete sorcierou le partici-
pant aux actesmagiques.Or l'attitudede l'hommeenversles
dieux M'apu être primitivementcoercitive(p. 43,343,t"r).
Dès l'origine, la religion tut une véritubteallianceavecdes
êtres suprahumains c'est ce que démontrent les rites
d'alliance, de communionqui sout le fondmêmedu toté.
misme.

tt. – Dans~a récrie du totémisme,M.J. complèteplu-


tôt qu'il ne critiqueles résultatsauxquelsl'Écoleétait parve-
nue. Il laisseintactesles principalesconclusions et suit a peu
près l'expositionde M. Frazer.H admet que cette formede
religion a du être universellementrépandue. Il nous en
montre et le coté socialet le côté religieux.Le totémisme
correspond aux plus anciennes organisationssocia!es~!)u
clan; il est le principe det'atiiauce.do lu communionpar le
sang, du systèmede parentédans le clan; il est le motifde la
vengeancedu sang p. tOO,99). Lerespectmoitiémoral, moi-
tié superstitieux,du aux êtres totémiques,s'étendaux mem-
bres du clan, puisqueles uns et les autressont supposésde
mêmeorigine(p. 107-9) de ta le respectd'autruià l'intérieur
du ctan. Letotémismeest le centredela viemorale.Au point
de vue religieux,c'est toujours une espèce,animaleou végé-
tale, considéréecommeun tout, et jamaistel ou tel individu
de cette espècequi est le totem cette espèceconstituedonc
un véritableclan d'êtres divins, dont on se vengeà l'occa-
sion (p. 100). maisavec lesquels, par dos rites communie!s.
on établit une union religieuse.La fusionidéaled'une com-
munautéanimalèet d'une communautéhumaine,voiiài'es.
sence du totémisme.De là, d'une part, la notiondu péché;
dont M. J. met en lumière l'origine les offensesau totem
sont devenuesnon seulementdes actes dangereux,maisde
véritables péchés(p. 112). Do là, d'autre part, le sacrifice
totémique(129)où le clan communieavecses dieux,et s'unit
à euxen mangeantla chair d'un être totémique(p.220,2).De
ce sacrificeviennentles caractèresdu sacrificeanimâttui-
même,tel que l'a conçul'antiquité,et qui n'est qu'une con-
centration du totémisme(ch. x et xt) la nature sacrée de
t'autet. les formesdu rite qui s'ypratiquent,le repasqui suit
d'ordinaire, tout cela dérive, par évolution,du totémisme
primitif.
A cette théorie,presque classiqued'ailleurs,M.J. ajoute
ANALYSE!).– SOCIOLOGIEHeUGtEUitE J68

une hypothèseneuveet presqueinattendue sur les origines


du totémismeetd'intérossants développementssur t'inftuence
qu'il a eue pour le progrèsmatérielet religieuxde l'huma-
nité. – Letotémismeest le plus ancien type de religionhis-
toriquomentou etimotogiquementconnu. Mais,si ia difïé.
rence entre le surnaturelet le naturel a été de tout temps
sentiepar l'homme(p. 18),et si le totémismeconsistedans !a
recherched'une attiaoceaveccesêtres divins,c'est qu'il doit
provenir(M.J. présentecette idée avec toutes les restric-
tionsnécessaires),d'une religionptusanciecnedontitneserait
qu'une régression(p. 393).Cettereligion seraitune sortede
monothéisme,antiqueet vague,ou une consciencereligieuse
rudimentaire(p. 414)sentaittout simplementla présencede
la divinité, sou caractèreterrible et bienfaisant, ne faisait
que tendreverselle(p.4)3) il tucherchait(p.i09.HO)pourse
concilierpar des cultes l'amour d'un être tout-puissantsur
la nature(p.4MLe totémismea étéune erreuret surlechoix
du symbolequi représentaitcet être suprême (on l'adora
dans une espèceanimale),et sur les moyensqui pouvaient
assurer l'hommecontre les capricesde cet être, puisqu'on
acquit l'alliancepar un repas sacrificiel.Le monothéisme
juif (ch. xxv),quelque discutéeque soit son origine,pour-
mit bien être la persistanceextraordinaire,dans une nation
et dansune religion,de cet état prétotémistiquede la pensée
(révélation)religieuse.
Quantà ses eitets,le totémismea eu une influenceconsidé-
rable sur révolutionéconomiquede l'humanité.Reprenant
une conclusionde M. Frazer,M.J. émet, avec des raisons
très ingénieuses,l'idée que c'est le totémisme,culte d'une
espèceanimaleou végétaie.qui est l'originede la domestica-
tion des planteset des animaux (p. ~5), qui est donc« le
premiermoteurdu progrèsmatériel (p. 1)3~.L'instinctdu
primitif,du nomadechasseurou pêcheur,n'est, en effet,rien
moins qu'un besoinde réserver pour l'avenir le sauvage
actueldilapidetoujours.D'autre part, la chassepousse,non
pas a conserver,maisà détruire,Il fallait doncde bien puis-
sants motifspouraboutiràgarderles semencesd'unerécotte,
à laisserse reproduireles animaux.Cesmotifs, seul le toté-
mismepouvaitles fournir(p. ~7, ~9).tt défend,en etïet,do
manger,saut dans certainscas exceptionnels,un alimentqui
proviennedu totem.Aussitrouvons-nousque la plupartdes
animauxdomestiques ont étésacrés,que,jusqu'à une époque
<t66 t-'AKttËK SOCtOMCH~UE.))t!'7

rapprochée, ce fut un sacrifice que de tuer uu animal quel-


conque. Et, setou M.J., si les cultes de la nature, les cultes
agraires surtout, sont d'origine totémique (p. 3~), c'est parce
que !a culture ctte mêmedes plantes n'a pu avoir d'autre ori-
.ginefp.MO,M7).
Enfin M. J. dérive, comme R. Smith, du repas totémique
sacrificiel le sacrifice expiatoire; mais sur ce point M. J.
propose uue idée qui, plus précise et plus développée, eut pu
être féconde (p. 1)5. tH, ~60).Le totémisme obtient ia protec.
tiou des êtres surnaturels par un culte essentiellement com.
muuie); mais cette protection n'était nécessaire qu'en cas de
détresse nationale ou individuelle. Or, les péc))ésindividuels
sont plus fréquents que les désastres publics, et même, on
imagina bientôt que les malheurs du clan provenaient de la
faute de tel ou tel de ses membres le sacrifice
totémique,
a
puis expiatoire, donc eu pour but non seulement de rame-
cet' les dieux vers la société, maisaussi de rapprocher un cou-
pabte des dieux et de ta société, à la fois. AI.J. soutient donc,
peu clairement il est vrai, l'origine expiatoire d'un certain
nombre des rites du repas sacrificiel. Il a le sentiment que les
savants de t't~coten'ont pas tout dit sur cette question. Mais
une telle indication est loin d'être suffisante, et je crois
que
M. J. eût bien fait de soutenir la coexistence primitive du
sacrifice communie! et du sacritke expiatoire, et de constituer
deux espèces distinctes du sacrifice.

!!t. La théorie du tabou que NI.J. propose est des plus


.originales. La moratité est, â son origine, étroitement liée à
Ha religion (p. )<?, t H),au totémisme. La source de la morale
) <st,pour ainsi dire, religieuse, ouplutôt, l'institution du tabou,
qui n'est spécifiquement ni moral, ni social, ni religieux
(p. KO),qui est tout eusembie, mais est plutôt d'aspect reli-
gieux, est la forme réellement primitive sous laquelle tes
préceptes moraux se sont présentés à l'humanité. Les règles
sociales, morales ou religieuses, ont été surtout prohibitives.
< Ne fais pas, disent les plus anciennes coutumes et les
plus
anciennes lois. Ce caractère négatif de la morale élémentaire
est précisément celui du tabou est tabou ce qu'on ne doit
pas toucher. Cette idée de devoir, elle-même centrale dans
toute morale qui a fonctionné, c'est le système du tabou qui
l'a fournie il est la forme primitive < de l'impératif catégo'
tique (p. 84). 11est a priori, n'étant nullement dicté par
– SOCtOMCtC
ANALYSES, MUOtKUSK 167

l'expérience, mais posé au nom de principes religieux, ou


observé inconsciemment. !) est purement formel et sans
contenu. I) est môme la source de t'obtigation morale pure;
et voici comment. Le caractère essentiel du tabou, c'est sa
contagiosité Les faits, sur ce point, sont bien connus. Cette
contagiositéest, d'ailleurs, réglée par les principes mûmes de
l'association des idées (p. 67). tJoe chose tabou en touche une
autre. le tabou passe de l'une a l'autre; un individu touche
un cadavre, il devient tabou comme le cadavre tui-méme.
Telle est l'origine, non seulement d'un grand nombre de faits,
mais encore do tout l'aspect de la morale primitive. La crainte
des morts, de prononcer leur nom (60-1le serment (C4-S),
les fêtes (8S'. etc., ont pour motif te taboudes morts, celui des
places et objets saints, celui des jours déterminés, la crainte
de leurs eiïets: et il y a aussi «des raisons de croire que, dans
les sociétés primitives, les seuls criminels sont les violateurs
d'un tabou, et que le crime amène le châtiment avec soi,
puisque, dans lecas derupture d'un tabou, te coupabledevient
tabou tui-métne La crainte de devenir tabou est le motif
pour lequel le primitif s'abstient de tel ou tel acte. L'évo-
tution du tabou, secondée par une véritable sélection parmi
les divers tabous, rejetant les uns. sublimant les autres, a été
la véritable cause des dinérentes règles morales aujourd'hui
en vigueur. Le système du tabou fonctionne encore aujour-
d'hui derrière les actes qui semblent les plus éteignes d'une
telle origine; la sainteté, la religiosité rationuellea (p. 368)
sont la simple exaltation de ce processus sentimental primi-
tif par lequel l'homme évitait telle ou telle chose tabou.
Cette théorie, M. J. ne la présente que comme une digres-
sion, elle est pourtant la partie maîtresse de son livre. Le
reste consiste en une série de développements, tous suggestifs;
sur le fétichisme (xm)qui s'est développé quand les dieux de
la tribu n'ont plus suffi à l'individu, et qu'il lui a fallu des
dieux et des rites pour lui; sur les dieux familiaux et indivi-
duels (x'v). sur le culte des aucetres (xv) que M. J. dérive
aussi des anciens cultes totémiques sur le sacerdoce (xx),
effet de la concentration de la religion et du culte sur tel indi-
vidu et dans ses mains; sur le syncrétisme et le polythéisme,
produits, d'une part par la fusion des cultes tribaux dans un
culte national, et de l'autre par la réaction de la civilisation
-matérielle sur la religion qui l'avait causée. L'existence de
l'agriculture, due au totémisme, et, par suite, celle des rites
~C8 L'ANKÊK SOCtOMCtOUE.M9T

etcultesagraires,donnentun sérieuxappointau polythéisme.


Eu outre, te développement Économique de t'humaniteaboutit
&faire de la religion une sorte de commerceet de contrat
avecles dieux,tandisque lit fablecréaitunemythologie(xtx),
explicationde l'univers et des rites, totalementopposéeà
une sainereligiosité(p. M'!).tt eut falludésespérerde l'avenir
de la religionsi, en même tempsqu'agissaientdes causes
historiques, n'était intervenue au sein du vieux monde
(vr' siècle av. J..C.), une véritablerenaissancereligieuse,
causée par un réveil des croyancesconcernantla vie et ta
mort(v),la viefuture (xx<),devenuesde plusen plus morales
et religieusesfxxn).A ce moment,dans l'antiquitégrecque,
une pousséede mysticismeso produisit i'idéesémitique du
sacrementet de la communionse rapprochadu sentiment
qu'il fallaits'assurerdéscettevie le bonheurj'outre-tombepar
des actes religieux et une vie morale de ta les mystères,
ceux d'Eleusis en particulier (xxm,xxtv),qui préparèrent
l'avènement du monothéisme(xxv). – M. J. adjoint à
son livre une dissertationphilosophiquesur Évolution de
la croyance.
On voit sur combiende problèmess'est exercéela péné-
trante réHexiondeM.J. Uncertain nombrede questionstrai-
tées'dansce livren'avaientpas mêmeété touchéespar l'~cote
anthropologique.Toutelit dernièrepartie, sur lit vie future,
les mystères, est originale. Peut-être mêmedomine-t-elle,
dans lu penséede l'auteur, le plan de l'ouvrage.Encela,M.J.
est bien dans la traditionanglaisepourlaquelleune étude,si
généralequ'ellesoit, a toujours pour but l'explicationd'un
ordre spécialde faits.C'estpourtant, à notreavis,la partie la
moinssuggestive la conclusionn'a pas unegénéralitépro-
portionnéeà celtedes propositionsqui serventà t'établir. Hy
a là un défaut qu'on retrouverait mêmedans l'admirable
« GotdenBough deM. Fruzer.Au fond,chezAi.J., l'intérêt
qui est porté à ces étudesde < religioncomparée est d'une
part (commechezMM.Fraxer et liartland),historiqueet phi-
lologique,et il s'agitd'expliquertel ou tel faitde l'histoire,de
la poésieou de l'art grecs ou romains;et, d'autrepart(comme
chez M. Lang),religieux,et il s'agit de distinguersoigneuse-
mentce qui est réellementreligieuxdece qui ne l'est pas, te
mythedela croyance,la magiedu culteintérieur.Desconsi-
dérations, en quelque sorte extérieures,guident le savant
dans le choixdu problème,des principes,des dénnitions.
– SOCtOMCtB
ANALYSES. ttEHGtt!0!E 169
Le défautdece modede penser est particulièrementappa-
rent dans la discussionque M,J. a Instituéesur les origines
du totémisme.La questiona été posée par des préoccupa-
tions oxtrasciontifiques,< dansla convictionque les intérêts
de la vérité et de la religion sont fondamentalementiden-
tiques (Préface).Nousne devons donc pas nous étonner
quandnous voyonsM.J. supposerune phaseprétotémistique,
monothéisteet purede la religion.Cette hypothèsegratuite,
invérifiable,nous semble,jusqu'à nouvel ordre, de nature
plutôtmétaphysique.Quel'amoursoità la basedu totémisme
commedu christianisme,personnene i'a jamaisnié.MaisIly
est a l'état d'élémentcomposant,non pas à l'état de principe
origineldont te totémismene serait qu'une déchéance.
La mômevue théoiogiquea conduit M.J. dans sa critique
des théories de i'Éeoiesur la magieet le surnaturel l'exis-
tence pour le primitifd'êtres bons, tout-puissantssur la
nature, en relationsfixesavec une communauté (p. ~04),
serai),seioniui.enetde lu conceptionoriginelledela divinité.
Maiss'ensuit-ilque cesêtres aieutété nécessairementconçus
comme surnaturels? Sans doute j'admettrai avec M.J. (et
j'imaginequeM.LangniM.Frazerncferaientici dedifncuités)
que les notionsde naturelet de surnaturel ne sont pas des
conceptsreligieux, mais des conceptsmétaphysiques.Elles
appartiennentplutôtà l'ordredo la connaissancesocialequ'à
l'ordre de la religion.Néanmoinsleur colorationest originai-
rement religieuse. L'animismeest un moyen d'explication
pour le primitif, maisles esprits sont non seulement des
causes,cesontaussidesformesreligieusesdeschoses,ce sont
des êtres auxquels ia société,l'individu croient, et doivent
s'adresserà l'aidede cultes. Quoiqu'en dise M.J. qui, sur ce
point,n'invoqueaucunfait nouveau,lesdieux ont, à l'origine,
fait partieintégrantede cesystème,ni naturel, ni surnaturel,
qui étaitle mondeétfoitet vaguedu sauvage.Leprogrèssocial
seul sépara les dieuxdece qui n'était pas eux, opérant entre
eux et la nature une divisiondu travail pareilleà cette qui
s'opéraitdans la sociétéoùla religionse difïérenciaitdesfaits
de la vie économiqueou juridique. Les dieux sont devenus
des êtressurnaturelsquand t'idéede nature a pu s'opposerà
eux. Maisceci n'est qu'un phénomèneinfinimenttardif le
caractèrenaturalistedela plupartdes religionsdites aryennes
ne pourraits'expliquersi, dés l'origine,iadivinitéet la nature
s'étaientexclues.
HO L'AKKËK 1897
SOCIOLOGIQUK.
M. J. distingue de la mcme façon lit magie et le culte, le
prêtre et le dieu, et soutient que leur fusion n'est qu'un phé-
nomène secondaire; la magie a pénètre la religion, le prêtre
.n'estdevenu qu'accidentellement uu Dieu. Si, sur ce dernier
point, nous croyons qu'en ellet lit théorie de M. Frazer
demande une revision et qu'il faut bien séparer le prêtre-dieu
.du prêtre possédé du dieu. il est impossible de trouver, en
tait.. aucun culte pur de tout rite magique, et dont les cultes
magiques ne seraient que des altérations. Est-ce des cultes
totémiques que veut parier M. J.? Mais leur forme commu-
nielle embrasse tout un fond de magie sympathique, puisque
lit communion est essentiellement l'acte mystique par lequel
une partie du Dieu est ussimitée au tout du clan. Est-ce des
cultes 1)rétoté-miques?Mais il est impossible d'en parler. Le
caractère magique des quelques cérémonies australiennes
connues, celui des cultes polynésiens et des fêtes agricoles des
Indiens do l'Amérique du Nord est tellement marque qu'il
semble impossible de prouver qu'il y ait eu des types é)émen.
taires de culte qui n'aient pas eu une forme de rite magilue
bien dessinée. Lesfaits sout bien loinde cndreravec le tableau
qu'en trace M. J.
Mais ce qui nous semble rester du livre de M. J.. c'est sa
bien intéressante idée que la domestication des plantes et des
animaux a une origine totémique; elle séduite première vue,
surtout quand, par l'habitude qu'on a d'observer les faits reii-
gieux, on sait toute teurinnuencesur la vie économiqued'une
société, et qu'ainsi, ponrbiendes paysansencore, tes semailles,
la récolte, sont des actes presque religieux. Certes les objec-
tions naissent en foule. Entre autres opinions, ou pourrait
soutenir que t'être totémique est souvent tel, précisément
parce qu'il est la principale source d'alimentation du c)an;
ainsi la vache aux Indes, ainsi te gâteau de raisins secs de
certains clans arabes. Mais l'idée est émise, on n'a plus qu'a
chercher si tes faits, dans leur ensemble, la confirmentou t'in-
firment décidément. En second lieu, M. J. nous semble
avoir bien mieux vu que M. Frazer la nature du tabou il a
senti que c'était l'origine de la moralité même, la forme pri-
mitive de l'obligation morale il a bien montré que la sanc-
tion du tabou était ta véritable sanction originaire des pres-
criptions morales. Quelque imparfaite que soit l'analyse des
faits, M.J. a apporté l'indication décisive.
Lessuggestions nouvelles foisonnentdans.le livre de M. J. à
– SOCmOGtKR~GtRUSK
ANAMSKS. .~i
~!to t~nt~).
tes ptus .t:
divers. tT.~!.<
propos des faits Unindex F~~t –<t-t
fort complet ~t
secourt
heureusement le lecteur. L'auteur écrit d'ailleurs de cette
agréabte façon anglaise, où presque toutes tes articulations du
raisonnement sont masquées par des faits. Ces faits, il est
vrai, sont loin d'être puisés a première source. M. J. n'eu a
nullement l'ambition (Préface) et les emprunte &sesdevan.
ciers. pour )a plupart. L'érudition de M. J. est extrêmement
agréable, qu'il nous soit permis de regretter qu'elle n'ait pas
été plus critique. M. A. Nutt (p. ~0) n'est pas une autorité en
ce qui concerne l'Inde et le livre de M. Le Page-Henouf sur la
religion égyptienne est bien dépassé ne pas ae fier ainsi aux
témoignages indirects eut épargné des erreurs de détait à
M. J. comme de confondre l'herbe kusa répandue sur le sol
du sacrificeavec lesol même ~p.74, n° 2), d'assimiler les !<~
aux aserot sémitiques ~p. )34\ de nier l'existence développée
du totémisme au l'erou fp. H!0). – Ce sont de petites choses,
d'ailleurs. Le nombre des hypothèses, des interprétations dis-
cutables, est nécessairement très grand dans un livre de cotte
étendue. Peut-être un tel ouvrage etait-U un peu prématuré;
un mauuet d'une science no vient que lorsque cette science
est classique, et la science comparée des religions est bien loin
de t'être. Mais la (ouied'idées que l'auteur répand est telle que
d'ici longtemps, tous, nous lui aurons de réelles obligations.

A. SARATtER. – Esquisse d'une philosophie de la. reM.


glon d'après la Psychologie et l'Histoire, in-8". Paris,
Fischbacher et C", 1897.

Le livre de M. 8. intéresse le sociologue à plus d'un titre.


D'abord son apparition est uu fait; la pensée religieuse pro-
testante y est analysée do telle façon que nous possédons dès
maintenant un document historique important sur la nature
du protestantisme libéral. Ensuite, bien que NI.S. critique en
passant la sociologie(p. ~), il nelaisse pas d'y avoir apporté
quelque contribution.
Certes le point de vue théotogique domine; ta considération
des réformes possibles dans t'Hgtise protestante est l'un des
buts de l'auteur (p. t8f), p. t43). C'est une critique de la con-
naissance religieuse, faite dans un esprit kantien et menant à
un nouveau symbolisme (p. 408). qui forme la partie dia-
lectique de l'ouvrage. De ptus, les préoccupations d'une âme
sincèrement éprise de sa religion compromettent l'emploi de
!73 L'ANNÉE SOCIOLOGIQUE.
<S9T

la méthode.La définitionmêmede la religions'enressent


< la religion,c'est un rapportconscientet vouludans
lequel
l'âme en détresse entre avec la puissancemystérieusedont
elle sent qu'elle dépendet que dépendsa destinée (p. 24,
p. vm).Selon M.S. rame humaine,des les tempspréhisto.
riquesa toujourssenti la contradictioninitiale,entre )apen-
séeet le monde,entre les menacesde la natureet lit soumis-
sion de lit science,et lit forcede l'esprit qui s'insurge. Ce
conflit,t'hommen'a pu le résoudrequ'en se rétugiantversun
être supérieurà lui et au monde,vers Dieu,que la piété lui
présentaitdans sa conscience.Le commerceavecDieu se
réalise par lit prière; <ta prière, voilàla religionon acte ·
(p. 24, p. 14). La prière est un mouvementde l'âme en-
trant en rotation personnelleet intérieureavecDieu. C'est
l'expressionimmédiatede la piété,radicalementindividuelle
et subjective.
MaisM. S. n'est pas seulementthéologien,il est encore
psychologueet historien.Sa psychologieest bien souvent,il
est vrai. uu peu personnette,et l'histoireest loin d'être un
appui constantpour ses démonstrations.Cependant,il ne
laisse pas d'avoir employé,dans plus d'une occasion,une
méthodeà ta foishistoriqueetcomparative. Il a bienvu l'élé-
ment socialdans la religion (p. 103-8)et t'a traitée comme
un phénomènesocialet historique.Selonlui. ellea été, dans
toute la suitede l'évolutionsociale.te < véritablecimentde
la vie collective(<0~. La communiondesâmes, uudes plus
étonnants phénomènesde la vie morale, n'est parfaitement
réaliséeque dansla religionet par ette. D'ailleurs,demême
que dans le moi sentiment, votonté,intelligence,manifesta-
tionsextérieuresdesétatsderame sontétroitementsolidaires,
de mêmeil est impossibleque la piété ne se traduisepas par
des rites, des doctrines,des institutions (p. 309),dans des
formesreligieuses,historiques,œuvresdeiasociété(~, que
nous pouvonsconnaîtreet décrire commedesfaits extérieurs
(p. 408).I) est doncbonde faire une esquissede l'évolution
religieusedans l'humanité. Et, pour cela, l'histoire des reli-
gions,encoreà sesdébuts,entreprenddeconstituerune flore
religieuse. (p. 1 H)où les faits seraientdécritset catalogués.
Maisl'Œuvreest peine commencée.Lephilosophene pourra
que retracer< enpèlerinpieux l'histoirereligieusede l'bu-
manité (p. )(?;.
La recherchede l'auteur est doncguidéepar sa piété.Celle-
AttAU'SM.MCtO).0(!tR
RELIGIEUSE 178
citui fournitdeuxprincipesdirecteurs.Lepremierdécoutede
la nature innéede la religion,c'est l'identité fondamentale du
principe religieuxdans toute l'humanité pas de diitérence
essentielleentre les premièresémotionsde la vie religieuse
élémentaireet celles qu'éprouventles consciencesles plus
hautes et les plus épurées(p. 105).Le second, c'est que le
développementde la civilisationayant eu pour parallèlele
dévetoppementde la contradictioninitialeentre la conscience
et le monde, a eu, pour conséquenceet pour principe&la
fois, un progrèsreligieuxd'une intensité proportionnelle,
aboutissantdirectementau christianisme. Oubien t'évolu-
tion religieusen'a ni sousni but, oubien il faut reconnaitre
qu'elle doit aboutirà t'Èvaugiiecomme&sontermesuprémo»
(p. ~32-i'?S).Maisla consciencescientifiquede M.S. est assez
belle pour que de telles prénotionsne t'aient pas empêché
d'arriver à des idéesintéressantessur l'évolutionreligieuse,
sur l'origine, l'essenceet l'histoiredu christianisme,sur la
nature et la viedes dogmes.
L'évolutionreligieuse,selon M. S., résulte d'un triple
mouvement:t"Unélargissement descadresreligieux.D'abord
locaux et familiaux,les cultes deviennentnationaux sous
l'actionde causeshistoriques puis, les religionsdeviennent
universellesde par les créationsgénialesde quelquesindivi-
dus le Bouddha,Mahomet.Seul,d'aitieurs,le christianisme
est véritablementuniversaliste,puisque seul il est une reli-
gion d'égalitéet d'amour(t. IV.§ 2). 2vUn progrèsdans
les représentationsdu divin.L'évolutiongénéraledes notions
et des imagesreligieusesa toujourssuiviles notionsde plus
en plus précisesque l'humanité s'est faitede l'esprit (t20).
Les premièresreligionsont toutes été nettementspiritistes
esprit et corps y étaient confondusen une idée vague.Puis
s'est fait jour une tendanceversle monothéismenaturaliste,
où l'esprit divin,quoiquedistingué,ne se séparaitpas de la
nature (Grèce).Par une purificationde ces notions,par une
idée de l'essencemoralede l'esprit, te monothéismehébreu
s'est établi. MaisDieuétait encoreextérieur a l'âme et au
coeur. C'est le christianismequi, depuis l'expérience reli-
gieusede Jésus,a fait de Dieucet être spirituelque la cons-
cienceretrouveen eite même, et sur lequelelle s'appuie pour
considérerle monde (t, IV. § 3). – 3° Un progrès dans la
prière. A l'originecelle-ciet, en général, les rites n'ont de
religieux que la croyanceen leur cnieacité l'esprit divin
~74 L'ANNA SOCtOLOUtCUË.MXt

est en quelque sorte eu servage. Puis dans le fétichisme et le


polythéisme une sorte de contrat s'établit entre l'homme et
ses dieux il prie et sacrifie pour recevoir. Dans la retigiou
juive ta piété et la morale fusionnent do ta une prière de
confiance, d'abandon et de joie. Mais un monothéisme
farouche laissait subsister ia crainte et la peur de Dieu. Ici
encore, l'avènement de l'Évangile a donné son achèvement à
t'évoiution religieuse, et depuis Jésus-Christ l'homme peut
s'adresser ù Dieu comme à son père (I, IV, § 4).
Le christianisme avait donc été prépare par toute l'huma-
nité. Mais s'il est né en Israël, il doit y avoir là des causes
particulières. Or, ni l'organisation sociale des Hébreux (IL
I, § ~), ni le caractère divin attribué par la Bible aux événe-
ments historiques ne fournissent de suffisantes explications,
puisque ce sont des faits communs à toute la race sémitique.
Au contraire, le prophetisme fut spécialement israélile. Ce
fut une série de créations morales par des individus de plus
en plus inspirés, qui se dégagèrent, par une véritable lutte, et
des procédés ordinaires et du milieu où ils vivaient, qui trou-
vèrent en eux-mêmes lu révélation divine. Au retour de l'exil,
les prophètes achevaient leur osuvre. t La piété jointe à un
sévère idéal do justice dans la notion de Dieu, la moralité
introduite dans la religion par la subordination du rite
à !a droiture du cœur. enfin l'espérance d'un avenir de
bonheur et de paix par la réalisation de la justice, voilà
les trois grandes idées léguées par le prophétisme à l'Évan-
gile "(p. ]u8). Mais le pacte entre Dieu ett'hommeetait encore
national l'Église juive, qui se constituait alors, n'aboutissait
qu'au pharisaîsme, au Talmud le prophetisme ne persistait
que daus les rêves apocatyptiques. Pour créer, dans de telles
conditions, la religion souveraine, il fallut l'action divine du
Christ.
L'essence du christianisme, M. S, la retrouve par une
méthode surtout d'analyse interne. Ce qui fait le chrétien
(p. t7S), c'est d'abord qu'il sait en conscience que sa religion
est une religion parfaite, puisque Dieu est présent en son
âme (176). que c'est une religion d'esprit libre et de pure
moralité c'est ensuite la conviction que sa piété, le senti-
ment de son rapport avec Dieu et avec l'univers, vient direc-
tement de Jésus-Christ. La conscience religieuse de Jésus-
Christ est la source première d'ou le fleuvechrétien est sorti.
C'estJésus-Christ qui rendit Dieu présent dans le for intérieur
ASALYSM. SOCMUMUBBBUMtBUSH 1*8

des hommes. Us sont chrétiens dans la mesure où la piété


liliale de Jésus-Christ se reproduit eu eux. c La prière de
Jésus-Christ doit être leur prière a (H)t), son attitude frater-
nelle à t'égnrd des hommes doit être leur attitude. – Cette
recherche psychologique aboutit à distinguer dans le chris-
tianisme sou essenceet ses réalisations historiques. Dans son
principe interne et idéai, le christianisme ne saurait être
perfectible. C'est un idéal qui n'est jamais atteint et une
force intime, toujours identique, qui nous pousse toujours à
nous dépasser car la religion chrétienne est merveilleuse-
ment vivante, et qui dit vie, dit altération, échange et répa-
ration. L'influence de la vie sociale a fait varier ses formes
historiques; la piété véritable eut donc à lutter contre des
éléments étrangers qui l'eussent perdue si, à chaque instant,
le principe chrétien n'avait repris le dessus. Sous sa forme
messianique ou juive, le christianisme dut combattre !a
tradition juive, conquérir son indépendance, sortir, avec
Paul, du cercle du formalisme national. Le messianisme
apocalyptique, d'autre part, régna longtemps même dans le
cœur de Jésus, puis daus les idées des apôtres, jusqu'à ce que
la vie chrétienne pure se fut substituée a uue attente du
retour du Christ. Le christianisme catholique fut l'effet
des attaques de l'élément païen se modelant sur l'empire
romain, t'élise eut son administration, ses lois, ses dogmes,.
et tenta de rattacher l'âme à Dieu par l'Église seule. Le catho.
licisme fut une matérialisation du principe chrétien les rites,
les pratiques, les œuvres extérieures devinrent le tout de la
religion. L'autonomie de la foi individuelle fut abolie le lien
entre t'élément religieux et l'élément moral, rompu. Heureu-
sement, le protestantisme vint. La Réforme, déjà souvent
tentée, réussit enlin. Elle consista surtout en une nouvelle
expérience religieuse des réformateurs, qui constatèrent, une
fois de plus, l'inanité du système des wuvres pies Le germe
du christianisme était retrouve, aussi vivant qu'a l'origine.
La nature interne de la foi fut de nouveau consciente; la
subjectivité radicale du protestantisme découle et de l'es-
sence du christianisme et de son histoire.
Mais si la foi est tout, si elle est, pour le protestant, la seule
chose essentielle, il s'ensuit que tout ce qui est extérieur,
tout ce qui est institution et dogme, ne peut être immuable et
doit changer suivant les exigences de la vie religieuse (p. 253,
p. 2SS). Le dogme, c'est-à-dire ta doctrine admise par une
~6 t'AftNÊE SOCtOMGtQUE.iM

Église,n'est qu'un phénomènede la viesociale.il n'y a pas


d'Églisesans dogmeai de dogmesans Égtise maisle dogme
n'est ni le principe ai le fond de la religion. L'âme de la
religion, c'est la pieté, tes dogmeset les rites n'en sont que
le corps. La prière s'opposeau dogme (p. 300) elle est
la foi eite-méme,il n'est que c la languequeparlela foi Les
diversessaisde fixationdes croyancesreligieusesne sontque
le troisièmetermed'une série car c'estla révélationinterne
de Dieuqui engendrela pietésubjective,laquelles'exprime
en rites, en formulesde foi, en livressacrés.Aussiexiste-t-il
à t'intérienrdes dogmesune véritablepuissanced'évolution
qui tait leur vie, leur mort et leur renaissance(p. 297-8).Ils
apparaissent,dans leur genèseet dans leur histoire,comme
essentiellementmobileset vivants.Leurvie est comparable
à celle des mots ils disparaissentpar désuétude,ainsi la
notion du démon ils se renouvellentpar intussusception,
par l'introductionde nouveauxsens dans les formulesan-
ciennes il s'en crée de nouveaux,ainsi l'idéede la justifi-
cation par ta foi.La variabilitéest, d'un certainpointde vue.
le caractèremémedu dogme.Sonautoritéesttoutecondition.
neiteet pédagogique.Ilest nécessaireà l'existencede l'Église,
parcequ'il est le moyendo propagationdela vie religieuseet
de son édification mais, pour le protestant,la valeurd'une
croyancequelconqueest toute momentanée.11n'y a que lu
prière et lu piétéqui relient vraimentt'hommeà Dieu. La
formedes dogmesdoit doncêtre toujoursprêteà se renouve-
ler, et l'Église évangétique,doit être en constantprogrès.
On voit comment,chez M. S., la piété, ia préoccupation
de l'avenir reprennenttoujoursle dessus,quelleque soit la
franchisedes aspirations scientifiques.D'ailleurs,en ce qui
concernela théoriehistoriquedes dogmes,cettefoi à t'aflùt
de toute nouveautéa réettementservi l'auteur,tt a, mieux
qu'on n'a jamaisfait,mis en retieftecaractèresocial,extérieur
du dogme,de la croyancereligieuseformulée.I! a montré,
en mêmetemps,que la constitutiond'une Égliseétait rendue
nécessairepar la propagationd'une croyanceinternationale
et individuelle.tt y a là une déductiondont l'importance
sociologiquen'échapperaà personne.Je suis mémopersuadé
qu'en étudiantcomparativementla formationde l'orthodoxie
musulmane,la compositiondescanonsbouddhiques,la cons-
titution des Égliseschrétiennes,on arriveraità des résultats
qui confirmeraientceuxde M.Sabatier.
-– SOOOMHtE
AM.tt.YSEif. HHUOtKUSH ~7
Nous no saurions critiquer l'esquisse large et facile que
l'auteur donne de t'évotution religieuse. Ce serait même
injuste. C'est une phitosophieet non une science que M. D. «
voulu taire. Mais le résume des formes historiques du chris-
tianisme n'est pas sans une réelle valeur scientifique. L'au-
teur nous montre bien les deux grandes oscillations du mou-
vement chrétien, qui trop individualiste à l'origine, devient
trop social dans le catholicisme et redevient individualiste
avec la reforme. Enfin, bien que ce soit par une observation
personnetio que M. S. y soit parvenu, it a suuisamment vu
l'importance d'une théorie de la prière pour uue science des
religions. Mais c'est une erreur fondamentale que de croire
que la prière est le toutde la religion elle a pris cette impor-
tance, elle no l'avait pas, et je crois pouvoir assurer qu'il y a
des religions (australiennes! où la prière n'existe à aucun
degré. C'est encore une erreur de fait de dire que la prière a
toujours été un élan individuel de t'amo il est des religions
où la prière individuelle est interdite à quiconque n'est pas
prêtre (brahmanique) et d'autres religions où seules existent
des prières formulées ou récitées en commun. Le caractère
tardif et social des premières formes de la prière semble bien
établi par les faits la prière Individuelle, la méditation
religieuse, la tendance pure de )'ame vers Dieu. sont des faits
récents, des créations du bouddhisme et du christianisme.

Dr E. KOCH. Die Psychologie in der Religions.


wissenschaft. Grundioguag. (~.« ~cAo~<e dans la
Mx'HCfdes )'<<oK.) Freiburg im Brisgau. J.-C.-B. Mohr.
1896, in-8", 140p.
L'auteur veut défendre contre certains phi!osophes et
théologiens allemands les droits de la psychologie à pénétrer
la science religieuse, c'est-à-dire la théologie. Pour cela il
faut rendre la psychologie indépendante soit d'une métaphy-
sique morale, soit d'une métaphysique qui en proclamait
l'absolue subjectivité on arrivera ainsi à une conception
phénoméniste (subjektlosen)du moi, qui seule permet la for-
mation d'une psychologie religieuse ~41).On peut dès lors
trouver parmi les phénomènes de ce moi expérimentalement
donné une certaine catégorie de faits, objectifs comme les
autres, qui sont les sentiments et croyances religieuses (3. g 4).
Est religieux ce qui, dans l'esprit, revêt l'aspect de t'eter-
E.Cuxt:HE))t.–ABBeC!'ufio).t)t97. <Z
H8 L'AtfKÈE SOCMMtC!Qt)8.M97
_.t.t. les
nité idées de Dieu, de !a révélation, du Christ, la
votantereligieusecontiennenttoutesce caractèrede l'absolu.
Maisquelle espècede fait de conscienceest ce phénomène
religieux? M. K. repond que c'est comme représentation,
commeobjet de perceptionpossible(98jque les chosesreli-
gieusessont en nous.
Lelivre de M.Kochest une réactioncontre les tendances
symboliqueset anti-rationalistes(p. 81)et est une honorable
tentativede deHnitionrationnelledes faits religieux.Maisil
l'essayedu point de vue d'une science religieuse,non pas
d'unesciencedesreligions.Il restetoujoursqueM.K.a bienvu
quelle métaphysiqueétait ta conditionpréaiabied'uneétude
rationnelledes faits religieux,et qu'il fallait pour arriver à
une notion objective,admettre qu'onpouvaitétudiercomme
faits,des chosesqui n'existentque dansla conscience.

XOTtCES

M.~xMUH.KR.– Contributions to the Soienoe ot Mythology.


Lond.Longmansand C",<8M7, a vo).in-8".
Xousrendrons comptede la traductionfrançaisequi paruttracette
année à ta librairie Atean d'aittcurs.autour de c<;livre,uue pote-
mique importantes'<"it<!tet')~<;nAn(j)et<'rt' nous re~'n'ons donc
une étudede ia questionpour !<'prochain votunted'' )'~««f'f.s'ot'f'o.
f'~t'~xe.
JotMBEATTIECROZtEK.– Hiotory of ImteUectual Develop-
ment. 1. Lond.j.ongmansand (.'u,i896.
Histoirerapide de la pensée hindoue, grecque,judaïque aboutis-
sant à une apologiedu plutonisme.

HtKRvOSBORX TAYLOK. A study of ïateUeotual and Spiri-


tual Growth trom Eariy Timeato the EstaNMtunentof Chris-
tianity. Xew-York.Putnam'sSons,1890,2 vot.in-8°(]:)46t p.
Vt)t-Mt)p.).
Etude(!<'neraicd'histoirereligieuseet phitosophiquesur le déve.
toppement des ditï&reutsidéaux des grands peuples,aboutissant
tous, seiun l'auteur, à l'idéal chrétien. Le livre se composed'une
série de développementssur la plupart des grandes religionsanti-
ques d'une étudetrès pousséesur la préparationdu monde ancien
au christianisme.Lelivrede Il. T., quoiqu'ilsoit plutôt un livre de
vulgarisationreposante,ne laisse pas de présenter certainesparties
utileset une éruditionde bon aloi.
AMH'S)!S. BELHitOM )'R)MmVËa EN (.MNÊRAL ~t9

t.ons Mt~AKD. – SymboUque des BeUgioM anpiennee et


modernes. Leura rapports avec la civilisation. (Revued'ltis-
toirc des HcUgions,t. XXtV,n° 2, septembt'f'.octobre f89B,p. <7tt-
SOt.Paris, Leroux.)
Articlede g<'u)'runtf~,sur la placede l'histoiredes religionsdans
t'histoireuniverselle(p. it2); M.M.emett'idée que le mêmesymbo.
)i:<meanime tf dogme cht'etienet )u mythotogieMt(t9~ indique
<)UMtque6 cctKot'dtmccsdes religionset dusfunnes potitiques.

Thé Study in Psyohology of BeMgiouafhemomena. (Ameri-


can Journal o/Ao/o~, Vil, n" 3.)
– Religion M'dV61ketkunde. (Glubus,V,'!<,n<"7 et 8.)
HEMHMG.

H. HE).!CtOi<S PatMtTtVRS RN Gt~ttAt.

)'<n-M.MAt'ss.
MARYH. KINGSLEY. Trave!a ta West AfMctt,Congo
Français, Corisoo and Camerone, (Voyagedans<4/r~Me
occ«/~<t<e.) Macmillanand C",~97, ia-8"(xn-743p.).
Cetteretat!onde voyageest captivantepar la simplicitédu
style et le naturelaveclequelsont expriméesles émotionsde
l'intrépidevoyageuse.Maisc'est,de plus, un livred'unevéri-
table valeurscteatiuque.Depuistes travauxdu colonelEllis,
il n'y a pas eu d'aussi importanteétudesur les religionset
les sociétésnègres.M"K. ne raconteque ce qu'elle a vu, ou
bien ne nous donne que des renseignementsqu'elle tient
d'anciens résidents, connaissantbien les indigènes, leurs
langues et leurs moeurs.Unegrande partie de ces informa-
tions proviennentdu D' Nassau (p. 395), ie plus ancien des
missionnairesde la côte, et sont certainementde premier
ordre. De plus,elle mettoutesa conscienceà localiserstric.
tementles usageset tes traditionsqu'elle nous décrit. Enfin
elle s'abstientd'interpréter,saufpourrapporterl'explication
que d'autres, indigènesou observateurs,lui donnent comme
naturelle.
Le livre de M° K. contient,épars à vrai dire, mais non
moins précieux, un certain nombrede renseignementsqui
intéressentd'autressociologuesque l'historiendes religions.
Uneétude approfondiedu commercechez les nègres forme
un long appendice,et pourraitservirgrandementà des éco-
180 L'AXKKESOCtOLMtQUE. t!<9T

nomistes. Une dissertation peu banaie (p. (MMsuiv.) sur ta


mentalité des nègres, leurs ditïérentes aptitudes, sur les tan-
gages, tes gestes, l'imagination (p. C04)forme un véritable
essai de psychologie sociale. Les juristes auraient ù se servir
de ce que M"K. nous dit du fonctionnement des lois du clan,
des ordalies, des punitions pour i'aduitero et le vol, de
l'organisation de ta propriété (4!Msuiv. Cf. p. ~(!S;.lis auraient
à remarquer la structure maternelle de la famiite le droit
desuccession de l'oncle (483-29~),te fait que chez lesM'pougwe,
on achète la fiancée à i'oncie et à la mère (p. :MS)en sout des
preuves suffisantes le caractère pour ainsi dire économique
du mariage, dans ia plupart dos peuplades, sauf chez les
Fans où il a uu aspect religieux (3~t;; la cou tumedu mariage
des enfants résultant plutôt de ia dégénératiou des tribus
(403-404);l'organisation de la polygamie dépendant de causes
économiques et sociales (21U-6M;;voilà une série de faits
que M' K. verse dans le courant sociologique.
Mais tout cela n'est que par surcroît l'étude générale du
iétichisme est la partie centrale du livre. Naturellement
M''K. refuse de reconnaître l'exactitude et la valeur du terme
de fétiche, qui désigne tout au plus certaines amulettes;
naturellement aussi, elle s'en sert constamment ainsi que du
mot joujou (françats, employé par les indigènes), parce que
c'est un mot commode. Comme, sur ce point, les recherches
de MeK. ne semblent pas avoir abouti à dissiper toute con-
fusion, je me permets de ne pas utiliser exclusivement sa
terminologie. C'est le tableau absolument généra) des reli-
gions nègres, sauf de certaines religions Bantu, que M°K.
nousoure, en se réservant de le compléter. Certaines institu-
tions sont étudiées plutôt citez telle tribu que chez telle autre,
suivant que M"K. a eu des rapports plus ou moins Étroits
avec elle, et que son séjour l'a mise en contact avec telle ou
telle coutume plutôt qu'avec une autre. Au point de vue
ethnographique pur, il n'y a certes rien à dire. Au point de
vue sociologique, le plan suivi doit être critiqué. Il n'est pas
possible de compléter par un fait emprunté aux Guinéens
une description dont la plupart des termes sont congolais et
réciproquement. M"K. aurait eu une façon bien simple de
garder les ditlérences réelles, tout en marquant les ressem-
blances, c'était de comparer. Le champ était assez vaste pour
que la chose fut possible. M' K. a d'ailleurs procédé d'après
cette dernière méthode pour les croyances concernant la vie
ANALYSES. RELIGIONSPMMtTtVNSEN GÉNÉRAL 18<

d'au delà. Pourquoin'a-t-ellepas faitdomêmepour le reste?'1


Cettecritique généralefaite, je n'envoispas d'autre néces-
saire.
M°K. ne constatepas, commele t)~Ellis, l'existencedtt
totémismechezles Nègres.Cecin'enlève,d'ailleurs, aucune-
ment leur valeuraux renseignements de ce dernier maisun
certain nombredes faitsqu'il invoquaitdevront dorénavant
se ranger soit parmi les pratiquesdes sociétés secrètes,soit
parmi les interdictionsreligieusesindividuelles.En effet,les.
cultes thériomorphiquessemblentassezspéciaux aux nom-
breusesassociationsreligieusestout à (ait comparablesaux
associationsmélanésiennes.Ëitesont,il est vrai, un but poli-
tique et commercialmais, comme ellesseconstituentautour
d'un esprit (crocodileou léopard,p. 836 et suiv., p. M6 et
suiv.),que l'on cherchedans la brousseou sur la meret que
l'on amèneau milieu de mystèresdontles femmessont soi-
gneusementécartées comme,dansces mystères,s'exécutent
desmeurtresaccompagnésou nondescènesde cannibatisme,
et, en tout cas, des initiations,le caractèrereligieux en est
excessivementmarqué. Seulement,par leur liaisonavecces
pratiques, les sociétéssecrètessemblentbien n'être qu'une
concentrationdu totémisme.D'autrepart, certainesinterdic-
tions,que l'ona cru d'originetotémique,sont rigoureusement
individuelles chaqueindividua son< 0<'MH</« particulier.
tt est défenduà un tel de mangerdu poisson(p. 4S6),&un
autre de cuire sur le bateau ou en voyage. Le faire serait
vouloirmourir.C'estle devin,ou bienl'individu iui'mômeàt
son initiation,qui ont fixécet Orunda.Ainsi, dans toutes les-
retigionsnègres,fonctionnecettepratique,thème générâtdes.
contesde fées,dela choseinterditespécialementpar tes esprits
à tel ou tel individu.
Pour le reste, lescaractèresnormauxsont des plus accen-
tués la vertu magiquedu sang(4M-S~8), de la salive (288),
l'actioncurativedu sacrificesanguinaire(4S'tsuiv.), le carac-
tère sacréde certainslieuxqui serventd'asiles (4S6),la divi-
nitédu chefet desafamille(497),ontdenombreuxéquivalents
dans les religionsles moinsavancées l'étude de M"K. con-
tribueragrandementà en compléterle tableauque la science
cherche à dresser. Tout à fait remarquablenous semblela
distinctionfaite, d'aprèsles faits, entre la prière et l'incanta-
tion (43~ dont l'uneaccompagneet définitle but du sacrifice
et dont l'autre a une vertu magiquepropre soit que le sor-
!M L'ANUS t8i)7
MOOMOtOUK.

~i.u --A- ar. _L_i. J. _1


cier, appeléprès d'un malade,chercheà enchanterun esprit
qui s'est introduit dans le corps et le ronge,pour l'expulser,
soitqu'il tentede ramenerl'Amequi s'échappe(46t).
Lapartie du livre oùsontétudiéesles croyancesconcernant
rame après la mort est la plusconsidérabiopour te nombreet
l'importancedes faits. Pourles idéesguinéennes,on peutdire
que M"K. a trouvé la formule l'esprit est caractérisépar
son intégrité,son éternité, t la vieet la mort ne sontque des
ombresà (p.820).L'âme existaitavant la mort,et continueà
mener la même existence après. Ou bien elle se réincarne
(Bantu,Deltadu Niger),ou bien, venantd'au delà dela mer
et de la rivière, elle retourne au lointain pays des morts
(p. 488.49S).De récompenseset de peines on en trouverait
peu le châtiment divin est plutôt immédiatque futur (404).
L'âmeeu effetest très mobile,elle habite mêmequelquefois
hors du ::orps (p. 439),une souillureentralne par elle seule
le départ de l'âme et la mort. Le défunt,en mômetempsqu'il
habite le monde futur, hante les siens, la veuve surtout
(483-8)lesesprits d'enfants s'emparenta l'occasiondes corps
des petits enfants vivants, et les font mourir pour prendre
leur place;aussi certains enfantsméchants,les jumeaux,les
infirmes,sont-ils exposés(p. 473.4T?).Pour prévenir cette
hantise on accomplit des rites funéraires complexes,qui
tantôtont pourobjet de fixer le corpset de congédierl'esprit,
tantôtde rattachert'âme au cadavreet de l'enterreraveclui,
tantôt de détruire, en le mangeant,l'esprit et le corps d'un
individu particulièrementméchant (Fans, p. 430).H faut
donner toute satisfactionau défunt immoler,en guise de
vengeance,ses femmessi ellessont présuméesl'avoirenvoûté
ou empoisonné(p. 468-88j tuer sur sa tombesesfemmeset
ses esclavespour qu'il ait une sociétédans le mondefutur
(Tshis,Bengas,côte de Calabar) lui oiïrirdu sangd'animaux
pour qu'il puisse renaître (Delta).Le cadavreest d'ailleurs
un objet magique de la plus grande puissance.Le mortest
souventun esprit tutélaire de la maisonet est enterré sous
la porte(p. 494,Cf.476).Delà descultesancestrauxnaissants.
et la nourriture offertependant.quelquetemps aux aieux
décèdes.
La vie qui anime le récit de M"K., fait que cetteénuméra-
tion parattra sèche auprès de la lecture des chapitrescourts
maisdensesque l'auteur y consacre.Maiselle parattraaussi
plus systématique.L'esprit de M"K., merveilleusement doué
ANAÏ.Y8M. – MMGMNS PR!HtTÏV8S KK GÊKÉKA~ <?

pour l'observation concrète,na nn


'nhoa)t*vnt!nn~nnnp&)ta un peu
natt brouittéles d! versordres
hnnttttt~taa~tMûfo~t~tt

de faits que l'analysenousa forcéde séparer.

J. WELLHAUSEN. – Reste des AMtMsohen Holdea.


tmms.f t~tt~ea<<tt .if'a&t'f.)3' Ausg.Uert.Georg.
pa~aKtitmefM
Reimer,~?7, in-8",3M p.
Le livredo M.W.est de ceuxdonton reparle à la seconde
édition. Non seulementrien n'y a vieilli, mais encoreon
en voit mieux la portée, la grande place qu'il tient dans
la science.Point de départ de ia < Y<e~<oM o/' s<'n!!<Mde
R. Smith, premieressaide cette fécondeétudedes religions
sémitiquescomparées,indicationd'undes plus beauxchamps
de travail pour l'historiendes religions,voiià ce qu'a été,
depuis dix ans, cette partie de l'muvrede M.W. Car, pour
la religioncommepour la langue, l'unité de la civilisation
sémitique est évidente.La méthodelogique,qui recherche
par comparaisonles causesest infinimentfacilitéepar l'iden-
tité fondamentaledesdialectes.L'étudedu pagauismearabe
est lumineusepour le monothéismearabe, en mêmetemps
qu'elle est décisivepour les antécédentsdu monothéisme
hébreu, puisque, au rapprochement,les mêmesconnexions
apparaissent. AvantM. W., Renan avait senti te problème,
mais la fantaisieet la généralisationrapide ne l'avaientcon-
duit qu'à de vaguesdéveloppements sur le monothéismeeth-
niquedu sémitenomade,et personnene s'y était rattaché.
La compositionserrée, le développementfait surtout de
textes rigoureusementtraduits, reliéspar un minimumd in-
terprétation, donnent à l'ouvragede M. W. une incompa-
rable densité. Cetteméthodestrictementhistoriqueest d'ail-
leurs ce qui fait la valeur du livre en face de celui de
R. Smith.Ondirait que M.W-,en rééditantainsicevolume
sans l'augmentersensiblementet sans presque rien changer
aux conclusions,en se contentantde t'amétiorer partielle-
ment, a voulu montreret sur quel fond soiide.s'appuieatles
théoriesde Smith et le point où commencentles inductions
et les hypothèses.En tout cas nous avonsici, pour le paga-
nisme sémitique en générai, arabeen particulier, un réper-
toire, mis à jour, des faits et une systématisationd'autant
plus durable qu'elle a été faite avec la meilleureconnais-
sance des textes et avec un vif sentiment de ce qu'est la
fonctionsocialede la religion(p. H4, p. 94,cf. p. 214).
)84 L'ANNEE <M7
SOOOMCtQUE.
L'existence antéislamique d'un polythéisme arabe no peut
être niée. Lu fréquence des noms tbéophores duns les poèmes
antérieurs à l'hégire, dans les inscriptions, dans les textes
grecs, les analogies nombreuses du sémitisnM. les renseigne-
ments que nous donnent les historiens de h) vie de Mahomet
et les géographes, les fragments du livre arabe sur te renver-
sement des idoles, fournissent des preuves plus que suffi-
santes (p. 1-64). Multiplicité des noms des dieux, des lieux
sacres, des cultes, rien n'y manque. Une remarque s'impose
si le caractère naturaliste des grands dieux, si l'adoration du
soleil et de la lune, de l'étoile du matin ne sont pas douteux
(p. )43). ceta n'empêchenuttentent qu'il y ait eu lit plusétroite
alliance entre le dieu et te c!an qui porte sou nom et qui est
possesseur de son culte (p. ~tS~. En somme, suivaut M. W.,
les dieux du polythéisme arabe et aussi sémitique ont été
tribaux mais leur caractère totémique est difficileà établir.
Kn tout cas, tes textes ne nous mettent certainement pas,
comme le croyait Smith, en présence d'un état où les dieux
n'auraient été que des esprits (~«x) supérieurs. lis sont de
na tu recéleste.sinon purement spirituels. C'est une régression,
que le monothéisme a fait subir aux dieux, qui les transforma
en diables (p. ')!!?) il ne peut être démontre que les dieux en
aient été dérivés. LosytKM~ sont des esprits terrestres ou sou*
terrains.des eaux, des serpents, de la matadie; ils sont encore
aujourd'hui l'objet, ou l'instrument des sorts, des charmes,
des exorcismes; ils ont toujours des noms. Mais, déjà au
moment où lesArabes arrivent à l'histoire, ils faisaient partie
du < paganisme inférieur
La mythologie ne nous fait donc assister qu'à un stade
avancé du potythéismo arabe puisque les très anciennes
croyances n'existent plus qu'à l'état de survivances. Le culte,
au contraire, est profondément primitif tes lieux sacrés, le
rituel sont le plus simples possible. Ce dernier ne consiste
guère qu'en circumambulatious, en jets de pierre quand on
passe près d'une place sainte le rôle de la prière est secon-
daire. La nature du sacrificemontre qu'il confineaux origines
vertu attribuée au repas eu commun, petit nombre de sacrifices
non sanglants, rôle du sang qui doit être répandu, non pas
parce qu'il est une offrande au dieu, ce qui ne serait qu'un
phénomène dérivé, mais ptrce qu'il lui est consacré et qu'il
opère la communion entre le sacrifiant et la divinité, tous ces
faits témoignent qu'on est en présence de rites sacrificiels
ANALYSES. RELIGIONSPRIMITIVESEN G6f))!t<At. ~8&

élémentaires.L'individucommençapar laisser coulerson


sang sur la pierre du dieu puis il y substituale sangde la
bête que l'on mangeaitensuite,devant et avecla divinité.
L'idéedu sacrificeoffrandeest bienpostérieure.
Lesacerdocea une organisationrudimentaire l'interven-
tion du prêtre n'estnullementobligatoire.Uncertainnombre
de cultes sont mêmede véritablespropriétésprivées,telle
famillea, à sonservice,un esprit puissant,et vendses bons
offices,tout commedans l'histoirede Mikahque conservela
Hibte.L'étroiterelationentre le prêtre, le devin, le sorcier
est évidentecommedanstoutl'anciensémitisme.
Enfin,un troisièmeordrede faits vient nous dévoilerles
assises mêmesdes religionssémitiques.Ce que lesArabes
appellent lit Fitra (religionnaturellejest passédirectement
danste Coran,toutcommele mémoensembleest fondamen-
tal dans la législationmosaïque ce sont ces prescriptions
qui concernentle <yo<thébreu,le t'A~Marabe, en un mot
toutesles interdictionsrituelles.Cesont les règlesde la con-
sécration du premier né, des premiersfruits, d'une partie
du troupeau, des biensdu dieu (M.\V.voit ici, p. 113,l'une
des originesde la propriétéindividuelledans le mondesémi-
tique), c'est la donationducheveuau Dieu,l'alliancequi doit
être scelléeaveclui par la circoncisionce sont les multiples
prohibitionsauxquellesdoit se soumettrequiconquea fait
vœude sacrifier.comme serasoumist'homme
celles auxquelles
pieux dans le monothéismepostérieur enfin, ce sont les
prescriptionsqui déterminentla puretéet l'impureté,et dont
la dernière paratt spécialementapplicableaux femmes,à
leurs époques,à leur puberté,à tours couches.Cesphéno-
mènes religieuxsont certainementles plus primitifs qu'on
puisse trouver.
C'est sur ce fondque se préparaet naquit, spontanément,
sous l'Influencede causessocialesdiverses,le monothéisme
mahométan.A la Mecque,devenueun centre commercialde
premierordre,un véritablePanthéonse constitua,oùles dieux
se transportèrent,voisinèrentet se confondirentun peu. Le
polythéismeperditde sesarêtesvives.Lescultesde la Mecque
sont bien, en fait, les ancienscultes païens. La A'a'~aétait
originairementla pierredontAtlahétait l'esprit le temple
se bâtit autourd'elleetse peuplad'autresdieux.Le /~<~était
un sacrificedu mêmegenreque les autres; le moissacré,de
~a~t (Ramadan),correspondaità la Pâqueshébraïque.Seu-
IS6 L'jmKÉE SOCIOLOGIQUE.<M?

lementtes pèterinagesettesarrivéesde caravanes coïncidaient,


les {êtesétaienten mêmetemps des marchés(commecelase
passeencoredans nos campagnes).Cescultesperdirentainsi
de leur caractère localà mesureque l'on venaitde plus loin
pour y participer. Le monothéisme,d'ailleurs, ne fut pas
obligé,pour se constituer,de lesexclureviolemment;ii n'eut
aucunepeineà pactiseraveceux, à les laissersubsister.Leur
peu de précision,de significationsociale(puisqu'ilsétaient
très primitifs), facilitaientsingulièrementleur appropriation
à d'autres besoins religieuxet moraux. D'un autre côte, au
mêmemoment,la religion,par oppositionau culte, prit une
importancesocialeconsidérableet immédiate.Onta voitalors
réglerlesrapportspolitiquesdostribus parles rites d'alliance,
fournirdes sanctionsaux contrats, sanctifierles mariageset
la mort,entourerla viede toutce qui la fait pureet bonne.De
ta vint avecsoncaractèremoral le monothéismemahométan
ou hébreu,car l'agent religieuxpar excellenceétait « la divi-
nité (AHah), commechez les Hébreux tesdieux (Etohim~.
Allahétait le témoininvisiblede toutes les conventions,de
toutesles actionsdes hommes, châtiait le traître à sonhôte
et l'impur.La vertu créatricedu mot agit ici, à son tour. Les
noms propresdes dieuxne pouvaient,pour la plupart, être
dits sans danger. On invoquaitdonc le dieu en générât
L'usageet le rituel figèrentl'expression,on l'expliquapar
une personnedivine,Atiah, l'uniqueet le vrai dieu. La révo'
tution mahométane,souventtentéeavantMahomettui-méme,
dépenditd'iuttuenceschrétienneset juives (p. 234)et ne fit
qu'accentuerla séparationentre le monothéismeet ses anté-
cédents.

NOTICES
Lesétudesles piusdiversesse trouventdans
ADou*
BASTtAX. – Zum Festgruss zn seinem 70 jehrigen
1896.
Qeburtstag.Bo-Hn.
A..H.KEAXE. –Ethnology. – Cambridge. Press(Geogr.
University
Series),2 vol.in-S",i890.
Utilesrenseignements nécessairement
sommaires.
ANALYSES.– MUOOX8 PMMtTtVEBEN O&NÊttAt. <8f

MONOCKAt'MtES
DETtUBL'S
/t.–MAL.\)!t)Kic

r')t~\i: KttOXHCKHH.– Von Javas Fouerbergen. tu-8", 30 )'.


OtdeMburg-Leip:!ig,Schut)!e,i89'?.
Kenscignemcntssur les Tenggereses.
M. C. SCHADHE.B~drage tôt de Kennis van de Ethnographie
der Westerafdeeling van Bormeo(in /<t<eM~<)'oMa< /t<'c/t<'<'
/<'
6~
Il, suiv.; t\ i). if8 et suit.
~Atto~tt'f. Leiden,Hfit!).thOO.

VETH(J.). Java. 2"Mit. Uaarten),Uohr(<89-)).


Tt'ùiicompletet trt's utile.

W. KUKE~THAt.. Foreohungsreise imden Molukken und In


Borneo. t't'ankf.a. M.,i896,i)t-4' 3St p. (Kayansde Hornt'o!.
l,

CHU~WEnEL.– Notiten aus den Reieemvon Hrolfs Vaughan


Stevema in Malaka (iu /~At)ob.Mfc/(My«~~A~«~. hcrgg. v. d.
t)ircMiun d. Kgl. Museumsfür Votkskundc.t, 3 (t898~.Haack,
Bet'Hn.
Faits remarquablesde culte totémiquedu tigt'c(p. 1-12).

L.-Ttt. MEYEH. Ein Blik in hot javaaMohe VoUeleTea.


(2~deet).Lciden,Brin.t89)!.
Cu'. COOL.(Tranal. by ï. Taytor). Bali, Lombok and the
Saaaaka. 1890,it)-8",Lcnd.

H. UKC ROTH.– The Natives of Sarawak and British North


Borneo, i896,Zv. it)-8",Trus)ove
and Manson.
Extrêmementimportant et dont nous regrettons de n'avoir pu
faireune étude suffisante.M.A. Langa écrit une préface &ce livre.

n. – TtUBUSKO!)OVtUStStSMe!tKt)<! KTCEt.'txoO-CM)X)t

< SCOTTROBERTSO?!. – The B.ànrsof the Bindu Kush. Lond.


!~wrenceand Bullen.tn-t", xx-658p. (ittuittrat.et cartes).
Dans ce livre sont semésdes renseiftnementssur les rites d'ai-
iianceet d'adoption(p. 3<,S03,St3,3)8),sur t'organimtiondu etan,
les vendettas,la tribu, la famille,la propriété,lesmœurset le droit
(derniers chapitres).M. Scottnous décrit, commey ayant assisté,
188 I.'AtiKÉ)!!iOCtOM)0!OU8.«"7

nu "IIII¡n
certain 'l..
nombre do ".II41etnnf
ceretnonies, consistant elit-t.~ii
surtout en danses
~i6, 220. 3'!5).Mn outre, deux c)Mp)tt'ft importants donnent lu
premier expose que t'en ait Ut-ta religion et du lu mythologie (XXtit,
XXtV).L'organisatioH du sacerdoce et des castes aristocratiques fait
l'objet d'un autre chapitre. Les informations sont de première
valeur, M. S. étant le premier Huropëen qui ait séjour))'! pu ces
relions, et les tenant du j~randprêtre tui-metne auquel ii s'était attie;
elles seront vite précieuses, parce que dans ces contrées t'tstam fait
les j'tus rapides progrès.

Maj. W. UHOADFOOT. – Kaartstams and thé Kaara (in M«'t<t'oo<<<


.t/«y«tt'Mf,tM~.nMt's).

t.HKTKLu~ M. CUUDHX. NàgA and other Frontier TribM of


North East India (/oxt'M<t<o/' <A<'~X/tropoh~t'faf ÏM««o(eo/'
XXVt,n" t<tt)-2Ut.
/.oM</o<t),
HMeiienteconpitatioH desdoeuments existant sur ces poputatioas.

Co). R.-C. WOUUTHOtU'r:. Some Aooount of the Shama and


HUl Tribes of the States on the Mékong (~«''M. o/' </)<'~M<A)'.
/n.!<.o/ow/fMt), XXV),n" ), p. M suiv.
tmportantsn'nseignetnextssurt'orgunisation sociale et les cutter;
particuiierement intéressantes sont les croyance!! concernant lu
nature de t'Ame.

t.. OPi'KHT. Ueber die Toda in den Nilagiri oder den


Blauen Bergen 'iM Zeitschr. f. Ethn., p. N13suiv., tMtt).
Quelques renscij~netnents sur cette population dont le totémisme
estbien connu.

C. Af)t)Ot;E

S.-H.-H.JOHKSTOX. Brist.sh Central Afrioa. Methuen a<td < ·,


t897,in.8".
Honnc d'uliles renseignonents (teneraux.

K. WËUi.E. – Zum Fetisohwesen der Ewe (~<. A'o«'Ma«,


t8M, t. p. 29-38.)
D'après les renseignements de M.Baumann.

H.-M.COXXOLLY. – Sooial life in Fanti Land (~KM. o/' the ~M<A)-.


/M~. o/ow/.j, XXVt. ? 2, p. i29.t83.

KUDOH-'PHtETZH. – Beitrege zur Erforsohnng von Spraohe


MndVo!ksgeist in der Togo-kolonie (<?<'t~ /)/)'<taHMcAtun~
OtMtNMcAe~M«'/M«). Mertin, 3" année, in-K",p. 6t.
ANALYSES.– MUOMM t'MMtTtVKS BX Of~RAL i8!)

~.–Uc~AXtK

STE!~)!Af:H. – Einige Schadet von der ïnsel Nauru (~f«~t<


/<t~t)</).(~<«c/t.A'</tM~<8M.Y).)).SM~uiv.)

J.-t)..t:. SCHMKLTX.– BeMrœge zut Ethnographie Yon Neu-


Guinea. (/"<--t''< ~</tM.,<Si)6,H), p. U3-t2:i.:

/t'. – Ast)! Stit'TKXTKtOXAt.K

A. SKRXY~t:m.–Jakutenbrattcho iAm.-t'rqm't), Xeue Fo~ tY.


t"'<'t2")h't'fHMus).

)t. !))! WtXnTS. – Reison an der Beringatratse. Tsohuktsohis


titt C<~<M,Ht'unsMck. Vx'wpj;. ).XX),t9-Ui mui f897, p. SM suiv.

?{..Y.STE~t~. -Die Fermier fi)' S et tBjuitt <89'!(p. 349et 3?t ).

SEttOCMEVSK!(V.T.). – (Kn rus-ie.) Yakoutee.SMiht-t'<'tc)"ib.,t8!'6,


n~O. tmpt'imerif'des Apanugt's, {if. in-S".

<:HUBE.– Daa SchamaBenthum bei den GoMen <Q~&<M,


LXXt

AXO))!XSt'KH'H! tXt'O-EfttOt'~KXS

E. S!ECKE.– Die UrreUgion der Oennanem.t896, io-S".Bo')itt.


Mayerund MuUcr.
FM.STA)X. – Die VoUteMtœmme der Germanen nach roe-
Stocr.
miacher Daratellung, 1896,SchwcinfttrU).

UFALVY.– Les Aryens au nord et au sud de nmdou-KoNoh.


!n-8°,Paris, Masson,<896.

DESHKUUtOXS
SU)t\')VA!<MS FK!))mYt!S UMCtYttJSb.
C))t!X

J. EUTtKH.– Tagbuoh einer Beise in Inner Arabien. Drill,


L<!iden,<890,in-tt'vnt-SMp.
Quelquesrenseignementssur luvie retigieusoactueHe, les supers-
titions courante:et païenneschezlesBédouinsen Arabie coutumes
de mariageou funéraires; ce sontde ccsinfbrntationsquctout voya-
geurrapporte d'un pays où il ne réside pas, mais qui ont lavaleur
que donne aux travaux de M. E. sa hauteautorité de sémitisant.
~0 L'ANfOSBBOCtOMOtOOE.)M7

MAHX.Ka~kasiache Beisenumd Stadien. (A'fMc


~<~<. j:),t.
~MM~tM~M ~K~MC/tfM~,«M</jt). Dunckeruud Humbtot.t.eiuzit!
<896.)))-)Y.29)ti).
Hy Mdans ee votunteune descriptionde curieusescoutumes de
ttuu-iagcd<'sT:tHtt'<df lu Kabftrda une importanteétude,ncuw o)
biendes puints, sur les urbn't) et buis sacréschez les
peuplesdu
Caucase. (H) sur les grands sacrificesagraires des Oss~cs de
Digor(Ht),d'utiles renseignetnentssur les peupladesdu t)aghe!!t<u)
et les sectesr<!eent<'s.

Bt!)txuutu 8TE«\. Zwieohen Kaspi und Pontue. KauJtMitche


SMzzen. Hre~au,SchotttSnder,t89t, x\'t.2Mp.
Uncertain nombrede renseignements,sur h
famille,le
tes ritesde ta naiiotance.Unesériede légendesde saints etmariage,
un nou-
veau contndu cycte d'Atexandreintéresseront vivementles foik-
loristes.

L. STjëDA. Referate aus der RutstsohemL1teratur. Abhand.


lungen denKaukasus betreffemd(inAn;/<~/'t:t-~tt~ro~o~m'e
1897,XXtV,Brunsw.Yiewcg).
excellentedes ouvragesrussessur le Caucas'
Bibliographie

!H. – t:t').TE hOMKSTtQUE

ParM.MANM.

ATTtUODEMAUCH!. -n culte Privato dl Roma Antioa.


I. La ReH~lonenella vita domestioa. Iscrizioni e
oCerte votive, (LeCM<te
pncd de la /!oMM
«M~oxe.)
Hoepli,
Milan,~896,in.4",xvt-30'?p.

Depuis!e livre de Fustet, en dehors des grands manuels


allemands,rien de systématiquen'avaitété fait sur la ques.
tion traitéedans cet ouvrage. La méthodeen est tout à fait
!ouaMe.Labibliographiede fauteur est peut-être
nousseronsles derniers à l'en Marner.Maissonincomplète
livrerepose
sur une profondeconnaissancedes textes littéraires
impor-
tants, et sur un dépouillementconsciencieuxdes documents
épigraphiques.M.de M. n'est donc pas embarrassepar une
traditionscientifiquetrop lourde,et, d'un autre côté.comme
sonlivreest surtoutuneclassificationdes
documents,c'est,en
– CUM'E
AKAMSES. COMBST~ttE ~9i
grande partie, l'esprit mêmedes faitsqui présideà leur dis-
position. M.de M.cite en entierles textes dontii sesert.C'est
une habitudeque t'ou voudraitvoirse répandreet qui seule
permet le contrôleincessantdu lecteur.
L'auteur déiimitesonsujet en suivantl'oppositionque font
les juristes (Cicéronet Digeste)entre lesM~'a ?«<'<«'« et les
M~'s pf<f~<.Appartientau culte public tout acte religieux
accomplipourio biende t't~tat,aux frais del'État fout partie
du culte privé tous les actes faits par les individusou par
ies associationspoureux-mêmes,quelqueétendusque soient
les intérêtsprivésen jeu.Il suitdo là quelesactesindividuels
enversles grands Dieux,objetsdecuitespublics,seraientdes
actesprivés,et queies actesdet'Ëtat surveiiiantl'exécutiondes
obligationsreligieusesdes particuliersressortiraientau culte
privé (p. p. M). Nousreviendronsplus loin sur cesdénni-
tions contestables. Dansce premiervolumeM.de M.n'étu-
die que les cultesdomestiqueset individuels.Le secondsera
consacréauxcultesdesjj~M, descollèges,des corporations,
et de touteassociationsanscaracterepolitique.Cettedivision
presqueextérieure en recouvreune, plus profonde.Dansle
culte publicl'individun'a quepeude part toutse passeentre
les prêtres,hors de lui (p.15).Leculteprivé,le culte domes..
tique en particulier,permet,au contraire,desaisirce que fut,
dans t'ameindividuelle,la piété,la religionromaine,la façon
dontelles'attachaità touslesmomentsdelavie.Cettedévotion
primitivene fut pas sans jouer un rôle historiquetrès impor-
tant elle a concouruà préparerles espritsà l'influencedes
religionsorientales.En etiet,elle répondaitdéjà, mieuxque lit
religionofficielle,à cesbesoinsmystiquesdonttoutepratique
doit s'alimenter et qui firent les succèsdes grands cultes
orientaux.
La religion dans la vie domestiquepeut s'étudiersuivant
l'expressionde M. de M-, à un triple point de vue 1° les
dieux domestiques,2" le matérietet les formesdu culte,
3" les actes religieux dans la constitutionet la vie de la
famille.
Lesdieux domestiquessontd'abordet surtout les lares. La
dissertationque M. de M. leur consacre,est des plus intéres-
santes et des meilleures.A l'origine(et la religion étrusque
fournirait des équivalents),le tôt- existaitprobablementseul
fp. 48) il était l'esprit possesseurdela maison,il l'habitait,il
était son âme.Puis en vertud'une confusionavecles pénates,
<? t.KÊt! BOCMMtitOL'E. Min

qui. eux, turent probablement toujours multiples, et aussi


parce que le culte du/:a'<-était étroitementtié au culte du
foyer et des mânes, tares, pénates et mânes se confondirent
les uns avec les autres en mémo temps que fusionnaient les
rites destines aux diHét'eutes divinités de la famille, Les
pénates furent en principe, les esprits du pfHtM,du fond de
)« maison où l'on conserve le grain auquel ils conservaient sa
force et sa bonté. Ils devinrent les protecteurs
domestiques
en général, et les grands dieux eux-mêmes purent être
appo.
lés Pénates; mais jusqu'au bout les p~M/M ~'« furent
proprement les gardiens du patrimoine et des membres de la
famille (p. ?'. frétait la flamme. la vie de lit maison.
le feu qui brute sur t'autet domestique; celui-ci était le
centre de lu famille. le symbole de sa perpétuité. Enfin,
légèrement à part, le génie domestique. Les ~t't étaient ces
esprits qui accompagnent chaque individu dès avant sa
naissance; chacun rendait hommage au sien, mais toute la
famille adorait le ~PKOM </OM))M(p. 74) confonduavec te ~tt'tH
~'«~tMx'/KM. image de la puissance génératrice de lit famille
ette-meme. Le génie est souvent représenté, à Pompéi en
particulier, sous la forme d'un serpent, esprit infernal de la
fécondation.
La place que les divinités occupaient dans la maison
correspondait aux croyances dont elles furent l'objet. Quand
celles-ci varièrent, te sanctuaire changea de forme et de lieu
les images furent d'abord auprès des portes, dans le vesti-
bule, puis au centre de t'a/nxMt (où était souvent planté un
arbre), ou bien au mitieu de t'tMx~t plébéienne, pauvre agglo-
mération qui ne possédait qu'un autel pour une masse de fa-
milles. Enfin les dieux domestiques furent relégués dans un
coin, une nicbefp. 89) ;soust'innuencedes cultes mithriaques
et de la superstition concernant les rites souterrains, les <am.
n'a furent transportés à la cave. D'ailleurs, fait
remarquer
M.de M., il y a une véritable dinicutté à distinguer,
pour les
époques sur lesquelles nous possédons des monuments figurés.
cequ'il ya, dansées représentations, d'artistique et de littéraire
d'une part, de religieux et de populaire de l'autre – Les
instruments du culte étaient le foyer, la table, la salière, la
patère à libations, les vases à parfums. C'était d'ordinaire
le père de famille qui o(t!ciait. et lui seul en avait le droit
lors des grandes fêtes domestiques mais il
déléguait ses
pouvoirs à sa femme pour les petites offrandes journalières
– CULTE
AHALYSHB. MNMTtQUE 193
aux mânes sur le foyer (p. 109). La famille tout entière,
esclaves compris, assistait aux cérémonies. L'accès de l'autel
Était libre à chucuu chacun cabrait pour soi son </«'<
M«<<t<M, et les esclaves eux-mêmes étaient admis & tous les
actes généraux d'adoration.
Tel était te matériel et les agents du culte, les formes en
étaient nécessairement correspondantes. En premier lieu la
présence constante des dieux domestiques nécessitait certains
rites fréquemment répétés ainsi on devait, au retour d'une
assez longue absence, avant tout. saluer les pénates (p. 32S).
En second lieu, un des instruments du cuite, essentiel, déter-
minait la forme d'un bon nombre de rites: c'était la table.
Le repas lui-même, pris devant les dieux domestiques, et où
les morts de !a famille avaient aussi leur part, était chose
éminemment sacrée (p. 1)5, Mt'ra MCMM'jpuis le repas servi
aux dieux lors d'un <ff<M<fn)()«M, te festin oilert au mor
lors des funérailles étaient des actes religieux de la plus
haute importance. Pour le reste, les offrandes étaient surtout
des couronnes de fleurs dont on décorait la statue du dieu,
du génie des grains et du vin étaient répandus sur le foyer,
pour Vesta et les mânes (p. 2~0;. Maisles sacrifices sanglants
étaient rares, ils consistaient surtout en porcs, dont quelques
morceaux seulement étaient consacrés aux dieux.
Dans lu troisième subdivision, M. de M. semble confondre
deux genres de faits dont lu séparation eut ajouté à son livre
quelque intérêt. Et) ellet, un certain nombre d'actes religieux
de la vie de famille correspondent à dos pratiques religieuses
pures, ont des buts, des fonctions, des époques déterminés
ce sont ce que nous pourrons appeler les fêtes les autres ne
sont que t'euregistremeut religieux de certains événements,
tts sont nécessités par eux mariage, naissance, mort, anni-
versaires et nous pourrions les appeler des sacrements.
M. de M. suit plutôt la vie du Romain qu'il ne répartit les
institutions. Qu'il nous soit donc permis de nous écarter, sur
ce point, du plan suivi par notre autour.
Les fêtes sont caractérisées par le repos religieux de toute
la famille, y compris les esclaves en vertu de la définition de
la /<HM<<«! romaine (p. 145, cf. p. HO). Ce sont des jours
consacrés à l'accomplissement d'actes religieux périodiques.
Elles sont ou familiales, ou agraires, ou ottes célèbrent sim-
plement le retour do certaines dates. – Les fêtes de la
famille sont au nombre de trois la caristia, offerte aux <<«
)'t)oMi)t)!)M.–At)t)t!).'Mtci.)).iM7. t3
~4 t-'AKNËË SOCMMGtOL'E. t8'H

j~tWM, est proprement une fête où se réunissent, en agapes


fraternelles, les agnats; les MM~-o<M<M sont des têtes des
matroneset de la maternité. cabrées en l'honneur de
Lucine i
enfin viennent les M<)u-tM~tdont aucune
explication suni-
sante n'a été donnée, et on, après te sacri(!ced'un
porc, uu
banquet oflert par le père de famille réunissait, comme des
égaux, les esclaves et les hommes libres. D'autres cérémo-
niesavaient, de leur côté, pour but d'associer)a vie do famille
ataviedes champs (p. 128suiv.). M.de M.en fait une étude très
soignée, et partant de l'idée généralement admise du caractère
agricole de la vie des anciens Romains, il nous montre, soit
dans les rites agraires eux-mêmes (vendange,consécration du
bétait), soit dans les rites qui en ont perdu l'aspect, des survi-
vances de rites agraires. – Le troisième genre de fêtes était
consacré à marquer certains moments de l'année, ides ou
calendes, le neuve! an, les anniversaires du père de famille,
même ceux d'un ami, ou ceux du prince.
Outre ces fêtes, des chômages nombreux, de
multiples
obligations au culte domestique, enserraient le Romain d'un
bout à l'autre de sa vie. Des !a naissance, des rites nom-
breux assuraient son entrée heureuse dans le
monde, au
milieu d'un cortège d'esprits adonnes spécialement à cette
fonction. L'enfant était pré~nté l'autel, ri Hercule
guéris-
seur, aux dieux domestiques on le mettait, par de curieux
rites, a l'abri du Sylvain et sous la protection des divini-
tés de la culture fp. 117). Cette fête de naissance était
renouvelée chaque année, et pendant toute la
jeunesse, on
suspendait dans les temples les vêtementsdes enfants. Puis
t'éphébe revêtait, au champ de Mars, la robe prétexte, et
déposait devant les dieux les insignes de sa jeunesse; la
pre-
mière barbe était aussi consacrée et souvent
soigneusement
conservée (p. 179). L'année du Romain s'encombrait alors
d'une série d'anniversaires, de commémorations
publiques et
privées naissance et mort des ancêtres les plus proches,
services pour les mânes des morts
qui n'ont pas d'héri-
tiers, etc. Le christianisme hérita d'ailleurs de ces
pratiques.-
Le mariage, à peu près obligatoire au début, eut, au moins
dans les familles patriciennes, un caractère strictement
religieux et sacramentel le mariage par co«/arrfa<M fut
probablement le type primitif. !t ne pouvait être célébré pen.
dant certains jours et certains mois. La célébrationen
exigeait
un sacrifice divinatoire que l'usage
remplaça par la consutta-
ANALYSES. CULTE OOHEST10UE ~98

tion des auspices, et qui semble avoir aussi servi de consécra-


tion religieuse au mariage par foewptm.Lc/hm<w <<<«<M assis-
tait a la cérémonie. et il n'y avait probablement pas d'autre
sacrince que le premier. Le rituel de ce mariage est bien
connu, et nous n'avons pas à l'exposer de nouveau: là
comme ailleurs la revue des textes que fait M. de M. est fort
complète. Il faut remarquer ce que l'auteur dit à propos de
la <<'a//o )o mariage par co~n'fa/<o était a peu près
indissoluble. Pour le rompre, il faHait des cérémonies
terribles d'une solennité extrême. Nous sommes malheu-
reusement peu renseignes sur lit nature de ces rites,
qui cou-
sistaient probablement, soit dans la rupture symbolique du
lien créé, soit dans des actes inverses de la coM/ar/-<'<t«o.
M. de M. se borne a interpréter les textes et
l'inscription qui
ont trait & cette institution. – Les rites funéraires sont,
comme ceux du mariage, de ces pratiques religieuses qui ont
une efncacité par elles-mêmes, sans qu'il soit besoin de t'inter-
vention d'un dieu, fût-it domestique. La coutume générale-
ment suivie était l'enterrement, avec ses phases bien connues.
Au retour, avaient lieu des lustrations pour
purifier la
famille; un repas funéraire Mt'fcf'KtMm),renouvelé le troi-
sième jour, puis le neuvième (fu-nanot-fm~o/M),faisait
dispa-
raître la souillure qui pesait sur la famille (/~(M
/Mm<<<fp
/MHM<f<!). Le lieu de sépulture était un < <oc<M sac~' c<rWt.
~MM< consacré d'ailleurs aux mânes par le sacrifice d'un
porc. Il fattait rendre à t'aneetro de légitimes honneurs.
D'abord ce culte améliorait la condition du mort (p. t8~
dans son tombeau comme dans les Enfers. Puis leur
négli-
gence eut entraîné pour ta famille et pour la cité les plus
graves dangers. Aussides sacrificesexpiatoires sévères étaient-
ils imposés à quiconque contrevenait à ces devoirs. Un court
développement que M. de M. consacre aux croyances concer-
nant l'autre monde, parattra à tous un peu sommaire et
superficiel une étude archéologique de la forme des tom-
beaux, des inscriptions et monuments figurés qui s'y trou-
vaient manque ù cette partie du livre, et l'on aurait souhaité
voir traitée ici la question des rapports, à Rome, de l'ense-
vetissement et de la crémation.
La seconde partie du présent volume consiste dans une
étude des inscriptions et offrandes votives, autrement dit, des
actes de piété individuels à l'égard des dieux,
quels qu'ils
soient, domestiques ou publics ces inscriptions relatent sur-
L'ANXÈH <8M
SOOOMCtQU!
tout des couseerations d'autels, des dons a un
temple. Par
un excellent depouitiement et une intelligente ciassification
des documents du Co~tM M. de M.
~w~oKtOM /«~'M«r«Mt,
recherche 1° ce qu'était le donateur celui-ci pouvait être un
homme, une femme, un esclave même queite était lit
divinité invoquée d'ordinaire il y eu avait plusieurs, lit for-
mule était assez vague et s'adressait à tous les dieux
qui
avaient même fonction, locale ou sociale ip. j60; 3"
quels sen-
timent expriment les dédicaces c'était généralement cette
idée qu'il y avait une sorte de contrat (p«cM<w,- dont t'aceutn-
plissement du vmu était l'exécution. M. de M. étudie encore.
a ce propos, la façon dont l'individu rernerciuit le dieu eu
échange du service rendu, ou exposait ses désirs dans la
prière votive fp. ?"). Toute cette partie de l'ouvrage est très
neuve et sera très utile.
M.de M. s'est posé au commencement de son livre
(p.
et la question de i'autériorité du cutte
domestique sur le
culte pubiic et, après Fustei, il t'a résolue dans le sens
de la priorité du premier. Comme le savant français.
XI.de AI.voit dans le culte fondamental de t'Ëtat romain, le
culte de Vesta, la transposition du culte
domestique ù ia
grande famille qui est la cité. C'est la seule question d'ordre
réellement général à iaqueiie ~f. de M. se suit attache. Nous
nousdemandous si elle n'est pas insoluble, et peut-etreoiseuse.
Certes le culte de la Vesta romaine et celui. de la resta des
foyers patriciens ont prubabiemeut été identiques. Mais, au
fond, quelle raison autorise à dire que l'uu vient de l'autre ?
Le culte de la Vesta domestique est celui de
l'esprit de la
maison, comme le culte de Vesta est celui de l'esprit de la
cite. L'neétude comparée des faits de ce genre ne permet
pas
de poser une antériorité quelconque et l'histoire ne
permet
pas de remonter si haut. Toute agglomération, toute habitation
semble avoir été sous la protection d'un esprit
qui la symbo.
lise et la protège les cultes de la famille et ceux de la cité
coexistcut et se ressemblelit comme ont coexisté les rites de
la fondation des villes et ceux de la construction des maisons.
D'autre part, une objection peut être faite à la définition
admise on ne peut appeler réellement cultes prives que ceux
de la famille, des individus, des associations, qui s'adressent
aux dieux de ces difïerents agents religieux. Les actes indivi-
duels à l'égard des dieux de t'État ressortissent au culte
public, puisqu'ils s'adressent aux grands dieux, protecteurs à
ANALYSES, CULTE OOMt:<Tt()UR )97

ln fois de la vit!e et do chaque citoyen. I)e ce que l'évolution


religieuse a permis ù l'individu d'avoir sa part au culte et
des mouvements personnels de pieté, il nes'ensuit nuttement
que le culte n'ait pas gardé son caractère pubiic. Ce fut pré-
cisément, M. de M. le montre bien à plusieurs reprises, ce
développement de l'individu dans les cultes puhtics et domes-
tiques qui favorisa ia prompte expansion du christianisme.
Les connaissances de grammaire et mythologie comparée
de M. de M. sont peu sures. Je ne crois pas qu'il existe de
mot sanscrit Alika == mère(p. HO,n.), et l'étymologie Yesta de
<M.briiter. est ordinairement rejetée; on la rattache plutôt A
la forme cas, rester, sanscrit <'«~«, demeure.

XUTICKS
M. HAXTHLS.– Mittheiluagen aus demFrauenlebom derOrang-
BAlondas', der Orang-Djakuna. der Orang-L&ut. – )<'uf't''s
))t-o)fVtUt(!h!u)Stcvens, in~<!c/< /:7/<M.,tSuc.IV, t62-202.
A n'marquct' les intcnHctions <'nn';f'n)ant icx r<'m)n)'s, k'tu's
f~-t'indt's, i'uccouctK'moX,et tout pMtticuiif'rententtes t-it'-s d'' put-i-
))cation(n"t':2~uh'.).

H.-H. MATftHWS. The Burbung of the Wiradthuri Tribes.


J. A. t. t897, X\'t, u'' 3. ()). 2':2 suiv. MUMt-tjUubtesK~n''tnoni''s
d'iHittatio)).

t)..V. ).) SCXA)'.– BeMrag zur Kenntniss der Tattowierung iM


Samoa (~c/<. y. /</<«., )8M), \)-SS)).
i.

A. SKHXYXCKt.– Das KInd in CHaubeund Brattoheder Vœlker.


<.tM r~«~. x. F. t\. \,u<" i t.[ a.;

J. K. !'tS)\«. Ctebrattche beiderGeburt und Behamdluagen


der Neugeborenen bei dea Albanesern. (,t/<f<A.< ~~0.
CM< U'w<,XXY!.t<),p. <4tsuiv.)iTa)!uu~ d<' t'afcoucMe.)

!)' n.-t'. KAMfK. – Haus und Hof bel den Huzulen, oin Bei-
trag zOr HausfoMchtmg im Oesterreich. f/AM.. V, p. t~,
<86.;
!9S PASSÉESOCIOLOGIQUE.
MM

h'. – CUt~'AXCHS
ET t'BA'nuL'HS
KUSCKKXAXT
).KSMuttTS
t'arM.MAtss.

R. STEIX~tKTZ. Continnitœt oder Lohn und Strate im


Jenseits der WUden ~'uHN'Ht«<~ ox pc<MM et <'t'<'OMtpf)tj!M
(/f«~ h r«'<<'OM~'<to~<'chez <? ~Kra~M). (~'<~tf. /<«'~H-
</<ro/)o~ 189?, p. S77.6Û8.)
Cet article est plus important que tel ou tel gros livre, et
par la preuve et par le résultat par la preuve, car l'auteur
y rassemble presque tous les renseignements que nous avons
sur les conceptions que les sauvages se font des peines et
recompenses dans l'autre moude par le résultat, car il s'agit
de la question de savoir si les sauvages ont ou non cru que la
moralité en ce monde pouvait anccter leur existence au delà
du tombeau, ou si cette croyance ne serait pas plutôt de créa-
tiou récente. La discussion est eu cilet ouverte, et c'est dans
une réfutation de la monographie de M. MariUier sur le même
sujet (A« ~of<N«'f </<'<'<!Mtc et ~'fWf</c;«~<c<'<«'; ~M~<'«p~
t!OHc<f<<«!<&() que consiste le préseut travail.
M. Marillier a divisé les faits eu ciuq groupes t" chez
certains peuples, il ne trouve aucune idée des peines et récom-
penses; chez d'autres, les dinereutes conditions de t'ame
après ta mort lie soutque ta continuation de la coudition ter-
rostre ou en dépendent ailleurs, elles varient avec le genre
de mort 4" dans d'autres cas, des embûches, des ordalies sont
censées attendre i'ame au sortir de la vie et son sort dépend
de la façon dont elle triomphe de ces épreuves (de là l'impor-
tance de certains rites funéraires où l'on munit le mortpour
le grand voyage;; S" enfin, il arrive que l'influence des idées
morales commenceà se faire sentir, ou que des emprunts au
christianisme introduisent l'idée de justice dans les notions
de l'autre vie. Tels sont les faits dont M. St. critique avec le
plus grand soin lu nature, la source et la classiticattou. M. St.
en effet avait soutenu ailleurs 'A'</)Ho<o~MF/«' .S'<)«/<e«,
)894)
une théorie qui lui semblait résulter des faits et qui allait ù
l'encontre des idées de M. Marillier, et, ajoutons-le, contre la
théorie presque classique de la continuation de la vie de
l'âme. C'est donc avec une certaine passion qu'il maintient
son opinion, eu attaquant, sur certains points avec sucées,
les conclusions de ses adversaires.
ANALYSES. CMYAtfOB! KT («TES FUNÊKAUtKS t09

Il sembleque M.St. ait raison(§~)de maintenir que les


faitsdu secondgroupeno sont pasdénuésde caractèremoral.
Si, dans l'autre vie, la condition,la fonctionsocialeou reli-
gieuseimportentetclassentles individusen heureuxet mal-
heureux, elles correspondentdès cette vieà une hiérarchie
tnoraie.Carpour le sauvage i'étatdefaitcorrespondexacte-
menta l'état moral,et le riche est pour lui nécessairement
meilleurque le pauvre(surtoutenMétauésie).Pour les faits
du troisièmegroupe, si les différentesconditionsde t'ame
correspondentau genrede mort, c'est qu'il y a une sorte de
mériteil mourir plutôtd'une façonque d'uneautre. En qua-
trièmelieu la victoiredes épreuvesdu passagequi attendent
les âmesau sortir de ce mondedépendnon seulement do la
force physique,maisde ta vertu, du courage,de la piété du
mort et des droits que sa conformationaux usagessociauxlui
a acquisenversles hommeset les dieux. Pour ce qui con-
cerne l'emprunt possible, M. St. critique l'opinion de
M. Mariitier, suivantlaquelleles Indiensde l'Amériquedu
Kordauraient, dansleur conceptiondeschampsde citassedes
bienheureux,reçu l'influencedes missionnaireschrétiens,t)
remarqueavec raisonque les jésuitesauraient introduiten
même tempsqua l'idéed'un Paradiscelled'un Enfer(p.896)
dont on ne trouve pas trace; il soutientle caractèreautoch-
tone des mythesaméricainsdu mondefutur. M. St. se rat-
tacite donc à l'explication de Waitz, à laquelle nous nous
rallions également.Quantà l'ordrede faits que M. Marinier
avait misen tête desa classification,M.St.t'affaibliten rédui-
sant le nombredesobservationssûreseten montrantqu'elles.
sont faitessur des peuplesde culturetrès inégale.
Cettediscussionminutieuseet cette monographiecritique-
dé M.Marittieret de M.St. montrentréeitementla voieoù
l'ethnologiedoit s'engager.Maissi décisifsque semblentà
certainségardsl'argumentationet les faitsde M. St., il reste
établi que, logiquement,et en quelquescas, l'idéede la sur-
vivancede l'âme est indépendantede la notion de justice.
C'est par fusionentreces deux idéesde la consciencesociale
que l'idée actuelledu monde futur s'est produite. Mainte-
nant, M. St. peut dire que dans la majoritédes cas nous
trouvonsla fusion opérée, et que la façon dont l'individu
est moralementjugé influe sur la façondont les survivants
s'imaginentsa vie d'au delà. EnfinM. St., dans un para-
grapheremarquable(§6),montreque cettecombinaisonétait
~00 t-'ANNÉB SOCtOLOC~Uf!. )t!M

possible et même nécessaire dans certaines circonstances


sociales, et comment la contiuuité physiftue. supposée entre
le monde des morts et celui des vivants, entraînait aussi ta
continuité morale. U semble avoir satisfait aux exigences les
plus rigoureuses de la preuve, et on ne peut lui. refuser
d'admettre qu'il y a eu, dès l'origine, étroite association des
idées morales et des croyances concernant les morts, mais il
faut maintenir que dans de nombreux cas l'association ne
s'est pas produite.
D'ailleurs quelques considérations sociologiques seraient à
introduire dans le débat. La première serait, pour parler
comme M. St., cette du rapport des peines surnaturelles
célestes aux peines terrestres du même genre o, et, pour
employer des termes plus exacts, celle du rapport de l'obser-
vation des interdictions rituelles et de la vie d'outre-tombe
le péché, le sacrilège sont les premiers crimes punis dans l'au-
delà, ce sont aussi eux qui affaibtissent t'âme assez pour que
l'individu meure ou qu'il disparaisse ou qu'il erre partout au
lieu d'arriver dans le monde des bienheureux. La seconde
serait celle du rapport des sacrifices et du sort de t'âme après
la mort. Car les actes religieux ne fortifient pas seulement la
santé et la situation sociale de l'individu, ils assurent encore
sa vie éternette, et la doctrine que le salut vient des œuvres
pies est un des étémeuts des idées qui président au sacrifice
même.

Dr W. CALAND. Die AItindisohea Toten-und Bes.


ta.ttQngsgebra.&che,mitBenutzungH&ndachriîtUcher
OueMeadargestent(/.M WfMnt~tMtt'Mp~/xK~'a~'M~Hx
f/Mc aKCtt'MMf). (t'~7<HK</f/<H~t'Mder AcMt~. Akad. <:«M
H~pMcAap. ~«~f~/aM. Afdeet. Letterk. Deet. l, n" 6.)
Amst., J. Mutter, t8M!, in-8", xtv-~t p.
Les rites ttindous sont peut-être encore plus intéressants,
pour le sociologue, par leur détail que par leur physionomie
générale. La façon admirablement vivante dont les textes nous
ont conservé le rituel suivi, en fait les plus précieux docu-
ments pour quiconque tente d'étudier d'une façon générale
ua ordre précis de faits religieux. Les rites funéraires de
l'Inde ancienne (antébouddhique; ont un intérêt de ce genre.
Le sens des actes accomplis était resté tellement clair, la cor-
respondance extraordinaire de la prière à l'acte auquel ette
ANALYSES. CMYASCKS ET BtTRSFUNÉHAtHUS g01

est attachée est telle, les formules (maK~'ajt)ont une expres-


sion tellement saisissante que le livre de M. C. sera un
indispensable étémeut d'une explication sociologique des
rites funéraires. Ce livre, M. C. l'intitule modestement
exposé, et en effet, presque toujours, les textes se suivent
et leur traduction coordonnée constitue le développement.
Mais nous savons quel travail nécessitent et une traduction
et une systématisation de textes encore peu connus, pour la
plupart inédits. Le livre de M. C. (ait d'ailleurs partie
d'une série. L'auteur s'est fait pour ainsi dire une spécialité
de l'étude du culte des morts dans t'tade antique. Son opus-
cule L'c~r die ï'o<CMW<«'tt~ /w wt~cH </f<-Moy<TmatM.
c/tfM t'C~ (<889)est comme l'introduction d'abord de son
second livre .t/<<n<<Mc/t<t/)M<'n<'M~(t8M), ensuite du présent
ouvrage.
Le plan et lit méthode de travaii de M. C. ont un douMe
mérite. La personnalité de fauteur s'enace devant les faits.
Or it se trouve que les rédacteurs des rituels brahmaniques
avaient déjà pris conscience d'une distinction qui nous appa-
raît fondamentale entre le culte des ancêtres et les cultes
funéraires. M. C. l'a suivie il a ajouté à la valeur philolo-
gique de son travail par i'intérét scientifique du principe. En
second lieu (p. H!4),M. C. est résolument sorti de la voie de
t'étude indéfinie du Higveda. Les Hoth, les Wcber s'étaient
exclusivement servis de ces indications vagues que donnent
les hymnes. Les progrés de l'Indianisme permettent main-
tenant do travaittcr dans une tout autre direction et de
s'attaquer a ce bloc de textes dont le Rigveda n'est qu'une
partie minime; méthode plus philologique, qui semble, jus-
qu'à nouvel ordre, correspondre mieux et il la tradition
hindoue et aux faits. Dans ie livre de M. C., comme dans
celui de M. Ilillebrandt dont nous parlerons plus loin, la
recherche est plus exhaustive qu'etto ne t'a jamais été.
M. C. a une exacte notion de l'importance de son travail
pour c l'ethnographie comme ii dit (n° ~). I! connaît
l'article de Frazer sur les coutumes funéraires {p. 6; et, au
fond, adopte son interprétation générale (App. H, p. t7t ). U
ne s'est pas fait faute de donner les équivalents ethnogra-
phiques dont il disposait, et surtout ii s'est réellement attaché
a faire connaître ce qui était encore aujourd'hui en usage aux
Indes. Ces rapprochements ajoutent encore à l'intérêt du
livre. Les anciens cultes funéraires paraissent avoir, en effet,
?:! L'A!<SË6 SOOOLOOtUUE.MUT

plus persista que lit plupart des autres pratiques des vieilles
religions hindoues.
Les textes distinguent, dans les rites funéraires, quatre
momentset M.C. adopte leur division (p. xu). Pour lu commo-
dité de l'exposition et pour ta logique des choses, distinguons.
eu un de ptus I, rites antérieurs à lu crémation 11,ritesde
ta crémation III, assemblage des ossements t\ te ;-aK~w«
(cérémonie d'apaisement) V, l'érection du monument {une.
raire. Unprincipe domine tous ces rites, c'est la ditïérence de
traitement entre l'individu qui, pendant sa vie, a posé les
feux des grands sacrifices (tt~a~ et celui qui ne les a pas
posés (atM/«M~f<).Aux Indes, plus que partout ailleurs, est
évidente cette relation entre la vie future et les sacrifices
accomplis ici-bas. Commele rituel qui concerne t'«~'<<h~< est
plus complexe et plus intéressant, n'indiquons que celui-là.
I. Si les moyens magiques de rappeler la vie ont échoué,
si même l'achèvement des sacrifices qui ont pu être négliges
n'a servi de rien, alors il faut avoir soin de répéter certains
hymnes (§ 4), de ne pas laisser le mourant expirer dans son
lit (§ N) et aussitôt après lit mort on doit réciter des textes
sacrés, faire des libations. Viennent ensuite le bain et la toi-
lette du mort auquel ou lie les deux pouces ensemble. Le
cortège se met en marche, les feux d'abord, portas dans les
vases du sacrifice, le mort, puis viennent la victime (vache),
les parents en deuil, couverts de poussière. A des intervalles
réguliers, ditterents suivant les écoles, détermines soit par la
distance soit par les lieux, sont pratiques des rites pour
écarter t'ame (§ 13 et n" tu6).
II. Onarrive au terrain fixé rituellement pour la créma-
tion, on purifie la place, on la consacre au mort. On et&vele
bûcher, on fait une dernière toilette du cadavre, soit qu'on
t'asperge d'eau, soit qu'on le baigne encore une fois on lui
coupe teseheveux et les ongles, à moins que l'on procèdeseu-
lement àcetteoperationaprest'accomptissementdesritessym-
boliques suivants. tts consistent eu une curieuse cérémonie
d'expiation la vache est amenée, tous les parents formant
une fite, oùles plus jeunes sont tenus par derrière par les plus
vieux, et le plus jeune embrasse les pieds de derrière de la
vache. Là-dessus,on fait faire à la vache le tour des feux, et,
ou bien on la laisse partir, ou bien on la sacrifie, et on en
dispose les morceaux cuits autour do l'autel. Puis vient ua
ANALYSES, CROYANCES
ET MTM FUMÊRAtXES 203

rite qui jette un jour tout nouveau sur le lévirat. La veuve se


couche à côté du cadavre, et le prêtre dit au mort < Dottue-
lui postérité et biens sur la terre. Lefrère du mari s'approche,
lit prend par lit main, lui commande de se lever, de revenir au
monde de lit vie Tu es devenue )a femme de l'époux, tui
dit-il (§ ~K. §9t;.H est impossible de mieux exprimer la
substitution d'un frère &l'autre. On dispose le cadavre sur le
bûcher, ou met de l'or sur ses yeux, on arrange les vases et
les instruments du sacrifice, et t'en habille le mort avec la
peau de la vache (p. S4). On fait, suivant des prescriptions
détaillées, des tibations, des circumambutations autour du
bûcher, et après diverses cérémonies expiatoires on exécute
la crémation cité-même. Les prières expliquent le but des
actes eux-mêmes, qui est, non pas de détruire le mort, mais,
bien plutôt de le confier a Agni (le feu) qui le mène dans le
monde des ancêtres. Mais si la mort est partie, la souillure
reste. Des tustrations doivent être faites sur-le-eliamp (g 36,
p. 73). Un grand nombre d'interdictions pèsent sur les gens
en deuil (§ 39). Daus le cas où le mort était un «Ka/«<<~<t<,
certaines pratiques fout défaut. Si le mort était hors de sa
maison, il faut y ramener le cadavre. Si cedernier était introu-
vable, on lui substitue, pour l'incinération, une ngure~faitede
tiges d'arbustes. Une exception des plus remarquables à ce
rituel concerne l'ascète si ou l'incincre, il faut au préalable
faire sortir de lui, par une cérémonie symbolique, les grands
feux qu'il est censé avoir absorbé pendant sa vie ascétique
(!;46). Ou bien on ne l'incinère pas puisque ses actes lui ont
acquis par eux-mêmes t'éternité.
itt. -– On rassembleainsi les os retrouvés parmi les cendres,
on les met dans une urne, pendant qu'on fait des libations et
des invocations à 1'tlme pour qu'elle s'éloigne.

IV. –Le~M~arma, ou apaisement(§6t, p. 4i~), consiste


en une série de pratiques ou l'on purifie le feu qui vient
de dévorer le mort et où on en allume un autre, où on relève
des tabous d'enterrement la veuve et les parents (§ 67, voir
les formules). Enfin par différents actes symboliques on raf-
feriiiit la famille éprouvée (§ 65).

V. Pour tout autre que t'a/tt/~Kt, l'urne qui contient les


os est simplement déposée au milieu d'un bois; seul celui qui,
par ses sacrifices constamment répétés ou par sa piété extra-
204 L'ANtÊE MCNMGMUE. «''7

ordinaire, s'est acquis des droits à la vie future est honoré


d'un monument funéraire t~ construction, le site eu sont
déterminés par des instructions aussi minutieuses que celles
que les textes donnent pour ta construction de t'autet (§ 87.
§ ?)) ou tobourete champ, on le sème de grains de sésame
on sort de )'urne les os du mort, on les arrange en le priant
de les colliger lui-même § t03), et on les recouvre alors de
mottes de terre en nombre fixé par lu toi. Les devoirs tune.
raires les plus absorbants ont été rendus,
M. C. a ajoute app. Ht, p. )Tt suiv.) diverses explications
pour quelques-uns de ces rites, tt remarque excellemment
leur caractère générât, dont les Hindous ont d'llilleurs eu
conscience ta mort est le contraire de la vie. les rites {une.
raires sont donc le contraire des rites de ta vie, c'est-à-dire du
sacrifice aux dieux. Le sens dans lequel ou (ait h' tour des
feux, la manière dont on porte le cordon du sacrifice, les
nombres impairs, la couleur noire de la victime, l'orienta-
tion, tout est exactement inverse. M. C. fait encore une
remarquedécisive, que les textes taisaient déjà (§ t4, cf. p. 174)
les rites funéraires ont essentiellement pour fonction reli.
gieuse d'assurer au morlla vie d'au-delà, de conduire l'esprit
dans le monde du cie). région des Ames des morts.
Tel est en effet le principe même de ces pratiques. M. C. a,
nous semble-t-il, rendu un inappréciable service à la socio-
logie religieuse en signalant ce fait. La théorie de M. Frazer
n'est que partiellement vraie; les rites funéraires n'ont pas
seulement, comme it croit, pour but d'écarter t'àtne du mort.
its tendent à lui assurer une existence réelle et heureuse.
C'est dans l'intérêt du vivant et dans celui du mort que les
rites sont accomptis. – De plus, le mort satisfait devient un
ancêtre, objet de culte, divinité tutétaire du foyer. Une étude
qui ne rentrait pas dans le cadre que s'était tracé M. C., sur
les notions de prc/n. et de c'est-à-dire sur les idées que
les Hindous se font de l'état de t'ame avant et après les rites
funéraires, montreraitcertainementqne tous ces rites ont pour
objet do transformer un esprit vague et méchant en un ancêtre
puissant et ami. Espérons que M. C., plus compétent que
personne, fermera sur ce point le cerclede ses monographies.

0) Cf.h- .-o)))j)tc
tt-n'tu<)t'n. )'i.<h''t ('J~/tM~Mc/M ~<«-<f .):~fK.
jui)t''mt'n,p. Nit).M.)'i,<c))t') jxmr'juoi.aux )))')'<,h'~t!rui)M
t'X)))h)U<' <)f
sA-attM'fontpartit,du ntttt~w)tuH<'tTtin: ils !.untnuir~,et h- ncit'fiitlu
''MttfUrdes ototH.
ANAt.YiiHS. CROYAMCES
ET HtTKS FUt~HAtMES 20S

PEMCY CAHDNER. Soulptured Tombe of Het!M


<« ~t't<<pf«t-t'
/«t<««'<' </c<!
~f'WMM).Londres, Macmittau,
i896,iu-4".xx-239p.
L'ouvrage do M. G. ne prétend Il rien de plus qu'à Être un
livre de vulgarisation et d'tnstoire de l'art. Splendidement
imprimé et illustré, il est fait pour mettre sous les yeux, et
d'une façon intelligente, les plus beaux monuments do la
sculpture funéraire hettène. Mêmeles ambitions explicatives
semblent réduites &teur minimum.Et pourtant, comme l'au-
teur est uu des archcotogues les plus distingués de i'Angte-
terre, comme le sujet est un de ceux qui n'ont guère été étu-
diés jusqu'à présent, il nous faut soigneusement signaler ce
livre tel qu'il est.
f/archeotogie et t'epigraphie nous apprennent chaque jour
plus sur ta vie réelle des cités et dos familles grecques. Les
monuments littéraires ne se rapportent qu'à une élite intet-
lectuelle; s'ils nous donnent des renseignements précieux, ce
n'est que par contre-coup, et souvent les faits qu'ils présen-
tent sont idéalises à l'excès. Même les documents les plus
précieux, Hesychius. Sorvius, nous font counattre la théorie
des choses, telle que les esprits reRechis l'avaient imaginée.
non pas les choses ettes-metnes.Au contraire, les monuments
figures nous permettent de saisir les institutions vivantes et
agissantes. Encore que les plus importants aient été pour ta
plupart t'œuvre de cités, de patriciens, ou traduisent des évé-
nements rares, ils portent, mieux que les vers dos poètes ou
les travaux dos philosophes, l'empreinte du milieu qui les
entourait, des idées et des sentiments moyens concernant les
morts. C'est pourquoi le livre de M. G. venait à son heure.
Evidemment il a tous les défauts des livres de vulgarisa-
tion la discussion, par exemple, sur l'identité de t'ttades et
desChamps.Etysees, est bien académique [p. ~8). Desépithetes
que les archéologues semblent affectionner sont constantes
et l'explicatiun des faits par le caractère <mesure des œuvres
du génie grec est fréquemment employée. Mais ce n'est
pas là que se trouve l'essentiel de l'ouvrage; ces chapitres
sur les croyances et les cuites ne sont qu'une introduction à
une étude des mômes faits vus à travers la forme du tom-
beau.
Un premier renseignement gênera) est ta rareté des inscrip-
306 L'A!i\Ët: SOOOMCtOUE. t897

tions faisant allusion aux peines et récompenses après la


mort (p. 40). A part certaines peintures de vases, empruntées
plutôt à une pure mythologie ou dérivées de tubteaux fameux,
on ne voit aucune de ces représentations de tourments et de
béatitudes auxquelles le christianisme ou le bouddhisme ont
habitué t'Ot'ient et l'Occident. En moyenne, si la rnoraie d'ici-
bas n'était pas absolument indinerente aux idées grecques sur
la vie future, celle-ci était loin d'être le centre des préoccu-
pations. Les inscriptions énoncent plutôt simplement le nom
du mort, de l'auteur du tombeau, de celui qui l'a fait cons.
truire etmémetesépigrammes les ptusiittérairesde l'époque
alexandrine ne (ont. que dire des adieux au mort ou que le
iouer de sa sociabilité.
Maisla description même des formes des monuments funé-
raires, l'étude de leur répartition géographique, de leur
transformation suivant l'évolution de l'art et des idées, sont
le centre même du livre de M. G. Les plus anciens monu-
ments de la civilisation mycénienne sont certainement les
tombeaux royaux. Le mort y dut être longtemps l'objet d'un
culte; c'est ce que prouve la vaste disposition de t'entrée du
tombeau. Le roi y était enseveli au milieu de ses trésors; là,
comme dans toute l'antiquité grecque, on entourait le mort
de ses objets familiers. Ainsi on retrouve souvent des enfants
enterres avecleurs jouets, des guerriers avec tours armes ou tes
images de leur cheval et de leur chien (de là la représentation
fréquente du cheval dans les bas-reliefs, p. 83, p. US).Les
quelques sculptures, lions, chasses aux lions qui ornent ces
tombes, en même temps qu'elles rappellent des épisodes des
moulages assyriens, montrent que, des ce moment, le carac-
tère des figurations tombales est de rappeler la vie du défunt,
de le fixer dans son attitude favorite, plutôt conventionnelle,
et non pas de préjuger la vio qu'il va mener au delà du tom-
beau. – A Sparte, le mort est nettement héroïsé et l'histoire
même nous relate, comme les tombes, des changements de
nom après la mort (p. SO).Maisce qui est bien symptomatique
c'est que, même dans le cas où il n'est pas douteux que telle
sculpture nous représente des morts, on les voit figurés dans
leur vie passée. Et c'est ainsi que la place qu'occupe la femme
à côte de son mari sur ces tableaux semble correspondre à la
place relevéequ'elle occupait dans sa vie d'ici.has (p. 81).
A Athènes, à l'origine, on voit exister deux sortes de tom-
beaux le tumulus, avec une ouverture où l'on répandait le
– CROYAKCK8
ANAU'SBS. t!TBtTMFOKÉHAmES307
sangdes victimes,et la stèlequi marquaitremplacementdu
cadavre les deux étaient souventréunis.Avantte:<guerres
médiqueset pendant!'époqueclassique,sur la stèle sedevc
loppéretitun certain nombred'ornements un étroit portrait
conventionnel du défunt,surtoutpourlesjeunesgens(p. 1M
Puis )a stèle s'agrandit; elle contientun grand bas-retief,
représentantsoit le défunt, soitsesattributs(vasede mariage
pour les jeunes filles). A un stade ultérieur, des sortes de
petits templess'érigent, ou apparait la statue équestreou
isoléedu mort. Cette nichemêmefinitpar dlsparaltreet la
statue resta seule, mais seulementdans certainscas assez
rares.Un autre développementde la stèle est constituépar
les imagesnon plus du mort isolé, maisdu mort dans sa
famille,commesi sa vie passéefournissaitle typedesespoirs
possiblespourun autre monde.Les représentationsdu mort
recevantdansson tombeaules hommages des siens,ou assis-
tant à leur repas funéraire,semblentrares. Une troisième
séried'ornementsest constituéepar la reproduction,au som-
met de la stèle, soit des feuillesd'acanthedont les Assyriens
fournissaientle modèle,soitde sphinxet de sirènes,esprits
chargés,suivantM.G., d'écarterlesmauvaisgéniesde l'âme
qui habitait le tombeau. On trouveaussi figurés des ani-
maux simplementsymboliquesdunomqueportait le défunt.
Quelqueinsuffisantesque soientles preuvesexposées,le
livre de M.G. ne laisse pas de s'appuyersur une érudition
extrêmementsolide. On pourra refuserbien des identifica-
tions, par exemplede voir dans les sirènesdes xno-;po!M(<,
alors qu'il s'agit évidemment,commele montrentles figures
mêmes reproduitespar M. G., d'espritschargésd'emporter
et de protégerl'Amedu mort.

XOTtCKS
/t. – PK<))).TO)U)~L't:

A..P. MAnSEX.–Ch'avhœje og GravfuNd A'a Sten&ïderen i Dam


mark. De oattige Danmark, 38 p.. 50 p). Kjœbt'nhavn. <:y)-
dendft!, <89C,in-fo)io. (Tombes du Dancmm-k)

W. COt'ELAXUBOHLASH. Thé Dolmens ofiretamd. 3 v.ni-8",


Chnpmanand HaH, )M6. (Mistribution<'t mpprocht-utFnts.)

WOLFCAXGHELBfG. Ein ~yptiMheo Orabgemœido und die


?8 L'ANKËE SOOOKMtOO)!. )897

Myoenische Frage..Siti'hct-. der ).))U.phitot. u. hist. K)ass< d.


k.t!.Ak.d.Wi<s.,)89U,)V.)

<j. t'A't'ttUXf.– La OiviUeation primitive dans la Sioito orien-


tale (Attthtupoj~it-.t'ans.M.~san~Vt)),S, p. t~, 29~
S. XHfXACt). (tt. p. ~-7-34t.) Le
préhistorique en Egypte
d'après de récentes publications. t<utn<' )a <tm'stiundiscuta'
ptn':

).-t.tXt)).:)!S )'t.r)'tUH. St't'XXHt.LKTm.'tXMK).).. X~attasatht XaX.tx.


Luod., «?6;

MAS)'H)<O.Bt-Y.critif}Ut',)89'),)).):'Nsui~.Cotn).t.'r..ndud(!(.-('
dct-nh'r )m'<

n
/<.–PK'')').H;<<(). t:tY)t.).-t'.<
S. K. Kt SXHXUW. Ueber den Glauben vom Jenseits und den
TodtenouttusdorTsoheremissen. Oxt.Arctt.f. Kthtt.JSM, f\,
t5<(.Uiv.)

C.–A~T)))tOt'Ot'M.)KMf!t.)<:)t:L't! F.

A tufjuv~tiutt dt's cuttt's fm)t''t-!)in-s-.<'t-attactx-.;<'))(.'


du repas où p~t
t))<n)~)L'dcfu)tt,(.'t''<'))('df ta M'rtuntit~i'jm'uojmscdtt))!'un F
)'ft)asdt'<tu-c.

H. MADCQKA.– Anthropophagie in der pr~historisohen


Ansiediun~ bei Knovize und in der prfahistorisohen Zett
uberhaupt. (Mitth. d. anthr. f~M)).W.. X\V), t\' p. <29.)
L'auteur :i''mttat't))'a)'i))t('t-p)'<)at)')nfmi)niste.

)). KKt~.– MenschenneiMh akArznei !i. Hthnopt-aphischeHci-


ji
t)-a)! )''t'~t){t-t)ss! ~-i.'t-d'-s ~0" t.churtst. A. Banian).–(Supp!.
ùh)t.Ar(-h.f.)-:[))))o.,p.M.)
(Coutumes chittuisc! hindoues, ccttf's.)

S. KXAt-'SXt.. K. S)')tt-:X):j-:H.– .·
Menschenneischessen, eine
X.
Umjtrage (A. [.'r<)u<-t) F. H. S;.

~.–AXT)UL')TtS CMCQLt!

H.v. FBtTXE. –ZudenGriochischem Totenmahiretiefa. (~'«AH?.


tM~M <~ ~at'Mr/K'Ae~/)fM/M/<M~<-c/«?'~o~Me/teM
/<M<f/M~~<A<
«McA<- t896, p. 34Ssuiv.
.4A<Ae)7«)t~),
AXALY9KS. CROYANCESET B!TM FUKÉXAMKS 309

Les feprfxentution!!si fréquentes de repus funérairesymbotiitp-


raient, non pf))tun souvenirttun'pas de fitmiDe,ou bienla façon
dont le mort se nourritdans le tombeaudes mets qu'onlui apporte,
maisla )a<;ondont il assisteau repas fu)t<irair<-
t-t s'y réjouit.

Die Atttftohen Grabeliefs. Merggb.im Auftraged. k. Ak.t. Wien,


i8M,)iv.Vt)t,tX.

C.-M.KA!FFMAKX. Die Je&eeitshofhtMajrender Orieohem


und Rcemer naoh den SepaUtratinschriften. i8C7,F. i. B.,
He'rdpr,in'8", \n-8!ip. Excellentetuono~raphie.

nEKt!)!)E)t.–L'idée de lamort en Grèce à l'époque classique.


Paris. Fontcmoinf:,1897,in-8".
Exposad<;r~votutiondes id<cscnnt:<'r)mnt ta mort et rautre vh',
au tv"si~'fjf.))est à rf'(;r<*ttcrque fauteur, capabledesmcittearcs
études archcotogiques,se soit born<a une étudephilosophiqueet
littéraire qui ajoutepeu au livrede itohde P~c/«.

~.–CM)XB

D'ENJOY.– Le culte des mcrta en Chine (Reu./K<.de Socio.


~t'f.rnarstSM).

–EOYt'Tt!

(:. MASPERO. La table d'offrande des tombeaux eerypttena


(~. <<?<. /M~ XXXV,3, p. 275,350).
Articlequi nesera Mhevëque dans le tome suivant,dépassed'au-
leurs testimitesmêmesdu culte desmorts; nous enferonsuneétude
dans ta prochaineannée.

C.–OtV)X)!!AT)0;< nés HOKTS KT DES t'KtSCEB

J. KAEMST.– Die Begrnadun~ des Alexander und Ptolemcer-


cultus ln ~rypten ~/«'<M«eAM~t<M«M,
V,S, f )ivr.).
G. MASt'HKO.– Oomment Alexandre devint dieu en Egypte
(Annuairede ~o/c des ~<!M<M
~<M<~M.
Paris, lmp. Xat., tM7).
FttAXZCUMOXT.– L'Éternité des Empereurs romains (~ec.
<fHMf.etde ~'M.religieuse8,<890,t, p. 43S.M2).
Étude sur le titre d'Éternité des empereurs. M.Cumontrappro-
che MtMnitede l'empereur et cettede la ville; il montre ensuite
E. Dt.'MMttt. Ann<'osociul. M97. tt
210 t'AXKÉB iMï
SOOOLOCtOUB.
comment,sousFinHucncedes idées religioso-politiques orieutale)!,
t'eternitMdes astres, du soleilea particuiier, fut mise en n'tatiun
avecla personnede i'e)n)'<)'eut'.Lerituel net'' persisted)msle cere.
moniatbymatiu.LetMVuii de M.C.tnuotfeMHeXonment lahxiondM
institutionsn'tigieu~Met d~sittstitutionspotitiqm'squi s'est fuiteau
profit de t'etnpet'eur.– )\'ut-t!t)'oM.C.aurait-U mieuxsaisice que
fut )n naturedivinedu princf): avaitchereh'!du cûta de la cotMf-
cf«<t'o,de t'apotheose,cet'Ononie(lui lui faisait acquérir, de son
vivant,l'eteruite desdieux.

–f<KA.'<0)!!f KeLtOO~

R. HOLDZIHEH. Aua dem Mohammedamiaohen HeUigen-


cultue in ~Egypten (G~AtM.).XX). n" <3<S).

S.-S.-J. DAHLMAXX. Nirvana. /f~~<«fM<- M<t- Vo~McAt'eA~~M


~M<MA)'MtM. (Her).. DamMS,t89<) l'eu de r~suttats. (Cf. C. M. p<n'
JalcobifMtt. Cet. At))! avril t89')
Nous ne mentionnerons que pour mémoire le grand débat ouvert
ces dernières anodes pour savoir si i'inscnption d'Abercius (Asie
Mineure) apparti''ntau':u)tc funcraire prec ou chrétien. La question
est loin d'être trancMe.

–St:tt\'tVAXMSn'*XC~SX)!S
CROYAXCt!!).
CHAMAM etc.
MAXTtis,

WtLKOWSKt. Sagen vom ScMoaaberge Mehlken (Xeitsch. f.


Et))n., i897, !), 63, cf. 68 suiv.)

V. – CULTES POt'tJLAHtKS KN GËN~BAL

PUS PAKTtKUt.)t:ttR!)tHST A<!RA!RES

ParAI.MAMs.

W. CROOKE. The popular ReMerionN and Folklore of


Northern Indta. (~~Wts popM&Met Folklorede l'Inde
i896, Westminster,Constable,3 vo!.in.8".
<ep«H<WoH<!<<').
ï.vt!t-294p.;H.!i.3S9p.
La secondeéditiondu livre de M.C.sera encoreplus pré-
cieuseaux travailleursque la première. Considérablement
enrichide documentsinédits, de rapprochementsnouveaux.
rendu extrêmementcommodepar un indexcompletet une
ANALYSES. CULTES POPULAIRES 3H

bibliographieremarquable,le livre de M.C.doit faire partie


de toute bibliothèquede sciencecomparéedes religions.
Certesles plus gravesobjectionspeuventêtrefaitesau plan
du livre, à la méthode,à la délimitationmêmedu sujet. Mais
il est rare de voirune étude plus indispensablequecelle-ci.
D'abordelle constitueun résuméde toute unemassedelivres
très vastes et d'un accès diniciie. Ensuite,nulle question
n'avait plus besoind'être traitée. Rien de plus faux que les
idéescourantessur t'étatactueides religionshindoues,même
les travaux les plus recommandables,le livrede 8. Monnier
Williams, Nfa/ttoaM~m«Kf<M<K~«MM), ne nous donnent
que l'étude d'un petit groupe de faits l'enquêtepremière
restait à faire. Il fallait appliquer aux religionsle procédé
dont s'est servi M. Risley dans l'étude des castes.Résidant
dans l'Inde, aimant et connaissantles indigènesde tous les
rangs de la société,sachant admirablementl'ethnographie
du pays, tout à fait au courant dos questionsque se posela
sciencecomparéedes religions, s l'anthropologie religieuse
enfin,doué d'un réeltalentde classificationet d'organisation,
M. C. était tout désignépour cette premièreassisede tout
travail futur sur ce mémo sujet. H n'est pas d'ailleurs de
problèmeplus attachant.Lesfaits sont, dans l'Inde actuelle,
à la foissi simpleset si complexes;ils sontle produitd'une
histoire tellementvaste et d'une telle stagnationen même
temps, ii y a la un pareil coudoiementdu primitifet du raf-
finé, d'institutions religieusesen régressionet d'autres en
formation,et dans tout celaune telle continuitéque nulle
part une étude de ce genre ne sera plus fructueuse.M.C. a
eu le bonheur et l'honneur d'avoir commencéle défriche-
mentd'un si vastechamp.
Les religionspopulairesde l'Inde septentrionalefont soi-
disant partie de l'hindouisme.On entend par hindouismela
dégénérescencede l'ancienne religion brahmanique clas-
sique,pendantiaqueiiedes pratiques multiplesse grenèrent
sur les anciens rituels où les dieux les plus grands,Indra,
Brahma, s'abaissèrent, tandis que Visnu, Çtva,Kàti, etc.,
devinrentle centre de la mythologie.L'ensembledes cultes
populairesrentrerait dans ce système &titre de dérivésdes
ancienscultes brahmaniques.M.C. s'élevaitdéjàcontrecette
vue, dans une communicationau Congrèsdes orientalistes
deLondres. L'hindouisme, selonlui, recouvraitun londsprimi-
tit et lescultes populairesétaienttout autrechoseque des ré-
SIS L'ANNA <B97
SOCtOMGtQUE.
gressions;ils étaientce fondsmême.C'està la démonstration
decettethèseque leprésentouvrageest en quelquesortedes-
tiné.Nonpasqu'il y ait ici unediscussionen forme cesont
des procédésInconnusaux méthodesanglaises.Maisdeux
ordresde faits militent par leur simplepréseuce.D'abord,
c'estl'extrêmediversité,lecaractérelocal desusagesreligieux
ils changentde villageà village,de districtà district, comme
si la vaguehindouisteavaitsimplementrecouvertlesreligions
tribales.Ensuite,c'est le caractèreprimititde tousces usages
etde toutesces croyances leséquivalentsqu'on en peutindi-
quer dansle folklore,dansles civilisationsélémentaires,dans
lessociétésles plus inférieures,sont innombrableset les reli-
gionspopulaireshindouesapparaissentsur lemêmeplan. –
D'ailleurs,la comparaisonincessantedes tribus dites ana-
ryennes, dravidieunesou autres, avec les villageset villes
dits aryens,éclaireet montre la parenté intimede ces cou-
tumes,soit qu'elleait pour causela similitudespontanéedes j
deuxcivilisations,soitque, commeon peut l'apercevoirchez
certainestribus qui se convertissentà l'hindouisme,il y ait
eu assimilationd'une race et d'une sociétépar une autre.
Dansles deux cas, le fondsresteaussiprimitif.
Ce qui caractérisenon seulementles grandesmythologies,
mais mêmeles religionspopulairesde la civilisationindo-
européenne,c'est laspect naturaliste. Tout le monde sera
frappédes analogiesprofondesqui existententre le folklore
européenet ce qu'onpourrait peut-êtreappeler le folklore
hindou il y a correspondancederites, correspondancede
croyances,commeil y a eu symétriede langues. Tout un t
vaste ensemblede superstitions européennesrépond aux
notionsdesitindousconcernantla natureetlesespritset forme
une sorte d'aire religieuse, géographiquementdéterminée.
Sans doute, certainesd'entre elles dériventdes caractères
généraux du type religieux auquel elles appartiennenti
à savoir,d'une théorie animistedu mondeet d'unesource
fétichistedes cultes.Maisl'identitépresquecomplètedes rites
agraires,la régressionréelledu totémisme,la naturedu poly-
théisme,singularisentles peuplesindo-européensparmi les )
autres si cette conclusionn'est pas dans le livre de M. C.,
elle endérive. D'ailleurs,si M.C.tientà prouverque le fonds
primitifest le mêmedans toute l'humanité,il ne laissepas
d'ajouterque certainesformesfurent particulièresà certains
groupesde peuples.
ANALYSES.
CULTES
POPULAIRBS 3i3
M.C.fait une excellentedistinctionentreles grandsdieux
personnelset omniprésentsde l'hindouisme,et tes <divinités
(~oM, f/eca<()), petits dieux de la nature et des champs,
locaux, spéciaux,occasionnels.Parmi ceux-ci,les uns sont
les esprits desêtrescélestes.du soleil (l'ancien~n/«, devenu
de la lune,desétoiles,des éclipses.Puis,particulière.
.<!«;'<),
ment répanduest le culte de la Terre mère.Celle.ci,dont le
caractèresacré est bien évident (depuisle Véda,ajouterons-
nous),estla sourcedela viedesplantes;onluttaitdesonrandes
des prémices,et aussides propitiations,au premiercoup de
charrue ou de pioche(p. M, p. X~,cf. Il, p. 387,i8a suiv.).
Malsla terre n'a pasété seule l'objet de cultesagraires. Le
développementde ceux-ciest, aux Indes,colossal.M.C.n'en
donnequ'un courtrésumé, et, par exemple,lestrèscurieuses
coutumesdu Bihar,pour la culture dela cannea sucre, n'y
sont pasmentionnées maiscerésuméest infinimentprécieux
par la variété et la netteté des faits qu'il nous fournit.Tous
les actes qui ont trait à la viedes plantessemblentavoirau
moinsun commencementreligieux.Lessemailleset les plan-
tations, lit cueillettedes fruits, la récolteet la manièredont
est réservéeou partagéela dernièregerbe(H,80i),le vannage
du grain, la façondont on le mesureont un caractèrereti-
gieuxau dernier chef;il s'agit de réserver,en quelquesorte,
ia forcespirituelleque l'on supposerésiderdansla terre, les
plantes,les grains.Cettenotionde l'espritde la végétationest
aussi l'originedescastrès nombreuxdu cultedesarbres, des
bosquetssacrés,et eu particulierde la coutumeremarquable
du mariageauxarbros.Celui-ciprécèdetemariagedes fiancés
entre eux, commesi on voulait,d'une part, associerla ferti-
lité des plantesà celledumariage,ce qui est, je crois, l'inter-
prétationvraie; et d'autre part, déchargersur ies arbresles
péchéspossibleset les maladiesdu coupte,ce qui est l'opi-
nion de AI.C., maisne paraît être qu'un faitsecondaire.A ces
rites purement agraires viennent naturellementse joindre
des .pratiquesdérivantde cultessolaires,et, en particulier,
cette fête généraleaux Indes, paralléleà la Saint-Jeanen
Europe(11,3<S),desfeuxde la Holl.Ony voitdesbataillesde
femmes, des rondesautour du feu, des sauts par-dessusce
dernier,desluttesetdescoursesentreleshommeson y prend
des cendres fertilisantes,toutessortes d'usages,qui ont évi'
demmentpour sens d'assurer du soleilen suffisanceau cou-
rant de l'année,et peut-être,en vertude la coincidenceavec
M4 L'AKttËE MCtOMGtOttE. MM

le&<?MMt (nouvelan),de bruteruneannéeet d'en allumerune


nouvelle.D'autresrites procurentde la pluie, d'autresla fer-
tiiité, cesont plusparticulièrementces usagessi intéressants
où des femmesnues accomplissentdes actes symboliques
précis(i, 69, Les montagnes.l'Ilimalayaoù habitentles
grandsdieux,sont le séjour de divinités. D'autressont mai-
tressesde l'air, du temps, commeBhima,Bhimsen(anciens
hérosdu Maitabharata), des sources,des étangs.Lesrivières,
le Gangeenparticulier,sontdivines;lesconfluents,lesmarais,
les puits,sonthabitéspar desesprits plus oumoinspuissants,
et sont adorésparceque ta semblese manifesterplusqu'ail-
leursla viede la nature. Lecaractèrenaturalistedes religions
populaireshindouesest ainsi extrêmementmarqué.
D'autresdieuxremplissentdiversesfonctionsspéciales les
uns sont les protecteursdu village, ainsi Hauumau,le dieu
singe; les autressont les espritsqui présidentau mariage,à
la bonnesauté.Maisle culte, tout local quand ii neconsiste
pasenritesagraires,est aussi élémentaireque celuidestribus
sauvagesenvironnantes.Commeelles, les villageoisvont
enduiredu sang desvictimeslit pierredu sacrifice(t, p. 98), '),
oului offrir,aprèsquelquesactes religieux,débrisde la piété
brahmanique,un petit nombrede grainsde riz. D'autresdivi-
nitéssont lesespritsde la maladie,de la petite vérole,etc. A
celles-làon doits'adressersoit par la magie,soitpardehâtives
propitiations.H va de soi que les cultesde ce genreportent
aveceux leur caractèred'universellesimplicité.Il s'agit en
effet d'apaiserou d'expulser le dieu dangereux, ce qui est
équivalent.L'acte,alors,consistenécessairement dans l'obser-
vationdecertainesinterdictions,du silence(II,3t2),dansdes
dansesd'exorcisme,deflagellationspour fairesortir du corps
le dieu méchant,à sonner des cloches(ti, 167) ou bien on
transportele charmeet la souillure sur un boucexpiatoire,
on fait mangerlespéchéspar un brahmane,on va pendredes
habits du maiadeà un arbre sacré. On emploieaussi des
moyensoraux d'exorcisme(t, 146). Les maladies-dieux,en
effet,ont des noms, et si le sorcier, Brahmaneou sauvage,
les connatt,il fauts'enrendre maître.Acet usageon emploie
souventdesma~nMvédiquesincompris.
Cescultesconfinentévidemmentà la magieet à la démo.
notatrie.En effet,te mondetout entierest peupléd'esprits,la
plupartmauvais,que l'Hindoule moinspieuxdoit écarter.Le
sang,la couleurrouge,les mettenten fuite(H,70) le premier
ANALYSES. CULTESPOPUtAtRËS Si S

a doncune vertu curative.Le {eu,le soleil,l'or, la coulour


jaunesontaussides préservatifscontreles espritset !e mau-
vaisœit (H,p. 16).Lesobjetssacres,bénits,les amulettes,les
reliquesde saints (survivancedu bouddhisme) sont employés
dansle mêmebut. Enfin,se rattacherà quelquesanctuaireen
y consacrantune partiedesoi,cheveux,ongles,etc., estencore
un moyende s'assurerla santé.LesHindous, commela popu-
lation dite dravidienne, croientaux bonset aux mauvais
présages,aux porte-bonheur(maind'un mort, p. 3, Cf.I,
!i!44).La sorcellerieest au fondla mêmechezles tribusabo.
rigènesque chezles Hindous mais,chezces derniers,on se
trouvesouventen présenced'anciennespratiquesbrahma-
niques, auxquelles les brahmanes n'ont pas d'ailleurs
renoncé.La magiese pratique< sansl'aidedes dieux, l'acte
agitpar lui-même.Même,chezcertainsbrahmanesde Bom.
bay, les fonctionsde prêtre, de devin, de magicien,ne sont
guèreplus incompatiblesentreellesque chezles Baigasdes
Gonds.Les procédésd'initiationdu sorcier(qui consistentà
le mettre en communicationavec des morts),les modes
d'enchantementpar les cheveux,les tracesde pas,l'envoû-
tement par des prièresprononcéesen sensinverse(tt, 270),
sont employéspartout de la mêmefaçonqu'aux Indes.
MaisM.C.croit possiblederetrouversouscesinstitutions
une sorte de culteencoreplusprimitif letotémisme.Ici, il
eût peutêtre été do rigueur d'observerla distinction, dans
l'exposémême, entre les faits empruntésaux nationsnon
hindouisées,et ceuxquiproviennentdespopulatioushindoui-
sées. M.C.ne t'a pas fait, et celaeu)6vobiende la valeurà sa
démonstration.Ji semblepourtanten résulterque, pour les
deux races,l'exogamieet le totémismesontétroitomentliésà
l'organisationdu clan; que lesclanstotémiquesnonhindous
sont nombreux(H,i46); qu'un)certainnombrede clanshin-
dousportent des nomsd'animaux,les respectent,n'en man-
gentpas,neles sacrifientquesolennellement, les imitent dans
uncertainnombredecérémonies. L'hindouisme, suivantM.C.,
n'aurait fait querecouvrircescultesélémentaires,faisantpar
exemplepasserle porc-totempourun avatardeVisnu. Mais
un très grand nombredecesfaitspourraientaussis'expliquer
par un culte d'animaux qui ne serait pas nécessairement
totémique.Têtte cultedu tigre, cet animalsi répandudans
toutel'Inde, donton nepeutprononcerle nomet danslequel
on voit souventun hommemétamorphosé, un sorcier (21t,
2t0 L'ANNE)! SOCMMGtQUB. 1897

MO,). Tel aussile cultedu cheval, représentantle principe


mate,ta pureté, la ïertitité (p. 301).Daustous ces cas, i! est
d'autantmoins nécessairede faire intervenirle totémisme
que l'ensembledes tmditions, hindouesou non,concernant
les bêtes, oiseaux,poissons,insectes,est presque indéfini.
D'autre part, le stade fétichisteest toujours celui où s'est
arrêtéela plus grandepartie de la populationqui révôrocer-
taines pierres,certains rochers,certaines places,des autels
où se font des cures merveilleuses,des marques de pieds
divins,et le fétichismepourrait expliquerbiendes faitsratta-
chés au totémisme.Au contraire, dans le casdu culte de la
vache,on se trouveen présence, non pas d'un culte récent,
commecroit M. C., mais d'un très ancien culte totémique,
qui a persistéétonnamment,t'ne étude suffisantedes textes
védiquesles plusanciensprouveraitque ta vachefutle totem
des premiersc!anshindouset je n'en voudrais pourpreuve
que le nom f.o~-a,vacherie. du clan brahmanique.
Dansle cultedes morts,M.C.distinguebienles deux caté-
gories cultes funéraires,cuites ancestraux. Les rites funé-
raires,dont l'extensionest généraledansle norddo i'lude,ont
pourbut l'expulsionoulu fixationde l'esprit du défunt,dont
il s'agit d'empêcher le retour (H. SS, 68Aussi, enterre-tonle
cadavreavecses objets familiers; on brise lu vaisselle,etc.
Maisles cultesancestrauxsont spécialementaryens.La plu-
part desespritspassentpour méchants tellessont les âmes
des petits enfants,de ceux qui ont été enterréssansles rites
(~«), de ceux qui sont mortsde mort violente,des pendus
sscr.BhCta).lis hantentles habitations,les cimetières,
(B/tt!f<t,
certainesplacesdangereuseset causent des maladies(cf. L
380j,s'incarnentdans les animaux de nuit, deviennentles
démonsles plus malins qu'ait imaginésl'Hindou.D'autres
deviennent,au contraire,des divinités tutélaires ainsi tous
les pèresdefamilleenterrésrituellement(lesPi/'x,sscr.J"<
r<M), qu'onnourrit régulièrementpar les offrandesde gâteaux
et de grains,et lors desrepas funérairesbimensuelsou anni-
versaires ceux-làsontdes protecteursde la famille.A leur
cultese rattacheprobablement, te culte des serpentsdomes-
tiques(M,p.133),devenu, par extension,un phénomènereli-
gieuxextrêmementimportant. D'autresâmessonthono-
réespartoutle villageet mêmepar denombreux pèterius. Les
tombesde saints(souvent.musulmans, car les Ilindousmaho-
métanscontinuentteursaneiennespratiques)sontl'objetd'une
– CUME8
ANALYSES. rOPCtAMES St7
grandevénération.Très souvent, le caractèrehistoriquedu
personnagedivinisé n'est pas douteux(t, p. <96).La déifica-
tion dépend donc, suit du genre de vie du saint (s'il fut un
grand ascète,un voleur renommé,un terrible magicien,qui
continueses exploits) soit de la façondont ii est mort(c'eft
le casdes satt, femmesqui se sontfaitbruier avecle corpsde
leurs maris) soit encore,ajouterai-je,du genre de conduite
qu'un défunt adopte vis-a-visdes vivants. Si, sur sa tombe,
des miraclesse produisent, s'il amigele villagede maladies
épidémiques,ilest bon, ou nécessaire,de lui rendreun culte
qui l'apaiseou l'utilise, et c'est ce culte qui en fait un dieu.
Car non seulement il doit être saint après et pendantsa vie,
mais ii a dut'être aussi de tout temps,dans toutle cercledo
ses naissancesantérieures.
On voit quelle est l'importancedes sujets traités. J'ai, à
dessein,omis les théoriesde M. C.qui sontd'ailleurscelles
des savantsde l'École anglaise; les similitudesqu'il signale,
les explicationsqu'il fournit sont extraites des ouvragesde
MM.Letand,Frazer, S. Hariiand.Il faut pourtantmentionner
la notionque M.C.s'est faitedu fétichismeen générât,hindou
en particulier. Il fait consistercette formede religiondans
l'inventiond'autant de dieux qu'il y a de classesde choses
intéressantl'action c'estce qui ressortavecévidencedescha-
pitres qui ont trait aux divinités », Ii est à regretter que
M.C. pensant de cette façonanglaisequi nese peut détacher
des faits bruts, n'ait pas mieuxréussià en dégagerle carac-
tère. Je crois que s'il eût fait porter ses observationssur les
dieuxdes castes inférieureset des corporations,il eut trouvé
dece côtédesfaits importants.Maisl'attentiondesfolkloristes
est plutôt dirigée vers les campagnesque vers les villes.
Mêmeence qui concerneles cuiteslocaux,un certainnombre
de lacunes se laisserait déceler.L'étudedes pèlerinages,en
particulier des <n'</«M, si nombreuxau Kashmir, semblait
assezindiquée.
Eu secondHeu,si M.C.a toute la compétencevouluepour
traiter des religionspopulaires,sa compétencespécialeen ce
qui concernel'Inde est d'autant moinsgrandequesesétudes
des anciennesreligionshindouesont été moinsdéveloppées.
Ainsi l'usage de faire des libations avec des jarres percées
par le bas, et tout en tournant autour du bâcher funéraire,
date certainementde la plus haute antiquité. De même, les
textes qui concernentles vertus magiquesdes plantes, la
2~ L'AHNÉE )<97
SOCtOtOGtQUË.
connexiondesanciensrites agraireset des cultessolairesou
lunaires, nesont pas moinsintéressantspour ta sciencecom-
parée que lessurvivancesactuellesde cesmêmespratiques.
Leur sens est beaucoupplus clair et ce sont eux qui consti-
tuent le fait origineldont les usagesobservésaujourd'huine
sont plus que la trace; la forcede la démonstrationde M.C.
edt été bien plusgrandesi certainsrites tout à (ait ancienset
encorevivacesavaientété claMéscommeprimitifs.
Enfinl'indicationtropconstantedes similitudesproduit,là
commeailleurs,cette impressionque les faits étudiesn'ont
rien de spécifique.Ontrouveraitdes rubriquessouslesquelles
M.C. ne rangepresqueaucunfait hindou(H,66) ainsiquand
it s'agit du sacrificede la chevelureau mort. C'est la même
méthodequi a amenéM.C. &fairecette grave confusionque
nous lui avonsdéjàreprochéeplusieurs fois,entre ce qui est
hindouet ce qui est sauvagedans i'tnde. Les différentsfaits
relatésnesontpas suuisammentà leur rang, lesuns de cou-
tumes survivantes,les autres de coutumesen voiede régres-
sion, les autresdo coutumesen voie de formation,les autres
de faits absolumentprimitifs.Maisn'oublionspas que nous
sommesen présenced'un beautravail inaugural.

M"J.-H. PHILPOT. TheSacred Tree ortheTree ta Re-


ligion and Myth (t'«r<)/'es<w< oit <'af&f<*
</<!<)<!
lec«~c<'t
<faMle Mt~/tc).
Lond.,Macmillan,1897,xvbd79p., in-8°.
L'auteur, sans ambitionscientifique,ne se vantant d'au-
cune idée originale,ne cherche qu'à collectionnerles faits,
sans même prétendreêtre complet. Ce livre, si modeste,a
pourtant de réelsmérites compilationclaire,utilisationjudi-
cieusedes documentsrassembléspar Mannhardt,Frazer,Fol-
kard, Gobletd'Alviella,ilest déjàutile par cela,et la prudence
des conclusionsfait qu'onpeut relativements'y fier.Malheu-
reusement le détail des preuves est moins solide que les
résultatset nousallonsêtre obligéd'en faire de suite la cri-
tique.
M" P., par une revisionaussi complètequ'elle a pu la
faire, a cherchéà prouverl'universalitédu culte des arbres.
Commeles recherchesultérieuresne pourront certainement
pas manquer de confirmercette hypothèse,il se trouve que
M' P. a eu unejuste vuedes choses.Maisune grave lacune
règnedans tout son livre: c'est l'absenced'étudessuffisantes
– CULTES
ANAMSRS. POt'ULAMES ~M
des religionsles moinsdéveloppées.Celtesci eussentpourtant
fourni à M""P. h plus ample moissonde faits.D'autre part,
l'incompétencephilologique de la plupart des folkloristes
leur fait admettre des hypothèsescommedes faits démon-
trés; ainsila nature de t'(Mc~'« bibliqueest controversée,et
il n'estnullementcertain qu'elle tût un casdecultesylvestre;
l'arbre de la <'o~! (p. 41)n'est honoréque parceque l'illu-
mination (&o~t) du Buddha se produisit à sonombre. Ces
faits d'ailleurs se laissent très bien remplacer; le culte des
arbres (M<n<Mp<tt<) est encore vivace aux !))des commeau
temps du Rigveda,et les bosquetsd'Astartéfurentfréquentés
par Israël tout entier. Le nombre d'exemplesqu'on peut y
ajouter est Indéfini.
La division que M""P. proposesemble juste et raison-
nable. Elle distingue le dieu de l'arbre, et les esprits des.
arbreset des bois (p. 3~). Peut-être edt-elle pu, on mettant
simplementmteux en lumière une des idéesde Mannbardt
qu'elle connaîtbien (p.00), découvrirune troisièmecatégorie
de faitsdu mêmeordre. L'esprit dela végétationet les cultes
agraires formenten effet une classe spéciale,les dieux sy!-
vains et les cultes sylvestresen forment une autre, et il y a
les démonsdes arbres auxquelssontoffertesdes propitiations
occasionnelleset qui constituentune espècedéterminée.C'est
de ce point de vue queje vais analyserle livredeM" P.
AvecMannhardt et M. Frazer, M""P. attribue en effet
aux croyancesqui concernentla viede la natureet de l'uni-
vers, son renouveau, l'entretien de la végétationqui som-
meille, les fêtes de Maiou do Saint-Jean,d'une part (vu)) de
l'autre, les fêtes de Maiou de Saint-Sylvestre()x).Au prin-
temps,pourque la moissonsoit bonne,qu'ily ait suffisamment
de soleil et de pluie, on cherchait au bois l'esprit de la
végétationsousformed'un arbre de Mai; on le menaitau vil-
lage, devantchaque maison.A l'hiver,c'était une plante tou-
jours verte, houx. gui, cyprès ou sapin (t'arbrede Noetest
une institution récente)qui étaitcenséecontenirles forcesde
la nature et que l'on introduisaitchezsoi.Lecaractèrespéci-
fique de cette croyanceà une vie universelle,de ces cultes
qui l'assurent et l'accompagnent,participantau rythme des
saisons,les empêched'êtreconfondusaveclescultessylvestres
proprementdits. C'estle dieu de la végétationqui est adoré,
et nonpas le dieu de tel ou tel arbre en particulier,ou de tel
coin du bois.On peut d'ailleurs le représentersoit par une
2~0 t/ANNÉE SOCMt.OGtQUS.t8M

gerbe,soit par un bâtonenrubanné,soitpar un jeune homme


déguiséde feuillage.!)e même,je rattacheras volontiersà ce
cultede la naturele mythedo l'arbre universel,supportant
le mondeet litsourcede'ta vie(v<),et c'est iciquepourraientse
placer,croyons-nous, les diiïéreuteslégendesdesPnradis(vn),
jardins d'arbres merveilleuxou de l'arbre merveilleux.
Toutautressontlesdieuxsylvestreset leurculte.Ledieu(n)
est ici, commeon le voitsur certainespeintureségyptiennes
ou grecques,indépendantesd'ailleurs,l'esprit de l'arbre. Il
y habitecommel'Amehabite le corps. Ouhabillel'arbre des
vêtementsdu dieu, ou y suspenddes M'.ro<o,parce que le
dieuest là. C'està cet arbrequ'on arrachela branche sacrée
que l'on promèneà la fête du dieu. L'arbre, étant le siège
d'un espritsouventpuissant,devientfacilementun oracle(v),
soit qu'il rendeses réponsespar tui-memeou par l'intermé-
diairedes prêtres,soit qu'il fournissela baguettedivinatrice
(p. iOH).
L'arbrepouvaitd'autant mieuxservirdo placeà un esprit
rendantdes oracles,qu'ilpouvaitêtreassociélui-même,d'une
part à la vie humaine,de l'autre à un esprit ou démon,de
rangintermédiaire,et plutôt malfaisant(tvetp. tût et suiv.).
Les arbres sont en effet,en vertudes idéessur < t'àmeex-
terne liés au sort de tel ou telindividu.L'âmede celui-ci,
mobile,dont une partierésidedans l'arbre,estl'esprit même
de ce dernier. Si elle peut s'y réfugier,en casde danger, la
vie est sauve: de ta tant de conteset de mythesoù le héros
se transformeen un chêneou uneplante,où la destinéed'une
familledépendde celledeson arbre. Maisd'autres esprits
que des esprits humains(génies,feux follets,etc.) peuvent
hanter les arbres, les animer, protégerleur existence,s'irri-
ter si ontescoupeetlesfait saigner(m); its exigentdes propi-
tiationspour qu'on puisse porter la hacheà un ehcaevéné-
rable ouàun coinsacrédu bois. Sur ce pointM""P. aurait
pu trouverde curieusesanalogiesentre lit superstitiondes
bûcheronsnègreset celledes paysansgermains.
Plus profondémentorganisés,les faits dont M' P. dis-
poselui eussent peut-êtrepermis de répondreà la question
qu'elle pose franchement,maisdontelle refusedo tenter la
solution(p. 23) quelleestla théoriela mieuxprouvée,celle
de M.Spencer,suivantlequeltous lescultes.dela végétation
proviennentet des vertus médico-religieuses des plantes et
des histoires de revenants,ou celle de R. Smith, suivant
ANALYSES, EUMES t'OPUtAtMES 2M

lequel ce seraientdes forces spirituellesde la nature, dont


l'imageet le rôleseseraient peu &peu dégagésde leur gangue
matérielle. qui auraient été plus ou moinspersonnifiées,do
façon&devenir,les unes les espritsfavorabtesdeschamps.les
autres los esprits maiveiitantsdosforêts?Lesfaitsparaissent
difticiiementconciliables avec l'un commeavecl'autre de
ces systèmesexclusifs,et nousdoutonsqu'une combinaison
éclectiquerésolvela difficulté.Lavérité,c'estque partout on
constatela coexistencede ces trois espècesde cultessylves-
tres de l'esprit de la végétation,des dieux sylvains, des
esprits folletsdes bois. Ils correspondentà trois formesd'une
mêmeidée l'idée de la vie spirituelledes planteset de ses
liensavecla viede la tribu et celledesindividus.

NOTICES

–MOXOUMAPMt)!0)VBKSt!S–

H!CHAMDAKDHEË. – BrauMchwet~r VolkBkande (Bruns.


wick, Vieweg, i896, in-8", vn-S85 p.).
Documents de première main, mis en œuvre par un mattre. Sans
compter tous les renseignements que M. A. donne sur la vie inté-
rieure, économique, mot'ate, du paysan du duc.he de Brunswictt,
mentionnons un catalogue des inscriptions trouvées sur les mai-
sons (p. <t8-9); des informations sur uoe ccrtaincfjuantiM d'usages
et traditions concernant la naissance, le baptême, le mariage et la
mort; une étude reettement importante sur les différentes fêtes popu-
laires, sur certaines coutumes agraires,ta /)/u<'&)-aM<
(p. M8),la chasse
aux drapeaux (853), celles qui concernent ta moisson, la dernière
gerbe (26<-8<),tes fêtes d'hiver. Les pratiques semblent avoir mieux
persisté que les croyances, dont peu sont réellement curieuses.

A. GOETZ. VoUMthamUchea von Siegeiau (Alemannia, i897.


XXV,t).
Excellente monographie.

WtUtem SCHWARTZ. – VoUMthumMchM aus Lauterberg am


Karts (~«-/<. y. /?</<KO.,t896,tY, tBO-tea).Contient des rapprcctte-
ments très justes, donne des détails intéressants sur les foux de
la Saint-Jean, de la Saint-Sylvestre.

V. SCHULEXBEM.- BeitmBge zur Volkekande (/& tY).


Etudes de folklore comparé.
222 L'ANNÉESOCMMCtQmS. t<M

F.t:cfyD. BERCEE.– Ourrent Superatitiona. CbMec~~'om <Ae


0)'«<Tradition~My<M/<<pMA<~/oM, withNotesand an Jutro-
duction by W. WeHs~!ewet,Host.a. X.-York.(Amer. Folklore
~cc~). Moughton, XuH-Hart'assowiti!,1890,gr. !u-8",i6i p.
M.~). a doam!une préfaceà ce livre, où il le r~ume et l'apprécie
au point d<!vuede l'écoleaut))t'opotogittue.La pubHcationest tr~
soignée lesnotusdes informantstnanqucnt. Lci!usagesqui pr<ii-
denta la nai!MMce,auxexurcismes,aux tlançailles,sont intéressants.
Maisle folklore aitiéricaiiiest de date récente, de provenances
dherses; sonétudedoitêtre entourée des plusgrandesprécautions.

E. tUHSS. On&noieataupeMtitions. Trf<M«e~MM o/Af ~men.


<-«;< Hoston,Grimmeand t. t899, XXYt.
~/()7o/o~t'M<tMocM/t'oM.
Etudf!)Ur[Mméthodede recherches.

P.-G.SCOTT.–Thodcvilamdhisïmps.anetymologioalinquiai-
tion <

K. tUHHSS.– Superstitions and popular beliefa in CtreekTra-


gedy(/A.).
BËHAXOEH FËRAL'D.–Superstittonaetam'vivanoea.Y'. Leraux,
1890,in-8'
Sanscritique,quetquMrenseignementsutiles.

\OSSH)LO. MeoMemburgiacheVolkaOberlieferung. Ratset.


Weimar,Hinsturff,in-8",i896.
Tris bon )C. H.du LiterariscttesCentratbtatt).

M. t'LALT. Dentaohesliand und Volkin Volksmunde.tn.8~,


Brestau,t897, Uirt.

Rrv. W. WESTO~– Oustomsand Superstitions imthé High-


tands of Central Japan~<. </<<- An</n'./M<.o/on~ XXVt,t).
A n'tnarquet'surtout lescérémoniesde magiesympathiquepour
produirelitpluie(p30).

W..A.-P.MARTtX. A oycle of Oathay. Otiphant,Anderson,


Ferrier, Lond.,t897,in-8".
Étudessurles populationsdu nordet du sud de)« Chine.

CMB.:LESt~EMACKAY. From far Formosa. tta ïatand, ita


People and Missions,etc. (7&.).
L'auteura fte tongtempsmissionnairedanste pays.
– CULTES
ASAMSES. MPULAMBS 83S
S.-C.WtLSOX.– Persian Lita and Oustoms (2°édit., <&.).

P. KHMAXX. VolksthamUche VorsteUungen tu Japan (in


M<«A<<«M~M <~<')'
/)e«twA''MCMc~tcAo/ï -Va/Mt'MM<<
/*<!<* t'<)<A<~
<-«M</e ~t yoAt'e,i8t)' V,Vt, Et!"tivr.).
~«t<'<'H<
Contientdes rcnsfitjut'<ue))tsutilessur tes croyance!!concernunt
les animaux.

– /))<«-./t<'<t.f. 7:'<Aw.
J.-U. E. SCHMHt.TX. !X,p. 213.Notesur

f! VA?!HE~EPP. – Bijdrage tôt de Kennie van Kangean


ArchipcL–/A'!A<'M<'«//M tui </eA'M)Kt<(M)t~fM
(i))/<)'y(/)'o~< Taal,
/«M<<Mtt'oMo)<!«'x/f
MMA'<'<~r<<(M</«'/t./n~<e).Y),Il, p. 89 suh'
«t96).

SCHLEGEL. – La fôte de fouler le feu (Inl. ~)'c/<.y. ~<An.,


t8M, V, p. tfS-S).
tVtedu fiotsticcd'<?t~,<'nChineet u Jova.

J. SCHKEUËL.
– Phallus OultasinJapan. Yokohama,1896.

C.HAHX.–Démêler undBaubo,i))-8",),ubeck,t896,cheï fauteur

A. KOHTE. – Zu Attischen Dionysos Feston (MM'MM~M


X.F., 52. 2).
J/MMMM),

t). v. !'HOTT. Buphonien (/&.).

M. BLOOMFtEL!). – On the Frog Hymn of the Rigveda (Joter-


nal «/'</«/tMtf)'t'M<M
ot')'MMa< C.M.des séance! t898,XVII,
S<'c«'<y).
p. n3. Décritun charme pour attirer la pluie.

M.VORDEMAXX. – Animistische Ansohauungen der Javaner


befh'effa einiger Pflanzen ~c&<M, n'" <et 2~.

HBattMAx~GOSZLEH. – Altheilige SteineinderProvinz Sachaen


(in A~ex/aAM&MMer, Hergg. v. d. itistor. Kommiss.d. Prov.
Sacttsen).Ma)te,Otto Hende),1896.
Étudefort compX'te.

H. LËKOHCY.–OoUieraceltiques. Origine,histoireet supersti-


in-8".
tions. Suint-Mcuc, <8<M,

t). LtËBLEtX.-Le culte des animaux en Egypteetle fétichisme.


~'o~M rtWW/)., <897.
224 L'ANNÉESOCIOLOGIQUE.
~M

C. TEMPLE.– A glossary ofïndian terms relating to reUgion,


oustoms, goverament, land. Lond.,i897, t.uMc.

H.-C.BOt.TOX.– The langage ueed in talking to domesttc


animais (~Mfft'MM
/h~/t~M<o~«<).
W<tsh.,tSM.

Il. CHAXT.– La superstition dans le HigMand écossais


Louvain,avril <8a?),
(~/tM<!«H,
Kous tte pouvonsque !!ign:))<if
les numht'euxtt'nsogncmcntsque
l'un trouvprasm')cspratiquesdont t'~tudcn'X'reduFoftdoredanstM
périodiquessuivants VoMma~ of ~f /o/A/wp ~oct'~ (Lond.).–
!<cvu''des traditionspopulaires(Paris).– M<!)usitte(Paris) où nous
remarquons
M. TL'COMAX~. – La Fascination. Continuationd'une enquête
déjà longue,maisd'une éruditionénorme (in ~/e<tMt'<te).

Vt.–).)!)UTCK).

~'arM.)hm!)
Moxs.FRANCESCO
MAGAN!.– I.'a,attc& Liturgla Romana
/.<<x~«'fomat'He).VoL I, Mitano. Kpo~ra/M
(/<!Mn'~f«'
poH~/MM,J. Giuseppe,t897,in-8', x-2H8p.

Quoiquefaite dans un esprit exclusivementcatholique,ta


contributionque Aï.M.apporteà l'étuded'une questionfort
controverséene laisse pas d'être importante.Contrela doc*
trine classiquede la scienceprotestanteet mêmedes histo-
riens catholiques,M. M. vient soutenir l'unité primitive,
fondamentalede toutes les liturgieschrétiennesanciennes
et, cela va sans dire, l'identité de toutes avec la liturgie
romaine,qui leur servit à toutes d'exempleet d'archétype.
La diversitédu ritueldesdifférentesfractionsde la chrétienté
pendant les premiers siècles serait, suivant M. M. plus
apparenteque profonde.Et si uneétude comparéedes détails
pousse à admettreles divergences,un rapprochementdes
momentsimportantsdes servicesliturgiquesdes différentes
Égtises,montreque la structuredel'officechrétienfut partout
la même,au début. Et sur ce point,sinonsur celuidu primat
romain, Il se pourraitque l'histoire désintéresséeet mieux
informéedonnât, un jour, raisonà M.M.
Cepremiervolumefaitpartied'unesérieoù serontétudiées,
– tB Bn'UEt.
ANAMStiS. 2M
outre l'histoire de f officechrétien eu générât, celle des difte-
rentes parties de l'office et celle des accessoires de l'office.
Mais on est, dès maintenant, suflisammentectaire sur les ten-
dances, les principes, ta méthode de l'auteur. Je préfère ne
pas exposer certains raisonnements par trop théologiques,
où l'origine romaine de ta liturgie est déduite < en droit
pour constater le caractère historique de l'étude de M.-M.
la façon très consciencieuse (tout sont étudiés et critiqués les
textes, l'élégante et vaste érudition de fauteur. Son livre sera
très précieux pour les débutants, au moins. Do plus, comme
it s'agit d'un des phénomènes do sociologie religieuse les
plus importants, de ta fixation du culte chrétien, il importe
que le sociologue soit tenu uu courant de l'état actuel de la
question.
L'ensemble des travaux qui ont été faits sur ce point se
réduit, en fait, ù une critique des textes et à des essais de
classifications de documents rituels ou historiques, de valeur,
do provenance, de dates différentes. Nulle part tes institutions
n'ont été étudiées pour elles-mêmes. On dirait que chez les
plus illustres des ritualistes contemporains, les de Mossi,les
Kraus, les Duchesne, l'histoire des sources prime celle des
faits, alors qu'elle ne devrait être qu'un moyen. Le livre de
M. M. n'échappe pas à la tradition classique. Des travaux
d'historien, de sociologue, sont d'une nécessité urgente dans
ces sortes de matière. Mais suivons, en mettant à leur rang
les questions philologiques, l'histoire que nous donne M. M.
de l'antique liturgie chrétienne.
Évequo et ne doutant pas de fauthenticite absolue des
Évangiles, M. M. n'a pas de peine à démontrer que, dès l'ori-
gine, il y eut un ordre liturgique, établi par le Christ, admis
et prescrit par les apôtres (p. H, p. K) que ce système fut
précisément transporte par Pierre a Antioche d'abord, puis
à Rome (p. 63) que Paul tui-meme eut à proclamerla néces-
sité d'observer les règles divines. La messe, des l'origine, eut
une sorte d'unité substantieUe (p. iS). Elle fut le noyau
même du culte chrétien. Sa structure (préparation à la messe
consécration, communion) dut, même avant la constitution
d'un rituel detaitté, former comme un bloc sur lequel les
actes liturgiques vinrent se grefïer mais ils ne firent que la
suivre et l'analyser sans l'altérer.
Le sacrifice de l'Eucharistie est donc le principe du rituel
des premiers âges. Quelle fut son origine? v Provenant du
K.))t:MM<!tM.–Ann'?c<ut-it)).iM7. H
M6 L'ANNÉE SOCMMOQUK. <t)M

milieu immédiat où vécut le Christ, le modèle du service


divin fut certainement juif. La prière, hébraïque pendant
quelque temps !p. 40), grecque ensuite, conserva toujours tu
marque de ses auteurs. Les actes symboliques, eux-mêmes,
furent emprunta a deux laits du rituel judaïque aux rites
du repas domestique, aux rites delit Paque. t)aus les premiers,
avant chaque repas, une sauctiucatiou du pain et du vin avait
lieu :qiddûs) ce fut l'origine de la consécration, au moment
de t'ctévation. Et, d'autre part, la cérémonie do tu t'aque. de
la communion par le repas en commun servit de modèle a
la communion apostotique. Ce fut par une fusion du sacrifice
de la Paque juive et de tu bénédiction synagoguate de la table
journalière, que se forma ce foyer du culte chrétien, lit Cent',
telle que la reproduisent les plus anciens documents, et telle
que le Christ l'institua probablement lui-même.
Les petits groupes des premiers chrétiens, s'ils adoptèrent
cet ordre, n'y restèrent pas toujours fidt'tes. Des distinctions
profondes se firent entre les différents moments du service.
qui persistent aujourd'hui. Des les premiers siècles, la prière
et l'action de grâce, t'une avant, l'autre après le saint sacrifice,
furent distinguées (p. CH).L'ossature était donc nettement
accentuée. Des variations se produisirent, se fixèrent. Les
différentes églises répartirent différemment les divers éléments
du rite. Maisles Hottementsqui subsistent encore n'empêchent
pas que le dessein central ne soit reste constant (t!, 3-f3).
La différence des formulaires, qui variaient a l'infini, n'est
qu'une difïérence de détail, suggérée par les inspirations
personnelles. L'unité do lu liturgie chrétienne, la relative
pureté de la liturgie romaine, sont partout évidentes et fon-
damentales. Même la diversité tant vantée du rituel gulliean
ou ambroisien et du rituel romain se réduit en somme u
des différences d'applications spéciales d'un même principe
(App. t).
Mais si le plan liturgique futle m&medans toute tachréticnté
~p. )77), comment se fait-it que des différences s'y soient
introduites ? Les premières qui se produisirent furent pour
ainsi dire quantitatives. Des le début, ta messe soicnnelte
(aujourd'hui la messe chantéc) s'opposa à la messe privée
(basse) Hmportance attribuée soit aux services journaliers,
soit aux services de telle ou tette fête, varia nécessairement
avec les Églises. Ensuite, on voit très bien l'origine historique
de chaque liturgie, et comment, sous l'action de causes
– m MTUEL
ASALYSH! 22T

diverses, le ptan dévie, sur des points secondaires. La cause


de ces divisions, qui ne dépassèrent jamais certaines timite~
(p. t8~), ce furent les libertés hissées, aux temps héroïques
do t'Égtise, a chaque évoque, sous sa responsabilité et sou&
la garantie de sa piété; f'e fut encore la constitution de natio-
nalités rivales à la place de l'Empire romain ce furent les
besoins nouveaux du christianisme, son caractère public et.
solennel de religion d'Htat. Les divergences turent ainsi'
nécessaires. Mais si, plus tard, i't~Iise romaine réussit &
imposer la règle catholique, ce ne fut pas, comme le préten-
dent les auteurs protestants, par une sorte d'envahissement
de dépossession des Ëgtises diverses; ce fut par une restau-
ration, claire et consciente, de la pure tradition chrétienne, à
laquelle les autres rituels n'avaient apporté que de légères
modifications.
Nous n'avons qu'une compétence infime pour discuter de
pareilles conclusions. It paraît cependant au sodotogue que
le culte chrétien Meu nécessairement une stillisante unité~
pendant les premiers siècles. Les formes rituelles sont en
efïet plus rigides que les parties intellectuelles et dogmatiques
d'une religion. C'est par le culte surtout qu'on est d'une
société religieuse. Ces actes matériels constituent le point
d'appui, le centre même du mouvement de propagation d'une
grande religion. Les mystères auxquels se complaisaient et
étaient forces les premiers chrétiens, et qui constituèrent très
tôt la messe des fidèles, par opposition à la messe des caté-
chumènes, durent former un tout organisé et suntsammont
identique dans toute la chrétienté. Mais si M. M. doit avoir
raison sur ce point, il n'eu subsiste pas moins contre lui
qu'il y eut, dès le m" siècle, une diversité extrême des tradi-
tions chrétiennes et une indépendance absolue des dinérente~
formes que revêtit un même rituel. En somme, la vérité his-
torique cadrera probablement avec les inductions socioto-
giques elle consistera peut-être à dire que le fond du culte
fut uniforme, mais que l'évolution du christianisme, son
extension, son organisation en églises locales, furent la cause
de divergences aussi profondes que celles qui existent entre
le rituel catholique et le rituel grec et orthodoxe.
228 L'AKSËE SOCtOMGtQUK.t897

A. HtLLEBRANDT. – Ritual Litteratur. Vedtsohe


Opter and Zttuber (&<c~/<CM c<ma~tf r<MM),gr. in-8",
Strasbourg, Trubner,18U6, in <;n<H~'<M~M<trM<t<'M
Philologie «M~.i~r</<MM«A'<u«/c/<p<'<n<<;t<'Kvon Georg
Buhter,Ht"B.,2"Heft,t86p.

Le livre do M. Il. fait partie de cette publication très


importante du Traité de philologie et d'archéologie indienne
que tout uu ensemble de savants ont entrepris sous lu direc-
tiou d'uu des mattres les plus connus, M. le professeur
Biihier. Quoique tous ces traités soient rédigés dans un
esprit
strictement historique et philologique, quoiqu'ils aient sur-
tout en vue de préparer uue intelligence plus comptete.des
textes, des langues et des monuments de l'Inde, ils n'en
contiennent pas moins une immense quantité de faits dont la
connaissance plus précise devra faire partie de tout matériel
sociologique, De même que le livre de M. Jotty, dont nous
rendons compte ici, doit être considéré comme celui auquel
il taut se référer, en ce qui concerne t'inde antique, dans
une étude comparée de la famille, de même c'est au livrer de
M. H. qu'i) faudra recourir, pour les cultes Védiques,
dans un travail sociologique sur le rituel. Les faits y $ont
recueillis dansles textes mêmes, tesdinerentes monographies
qu'il contient sont souvent de simples traductions coordon-
nées. Une connaissance profonde de la bibliographie des
questions, un souci constant d'être complet, sont des qualités
qui font de ces livres une source do renseignements de pre-
mier ordre.
L'importance générale de la littérature rituelle de l'Inde
n'a pas échappé à M. H. Hsait tout ce qu'une science compa-
rée des religions et de la civilisation pourra retirer de cette
étude (p. I, !h. Il sait aussi tout ce qu'une comparaison avec
les usages correspondants et des peuples aryens et des autres
pourra ajouter de lumière aux explications fournies par une
6tudecritiqucdestextes.Ungroupedetravaiiteurs,MM.Ca)and,
Otdenberg, Winternitz, partage les mêmes opinions, et l'on
doit, dès maintenant, espérer beaucoup de leurs recherches.
Les quelques exemples, que M. H. nous donne des travaux
possibles dans cet ordre d'idées, sont faits pour exciter l'inté-
rêt le plus vif. Les rites du mariage védique, par exemple,
sont réellement typiques, et admirablement décrits par les
ANALYSES.– LE RITUEL

textes pleurs de la mariée au départ, port d'un cordon


rouge, tours faits par les flaucés autour du feu domestique,
jet de semences sur le couple, tous ces usures ont leurs
équivalents indo-européens, qu'ils éclairent et dont ils
reçoivent de la lumière fp. 4'. Les rites de l'initiation, le
mode de coupe des cheveux, io culte.des mânes, les règles de
la construction que l'ou retrouve dans t'tnde, sont communs
à toute l'humanité (p. 6, 8). Or il se trouve que, daus t'tnde
seule, nous possédons des descriptions complètes, détaxées
de tous ces actes, que nous pouvons, dans les textes, assister
a un sacrifice védique, aussi bien, voire mieux, qu'à une
messe chrétienne du moyen âge. Combiende fois, en ellet, les
formules ne dounent-ettes pas immédiatement, le sens mys-
tique des actes auxquelles elles se rattachent! L'importance
d'une étude, même purement philologique des rituels in-
dous est doue capitale pour une sciencegénérate des retigions.
Je ne crois guère excéder ta vérité, ni les opinions de M. H.
en disant que t'tnde est appelée à uous donner, en ce qui
concerne les religions,, des faits cruciaux au point de vue
sociologique.
It est à peine besoin do dire que M. Il. a débuté par une
étude pbitotogique des textes dont il va nous résumer le con-
tenu. La première partie du livre consiste en une série de
dissertations sur l'époque duMigveda,et ladescription que ce
recueil nous donne du sacrince védique; sur le caractère,
l'origine (p. 20)des livres proprement rituels de t'tnde brah-
manique, tes~YM(tils conducteurs~ sur la compositiondes
dinéreuts ~X~M,leur répartition dans les dinérentes écoles
védiques, la façon dont ils sont rédigés, la valeur de leurs
informations; enfin.sur les commentaires dont l'érudition
brahmanique do l'époque classique les a accompagnés. On
donnerait dinicitemeut idéede la sûreté avec laquelle tous les
renseignements sont classés, les opinions des philologues
discutées et les conclusions présentées.
M. H. renonce, avec raison croyons-nous, a donner une
exacte description du rituel du Higveda.Malgré la variétédes
textes contenus dans cotte collection, malgré la pauvreté des
renseignements, il est permis de croire, d'une part, que dès
l'époque védique une partie du rituel futur existait déjà, et,
d'autre part, qu'il fallut une longue période pour que le même
rituel arrivàtata fixité et à lu complexité dont les Sùtras nous
rendent témoins. Particulièrement suggestif nous scmMele
?0 L'ASIE SOCtOLOGtQUK.
«f!

paragraphe 4, où M. Il. montre quelle valeur pourrait avoir


unecottection des allusions quela littérature bouddhique fait
au sacriftco brahmanique.
Les satras se divisent eu '/<'A</«xt)/<'<t<,
en;TaM~t~<«.i!;les
derniers sont les rituels des grandes cérémonies (''mxfrH,
révélées) les premiers sont les rituels des cérémonies jour-
nalières et domestiques '~('Ay, maison).
De ces deux ordres de textes, M. U. va nous esquisser suc-
cessivement le contenu, et ce plan est excellent. Les Indous, en
ettet, ont tellement réHéchia leurs actions religieuses que, sur
bien (tes points, les divisions qu'ils ont établies entre les faits
méritent d'entrer directement dans ta science.Eu réalité, rien
n'est plus distinct que les actes du culte domestique et ceux
des cultes des grands dieux. M.t!. suit mômete ptun générât
des sntras, sauf en ce quiconcerne les j~ft/tM~n~, ou it adopte
un plan voisin de l'exposition dès ''<~<t'«<~tuis de Manou
par exempte et reproduit t'histuire de la vie du brahmane,
depuis sa conception jusqu'à sa mort et sou autre vie !p. 4t).

I. – Particulièrement intéressants pour le sociologue et


relativement faciles &lire, nous semblent les exposésdes actes
suivants la cérémonie pour l'obtention d'un fils, où le brah-
mane, entre autres rites, donne à manger certains grains à la
femme qui répond qu'elle avale une création d'hommes
l'étabtissement du feu de t'accouchée, car pendant l'accou-
chement il faut un toyer spécial pour écarter les mauvais
génies et on doit étonner le feu domestique (p. 4!!) le ~a.
Aot'HMK, pratiqué immédiatement après la naissance du gar-
çon, où le père donne le sounte &son fils, assure son exis-
tence heureuse, demande aux dieux de lui donner la sagesse,
lui impose des noms, l'un vulgaire, l'autre secret (p. 47) pour
que (p. m) ce nom ne soit pas employé dans des formules
d'envoûtement et do magie (§ initiation
I'«/)f<K<!f/«M,
faite de huit à seize ans, on, pendant et après un sacrifice
libatoire, on revêt l'enfant de l'habit de sa caste, du cordon
brahmanique s'il est un brahmane. L'enfant entre alors chez
son maitre après une série d'actes qui ont pour but d'assurer
sa fidélité, sa sagesse, son âme ette-méme (p. M). A partir de
ce moment, le jeune ~AmftfaWM apprend et récite la grande
prière brahmanique, la .'Mr<~7,remplit les devoirs de l'élève,
étudie le Véda suivant les rites et les temps déterminés, jus-
qu'à sa sortie de t'écote; alors il prend un bain solennel,
ANAU'SES. LE RITUEL ?1

revêt les dernières insignes brahmaniques, et vit suivant les


règles morales de sn caste, jusqu'à son mariage (~ H~ dont
les sntras indiquent les conditions religieuses. Le fiancé et la
fiancée doivent n'être pas de même clan de père, ni être
parents (M~<(<a)do mère (au (!"dfgre), mais être de même
caste et de mémo village, avoir certains noms, certMinesqua-
iites. Parmi les nombreux rites. signalons le bain de la
fiancée, lit parure de la fiancée, la conduite, le sacrifice nup-
tial, ou, A un moment donne, auprès d'un autel domestique
spécial, le mari prononce une formule curieuse c Que la
jeune fille soit écartée de ses aïeux les rites du retour à la
maison, et des premiers jours de cohabitation (§ 36 et suiv.).
Le mari établit le feu domestique avec des rites déterminés,
doit t'entretenir régulièrement, le saluer & chacun de ses
retours. Seul l'homme peut faire les sacrifices domestiques
qui sont tous des p~«t/M/M~ (sacrifice à cuisson), dont les
plus eiementuiros sont de simples lihations de beurre fondu
et dont les plus rares sont des sacrifices d'animaux f§ 44,j. Les
sutras fixent soigneusement les moments, lieux, matériaux
de chaque sacrifice tous les jours (§ 46) des sacrifices sont
faits pour les dieux, pour les aliments. pour les êtres vivants,
pour les mânes, pour le Véda (consistant en la récitation
d'hymnes', pour les hommes. A chaque nouvelle et pleine
lune celui qui n'a pas posé les trois feux des grands sacri-
uces, oltre un sacrifice spécial. A certaines époques, le rite
varie, au printemps, au commencement de la saison des
pluies (ottrande aux serpents), au moisd'Açvina (cérémonies
pour le bien des chevaux et du betait).
En outre de ces sacrifices périodiques, des sacrifices
marquent chaque moment de la vie domestique la réception
d'un hcte (S S3), la construction d'une maison (§ 54), rites
particulièrement intéressants pour le folkloriste (p. 8t). Une
série d'actes symboliques assurent ta prospérité des trou-
peaux. La maladie, lit mort, la crémation, l'enterrement des
cendres, etc., sont également l'objet de cérémonies dont nous
avons rendu compte ici môme, à proposdu livre de M.Caland.
L'âme devient objet de culte, et chaque jour, et a la nouvelle
tune, et à certaines époques de l'année signalons que la
cireumambutation du foyer se fait de droite à gauche au lieu
de se faire de gauche à droite comme dans le sacrifice ordi-
naire (Cf. p. l':S) et que les onrapdes du f<-a<M<« funéraire
sont faites d'ordinaire de g&teaux (pt~a).
S32 MUT
L'AftSÉESOCIOLOUIQUH.

H. Les grands sacrifices que nous décrivent les <'raMh!


xf)<)'aftont une nature tout autre. L'intervention du prêtre
est caractéristique. Le brahmane est indispensable. Il y a
plus, le maitrode ia maison loin d'être l'officiant, est, en tunt
que sacrifiant. y«y'«~f!<w, un simpie comparse, Il assiste au
sacrifice, se soumet, donne, paie aux prêtres leur <a (sa.
laire!, qui diffère avec cttaquc sacrifice. Les prêtres, en nombre
variable, à fonction déterminée, accomplissent les actes mate-
riels, oratoires, mystiques, soustasurveittanco de l'un d'entre
eux, le ~<Y</tM<«M. Le sacrifice est un véritable drame (p. 107),
chaque instant ayant son prêtre spécial, chaque prêtre sa
mélodie et sa prosodie, qui n'a pu être ainsi fixée que par une
longue évolution religieuse. Tous ces sacrifices supposent
l'établissement des feux qui y sont nécessaires. H faut lire
les minutieuses prescriptions qui entourent la construction
de faute) < 83 la façon dont doivent être allumes les
trois feux. et les premières tibations faites, pour voir toute
la richesse du rituel védique. Aulel et feux servent dès lors
aux sacrifices lillatoires réguliers. Hy en a chaque jour (~ (!t),
d'autres se pratiquent a ta pleine et à ta nouvelle tune. M. M.
qui avait déjà étudie ces derniers dans une monographie
remarquable, les rapproche Cf. p. 111) des culles lunaires
universettenx'nt répandus, t) y a encore le sacrifice aux
maues, tes sacrifices des mois, des saisons, dont t'un pré-
sente des caractères singuliers, qni dénotent une origine
populaire on y tuait un bélier recouvert de mamelles et de
testicules, et t'en faisait se confesser ta femme du sacrifiant.
D'autres sont occasionnels A'"M~<M!, suivant les désirs du
sacrifiant, par exemple des sacrifices pour l'obtention, ta
multiplication du betait 67).
Mais ptus grands, ptus solennels, plus importants et par le
temps qui y est cousacn' et par le nombre de prêtres, et par
la difficulté des actes, sont encore les sacrifices où est offert
le M~tf!,lit liqueur sacrée que les brahmanes offrent en nour-
riture aux dieux. Avanttout sacrificef'ù sont faits des pressu-
rages de soma, interviennent des rites de jeûne, de consécra-
tion, qui constituent lu ~?Aw ''intronisation) du sacrifiant.
Tout le grand sacrifice indou est dominé par la nature de ce
rite. L'individu dévoué aux dieux, ou achète et on apporte le
.t<MM en grande pompe le prêtre le porte, suivi de la famille
entière (restes d'un iMcnoM ~<t~'<'<«M),dit M. li. (p. t36).
Viennent alors, dans le sacrifice type, t'~Ht-~ooM,les trois
ANAt.YSES.– LE KtTUEL 233

pressurages, du matin, de midi et du soir, qui, avec les


offrandes et sacrifices d'animaux qui s'y rattachent, tonnent
un comptoxus d'un profond intérêt. Le sacre du roi, le grand
sacrifice du chovat, le sacrifice humain bien souvent étudie,
sont aussi très riches est rites remarquables, Signalons sim-
plement une expression des ritologues indous ils disent
d'un certain sacrifice qu'il a pour effet de < taire monter de
rang te sacrifiant (~'o/<o r~<<'<~f<<'f/«/<Lelivre de CodriHg-
ton sur la Metanésie onrirait sur ce point do curieux paratié.
tismes. Enfin ie sacrifice universel (x<«'f<~M<'<)< § 78) est
accompli par le brahmane l'exemple de /«/tMMKSrf~OHtMtt
qui en se sacrifiant, en 8e retirant de tout, anima toutes
choses on reconnaît ta les idées qui formèrent ie fond de la
doctrine bouddhique du sacrifice de l'individu au monde.
A cette étude du rituel religieux proprement dit, M. H. a
adjoint un résumé fort court, quoiqueprécis qu'i) soit, de la
magie védique. Le sacrificeenenet passe insensiblement dans
le domaine de la superstition. La distinction du mimiqueet
du religieux n'a jamais été vraiment faite par les ludous.
Même le rituel des sacrifices les plus élevés mêle aux actes
religieux les plus purs les actes de ia magie ia plus élémen-
taire conjuration des sorts, malédictions des ennemis, rites
pour s'assurer la victoire, la pluie, etc. Les moyensmagiques
se divisent en moyens oratoires, et t'n actes symboliques
)~ les formules de bénédiction, les souhaits de santé fp. t(M,
'?()); la valeur particulière attribuée a certains mots; les for-
mules de tnatediction; les MxntO'fM védiques employés, dans
ce but, mais en guise de pures mutopces et sans avoir de sens
bien détermine; ta récitation àt'cnvers de certains offices:
2" (§ 89), l'emploi des rites symboliques pour avoir du soleil,
des amis, une amante, pour envoûter, etc., t'emptoidusang
(p. i7ë). Xaturettement. de même que les dieux sont meies
au sacrifice, de même les mimes (§ fU), tes démons (p. H~
sont les exécuteurs des ordres des enchanteurs. !i vit sans
dire que la magie et la médecine ne sont pas distinguées
(§ 92, n" H) et que les brahmanes ont toujours pratiqué la
science des présages et des oracles.
Peut-être M. H. eut-ii bien fait de rattacher plus étroite-
ment encore la magie au rituel. 11est eu enet bien exact que
les textes ne distinguent pas eux-mêmes, que les faits se pénè-
trent. A cette époque, comme a l'époque classique, comme
aujourd'hui encore, le pouvoir magique et le pouvoirreligieux
S34 L'AKNÉe SOCtOLOGtQUE.<"97

du brahmane semblent bien n'en faire


qu'un. Précisément,
ce qui rend si utile pour le sociologue l'étude des religions
indoues, c'est cette coexistence étonnante des types les plus
avances des institutions relieuses, avec leurs formes les
plus
primitives ou les plus absolument dégénérées. Lestextes eux-
mêmes donnent cette impression, que le livre de M. H. ne
rend pas absolument. Les diffif'uttésd'un travail do ce genre,
le peu de place laissé à ce livre dans tout un ensemble sont
d'ailleurs de bien suffisantes excuses pour l'auteur.
Enfin une remarque peut être faite d'un caractère aussi
philologique que sociologique. M. H. s'est servi, pour son
exposé, surtout des sûtras. Or, dans ces textes, l'essence, le
principe. t'ettet du sacrittee ne sont pas mis suffisamment en
relief. La lettre du rituel en a, sur bien des points, tue l'es-
prit. Dans les Brahmanas.au contraire, c'est-à-dire dans la
série de textes immédiatement antérieurs, les caractères géné-
raux du sacrifice apparaissent infiniment mieux. C'est dans
les Hrahmanas qu'i) faut apprendre pourquoi l'on spcrille, dans
quel but, dans quelles occasions, quel enet on en attend sur
la nature, sur les dieux, sur soi. Une étude suffisamment
générale du sacrifice indou ne peut être faite en dehors des
Bràhmanas. Heureusement, une étude faite dans ce but, et par
un mattre, va bientôt combler le vide que laissait encore le
livre de M. H.
Nous souhaitonsqu'un (~fjn')'MMi, en allemand, où seraient
traduits les termes sanscrits, vienne faciliter, à ceux qui ne
savent pas le sanscrit, le maniement de cette précieuse col-
lection qu'est le Ct'xs~'Ms(/c<-Mo-.4n'MA('KP/t<<o~<e.

W. SIMPSON.–TheBuddhist Praying-wheel. A<'o/<<-c/!OH


o/' .t/afp<-M<<w<WH~ x~tt llrex~w~o~m o/'</<e?/)?<. aM</c<t'-
''M~«-tHo<-€H«'t<<f!
ttt ('tMfot)t««<<t'cft'gtoxitWfMtff.(La roue à
prières bouddhique.)Londres,t8')6,Macmiiian~94p.tn-8").
A proprement parler, l'auteur ne tend qu'ai nous fournir un
ensemble de faits. On dirait un collectionneur qui met les
pièces qu'il a rassemblées à ta disposition du pubtic. La cons.
cience qui a d'ailleurs préside à la réunion de ces matériaux,
et l'ardeur qui y a été mise pendant une longue série d'années,
sont notables. M. S. est arrivé à condenser dans ce livre
presque tous les faits connus sur la roue symbolique et la
croix gammée, etàen rassembler une somme très
respectable
ANAtYSKS.–~B)~~T~)~ 23~

sur les mouvements circulaires dans la plupart des religions.


t) y a, pourtant, des omissions. M. 8. oublie qu'il y a eu une
croix gammée au Mexique. 1)'autre part, l'énumération des
eircumambutations dans les différents rituels est loi d'être
exhnustive processions catholiques, promenade de la loi
dans les synagogues, etc., sont négligées, sans compter les
choeurs antiques et les dauses que M. S. reconnatt tui-méme
n'avoir pu étudier.
Le titre c La roue à prières bouddhiques indique plus
l'occasion que le sujet de l'ouvrage. M. S. a été, dans le
temps, pendant un séjour à ta frontière thibétaiuo, fortement
intéresse par les moulins à prières si nombreux qu'il y t'en*
contrait il en a acheté deux; it a rénéchi. s'est informe des
autres cas bouddhiques du même usage 'Chine, Japon, Vit).
Puis Il a remarqué que le nom thibétain et sanscrit en signi-
fiait <'la roue de la loi Le soi-disant moulin n'était donc
qu'un cas de la roue symbolique. U remarqua encore le
sens toujours identique des mouvements de la roue, qui
tourne constamment de droite à gauche (p. 4~ dans le sens du
mouvement du soleil, dans celui de presque tous les mouve-
ments circulaires des tndousetdes Celtesautour d'unaute)
(p. H); de là cotte étude générale.
La roue à prières consiste essentiellement dans un cy.
lindre mis en marche, soit par une ficelle que tire le lama,
soit par tout moyen, l'eau, les passants. Ette porte une for-
mule uniforme, exprimant t'adoration au Buddha. Onta tourne
dans le môme sens que celui où les lamas dansent, ou font
leurs tours do la statue du divin ascète. Or cette roue, bien
qu'elle n'apparaisse dans le rituel qu'à une époque tardive,
existait déjà dans la mythologie bouddhique la plus ancienne.
Représentée sur les piliers des )!(OpMde Barbut et de Sanehi
(n"siecto av. J.-C.), elle est la roue do lit loi, celle quetourna
le Buddha lors de sou enseignement, celle qui est < te grand
cercle du pouvoir et de la règle Hien d'étonnant si dans la
dégénérescence du Bouddhisme, dans ce mouvement où il se
réduisit aux pratiques extérieures, l'imitation matérielle de
l'acte mythique du Buddha devint chose salutaire. Ce sym-
bole do la roue avait été centrât dans le bouddhisme, la
forme du temple s'en déduisait et les <:<wp<M les plus fameux
affectaient la forme de disques et de croix gammées (ch. n~.
L'analyse des origines de ce symbole va nous indiquer sa
signification. La roue de la loi faisait, avant le bouddhisme,
~3<! L'ANNÉESOCMLOCtQUE.t8t!

partie du système brahmanique lui-même; et c'est a celui-ci


que les Jainas aussi t'empruntèrent. D'autre part, le sous des
mouvements circumambutatoires, leur vertu, sont les mêmos
que dans le bouddhisme ou doit tourner autour de l'autel
suivant lu ~w/ftA-~M,c'est-à-dire eu ayant i épauledroite au
centre et d'est en ouest, dans le cas où une orientation serait
nécessaire. Or tel est évidemment le chemiu du soteit les
tours faits ainsi sont faits à sou imitation. ))e même, la roue
est aussi un symbole du soleil roue illuminée, roue de
bonheur, elle est le signe et la productrice de la victoire et de
la fécondité. Heprescntee d'abord comme un disque plein,
puis comme une roue avec ses rayons, en nombre pair,
variable, multiple de quatre. elle vit ses rayons se restreindre
à ce dernier nombre; puis, le tour de la roue se fractionna,
il y eut un vide avant chaque rayon, et ce fut la .tM.<'< la
fameuse croix gammée, le porte-bonheur comme dit sonnom,
reste du disque qui représente le soleil (ch. n).
En t'~ypte, en tsraP). dans le culte de la Mecque, citez les
Grecs, les Celtes, M. S. retrouve la même orientation des
marches rituelles. Kn Grèce, comme les découvertes chaque
jour plus nombreuses le démontrent, en Gaute commele beau
livre de AI.Gaidox(/ </«')< ~«<~ <<«.wM et le .~M)/w<wMe
de <'o«c)t'établit, dans lit mythologiegermanique, dans le
folklore européen, tu roue (souvent enflammée), le disque,
la croix gammée, la croix représentent le soleil victorieux.
!n fait pour ainsi dire décisif, presque générât, c'est que,
si les mouvements circulaires accomplis en t'honueur des
dieux se faisaient d'est en ouest, et de droite & gauche, les
démarches accomplies en l'honneur des morts, ou au courant
d'actes de magie, se pratiquaient d'ouest en est et de gauche
à droite. La gauche fut toujours de mauvais présage: les
messes noires furent gaucheres, commesi les circumambuta-
tions rituelles correspondaient au monde de la lumière et de
la vie et les circumambutatious contraires correspondaient au
monde des ténèbres et do lu mort.
Tels sont les faits que l'on peut extraire de l'exposé de
M. S. La dernière partie me semble plus durable que ta pre-
mière. L'auteur avait pour se guider le livre de M. Goblet
d'Alviella sur la .M<<!(«Ht des jtt/w/M~. Le problème en tout
cas est intéressant. L'imitation des mouvements, non seule-
ment solaires mais encore astraux, a du faire partie do tout
culte de la nature un peu développe.Ce qui donne une grande
ANALYSES. LE RITUEL 331

vraisemblance à cette hypothèse, c'est que la division du


monde en régions suivant les points cardinaux est probable-
ment une idée fondatnentate parmi les notions religieuses.
Sans compter que les sauvages ont ou ont dû avoir un sens
de t'orientation extrêmement précis, la conscience sociale
attribuait telle ou telle nature religieuse a telle ou telle par-
tie de l'univers. Une place du cie). de l'atmosphère, de !a
terre, des eaux, était le monde des dieux, une autre le monde
des démons, une autre le pays des morts. Cetterépartition du
mondeen régions plus ou moins favorablesù l'homme qui les
contemple est même un de ces cas où fonctionnent immédia-
tement les lois psychologiques des représentations sociales.
L'acte religieux qui eut partout pour but d'assurer lit vie
et te bien de la nature, des hommes et des dieux, devait
s'associer ù ces bonnes régions et aux mouvements des
astres; l'acte magique, terrible et funèbre, devait s'associer
au contraire aux mauvaises régions, aux esprits méchants,
aux morts.
Mais si les faits reunis par M. S. sur ce point ont cette
valeur, la connexion qu'il établit entre le moulin a prières
bouddhique, la roue de la loi, les mouvements circulaires
paraltra extérieure. Sans doute il y a une confusion dans
le rituel thibétain sans doute aussi le sens du mouvement
de la roue est bien le sens religieux des mouvements mais
la tradition ne se trompait pus, qui partait d'uu moulin
à prières et non pas d'une roue de la loi. D'abord,c'est tou-
jours un cylindre, et non pas une roue. Ensuite, sur ce cylindre
est reproduite la formule évocatrice du Buddha, le OH< indou
qui fait atteindre au Jaina le ciel, au brahmane le Hrahman,
au bouddhiste le Nirvana le mouvement constitue donc une
prière. D'autre part le bouddhisme thibétain ou chinois
fourmille de faits similaires l'arbre à prières dont les feuilles
s'agitentau vent pouradorer le Buddha, les drapeaux à prières
dont les villes s'entourent pour chasser les mauvais esprits,
les cloches qu'il est méritoire de sonner, tous ces instruments
sont là pour assurer la constance de la prière. Le bouddhisme
a voulu que toute la nature priât, puisqu'elle est tout entière
animée. Le moulin & prières n'est qu'un des moyens inventés
pour réaliser cette idée. Et d'un autre point de vue, en même
temps qu'un ramnement, le moulin a prières est une régres-
sion de celle-ci elle s'y est matérialisée, et le bonze et. le
lama qui, maintenant, tournent pendant leur vie un moulin à
&? L'ASKÈK M9?
SOCMMtGtQOE.

prière acquièrent les mét'ites qu'autrefois, dans le bouddhisme


classique, lit muditution religieuse seule procurait:

XOTtCHS
~t')t)!:)tHSt:TH)Tt'Kt.

< MAXM)').).Htt. On Anoient Prayers (in A'fwt'f/c~t«/t'M <«


MCMOt'y uy/<<-< ~t~ A'H/f«< m), hy U..A.Kohut.H'r)in, S. Cat-
vat-yand<<X9T,in-ii",p.i<;tsuiy.).
ttans o'ttc h''))'; et )itt~rair<' h'un d'uuvt'rturc d'un cours sur lu
prit'r<M.M.chut'<;h''at'))M<)ui.<<'t'ra)ad<')nM))tt'~vo)utio)),<'ti' i!
d~t!(t)!<;rles traits f~mtnuus d''s diu~n'ntM furo)' (;u*)t'' MrcYt'-
tues. A('[di<tU:mtsa divifion <k'.<t'<;)tjduusest t'thnn)tn" natiuntdt!
individm'ttcs. )'i)tust)' f'm'tat''Ut' d'' ht scioto' compitn'')' df.< t'cti-
gion:: d~tnutttr' ';)t ~tudiaot tfs t'c)i{!tonsdu pt'onh')' !)'?< t'Utti-
versuli~ de la pt'ict'e-dctntmde fp. 13), qu'etto s'adtesi)', cumm'*e))
t.W'ct' <'t cho! h'~ HoUt'ntots. aux fSjtrits mattres d' )it'ands ph~nc'
mènes nitturfis uu hi<'n,Mottut)~'en ~tau~ie, aux esprits tut(''tuix"'
des uttt;(''t)'t's(;)).
Mais )Mpt'ie)'~ <'st,&c'' stad' ittt~~t'ativf'sitnj'if !tcco)npa):))t'tn<'t)t
df i'iK'tc n')ij<i<'U![ fjui, lui, fu)'t:f)'' dieu A at!ic duos un s<:)tsd~tct-
minu. Datis les rcti~iutts uatx'Mitips,t'n <tt't'(;e,A Munn', aux tttdt's,
t'))t')')'f,)a)'t'it''t't't:u)Ht)«'))'aatuit'un''valeur :tt'th'<<'tau~i
une Yu~'ut' )nft'!))t'. t'n 't'm';nt hmniun t'st pn'st'ni. tians tuut
ttynu)'' titu)');i')U' )<'s)))'if'r<'< drs j'r~tt't's. ccth's des h''r«sd'n<)t)))''rM
Mprhm'nt, il est yrai, uu'' sortf d<' cuntrat. t))ai<;auMi lit cunviHtion
et la j'i~tc (p. 25 suiv.. Mai" lu v~)'itM)'h'tt"raison df in prifrc se
produit d:)))s )''s D'ti~iuns indhidu<;)h's. Uu«d))istn~ Chriii'taniiitm'
c<'sottt ')h's où )'tM<'d';mat)d<;d<< i'or';<'spour ia tutte, pt'h' pouf
)at)~ttte de la vif, et surtout devient humhh'et''onOaxte. En
somute, cuuctut M. M. Muttct', t'~ohttion tuut enticre consiste dans
c<'ttf oppositiot) ftttn; la pri'')' pritnith'c 'tt)i curr~pund a ccUn fur-
muh! < <)U' )na vutuntt' soit fait'' ''t ta sph'ndide~xprcsiiionjud~u-
t;hrt!tiet)n'' que lit vutunt<!soit faite
0. STt MEL. Samoanische Texte. Unter BehMfe vonEtNge-
borenen geaammeit und (tbersetzt. Hfr~. v. t- W. K. Miifh-).
(t'ern~. M. < ~<. j/<M. t't!M< n' M., a-t n. )!< in4". Bc<-)iu
Dich'it'h ht'imt'r, iMM.)i'u)))i''atiun tr~'s hnpo)tat)t<' tant au poia)
de vue mythui~iqu'? qu'au puiut de vue de lit religion, des
cultes, des prit-rc: cht' h: Satnoaos.
G. WOHHEHMtX.– ReUgionsgescMchtUche Studien zu Frage
derBeeinOuasaog desUrchristentuma duroh das ant&eMye-
terienwesen. Bt'tti)), mx'rittff, 1890, in-8". \)))-iSO p.
Fait en même temps que le tin'e d'Anrich sur le m~me sujet et
ANALYSES.– LE MTUEt. 239
Mmve aux mt'-)))<'s)-n)tuts.ùth'<'t-h'r ht ptt)'<'ttt)?qu:t-xi!it'Mun-
les ntyst.')-('A.('))n''t!<'n.<<-t)<.s))jystwst:r<cs;t-tc()u<ut a un<-
iun'u'ncf'histuritjm'.t'ufi'onnfdiss'rtutiottsurtt'motJtY!');.
Htif~ XASSH')'.– Les Apocryphes
éthiopiens, tmduits <-<)frm)-
':< (-tt-H.HttS('itttn'tjt).-ntd<'J.-C. A.('sdist;i))h'<'t))ri''rM
mat!i<)m's.pHt-is~)<i))t.du)!))(!(t)t('Sci!'))t'c),)8M,3<i().it)-)8.
)'<'s)'rh'-r)'<))t!)M")u<'<t))t(.M.))!t<s'-tn<tt)sd~))t)''h~<h(nsunftr{"i
t'eitett'itdttctio)), et suivant mtt;hn)xtn''s)h'ur''ux.'t'ntjt)usitnmM-
diat<-)t)<-)tt))tt't'<'s<)nt<'s(jUt-h's..j.:))st')t;n'-m('nt~t.L)'s))ti!t-ps,
surtout :tp!tt-tir du ht )V'n')-cntd.'s<;x(-)nt)tes.:M'k-)).'fd<)tnti.).
nis)nt'd<-i'it)voc!ttitj)t)'td''iut'itr<)nd()t)t)!t)<m's<'(-thttnystittu<'
n'ont foit,en .\byssini<(ju''r<'cuun'iruu)u)td('rin)iti)'.

<S. H.UOtËTT. Thé EarUest Christian Hymn. ).ond., iM7,


iu-8".

HEv. [.S. WAHXKX. The Dies ïrso. t. y/te /M. ).on()., <89U.
Sk''tttt)).:tonandS<')js.

F.-K. BHR.ttTM. – ))onnf mu- <ditiun )'etU!n~tmbt<-des textes


Ittm-)!i~m'!i.Ox)'.(:)!tt'<'n<to)tt'tt's.«'.

H. WE))'tt'r. Das Shinto Gobet der Grossen Roinigung.


(.)/t/i. < f/fM~t-Aft) CM~./'<Vff~Mr KM<<!Mw<«)tf/c ~t-M<
M 7'oAt'o,N8"th'r.)

t'B. t:M()XT. -Textes et monuments figurés relatifs aux mys-


tères de Mithra. t'«!ic. Ht et t\ <40),18MC.

ncuAt'LAtX):. -De iaitiishumUibusmirabilibusqtte per secula


incremontis oultus B. Mariœ Virginis, disquisitio historioo-
liturgiea (in Slud. «..<<. «M.!</<'«~<-«M/t't-/<MM-
«M</</<)Ct~fr-
o'<-<M«!<'t).uu. X\'ttt, th. t.

J. WATTEtUCH.– Der Consecrationsmoment im heUigenAbend-


mahl und seine Gesohiohte. th-idcthft-t!, (:. Wioto-, tSM, in-8".

Il. SCH.\t'Ët<. – Das HorrenmaM nach Ursprung und Bedea-


tung. BcrtctstniU))),<!itt<'Mtu)t''i)t),)8i)*?;t)~u)ojti(tu<'j.

~MA~K f.

LE t!LAXT. – ?80 Inscriptions do pierres gravées, )896, Leroux,


Paris.
Htabtit t'existetMMd'un fot-tnuhmc mo8"tuc.
~40 L'A~E SoaOMGtOUH. m't

K. Ku-:S)':WHTT)-:H. Der Oco~ttsmus des Alterthume, H.ctc.


t.pip!t8M.F)')'d'r)L-h.
t.. KHn.):XH):CK. Der OceultismuBder Nordamerikanischen
ïndianor, ib.

\t<.–MYTHKM
fw MM. MAms et th)'t:M.

H.UZEXER. – Gottern~men ~M Momsdes ~<'ffu-).Versuch


einer Théorie der Meiigiosen Begri<ïsbi!dung. Bonn,
Cohen, !??.
Nous sommes heureux qu'un concours fortuit de circons-
tances nous oblige à dépasser, eu faveur du livre de M. f. le
miHésime prescrit en principe aux collaborateurs do l'~t~c
j!0f!'0~«/«<
Ce livre est le chef-d'œuvre de IHscience comparéedes reli-
la sûreté y
gions pendant t'aanee passée. La profondeur,
a conscience
egatentta generaiite des vues. L'auteur tui-môme
de la méthode qu'il suit Plus profondément on fouille, dit-
·
il, plus les résultats auxquels on parvient sont généraux
de faits
(VU). L'exploration presque comptëto d'un ensemble
ramène à
qui apparaissent bien limites, mais que l'analyse
leurs principes, conduit aux théories les plus neuves et les
ses causes, son évo-
plus justes sur la nature du polythéisme,
lution et sa tendance vers le monothéisme. En fait, le sujet
méthode que par
précis qu'a choisi l'auteur est plutôt tel par
intention c'est la vie des notions religieuses qui est étudiée
à travers les noms des dieux c'est la manière dont elles se
U. sait la place
multiplient, s'agrègent, disparaissent. M.
faits
qu'occupe cette recherche daus une théorie générale des
des
religieux 'Vf) elle constitue un essai sur la formation
concepts religieux.
D'autre part, la méthode ette-même est suffisamment géné-
rale. Le champ des investigations, c'est tout le groupe des faits
Non
religieux que présente la civilisation indo-européenne.
comme la désire
pas que la science comparée des religions,
M. U-, soit la mythologiede M.Muller et de KHhn.Elle ne pré-
tend nullement à reconstituer la pensée religieuse des Indo-
Européensavantteur séparation. L'école phitotogiquoaéchoué
en tentant de retrouver des faits historiques là où il n'y avait
ANALYSES. – MYTMBS 2~

que des concordances(g f). Mais on peut en appeler d'une phi.


lologie ù une philologie mieux informée. La parenté des con.
cepts religieux ou autres, paraltète a la parente des langues,
favorise certainement les comparaisons dansie domaine indo.
européen. On est sur de rapprocher des phénomènes de même
Heure )a définition et l'analyse d'une part, te groupement
des faits et l'induction de l'autre, peuvent être garantis à
chaque instant, au moins par des équivalents philologiques
C'est douesur un terrain solide que M. U. s'appuie pour tenter
une histoire des représentations religieuses,
qui soit une des
chevilles ouvrières de ce grand édifice d'une histoire '< de
l'évolution de l'esprit humain On pourrait, en forçant
peut-être un peu les choses, aiter jusqu'à soutenir que H. U.a
suivi une méthode profondément
sociologique. Il a tendu en
effeta découvrir, non pas tes notions religieuses
individuelles,
mais tes notions sociales. A'o&M t-Mxoc~ M~M r<M rt'A<«'
telle est lit maxime que M. U.u mise en
exergue de son livre.
Le moyen qu'it a choisi do parvenir aux choses sociales était
admirablement adapté. < Le langage, a dit un autre
philo.
togue, M. Meitiet, est une réatité sociale.. Rien de plus tégi-
time que d'étudier un fait social dans ses connexionsavec un
autre.
L'étude du langage est d'ailleurs un des biais
par où l'on
peut le mieux considérer les représentations religieuses
comme des faits objectifs. Eminemment social, le mot
prête
aux notions sa massivité, sa fixité; on le voit s'attérer avec
elles, et ses flexions suivre leurs diverses applications on le
voit rester vide de sens, puis s'adapter à
l'expression de uou.
velles idées, s'associer & d'autres mots comme les idées
s'associent aux idées. L'étude des notions religieuses faite
à travers les noms des dieux devra donc,
par une sorte
d'analyse progressive des couches philologiques et intellec-
tuelles, essayer d'abord de retrouver sous ta
multiplicité
dos noms l'unité de l'idée, < rechercher ta carcasse du con.
cept sous ses superfétations; puis, les différentes idées
religieuses décomposées et les éléments retrouvés, arriver à
une classificationet à une déduction générale; enfin voir l'évo-
lution de ces idées, leurs fusions, leurs régressions, la
façon
dont eties préludent à de nouveaux progrès ou
persistent dans
d'autres systèmes.
Une sorte d'hypertrophie conceptuelle entoure la
plupart
des notions mythologiques que l'antiquité nous ~uw
_z_ présente. En
le 0.-
H.))t')t)!)tt:)u.–Antt~<'iu).)897.
242 iMt
L'ANKËESOCtOLOUtOL'K.

effet, les noms apparaissent d'ordinaire groupes soit que des


divinités féminines aient été symétriquement opposees &des
divinités masculines. probablement identiques M l'origine
soit que, autour d'un nom ~§3), une série de patronymi-
ques se soient disposes .ainsi dans le cas d'Hyperés. Hypé-
riou, Hypérionide) (§ ~), ou que la pensée populaire ait inter-
prété pur un nom aucestrat des noms supposés patronymiques
(ex. ,t</«(, mère des .t(M(/(M).D'autre part, les mots et les
idées viveut. Ils tombent en désuétude, ont besoin de renou-
vellements venus de l'extérieur. Souvent nue même idée réap.
paraît rajeunie, sous un nouveau mot. Et deux noms de
dieux qui semblent fort distants l'un de l'autre ne corres-
pondent qu'a une seule et mêmeidée religieuse, a un seul fait
social. Ainsi l'analyse superbement conduite par M. il. nous
fait voir comment la même idée du Pampuaës, celui qui illu-
mine tout, s'exprima par de très nombreux personnages
divins. Danstous les cas. c'est un même concept qui se ramifie
ea personnifications secondaires (~8).
Toutes ces appellations multiples, ces homonymes et ces
synonymes,'uesontdouc pas des faits de suraddition. Cequi les
rend possibles, c'est l'obscurcissement de la notion primitive.
Si celle-ci était restée claire, si le seus du mot était resté plein,
aucune prolifération, aucune adjonction étrangère ne se fussent
produites. Or les noms des dieux ont été absolument compré-
hensibles à l'origine. La signification du mot correspondait à
l'idée, et l'idée avait une fonction déterminée. En d'autres
termes, chaque dieu correspondait auue classe déterminée de
faits, répondait à un ordre spécial d'événements, naturels ou
humains, y présidait, était l'objet du culte qui donnait à
l'homme pouvoir sur eux. Les dieux furent primitivement,
autant que les déductions philologiques permettentdete dire.
des dieux spéciaux (A'oH<~ti~<T). Ceciest le plus évident pour
le plus grand nombre des dieux romains, surtout pour les
petits dieux des <H<~t<nmfK<« qui se répartissent entre eux
toutes leschoses de !a nature et des hommes dieu du premier
coup de charrue, dieu des mauvaises herbes ? 6). Do même,
les renseignements si imparfaits que nous possédons sur les
dieux Lithuaniens nous les montrent avec des noms parfaite-
ment ctairs, des attributions nettes qui embrassent pour ainsi
dire tous les faits qui peuvent intéresser l'homme et exciter
ses besoins religieux (§ 7). Le fait est moins patent en ce qui
concerne la Grèce et doit être décote par l'analyse. Mais dès
ASAH~RS. MYTjftiS g~

qu'une recherche untt peu


I.# 1. -1 1.a_
attentive s'exerce, les casde ce genre
s'aperçoivent en fouk. L'Attique comme Home eut ses petits
dieux spéciaux. Onai)nit
adorerdesdivinités chargées de faire
pousser les Heurs et mûrir les fruits. Ces divinités formaient
peut-être le fond de toute lu tégende d'Athènes, de Cf'crops
etde sesnttes, d'Hrechtheuset d'Erectttttion,
qui, eux.mûmes.
étaient de ia même nature, i) y eut le Médecin, le dieu
Médecin (§ 10; dont le nom d'Ashtépios.
tui-mémeanatysabte
(p. )G8!, n'est qu'une des multiples xppettations, dont les
autres formes sont Juson, Jasos, Paian 'te
purificateur), Chi.
ron. et toute cette série de divinités a nom en :i- Médos,
Modes, où se constatent toutes les variations
imaginables
dérivations adjeetives Médée),particuies ajoutées Potvmede
D'autres dieux furent desprotecteurs spéciaux du bien
pubtic
(Soter, Sosipotis, Soxon) et de ta cite (i; -)~. Leurs noms dési-
gnent leurs actions; les textes et les inscriptions les men-
tionnent comme indépendants des noms des dieux
auxquels
la mythologie savante les a accotes, comme des
qualificatifs.
Ainsi, un certain nombre de surnomsdes dieux sont des restes
de petits dieux spéciaux (§ 13). Même certains
qualificatifs
purement locaux qui semblent designer simplement le carac-
tère tocai du culte adresse à tel grand dieu, cachent au fond
un ancien dieu local auquel ce nom était propre.
Ainsi, avant
une 'n~ 't~ il dut y avoir à Argos une 'nv, (p. ~34).
D'autres, devenus de simples esprits comme Faunus (Phaon)
(p. 3~, ont été certainement de véritables dieux, ont
occupé les champs et les bois. D'autres qui ont été depuis
considérés comme des démons et des héros, ne furent
pas a
l'origine des âmes de morts ce furent des dieux dont le
cutte fut expliqué plus tard par t'héroïsation ou la divini-
sation d'un individu.
Non seulement les différents genres
d'événements, mais
encore les différents moments de ta vie furent dominés
pat-
des divinités différentes. II y eut des divinités occasionnelles
(.4M~<'N.(-~<), en plus des dieux spéciaux. A Rome, en
Lithuanie, dans les coutumes do la moisson de presque tous
les peuples européens, ils furent révérés à certains
moments.
lors de certains actes, pour certains besoins. En Grèce,
t'Eiresiônë fut t'équivalent de la dernière gerbe du folklore
germanique, commeMannhardt t'a montre. De même, tes Eros
furent les esprits protecteurs de chaque amour en
particulier
(§ tK).La dissertation que fait ici M. U.sur la notion du o~
244 L'AttNËKSOCMLOUtQfe.«07

de son intervention momentanée, de la façon dont i) peut


saisir et guider les hommes est un modèle du genre (p. 192).
Il est possiMe maintenant de chercher le fond commun sur
lequel se détache ia personnalité vague de ces dieux. Or, der-
rière toute cette foule de dieux, d'esprits, de démons, qui
peuplent t'espace et occupent le temps, c'est un même et
unique phénomène que le cuite cherche il atteindre la
lumière, qui, elle aussi, remplit et vivifie l'atmosphère et
mesure letemps )§ i2). L'adorationdes phénomènes lumineux
est un fait dominant c'est la marchedu soleil (lui détermine
les moments où doivent s'accomplir les actes; c'est l'orienta-
tion, la distinction du droit et du gauche, du levant et du
couchant, qui déterminent le lieudu cuite (p. t9t). II y a plus.
les cuites naturalistes eurent pendant longtemps la plus vive
innuence sur la moralité, et ils turent, jusqu'à des jours très
proches de nous, les agents tes plus actif." de la morale reli-
gieuse. Le soleil et le jour étaient pris à témoin lors des ser-
ments ils pénétraient la consciencemême du méchant, étaient
présents aux séances solennellesde justice (1!)4-18! Ht, pour
invoquer un ordre spécial de faits, tous ces caractères se
trouvent réunis dans le concept de Zeus (le ciet et aussi dans
le concept analogue deAux' dieu de ta lumière et de ta jus-
tice.
Ainsi, ni l'animisme et ta notion de la persistance des âmes
après la mort, comme le voulut li. Smith ni le monothéisme
primitif, comme t'ont prétendu \etckeret Schelling. ne sont
à ta base du polythéisme § )~ Le fond en est un polythéisme
primitif, à caractère naturaliste, fort peu religieux. Lesdieux
n'avaient que des formes vagues, avec leurs noms a la fois
trop taches et trop précis, à signification trop étroite et trop
peu vive. A vrai dire, il n'y avait tu qu'un minimum de
croyances. Celtes et Ibères pouvaient être dits < athées et
les Grecs pouvaient croire, commele raconte Hérodote, qu'ils
ont ct<' longtemps sans nommer les dieux et ont appris des
Phéniciens à le faire. Toutela race indo européenne dut pas-
ser par nn stade religieux on ni les noms, ni les notions des
grands dieux personnels et actifs n'existaient et où la vie des
choses et la morale des hommes n'étaient garanties et sur-
veillées que par cette foule indéfinie et peu forte des petits
dieux. Les religions celte, romaine, K''<*cque,ne sont qu'a
des dc~r'~splus ou moins éloignesde ce type religieux.
Mais, de mémeque le progrès linguistique consistait passer
– MÏTMËS
ANALYSES. ~4N
de termes trop spéciaux ou trop vagues à des termes plus
généraux et plus précis, à substituer par exemple &un tan-
gage trop concret et d'un emploi vague horade ses restreintes
acceptions comme le tangage des chasseurs), uue langue de
termes abstraits, suffisants pour une analyse précise (t8); de
mémo le progrès des notions religieuses consista dans ia for-
mation et le développement de représentations distinctes et
générâtes et qui fussent on même temps des représentations
de dieux personnels. Ici encore, le rôle principal fut joué par
l'idée deia lumière. Apollon, par exempte, fut celuiqui chasse,
talumiëre qui purifie (p. ~H') il devint alors le sauveur, l'écar-
teur, et le divin latros devint ou son fils, ou un simple héros,
ou un de ses attributs. Mais ceci n'était possible qu'à une
condition qui dépendait de l'état de la langue il fallait que le
sens primitif en vertu duquel la notion religieuse s'appliquait
à une classe d'objets, fut perdu. Le nom put alors devenir un
nom propre. Ht ta divinité, jusque-tà engagée dans les choses,
fut un esprit indépendant d'elles, personnel et dominateur.
Dès que ces notions furent formées, il leur suffit d'exister pour
se développer. Elles exercèrent une véritable attraction sur
les représentations des quelques dieux dont te nom n'avait
pas perdu sa valeur primitive et dont la fonction était encore
claire. Les notions d'esprits vagues, spéciaux ou occasionnels
ne pouvaient résister à des notions ainsi constituées. Elles
fusionnaient, donc. En vertu même des lois de la pensée, le
syncrétisme eut précisément pour but d'attribuer à chaque
grand dieu les fonctions des petits. Le polythéisme tendit
ators vers le monothéisme. Le syncrétisme est ainsi « l'un
des stades de transition les plus importants de l'histoire
religieuse, il est la préparation à la croyance en un Dieu ·
(p. 340). Ces notions elles-mêmes ries grands dieux, combi-
nées avec celles de tout ce gigantesque système de petits
dieux, fusionnèrent en effet dans des concepts nouveaux
celui du dieu qui est tous les dieux Panthée, Pan, et, d'un
autre côté, celui du dieu qui t'est, ptusque tous les autres,
le Of:; ~<!Tt. dont le culte favorisa tellement la propaga-
tion du monothéisme évangélique.
Mais, dans le christianisme, les anciennes notions persis-
tèrent, réapparurent. Les saints du catholicisme avec leurs
attributs et leurs pouvoirs spéciaux ne furent pas autre chose
que le retour ouensif des dieux spéciaux des anciens paga-
nismes (§S). Mentionnons, pour terminer, les deux disser-
!~C ).'ANKÉRSOCNMCtQU)!. tMt

tations de M. L'. sur les noms titeophores dans l'antiquité, ot


sur les concepts abstraits divinises.
Lu découverte par M.L'. do ces deux genres de dieux, dieux
spéciaux, dieux oceasiounets, est une de celles qui passeront
dans ht traditiot scientifique. C'est elle qui forme le centre
du livre et qui eu est le véritable gain. Les faits
que l'on
pourra considérer dans le même esprit ne puurrout pas man-
quer d'en être de nouvettes et Éclatantes confirmations. Les
auges du judaïsme sont, eux aussi, d'anciens petits dieux,
et l'étude de leurs noms, suivant ta méthode inaugurée
par
M. L' sera certainement féconde. De même un bon
catalogue
des démons auxquels crurent les Indous, uue liste (comme
cette de M. Crooke; des différentes < divinités qui
président
à tel ou tel fait dans l'Inde actuelle, fourniraient une am-
plification importante de la thèse de M. f. Celle-ci est d'au-
tant plus juKtequ'etteso trouve d'une application universelle.
Le polythéisme consiste précisément dans cette
muttipticatiou
des dieux pour tous les besoins de la vie humaine. Ainsi les
Nègres adorent lit petite veroie, comme font aussi les Hin-
dous, et ils ont des dieux guérisseurs comme les Romains eu
avaient. Lefaitest donciucoutestabte. Peut-être même devra-
t-on donner encore plus d'importance aux dieux occasion-
ueis. Il y a des dieux pour tout, disaient les Romains et
les Crées c'est précisément le caractère du polythéisme. Mais
ces moments de ta vie sont aussi nombreux que les différents
actes, il dut donc y avoir de plus nombreux dieux occasion-
nefs que M. r. n'en indique. fJc plus, deux classes de dieux
devrontprobabiement étreajoutees, irreductibiesaux autres
les dieux locaux, esprits de telle ou tette place, bois, vitte ou
maison, et les dieux individuels: car ieor: feCeuius et
la Juno ne sont pas du tout des dieux momentanés ils suivent
l'individu toute sa vie, ils sont son double et sou frère diviu.
Ils correspondent au totem individuel, au félicite protecteur
que chaque Xegre se choisit à son initiation. Ceci fait. ou aura
peut-être une classification des divinités du polythéisme.
Mais une iacune existe dans le livre de M. U. Les noms des
dieux ont, M. f. ne l'a pas remarque, une fonction religieuse
qui a dû les allecter. Un nom est, religieusement, une partie
de t'être qui le porte. Le conua!tre et le prononcer, c'est avoir
un pouvoir sur cet être, homme ou dieu. De là, le rôle du
uom dans l'invocation etta prière. D'autre part, prononcer le
nom d'un dieu puissant, dangereux, c'est vouloir sa présence,
ANALYSES. MmUift M

..8.1.1. t. .v .A 1-
et cette-et est redoutable. l<onom est sacré comme le diou;
aussi lie peut-il être dit hors des cérémonies nécessaires, H
(Mutmêmeêtre bien sur de la bienvoiltaneede la divinité pour
oser h) convoquer. Do ta l'interdiction de prononcer}enom du
dieu. L'étude de ta valeur ritueiic du nom eut pu mener M. U.
à des vues importantes sur la relation du rite et de la notion
religieuse. Tant que le rite agit par lui seul, sympathique-
ment, il n'existe pas d'agent diviu distinct des choses elles-
memes ainsi les sauvages qui assurent par des cérémonies
magiques la fertilité de leurs champs n'ont pas ou besoin
d'imaginer et de nommer un esprit qui y présidât. Puis, avec
te progrèssociat, intellectuel et religieux, la liaison du rite et
de l'effetattendu cessa d'être conçue comme immédiate. Le
Heusympathique lut figuré sous les espèces d'un esprit qui
imprimait aux choses la forme que le rite exigeait qu'il leur
donnât; il était la chose même et le rite à la fois, mais divini-
sés. Cetesprit eut donc un nom correspondant exactement au
rite et a son objet. Ainsi les cért'monies, destinées à assurer ta
vie des plantes, s'adressèrent à uueNutrix, àuueK~
C'est quand, par une nouvelle division du travail entre les
notions et les pratiques, le dieu, le rite, la chose se détachè-
rent totalement l'un de l'autre, c'est aiors que ta notion du
dieu devint indépendante de celle du rite et de celle de l'objet.
La divinité porte un nom propre devenue une personne libre,
elle n'agit plus que votontnirement. C'est alors qu'on la
prie et qu'on tache de lui donner tous tesattributs nécessaires
et favorables, et c'est ainsi que le rituel accéléra le syncré-
tisme même des idées.
Je me refuse à voirdans les déductions de M. U. sur le rote
de la lumière autre chose que l'un de ces systèmes de mytho-
logie qu'une philologie sévère, une sociologiescrupuleuse, qui
comprennent et n'interprètent pas, doivent laisser de coté.
XtAXCHt.MAUSS.

Eowts S!M<EY HARTLAXf). The legeud of Perseus.


A Study of Tradition in Story, Custom and Bellef
ft« ~tM~ /'<'M<t'),vot. Ht, Andromeda, Médusa.
D. Xutt, Lond., t896, in-t~, xxxvn.244p.
M. H. termine, avec ce troisième volume, son étude de la
légende do Persée. Un index à tout l'ouvrage, un supplément
bibliographique à la liste des livres contenus dans le premier
248 L'ANSÉBiiOCtOMM.tqUE.«M

volume, ajoutent encore à l'utilité générale du livre. Ici,


fauteur entre sur le terrain plus précis de ta mythologie. Un
enet, la naissance surnaturette du fils de Danaé )~' voL), la
façon miraculeuse dont sou existence était reliée à certains
objets (~' vol.) avaient couduit ~t. S. H. a rechercher !a
théorie générale de ta vie sociale et imtividuette qui est le
principe de toutes ces idées, et de toutes les coutumes qu'elles
synthétisent (1!I.p. 1S~. Les croyancesconcernant le système
de la parenté expliquent la naissance surnaturelle du héros;
celles concernant la magie, les ptuitt'es et la sorcellerie, les
rites du. mariageet les rites funéraires, te lien du sang, expli-
quent comment l'cime est indépendante de certains objets
extérieurs, peut vivre en eux, être aCectee par eux. Et tout
ceta, y compris l'épisode de ta légende où des animaux K'e-
riques et bons viennent aider le héros auquel ils ont <H.ele
plus souvent liés dès la naissance fp. 184, n2, table A), tout
cela a été rattache par l'auteur a cette conception de la nature
et de lit vie, universellement répandue, qui est à ta base du
totémisme, et qui est encore la couette profonde sur laquelle
repose le mythe chrétien p. i88-t9«!. La recherche, jus-
qu'ici, avait donc eu surtout une importance pour t' < his-
toire de ta constitution mentale de l'humanité et celle des
institutions. Avec le troisième volume le problème se cou-
centre. H ne s'agit plus que de mythologie comparée, et, qui
plus est, de mythologie et de folklore classiques. Les deux
épisodes qui restaient a étudier dans ta légende sont ceux
de la délivrance d'Andromède et celui du pouvoir de ta
Méduse.
La Méduse se présente avec trois traits principaux t" sa
tête éfhevdée le pouvoir qu'elle a de pétrifier 3" par un
seul de ses regards. Orle rapprochement des divers contes ou
légendes qui s'occupent un peu partout des sorcières et de
leurs enchantements de toute espèce, permet de rattacher
tous ces caractères a une origine rRtativement commune. Les
cheveux sont, en effet, dans une masse énorme de traditions,
les dépositaires de la puissance du magicien souvent c'est
avec un de ses cheveux, 'mi grossit au point de devenir une
chaîne, que la sorcière s'empare du héros. Rien d'étonnant
donc à ce que la Méduse soit figurée avec uno tête terrible.
En second lieu la pétrincation, la métamorphose d'un héros
en rocher, soit par une incantation, soit par un coup de
bâton magique, est un des thèmes favoris du folklore, et pro-
AHAMSBS. – MYTHES 249

bablement ajouterai-je, un thème général des mythes étiolo-


giques de telle ou telle particularité régionale. Eu troisième
lieu, que le regard ait précisément cette puissance, cela s'ex-
plique naturellement par les superstitions concernant le
mauvais mit (p. !43). La (uscination peut aussi bien pétrifier
que tuer sur-le-champ, ou rendre malade. Remarquons, d'ait-
leurs, que la croyance au mauvais œi) est toujours vivace
daus le bassin de la Méditerranée, où justement la légende
semble avoir le mieux persisté sous sa forme classique. Les
trois éléments du mythe de ta Méduse s'expliquent donc
tacitement, et fout partie d'un système tout ù fait primitif.
L'épisode de ta détivranee d'Andromédeest d'une tout autre
complexité, t'ne particularité le signale. L'aire géographique
où ou lui trouve des thèmes similaires est restreinte t'aneien
monde seul en présente, contes ou sagas, où une jeune fille
ollerte & une bête mythique est sauvée par un héros. Cette
légende existe aux Indes, au Cambodge, dans le Folklore
européen, méditerranéen, asiatique. Elle ne se rencontre donc
que dans les civilisations avancées (le conte iroquois n'est
qu'une importation Que le hures soit un jeune pâtre, ou un
fils de roi déguisé (Contes du berger, p. 9, suiv.), qui délivre
la fille du roi exposée; ou que le sauveur aitte, avec t'aide de
ses animaux bienfaisants, t'arracher aux enfers (Hercute,
Thésée, p. suiv.); qu'il ait ou non a combattre avec un
imposteur qui prétend avoir tué le dragon; ou enfin que la
légende se réduise à ta légende de Saiut'<!eorges, à la Saga
islandaise qui eu dérive, le fond du mythe est te mémo sous
des aspects différents, c'est un héros qui abolit un sacrifice
humain. Certaines pratiques américaines et africaines (p. '?<),
82, 83) nous apprennent en effet qu'on offre, dans les débuts
de l'évolution religieuse, une victime humaine aux animaux-
dieux, souvent une jeune fille de race royale, comme dans la
légende. Ces monstres sont pour la plupart marins ils
représentent l'esprit terrible de la mer, du lac, du fleuve ou
des marais qui répandent l'inondation, la fièvre, la mort. Une
reforme religieuse s'imposa dès le commencement de la civi-
lisation contre une coutume d'une telle barbarie. Le mythe,
le combat fabuleux où ces dieux sont détruits, retrace proba-
blement selon M. S. Il. un (ait historique qui s'est produit
dans différentes nations de l'ancien monde et où disparurent
ces cuites. Puis la légende, par son caractère poétique et
humain, eut tôt fait de se propager. La légende de Persée,
~U L'A~ËSOCtOt.OGtQUï.t'

comme un tout artistique et littérxire où l'épisode d'An'


droméde est capitai, est certainement asiatico-europeenne.
Des signes uou douteux de transmission existent (p. ~79).
Ainsi ta jeune fille éveille le plus souvent le sauveur qui
attend le dragon en laissaut tomber sur lui des larmes
(table 1). Un détail d'une telle constance prouve des emprunts
évidents. Un résufné, trois des éléments de la légende de
Persée appartiennent au fond anthropologique de ta pensée
ttumuine et des institutions sociales. Le quatrième a une
origine et une extension bieu marquées; il est le produit
d'une civilisation immédiatement antérieure aux nôtres, et
la légende entière ne s'est répandue que dans les sociétés
très civilisées du vieux (Monde.
Les trois volumes de M. H. sout d'une telle vaieur d'en-
semble qu'ils deviendrout rapidement indispensables uu
mythologue comme au sociologue. Les vues originales abon-
dent dans le second volume. Xecessairement 'tes erreurs de
détail se {{tissentdans des synthèses aussi vastes. M. Il. parle
fp. 75) du sacrifice humaiu comme prescrit par les lois in-
doues, ce qui est en partie inexact. Ht je crois qu'i! oublie
Pegaso quand il dit que i épisodedes animaux secourables est
absent de la te~eade classique. D'autre part, cette façon de
concentrer l'intérêt, non pas sur la recherche d'ensemble, mais
sur l'explication speciate d'un ordre très restreint de faits,
nuit a ia généralité, à la sûreté de ia méthode. En somme,
AI. H. bâtissant sur une dizaine d'épisodes mythiques, une
encyclopédie des usages et des croyances préhistoriques de
l'humanité, semble considérer les mythes comme des docu-
ments sociologiques et non comme des faits sociaux. it en
étudie le contenu et non la fonction. Or le mythe est une
croyance religieuse, et non pas une tradition historique le
mythe d'Andromède, par exemple, est autre chose qu'un
souvenir de la suppression du sacrifice humain. En tout cas,
l'épisode du meurtre du dragon, de la lutte des bons et des
mauvais esprits, fait partie de toute grande mythologie, cons-
titue par tui-meme un fait religieux. Mais M. Il. pouvait
dinieiiement faire la recherche que nous aurions souhaitée
en prenant la légende de Persée toute formée et déjà très
complète en Grèce. S'il en eut fait l'analyse histonquc, ets'it
l'etlt étudiée comme un tout mythique et non pas littéraire, il
eût pu trouver, croyonsnous, la raison de sa naissance et la
loi de sa fructification. Au lieu de cela M. 11.décrit fort bien
– MVTHM
ANALYSES. 8St
tes thèmes de lu tégeado. en multiplie les exemplaires Hse
soucie médiocrement d'eu déterminer lu place, it nousdonne
unejotie collectiou d'épisodes semblables. Ce qui uous instrui-
rait plus encore, ce sont los différences des épisodes équiva-
lents. C'est déjà quelque chose d'avoir trouvé des similitudes;
seulement on perd de vue la variété des faits et des conditions.
Tout finit en une analyse assex vague et des appréciations
quelquefois subjectives (Ex. p. U4 Je sujet révoltant du
sacrifice humain Mais it ne faut pas trop nuus plaindre
que M. H. ait été poète quelquefois. Le travail d'imagination
qui a abouti a la création do tout ce système sociologique,
greffésur la légende de Persée, a eu dos résultats scientifiques
assez considérables.
M.tHCHt.MAUM et ifKXM ffuBHRT.

ItEV,EuAS 0\EX. Weïah Folklore. A Collection of


the Fotk-ta-ïea and Legende of North Wales, ~96.
Owestry aud Wrexham. ~M'/orf ~<«o)' (Print. a. pubi.
by \oddai) Minshaii et C', in- vi.3~ p.)
La coitectiou de tegendes et contes populaires gallois du
Rev.E. 0. est un simple mémoire; mais le caractère de l'au-
teur, le choix de ses sources d information, le soin avec lequel
il nous renseigne sur lu localité, le moment on ses contes ont
été recueillis, la conscience avec laquelle il recherche les dif-
férentes versions d'une même histoire, doivent inspirer ia
plus haute confiance. Au point do vue documentaire, le livre
de M. 0. est certainement de réelle valeur. Commele folklore
de tous les pays celtiques, celui du Pays de Gallosest infini-
ment riche, inupuisabie presque 'V. Prêt.); la variété des
contes que M. 0. a enregistres sur une aire très petite de
pays, est vraiment étonnante. Un certain nombre se trouvent
déjà dans ie beau livre du prof. Rhys ))ck/t F<!tt'<r«<M.
L'ouvrage de M. 0. a pourtant sa place à côté de ce travail
magistrat, parce qu'il donne la physionomie complète de la
pensée populaire do tout un coin du Pays de Galles.
La série de légendes qui nous présentent des fées est d'un
réel intérêt. Les anecdotes que l'on répète encore sur la façon
dont ettes apparaissent, dont elles s'occupent des anaires des
gens, les noms qu'on teur donne, tout cela, M. 0. l'expose
très simplement et avec beaucoup do sûreté. Dans le pays
de Uaites ou dit que les fées forment un peuple, une tribu
3C3 L'ANNÉE )«9t
SOCMLOCtQUE.

(p. K).Ettesont unpaysoù certains hommes peuventpénétrer;


quelques-uns en reviennent. mais, à teur retour, meurent, des
qu'ils mangent. D'autres ont eu pour femmes des fées, et les
familles de rebouteux doivent, comme on dit, le plus souvent
à pareille origine leurs dons tiéréditaires. Maisces mariages
sout tout il fait instables, une infraction a une règle bizarre
quelconque et la fée disparaît (p. ~C, 29). 11 y a des fées
qui ont été prises d'autres sont des esprits frappeurs dans
la miue et le rocher (p. tt4-t!M;. Httes hantent surtout cer-
taines piaces dans les bois, où elles dansent pendant la nuit,
et elles y attirent des ttommes qui restent ta. enchantes,
sans savoir le temps qui passe. M.0. croit que ce sont d'an-
ciens lieux sacres. Ettes se mêlent d'ailleurs intimement A la
vie humaine, elles fréquentent les maisons propres, tra-
vaittent dans les fermes, font la charité; mais aussi elles
volent les enfants des hommes, les chungent contre les
leurs qui sont méchants, laids, malingres, et qu'it faut jeter
u l'eau ou exposer, à un signe quelconque de précocité
(p. !!4 et suiv.), si t'en veut retrouver le véritable enfant.
Tout ce tableau est fortanimé et fort complet. Et si on ajoute
à cela ce que M. 0. nous dit concernant les animaux fantas-
tiques 'p. t24 et suiv.), dont il faut rapprocher l'ensemble
des croyances sur les animaux et les bêtes, il ne restera rien
à désirer, je pense, pour avoir une idée assez nette du monde
où se meuvent les imaginations des paysans gallois.
Les histoires que t'on racontesur le diable ont moins d'in-
térêt, quelque importance qu'elles aient dans le fo~o;'<{<<-
loi, (p. t44;. Leur caractère local n'est pas prononcé. Les
légendes qui nous décrivent ses transformations, ses formes
habituelles, comment il acquiert les âmes, saisit les pécheurs,
sont trop traditionnelles et ont un caractère trop chrétien,
pour qu'on n'y voie pas un élément récent de la tradition cet-
tique. Peut-être les légendes relatives aux lieux hantés, au
déplacement fantastique des églises sont-elles des restes d'an-
ciens cultes (p. t74;. Des revenants, on ne dit rien de ptusque
dans toute l'Europe celtique; ils apparaissent chargés de
chaînes, ils font découvrir des trésors, on les exorcise, etc.
Les sorciers, d'après M. 0., sont l'objet de nombreuses
pratiques, de superstitions encore vivaces. Que ta sorcellerie
se perpétue dans certaines famittes, que le don de magie soit
souvent acheté par la vente de t'âme au diable (p. SH), que
les sorciers puissent se métamorphoser souvent en animaux
– MYTUHS
ANALYSES. 2<K<
(p. 2~4.S!T! il n'y a là rien que de très ordinaire.Maisla
façondont se jettentles sorts sur le bétail,etc., la façondont
onles conjure,ou dont onles rompt,ou dont on s'en préserve
(p.~48),sont souventcurieuses,quelquefoismêmeventabte-
ment Importantes.Les indications très brèves que M. 0.
fournit sur la notion de l'ttmeet de la métempsycose, et
commenton voiti'ame s'échapperde ia bouchedu mourant,
nousfontdésirer qu'il lesconptète bientôt.
Quantaux explicationshistoriquesque M.0. donne des
faits qu'il rapporte, elles ne nous paraissent pas avoir le
mêmeintérêt, et nous les avonsncgiigees.

XU'DCHS

.t. -– MtTHOt.OutK COMt'.Utt!)!


£

M.txML't.LHtt.– ct't~MM.

S. \()USK(' – ~jaeledyrkelso og Naturdyrkelse. Bidrag til


BeetemmoloDafden mytologisk Metode af. t. Xgvdf)o~ Hddu.
Xupt-uhit~ut;t,fh)omm ''t ng' t89U-

Ouvntftt'')'n )':tm!t cncut'e en HYt'ftisoos,et dont nous nous n'cr-


tuf)s tk' foit'c h' co)uj)tc rendu.

)'K)')').t:S SAt'YAt.KS

W.~M.MATTHHWS. Navaho Legends, oolleoted by. (~Mff/fM


~u)'<.Soc«' «"ton. )8M,iu.8".

d.-HAMtLTOXCL'SH)Xt:. OutUnes ofZuoi oreation myths (TVtc


<3"' .)M«)«f//<<<or< «y<At'BMf(''(t< o/'7:'</««'/w/ J.'W t'uwct), dit..
<89t-S. (Smiths'tniun txstitutc Wash., <896. <:ov.t'tint. utT.. )!<
in4°,)'. 39S-4t7.)
Tn's itttpottuntt' tnuno~t'apht' ).'aut<'u)'j't'st''dt' tt'~ ))i<t)t'ttistoi)'
''( tHt'nx*lit jx'~histoin' de tu jx'uphtdt' d"))t il tmitc. L'tt d<v<)o)))'c-
tnott, n)a))x''n'<'))!)n''nt court tuais tout afait ~'t))!n'')U!thh',sur)'or-
)<!t)tisMtiu)tn)yt)))'sf)eiutoj<i<)Uf'xuf!i, <st-a-di)'<' t~t~miqu< sur
icut a~mitM un fxposo d<tai))~, j'rot):d)I''n)''nt <)'' ~raudc
<:uit<'s
vateu)' ti)))!uisti)jm',des mythes <'t d''scuhcs foom'MS, voità ce que
t'utttieutccttt' )'at'ti<*tle cf bom voiump.

)).-< MM)M'OX. -The myths ofthe New World, A treatise on


thé aymboUsm and mythology of the Rod Race of America.
3'' cd.)890. Phitadcttdna.
~S4 JL'AKXÉESOCtOMOtQUE.f<~

C..M. PLEYTK. – An uapubtiahed Batak création Legead.


(~t«'M<!<o/'Mf.4M/Af./M~.), tttMT.XX\), 2, )'. tU3.tO'

TM. AC))M.tS. Der Gott Tané. Bim Kapitel aue der Polyne-
siMhen Mythologie, t8''7, ix-S

t). H)ti~(:K):X. – Die Sage der Ovambo vom Kaluaga. Bed.


St<;itc)))n)sc)).,)897.

M" t.LU)t PAHKKX. – AuatraMaa Tales ()t)'tudn.-tiu<t pat


)..tt)){;.Luxt)., )8M, Xutt, it)-8".
Uuth.'ctiot)i))t<?t'<ss)ntpd'' cont)' inAtit-

D' H. <t)<AX))S't'):TT):X.–
Malayo-PotyaesischeForsohungeN.
Die Or<tnduajjr von Wadjo. ).U!rt). His<n)ittt;, )8H6.ht-4", )8 ;).
Tr:n)ucticu d'Utt texte a-ssex))tt~n"<stmt.

i)' Heu. f.H~X. – Araukanische Meerohen und EriM9hlumgeN.


mi))<t)x'i)t ''<'))S<undnj!tt':t 'K~b'm), <t''s!))t)t)tt'))uott iit't't-Sf'ti!).
Y.t)))tn-!tiso.t)))pr'nt:tth'iuMh'<')'sit)ud,t;.))e))'ttiimnJ8U'i.in-8")t).
t)';stit"' aux t~udf' d<' tnythuh'i!)*'et futkton' c<jm)Mu's. t )) <;um(
t'~sttîu~ ')<' )a n'ti~i'Ut !U':m'ut' ht's ''as tt'r.s '-mh'ux d'' cu)n))at
ntythiqm' J'un )t''tus:ni'<' un t"-pt'it. t't df )t:t))ti' df ):t fiftttct'-cjt:u
~ot) !tt)XU)(mufL

A. St-:H)K)..– Geschichten und Lieder der Afrikaner, ttofit).


{696, SMtmUuod t.mm), 340 p. i))-'2.
G<j))cctiuut)'<'))spn)t'tf<)'' <tnt!'s )'t d<'<')<itu~t'ntt'ndus )«))' )'i[u-
h'ur, uu t'xtntit-')'< t'ruci)s ft-)'h)s)'A-t'<tt!i. )')t <'<')-(H))t ncmht't'ttt'
<tu))t)'s .ut' i'AMtjm- a)))-tt)!uh)';t't:u''nt itt'dit!i. ).<'
i'<'ns<'it:t)t'tu<'n(!<
aux ))~<'<sit<sd'm«' hutUtc criti'ju'
tm'). tiaus )'t'<'t';ntiu)), )'<~<'))tt

C.-– S)'KY)VA.L':f)H."YTO)!S

LY)')AS<:UfS<:m)AXUt-'t'– Légendes religieuses bulgares, tt;<-


duitt's)):n')'!t)i<,L'-t'ottx,<896.i))-tC,\)))-ÏOU)).
A iit~uttkrtt's contes su)' Cm-i~incou h's mœurs <).'sanimaux, ce)))'
<tfs t)))t!t''s, un cMt:)it) m'mt))'' d<' <utts d~peoda))) pt'ut-t'-tt-);J'iot-
cit'nncs(;ustt)0{!0t)i<i.

V.-A. t !)KCtHA.– Légende Romane. Viate in Treout. Reminis-


cente di. 3''<?d.Mucaf-Mt,Succeci). t89C,iu-)0, SOOp.
ANALYSES. MYTMRS ~SS

/–MYTtt <)).') <.)K!f)'))U)-)t(!Mt;<Tt))THS

H. STt CK):X.– Astraimythen der


Hebraer, Babylomer und
Bgyptor. t Th. Abraham. KeUerionsgeaohiohtUcho Unterau.
changea, t.)' t-:d. t'ft'tn'cr., tSuc.

H'dt'MyU).)~ic![!.tt'')))<'tt)i'(u''<())))))!))'.?<)))..)))(..
d'-st-M))))~).
faits
cht-mL-n).<,(<.sp)us))rt'-cit-ux('tttr<-h-s ))-sp)t)s.t.)i~).~()Ut-)'.tu-
t'-urcotumO )'))it()io)ti'(u<-m<t)t.
Lu th~i< ~u'-t'uh- tin thn' it tooit)-;
'h'v:dcut'()m'it'dt''tait.

):. HUtXEt.. Die Homonymie der Griochischen Gotter naoh


der Lehre antiker Theologen (~ft'«.)~' <'t~' ~tf <<«/ d.
A's'Mc/M. ~M. tt't'.«t.<t7. 7/t' A7f~f. t89' ))t. ).<)'

R(~)('<)'('spnhhnstt-~)t(-t<)))[<?(<')-'?dtf:St-('sj)Ut't)<'s'))'s~uyn)):f's
soit 'te CiL-~t'ot)et .)<'spttHosuph' su~ des (tt-umntait-k'ns.
([ni son)
!.i[)r)~'i''nst"!i)uxn)ytim)«);m"

Il. (!KLXHH.– Zur Armeniechea Goattertehre <'A.).)!. !)t) )49.


L'!)ut<ut'('h<'n'))<')<"itt)fr~)'"))t')'))as)".df- hm~
UM~mmUMn~q~yf~~t~p~
d<'tMt)h- imniL-nm-. syt-it-nm', ~rcctjtK-. t't df)n<)'' ft-
))u<-fut ht
)))ythu)u)!i<'uaUuuu)c.

A. i.EH~)<):. Mars, dieu du printemps, de l'orage et do la


fëeonditô (/<<-<)/Mj!.</('<(-f~<'(('~M//o-f~f,, ~7, j). nn8:i.
Htudc j'u tm'-H«)()iqtt)'([<-fo)k-)u~- et de )h)guisti.;)n-
cutMjon'-t'.
t'. t'E!U))t)Xt-)'. Mon fi). AM~<M <~ M~M~t~M~
/tc/w/w,
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t'oM'wt~ r<i<-
~wAfM'/c.

'rt'adu':tio)td''t<'xt''s)m)))it~)'!u')'MUtt'm't'Urt'si)))crfss!t))ts.

W.\).HSRt'tX;K. –Thé laughaMeStories. «:u<f. .Va<-Rr~f~


~u/«t /~«'/«'tr(t<f. T''xt'- :<y)'i:uj()''ave'' tr:tdu<'ti«)t. ).ut)<).,).u/a'
<8~.in-8".

L.-M.-J. t:AH~HT')'. .Greek folk poésie. ( y'<-a<M/.


)<-<7/<
7:'M~<A</
J.~<M«W-C~fH'<)t.')n<L.Xutt.i8M.

/–)~H~K~K

J. HH~ttAMPAttSOX~ – Thé non ohristian Cross. An Enquiry


into thé origin and history ofthe symbol eventually adopted
asthat ofour religion. )."))')., Sitoj'kttt Miuiihu)),<89)!,394p.
ASAÏ.Y8KS. – OMAStSATtON PU CULTE 367
1_- ni _u. -I!IL, _llu. &h.<i..
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)~<tU'XXH. –Studionzurvergletohemdem ReUgionswiaseNS-


ohaft, ))f. Das Zoiohon des Menohsenohaea und der Doppel-
sinn des Jonazeichens. <.)nss''ttnu') Mak'ri:)th')t xm' EHdNnm),
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<n<)tt)f.M.n.)tnus)n<)))tt<'cntn)t)''t)t)')))M~i)):ttiun)'")'ui:ti<'<'r'
t't'at't:titah')'.<t<'<
(th't-t's~pisuth' d'')u tt'fHtitiunhi))ih)U'ty\nyaHsur
t('utd''s[):)t'!t)'nt')'!)Wi('uii'ti'ut<'ntint')'<tttt' S
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t~tKtcst'ctath's!m.Ht)ci).'nn''< rP)!r<nt:)tiun!i ')u<;u!)c(j). 200i-uiv.).

Y)t).–UM'.AXtSATtuXttt'Ctt.TK. MCXAOnSMH

Dr 0. ZOCKLER.– Askese und Mœnchtum. ~«vt~ <y«))j


lich Kftt&<w<'f~c/<'«))(/ .<<«/'& .tM~<</ff < Kri-
cM'Hx'/tt'tf
tischen Geaohichte der Askese 'Ascetistne et Mona-
chîsme). r' v. Frankf. a. M. Heyder u. Zimmer, 18!)~,in-8".
vut-3Mp.
Le livre de M.Z. s'adresse expressément aux sociologues.
L'auteur espère que son livre excitera quelque bieuvciHaut
intérêt chez les represeutants de la science uujourd'itui par.
ticutierement en vogue, la science sociate Sans aucun
doute, ceux-ci lui doivent dès maintenant plus que de l'in-
K. DrmiMM.– Aonec ««.'iui. tS97. n
2S8 <?
!ANSËË~CtO).OG)0);E.
tA~At t)n)t.tn!f.t).)..n.n~t!
térét. Ils lui doivent t~
la plusvive attention. En premier Heu. la
méthode suivie est la méthodesociologique même. Les institu-
tions sont plus l'objet de la recherche que les individus qui
les ont vécues ou façonnées. Car M. Z. étudie ce que le besoin
ascétique de l'humanité estdevenu dans les différentes condi-
tions sociales, ce à quoi ses(ormes ont correspondu. Ensuite la
méthode est strictement et sûrement comparative. Les mani-
festations ascétiques de lavie religieuse des différents peuples
y sont soigneusement rapprochées, les ressemblances mar'
quées, les dinérences observées. Entin, cette comparaison
s'étend a toute l'humanité. L'étude des sauvages, des religions
du nouveau monde avant la conquête tient une place impor-
tante dans ce livre. Aussi l'auteur peut-il ahontir a un clas-
sement, à une sorte de hiérarchie des types d'ascétisme reli-
gieux réalisés par l'humanité. Tels sont les très grands
mérites de l'ouvrage de M. Z. à notre point de vue. D'un
autre cùté, ce livre sera pour tout le monde la source
d'excellents renseignements bibliographiques, et, dans toute
la seconde partie de ce premier volume, l'ouvrage est fait
d'âpres les textes eux-mêmes,établis et dépouillés avec une
critique judicieuse.
Le premier volume ne met le lecteur en présence que d'une
partie des faits. Tout ce qui concerne l'Europe occidentale et
catholique, d'avant et d'après la réforme, sera l'objet du
second volume. Mais)e premier forme déjà un tout complet,
et décrit l'origine et la naissance du monaehisme.
M. Z. débute, en bonne méthode, par une définition. Certes,
il procède plutôt par une recherche du sens du mot ascétisme
et des dinérentes acceptions qu'il a eues au cours de l'his-
toire il définit étymologiquement l'ascétisme comme étant
l'exercice corporel et spirituel au cours d'une vie religieuse
qu'il s'agit de perfectionner.
Dérivant immédiatement, selon lui, dece besoin d'expiation
et do cette sensation d'imperfection qui est à la base de la
pensée humaine sous toutes ses formes religieuses, l'ascé-
tisme est universel comme la religion elle-méme. Lo pro-
blème de son origine historique ne se pose pas. Dans toute
religion un élément de privation et d'amélioration a existé, tl
n'y a aucune raison de croire à une propagation d'un pareil
besoin (p. i, p. S Cf p. 13,p. 3) Telle est l'extension et telle
est la nature du fait. Les formes s'en peuvent facilement
classer. L'ascétisme est ou individuel ou social. L'ascétisme
ANALYSES.– OKGAtOSATtOft
DU CULTE 8C9

individuel est toujours négatif, il consiste dans des douleurs


que l'individu s'inflige diète, privation de rapports sexuels,
familiaux, recherche de la douleur. L'ascétisme, quand il
est ti la fois individuel et social, est toujours positif et vise
une amélioration à lit fois de !a religion et des individus
augmentation de la vie religieuse, de ta part faite à la prière.
augmentation de la pieté intérieure. Ennn, l'ascétisme soeia)
est positif eu tant qu'il prescrit le travail, la prédication, la
contemplation ou n~ittif en tant qu'il aboutit a des règles
de pureté monacate. de pauvreté, d'humilité. C'est sous ces
différentes rubriques que M. X. classe avec soin les divers
systèmes ascétiques qu'il étudie.
AI.X.sait l'universalité des principes ascétiques. )[ais,non
content de la déduire, ii la prouve. A vrai dire, on n'en trouve
naturellement chez les peuples primitifs que les rudiments
mais les privations, les émotions douloureuses infligées au
nom des principes religieux n'en sont pas moins fréquentes.
Les pratiques sauvages d'initiation, les épreuves qui accom-
pagnent le mariage ou le deuil, la circoncision, les lustrations
nombreuses, sont les manifestations de ce besoin de douleur
et d'humilité que la nature imprime a l'homme.Au Mexique,
au Pérou, nous voyons poindre des organisations ascétiques.
Des groupesd'hommes et de femmes sontconsacrés au culte et
soumis à des privations sévères (p. Mi et suiv.). Mais ia terre
classique de l'ascétisme fut t'tode. Nonseulement le christia-
nisme n'en a pas le privilège, mais encore le monaehisme
même fut représenté, organisé, régularisé chez les Indous
bien avant l'époque chrétienne. Dans la période antéboud-
dhique, l'ascétisme fut, ou bien un acte momentané, par
exemple tors des préparations au sacrifice, ou bien une habi-
tude constante des brahmanes qui se retiraient dans les bois
pour méditer et réciter les livres sacrés, et suppléaient par
leurs privations et leurs prières aux actes matériels du sacri-
fice et de la piété extérieure. Certains d'entre eux surtout,
pendant la lutte avec le bouddhisme, les gymnosophistes
que nous décrivent les voyageurs grecs, parvinrent a nn
ascétisme fanatique. La réforme bouddhique eut au contraire
un caractère modéré (p. M!). La vie du Bouddha, celle qu'il
recommandeà ses disciples, n'a rien d'absolument mortifiant.
Mais la nouveauté importante du bouddhisme, ce fut la
création d'une communauté, la distinction des moines et
des laïques, ta constitution d'une règle monastique, t'étabtis-
2<!0 L'ASXtESOOOLOOtQUË.
~9'
sement de monastères. Les excès qui se produisirent pro-
vinrent plutôt de ia tuttedu brahmanisme et du bouddttismc.
On sait commentte premier a triomphe aux Judes et quelles
sont les pratiques actuelles des faqirs. Quantau bouddttisme
finnois et japonais, it n'a pas fait pénétrer bien avant l'ascé-
tisme dans la vie des fidèlesai mêmedans la vie monastique
et peut-être, dans l'organisation du bouddhisme tamaïque
du Thihet et de la Mongolie. se trouve-t-on en présence
d'influences chrétiennes dont t'tnstoire s'aperçoit de plus en
plus.
L'Occident présente des phénomènes infiniment moius iso-
lés les uns des autres. Eti'on se trouve ici en face d'influences
historiques multiples et entre-croisées. Les romains ccunu-
rent, pour ainsi dire, un minimum d'ascétisme. Les seuls cas
réeiiement nets étaient ceux de ces prêtres qui, comme le
~OMff/i'.fJ/«.n~«. iesVestates. étaient accabiés d'une série de
prescriptions de pureté. ))e mêmechez les Crées, l'esprit reli-
gieux n'était que secondairement ascétique if devin était
soumis a des règles de jeune, de mémo le sacrifiant, t'initié
de certains mystères, mais le tout était peu grave. Ce fut sous
l'inlluence de l'Orient quet'Orphisme, probablement, se déve-
loppa et proclamaque t'ame était la prisonnière du corps »
'p. tuf)). Cefut a l'imitation de i'È}typteque Pytha~urc fonda
une véritable secte ascétique. Poursuivie par Platon, ie Por-
tique, et surtout le néoplatonisme, lu tendance ascétique
persista dans la philosophie grecque et finit p:)r t'absorber
entièrement, à l'époque de Porphyre. – Pendant ce temps, !e
groupe sémitique faisait une part de plus en plus grande
fi l'ascétisme. Nous ne savons que peu de choses des cultes
phéniciens ou syriaques, mais ils faisaient certainement
subir a leurs croyants de suflisantes épreuves. Sur ce fond.
tes pratiques juives se détacheut. Ce n'est pas qu'etics aient
été en aucune façon dirigées vers autre chose que vers le bien
moral et pratique de l'individu. Maisla Hibteeonnait t'<HM(!A,
la peine infligée à t'ame, le jeûne à l'occasion du vœu. des
fêtes expiatoires, à ia veitte des fetesde communion. La légis-
lation tévitique impose au prêtre de nombreuses règles
de pureté sexuelle et autre. Avecle développement du ju-
daïsme et de ta synagogue, tes jeunes se multiplient. L'exalta-
tion do toutes ces expiations accomplies cause des malheurs
d'Israël donne naissance à t'Essenisme, qui, à partir de la
destruction du temple, se voue (p. <2S)à ne plus manger
ANALYSES. OHUANtSATMNDU CUt.TH 26)

d'aucune chair. Le judaïsme extra-palestinien avait déjà pro-


duit, à Alexandrie, sous l'influence combinée du t'ythxgo-
rismo et des groupements cryptions, t'hilon, le Traite do la
vie contemplative (que M. X., avec les derniers chercheurs,
reconnaît authentique) et ia secte philosophique et religieuse
des titerapeutes, qui. soutnise a des règles précises d'absti-
nence et de piété, fut le prototype de l'organisation monacale
thbaine.
Lemonacbisme même n'estdonc pas spécialement chrétien.
Mais, d'autre part, il est évident que les formes do ia vie
ascétique les plus parfaites ont été réalisées par le christia-
nisme. M. X., de conviction fortement chrétienne, fait de
celui-ci l'aboutissant de toute l'évolution antérieure. L'ascé-
tisme chrétien est le dernier en date, le premier en achève-
ment. Citez les musulmans il consiste en de simples priva-
tious, et les quelques associations religieuses qu'on y ren-
contre proviennent d'imitations chrétiennes (p. 309 suiv.). H
ne s'agit donc que de savoir en quoi consiste le progrès que
la religion chrétienne lit faire à l'ascétisme.
Or, chose curieuse, il est impossible, selon M. X., d'ad-
mettre que le christianisme ait été à l'origine, « au temps du
premier amour une religion ascétique (p. 1H7).Lesdisciples,
le demi-frère de Jésus étaient mariés. La mortincation de la
chair, Paul même ne le considère pas comme essentielle.
L'humilité, le dédain des biens extérieurs sont prêches; mais
le jeune n'est admis qu'à un rang secondaire, les privations
excessivessont blâmées. L'ascétisme fut donc le produit d'un
développement ultérieur, et non pas un fait originel. Les
jeunes répètes apparurent les premiers, dès avant l' Ensei-
gnement des Apôtres livre du <r siècle, mais peut-être
y a-t-il là une influence montaniste. La séparation des sexes,
ta chasteté dans le mariage ne furent que plus tard des faits
fréquents. De même pour le vêlement, ce (ut par un renché-
rissement mystique toujours plus fort dans l'imitation du
Christ, que certains chrétiens arrivèrent à ce goure d'ascé-
tisme. Enfin, les nécessites de prier furent longtemps modé-
rées, les veilles et les nuits passées en prières furent rares
pendant les deux premiers siècles (p. 1G8suiv.).
Maisles besoins ascetiquesaugmentaicnt; l'influence mani-
chéenne agissait vivement.L'existence.à Hierapotis.à Alexan-
drie, de nombreuses sectes d'ascètes, d'individus pieux, exci-
tait et préparait les exaltés. Le monachisme débuta sous des
?2 1897
L'AXSÉE SOCtOLOUtQUË.

formes diverses. D'abord ce furent des ascètes agissant indi-


viduellemeut, sans règles, pour leur salut propre. Puis un
certain nombre de tentatives sociales ouvrirent la voie au
mouvement. Cefurent !a secte d'Origene, moyen terme entre
une église, une congrégation et un simple groupement; les
ascètes voyageurs qui, eux, eurentdes rentes rigides, mais ue
se réunirent point; les moinesd'Kusebe qui eurent une orga-
nisation, mais menèrent une vie séculière; puis, cesertnites
qui partaient au désert et y menaient la vie anachorétique, à
l'imitation de saint Jean-Baptiste. C'est sur ces dinéreuts
mouvements que vinrent agir, combinant les traits de cha-
cun, saint Pakhùme et saint Antoine, dont l'histoire ne nous
est parvenue que moitié authentique et moitié légendaire,
mais qui certainement groupèrent et réglèrent les volontés
pieuses, tout en les retirant du monde.
Le caractère doux, profondement céuobitiquo du moua-
chisme thebain (p. ~0)-3), se perdit rapidement. Ues excès
d'érém~tisme furent fréquents (p. 234~.L'isolement, ta mys-
tique, aboutirent à des raffinements ascétiques (stytites la
prière envahit toute la vie, absorba le sommeil, en même
temps quelle devenait mécanique et vide. On tendit par
l'extase au néant. Surtout ou supprima tout travail, tout
commerce avec te monde. La vie mouacaie et contemplative,
l'ardente qucreite dogmatique qui se poursuivait dans le
monde chrétien surexcitèrent te fanatismede certains moines;
de là de terribles rivalités d'écoles, des accusatious de
schisme. Le nestorianisme se constitua alors, avec ses vertus
d'expansion et d'ardeur dogmatique. L'intervention des em-
pereurs byzantins dut régler tout, relations avec les pouvoirs
temporels, ou avec t'Ëgtise séculière; le cénobitismefut favo-
risé. Et c'est de là que vient le caractère générât du moua-
chisme oriental, russe ou anatolien, ou grec de grandes
communautés. ceiledumontAthos par exemple,vivantabsotu-
ment isolées, absorbanttoute t'intettectuaiite du culte !p.309),
eu satisfaisant tous les besoins généraux et purement reli-
gieux tandis que le clergé séculier, trop engagé dans la vie
du peuple, ne peut avoir sur lui d'influence morale.
Du point de vue sociologique, le livre de M. Z. ne peut être
considère que comme un essai, si fructueux qu'il soit.
Quoique toute conviction religieuse soit permise au savant, la
science ne tolère ni tes définitions a ~M'«M-<,
ni les vues a ~'<nr<
sur la linalité de l'évolution. Or, la définition donnée pour
ANALYSES.OttOAXtSATtOX PUCULTE 263
,_r.
.l'ascétisme est en somme la définition chrétienne, et les vues
de fauteur sur t'évotution historique sont aussi
théotogiques
i) so trouve qu'en procédant ainsi. M. X. a confondu des
choses qui doivent être distinguées. L'ascétisme ne fut
que
tardivement la manifestation du besoin d'expier un pèche, et
le monachismo ne lui est relié que dans un petit nombre de
religions. L'ascétisme comme tel, c'est-à-dire eu tant qu'acte
conscient de privation ou d'exercice religieux, est plutôt
récent. En règle générale, Il est toujours indivtdue!, et ne se
fait jour que lorsque l'individu a acquis une valeur sociale
et religieuse sufïisantes. Aussi n'a-t-il été réatisé que dans
les Indes, dans les sociétés sémitiques et chrétiennes. Il
importe, en effet, de refuser te nom d'ascétisme à toute
cotte classe de faits qu'on appellerait mieux les interdictions
rituelles. Celles-ci ne sont nullement infligées par la société
a l'individu à cause d'un besoin mystique de la douleur et
d'une croyance à la vertu de celle-ci. Tel ou tel aliment, le
porc chez les juifs, par exemple, fut interdit, non pas en vue
d'une privation pénible, mais parce qu'il était
marqué d'un
caractère religieux. De même, la circoncision, les épreuves
de l'initiation furent bien intentionnellement
douloureuses;
mais la douleur n'était pus le but, elle était l'accessoire de
rites qui avaient pour fln l'admission de l'individu dans la
société religieuse. – L'ascétisme proprement dit fut l'exalta.
tion de cet accompagnement ordinaire de tous les actes reli-
gieux. Les interdictions multiples qui régiaient la vie du
grand prêtre, des lévites; celles qui enserraient, à Home, la
vie du /~M<-K </t«~. servirent de modèle à la constitution et
à l'organisation de la vie sainte. La vie la plus
religieuse fut
celle qui supportait le plus d'interdicliuus; elle fut
ascétique,
mais l'ascétisme n'est qu'une fructification du
système des
interdictions rituelles; celui-ci n'en est pas une partie.
Une chose ressort du livre de M. Z.,
particulièrement des
dernières pages de ce volume c'est une théorie
socioiogique
de la formation des groupements monacaux. Une société
religieuse étendue, comme le bouddhisme, le christianisme,
embrasse nécessairement des individus de religiosité
diverse,
les uns métés perpétueHement à la vie du siècle, les autres
attachés à leur direction. H n'y a pas, à l'origine, d'organe
qui prenne sur lui de concentrer la vie religieuse, de prière
et de méditation. Des individus isolés, seuls, pouvaient le
tenter; ce turent tes ascètes brahmaniques, les ermites chré-
364 L'ANSÉE SOCtOLOOQUE.~?~

tiens. La formation d'un organisme religieux assumant pour


lui le travail d'expiation nécessaire à cause des pèches des
autres membres det'Hgtise. suppléant par la constance de ses
prières a l'ancienne perpétuité des sacrifices, voi)à quelle fut
la cause sociologique du monaeitisme. Al. X., si je t'ai bien
compris, t'indique. Mais, ici encore, la considération des inter-
dicUous rituettes eut pu être décisive. La consécration reli-
gieuse de tout un cottege de prêtres, ou de jeunes filles, ou de
jeunes gens. u un dieu, est un fait d'une extrême généralité.
Ce fut évidemment un prenuerpas vers l'organisation monas-
tique. M.X. connaitces faits, il neles metpasàteur véritable
place. Ils sont l'institution même. et cette-ci n'eut qu'a être
adaptée à des besoins mystiques nouveaux, a servir a une
division du travail nouveau. Ceci pennet de comprendre com-
meut le cotise du Serapemn put Mrc imite par la secte des
Thérapeutes, et celle-ci par les premiers moines chrétiens.

XU'nCHS

M. t-'KHf~A~. – Sexuahnystik der Vergangenheit. i8t)U.


in-8". fC. Il. in tt'f)t'/te<Mt'/<)'t'< /Vj)'h~«. xtv-2~ p.;
C7<M.<«'j<'
/N<-
!)' M. H):)M)Ucn)-:K. – Die Orden und Congrogationen der
kathoUohen Kiroho. SchunioMh. )':hh'r))'j<'n, tsu~t'ettiK~ 'tans
un csjtt'it cattu'ii'jm-

WOOUH'))SR ~f. – MonastioiNn, anoiemt and modem.


in-8' t:at'dt)(T Darton und C", i.oxd., )~7.
TH. MOMMSKX. (.V<«M..h-t-/«'t' CM~y. <~<f<-e~K~-f-Ae
CM<«-
c/)<~MHf~XXtt, 2.) Das Nonnen Attor.
HBv. P. L)M):tU':K. – Tha BeUglons Orders in the Roman
Communion. :(.'«M<cM/<.Aft't'ot' LuuJ., p. 5~2-9t, <8~.

XUTtCHS btVtiHSES
SL'MLES (.)t.~UHS HKH'.foXS HX <:ËXËHA).

/<.–Co~ST)T<'Tf"X KT OKYKt.OO'KUKXT t)t: eoUMS


H~UKAt~L't!t:T )SKAt:LtTK
JACUHS. –Jewish Ideals and other lasays, )896. (.oud. Xutt,
in-8°, xvm-242
Contient un pssai d'histoit'e phitoMphi'ftc et rapide des ;))tases par
lesquelles a passe ta notion de Uieu et) tst'aët (p. 28-6~! un autre
ASAMSËS. – KOTtCRK !:U~ LES MEUGtOKS 26S

sur ta fa'on dont tes Juifs servirent A lu ditTusion des contex popu.
on<tottt)('sJtuf!i'!<'rvir<'ntA!!t<)i<Tt)!:i.)!).)t~it)h.x)!«mt.

tairesd:t))s)')tntiqui)~<-) au moyen.~e()<.<3t,tSS).

M. m<A)-:TXSC))MA«.
Die BundeevorsteUung im Alten Tes-
tament in ihrer geaohiehtiichen Bntwiokelung. Miu'hurx.
Hh't.'rt.iM6,in-8').23tp.
L'auteur étudie d'tt)) point de vm'expressetnenttiteuto~ifjue et
co)t)tt«'t)t.-i'it t)<h'(')(f~;j~'
j)))t)<))t~i<;o<' <'ftf'.df'sttfK-):)ootioft de)':<)-
)m))CMMV''cMt.'n.C't"i)d'a))ur<tun('")ttr!ttat'<'u)uj['!mn!tnt)m)'it<'d'a)-
iMnc<nt)-U<)nt-,h-))tus.<otm-)ttf'at-tt'.s:u)K. Puis ct'th'institution
s'Mtd(''V(')upjn''<'('nut)<'a)tinncf'd'it)tt''t~tss))i)'itm't!i<tM('t'j't'<')))it')'s
)))'uptt't('.<H('ro)))tut'ntpas,tt)!ti')ui!i'<tcunstituc<'i)ucuUMdt'kt
rédaction duUcut't'ot)t«))t'<t du t~viti'ju'

D' H. SHH.)'<. – Boitrae~e zur israeUtisohom und Judiechea


BeIigioN9~Bohiohto(H.)). JahwoB VerhœltntsBzumïaraeUti-
sohen Volk und ïndMduum, nach altisraelitischer Vorstel.
lung. Lf-ip: th-it'hcrt, t8M, Ytn-StOp.
Le ~t'it'nx int~t'~t de ce )i\n' f'oo'ii.stt-il )n"tttt'<'r t)u'ii n'y n )<:tseu
dh'f')'.<it)? d'' Ja )'f)i~i<')<{'uftthtit' ft d<' lu n'Ji~iun des
<)'i)).<))irit)it'))
;)t'"t'h'tt's.!h''s)'tt)'));it)')att-Mditiunh'))nu't)tK'tnut)tr!utd!U~Di<'u
Ut)'t)(')))n)-id''tnf'nt))ttiMS<.)upt'))ptf'tn).2))t!tr)m)icn~rit)utir.
Le jn'a~W's:[ cunsistt'-a mtfinK'tttft-le c:u':n'tf't')'tUt't'itt de ce lieu, Mms
tjtt'i) soi) )n~.<i)))<'dt')):u'i'')'d'tt))<')'<u)uti<)ttp)'")'t'enx'))t dite. J)p
m.i(n'')'<mt-)<?c)Uin;t'n-)))unttdei!tt-e)i);iot):!tt)-Mt!;itn'y!) Il
don'' :)U<'nm'diOexince de uatm f, il n'y eut ([(te des din'et'encexde
degt'e!.entre les divers toomeots df )'))et))'a!s)ne.

HAv. H. Mt'f.LHtt. – Die Propheten in threr urspramglichen


Form. Die Grnndgesotze der ursomitischen Poésie, etc. t. B.
~'«~. A'/x' \\ien. t890, Hoider.

P. tMLX.– Die VorexiUsohe Jahweprophetie und der Messias


<:f)tti))get),Vund''n))u(-k)U)d)tuim-t;ht,in-8~,)897.

0. XAUtA~X. – Das Deateronomium, das prophetisehe Staats-


getetzdeethookratieohonKœnigrthums., t8U7,Ht't'tetsm.f.ittet's-
ioh.

CO.'<ST<TCT)OX
t)H LA SYXAt;f)t:UK

Eu. MEYEM. DieEntatehungdes Judentums. ttxttc, Xiemeyo-,


i8!)6.Tt-esi)on.

MAXQ)ART. FuNdamemte attisraeUtischer undjadiaoher


GeseMchte. CStt. Dietenct), <M<t.
~S6 L'ANSÉË SOCtOMGfQUH.<M~

A. H.Ut~ACK.–Uber die Judonim BoeporantMhemReiche und


die OenoBecnsohaftender ?: ~«v'it ')!~7~j,t~~v ebendasoibst.
&<-<-
[~f'<?. < A.
~-<-MM.~A<)< tt'<«.~<-f<.M)'<.//t' A'<«M<)<.) 8i)7.
M.FHtEOL~MËK. –DasJudontumimdervoMhrbtUchengrie-
ohiBohenWolt.\Y)L-t),n)'<'it'-t)steiu.
iM'?,in.x'j). ())n)~htmt.)
– CHianteoedenti :torM del ohri6tiane9imo.
Y. A).\)UAXU.
C«(~<w<«. ~M~f'ff, vui. LXVH,fasct.;
(.Y'««M

N. – CtHttSTt~Xt-'Mt!.FuKMATt'JXM~'DU'JMH

A. M.U~ACK. – Die Chronologie der AttchristUohon Litora-


tur bis EuseMus. ï. B. Die Chronologie der Litoratur bis
Ïrenaeus. U'ip! iïintichs, 1897,ia-8°, x))-32 p. '.(;Mf'/<.
(/t/<t-At-M.
~K-/<ft<
/.)'~<?~«-, )) Ttn'i).~
Outt'c <jtt'i) Mtun adtoiraht'' in'.trumfntdM travaii, ce )iv)'<'it plus
qu'un intMt histm-hjtt.' un phitu)u)!i')U(-.Car suut~-nit',ct'tnmc fait
M. !)., contt't' toute )<t rtithjm' bibH'jm' d'"} cithtuantc dcn)if'rc"<
aHUccs, );( n~'it'~ histt'ntfu'' de ht tmditiutt an 0- (jui t'mtt't't-n'' les
textes et leur .mciftmet~. c'fst n'txfttt-f h's ~tud''s en c'-ntact ovt'c
t''s htits j'tus <(u';tv<-ch", tcxt'-s, t't par ce)!) même ubji~'t u voir
dans!fc)u'istii)tu-))te M)K-i';nautn- <'))<jst't)u'unt'nch'tt'f)ncttt de
duettim' et d<' tt'iuJitu.'))~,<j)t'uu chut' d'id~ htditidut't)'<, mmA
bien <;)'<{u'i)fut, un imn)''n' tnuuvt'tncnt puputaiff duut)t'.< tfXtfx
ne font tjtu'.t')'tr:K't' t'!ts)n'ct intcttcctm').

Die Griechischen ChristUohen Schriftsteller der esten drei


Jahrhunderte. //<')' < rf. ~MMt'M. < A'~<./'<-<'«.!<t~«/. <
«7M.) )t'-)-ti)), )897.

Sontt'mu'i Hiptutytus \t'k' t it. t tt:i)te. ftonM'tsch. Il natftc.


Ach<-)~.
Orij~em's Wcrk' H. t'. Kot~-hau.

t*. WKHXt.H. Der Christ und die SOnde bei Paulus. t'r. iH,
Muht-. t~.

J.-J. t.!AS. –ThoNicoene Creod. t807, in.S", LonJ., Sw:mut Sun-


neosch~'in.

AfAïnox A.UJ.. – Oeschichte der Logosidee in der Orlochi-


sohen PhUoaophie. ().cipz., Ht'i-itand,m-S", xx-25i ;<.)

M. Aatt iiuutit'ttttjtn: c\t ():)))fsit)))'tcd'~f)o))j~'ntc))t du concept


grccduLfgo~ (jue ~'(.~t)~<')M<'ec)ifz t'hiJuttia ~Mti~H,<tS(.'ttt!ci<c<httM
ANALYSES. NOTICES SUR LES MUGMSS 86f

h'christitmismfdu Lu~, divin.Il poswpiutût la qm'stiouqu'it m;ta


t~fouL t.ur~m; fera rusutucc'-ttctpx'sUon d'histoirt', il ft'ra, uturs
df partt'r en~ucioiotiie
:!t'u)f)))''nt,j)G)')nis de )ttfot'MMtiot) du dogtn''
c))n*'<it'n.
A. LOtSY.-< Le prologue au quatrième Évang~Uque. (/<<
<<< ef </<'/.t' ~W.. <M'r tt, t, janvier, p. 43-(H;nta)'!),2,
)'.i4t-tOt,3,t)tM),t'.2~-268.)
L'auteurmontre les notionsbibtiques et apostoti~UMS
du )<<)j:o'
de lit phitusophieH'qu<
rt'joi~uatttles jfriucipK!!
H.-L.OTTLHY.– The Dootrin of Incarnation. Mt'thm'aaud C'.
<8~, Lund., in-8'.
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!t. Ctar. Prcss. Oxf., t89'
OuvragecupitM),pum' t'~tudc du lu fornmtit'ttd<'s'~tisfii ''t))'
tit'ntx.'sd'AsieMineure; montn' h.'scunttit.st't )< it~e)'ft''t'(.'nt;t."i(pii
produisin'nt t'ntt'f h"! Mtn'x.'nscu)t<'sf't h' «ou~'an ()'<'nst')Mt)<
tncnts disst'-tuittt'ntuis de pt'onK'revaieur).

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tt.M.MutUIMKtt. H'CK"<:K FootpriNtsof thé apostats. Lunx-


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toire coolosiastiquo de Bede le Vénérable (/~f. (/f. (/M
/XXX)V. M-8S. t4:n:i. 296-3)5 t'it t'hi.Onirt-, d'apt'f's
)t<<.t'd';t!t''<)))Y<')~iu)t<t)'sA))).!):)i.<:tm.')))')!.tiMni'.tn<Utf!troudont
celui-ci s'est as~n))))'~)' :)))' i'-tts t'utt'*s, <)"t)tt' convt't'tis cuviM
~<m'nt)HLr'')t)!)u))))<juv)'))'!('.<t)!![tticn)i('Tt'm<;ntmt'fessante.

/–))')'))))))).<)) t:

H. KEH\. – Manual of tndiaa Buddhims. (CrMo~ /w/.


/«'), )nH.2)).S))-a.=bou)K.Tm)'))t't,f8ft!.
Je )')'t!r('tt<'<((tf)<*)'):tn d<)*.tMtt''F.<M'M(~t~Mf rende difficile Utt
ex[)0!d~tuit)<th'stt-!t)t's'.Ut-i'histtHti'<:<')np)H<d'nnt'n'iit!iou.Jf
nK'<))tt''))tt'(tun('<tt'i):na)t't')<')it't'd)'M.K.nnmeu)t't')')us
ti~ibtfi du CfXM~'t'M.Uadt"! ptus )))!U))!)b)''s,Ct ftttMidM ptus UttifS.
On y trouvera 'te t)C(nbt'uses n''f('r<'))ccs)tuxtextes: un cxpos'S tffs
<!tfg!mt de lu n'' du MuddtM.te))<;qu<-la tradition nou~ la décrit;
enOtt tout ce qu'un rcsuntL' jtct'tnft (t<!dire sur la nu?t:))d)y<i~U)'f't )a
tnomte du Hnuddhismp (!))). sur )'' <;u)h'.)'< snints,)'Kdi~ )<"<cnn-
({t'~gittiuns(tV;, sur sou histt)it'<'d)m!'t'tnd' s~u MXj'ftn'.io)), su d'~e-
ttMrMSCfncc dans )c Mah!iyanistm'. puis tf T.mtrismc, qui pt'cparcnt
iaToi':itt'Mindoui')mM;soncx)tu)si«))df)'h)d't'ttafM':ondonti! il
s'est refugM au Xcpa) et Ct'ytaH (\
– NOT1CHS
ANALYSES. SUMLESXHUOMNS 369

M. WASSH.tKM'. Le BouddMame dana son plo!m dëvetoppe-


mont d'après lea VinayaN (tt')'t. par S. ).yi. d'un artic)*'.)'"<
.~u~'s()t'i('nttt)t".tdt')itt''i)c.<)t"-).!tt)~u''s<)t-i''nt:')'~dcS!tint-
t'tst~m)! itt ~e". (~ /7/~<. XXXtV. )'. :H8-M!

S't't'-()t'h~t(')''s<)<)t')))n<'«)'! <))!))(')<)'t')u')n')i''t')!tt'<n')))!))i"t)
du)!tdi.')Cij!)it)''t)n'ttiH.)t''humtd)))~U('tt!t!)U)'<tituti')td'))n<'v)''
~'«))v<'))tth')i')m)''vi('!tSt't''ti')u<'<')T!U)t'

J. 'tAKAKtS)'. – A record of thé BuddMBt ReUgioa aspracti-


sed in ïndia and thé Malay Archipetago 'A. )).. o~t-Citi; ).
T.-i))~,tuntuit put- Oxf. Ont-. ?)'< <89t),)!t. i))-4" ).)\-2K)('.
H.fccHcntctt'adm'tinn fC. K. d'' A<'r.</7/ ~e. /<<)'«Hï) ))(":n't)-
':<'i!im'n)''n)'ju')''ti~irt)x<'hit)'t)<'u'!<tt)t)))~))r)\t:(t()<'t!tdis-
'');'))))'')!ou<)'t)<i')tn'im\')t'xi'<

H.-W.CAV)' –TheRainedOitiesofCeyIon. L")K)..Santp~'n ).ow.


Mdt'stuttuad C", )8t)7,K' <S6)' iHus~'ittion.

/–MAHOM~T)!<M)!

T. AH?<0).D. – The preaching of Islam. A History of the Pro-


pagation of MuaUm Faith. )M6. \Yfstmiti~m-Cm)-.)!tht<m-8",
.\))-<)<)).
Les <h'-i)n)-!)t(-nshtn)')t)t.<'<~)nn)''t<'nt('))))))-.<()))'< ttiriM'-sYc)'.<
t'<')tthuusi:t'.)nt')'r<M')\'ti()tt<)")t'<'cùt~d<')')'')att)<jU''M.A.nuu<
)ttu))trcthu)su))Mctud<'d't!ns<')t))jt'Mu)'t't)U)n)'j)')t')ms,vu)'Httuut'
uttt)!t(!tt's!t~'))tsdt'<'('U(:t<'t)')f(n<Atmt<'rp:u'tit'u)i<')'<'t)«'nt)''
<:h<t))i~'<t't fauteur''xp('s<'('<))t)m't)(,dut)s)')mt')'i.s):u)u'-tnt'
~n))ct))OM'Mi'hinduttisntt'et commcntt'Ot'pt'M'.)")) des castes )'on~
:mxcu)ncrsiu))')uitit"t'')tt)'iut)h'idt).

V. CHAUVE. La détenae des images chez les Musuhnans.


'~MKa~M /'Ac<H)t'f <4<'<fM/('<; <~ /M< tX, 4.)
TROSH~mSECTtCX
SOCIOLOGIE MOKALE ET JURIDIQUE

t. – T)~:OKtKS SC)(t.Ë UH<'H't:T LAMt'HALK


UËS(:HA).KS
t'MM.LAt'tt:.

ANTONtO LABR!OLA. – Essais sur la. conception maté-


rialiste de l'histoire. Paris. (.iard et Brière, tM'7. vol.
in-H, 348 p.

La conception matérialiste de l'histoire est en faveur a


chaque page de f~M«<'fMc<o~t~t«' on en aura la preuve, car
il s'est trouvé, dans chaque branche de )a science, des écri-
vains préoccupes d'étudier au point de vue économique les
autres éléments des sociétés. Or, expliquer le droit, la poli-
tique, la famille, la science, t'art, la reiigion et la morale par
l'état de l'agriculture, de l'industrie et du commerce, voila
ce que, suivant l'opinion courante, Kari Marx nommait le
maténatisme historique. L'originalité de M. Labriola consiste
à restreindre la portée de cette thèse pour éviter des objec-
tions, il arrive à lui enlever tout caractère paradoxal.
D'abord, le rapport qui unit l'économique aux autres phé-
nomènes sociaux n'est plus un rapport nécessaire. C'est seu-
lement pour < ectairer tes manifestations sociologiques qu'on
les c place sur leurs supports économiques H (p. 7); on ne
veut pas dire que l'état de la technique < détermine les
autres états sociaux. Dumoins cette première restriction est-
elle apportée il la thèse par M. Soret qui présente au public
français le livre de M. Labriola. Mais tel est bieu aussi l'avis
de l'auteur même il se demande si la morale, l'art, la reli-
gion, la science ne sont que des produits des conditions éco-
nomiques des effluves, des ornements, des irradiations et des
mirages des intérêts matériels Et il répond nettement par
AKAtYSES. DROIT ET HOHALE EH GÉKÉKAt- ~1

la négative seuls < les niais pourraient réduire toute i'his-


toire à l'arithmétique commerciaie et U ne sunit pus, pour
interpréter !a Divine Comédie, de l' illustrer avec les fac-
tures desmarchands itorentius <p.34~, 24S). Hutre ie sup-
port économique des faits sociaux et ces faits eux-mêmes il
n'y a donc pas de relatiou causale leur rapport, c'est le rap'
portdet'embryonct de t'être vivant bien que!'entbryon con-
tienne i'bomme en puissance, on doit, pour expliquer t'hotntne,
connaitre non seulement l'embryon, mais les causes qui lui
permettent do se développer. C'est ce qu'exprime encore
M. Sorei, dans sa préface, lorsqu'il dit que l'étude des faits
économiques ne dispense pas de l'étude des autres faits:
ceux-ci, bien qu'ils soient solidaires deceux-ta, ardent leur
nature et leur valeur propres. Les faits sociaux ne sont pas
tous de nature économique; ils ne sont pas tous causes par
des faits économiques, telle est ta première et capitale restric
tion apportée par M. Labriota à la thèse du matéritdismo his-
torique.
Si les faits économiques ne sont ni l'essence ni la cause des
faits sociaux, quoi est le sens de ia doctrine? A en croire
M. Labriola, elle signifie seulement que tous tes faits socioto-
giques sont solidaires les uns des autres. Elle signifie que
l'histoire doit être prise dans son intégralité, et que chez
elle le noyau et t'ecoree ne font qu'un, comme Gœthe le disait
de toutes choses < (p. 134). H y a action réciproque de l'éco-
nomiquesur le reste et du reste sur l'économique (p. 140,)4*!).
L'État, par exempte, fondé pour défendre des intérêts, réagit
sur la production et sur la répartition des richesses (p. MS).
On no peut pas isoler l'un des « facteurs pour en faire le
principe unique de l'histoire. C'est dénaturer le matérialisme
historique qued'en* tirer unenouveite philosophie de l'his-
toire systématique, c'est-à-dire schématique et tendancieuse ·
(p. )S4). La vraie doctrine qui porte ce nom est un effort pour
embrasser dans sa complexité la rcaiité sociale.
Par suite, on ne peut pas reprocher au matériaHsme ainsi
entendu d'oublier l'idéal, de ramener la mentalité et ses con.
séquencessociales à un simple épiphénomène. Il n'oublie rien
puisqu'il prend l'histoire dans son « intégratité rien, pour
lui, n'est épiphénomène < tes desseins prémédités, les vues
politiques, les systèmes de droit, etc., dérivent de conditions
et de situations déterminées. Mais cela no veut pas dire que
ce soient de pures apparences, des bulles de savon. Si ce sont
372 tM7
t'ASXËESOOOMCtQUK.
là des choses devenues et dérivées, cela n'implique pas que ce
ne sont pas des choses récites (p. iS~, et. p. ~). M. Labriota
va plus loin qui penseratt que le matériatisme historique put
reconnaitre t'inttuence des grands ttommes dans t itistoire '??
Pourtant, de métne qu'il n'adtnet pas que Dante suit un pro-
duit ccononique, de même il soutient que i'individuatité des
g rands ttonunes a joué dans l'histoire un rote ori~iuat que
ce César détermine que {ut Xapotéonsoit ne tette année, ait
suivi telle carrière, ut se soit trouvéprêt le )X hruttUtire, tout
cela est comptetemeut accidentet par rapport au cours ncnérat
des choses qui poussait la uouvetie classe, tnaitresse du ter-
raiu, & sauver de ia revoiutiuu ce qui lui paraissnit neces-
sairf. Mais queccquie'-tarriveeu rcatite arrivât deta façon
que nous connaissons, cela a dépendu de ce fait que ce fut
~apoicon qui a mené t'entreprise, et nou un pauvre Monck
ou uu ridicule fioutmt~er. Et dfs ce montent t'at'cident cesse
d'être accident, précisément parce que c'ost cette personne
déterminée qui donne t'empreinte et la physionomie aux évé-
neiiieiits (p. :H4). L'inteitiKenceindividuelle avec ses aspi-
rations et son idéal, sous toutes ses formes, n'est donc pas
bannie de l'histoire par iemateriansnteecoaonuque.
C'est que, en dépit de son nom, cette doctriue ne s'oppose
pas à l'idéalisme. Elle s'oppose ptutôt a t'ideotogie. Coqu'eHe
combat, c'est surtout < l'interprétation de t'histoire par des
vues subjectives, que ces vues soientdans l'esprit des acteurs
de l'histoire ou dans celui des spectateurs. Les acteurs croient
que les événements s'orientent vers la Un qu'ils désirent
mais, pousses par des causes qui échappent al la conscience
des individus, les faits dévient, dès l'origine, de !a route que
les hommes leur ont tracée. Et de même la philosophie de
l'histoire cherche il retrouver lesens des événements, mais
elle a le tort do leur prêter une loide fillalitéa taquene ils ne
sauraient obéir. Les faits sociaux ont leurs causes détermi-
nantes qui dépassent les consciencesindividuelles. Sans doute,
ils prennent l'empreinte d'un Luther ou d'un Xapotcon. mais
ils ne prennent pas le caractère qu'aurait voulu leur donner
Luther ou Napoléon. Le matérialisme historique recherche les
causes extra-individuelles qui déterminent les fuits sociaux
il exclut les interprétations subjectives il veut objectiver
ou naturaliser l'histoire'. Son vrai nom no serait pas

·
0) Voyezp. t26.131,t47. t9ï.
AffAMSES. – DROIT ET MORALEE!< GÉNÉRA!. 2733

celui de matérialisme que M. Labriola lui conserve; ce serait


celui de positivisme ou de naturalisme historique.
Si profondes que soient les restrictions apportées par
M. Labriola a ta thèse marxiste, il n'en conserve pas moins
l'opinion que les faits économiques ont sur tous tes autres faits
sociaux une influence prépondérante. Cette influence est tan-
tôt directe, tantôt indirecte. Elle est directe sur les relations
juridiques et politiques, indirecte sur fart, la religion et la
science. Enpremier iieu,de ia structure économique de ta so-
ciété dépendent fexistenceet les rapports des ctasses. En parti-
culier, ia division de la société en capitalistes et prolétaires
correspond & l'âge manufacturier de l'industrie. Et i'i~tat
n'est qu'une institution destinée a maintenir les rapports de
subordination qu'établit entre les hommes notre régime éco-
nomique. Aussi, dans le cas où ce régime chaulerait, les
relations juridiques et politiques seraient nécessairement
modifiées.Et fadirmationdn socialisme n'est autre que cette
ci actuellement, depuis l'apparition des machines et de lu
grande industrie, la situation économique change sans que
varie le droit ou l'État mais cette anomalie ne durera pas: il
est nécessaire quela contradiction qui existe entre lesforces
productives de la société et les rapports de la production ·
disparaisse rapidement :iarévolution sociale est uue nécessite
déterminée par la révolution économique.
Eu second lieu, la religion, la morale, la science et l'art
sont indirectement influencés par l'état économique. M. La-
brioia est timide en ce qui concerne ia religion. Il se borne à
noter que Luther ne sut jamais que le < mouvement de la
Réforme était un moment du devenir du tiers état, et une
rébellion économique de la nationalité allemande contre t'ex
pioitation de la cour papale (p. t3~ Encore ne ferait-il pas
diuicutté, j'imagine, d'avouer (lue la Réforme fut autre chosf
qu'une révolution politico-économique. Domême il n'explique
pas sans précautions les rapports de l'éthique et de l'écono-
mique il rejette avec énergie l'idée que ia morale de chacun
est proportionnelle à sa situation économique individueitc ·
(p. ~49). tt se borne à montrer que, dans des situations diffé-
rentes, les hommes, pris < en masse ont des mœurs et des
croyances morates différentes. La morale subit donc des
influencesexternes la morale ne se pose ni ne s'engendre
elle-même. ip. 24S). Pareittcment, t'histoire des idées « ne
consiste pas dans le cercle vicieux des idées qui s'expliquent
E.))t;«KMt:)M.–Ant)f'st"'i<)).<8i)'r. )tt
~74 t'ASSËËSOCt(M.O(i)QUH.
t8M
ettes-ntémes (p. 2B9) elles subissent t'tnnuenee de t'etat
économique. Sur l'art et sur ta science. l'auteur n'insiste pas
c'est qu'il veut, comme toujours, se garder du paradoxe.
La doctrine, ainsi depouittée de sou caractère provocant,
est peut être moins séduisante pour les esprits audacieux; il
faut avouerqu'elle est plus vraie. L'efforttente par At. Labriota
pourtnettre eu tumiere ta solidarité des faits sociaux n'aura
pas t'te vaiu l'économique agit sur te politique et le politique
sur l'économique, et il en est de mémo de tous les étements
sociaux que t'abstraetion peut découvrir. Montrer i'unité des
< facteurs historiques, c'est rendre à ia sociologieun service
aNato~ue a celui qui fut rendu à la psychologie quand on
démontra que les trois (acuités de t'ame ne sont pas des per-
sonnes séparées, tuais des classes de faits mal d)j!in)it''es. De
même. le droit, la morale, l'économie politique, toutes les
cat~orics que distingue t'auatyse sont reliées les unes aux
autres par des intermédiaires nombreux et par des mftuenees
réciproques. On ne peut croire à la sociologiesans croire it
t'uuite des faits sociaux.
On peut même accorder ai M. Labriola que, dans le t'«Mw«-
xtMdes forces sociales, l'économique joue un rôle plus impor-
tant que ne croit le vulgaire. Aristotedisait déjà que la richesse
est une condition de la vertu c'était affirmer, entre t'econo*
mique et l'éthique, un rapport devant lequel M. Labriota
parait reculer. De même est-il besoin d'être socialiste pour
découvrir des causes économique!; aux événements poli-
tiques? Ceux mêmes qui, comme la Révolution française,
paraissent provoques par un réveil des consciences, ne sont-ils
pas occasionnés par la révolte des intérêts? tt n'est pas jusqu'à
la religion qu'un écrivain peu suspect de collectivisme ratta-
chait récemmeut à t'economique en disant que le sentiment
religieux n'est que le besoin économique renversé il mon-
trait qu'en effet le sentiment religieux varie on raison inverse
du bien-être matériel on est d'autant plus mystique qu'on
est plus misérable; les périodes de calamités sont des périodes
de (oi c'est que le sentiment religieux est le substitut du
besoin économique'. Ainsi, sans rechercher le paradoxe, on
peut se montrer plus hardi que M. Labriola les besoins phy-
siques de l'homme ont sur la vie sociale une influence consi-
dérable.

()) LtKMttbf.~<*<7fM~<'<t'e
COMttWtt'f
fOMMMC p. )~6.
jM'«*MCf,
ANALYSES.– XtMHT ET MOHALEEN GÉKËRAt 278

Cetteinfluenceest-elleprépondérante? Dansle livremémo


de ALLabrioiaon trouvedes raisonsde le nier. Uu(ait pri-
mordialresteInexpliqué l'homme,au momentoù le prend
l'auteur,ne vit pas à l'état de nature, mais sur un terrain
artiftcie) dans un milieu qu'il a contribueu former. Mai&
commentl'a-t-il{orme?Est-cesousl'impulsiondu besoinéco-
nomique?Onpeut l'admette',bien quel'auteur ne le prouve
pas; maisencorefaut-ilque cebesoiuait été servi par l'intel-
iigence.L'intelligence a donc joue,dèsle début, un rote aussi
nécessaireque celuidu besoin.
En secondlieu, on ne trouve nulle part, dans le livre de
M.Labrioia,uneexplicationéconomiquede la famille,deses~
variétéset de ses transformations,N'est-ce pas une grave
lacune?Onla trouveraplus graveencoresi t'eu constateque
l'auteur admet,avant la période dans laquelleii coustatela
preponderauce de l'économique,l'existenced'une sociétéfon-
dée sur la famille on etïet, le peuple sur lequel il étudie
l'actiondesforceséconomiquesn'est pas une massequel-
coHqued'individus,mais un plexus d'hommesorganisésde
telleet tellefaçonpar des rapportsnaturetsde consanguinité,
ou suivanttel ou tel ordreartificielou coutumierde parenté
et d'affinité. (p.!?;. Consanguinité,parenté,affinité,voilà
donc des relationsqui sont donnéesavant les relationsde
mattreet d'esclave,avant les relationsdo l'hommeet de la
terre la famillene dépenddoue pas de l'économiquepuis-).
qu'ellelui est antérieure.Et le texte même que nousvenons
de citer prouvequ'elleapporte avecelle un certain droit,
qu'elleimpliquedescoutumesoudesrégiesjuridiquesétran-
gèresu l'ordreéconomique.
Enfin,M.Labriolane peut pas proclamerà la foisl'unité
des faits sociauxet la prépondérancede l'économique.Ou
bienil faut prendreà la lettre ses métaphores l'économique
est le < support des autres phénomènes mais alorsil n'est
pasle plus important,a moinsqu'onne soutienneque le socle
est plus importantque la statue et, d'autre part, les faits
sociaux,danscettehypothèse,sont juxtaposés,maisnonsoli-
daires.Oubien, l'économiqueest partieintégranted'un com-
plexusde faitssolidaires; mais alorsil n'est'pas plusimpor-
tant que tel autreélémentdu mêmecomploxus lesmembres
et l'estomacsont égateatentnécessairesà la vie de l'orga-
nisme une solidaritéde ce genresupposeque leséléments
sontcoordonnéset nonsubordonnés.Telleque M.Labriolala
270 t'AKKÉE <M?
SOCtOMGtQCE.

présente, la conception matérialiste est donc incomplète et


inconséquente.
Faisons abstraction de ces défauts ta doctrine est-elle cou'
forme aux faits? A ce point de vue, ou lui a déjà adressé
de graves reproches. ~!ut n'a encore montré, remarque
M. Durkheim, sous quelles influences économiques le natu-
risme était sorti du totémisme, par suite de quelles modidcn-
tions dans lu technique il était devenu ici le monothéisme
abstrait delahvé, là le polythéismegréeo.tatin On montré
que la charrue n'a guère varie depuis des siècles et que cepen-
dant les mœurs ont change ta propriété même, dont ta forme
devrait être liée a l'état de lu technique agricole, a passé, sans
changement correspondant dans cette technique, de l'état col-
lectif & l'état individuel. On a montré que plusieurs sociétés
possédant la même technique pouvaientavoir des institutions
et des croyances fort différentes. Mais il est inutile d'accu-
tnuter les taits. M. Labrioht se dérobe provisoirement au juge-
ment do l'expérience Je prie le lecteur, dit-il, d'attendre
les exemples que je donnerai dans d'autres essais, dans une
véritable narration historique (p. 27~).
A défaut de cette épreuve expérimentate, c'est a la méthode
qu'on peut s'attaquer. Est-il légitimede faire abstraction des
vues de l'esprit dans l'interprétation de l'histoire? Accordons
que l'historien ne doit pas imposer aux faits ses idées a
p<'<or<,mais tirer des faits eux-mêmesses conceptions, Est-ce
à dire que tes idées des hommes d'action n'ont sur tes événe-
ments aucune influence?' Accordons encore que ces idées ue
sont que très rarement le résultat d'un choix critique ou
d'une votonté raisonnante peu importe leur origine; la
question est de savoir quels sont leurs effets. A-ton prouvé
que ces effets sont nuls quand on a montré qu'ils différent des
prévisions de quelques hommes? Sans doute Luther ne voyait
pasle mouvement politique et économique qui accompagnait
son mouvement religieux. Mais Lutherest-il le seul auteur de
ta Réforme*?Tout grand événement historique esH'œuvre de
volontés innombrables qui, peut-être, ne cherchent pas toutes
le même but, mais qui toutes cherchent un but. Que de l'en-
semble de ces tendances il résulte un mouvement étranger
ou contraire aux intentions de l'initiateur ou du principal

~h Hft'Mf~/ff/MO/j/tt'f/Mf.ftt')'.t!i' )'.<<). Cf.At;!))t'). «<-)<«'</c M)('/<t;)/t.


M/«<M'j)t.ttM'r,)).<iMt:t!iUH'.
ASAt.YSKS.– DMOtTKT MORALB HS CKNÉMAL 2'?7

meneur, cela M'M rien d'étonnant, mais ue prouve pas que les
consciences individuelles soient pour rien dans l'événement.
Il ne suffit pas, pour expliquer la Reforme, de faire la psycho-
logie de Lutlrer, mais cela ne prouve pus que !a Réforme ne
puisse pas s'expliquer par des idées et des courants d'idées.
Naturaliser l'histoire, puisque dans l'histoire, de l'aveu
même do M. Labriota, les idées et les sentiments ne sont pas
des buttes do savon ce n'est pas exclure les idées, c'est
les considérer comme desfaits. Lu sociologie est à tu psycho-
logie ce que ta sciencedu complexe est à la science du simple
elle étudie les résultantes que produit ta composition des
forces psychotoniques; ettone doit pas commencer par nier
l'existence et la vateurdes composantes, même si la résultante
estdinerente des composantes. Dece que l'eau n'a pas tespro.
priétés de t'oxygène et de l'hydrogène. il ne suit pas qu'on
doive, dans i'étude de t'oau, négliger l'étude de ses éléments
de même tes faits sociaux ont beau posséder des propriétés
distinctes de eettes desfaits individuels: it n'en est pas moins
vrai qu'ils trouvent leur explication dans ces faits. Entre le
naturalisme matérialiste et l'idéologie, il y a place pour un
naturalisme psychologique.
Au moment ou il parait à la modo, le matérialisme histo-
rique s'assagit il a conserve son nom de guerre, mais il est
devenu prudent. Pourtant il n'est pas à t'abri des objections
attendons, pour le juger définitivement, que M. Labriota nous
ait apporté ses preuves expérimentâtes.

S. FRAGAPANE. Il proNemtt delle origint del diritto.


(Le pt'ob~mf (<f.torigines <<t(<<ro)<)Home, Lœscher, t896,
t voi. in-8",2!U pages.

Le titre même de l'ouvrage de M. Fragapane annonce une


doctrine évotutionniste. En effet, l'histoire du droit (livre I'")
aboutit, suivant l'auteur, à l'avènement des doctrines évolu-
tionnistes et la logique des sciences juridiques (livre Il) lui
conseille d'appliquer a l'étude du droit une méthode géné-
tique. C'est pour cette double raison qu'il pose le problème
des origines du droit la loi d'évolution est pour la socio-
logie comme pour les autres sciences le postulat des pos-
tulats. (p. H6,.
Ce n'est pas dire que, pour expliquer le droit, M. Fraga-
pane remonte à la nébuleuse il raille mémo ceux qui,
278 L'ANNÉE SOCtOt.COCfË. )'<

comme M. Letourneau, trouvent le fondement des fortna-


tious juridiques dans l'irritabilité de lu cellule nerveuse
(p. ~!)). Pour lui, l'inconscient ne joue aucun rote en socio-
togie(p.!(!Oetsu)v.aussi))ect)Grt'he-t-itpasd:)nsune
période antérieure à t'apparition de lu conscience l'origine
de lu justice. Le droit est le résuttat d'une double évoiutton
pour qu'il y ait un droit, il faut t'a effet quedes personnalités
se soient formées et distinguées les unes des autres mais il
<aut aussi qu'un r;tat réglemente et sanctionne les rapports
de ces personnalités. Une évolution sociale aboutissant à lu
formation de l'État, une évottt~on mentute~atoutissant à la
formation de ta personnalité, telles sont les deux conditions
<<ela justice.
M. r'ragapane étudie successivement dans les deux derniers
livres de son ouvrage chacune de ces deux évolutions. D'abord
l'évolution sociale par quelle suite d'états une société passe-
t-elle avant de posséder un droit? La cohésion sociale appa-
ratt tout entière connue une trame d'obligations et de sanc-
tions. Mais toutes ces obligations et ces sanctions n'ont pas
un caractère juridique certaines en effetsont inconscientes
or, une coutume qui reste inconsciente, qui n'est pas explici-
tement formulée, n'a pas force de toi. < Ledroit est le moment
conscient pour tous les rapports qui naissent incessamment
du jeu des forces sociales '(p. f! 4). t':t quand vient ce moment
conscient? Quand les actes sont imposés et sanctionnes par
le pouvoir. Ce n'est pas à dire que le pouvoir soit la source
unique du droit et que ta justice soit décrétée par les souve.
rains ou les testateurs. Le pouvoir n'est tui-memo que
t'écho de lu conscience sociate le pouvoir est tel que le
groupe le fait ~p. t93). Même lorsque les institutions repré-
sentatives font défaut à un peuple, le pouvoir politique
demeure soumis à l'opinion publique il est l'esclave de la
tradition parce que l'opinion publique est ette.môme fidèle
au passé. Ainsi, le droit n'est ni t œuvrede la volonté collec-
tive seule ni i'œuvre du seul pouvoir politique il est le
résultat de leur collaboration < un acte du pouvoir corres-
pondant à certaines exigences mondes communes aux cons-
ciences associées (p. ~Ot!,voilà la seule déunition complète
de la justice.
Nous ne suivrons pas M. Fragapane dans l'analyse des
transformations au cours desquelles cette double condition
se serait réalisée cette partie de l'ouvrage est trop pauvre en
.ttMYSRS. – DROIT KT MOHALHEN GËtOiMAL 279

documents et en faits bien établis pour que les conclusions


puissent être retenues. Ce qui précède suffit & montrer Je
principe de ta théorie t'Htat et ta personnalité sont pour
l'auteur les deux potes de l'idée dedroit. Aussi nie-t-it l'unti-
nomie qu'on prétend découvrir entre )a personne et l'état. Et
il nie que t'un de ces deux termes doive, dans l'avenir, être
sacrifiéa l'autre. Toute l'évolution juridique montre la trace
d'une élévation croissante de ta personne humaine. Aussi le
progrèsjuridique est-il senti par l'individu comme une liberté
croissante. Une sanction n'est pas seulement un tien qui
attache l'individu au tout, mais c'est le sceau d'une uouvetle
liberté. l'investiture d'un nouveau droit (p. 280). Le passé
nous garantit l'avenir à mesure que frétât se constituait, la
personnalité grandissait que t'Ètat perfectionne sa constitu-
tion et ta personnalité grandira. C'est sur cette pensée opti'
miste que M. Fragapane ferme son livre.
l'rise en cite même,cette prévision n'a rien d'invraisem-
blable M. Fragapane n'est pas le premier à montrer que le
nombre des règlements grandit parallèlement au nombre des
libertés t'ar cela même que le droit de reunion notait pas
reconnu, dit quelque part Henan. il n'était pas limite il en
est de même pour tout droit. Mais l'analyse de l'idée de droit
que proposeM. Fragapane prête davantage à ta critique. Pour
lui, un droit doit être accepté par tous les individus associes.
Mais ne peut-il arriver que l' « exigence morale. qui donne
naissance au droit ne soit sentie que par quelques consciences
d'élite? KesuMt-it pas que les esprits de la toute ne contieu'
nent rien de contraire au droit nouveau pour qu'il s'établisse ?
Nousavons reproche à M. Labriota de supprimer le rôle de la
couseiettcedans la vie sociale ne peut-on pas reprocher à
M. Fragapane de t'exagérer? Sans doute, une règle juridique,
pour être posée,doit être consciente au moins dans un esprit;
pour subsister, elle doit être tacitement acceptée par tous, ou
du moins elle ne doit rencontrer aucune opposition (ormeito
mais est-il nécessaire qu'ette recueille l'adhésion explicite de
toutes les consciences,qu'elle réponde à des exigences cont-
MtXHM&tous les membres de ta société ? Un droit qui aurait
pour lui uue telle unanimité réaliserait un idéal dans t'his'
toire, le droit ne contient pas l'élément qu'y découvre M. Fra-
gapane.
ït reste vrai, si nous en croyons l'évolution du droit con-
tetïtporaiu, que les règles juridiques dérivent des rcgtes
~80 L'AXKËE SOOOMCtQUH. «St

morales. Ou commence par protester contre J'esclavage au


nom de la couscieuce. puis les lois sanctionnent F exifteace
monde On proclame les droits de l'homme dans les livres
avant de tes reeonuattre daus les institutions. Un mouvement
d'opinion precMe le vote de toute loi nouvettt'. On peut donc
accordet-à M. Fragapaue que ta naissance d'un droit positif
est le terme d'une évolutiou morale.
Lesrègles mondes, a leur tour, dérivent-elles des instincts?
La discussion de ce problème serait hors de propos dans
r~<t«~' sm-M~<(/t«'.Mais, pour fauteur, l'instinct qui donne
naissance a l'obligation n'est autre que l'instinct social, car
toute société est un tissu d'obti~tions et de sanctions. L'idée
de droit aurait donc une extension égale à celle de l'idée de
société tout fait social étant moral et toute régie morale
pouvant devenir juridique, tout fait sociat pourrait donner
naissance à une règle juridique. Mais tous les faits sociaux
preseutettt-ils un caractère morai ? tous nous eugagent-ils
envers quelqu'un? tous nous imposent-ils des sanctions? A
première vue, il semble du moins que l'art et ta science, en
tant que faits sociaux, peuvent être indépendants de l'éthique.
Ajoutons cependant qu'au début des sociétés, l'art et la science
même obligent les individus ta danse n'est-elle pas re~e.
meutee et les mouvements contraires au rythme ne sout-its
pas parfois punis de mort ? Quant à ta science, elle se confond
avec la reiigion dont !e caractère impératif n'est pas discuté.
H est donc possihic de dire avec M. r'ragapane qu'à l'origine
au moins tout fait social a une valeur morale. Cette idée,
une des plus intéressantes du livre, aurait gngue à être établie
par des fuits plus nombreux et mieux critiqués.

D' FRËD BOX. – Grtmdzttge der wissenaohaftiichen


und technisohen Ethik (~«.fM<<'«))<-(~«f m<~<t/!yM<'
t't ~Y<(«jw). Leipzig, Kngehnanu, t896, vo). m-8",
I()Upages.

La morale, pour M. Bon, Il la double mission de fixer !e


but de nos actions et de donner les moyens de t'atteindre. t)e
même que, dans l'étude de la nature, on peut distinguer la
science, qui observe et définit, et la technique, qui utilise
pour les besoins des bonxnes les vérités découvertes par la
science; de même, daus l'étude de la couduite humaine, ou
peut distinguer une science qui observe les actions, et une
ANALYSES.– UMU' HT MOR~K ES (t&SËHAL 2M

technique qui utilisera pour le bien de l'homme les vérités


découvertes par la science moraie.
La science morale est une science d'observation. Hito cons-
tate l'évolution des mœurs humaines et s'etîorce d'eu déjuger
la loi. R'abord a son iusu, puis avec conscience, l'homme
passe de l'égoïsme à l'altruisme < t'ëvotution morale
s'accomplit par la prédominance progressive des intérêts qui
unissent (conciutorisch! sur les intérêts qui séparent ·
(isotatorisch). En induisant l'avenir du passe, M.Bon conclut
que nous tendons vers un état où les conflits individuels
seront réduits au minimum, où non seulement l'intérêt de la
cité l'emportera sur celui des particuliers, mais où l'intérêt
de la société cité-même sera prime par celui de l'humanité.
Cette victoire de l'altruisme sur taoïsme est d'abord incons-
ciente. Les hommes se sont groupes, sans savoir pourquoi,
sous ia pression des nécessites extérieures. Mais peu à peu
la conscience s'est éveillée. Dès lors l'homme se rend compte
des ordres que lui doune la société, en comprend les raisons,
devient un facteur de sa propre évolution. L'heteronomiese
change en autonomie.
On voit que M. Monprend pour accordé le principe spen-
cerien d'après lequel i'etat idéal est cetui vers lequel nous
eutratne l'évolution, et cela sans examiner les énormes difll-
cuités que soulevé ce postulat. D'ailleurs ia ici même qui
domino toute la théorie est-elle bien etnbiie? A lire le titre
de l'ouvrage on s'attend à trouver des inductions rigoureuses;
mais on rencontre plus decitations do Spinoza et de Nietzsche
que de faits et de raisonnements. Cette méthode méritet-eile
le nom de scientifiquef??

E. DEHObERTY. – L'Éthique. Le Psychisme social,


f/fM.f«''M)t'
<'Mf«~t«'h Wn/'< C(~Mft~t''ffOWMtC Mt'tO~tt' <?-
M)<'M<«<< Paris, Aican, ~8U7,i vol. iu.i8,2)8 pages.

Par ses ouvrages précédents, surtout par un premier essai


sur la morale considérée comme sociologie élémentaire
on sait déjà que AI.de Roberty, eu éthique, se place au point
de vue positiviste ia morale est une science, c'est la science
sociale.
La morale est une science elle m'a pas à donner d'ordres,
elle doit enseigner des vérités. Elle est la science du surorga-
nique comme la biologie est la science de l'organisé. La force
~82 L'ANSÉË «M7
SOKtOMCtQUH.

qui se déploie dans l'univers, après s'Être manifestée sous


forme de matière et de vie prend une forme nouvette.t'ette
du psychisme social et cette forme nouvelle est l'objet de
l'éthique. « Les banalités qu'on répète sur le dictamen de lu
loi naturelle suis tort, et sur les préceptes de la loi morale
sois prudent, vertueux, charitable, etc., prouvent, dit fauteur,
combien ou méconnaît encore ta vraie nature du psychisme
collectif. On se refuse, a voir dans la socialité un mode nou-
veau de la force universelle ou ne veut pas comprendre quf
nous donnons le nom de vertu a t'éuurgie transformée, devp-
uue, de mécanique ou vitale, morale ou sociale; et que nous
appelons prudence ou sagesse l'économie de cette même
force, sa dépense réglée par le principe de ta moindre résis-
tance tp. )~. Ainsi lu vertu est un phénomène aussi néces-
saire que la ebateur ou l'électricité. Le vice de môme
< quant à la prétendue primauté de la force brutate sur le
droit, il est manifeste qu'une telle formule ue signifie rien, it
moins qu'elle ne serve a indiquer une transformation rétro-
grade de l'énergie, une décomposition rapide d'un mode
supérieur de l'existence et un brusque retour au modo immé-
diatement inférieur (p. tH) Le mat mural, c'est une chute
dans le monde organique, comme le mat physiologique, ia
mort, c'est une chute dans le monde inanimé. Mais ces deux
décompositions sont ~gaiement produites par des lois
nécessaires. La morale, ainsi entendue, est donc une science
comme ta biologie ou ta physique.
La morale est la science du surorganique. Mais qu'est-ce
que le surorganique ? C'est, pour M. de Roberty, le mo-
rat, le conscient, le social, le rationne) tous ces termes
sont synonymes. En somme, le surorganique, c'est tout ce
qui dépasse la vie pure et simple. Ce n'est pas à dire que la
sociologie et la psychologie individuelle se confondent il y
a entre elles la même différence qu'entre l'abstrait et le con-
cret. La psychologie étudie les êtres vivants sur lesquels
s'appliquent les lois sociales. Un individu humain, c'est un
groupe de faits biologiques et de faits sociaux, le lieu où
s'entre-croisent tes lois de la vie et les lois de la société
faites abstraction des premières, et il reste l'objet de la socio-
logie. M. de Hoberty semb)e distinguer parmi les faits de
conscience deux groupes de phénomènes ceux qui sont pro-
duits par le corps vivant,-et ceux qui sont produits par ta
société H distingue une psycho-physique (ou psycho-physio-
– MOT ET MOHALË
ANALYSES. HNGËNÉML 283

logie, p. M,S8)qui rentre dans ta biologie, et une psycho-


logie proprement dite avec laquelle t la sociologie descriptive
doit confondre ses limites (p. 0:!). On voit doue comment,
pour lui, conscient et social sont tonnes synonymes.
De cette proposition sort un corottaire intéressant. l'ar cela
même que le social est un des étéments constituants de
l'individu, l'homme est altruiste uvant d'être égoïste
l'egoïsme n'est chez lui qu'une sorte d'atrophie du sens
social. tt ne faut donc pas dire avec La Rochefoucauld que
l'altruisme est ua égoïsme déguise, ou a\'cc Spencer que
l'altruisme est né do l'égoïsme c'est au contraire t'égoïsme
qui natt. par évolution régressive, de l'altruisme primitif. Ou
plutôt, M. de Robertyparait distinguer deux égoïsmes comme
il distingue deux conscieuces. Nous avons une conscience
physiologique et une conscience sociale; de même il existe
un égoïsmed'origine physique et un égoïsme d'origine sociale
le premier, c'est la bête dans l'homme le second c'est une
déviation de t'attruisme; eu tant qu'animal t'homme est
égoïste eu tant qu'ètre social il est {oHeiërement altruiste,
mais il devient égoïste par t'avurtement de son altruisme.
Sous ces deux formes t'egoïsme est le mal.
Ces opinions sur les rapports du psychique et du social et
sur les origines de t'egoïsme sont des indications ingénieuses.
Quant aux thèses fondamentales de l'ouvrage elles ne com-
portent pas de discussion, car elles sont simplement éuon-
cées sans démonstration méthodique. Elles ne se distinguent
pas, d'aitieurs, des thèses classiques d'un évolutionnisme un
peu démodé.

MAMEt.BERKÈS. – Sociologie et morale. Deux années


d'enseignement sociologique. Paris, Giard et Briere,
)896,1vot. ia.8", i6Spages.
Le livre de M. Bernès est un < programme de cours
aussi les thèses qu'il renferme sont-elles privées du dévelop-
pement et des démonstrations qu'elles comportent elles
échappent, par suite, en partie, et ù l'analyse et à la critique.
Ettes peuvent se ramener à deux propositions essentielles la
morale fait partie intégrante de la sociologie la sociatite fait
partie intégrante de la moralité.
Au gré de M. Bernés, la sociologie demeure trop théorique.
Elle oublie qu'elle traite de faits humains et qu'à ce titre elle
284 L'ASNÊH SOCtOMUt~L'E. 1897

ne doit pas se désintéresser des aspirations des hommes. Elle


est, eu gênera), naturaliste elle devrait être idéaliste. Eu
effet, la morale est la science w~wc/fcf (p. K)qui correspond
a la sociologie, science descriptive. Mais, dans ce domaine,lu
réel et l'idéal sont inséparables une société, c'est a la fois
« une chose et une idée 'p. KM., uu ensemble de faits don-
nés et d'évolutions inachevées vers les fins qui attirent les
hommes. La sociologie a pour objet l'étude d'actions hu-
maines or, toute action, même lu plus insignifiante eu
apparence, est « quaiiflable (p. 8C, 8H; moratetnent. et
i'uppreciatiua que les hommes eu douoeut est uu fait social
important. Doue, la théorie et ia pratique doivent se récon-
cilier sur ce terrain (p. M La sociologie sans la morale
reste mutiiee p. S
En revanche, lu morate devient abstraite et morte si elle
perd de vue la reatite sociale et ne fait pas aux sentiments
sociaux une place importante. L'histoire de la morate en est
la preuve. Lu morale primitive est une moraie sociate ·
p. ~O?) l'individu n'y est guët'o reconnu; il n'a pas de
valeur c'est la vie sociale qui est la fin do l'activité de ses
membres. Mais quaud la réflexion s'evciile, le sentiment
social perd sa prépondérance c'est ce qui s'est produit en
Grèce, au temps de Socrate. Par bonheur, Socrate conserve
encore le sens de la réalité concrète et de la vie sociale, mais
ses successeurs accentuent les tendances individualistes de sa
morale, en même temps qu'ils s'Oloigneut de la vie réelle.
L'individualisme est la marque de la morale hellénique. Et la
morale chrétienne, mature' son désir de s'opposer à la morale
antique, se détourne, elle aussi, des réalités sociales. Ce n'est
qu'au xvm"siècle, avec Kaut et tes philosophes français, que
la solidarité reprend sa valeur aux yeux des moralistes. En
dépit des interprétations ordinaires, M. Bornes trouve dans le
kantisme et dans les maîtres de la Mévolution française
l'ébauche d'uue morale contraire à l'individualisme. Repre-
nant une idée exprimée par M. Henry Michel dans son livre
sur l'/fA'f </f ~«f, il montre que l'individualisme banal est
une < déviation de l'individualisme du xvnf sieetc. Et celui-
ci, comme le kantisme, est la transition du pur individua-
lisme qui règne dans la morale antique, à la morale sociolo-
gique fondée sur le sens de la solidarité (p. t43). L'avenir
nous réserve donc et il faut s'en féliciter selonM. Bernes –
une morale de la solidarité. Cen'est pas à dire que nous retour-
AftAMSHS. – CHOtf ET MORALEEtt OÉKÉRAL 288

ncrons à la morale primitive l'auteur se défend de vouloir


prendre son idéal en arrière It va même jusqu'& dire
que t'idéat n'est pas de < consolider in société présente
t'idéai, ce n'est pas i'' ordre '(p. tGS), ta stabilité. Kous ne
devons pas nous piaindredei'anarcttieactuettedes consciences
ni iuttereontre elle par unerégression vers le passé. Mais < ia
morale n'est pas réduite à cette alternative d'être sociale et
tradittonnaHste en étonnant l'individu, en mettant une con-
trainte à lit place d'un idéat, ou de placer dans l'individu le
principe unique de l'action morale, et, en se faisant subjec-
tive, de renoncer à être sociale fp. )M). Il existe une troi-
sième solutiou qui consiste, si l'on comprend bien 11. Bornes,
a chercher ta solidarité par des enorts individneis. Lit morale
de l'avenir ne consistera pas à obéir de force à lit loi sociale,
ni à chercher chacun pour soi ta tache à accomplir elle
ordonnera à chacun de se solidariser volontairement avec tous
(p. )G4). Ainsi il ia solidarité forcée des âges primitifs, au
libre individualisme des philosophes antiques et modernes,
doit succéder ta solidarité volontaire, conforme aux données
de la sociologieet aux aspirations de ia morale.
A vrai dire, aucune des deux thèses principales de M. Ber-
nés ne parait très neuve. On soupçonne, en lisant son pro-
gramme, qu'elles sont développées dans son cours avec beau-
coup d'ingéniosité les paradoxes qu'il émet sur la morale
de Socrate, sur t'individuaiisme hellénique et sur l'éthique
de Kantodgent des démonstrations dont le détail doit être
piquant. Mais il est bien difficile de discuter, même sommai-
rement, des indications aussi brèves. Et celle discussion
serait mieux à sa place dans une histoire de la philosophie
que dans une .UtHéfMt'M/o~oe. Quette que soit en etiet
l'importance socialedes doctrines d'un Socrate ou d'un Kant,
ce n'est pas faire œuvre de sociologue que les étudier pour
eites-mémes. Ne cherchons donc pas querelle à M. Bernés sur
les moyens qu'il emploie pour démontrer sa thèse et ticcor-
dons-lui que les sentiments sociaux, en générai, et le senti-
ment de ia solidarité, en particulier, jouent un rôle important
dans la vie morale.
Sans être plus neuve, l'idée d'unir la sociologie et la morale
est plus discutable que ta thèse précédente, Il est vrai que la
sociologies'occupe d'idées et d'aspirations autant que de faits
matériels. Mais ces aspirations mêmes sont données dans
l'observation sociologique. Le sociologue n'a pas à s'interroger
?6 t/Att~E SOOOMOtQUS. 1801

sur leur vateur morale H n'a qu'à constater les courants


d'opinions qui entraînent les sociétés dans un sens ou dans
uu autre. Duce que les faits sociaux sont des tendances plus
que des états, il ne suit pas qu'il faille joindre à l'observation
scientifique l'appréciation morale de ces faits les tendances
s'observent plus diuiciiemeut peut-être, mais par les mêmes
méthodes que les états. Oun'a pas étudié les mmurs actuelles
si i'on s'est borné à décrire nos actions il faut y joindre nos
croyances et nos désirs mais ces désirs eux-mêmessont des
faits qui se traduisent par des paroles ou des actes obser-
vables ne serait-il pas imprudent de joindre à leur étude
des jugements sur leur valeur ? Ne serait-ce pas s'exposer a
perdre t'hnpartiaHte qui est la première condition do la
recherche scientifique? Nos passions ou nos préjugés poli-
tiques ou moraux ue risquent-ils pas de troubler notre regard ?
Ainsi, l'union de la sociologie et de la moralene nous parait
ni imposée par la nature des faits sociaux ni exigée par l'in-
térêt de la sociologie d'une part, il est vrai qu'eu agissant,
les hommes se proposent des fins idéales et qu'on ne peut pas
séparer la connaissance de leurs actions de la connaissance
de ces fins mais ces {tus sont données au sociologue non
comme des fins mais comme des faits. D'autre part, l'appré-
ciation de ces fins suppose que le savant les considère non
comme des faits, mais comme des fins, c'est-à-dire qu'il
renonce à ia méthode scientifique et à la vérité.
Pourtant, M. Bernés a raison de montrer que la théorie et
la pratique sont inséparables. Mais teur rapport n'est pas le
rapport d'identité qu'it veut établir c'est un rapport de suc-
cession. La pratique suit ta théorie à une connaissance con-
fuse succède l'instinct: &une connaissance distincte succède
l'activité réfléchie. La sociologie sans la morale ne serait pas
mutilée, n'aurait perdu aucun de ses membres, mais elle
serait déeouronnée. Si des vérités sociologiques sont déeou-
vertes, nul doute qu'elles ne se transforment en règles pra-
tiques elles uous donneront le moyen d'atteindre i'idéat fixé
par la conscience. Mais ce n'est pas à dire que la sociologie
doive se proposer pour tâche essentielle la découverte de ces
moyens. De même que dans les sciences de la nature les
applications pratiques ont souvent suivi les découvertes théo.
riques sans avoir été l'objectif des savants, de même la
sociologie nous fournira peut-être des règles de conduite
imprévues des théoriciens. Si nous admettons donc que la
– DMorrKTMOHAtE
ANALYSES. KMGËKÉKAt. 287
morale et ta sociologie sont, en fait, intimement unies, nous
croyons qu'en droit il reste légitime de séparer leurs disci-
plines. Lu morale, dit M. Mêmes, est tu science normative ·
a taquetia correspond ln sociologie. Mais pourquoi ces deux
sciencesnedemeuroruient-ettes pas séparées comme ta logique
est séparée de la psychologie du raisonnement ou comme
l'art de t'iogenicur est sépare de la mécanique ? Qu'il soit ou
non ditncite pour un sociologue de s'abstenir de juger les
faits qu'it observe, la distinction n'en garde pas moins sa
valeur logique.

Prot. Dr M. LAZARUS. D&a Leben der Seete in Mono.


graphten uber seine Eracheimun~en und Gesotze (/.«
fft' </t'~(iMtf;«'~ pAf'MOH<<)Mel ses lois ~<t«<t(~
i(0<M
/b<'H)ede
Mt<)<t<)~/ap/t<M), m" vo)., H"édition. Bertia, Dummter, t897,
1 vol. in 8°, xvt'44) pages.

Le livre de Lazarus n'est pas nouveau aussi nous borne-


rons-nous à signaler, sans l'analyser, la troisième édition du
troisième volume.
Le dernier chapitre de l'ouvrage traite de l'origine des
m'rurs Les mmurs sont des coutumes gem'r~tes et cons-
cientes elles fondent ce qu'il y a de <générât et d'objectif 1
dans les consciences la psychologie des peuples qui étudie
ce qu'il y a de commun aux consciences iudividuettes d'une
nation doit donc étudier les moeurs.
Lesmœurs sont i'uboutissementd'un processus psychique 1
dont le premier terme est !e sentimentmoral par là, fau-
teur entend tout sentiment accompagne soit d'une approba-
tion, soit d'un blâme or, une < propriété et une nécessité
fondamentale do notre nature psychique consiste à < perce-
voir toute action humaine accompagnée d'un sentiment d'ap-
probation ou de Marne" Ce sentiment est d'abord incons-
cient, mais it-détermine une action, et la conscience de cette
action, c'est la conscience morale. < L'homme primitif per-
çoit sa nudité cette perception est accompagnée d'un senti-
ment de desapprobation; il n'a pas conscience de son senti-

0) BouKM. /.M~cf'mcM«ocf'a/mfK .t//<*M)~Mf; ). Lazaru~.p. 39.


~t' XuUi!avons <Mj~r';n<'m)t~<()<' thuorit*<'h''xM.Fro~~xn"
(~))'<tK'*
)'t che:!M. Uenn'ssans <)U'"ttpui!«: dire !<ices deux auteur t'uot ou non
&Ltuarui.
t'M)[))'u))t''e
288 t.'AXtiÉË iSM
SOCMLOG~UE.
ment comme nous avons aujourd'hui conscience des nôtres
mais son sentiment se traduit immc'diatetneat en action
l'homme se couvre et dans cet acte il saisit son sentiment ·
p. 3"!S). Comme, a cette époque,tous les individus se ressem-
btent, ils éprouvent tous, duos les mêmes circonstances, les
mêmes sentiments pur suite, l'action de l'un est répétéepar
tous tes autres. Les mmurs s'expliquent donc par !a loi de
la qualification des actes et par la loi de l'identité des cons-
ciences primitives deux lois psychologiques.
Ces deux lois ne sont pas démontréespar des faits fauteur
n'a prétendu tracer qu'une esquisse semblableune figure
mathématique Mais cette méthode schématique convient.
elle à unehistoire?

t).–t:Tt'UHS(HUK<:T)\KSS(')tt.KSM«.U'MS
ParM.t.u'tt:

At-tREUVIERKANDT.– Naturvoelker undKctturvœlker.


Ein Beitrag zur Sociatpsyohologie. (~('Mp~~«M<f</x
pt ~<*M;)/M ftf<<Mf<;fMM~M~OM fi la ~j((/fAo/0<y<<'
Mft'H~C.)
Letpzit;, Duucker et Humblot, t8')M,1 vo). !u 8",xt49'! p.
Prix 1UM. 80.

Disciple de Wundt plutôt que de Lazarus, M. Vierkandt


s'occupe moins de psychologie des peuples quede psy-
chotogie sociale H ne décrit pas les traits communs
aux consciences individuelles d'une nation, mais dans rame
humaine en gênera! il trouve des phénomènes dont les lois
expliquent les phénomènes sociaux.
Dès les premières pages, l'auteur s'engage à déduire s
d'un caractère psychologiquetesditterences qui séparent sau-
vages et civilisés et i'tramènera des problèmespsychotogiques
les problèmes sociaux relatifs h lu cirilisatiou. Ce n'est pas
qu'il ait ia prétention d' < exptiquer p. )2); i) ne cherche
qu'un point de vue permettant de grouper systématiquement
les faits sociaux qu'il étudie. Son livre n'est donc pas une
philosophie de l'histoire, mais une cotiection de faits sociaux
régulièrement disposes autour de leur centre psychologique.
Ce centre psychologique, c'est t'activite..On peut distinguer
dans Factivité deux degrés l'instinct et la volonté, l'activité
irréfléchie et l'activité rettechie. La première caractérise la vie
AXAU-SHS.ËTUORS
$(;)<LKSMŒUKS 289
re'titK<'f'nt)f)('f<'t)ft<)ueft«!)!t!if!.)~))~t
des sauvages, )').
ta seconde celle des civilisés telle est l'idée
muttressedu livre. Il suffit, en eltet, suivant l'auteur. d'ana.
tyser t'instiuct et ta volonté pour voir quels caractères doit
prendre la vie physique, intellectuelle, moraic et religieuse
d'êtres soumis chacut) de ces modes d'activité. Ainsi les cuu-
tumos, les mmurs, les sciences, les arts et les religions varie-
raient comme varie l'activité des hommes.
L'acte instinctif est violent mais de courte durée déter-
miné par une excitution physique, i) a ia force Ht ta durée de
cette excitation. Il est aveugle puisque sa causeest mécanique;
il ne suppose qu'un minimum d'activité intellectuelle. Ces
caractères psychologiques, que tout le monde accordera ù
fauteur, lui suflisent. – La vie des sauvages, voues ù ~'ius-
tinet, sera une vie de passion leurs actes seront violeuts,
tuais leur activité vite lassée; leur vie est une succession de
crises passionnettes. Et leur vie sociale ressemble il leur vie
individuciie: c'est une série d'événements sans lieu
puisqu'ils
se succèdent au hasard des impulsions. En
dépit de ia couti-
nuité que la forcedo la coutume donne à leur existence, on ne
peut pas dire (lue les peuples sauvages aient une histoire
i! ne peut être question pour eux que d'une « chronoloKie
L'instinct est aveugle, il ue voit pas l'avenir et n'est pas
guide par des fins prévues les sauvages ne prévoient pas;
leur économie politique demeure rudimentaire parce qu'ils
ne connaissent ni l'épargne ni la production préventive ils
consomment leurs richesses à mesure qu'ils les produisent.
– De même leur droit
péoai est imprévoyant il réprime,
mais ne prévient pas le crime. 11est vrai que cette
impré.
voyance enieve aux sauvages des soucis leur humeur est plus
gaie et leur félicité plus parfaite que celle des civilisés. Leur
activité, se déployant sans but, est une activité de < jeu
elle va au hasard, cite se gaspille ses produits sont par suite
plus nombreux que ceux de l'activité civilisée les langues
des sauvages sont plus riches que les nôtres et (tans tous les
domaines de leur activité on remarque le même luxe. Mais ce
luxe est stérile. L'activité de jeu des sauvages ne produit pas
un art véritable il n'y a pas de < création citez eux, car
pour créer il faut agir en vue d'une fin. L'instinct, purement
mécanique, ne donne donc naissance qu'à un art passif,
imitateur, mais non créateur. La même stérilité se note
dans l'intelligence. Aux deux degrés de l'activité corres.
pondent en eilet deux degrés d'intelligence t'assm'iatiou et
H.t<mxM)!t!).–Ant)cK!.ucio).t8')T.
290 L'ASXÉHSOCtOU"UK.i~7

t'aperception. l'une passive, l'autre uctive les sauvages ne


connaissent que ia première leurs pensées, comme ieurs
actes, se sucefdent donc au ~ré des circonstances. Us ne
peuvent s'élever à l'idée de la science leur tour d'esprit est
mythologique en etiet, dans ia formation des mythes,
l'analogie, la métaphore jouent ie rote essentiel or, 1 anaio-
t ;ieet ia métaphure ne sout que des espèces d'associations. –
D'autre part. cet état d'inconscience dans toque! l'instinct
laisse l'âme humaine ne permet pas a la personnalité de se
reconuattre l'individu ne se distingue pas de ses voisins
par suite, il ne peut pas trouver en lui-même des raisons
d'agir et de bien a~ir. La moraie est tout extérieure non
seuiement elle ne propose pasa l'individu de se prendre pour
nn, mais eiie n'it~it sur les hommes que par ia voix de l'opi-
nion publique et de ht religion. La conscience morale ne
s'éveille pas. Mutin, l'instinct a sa cause en dehors de
l'homme l'être soumis il l'instinct nese sent donc pas maître
de sa destinée il pius forte raison ne se sent-ii pas maitre de
la nature; au contraire, il en est l'esclave et ii reconnatt cet
esclave'* le sentiment religieux est un sentiment de crainte
et de dépendance. Des coutumes économiques imprévoyantes,
nn droit répressif, une morale extérieure, nn art impuissant,
une science mythologique et une religion de )a peur, voiià
donc ce que l'homme, a l'état de nature, doit il la prédomi-
nance de i'in-tiuct.
four avoir le portrait du civilisé. il sunit de remplacer
chaque trait du sauvage par son contraire l'activité caracté-
ristique du civilise est en pftet l'activité libre qui est '<!con-
traire de l'instinct. 11 en resuite que les peuples civilises
seront capables de < grands desseins et de vastes pensées
ils ne s'an'ett'ront pas quand l'impulsion, venue du dehors,
aura cesse d'agir; leur histoire dépendra de leur volonté
et tout*volonté est tenace parce qu'elle est raisonnec. Leur
vie présente donc de ia continuité et les événements
en sont t'eues par des idées on peut dire qu' ils ont une
histoire
D'autre part, les civitisés sont des prévoyants. Le souci de
l'avenir, voila peut-être le critère le plus sur de la civilisa-
tion or, il ne peut prendre place qu'en (lésâmes soustraites
aux impulsions de l'instinct. L'économie politique en dérive
l'asrieutture et l'industrie produisent des objets non seule-
meut pour les besoins du jour ou du lendemain, mais pour
A~ALYSHS.– )ÈTFU)MSUR LES MO)itJ«S 29<

ceux (les années futures. Un oc vit pas nu jour le jour on


fait des réserves, on épargne, on capitalise pour t'avenir.
Assurcment, ce souci de l'avenir n'est pus sans inconve.
nieuts. Il tue, dans l'esprit des civiiises, lu bonne humeur des
sauvan''s; partout ia civilisation amené avec ettet'iaquietude.
Mai!), mai~n' ce pessimisme, la civiiisation n'est pas iufe.
cunde. L'activité volontaire est une activité économique elle
permeta i'hommed'obteuira moins de frais plus de résultats
la hm~uG anK~'ise est moins riche eu synony)m"i que les
tangues des sauvages, et pourtant elle jternx't de mieux
exprimer la pensée.)':t il en est de même dans les autres
domaines de l'activité. < Organisée, l'activité des civilises
est moins gaspiiiecque l'activité de jeu des snuvages.
Elle est aussi plus créatrice notre art n'est. plus passif ce
n'est pas une simple imitation de ia nature c'est une création
de Ja beauté. Elle imprime son <-araetere & l'entendement
même la science des civilisés n'est pas < mythologique
elle n'est pas une série d'associations d'idées, mais un sys-
tème d'aperceptions solidement oncttatnees. Plus active, la
conscience s'cvcitie et se revête à etie-meme I'individu:))it6
se distingue des individualités voisines ia di~'if'' person-
neUe devient le motif morat de nos actions. ]!:)bi)uee a deii-
herer, c'està-dire à peser ia r<~<'<«' de nos actes, la voionte
applique a elle-même cette notion de valeur, et l'homme
comprend qu'il a une destinée morale a remplir. Aux ordres
tout extérieurs de l'opinion publique et de la religion se joi-
gnent tes prescriptions de la conscience morate.
Enfin, cette morale influe sur ia rétinien même. L'homme,
par ia vujonte. s'aperçoit que ia nature externe n'est pas la
seule cause de ses actes, qu'il est lui-même l'ouvrier de son
être il est indépendant de la nature, il en est le maitre. Des
lors il n'a pius il emindre cette nature ni les êtres terribtes
que ia < penséemythologique des premiers a~es voyait der-
rière les forces naturelles. Dieu, c'est t'ideai morai sur lequel
ia voionte se modèle. Moral et religieux sont toujours syno-
nymes mais dans ia civilisation les actes ne sont pas moraux
parce qu'ils sont dictés par les dieux au contraire, un ordre
parait divin quand il est moral. L'ueéconomie politique pré-
voyante, un art créateur, une science explicative, une cons-
cience éclairée sur sa propre vaieur et une religion moraie,
voita donc ce que l'homme civitisu doit à la prédominance de
la volonté sur l'instinct. ·
:Kh! L'AXXKHMC)OLuUtt.)t;K. )«'?

L'auteur n'oppose pas ces deux portraits sans reconnattro


qu'it existe entre eux de:}intermédiaires. Mntret'etatde nature
et ta civilisation itptace lu demi'civitisation. Le genre ch'itise
tui-meme comprend des vitt'ietes. Cependant, il est peu étendu
car ta civitisation est, selon ~t. Vierkandt.un fait exceptionnet
et presqueauormat.t'ourtui,un ettet. deux exemptesdesocietes
civitisees peuvent seuls être produits ta société bettenique
du v' siècle et la société européenne des temps modernes. Les
Chinois, les Égyptiens, les Phéniciens, les Homains mêmes
dans l'antiquité, tes Arabes et les Européens du n;oy<'n âge
n'ont été que des demi-ch'itises. A deux reprises seulement,
ta civilisation est née eu (h'ece au Y"siecte, eu Hurope a la
Heuaissance. Connnent expliquer cette t'arete d'uu pheuo
mené aussi intportaut'C'est que t'ucth'ite instinctive est
favorahte a ta vie sociale tandis que l'activité reHeettielui est
nuisible. Ce qui pousse les hommes a s'unir en sociétés, ce
D'est pas ia conscience ci.tirc, mais c'est un instinct.Que la
votante l'emporte sur l'instinct, et le sentiment social tend a
disparaître uue société qui tend a se civiliser tend doue à se
suicider, t'at'tout, réciproquement, où le sentiment social
reste fort, ta civilisation avorte. L'auteur insiste sur ce point
et démontre son opinion par des arguments varies (p.5, N4
à ~t!, Les actes instinctifs, dit-il encore, sont plus
simples que les actes votontaires; par suite, ils peuvent être
conçus par un plus ~rand nombre d'hommes a la fois les
cotnbinaisons eomptiquëes ont moins tic chances do se pro-
duire que les combinaisons ptus simples; les aspirations ins-
tinctives sont donc pius générâtes que les tendances votou-
tuires; par les instincts un plus ~rand nombre d'hommes
conttnunient que par tes pensées ciaires t instinct unit, la
votontu divise où cetui-ta t'emporte dans la bat'ba.'ie –
la société est forte; oit celle-ci predumine – dans ta civilisa-
tion – la société s'anaibtit il y a doue comme une antinomie
entre société et civilisation. Sans doute la morale et la civili-
sation sont en harmonie car la morale, telle que l'entend
M. Vierkandt, est inseparubte de la dignité personnctte tout
ce que ~"c la conscience de soi est j;e par ta moralité.
Mais le triomphe de la morale, assuré par ta civilisation, n'en
est pas moins ta ruine de ta société. Comme l'homme est un
< animât social il n'est pas un animât « ch'itise c'est
pourquoi ta civilisation n'est dans son histoire qu'une excep-
tion.
AM).YSKS. – ÉTUOKS !L'K LES N(t:Uf)S 293

Pour cette raison, la civilisation est perpetueiiement en


état d'equiiihre instable. Les vrais civitiin's sentie petit
nombre m6me (tans les sociétés civitisces. Et d'ailleurs ta
civilisation ne peut pas étendre indéfiniment son empire saua
faire courir un danger a l'humanité, car si eiieretnet eu
question toutes les coutumes ou toutes les croyances tradi-
tionm'ifes, si elle veut tout passer a i'épreuve de ia critique,
si elle renonce a agir sous prétexte de délibérer. n'est.it pas à
craindre qu'elle n'aille à sa ruine en ruinant lu vie sociale?
La civilisation est donc une Heur rare et éphémère dans
l'histoire de même que l'activité volontaire dans ia vie indivi-
duelle.
On ne saurait dissimuler le piuisir que procure à l'esprit
l'ingéniosité de toutes ces déductions. Quelques-unes d'entre
elles choquent bien le lecteur, et s'ii t'tait dans lu logique du
système de considérer, comme le veut Fauteur, les savants et
les marchands comme des représentants d'un môme type do
civilisation, ou ne pourrait que plaindre le système une telle
conséquence ne sullirait-elle pas à le condamner ? Mais. outre
que d'autres remarques de l'auteur lui-même tendent à faire
rentrer les marchands dans une classe moins* intellectuelle
on sera moins tenté de lui reprocher ia bizarrerie de la pre-
mière assimilation si l'on remarque les transformations que
)a science moderne introduit dans ia technique c'est par le
caractère scientifique de son industrie, de son commerce et
de sou agriculture plus que par leur extension que se dis-
tingue notre civilisation. Même dans les déductions les plus
osées, on peut donc trouver des vues exactes.
Pour ce quiestdu principe gênerai de ia théorie, si l'on en
juge d'après ses résultats, it prête à ia critique. Il exige que
la rciigion primitive soit une religion de )a peur. mais on
verra, par d'autres chapitres de i'.tKx~ combien est discu-
table cette conception des premiers cultes. La famiiieet i'Ëtat
s'expliquent moins bien encore dans lit théorie de M. Yier-
handt. L'auteur dit, i) est vrai, que, en raison de la prépondé-
rance de l'instinct, les peuples sauvage'' sont divisés en deux
classes, taudisqu'une troisième, cciiede i'intei!igence,s'ajoute
aux deux premières citez les civilisés. Mais c'est la seule expli-
cation qu'il donne des faits d'ordre politique. On peut bien
combier en partie cette lacune, montrer, par exempte, que
le parlementarisme est le gouvernement propre aux êtres
dont l'activité est reMehic, tandis que l'autoritarisme convient
:M4 L'ANXÈt: SOCMMCtQUE. t'ii'7

a des sujets impulsifs. Mais pourquoi telle forme de t'autori-


tarisme est-ette adoptée ptut')t que telle autre ? La tttéorio
semble impuissante a le dire. Kt de même on ne voit guère
comment la polygamie serait liéeil Fimputsivite, la monoga.
mie à la ruflexiuu. Deux groupes d'institutions sociates. –et
uon des moins itnportantes – tes institutions politiques et sur-
tout les institutions domestiques, paraissent donc échapper
à lit déduction de M. Vierkandt il n'a pas cuordonnf au point
de vue psychologique tous les faits sociaux.
D'autre part, sa classification des faits sociauxest rudimeu'
taire. Placer d'un côté les Grecsdu V siècle et les Européens
modernes, et de l'autre tout le reste de l'espèce humaine. c'est
donner une classification plus grossière que celle qui pluce
d'uucdtet'hommeet de l'autre tes animaux,car, entre t'homme
et l'anima) il a, au moins en apparence, une ditTerence
essentietie, tandis que, de l'aveu de i'auteur. les sauvages et
les ch'i)iscs ne sont sépares que par des degrés. Des tors, ne
tattait'it pas distinguer quelques-uns de ces degrés'Hst-ii
d'une honne méthode de t'anger sous ta mémo rubrique les
Chinois et les Arabes, ou même les Australiens et tes Siuux ?`I
Si imparfaits qu'ils soient, les documents que nous posse.
dons sur ces sociétés nous permettent d'établir des classifi-
cations plus précises. Mais M. \'ieri<audt, ayant voutu tout
déduire des modes de l'activité et n'ayant distin~Uf que
deux de ces modes, ne pouvait distinguer que deux espèces
de sociétés.
Il en résulte que les explications de M. Vierkandt demeu-
rcnt abstraites elles rendent compte des aspects les plus
généraux de la vie des sociétés inférieures; mais elles ne
déterminent pas avec précision les institutions caractéris-
tiques de ces sociétés. C'est que fauteur omet un facteur
important l'association. Uumode d'association, de ta manière
dont les individus reagissent les uns sur les autres dépendent
en effet tes coutumes et tes croyances. Hieuqu'elle se nomne
sociate lit psychologie de M. Vierkandt demeuretrop voi-
sine de ia psychologie individuelle.
Pourtant, cette psychologie reposesur un postulat dont lit
valeur n'est pas douteuse elle suppose que i'amc humaine
est partout semblable et que par suite les lois de ta psychologie
générale sont partout appliquées. Et sans doute ce principe
n'est pas neuf M. Vierkandtcite, en épigraphe, une phrase
de Kadaiitac qui dit Toujours et partout nous trouvons
AXAU'i-H<–f:TU)ESSL'RH:MftTK-! :?

citezles races humaines en apparence si ditït'rentos tes mêmes


t;uûts, les mêmes ettorts, les mcmes tendMnccs. tes mêmes
conceptions. tt aurait puciter aussila pensée de Taine < Do
même qu'en miuernto~ie,les cristaux, si divers qu'ils soient,
dérivent de quelques formes corporettes simples, de même,
en histoire, les civilisations, si diverses qu'elles soient, déri-
vent de quelques formes spirituelles simples. Ht sans doute
aussi ce principe, chex M. Yierhandt, est bien plutôt un pos-
tulat qu'une induction. Pourtant, il donne qnetques exemples
précis à i'appui de sa thèse des coutumes en apparencf con-
traires. et dont la contradiction apparente rejouirait nn Mon-
taigne, s'expliquent par le même sentiment la naissance de
deux jumeaux est considérée par certains peuples comm<?
un événement heureux, par d'autres comme un événement
malheureux y a-t-il contradiction' La tnemc cause a-t-elle
produit des encts contraires? Xon la cause de l'opinion est
dans les deux cas ta rareté du phénomène il attire l'atten-
tion et comme tous les faits exceptionnels, il est considère
comme un signe de bon ou de mauvais augure. Pourquoi de
bon augure ici, de mauvais augure tu 7 Celadépend de causes
locales, d'associationsd'idées accidenteites.Mais le phénomène
essentiel, celui qui se retrouve partout, a pour cause un fait
psychotogiquuégalement ~nerat. Ainsi, en distinguant dans
les faits sociaux t'accidentet et t'essentiet, on arriveu tes expli-
quer par leurs causes psychotoniques. cHes-m~mes partieu-
tieres ou universettus.M. Vict'kandtdonne donc des exemples
à l'appui de ta théorie de l'uniformité de l'aime humaine et il
fournit une méthode permettant d'interpréter dans le même
sens un ~rand nombre de faits. Mais admettons même que
cette théorie demeure citez lui a i'etat hypothétique. Cette
hypothèse est le postulat nécessaire non seulement de toute
science sociologique, mais de toute science humaine. Si l'on
n'admet pas qu'it existe entre les idées et les sentiments de
tous les hommes une parente et mêmeune homogénéité rota-
tive, on s'interdit de rechercher une loi ayant !a valeur des
lois de ta nature. Et des lors il est inutile de cottecUouner
des faits en vue d'inductions futures il ne saurait y avoir
d'inductions sociologiques. Mâture tous ses défauts, le livre
de M. \'iert<andt a donc le mérite de poser un postulat indis.
pensable a la sociologieen proclamant l'uniformité dosâmes
humaines.
3'M} L'AtXËKSOCtOt.O~UË.t~

nr 1't.Ah- rrrr tnnn a w·m


t)' Hx:))A)<DtHL!)EBRAXD. – _LL
Recht und Sitte auf den
verschiedenen wirtschaftUohen Kulturstufen Ers.
ter Theil. /.f <</ < Mo'«/<«x~-<f<~M pAfMM </<'
/'f''f~f<~fw~fnn~Mtff/Mt'.)lena, t-'ischer, )?< ) vu), iu-8',
tv-IUupajfes.

M. ttiidebrand se propose d'étudier le droit et les mtunrs


dans les diversesci viiisations, ctassecs au point de vue écono-
mique. Ce n'est pas qu'il reconnaisse formeiiementlu prépon-
deraucc de i'eiottent économique sur les autres etetnents de
la civitisittio)); mais, pour lui, les institutions économiques
passent pin-tout et toujours par les mêmes périodes d'évolu-
tion eUes tournisscut par suite un n)o;'t'n de dater tes autres
institutions sachant que telle coutume juridique est content-
pot'aiue det'itgc pastor!)). par exempic. nous pourrons fixer sa
date dans t'histoire,cat't'etat pastorai n'a pu se présenter qu'a
un moment déterminé de ('évolution. Les institutions écono-
miques sont dune le cadre dans k'qnet viennent se piacer tes
autres faits sociaux. M. ttiidehrattd n'unit les textes princi-
paux qui nous renseignent sur les diverses sociétés et il les
classe suivant le principe que nous venons d'indiquer.
C'est seuien)ent la première partie de son travui! qu'i)
publie aujourd'hui elle concerne les peuples chasseurs et
pêcheurs, les pasteurs, enfin les agriculteurs primitifs et les
premiers propriétaires fonciers.
Les hommes vivent d'abord de chasse et de pêche leurs
institutions économiques sont alors rudimentaires. Ils errent
à la recherche de leur proie; ils ne sont pas nomades, mais
ils sont vagabonds. La rareté de la nourriture les force en
outre à demeurer isolés: la famille est le seul groupe social;
ii n'y a même pas cm'ore de horde. Par suite. il n'y a pas de
pouvoir politique le seul pouvoir est celui de l'homme sur
!a femme et t'entant, et ce pouvoir étant unique n'est limite
par rien tout te travail tombe donc sur ia femme. Ce n'est
pas a dire que la fcnune soit une esclave ravie ou achetée si
grossier qu'i) soit, le mariage résulte, à cette époque, du con-
sentemeut des deux parties les parents donnent seulement
leur assentiment, tacite ou explicite, et ils reçoivent, eu gêné.
rai, des présents de t'épouseur mais ces présents lie sont pas
un prix d achnt. A ta vérité, M. Hitdebrand lie donne pas de
sa thèse une démonstration positive il se borne à dire qu'a
une époque où l'idée de la propriété est encore incouune, la
AXALYSES. – ÈTUnHS St'H t.t:S Mft:UKS 2')?

femme ne r.nW n~~ Ai.. la nn.~nni.SIW In unn nwnl nl l'in/hnA1


peut pas être la propre de son mari, et l'intérêt
n'est pas encore le motif exclusif des actions des hommes.
C'estseulement a t'age pastoral que nous trouvons des textes
relatifs «u rapt ou à rachat des femmes & ce moment, en
effet, la femme est devenue unericttesse; ses parents ne la
cèdent qu'a tu condition d'être indemnises le mariage se fuit
par achat. Et tes pauvres, qui ne peuvent acheter une femme,
sont réduits soit vivre cetibatah'es, suit a voter leur femme;
puis les riches, par uvaricc, imitent tu coutume des pauvres
le mariage par rapt suppose le mariage par achat comme le
vot supposelu propriété, Il faut donc renverser l'ordre admis
souvent dans l'évolutiondu mariage on place le mariage par
consentement mutue) après le mariage par achat et celui-ci
après le rapt pour M. Hitdebrand, le consentement mutuel
(d'ftitteurs aussi peu formuteque possible' précède t'achat et
celui-ci précèdele rapt.
L'homme n'en est pas moins, des l'origine, te souverain
absolu de ta famille. et ce n'est pas pour placer le matriarcat
à l'origine des sociétés quefauteur retenue le rapt au troisième
rang. Commeil n'y a pas encore de groupe comptexe, ta pro-
miscuité ne saurait exister citez tes chasseurs et tes pécheurs.
En outre, t'iuteret n'est pas eMcm'ele motif prépondérant
personne n'est encore assez avare pour que la possession
exclusive d'une femme lui paraisse être un luxe. Les passions
et les instincts naturels ou élémentaires commandent encore
sans restriction p. t4); or, parmi ces instincts naturels, se
trouve )a jalousie. Dire que ta monogamie est tu forme primi-
tive de ta famitte serait ambigu, car ta famille n'a pas encore
de forme stable et précise a cotte date: mais ce qui est sur,
c'est que la famille ne débute pas par la promiscuité. C'est
seulement chez les pasteurs qu'apparait la polyandrie; citez
ces peuples où ta femme est achetée, le pauvre, s'il n'est pas
assez fort pour la ravir et s'it neveut pas se résigner au ceti-
bat, doit s'associer a ses frères ou parents pour acheter une
femme. Et les riches font, par avarice, ce que les pauvres font
par besoin. ))emême que ta polyandrie, le matriarcat n'appa-
raît qu'à l'âge pastoral ou a ragf agricole, Il arrive, eu enet,
à ces époques, que ce ne soit pas la femme qui est achetée par
le mari, mais le mari par la femme. Dans ce dernier cas, le
mari ne joue qu'un rote secondaire et ses enfants n'héritent
pas de lui, mais de leur oncle maternet. Le matriarcat et le
patriarcat ne sont donc pas deux phases successives, mais
~!M «'
L'Af:<ÉK!-OC)0).Ot:KH.'t'
deux modes contemporains de tu famille. Les riches adoptent
le mode patriurca), tes pauvres doivent subit' te matriarcat. U
ne faut donc pas voir à t'ori~ine des sociétés mi état (t:)ns
lequel la femme prévaudrait sur t'ttomme. En résume, :'t
t'a~e de ta citasse. tes institutions sont encore dans un état
amorphe le pouvoir politique n'existe pas; et si ):) famitte
existe, elle n'a pas in forme précise que lui donnent testhéori-
ciens on n'y trouve ni promiscuité ni matriarcat. ni rapt ni
achat tout ce qu'on en peut dire, c'est que deux individus de
sexe différent se trouvent associas et que t'un, tu femme, est
sous l'autorité absolue de l'autre.
Les chasseurs sont des < prolétaires a; les pasteurs, qui
leur succèdent, sont deju des capitalistes Us ont des ri-
chesses eu réserve, teur betait. Le bétail, en effet. nesert pas
à la consommation courante; c'est seulement pendant les
disettes ou pendant les fêtes qu'on ubut un animât. Au début
de t'uge pastot'a). tes hommes continuent a chasser pour vivre,
et le b6taii nesert quedanstes circonstances exceptionnfttes;
plus tard. on apprend a tirer du bétait un revenu le lait on
peut consommer ce revenu sans toucher au capital t'ctat
pastorat devient une industrie laitière le pasteur est un :;atac-
tophage
Quel droit et quelles mœurs correspondent a cet état éco-
nomique? D'abord, les pasteurs sont nomades; mais beau-
coup d'entre eux se bornent il posséder deux résidences fixes
l'une pour t'été, t'.tutre pour ta saison des pluies. En second
lieu, les dimensions du troupeau déterminent les ditnensious
du{j'roupe)nent humain charge de la surveillance. Si le trou-
peau grandit, plusieurs famittes s'unissent pour en prendre
soin. S'itgt-andit encore, s'il prend des proportions excessives.
la famille, ait contraire, se divise, et ses fractions vont cher-
cher pâture dans des directions diflercntes c'est ainsi qu'A-
braham et Lot)) se séparent. Comment sout organisées ces
familles ainsi formues par t'etat économique L'idéede
valeur étant née avec ta propriété du betait, un t'applique
a ta femme; la femme a une valeur qui s'estime ft) têtes de
bctait le mariage se fait par achat. L'autorité dans la
famille appartient donc au père et ta parenté- paternette pré-
vaut. Pourtant, le pouvoir paternct ne dure pas plus long-
temps que lu jeunesse de t'cnfant;du vivant d'tsaac, Jacob
et Ësau sont maitres dans teur maison, distincte de celle de
leur père. Au~si ne peut-on pas encore parler do famiite
AXALY~H. – HTt.'DKSSCH HM M~:UMS 2!M

patriarcale, tt n'y apasdavantitgede droit d'ittnusse. en dt'pit


de l'anecdote relative aux mémos Jacob et Ksai) t'aloe n'
do priviiù~e sur ses frères que dans les cas où te père meurt
avant lu majorité des autres enfants on d'autres termes, le
droit d'aînesse n'entraîne pus une inégale distribution des
biens après lit mort du père; mais c'est un pouvoir exefption-
net (lui est reconnu a t'atne pour que lu famitio no soit pas
privée de citef. !) n'y Il pas davantage, comme ou t'a cru, de
droit du plus jeune; mais il peut arriver qu'à ta mort du
père les ptus jeunes héritent seuls, si tes atJtet, arrives ù ta
majorité du vivant de leur père, ont reçu de lui ta part qui
leur revient. La famille, a cette époque, comprend des
esclaves ce sont des prisonniers ou des pauvres.
La famitte est eacore l'unique société il n'y a pas d'Htat;
si certains personnagesout de l'autorité, sur plusieurs fantittes
n'unies, c'est une autorité toute moraie, que leur confëre soit
teor naissance, soit leur àjfe, leur intetti~ence, teur force ou
leur richesse. Ils ne donnent pas des ordres. m:'is des con-
seils :itn'yadonc pas encore de toi.– L'ai;t!tmstoratnous
fait assister à la naissance des mœurs elles sont déjà plus
distinctes et plus reliées que dans i'a~G précèdent; tnais ces
règles viennent de la coutume: le droit n'est pas ne.
Kf'ttra-t-ii à t'age agricole? – L'auteur distingue, au début
de cette période, deux stades celui dans lequel apparatt la
culture, celui qui. voit poindre ta propriété foncière, tt ne faut
pas croire, en cnet. que i'agricuiturc entraîne immédiate-
ment ta propriété du sot. Tant qu'il y a de la terre en abon-
dance, elle est, comme l'air et t'eau, «'.f <(t<~t<M.Ht celui qui
ta défriche n'a pas encore sur elle de droit exclusif: il n'a de
droit que sur les fruits que sou travail a fait mth'ir. Le sol,
eu tant que sol, n'est pus eucore approprie. C'est a ce stade
qu'appartiennent tes Germains que nous décrivent César et
Tacite. Aussi M. Hitdebrand entre-t-ii dans un examen
minutieux des textes de ces auteurs pour rétablir, contre
certains interprètes, )a physionomie exacte des Uermains do
cette époque. Nous ne pouvons pas le suivre dans les dctaits
de son travail parfois plus philologique que sociologique. Hn
voici les résultats. Les Germains sont encore peu agricul-
teurs autour de leurs résidencesde vastesetendue~demeurent
désertes et incultes. Aussi ta propriété n'existe-t-elte pas
encore nous verrons en effet que, suivant fauteur, lu pro-
priété du sol ne peut apparaître qu'au moment où les terres
3'M) L'AXX);t;SOCtOMUtOUH.
t~

de culture deviennent rares. Les


dfcuttm'edevft'nttt'ntrnt'fM f.fsf~')')))'n)tenn
Cfrmains ne connaissent
qu'un droit de jouissance on a le droit de récolter ce qu'on
a semé, mais on n'a pas de droit sur le sol; it y a trop de
terres pour que la terre ait une valeur, et puisqu'on ne lui
reconnait pas de valeur on ue son~e pus a se l'approprier.
Hst-t-ea dire que la propriété soit collective Maisit M'ya ni
proprict);' ni cottectivite cd'mment parler d'une propriété
cottcctive? 11 n'y n pas de cottcctivitc, pas d'état sauf eu
temps de guerre, i) n'y apas de gouvernement, donc pus de
droit pubtic. L'individu n'est pas considère comme citoyen.
ni, :') piusforte raison, comme homme il est membre d'une
famille et le seul droit de cette époque comprendies règles
qui n'gissGnt ses rapports avec les autres membres de sa
famitte. Ht puisqu'il n'y apas de droit collectif, il nesaurait
y avoir de propriété collective. Conunent exptfquer, dans
cette hypothèse, les textes fameux d'après lesquels les Cer-
mains se partageaient les terres et refaisaient chaque année
le partage? Ces textes, selon M. Hitdebrand, qui reprend ici
l'opinion de Fustel de Coutanges, ont été mat compris
Mn'« </t<f/«~ dit Tacite; et on a lu f~'r't xt/c Mt</<u)f.
C'est uu contresens. Les Germains changent de champ, parce
qu'ils ont devant eux d'immenses espaces incultes, parce que
la terre n'est pas encore rare (~ «</w<</~cr mais cela ne
vetit pas
veut pliSdire échungellt leurs
dire qu'ils échangent tours chumps,
champs.<Mpf«-f<t<H/M/
.I!J"o,pl/"l¡'l/Illl",
dit encoreTacite mais rien ne prouve que ce soit la cottecti-
vite qui fasse ce partage entre ses membres; l'examen minu-
tieux des textes prouve qu'il s'agit d'une repartition des
terres d'un individu entre ses divers tenanciers. Et cet indi-
vidu tui-mcme ne peut pas encore être appelé propriétaire
du sol il ne reconnatt pas de valeur à la terre il t'aban-
donnera bientôt pour une autre. Mômeait temps de Tacite, )a
propriété foncière n'est pas encore née chex tes Germains le
seul propres qui se soit accompli depuis l'époque de César,
c'est celui-ci on reste plusieurs années sur la même terre
au lieu de t'abandonner après chaque récolte la possession
'je ne dis pas la propriété) devient plus stable.
Quand la population s'accrott, les terres deviennent rares;
elles prennent alors de la valeur, même si elles ne sont pas
cultivées le fonds par tui.memcdevientune richesse: iapro-
prit'te foncière apparaît. M. Hitdebrand montre les transfor-
mations sociales qui t'accompagnent la division des classes,
l'institution du colonat, puis du servage; !a naissance de
AS.tt.Y8KS.ËTCDËS SUMU: M(t;t;t<S HU)1
1..
t'Htat ou de ta eoiiectivité qui interdit :)ux étrangers de pos.
seder et les femmes pour éviter l'immixtion des
étrangers. Mais il s'attache surtout a démontrer, toujoursùà
la suite de t-'ustetde Coûtants. que cette propriété primitive
n'est pas une propriété coiteetive. ~ous avons maintenant tes
deux éléments qui nousman<)uaienttuntà t'iteurepour
constituer mie propriété cottectivc ta proju'iété et )a <'oitef'-
tivité. Pourtant la propriété demeure indivi.duette. L'opinion
contraire repose, dit l'auteur, sur nue quadruple confu-
sion t Elle confondr<'<cuM)HU<K< avec <'M)«</<<«.<:de i'exis-
tence de terres qui ne sont à personne, ette couciat a t'exis-
tence de propriétés qui seraient à tout le monde. – Elle
confond ~'f~<'< m~fc~ccet ~<'o/«''<</«t.~fc/.w.Or, dans les
sociétés ou t'indivisiou est d'usage, elle u'est pas du tout de
droit l'indivision estcotntnode, pitree qu'eiie permet à tous
les copropriétaires, sauf uu gérant,de percevoir les fruits de
ta propriété sans travaitier; ta division, surtout à t'ofi~ine.
est un contraire incommode, car les premiers agriculteurs,
habitues, dans t'age pastoral, à se partager tes troupeaux,
trouvent moins tacite de pat'tager le terrain mais nulle
part, ni chez les Kabytes de ttauoteau et Letourneux, ni chez
les Indiens de Sumuer Maine, on n'est tenu de rester dans
l'indivision 3"L'netrnisieme confusion consiste à prendre
un droit de~<t~MM''<'pour un droit de /<~<W. De ce que
certains individus font.pattre tours troupeaux sur un sol qui
aie leur appartient pas en propre, on conclut que ce sol
appartient à tout le monde mais il peut très bien appartenir
et il appartient reettement – à un autre individu qui cou-
cède aux premiers un droit de jouissance sur su propriété. –
4" Enfin, on confonduu droit purement («/M/«M<~<de t'Htat
avec un droit de propriété. t)e ce que t'Ètat teve des impôts
fonciers, ou conclut qu'il est le propriétaire l'impôt serait un
fermage. Mais l'existence des impôts fonciers et même du
droit d'expropriation dans nos sociétés ne prouve pas que
ta propriété soit chez nous collective. Ainsi, ta théorie do lu
primauté du communisme reposant sur tant do confusions
doit être abandonnée ia propriété primitive est individuelle.
C'est à ce point que s'arrête le volume de M. Hitdebrand,
sans qu'il ait le loisir de montrer dans le détail quelles ins-
titutions domestiques, politiques, quelles coutumes morales
correspondent à ce stade économique. U réserve sans doute
cette étude pour les volumes ultérieurs.
M'~ L'A~:Ë soctOMatQUR. tX'J?

Nous avons résumé avec quelque détni) le livre de ){. ttit-


(iebrund parce qu'il est fitit avec metttode et avec critique.
C'est un des rares livres traitant des origines do )a société
qui n'accueitto pas de confiance tous les récits des voyageurs
les premiers venus sur les premiers venus des sauvages.
Aussi ses conclusions, même lorsqu'elles ue concordent pas
avec les idées reçues dans la sociologie contemporaine,
paraissent-ettes plus solidement établies que ces idées reçues.
Un reprochera peut-être à l'auteur d'avoir abusÉ des vues
subjectives dans son interprétation de certaines origines. Par
exemple, torsqu'it dit que la promisfuite n'est pas le premier
Ctat de )a famiite parce que ta jalousie est un instinct plus
naturel et plus ctemeataire que t'interët, on lui detnandera les
preuves objectives de son ufïirmatioH. t)e nteme lorsqu'il
a)!inne que le jnaria~e par rapt est une institution inventée
par tes pauvres et imitée par les riches. 11répondrait sans
doute que ces vues subjectives ne sont pas contredites
par les textes, qu'aucun cas de promiscuité ou de rapt n'est
signa)' à t'à~c de la chasse, qu'ou n'a donc pas le droit de
considérer ces coutumes comme primitives et qu'il faut dès
lors les considérer comme dérivées de i'interet. Ataisi) reste
qu'aucun texte ne confirme positivement son hypothèse. En
outre, elle n'explique pas tous les faits de l'a~e pastoral que
des frères pauvres puissent s'associer pour acheter une
femme, c'est admissible mais on ne comprend pas que
cette possibilité devienne un devoir le caractère obligatoire
du ievirat par exemple n'est pas explique par cette cause
purement économique ta polyandrie ne s'explique pas
entièrement par la richesse ou la pauvreté des individus.
L'imitation des pauvres par les riches aurait aussi besoin
d'être démontrée. En générât, ce sont ptutot les pauvres qui,
de gré ou de force, imitent les riches. Ht. puisque M. Hitde-
brand assimile le rapt à un vol ordinaire, ou voit bien que
des pauvres sont poussés au vol par leur misère; maison
voit rarement des riches imiter cette pratique par avarice.
Avouons d'ailleurs que. si arbitraire qu'Gttesoit.t'hypothcse
demeure fort ingénieuse.
A mesure que M. HHdebrand avance dans l'histoire et se
trouve en présence de textes plus précis, l'arbitraire dispu-
raît aussi ses conclusions relatives a l'état de la propriété
chez les Cennains ainsi qu'à l'individualisme de ta propriété
primitive paraissent-elles très plausibles. H est vrai que sur
AKALYSHS. ÈTUOHSi(Uh LES MOKUHS 30H

ce point son origioaiite est moindre puisqu'il suit presque par-


tout t'opinhm de i-'usteide Couianges. Mais peu importe
t'esprit critique dont il fait preuve dans ces chapitres promet
pour )a suite de t'ouvrée des théories fortement prouvées.
L'a doute subsiste c'est que M. iiiidebrand puisse tirer du
point de vue économiqueau.quet il se p)ace tous les avantages
qu'il en attend.)) n'est pas dit un mot du sentiment religieux
des peupics décrits pourtant, )a rétinien existe chex ces
peuples et eiie itmue.sur )eur droit et sur leurs mœurs. Com-
ment n'est-ciie pas même nommée? Xe serait-ce pas parce
qn'etieextassex indépendante des faits économiquespour que
le principe de classification adopte par M. ititdebrand soit
mauvais? Je sais bien qu'il ne dit nuf)e part qu'ii .veut ratta.
cher a l'économique .toutes les formes sociales. Mais sa
metttodc lui permettra-t-eite d'arriver même a dater les faits
sociaux' L'évolution des faits économiques est-elle aussi
immuaidequ'ii iedit dans sa préface? t) remarqueiui-meme,
au début du chapih'e consacre ~ux premiers u~ricutteurs,
qu'on a pu passer de i'a~e de ta citasse a t'it~c agricote sans
connaître t'etat pastorat. iJes tors, comment acccpte-t-i) son
principe? )';t sonJivre peut-it démontrer ta thèse qu'it
annonce? Mêmes'il y échoue, il demeure un répertoire précis
et metitodique des textes relatifs aux peuples primitifs; et
surtout – on nesaurait trop insister sur ce point –ce recueil
n'est pas un amas de documents quetconques, mais une col-
lection de documents critiques.

Vtx<:Hxxo
GROSSI. – La. Morale pratica. degti (mtiohi
Messioani: ricerche e documenti etnograact '7.~Mw~c
,V<f'x'«ut.<r<'f/<('<t<el </MCt<M«'M<
~<<~f«'(/<<a<f<'«')f. <'</tNn-
~~«~/«~)<t'.< <M(/<<<f~,apriie t8U7.)
~f<r/4'~<t'c«'«~/«'«
M. Grossi met en tumiere le contraste qui existe entre !a
cruauté du droit pena) et n'tevation de ta !nora)e pratique
chez les ancicnsMexicains. D'une part, en cnet. les peines les
plus terribtes sont édictées contre le voleur et t'adutterc;
d'autre part, i'ivresse et le mensonge sont condamnes plus
sévèrement que dans nos sociétés.
C'est surtout dans les coutumes domestiques que se revête
!a pureté de cette morale. La monogamie est de règtc, sauf
pour les chefs. La femme est respectée on trouve, chez les
anciens Mexicains, cette formule evangétique Regarder
30t t.'ASXÈKMCMMt.MUK.iM'n
une femme avec une curiosité excessive, c'est commettre
t'adultère avec tes yeux. » La femme ne s'occupe pas des tra-
vaux trop fatigants. Eurevanette, elle participe aux fonctions
sacerdotates. –Ce n'est pas seulementio respect de la femme,
c'est aussi l'éducation de t'entant qui prouve combien est vit
citez les anciens Mexicains le sentiment murât. Mais sur ce
point M. Grossi se borne &citer de tondues pa~ps de Oavi-
gero.s7f)<'«!<«t~n<f/f/J/M.«t'o)et a traduire, d'après ta version
française de Hémi Simeon', t'exttortationd'un père mexicain
à son fils et lu réponse du fils à son père. Ce luu; morceau
n'est pourtant pas d'une originalité profonde il contient plus
de règles de savoir-vivre que de préceptes moraux,et t'on ue
comprend guère l'admiration qu'il excite dans i'ame de
M. Crossi pour lui, il n'y aurait riena retrancher, et presque
rien à ajouter à ces conseils. Kt il s'étonne, une fois de plus,
du contraste que présente cette morate avec la bartjarie des
Axteques. Comment les mêmes hommes peuvent-its se pas-
sionner pour les sat'rifices humains et concevoir en même
temps un idéat moral aussi pur?
Le problème n'est peut-être pas insotubte. D'une part, en
ctïet, M. Grossi exagère la pureté de cette morate c'est sur-
tout par ta crainte que le père mcxieaia agit sur t'esprit de
son fils Si tu trompes les hommes, tu ne seras pas bien vu,
tu passeras tes jours sur ta terre dans ta douteuret les larmes;
quand tu mourras, ta fin sera misérable; tes tëvreset ta langue
seront dévorées par le (eu. Qu'y a-t i! de si pur dans ces
menaces? Ht qu'y a-t-it de si eieve dans tes rentes de civilité
pueriie qui tiennent une place importante dans ce morceau?
Les Aztèques ne sont pas les seuls hommes qui, pratiquant
des sacrifices humains, recommandaientà leurs fits de satner
les gens en tout lieu D'autre part, est-il bien sur que le
texte cité soit d'une autiquitetres reculée? M. Grossi se con-
tente d'affirmer, d'après un auteur français. Chevalier, que
t'on s'est borné n remplacer dans cemorceaule nomdes diviui-
tes aztèques par le nom de Kotre-Seigneur oude Jésus-
Christ Mais on voudrait une démonstration plus complète
est-il vraisembtabte que lesauteurs de cette substitution t'aient
considérée comme suffisante ? N'aurontits pas été tentés d'in-
sérer dans le texte des préceptes chrétiens ? Hest donc pos.

~); ~Yf<))M)Ht'<f
(/<' ht ~;«'/m'M«/ttM//o« Mr.r«-ff;'n<
f'uttjxMc'' t'n t!itT.
))<n'h; t'tttnci~'ainAttdf''df <)))))".<,<')jmhti~ av.' tt'ttr", <~rtuit'i~
)H);ut!etc..)):u'H'~nit'ittt'u. t'itti",ho~t'ittu'fiL'
Uittmtmk, tK!<.
AXALY!'K'–A'm~!i!<t'ttLKSM<)!)'KS HOS

sihteque le problèmeposépar M.Grossise ramené&un pro-


blèmed'érudition l'écartréel entre la moraledes Aztèques
d'une part, leur droit et leurreligionde l'autre, serait moins
grand qu'it n'apparaîtdans des textesaltérés.

!)' Ptttt.n'pPAtJUTSCttKH. – Ethnographie Nordost AM-


kas. Die geistige Cultur der Daa&kU, Galla und
Somal (~Att~'ap/x'c;/<ttM~(/-OM< (/<- <t/h'~Mf.Cx~Mre
!«(<'«<'d«('«<'
(/M~atM~th,(~ GathMpttff<!SoM(«(<)!). – Ber-
!iu, Reimer,1896.1 vat. in-S', xvn-3t 2 pages.
M. Pautitschkes'estlivré à une étude complètedes Uana-
kils,desCaHaset desSomalis la premièrepartiea été publiée
dans un volumetraitantde leur civilisationmaterieiic i'au-
teur publiemaintenantses recherches sur la civilisationintet-
lectuelledes mornespeuples.
Aucunethéorien'est soutenue l'auteurse borne à énoncer
les faits H a contrôlépar tui-memeles faits rapportés par
d'autres écrivains,voyageursou missionnaireset il se cou-
tentede décrire.Hse place,en outre, au point do vue ethno.
graphiquequ'ilprendsoindo distinguerdu point de vuede la
psychologiedes peuples.Aussi la sociologiene peut-ettepas
chercherdansce livredes hypothèsesnouvelles;maiselle y
trouverade nombreuxdocumentspour détendreou attaquer
d'ancienneshypothèses.Celivreest un recueilde matériaux
choisisavecsoin à ce titre il est précieux.U entre dans les
défaits les plus minutieuxsur l'organisationde t'ihat et les
attributionsdes fonctionnaires,sur l'organisationdes reti.
gionset le rôledeleursprêtres nousne pouvonspas résumer
ceschapitres quant aux autres, Ils n'appartiennentpas à la
sociologiemorale,car l'auteur y parle des facultéspsycholo-
giques,du langage,de l'art et de la sciencede ces trois peu-
plades.
Avecsesréférenceset sesindex,celivresera un instrument
d'enquétetrès commode.Au point de vue qui nous occupe,
c'est tout ce que nousen pouvonsdire nous le regrettons,
car cette note n'est pasproportionnéeà l'importancede l'ou-
vrage. Maisellesera peut-êtresuttisaate pour attirer sur lui
l'attentiondes sociologues.

H. t)t;M)t)!))t.– Ann<;)i
socio).«''T.
1)
HO;; ).'AX'<KH~h;«'UH.)~t'K.tS'r

)<). –– t.A tAJOD.h t;

)'J)'M.)H')t)iMK)it.

t'rof. J. KOHLEM.– Zur Urgoschtchte der Ehe. Tote.


mismus, Gruppenohe, Mutterreoht. CoM~tf'nx rt
<«'!fo~'<'~'««//<)'<''/« M«n'<f~ ï'')/~<)('.<H«',
wart'f~eM<<'<<
<<'<fmf~c/-ttf'<.)Stuttpu't, Hntke, t vut. in-K".
j. – Ou suit comment Morgan, après avoir observé les
termes employas dans un grand nombre de tribus difMreutes
pour destituer tes divers degrés de parente, a cru pouvoir
conciure de ''M numenctatures a l'existence d'une or~anisa-
tioti tanuHtttc ou t'entant suivrait la condition de la mère et
où le mariag'e se contracteratt, non entre individus, mais
entre gruunps. Tous les honuues d'une société domestique
determint'e tl'pouset'aient cottectivement toutes les femmes
d'une autre société du même genre, et réciproquement. Apres
:n'o}r été, pendant longtemps, acceptées par la (;enera)h< d<'s
socioto,;ues, ces conclusions ont etc récemment l'objet dat-
taques vives et répétées. C'est Starckc qui u connnence puis
sout venus les frères Sarasin, qui prétendirent avoir trouve
chez les Weddas de Ccytau une organisation matrimoniale
très re~utiere et même une véritable monogamie, quoique lu
civilisation y fut très primitive'. Westermarck, dans un
ouvrage toutït) et quoique pou difïus, reprit les objections de
Stareke et réunit, pour les appuyer, un nombre assez respec-
table de documents ethnographiques'. Enna, tout dernière-
ment, Mucke tout en combattait les théories de Wcstcrmarek
et de Stareke et tout en reconnaissant l'importance des faits
observes par Morgan, entreprit de prouver que cet auteur
n'en avait pas compris le sens et en proposa une interpréta-
tion nouvelte.

(t) Me /')'(fnt/)'t'cf'nmf/f'cfo t'/o'f'rH«M'/<«M. Mnf//i'H/")f<-<t;M.y.


Lt'ipxif;.~M. – Lu tradttctionfhtn~is.'Mj'.u'u<-)K'x t'ftn~.))t't'.
At'-nn.
t~ t'tMtn)n)Frit!!S triton.Mett'oMa~t'on ff/fo)) «));<
ffteftiftttM.fbnxff
<<<j'c/<M/<'M. fit) <))'-
\'<t-).ur)t i n 'h'r )'hy)"K' 't' Mcns<;h'')t
ti'<M!h.')t
mnh'K;< der L~<Ut<!< x u
n!t)f.'r )!rit)!u. Wit'<)'a<)'-n.
?) T/tf t)):(t)t-~
M/'A«t)t<tM t)t«t')'<t){)<t.M<M~ix'.)t.'rtmt.)f. (nu )). ))M
<8'tu.
t'Ut-is.
\'<tt-ixny.
~) M~'f/f)«f~~'«Mft/ff «t !/<'ft'M<~Mt-/tt<'A~«'f t'M/X-x'tc/M))~.Stut)}t!i)'t,
<??.
A\t).KK' – H FAMtt.t.K H07
Le Hvre de M. Kobier a pour objet de réagir contre cette
tendance. Suivantiui, si ces auteurs ont ce point méconnu
i'œuvrede Morgan, c'est qu'Us ne tiennent pas compte des faits
ou qu'ils tour appliquent une mauvaise métitode. Ils croient,
t'n efïet, avoir démontré )e caractère primitif du mariage et de
ht famiiie patriarcate en faisant voir que i'un et l'autre se
rencontrent même chez des peuples dont ta civilisation est ou
leur parait être très rudimentaire. Or, outre que les critères
d'âpres lesquels on décideainsi du de~re de civilisation d'un
peuple sont, le plus souvent, arbitraires/ta question posée
dans ces termes est insoluble. Car il n'y a aucun moyen de
prouver qu'une institution quelcontlue est primitive, absolu-
ment partant. Tout ce qu'on peut rechercher, c'est si telle pra-
tique est !a furme primitive de telle autre ou en est dérivée.
On ne peut situer tes stades de l'évolution historique que les
uns par rapport aux autres; et, pour y arriver, <'e ne sont
pas les circonstances ambiantes qu'i) faut considérer, mais
les faits mêmes dont on veut déterminer la relation causate
et chronologique.
Mais cette étude même ne doit pas se faire sans méthode.
fi est des principes dont on ne doit pas se départir. M. Kohior
énonce les suivants qui, s'ils sont apptiques avec circonspec-
tion, nous semblent en effet irreprochabtes
1" Quand on constate, dans un certain nombre de cas, que
l'institution « est issue de l'institution b, sans que jamuis la
relation inverse ait été observée, il est logique d'admettre que
la seconde est la forme origineHe de ia première.
Divers procèdes peuvent donner :'<cette conclusion un
surcroit d'autorité
f<.Si t'on parvient à trouver queis sont tes facteurs qui ont
détermine révolution a se faire dans ce seus, et surtout si l'on
peut établir que ces (at'tcurs se retrouvent identiquement
dans toute société humaine
Si, là ou « est en pleine floraison, ou trouve des traces
de &qui sont en train de s'ettacer, mais ne peuvent s'expliquer
que comme des survivances du passé.
Pour savoir ce qui doit être quatiné do survivances. il con-
vient de prendre pour point de repère ia forme que présente
l'institution considérée ia où elle est parvenue il son plus
entier développement. L'observation des peuples où l'on peut
eu suivre le deciin jusqu'au moment où elle n'est plus qu'une
Simple formalité sera plus démonstrative encore.
H08 tM?
t.f)!K sm:t(n.o<n<)t'K.
H" Enfin, quand deux institutions se rencontrent constam-
ment ensemble, maigre la diversité des races et des civili-
sations, on sera fondé à supposer qu'i) existe entre elles un
tien interne. surtout si l'on peut faire voir quelles sont les
causes psychotoniques ou sociologiques qui font cette soli-
darité*.t.
C'est lu méthode ainsi formulée'que l'auteur va appliquer
à la question du mariage et de la famille primitive.

H. – Ou u vu plus haut eu quoi consiste le totémisme'


Pour ne rappeler que les faits les plus essentiels, te totemest
t'être animé ou inanimé qui sert d'emblème au clan etiui
donne son nom. Cenom cottecUfest aussi celui des individus.
Or, suivant M. Kohter, c'est sur le totémisme que repose
t organisation primitive do la famille. En etïet, c'est l'institu-
tion sociale ta plus ancienne que nous connaissions. D'un
autre côte, elle soutient avecla famille des rapports évidents
car l'animal qui sert do totem est honore comme t'ancétro du
groupe. Tous les membres du clan sont donc censés descendre
d'une même origine, être faits de la môme chair et du même
sang; autrement dit, ils sont tous parents.
De cette première proposition sort aussitôt un important
corollaire. Si le totémisme est la pierre angulaire de la
famiiie, celle-ci a du nécessairement commencer par être
maternelle, c'est-à-dire que la famille de l'enfant a été d'abord
celle de sa mère, et non celle de son père.
En effet, c'est un principe générât que nul ne peut avoir
deux totems à la fois. Car quelqu'un qui participerait simul-
tanément à deux êtres totémiques serait un hybride, un
monstre inconcevable on ne peut être en môme temps un
loup et un lièvre, une tortue et un serpent. D'autre part, nous
savons que, en vertu de l'exogamie, deux époux ne sont
jamais d'un seul et même totem. Par conséquent, l'enfant
doit appartenir exclusivement soit au totem de son père, soit
à celui de sa mère; et comme du totem dépend la parenté,
celle-ci ne peut être qu'étroitement agnatique ou purement
utérine; elle doit s'établir uniquement f.r Ma<:f«<M f< ~r m<M-

tt) CcUc')u<<ti()n tni)U':<'


tt'' t)t'th'")''ftctc j))ns)H)))<h')))<;nt jtart'ank'nr
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<tttt).< JM)'M/M<)M ~.t/<<ft~M<'t/K«, \'n, tMT.
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')'' <s r)')''< 'fat)''un <t)'ti''h*
~tf)'.tM/o'.'/f <'«''f~ )!?*.
tt'r<)tHtv){.
~3!Voymp. ~-3<-t!<).
A\.U.Ï.<H! –Ht'U))).).H KUU

ctt<<M, ou bien, au contraire, ~.f/i:'w<KMr< p<'r /cw<MN~. Parce


qu'on no peut pas ressortir à deux totems, ou ne peut pas
avoir deux familles. La filiation sera nécessairement uni-
tatérate.
De ces deux systemcsopposés, tequei est le ptus ancien ?`l
Si l'ou s'en tient aux faits directement observes, il semble-
rait qu'aucun d'eux n'eut précédé l'autre; car c'est tantôt le
premier et tantût te second qu'on rencontre chez les ditlérentcs
sociétés qui, en Australie et eu Amérique, pratiquent le
plus manifestement le totémisme. Mais comme t'unité d'ori-
gine des tribus indiennes n'est pas douteuse, non plus que
celle des peuplades australiennes, et que deux régimes
familiaux aussi contradictoires n'ont pu coexister dans le
groupe originel, il est certain que l'un d'eux doit être anté-
rieur à l'autre. Or l'auteur opte pour l'antériorité de la filia-
tion utérine. !i est inutile de reproduire ici les raisons par
lesquelles il prouve sa thèse, car nous les avons nous-meme
exposées un peu plus haut tt a toutefois le tort de ne pas
distinguer nettement entre ta famille totémique ou le ctau, et
les petites familles de fait qui se forment au sein du clan.
S'il est certain que, à t'origine, la première ne se composait
que de parents utérins, il n'est pas prouvé qu'il en ait été
de même des secondes. Cette confusion nuit a l'argumen-
tation.
Eu même temps qu'a ta famille maternelle, le totémisme,
suivant M. Kotttor, devaitnécessairement conduire au mariage
collectif.
En effet, la loi d'exogamieimplique qu'un totem déterminé
en épouse un autre, non moins défini. C'est dire que les
hommes du premier épousent collectivement toutes les
femmes du second et réciproquement. Tout individu mate
qui porte les signes du totem A est, de droit, t'époux de toute
femme qui porte les signes du totem B.
Mais M.Kohterne s'en tient pas à ces considérations géné-
râtes. Pour prouver la réatité de ces unions collectives, il
invoque des faits nouveaux,empruntés aux nomenclatures de
parents.
C'est déjà à cette source que Morgan avait puisé ses princi-
paux arguments. Voici,ramenée à ses traits essentiels, en quoi
consistait sa démonstration. Dans une multitude de tribus,

(t) Voyci!p. A!et <aiv.


fi
Ht<) ).'AXXKK<"r.)u).otitQr):.tS')*

t'enfnnt désigne par le mente nom sa mère et les smurs uté-


rines de s:) tnere. si la ntiatiou se fuit exclusivement en ti~nc
maternette:itappette les unes et les autres ses mères. De
même, itappette pères, outre sou père proprement dit. tous
les frères utérins de sou père'. n se considcre dune comme
issu de l'union contractée entre ce groupe d'itonnnes et ce
groupe de femmes, sans que. ni dans l'un ni dans l'autre, it
distinnue d'individus detcrmith's qu traite persouMeitenK'nt
comne ses parotts. <est dire. concluait Murpm, <)ue ces
deux groupes sont unisconectivement. tt trouvait unecunfir-
tnatiott (te cette hypothèse dans ce fait f)uu, )a où t'exogatuic
est etahHe depuis ioogtetxps. t'enfant. <)uiconfond sous une
tuerne rubrique sa mère et les su'urs de sa mère, desigae, au
contraire, parun mot di)ï'reut iess'eursutérines de scu père',
il les nomme, non pas ses inères, mais "es tantes. C'est doue
qu'i) nepeut pas se croire ned'ettes. ii prucedede même pour
les frères utérins')e sa n)et'e:ii tes traite, non de père-
tnais d'unctes. Or c'est bien ce qui doit arriver par suite de
t'pxo~))nie.);t'tfe-ci,e)) euft. prohibe ieconxnercesexut'i
entre frères et sœurs de tnere sous le re}{it))ede la fittnitte
maternetie. t'itr conséquent, je ne puis pas dt'voir tf jour
ni aux {rt'res de tna mère ni aux s'jjurs de mon peru. L'exis-
tence de dénominations distinctes, seiun que des rapports
de filiation suut ou non possibles entre t'enfant et l'indi-
vidu dt'si~ preuve que tout ce vocabutaireexpritne bien
des t'etations de consanguinité et de parente et puisque
tesvocat'iesf'mptoyt'-s sont cotiectifs.it faut bien quêta
parente ette-mOne ait le m~tnc caractère. Mais comment la
titiation pourrait-etiu être cottective. si le )))anat;<:ne t'était
pas?
C'est cette argumentation qu'ont attaquée Starckeet \es-
termarck. H'i ont prétendu que ces nomenclatures n'expri-
ment pas des rapports de parente que tes termes dont ettes
sont faites sont de simples formutes, etc. Sans repondre direc-
tementàtcurs critiques, M.Kohier entreprend de les réfuter
en s'attachant a mettre en retiff certaines jtarticuiarites, ou
récemment observées ou insunisamment remarquées, de tu

!hf~'<t!'Mt~'<d''jt''t't')''tu''r't)t~n''<))<t''<t"i'j!n)!h)~
tit'!tt)')<U'i)n!'j!~Ut'mit-t'ttiht~-ri)'a))<<r~tt'X))~Kt) <'?').ttYrttudtt
".)<<
j<)'i))''ij~f)Mt«r)'<'n')tat'<h'r')tnttt')t!h'f! !'tn*<h'<ttti''rr !<))''
a)~)''th'~hm'<ti))'<«h'nti!')~jUi.))!n-tti~M!t)) )«!tnwit.
La)tt'')!tr<t''))?iu)<Mfi''n~n'tt'));t)~)'ti').
\'<t-!S<. –).\t-M)t.H !tt)

terminoiogie usitée che:!les Omaitas et chez les Choctas et ou


il croit trouver une confirmation déunith'e des titMoriesdo
Morgan. J) insiste surtout sur les premiers qui ont été l'objet
d'une exce))entoétude de Dorsey
\ous sovons par cet observateur que, dans cette peuplade,
où ta filiation se fait en ti~ne patcrnetic, i'humme épouse ou
peut épouser, outre sa fenune et les smurs de ceHe-ei, les
tantes et les nièces des précédentes en !i~ne agnatiqne, c'est-
à-dire les filles du frère de ia femme et les su'urs de son
père. Or ce qui, d'après Kohier. démontre catégoriquement
que le vocabulaire conteste correspond bien a des relations
de parenté, c'est que ces conditions particuiières du mariage
rendent compte de tous les détails de ta nuinenctatm't' qui est
usitée chez ces mêmes peuples; et pourtant ils sont d'une
extrême complication, cti metne tcmpsqu'its formeut uti sys-
tème d'une remarquabte unité tonique.
En etïet, si mon père se considère comme ie mari, non seu-
fementdc sa femme et des sœurs de sa femme, mais encore
des tantes et des nièces de ces dernières, je devrai dunner
aux unes et aux autres ie nom de mères. Ht en enet, elles sont
toutes désignées dans la hu)~ue des Omahas par )u tnëme
tenne '<M<f<).Cetteexpression s'étend même plus foin, et cela
conformément aux lois de ia togiqm' la plus rigoureuse. En
cflet, si )a nièce do ma mère, étant ia femme de mon pcre,
est ma mère, la nièce de cette nièce < toujoursen !is"c u~
tique), c'est-à-dire la )i))edu fiis de mon oncie, se trouve être,
elle aussi. )a nièce d'une personne que j'appeHe tnère; par
conséquent, eu vertu du môme principe, je dois t'appeler
également du même nom et c'est pourquoi te mot d'«M/M lui
est applique.
Pour ta mente raison, je devrai considérer comme frères
on sours tous les enfants des femmes que je considère
comme mères, c'est-à-dire les enfants des sœurs, des tantes
et des nièces et des petites-nièces de ma mère. C'est enecti-
venient ce qu'on constate. Toutes ces personnes sont confon-
dues sous )a metne dénomination (<Y<f<' ou <~<t~' selon le
sexe
tJne dernière originalité de cette nomenclature s'explique
de )a même manière. Il n'y existe pas de mot spécial qui cor-
responde à l'idée do t'otMUt c'est a dire que ce rapport de

it) )tt. j<t)))MM<


«<«))<oy(At«Mtfoxe/ OAt)«< p. ~H ''t suiv.
Ht~ L'AXEE !«)(;t('t.<)).)Qt'E.tM'7

parenté ne pnratt pas y être distingué (tes autres. Or ce serait


une conséquence nécessaire du mariage collectif tel qu'il se
pratique chez tes Omahas. Rueffet, comme j'ai pour onclesles
(rères de mu mère et pour tantes les sœurs de mon père. je
ne puis avoir pour cousins que les enfants des uns et des
autres. Mais les filles du frère de ma mère sont, par défini-
tion, les nièces de ma mère; partant, d'après ce qui a été
dit plus haut, elles sont mes mères !)«) et non mes cou-
sines. Quant aux fils du frère de ma mère, puisqu'ils sont tes P
frères des précédentes, c'est-à-dire de personnes que j'appelle
mères, ils sont. non mes cousins, mais mes oncles «M~t).
Enfin, les enfants do la sœur de mon père me traiteront de
mère si je suis femme, puisque je suis nièce de leur mère,
et, si je suis homme,puisque mes soeurs sont leurs mères, je
serai leur oncle et ils seront, selon leur sexe, ou mes neveux
ou mes nièces ~«('t'«). Le terme de cousins est donc sans <
emploi.
M. Kohter passe en revue toutes les formes possibles de
parente et montre qu'elles sont toutes déduites de la même
prémisse. Nous ne pouvons reproduire ici la suite de ses
déductions nous nous en tiendrons aux précédentesqui sont
les plus caractéristiques. Mais si la nature du mariage rend
ainsi compte de la terminologie, n'est-ce pas que cette-ci
répond aux différentes relations de consanguinité?'?
Les observations faites chez les Choetas confirment curieu-
sement les précédentes. Citez ces peuples, la filiation se fait
en ligne maternelle. Or, on retrouve chez eux toutes les par*
ticutarités qui viennent d'être relevées citez les Omahas, accf
Chez les <
ffffc f~cHfc, ~ot~c/M'ï,gu'c~M y M~ t'cttfCM<'f<f.
Omahas, je donne le nom de mères, non seulement a ma mère
et à ses sœurs, mais encore à ses tantes et à ses nièces en ligne
agnatique. Chez les Choetas, c'est le nom de père qui reçoit
cette extension il sert à désigner, outre le père et ses frères,
leurs oncles et leurs neveux en ligne utérine, et toute la
nomenclature est modifiéedans le même sens. Cetteinversion
est la conséquence logique de l'inversion signalée dans le sys-
tème de filiation. En effet, ma mère, dans ce cas, peut très
bien épouser le neveu utérin de son mari, c'est-à-dire le fils
de ta MBurde ce dernier. Car ce neveu est, par hypothèse, du
totem que portent et sa mère et le frère de sa mère, son oncle
utérin, puisque le totem se transmet par les femmes.Et puis-
que cet oncle est déjà le mari de ma mère, il en résulte que
AXA).MKS.–),At'At)t).t.H 3)H

le neveu lui aussi appartieut un ctun dont les hommes sont,


de droit, les époux de ma mère. Pat' conséquent il est uu mari
pour ma mère et, pour moi, un père. On ferait le même rai-
sonnement pour l'oncto de mou père. Au contraire, la nièce
do ma mère ne peut pas s'unira mon père ni, par suite, être
considérée comme ma mère. Car cette nièce, fille du frère de
ma mère, appartient au ctan de sa mère; ce cian, par défini-
tion, n'est pas celui de sou père, ni. par conséquent celui de
ma mère. Elle est donc d'un autre clan que celui avec lequel
mon père est allié sexuellement.

tit. Quoique, prises à !a lettre, ta plupart des conclu-


sions de l'auteur ne nous semblent pas acceptables, nous con-
sidérons son étude comme une importante contribution à ta
sociologie de la {amitié. Les éléments de sun travail et cer-
tains des résultats auxquels il est arrivé nous paraissent
devoir être conservés, et peut-être facilitent-ils l'entente sur
les points contestés.
Tout d'abord, le rapport établi entre le totémisme et la
famille primitive est, croyons-nous, incontestable et it est de
nature à jeter une très vive lumière sur révolution domes-
tique. A l'origine. la religion du totem est certainement le
centre et le loyer de la vie famitiate on ne peut pas com-
prendre l'une sans l'autre. Si même il est un reproche qu'on
peut adressera M. Koliler, c'est de n'avoir pas tiré de ce prin-
cipe toutes les conséquencesqu'il implique. Nous aurons à
revenir sur ce point.
Mais pour ce qui est du mariage collectif, nous ne voyons
pas comment on peut le déduire du totémisme et les faits
nouveaux exposés par l'auteur ne nous paraissent aucune-
ment avoir la valeur décisive qu'il teurattribue. Toute t'tu'gu-
mentation de M. Kohter suppose que les nomenclatures
expriment des liens de saug, hypothèse dont il cruit trouver
la confirmation définitivedans les systèmes qu'it étudie. C'est
parce que le mot d'«M/M,par exemple, signifie, selon lui, le
rapport de filiation qui uuit une mère a ses enfants, qu'il en
conclut que t'entant voit dans toutes les femmes qu'il nomme
ainsi des épouses de son père d'où il suit que celui ci a une
cottectivité de femmes appartenant à une même famille. Et
comme le même raisonnement peut se répéter de toutes les
personnes désignéespar le mot que t'on convient do traduire
par pères, il eu résulte, semble-t-it, qu'à cette coUectivitt'
3t4 ).<X';KS<n;)n).<)t~'H.)'i<~
de femmes ''orn'spoud mie coiteetivite d'époux, c'f'st-i't-dire
que le maria~eatieu entre {froupes.Mais At.Kuhtern'a pas
répondu a t'objeetiou qui a et< déjà faite à Ator~an comment
{'enfant peut-il croire qu'il a plusieurs mûros? A ta rigueur.
on pourrait encore comprendre que l'incertitude de ta pater-
nité, due a de semblables unions, put dftertniner ie tout (te
p<«' a s'appliquer d'une manière indistincte et confuse à tout
un groupe d'individus parmi tesqm'is se trouve )non père
veritattte. Mais lu maternité n'est pas exposée a la metnf
équivoque d'où vient qu'ette puisse être également con'ue
comme cottective'?·'
Suivant notre autour, ta sente idée que !e mariage a lieu
entre groupes et non entre individus aurait sufti a produire
ce résultat Parce qu'un ensemt'te détermine d'hoaunes est
coHectivemcnt uni a un ensembie detcnnim' de femmes,
t'entant regarderait indistinctement conxne ses pères tous les
membres du pronier {troupe, comme ses mères tous ceux du
second. Maisconunent ne voit-on pas qu'une telle maternité
n'a rien de commun avec le tien de saur 'tae ce motdt'si~ne?`'
Car ce tien ne peut s'établir qu'entre des personnes définies.
Si je me sais descendu de telle femme, je ne puis concevoir
que je soutienne ta même relation avec d'autres, non plus
qu'avec le groupe forme par leur réunion. Sans doute, le mot
dont je tne sers exprime mes rapports avec ce groupe et ta
manière dont je les entends mais il est imp"ssibte qae ce
soient des rapports de consanguinité. Si donc ces expressions
n'ont rien de commun avec aucune ideededcscendance.ettes
ne sauraient être expliquées par ta nature du mariage ni, par
conséquent, servir il prouver que le mariage, alors, a telle ou
telle fomte.
Les faits mêmes rapportes par M. Kohter auraient dtt
t'avertir qu iis ne sauraient avoir ta signification qn'i) leur
donne. Toute sa théorie du système employé par les Umahas
repose sur l'extension du terme t)<~<, qu'it traduit par mère.
t)r, que veut dire au juste ce mot? Pour le comprendre, cons-
truisons le schéma de ia famitie a taquctte appartient ma
mère sous un tel reprime. Comme ta miatiou juridique est
unilatérale et qu'ctte se fait exclusivement en ligne paternette,
la famille de ma mère ne comprend que des descendants

't!y'')')'.)~.t:t~)'iti))''«' t"u))M'nK'ftt'.tt)t''n)'t<!M''))'tht la
dit'fit-M)~.
AXA).Y'.H<.–).\t'.UH).).K K)!)

<'<pcf ttt~ft~M. vit'.


f.t-Mf<('M<t<! Ktte pn'sentera donc ir.t'uspoet sui-
vant:

tj'j~'dujn'n'tnu)))~r.;t't.<t'r''r~.–t.()r'n)s.
t Tattt<t!H)~dt'))mm~t'.
t ~t;uih'«tt'h')))tt))"tf~<t/t~–fft«A~.
I:mle`du·Ir·mau·~ maha innhrr.
lil,.
).))~fi!s.–).rn)'<[it!r.<.ta)~<h'
<j)'t'<~)'t))a)t)''r''). )!t!ttt<<i'.
7~ftAn.
).ut'fU'–).<'ur.tit)<tttt".)t~t~
//tftAtt.
t.rur.fi)".–U'H!fU)<))!<<'h'tn~tth''t'
Ato~tt.
t.cnt'sHts.–L''U)~(!)!ni~<'t".t)'))irrt~<)r))t;tt)!~r<
~'tf'C[".ttt'ft'tHt)K'~tMftAf<'=!tn'j/f«.

On voit que le mot d'<«f</<«s'applique iaditïet'emment il


toutes les femmes du Rroupe doot tait partie ma tnf't'c. depuis
les plus âgées jusqu'aux plus jeuttes. Le sens de ce terme se
trouve p:u' ce)a memedetet'ntiue. Il desigttc toutes les fonmes
de ta famnie (ou du ctau' ou mon p6rc a contracta uturiage.
Sans doute, on peut av()it'que)({ue ma) à comprendre cou)-
tnentuneutetne expression pcuteouveuira tant de personnes
ditlerentes. Atais ce qui est t'ertain, c'est <;u*e)iene saurait
eveiHer dans les esprits aucune idée de descettdunce, au sens
ordinaire du mot. Car un homme ne peul pas sérieusement
considérer son arrière-cousine comme su nX're, mOnc vir-
tuette. Ce vocahuiaire duit donc exprimer tout autre chose
[jue des rapports de consanguinité proprement dits. – On
ferait voir de même quf, chez les Choctas. le mot qu'on tra-
duit par père s'apptiqne indistinctement a tous )cs hommes
du cian nnqnei mon père appartient et duot je ne fais pas
partie, puisque chez ce peuple la ntiation se fait en ii~ne
matct'neHe.
Cela pose, faut-ii couciure de ce qui précède ([ne les nomcn-
ciatures de Morgan et de Uorsey ne nous apprennent rien sur
l'organisation primitive de la famitie? Il s'en faut. U'aiMrd.
en fait, il est certain que toutes les personnes qui se désignent
par ces diilerents termes sont un, ce qui revient au même. se
considèrent comme de même san~. Puis, déjà les faits
rapportes autrefois par Morgan ne paraissent gucre pouvoir
s'interpn'ter autrement. Us portent trop évidemment )a
marque et de la loi d'exogamio et du mode de filiation adopte
par chaque société, pour être etra))j{<'rsa toute idée de
parente. Mais ce qui tranche, croyons-nous, la question,
Li
!(t(jt L'AXXëHSUCt<)L<)t:ttj)'H.t8''7
c'est ta comparaison instituée par M. Kohter outre te système
des Omahas. et celui des Choctas et c'est la ce qui fait le
grand iatérot de sou étude. En effet, chez les premiers, où la
fttiation est agnatiquo. it y a un terme d'une extension
extrême, c'est celui qut désigne les femmesdu ctan dont fait
partie ma mère. Chezles seconds, dont la filiation se tait on
ligne maternelle, on retrouve une expression dont l'indéter-
mination n'est pas moindre, mais il désigne les hommes
du ctan où est ué mon père. Les traits caractéristiques du
vocabulaire changent doue suivant que ia parenté agnatique
prime l'autre ou est primée par elle puisqu'il varie avec
l'organisation de ia purenté, c'est évidemment qu'ilen dépend
et qu'il t'exprime.
Mais alors n'aboutissons-nous pas à une antinomie en
admettant, d'une part, que ces tableaux ne figurent aucune-
ment des liens de sang, et que, pourtant, ils traduisent des
relations de parente ? Xuttement. It sufnt d'admettre, ce qui
est l'évideuce même pour quicouque est au courant de l'évo-
lutiou familiale, que parenté et consanguinité sont choses
très différentes. La consanguinité n'est pas lit condition sulli-
sante de lu pareate, puisque, aujourd'hui encore, t'entant
naturel non reconnu n'est pas, au sens social du mot, le
parent de ses ascendants it n'a, avec eux, aucun tien de
famille. t)e même, a Rome, l'enfant ne devenait pas membre
de lu famitte où il était ne, par le seul fait de sa naissance il
fallait de ptusque ieperute reçut comme tel par une cérémo-
nie appropriée, et, par l'émancipation, il pouvait également
mettre fin à toute parente, quoique ta consanguinité subsistât
intégralement au su et au vu do tout le monde. Elle n'est pas
davantage ta condition nécessaire de la parenté, puisque
l'adopté est le parent de l'adoptant et des parents de ce der-
nier et pourtant, entre eux et lui, it n'y a pas de sang com-
mun. Enfin, là même où il y a concordance, la parenté ne
varie pas toujours comme la consanguinité à Rome, elle est
beaucoup plus étroite entre les agnats et l'enfant qu'entre
cetui ci et ses parents maternels, et c'est l'inverse sous le
régime de la famitte maternelle. Cependant, les tiens phy-
siques soat les mêmes de part et d'autre.
C'est que, en efïet, la parente est essentiellement constituée
e
par des obligations juridiques et moratcs, que la société
impose à certains individus. Ces individus appartiennent à
des groupes dont les membres sout, en générai, issus d'une
AXAt.Y.OtS.).AF.\M)).).H H)7
h_ ..t_
commune origine ou se regardent comme tels. Maissi cette
condition est générate, elle M'estpus absolue ni nécessaire, et
surtout ces obligationsne se graduentni Mose classent exacte-
ment comme les rotations de consanguinité. Bien des consi.
dération'), étrangères & toute idée de descendance, peuvent
détenninet' in société dans la manière dontelle répartit, entre
les différents membres du groupe familial, les droits et les
obligations domestiques. Telle particularité de ta structure
sociale, telle croyance religieuse peuvent faire en sorte que
l'enfant soit, ici, plus étroitement rapproche, là, plus éteigne
de sa mère que de son père, mélé plus intimement à la vie de
l'un qu'à celle do l'autre; par suite, il ne sera pas parent de
l'un et de l'autre au même degré. En uu mot, la parenté varie
suivant la façon dont est organisée la famitte, suivant qu'elle
compte plus on moins de membres, suivant la place qui est
taite à chacun, etc., etc. Or, cette organisation dépend avant
tout do nécessités sociales et, par conséquent, ne soutient
qu'un rapport très tâche avec le fait tout physique de la des-
cendance.
Cette distinction faite, les nomenclatures de parents
deviennent explicables et instructives. Ce qu'elles nous
apprennent, c'est que, à l'origine ou, pour parler plus exacte-
ment, à l'époque lointaine dont elles nous ont conserve le
souvenir, la parenté était presque complètement indépen-
dante de la consanguinité. Du moins, jamais cette indépen-
dance n'a été aussi grande. Nous y voyons, en enet, classés
sous le même titre et, par conséquent, mis au mémo rang,
des individus qui soutiennent avec celui qui leur adresse la
parole des rapports de consanguinité très différents, par
exemple, mon père et ses frères, ma mère et ses smurs ou
même tous les membres féminins de sa famille. Inversement.
je distingue radicalement des personnes de même sexe, qui
ont avec moi exactement les mêmes liens de sang par
exemple, les sœurs de ma mère que j'assimile à ma mère, les
sœurs de mon père que je traite tout autrement.
C'est d'ailleurs ce qu'implique le principe très juste duquel
est parti M. Kohter, a savoir que la famille primitive a pour
base te totémisme. En effet,s'il en est ainsi, pour être membre
d'une famille, il faut et il suffit qu'on ait en soi quelque chose
de t'être totémique, c'est-à-dire de l'objet divinisé qui sert au
groupe d'emblème collectif. Mais si cette participation peut
résulter de la génération, elle peut être obtenue de bien
.<
3)S t,<HHSO(:[()LOtJt~t'H.t<7
d'autres manières, par
pur le
!e tatouage, par toutes les formes de
la communion atimentaire, de )a communion sangtante, etc.
t)e tu vient la targc pratKtue de l'adoption dans les sociétés
inférieures. Même. et elle sente, lit naissance ne suffit pas
t~o/fft'f~a faire de t'cufant un membre intégrant de la société
domestique; il faut que des cérémonies religieuses s'y sura-
jouteut. L'idée de consanguinité est donc tout à (ait au second
pian. Par const'queut. il est tout nature) que l'organisation
de lu parente exprime tout autre chose que des relations
généatogiques.
Nous disions que, peut-être, l'entente pouvait se faire sur
cette conception. H nous semble, en euet, que les théories
contraires s'y acheminent comme d'eUes-memes.h'une part,
tout ce qu'il y a d'essentiel dans le système de Morgan est
retenu dans notre interprétation; car nous maintenons que les
nomenclatures de parents tiennent a ta constitution de la
famille primitive. L'hypothèse d'un mariage collectif n'a
jamais été qu'une «~M<a /'«<<o,destinée à rendre represen-
tabies ces étranges coutumes: mais il est impossible de
meconnaitro toutes les difficultés qu'elle soulevé'. Si donc
on peut conserver aux découvertes de Morgan toute leur
importance sans recourir il ''ette invraisemblable conception,
le mieux n'est-i) pas de s'en passer? D'un autre côté,
Westermarck, écho de Starhe, tout en rejetant ta thèse de
Morgan, admet que les termes des nomenclatures corres-
pondent il une paremc sociale qu'il oppose à ta parenté
naturelle. Mais toute parente est sociale car elle consiste
essentieiiement en relations juridiques et morates, sanc-
tionuées par ia société. Elle est un lieu social ou elle
n'est rien. Si \estcrmarck a fait cette distinction, c'est
que, p"ur lui, comme pour le sens commun, la véritable
parenté se confond avec ta consanguinité et ne hit que l'ex-
primer. Mais du moment où t'en a (ait cesser cette confusion,
il ne peut plus y avoir qu'une parenté, c'est celle qui est

~t;Il') vnti <)t)'<)n tr~uv' ')'-<'~t.mph-<)''ttmria~ (-oX~-tif! ))Mu.!


'j)ti m' r'<')t))')''nt !m')<x')t<t)t M <;«)'M u<){)m ) .t K'))d<'<
)()))M'))~t)t
iunsi.Ce <)tt'<jn voit. t's) un t~t'uMjx' ')'' M'n'<''))')U!mtMto'h'nmM'. «u
dt!'t-m' ~'uni~anta un ))')t)t))~ntitisth))tun tftm))))'
nn )!)'!n))t; )'))fu<
t.) t'-tt"r))~' t'')<nn.mtun ttt'~M)M'nn?-.<t
<)')~))<Ht<t's i<h)'h't't))it~f)''f)')<H)~'<.
C' t)!<u'ia! f'<')hv(ij.<)mfunt im'uttt~tahtt's. tt'ttntricM<)ccomttttm
nvrtit pt'ttti~'<)it~ t't un ))'*h'~cun~t~tc't«'it Utt ttxxot.'Ht i'L'hth<t)K'ttt
).in)<v<t<- t'<v"h))i"n f.uot)m)'
~i Ot'f/tMf<<« t«Mt'«ty< )).'Ki.
A<f.tt.t.<K<.–Ht'AMHJ.K Ht!<

reconnue comme telle par la société. Or c'est &elle que se


rapportent les tableaux que nous devons a Atorgan.
Il est vrai que. sous )a famille qui nous est ainsi revetee,
ces auteurs croient en distinguer uneautre; mais nous verrons
à propos de l'ouvrage suivant que les groupements qu'ils
appellent ainsi ne méritent pas ce nom.

CROSSE Has~T). – Die Formen der Famttie und dte For-


mée der Wirthsohaft. (/,<</M)WM<f</«t<t/~t'< <<'< /f~'M<'s
J<' f(tt't<f<<<'
~wtfw«~'«' t''ribourg-eu-)h'isgau, J.-C.-B.
Alottr. ~Mp. in 8".

Cet ouvrage est conçu dans un tout autre esprit que le pré'
cèdent. Tandis que M. Koincrs'attachttitsurtoutà detertnincr
quel aete le puintde départ de t'evoiution famitiaie, At. drosse
laisse systemati({uetnentdecôte tous les problèmes que peut
soulever le devenir de la société domestique. Jt estime, sans
d'aiiteurs prouver autrement son opinion qu'en atténuant
l'échecde ta tentative <ieMorgan, quei'heure n'est pas encore
venue d nhorder ces questions. Hse propose donc uniquement
de décrire les dinerents types de famille que l'on peut cons-
tituer par l'observation directe, en les rattachant à leurs con-
ditions concomitantes, mais sans chercher aucunement a tes
enchatner les uns aux autres suivant un rapport chronologique
et causal. H iaisse entendre, d'ailleurs, que, ù son sens, les
véritables causes des institutions se trouvent beaucoup moins
dans le passe, c'est-à-dire dans les institutions similaires qui
ont précédé, que dans le pt'escnt, c'est-à-dire dans t'etat du
milieu social dont elles font elles-mêmes partie et dunt elles
dépendent. Kt comme, de tous les facteurs sociaux, c'est ie
facteur econonique qui lui parait le plus important, il prend
les différentes formes do l'activité industrielle comme points
de repère pour distinguer les formes correspondantes de l'or-
gaoisation familiale. Ainsi s'explique le titre du livre.

1. Tout l'ouvrage est dominé par quelques définitions


fotidaiiienliiies qu'it est nécessaire de résumer. L'auteur dis-
tingue trois sortes de famitte ta famille .ft'<o jtfM.fM. tctto
qu'elle existe à l'heure actuette dansles grandes sociétés euro-
péennes lit famille /«<oM';t.ofelle ctnn f'/«' -St~f).n définit
ta prentiere ta cotnmunante forntt'e par nu homme et une
femme, qu'unit un tien matrim~niat durat'te etexctusif, pt par
MO t8'n
t/X!fKK~t:)')t.m!)t~'K.
les enfants nés de ce mariage. La famille au sens targe com-
,n.i .,ulu., L,n'IonMn, .,11.u·n.·t.· 1.1.
prend, outre les parents et leurs enfants, les femmesdes (!tset
teurs enfants, les femmes des petits-iitsct leurs enfants. C'est
la première. éteoduo à toute la suite des générations issues du
couple initia). Quant au ctun, c'est l'ensemblede tous ceux
qui se reconnaissent comme unis par des relations de consan-
guinité. Toutes ces formules sont rapidement énoncées au
début de l'ouvrage, comme si elles étaient évidentes par elles-
mémes. Hn réalité, et!os laissent échapper une partie des faits
qu'eUes devraient exprimer. Quelleest dans cette classification
la place de la ~«<<'«~tslave, de la Jo«t~«n)t<tyde Sumner-
Maine? Ce n'est pas simplement une famille <«? .«'K.fM: car
elle comprend des branches cottatérates. Uira-t-on que c'est
un clan ? Mais, justement chez les Slaves, le ctanse distingue
très nettement de la Zadruga c'est le tra~tro. Et il en est de
même dans t'Inde. en Germanie, etc. Nous verrons plus loin
les conséquences de cette confusiou.
Pour ce qui est des différentes sortes d'organisationéconomi-
que, fauteur s'eu tient à ta distinction traditionnelle: peuples
chasseurs, peuples pasteurs, peuples agriculteurs. ti se con-
tente d'introduire dans le premier et dans le troisième groupe
deux sous-divisions et de distinguer chez les chasseurs et chez
les agriculteurs deuxstades, l'un inférieurett'autresupérieur.
Les peuples chasseurs du premier stade (ûjp ««'~c~t J«<<'r)
différent de ceux du second en ce que, citez ces derniers, l'art
de la citasse est pl usdéveloppé et dispose d'instruments plus
perfectionnés; ce qui permet ia civilisation de prendre un
peu plus d'essor. On retrouve une différence analogue entre
les deux sortes do sociétés agricoles. On obtient ainsi cinq
types sociaux caractérisés par la nature de l'industrie. L'au-
teur, toutefois, n'entend pas dire que ces lignes de démarca-
tion soient tranchées; on passe d'autant plus facilement d'un
type à l'autre par une gradation continue qu'il n'y a pas de
peuple qui soit exclusivement chasseur ou pasteur, etc. Mais
c'est toujours telle ou tette forme économique qui est prépon-
dérante. Enfin, it faut ajouter que, conformément à son prin-
cipe, M. Grosse ne présente pas cette série comme représen-
tant l'ordre do révolution économique. Il laisse la question
en dehors de sa recherche et se demande simplement quels
sont les types familiaux qui correspondent aux types sociaux
ainsi constitués.
Les peuples qui pratiquent la forme inférieure de la chasse
AXAU-SR". L.t t'AMUJ.tf 3~1

.1., ~"n n.t. .1.1--


sont, par exemple, les Boschimansen Afrique, les Wedda àx
Ceytan, les tiabitants de ta Terre-de-Feu, les Hsquimaux en
Amérique et, surtout, les ditlérentes tribus australiennes. Ce
sont des nomades qui errent par petites troupes sur d'assez
vastes surfaces de territoire. H ne s'y trouve aucune trace do
division du travail ni aucun pouvoir centrai. Chaque division
jouit d'une autonomie a peu près pomptpte. La nature de la
famille résulte de cet état de ta technique économique. Dans
de pareilles conditions d'instabilité, de grands groupes fami-
liaux ne sauraient se maintenir. C'est pourquoi ce qu'on ren-
contre, c'est )a fami))o~n'c~ww!t<, comprenant l'homme, la
femme et tes enfants. S'appuyant surtout sur le témoignage
de Curr, Grosse rejette donc complètement tes théoriesd'après
lesquelles ou trouverait chez ces peupiades, sous le nom de
mariage collectif, une promiscuité plus ou moins développée.
Partout, en Austratie notamment, on trouve l'homme uni A
une ou a plusieurs femmesdéterminées, (jénéraiement même,
ia monogamie est ia règle. La femme est si peu commune
qu'elle est la propriété de son mari celui-ci peut lit frapper,
la vendre à son gré. !t n'a pas un pouvoir moins étendu sur
ses enfants. Par conséquent, quoi qu'on en ait dit, ia famille
n'y a point la mère pour centre; elle n'est pas maternetie.
Mais au dota do cette famille restreinte que M. Grosse ne
craint pas d'appeler patriarcale, il y a le clan forme par )a
réunion de plusieurs famitiesparticulières, issues d'une même
origine. L'organisation du clan donne lieu à deux remarques:
1° elle est inconsistante; les relations entre les familles qui !e
forment sont rares et taches; 2" tantôt les clans se recrutent
complètement par voiede filiation agnatique. tantôt, et c'est
le cas le plus gênera), quoique i'eufant vive dans le ctan de
son père, il porte le nom (ou totem) du clan où est née sa mère.
C'est sur ce dernier fait qu'on s'est appuyé pour soutenir que
la famille, en Australie, avait été primitivement utérine. Mais,
d'après notre auteur, c'est donner à un usage tout extérieur
une importance qu'il n'a pas. Dans notre Europe actuelle,
t'entant porte le nom de son père. non celui de sa mère.
Cette pratique n'implique pourtant aucune primauté de la
parenté agnatique sur l'autre. Pourquoi la coutume austra.
lienne aurait-elle plus de signification? De quelque manière
qu'on dénomme l'enfant en Australie, c'est chez le père, dans
le clan du père, sous l'autorité paternelle qu'il vit. Cela seul
importe. Reste, cependant, à expliquer
· i comment l'enfant
».~

K.Ut:tM:M)M.–.AMm!t')<'i<tt.))i')?. gj)
L'AXX~K <M7
SOt:tumti)~CK.

porte le totem de sa mère, si c'est le père qui est le centre de


la famille, Reprenant une idée de Curr, l'auteur ne voit dans
cette réglementation qu'un artifice destiné à empêcher
certaines relations incestueuses, spécialement abhorrées.
Commet'entant est uni à sa mère par des liens physiques ptus
immédiats qu'à son père, ces sociétés, qui ont l'horreur des
mariages entre procites, se seraient appliquées particutiô.
rement a prévenir les unions entre parents utérins. La société
totémique se serait organisée dans ce but; elle aurait donc
compris tous les parents entre lesquels le commerce sexuel
est plus expressément prohibé, c'est-à-dire les parents par les
femmes et eux seuls. Mais elle n'aurait pas d'autre portée.
Les peuples chasseurs du stade le plus eteve (<<«'/tOf/tf/'CK
J~<) ne dinerent des précédents qu'en ce que leur citasse est
plus productive, soit à cause désarmes qu'ils emploient, soit à
cause de l'abondance naturelle du gibier. C'est surtout dans
l'Amérique du Nord, tout le long de la côte ouest, que ce type
social est le plus largement reprc'sente. En Asie, on en trouve
au nord-ouest, dans le Kamtshatka, par exemple. Par suite
de cette aisance plus grande, ils forment des sociétés beau.
coup plus considérables qui comptent parfois jusqu'à
tOOOO têtes. En même temps, ils deviennent moins nomades,
ils ont des maisons et de véritables villages. De ià résultent
les quelques particularités nouvelles que présente, citez ces
peuptes. la société domestique. La seule notable consisterait
dans une plus grande consistance du <:)an,qui se fixe sur le
sol d'une manière définie. On trouve de vastes maisons qui
hébergent MUet 300 membres d'une même tamitte, et entre les
dinérentes maisons de ce genre qui forment un village il
parait bien exister aussi des liens de parenté. Quant à l'orga-
nisation, elle est la même qu'en Australie, et, comme it avait
déjà fait pour les tribus australiennes, l'auteur qualifie ces
clans de paternels (p. 86), quoique l'enfant hérite du totem de
la mère. Cette erreur tient toujours à la même cause, à savoir
a l'extrême indétermination où reste la notion du clan. Sans
doute, il arrive souvent que le mari emmène sa femme chez
lui que les enfants, par conséquent, naissent sur le territoire
occupé par le père. Mais c'est le totem, et non le territoire
occupé, qui fixe le clan des individus; l'enfant peut habiter
chez son père et appartenir au clan de sa mère. Du reste, de
t'aveu de l'auteur, c'est souvent le mari qui vient vivre étiez
la femme où il occupe une situation assez inférieure (p. TI et
AKA).Y!:)M.– LA t'AM)H.E 323

?)). Dans ces conditions, ou ne s'explique pas que M. Grosse


quatttte de patriarcale cette organisation familiale et dise
que l'homme en est le chef*. Hajoute, il est vrai, < qu'il doit,
parfois, renoncer à ses droits pour des raisons Économiques
(p. 8) La constitution patriarcale de la famille est, paratt-ii,
bien peu solide pour dévier aussi facilement do sa nature.
La distance est grande entre ces sociétés et les peuples pas-
teurs (Kirghis, Mongots.Thibétains. Arabes, etc.). L'élevage
est entre les mains dos hommes dont l'importance sociale se
trouve ainsi sensiblementaccrue. Elle augmente encore par ce
fait que ces tribus sont souvent en guerre les unes contre les
autres car les vertus militaires ne peuvent acquérir plus de
prix sans que la prépondérance masculine s'accuse. De tout
cela viennent les rares nouveautés que présente la famille.
Comme, pour élever des bestiaux, il n'est pas nécessaire d'être
très nombreux, les familles particulières sont isolées les unes
des autres. Le clan ne prend quelque consistance qu'en temps
de guerre. Quant à la famille ~'<ffo seMM,par suite de l'auto-
rite plus graude des hommes, le caractère patriarcal en devient
encore plus marqué. L'homme achète la femme par un con-
trat régulier et, par conséquent, il en est propriétaire. Le
pouvoir paternel n'est pas moins absolu. H est vrai que
l'auteur a quelque mal à expliquer certaines pratiques, diffi-
cilemont conciliables avecun esprit patriarcat aussi invétéré.
Chezles Arabes, citez les Cafres, la famille de la femme inter-
vient souvent dans les relations entre époux et limite singu-
lièrement la puissance maritale (p. 113;. H y a surtout l'insti-
tution du mariage Mota,étudiée par Smith chez les anciens
Arabes Sousce régime matrimonial, la femme reste chez
ses parents et les enfants appartiennent à la famille de leur
mère. M. Grosse dit, il est vrai, que ce genre d'union n'est
qu'un moyen pour les femmesriches de maintenir leur indé-
pendance. C'est possible mais il y a des femmes riches
aujourd'hui commeautrefois, et pourtant notre droit n'admet
plus de semblables combinaisons. Pour qu'il les tolérât chez
les anciens Arabes, il fallait pourtant que l'autorité maritale
et paternelle y fut moins absolue qu'on ne dit. On est égale-
ment étonné de ne pas trouver dans ce chapitre une étude
plus approfondie sur la formalitédu rapt et sursesorigines. tt
est vrai que, suivant M. Grosse, jamais le rapt n'aurait cons-

axd Jtfat'Wa~e
(1)~<tMA)p «) M<j;<tf<t&<a.
M4 t.'A'<K)!)i ~"tnu).Kt;)Qt'H. <?*!

titué une formalité iégaie du mariage. Cette assertion surpre-


naute aurait eu besoin d'être prouvée.
Les peuples agriculteurs du degré inférieur no sont pas
nécessairement descendus des précédents et ne sont pas d'une
civilisation supérieure. Us ressortissent à une autre brauche
de t'évututiou humaine. Maisce que l'agriculture apporteavec
elle par la force des choses, c'est )a vie sédentaire qui permet
aux grands groupements de prendre plus de stabitité en se
fixant sur le sot. Il en résulte que le etan se constitue très
fortement il devient lit société domestique proprement dite
et absorbe dans son sein lit famille particulière qui perd son
individualité. C'est ce que l'auteur établit en passant en revue
les peuples(le la Maiuisie, certaines sociétés méianésieuMset
surtout les tribus indiennes de l'Amérique. Malheureusement,
l'indécision avec taqueiteestetnpioyécemotdecian M«'.St~
jette un grand troubte sur cette démonstration. On ne sait
jamais si, par ce terme, l'auteur désigne le cian proprement
dit ou simplement la ~«~«M)<<y. Ou plutôt, il est évident
qu'il prend t'un pour l'autre et réciproquement car il donne
indifféremment ce seul et même nom et à des groupes de
parents qui soutiennent les uus avec les autres des relations
de consanguinité définies, pourvu qu'ils comprennent ptu-
sieurs branches cotiatérates, et fi des villages qui sont formés
par lu réunion de plusieurs groupes de ce genre. Il semble
même que ses exemples soient beaucoup plus démonstratifs
quand ils se rapportent au premier ordre de faits qu'au
second, et ia véritable nouveauté qui caractérise ce type
parait plutôt être !a constitution de groupes familiaux compo-
sés ~o<M<«M)<<), qu'un renforcement de lu vie propreau cian.
Ce qu'ont de particulier ces agrégats, de quelque manière
qu'on les appeife, c'est que tantôt ils se composent exclusive-
ment d'agnuts, tantôt ils ne comprennent que des parents uté-
rins. Suivant Fauteur, ces deux variétés seraient on nombreà
peu près egat. tt semble bien pourtant que ia secondesoit plus
fréquente d'après un caicui de Fraxer, elle s'observerait en
Amérique trois fois sur quatre Toujoursest-IIque, cette fois,
<:e n'est plus seulement le nom qui se transmet par les
femmes. Toute l'organisation de la famille repose ici sur le
principe de la filiatiou utérine; l'auteur ne le conteste pas. Il
explique ce changement par la plus grande aptitude qu'il

()) yo/fm~M,p. 70.


AXAt.YSKS. – ).\ FAMtt.t.H 3~S

attribue &la femme


mnna »nmn les travaux nnni~r,l.,o
pour Ina inuwnmv agricoles ..fet r.< 1.1.
par ht plus
graudeautorité sociale qu'elle acquerrait ainsi. Mats si telle
était lu cause de cette organisation, cuite ci devrait être ~éné-
rate partout on la civilisation est agricote. D'où vient, cepen-
dant, que. dans un nombre retpectabte de cas, t'entant suive
ta condition du père, et ceia parfois dans des sociétés parentes
et voisines de tribus où ta (iiiatiou Inverse est eo usa~e ? i)e
plus, si c'était Ja supériorité économique de la femme qui
déterminait cet arrangement domestique, on devrait voir la
femme, (ruuo manière générale, exercer une véritable supré-
matie daus tafamiite et la société. La filiation utérine devrait
aller de pair avec le matriarcat. Or c'est un des mérites de
cet ouvrage d'avoir bien fait voir que le matriarcat n'est
qu'une rnreté très exceptionneiie il ne s'observe que citez un
nombre intime de peuples. Si ou laisse de côté ces excep.
tiens, partout ou t'entant suit ia mère, lit femme est vis-à-vis
des parents mates de sa propre (amitié dans t'étatde subordi-
nation et d'infériorité où elle se trouve ailleurs vis-à-vis de
son mari et des parents de son mari. C'est son oncle mater-
uet, ce sont ses frères en ligne maternetie qui gouvernent, ce
n'est pas elle. Eu un mot, lu situation respective des deux
sexes eu général ue parait pas diiïérer de ce qu'elle est
ailleurs ce qui est particulier à ce type do famille, c'est lu
situation respective du mari par rapport a ia femme. Htiene
saurait doue s'expliquer par te rote de la femme dans ta vie
économique.
Nous arrivons enfin au dernier stade, aux agriculteurs de
l'ordre supérieur, c'cst-a-dire aux peuples où l'agriculture
est complétée par d'autres fonctions industrielles, tout en
restant ta forme principale de l'activité économique. Nous
serons bref sur cette partie de t'ouvra~e dont IR rédaction
parait un peu précipitée. Kon seulement les informations
sont moins nombreuses que daus te reste du livre, mais elles
sont moins critiquées et assez confuses. L'auteur parte a la
fois de toute sorte de peuples divers, <!recs,itomains, Slaves,
Germains, tudous, Chinois, Japonais, alors que le caractère
très complexe que prend lit famille a cette phase de i'évotu-
tionsociaie eût nécessité, pour chacun d'eux, une étude
laborieuse et étendue. Ce n'est pas en quelques pages que
l'on peut décrire et expliquer métne la sente (amiite romaine.
Aussi la description est-elle pâte et indécise. M. Grosse
remarque d'abord que, dans toutes ces sociétés, on trouve des
326 ).'AXX)5ESt)Ctf))."t!~L'H.)MT
traces du clan, la yfH.<,le -);, etc. Mais ici encore la eon-
fusion, tant de fois signalée, s'accuse de nouveau et de la
manière iu plus nette. La /«</f«~ slave est formellement
assimilée&ht alors qu'ette est tout autre chose, ainsi que
nous l'avons dit. Le pendant de la ~est le ~-«~<<'o.Mai!)ai.
dans tous ces pays, le ctun a laissé des traces, partout aussi
il est eu décadence et il tend do plus en plus a s'etïacer à
mesure qu'on avance dans l'histoire. Comment M. Grossen'a-
t-il pas aperçu que, si cette régression est vraie du ~'af~co.
elle est fausse de la ~«'t~« qui, il y a moins d'un siècle,
était encore Hérissante chez les Slaves du sud
Ce qui prend lit place de ces grands groupements, c'est la
famille ~o <f<'Hi!«, que nous n'avons pas encore observée
jusqu'ici. Le modèle le plus partait en est donné par la
famille romaine où tous les descendants M MMf'M/M <'<pcr
m<MCM<(M vivent en commun sous l'autorité du plus ancien
ascendant mate. M. Grosse croit retrouver e~atement cette
même organisation en Grèce, dans t'tude et la Cermanie. Il y
aurait fort a dire sur ces rapprochements. La famille était en
Germanietout autrement constituée qu'à Rome. Le nts adulte
pouvait, à volonté, s'cmanciper de son père en quittant la
maison patcrnette t'ideutité de la «MKtMetdu MtKK~Mm, qui
a été par!ois soutenue, est tout à fait inexacte; la parenté
agnatique et ta parente utérine étaient citez les Cermains sur
le mOno plan, etc. Dans t'tnde et en Grèce, le fils qui se
mariait cessait do vivre avec son père et ullait allumer un
foyer spécial c'était ta 1'1!gledans le premier de ces deux
pays, le cas le plus fréquent à Athènes. Pour faire rentrer ces
deux sortes de famille dans la même (ot-muteque la famille
romaine, il faudrait donc. tout au moins, modifier la défini-
tion de la famitte <<o«'M.<«.Dans les détails de ta description,
on relève 'gaiement plusieurs unirmations contestables. C'est
ainsi que, suivant fauteur, t'asservissement de la femme
croîtrait avec te pouvoir paternel. Rome, où la puissance du
père atteint son maximum d'intensité, est aussi, de toutes ces
sociétés, celle où la femme est le plus complètement l'égaie
de sou mari.
C'est de ce type familial que serait sortie notre famille
actuelle.

H. – Il ne saurait être question de meconnattro l'intérêt de


ce livre, sérieusement informé, et où l'on retrouve cette pen-
.tt~HS.–H~MtLt.K M7
i

sée éprise do etarté et souvent ingénieuse qui distinguait


déjà le précédent ouvrage (le M. Grosse, Die ~M/«<~e</<'<'
~MMf'. Mats nous faisons les plus expresses réserves et sur
la méthode employée et sur les conclusions générâtes qu'il
croit avoir établies. De véritables erreurs ont d'ailleurs été
commises.
La méthode qu'a suivie l'auteur n'est peut-être pas impra-
ticable ni même sans avantages; mais c'est à condition qu'on
se borne a un travail de pure description. H n'est pas impos-
sible de déterminer diuérents types de famille par le groupe-
ment méthodique des ressemblances et des dinéreuces et
sans se préoccuperde savoirquels liens généalogiques ii peut
y avoir entre eux. Mais des qu'il s'agit d'explication, lu
méthode génétique, celle qui, pour rendre compte des faits,
commence par marquer leur place dans ta suite du devenir,
s'impose au sociologue. Car une institution est toujours, en
partie, le produit du passé. Chaque peuple trouve en naissant,
pour ainsrdire, un certain nombre de pratiques et de coutumes
établies, de croyances toutes faites qu'il hérite de ses devan-
ciers. Mtes transforme de manière a les mettre en harmonie
avec ses conditions d'existence mais il no les crée pas de
toutes pièces. Par conséquent, pour pouvoir comprendre
pourquoi elles ont pris telle ou telle forme par suite des
changements qu'il leur a fait subir, il faut savoir dans quel
état il les a trouvées. Les conditions concomitantes peuvent
expliquer comment it a été amené à élaborer nouveau la
matière qu'il a reçue; mais elles ne sauraient rien nous
apprendre sur la contexture de cette matière, qui pourtant
ne peut pas ne pas auectcr les produits de cette élaboration.
Pour ne citer qu'un exemple, il nous parait impossible de
rien entendre aux origines de la famille actuelle si t'en ne
sait qu'elle dérive directement de la famille germanique et
non de la famille romaine. Car celle-ci, enfermée dans le
cadre étroit de l'organisation agnatique la plus uniiatérate
qui ait jamais existé, ne pouvait pas en sortir d'ette môme et
en fait, elle n'en est pas sortie complètement, quelque euort
qu'elle ait fait pour s'en auranchir progressivement.
Aussi presque toutes les explications proposées par l'auteur
sont'cttes bien peu satisfaisantes. Nous n'avons pas a nous
prononcer ici, d'une manière générale, sur la thèse du maté-

J.-C..B.Mohr.
(i)FriboMfg-en-Bt'i~a".
).<;<)iHSucm).mU~):.tM7

riatisme économique à laquelle su réfère tnanifostement l'au.


teur elle est traitée dans uue autre partie de notre .UtMt~t,
Mais, dans le cas spécial de ta famille, sou insutUsance est
particutif'rement éclatante. Le môme type de (iunitte se re.
trouve, uu moins dans ses traits essentiels, sous des régimes
économiques bien diiîérents. Les Todas, les Ttnbétains, les
Juifs sont des peuples pasteurs les Matais sont classes parmi
lesagricutteurs. Or les uns et les autres pratiftueat la potyat).
drie fraterneile où plusieurs frères épouse)!), une femme eu
commun; ce qui implique que les branches c<)Uat'rates
vh'enteuseinMe (voyezp. i4~ et t )7).Les Slaves et les Homains
sont desagricutteurs; les prouiers s'en sont tenus u ta j'o<M(.
/am~ les seconds t'ont très vite dépassée. La fumille juive
de t époquepastorate semble être assez voisine de la (amit)e
putriarcale romaine, alors que la distance entre les deux
civilisations économiques est considérable, etc.. etc. On a pu
voir, d'aitteurs, combien les raisons éconouxques, atténuées
par fauteur, sont insuffisantes à expliquer la filiation utérine
UHitHtende.
Mais ce qui est surtout grave, c'est que fauteur a complè-
tement méconnu la nature propre du clan, comme société
domestique.
Le ctan est tout autre chose qu'un a~re~at de fumilles
cottaterales, de frères et de sœurs qui cohubitent ensemble
et avec leurs descendants, i) prcseuto, commenous l'avons
dit, les deux caractères distinctifs suivants: 1~ I) est forme
d'individus qui sont ou se considèrent comme étant eu gêne-
ra! consanguins les uns des autres, mais qui ignorent abso-
lument quels liens deiinis les unissent les uns aux autres.
La croyance en leur consanguinité vient seulement de ce
qu'ils penseut tous avoir un même ancêtre, de nature tou-
jour:; mythique. Puisqu'il n'y a pas et ne peut pas y avoir
d'arbre généalogique du ctan, le signe auquel ils recon-
naissent leur parente, c'est qu'its portent un monte totem. Au
premier abord, ce fait a fair bien superficiel mais c'est
ignorer ce qu'était le totem pour les sociétés inférieures. C'est
le signe auquel les parents se distinguent des étrangers,
celui qui détermine le milieu dans tequot chacun doit ou ne
doit pas contracter mariage il s'imprime dans l'/)f<M<M des
individus qui s'ellorceut de l'imiter par le tatouage, par la

(f)\'t~)'i!j))M~h)mt.)<70.
AXAr.YSK!–HFAMtt.t.K 329

disposition de la cheveiurp, etc. Maissurtout, c'est le centre de


la vie religieuse; le totem est le Dieu et toutes les divinités
particulière!! sont d'abord conçues par rapport à lui. Et
comme ia religion s'étend alors ù tout, on conçoit quelle
importance avait la société totémique, à savoir le clan. Et
pourtant c'était une famiite, puisqu'il constituait un groupe
partiel, qui ne se confondait pas avec la société politique
(celle-ci comprend toujours plusieurs clans). et qu'il était
formé d'individus qui se regardaient comme de même sang.
11est évident qu'un tel groupe ne ressemble ni a ia famille
patriarcale des Romains, ni à la /<«/n~<tslave.
Cela pose, toute une série de rectitieations devient néces-
saire aux thèses de l'auteur. U n'est plus possible de considé-
rer comme une formalité sans importance le fait que, en
Australie, l'enfant porte le totem de sa mero et appartient, au
moins dans ia généralité des cas, au c)an maternel. Ce n'est
pas simplement un nom qu'il reçoit ainsi, c'est une religion
c'est un ensemble de croyances et de pratiques qui retient sa
vie. Mitesavaient à ses yeux encore plus de gravité que n'en
eurent plus tard pour les Homains les MCf'a '/<'M/<7«'M qui
n'en furent, pourtant, que ia transformation. Par conséquent,
en tout état de cause, il y avait dés lors une sorte de famille
qui reposait sur de tout autres principes que lit famille par-
ticulière puisqu'elle n'avait pas pour base le mariage, et qui
pourtant avait une grande vitalité.
11y a plus c'était alors la famille proprement dite. Il faut,
en effet, s'entendre sur le sens des mots, c'est-à-dire classer
convenablement les choses. Une communauté de fait entre
des consanguins qui se sont arrangés pour vivre ensemble,
mais sans qu'aucun d'eux soit tenu il des obligations déter-
minées envers les autres et d'où chacun peut se retirer à
volonté, ne constitue pas une famiiie. Autrement. il faudrait
donner ce nom au groupe formé par un homme et une femme
qui, sans être mariés, cohabitent régulièrement ensemble et
avec leurs enfants non reconnus. Pour qu'il y ait famiiio. il
n'est pas nécessaire qu'il y ait cohabitation et il n'est pas
suffisant qu'il y ait consanguinité. Maisil faut do plus, comme
nous l'avons déjà dit, qu'il y ait des droits et des devoirs,
sanctionnés par la société, et qui unissent les membres dont
la famille est composée. Eu d'autres termes, la famille n'existe
qu'autant qu'elle est une institution sociale, à la fois juri-
dique et morale, placée sous la sauvegarde de la collectivité
330 tM7
t.X'H MCtOt.tMtQt'K.
ambiante.En ainsi le sens
limitant ainsi
ambiante. En limitant du mot,
sens du a<~ no le res.
mot, nous
treignons pas abusivement car, a moins de vouloir confondre
les contraires, on ne peut réunir sous un même vocable
deux ordres de faits qui contrastent aussi énergiquement
entre eux qu'un agré(;!)t fie fait, sans liens de droit, désap-
prouvé même le plus souvent par la loi et par L'opinion,et
une société régulière dont tous les membres sont tics juridi-
quement et moralement les uns aux autres. D'un autre côté,
quand on entreprend de faire l'histoire de ta famille humaine.
c'est de ta famine comme institution sociale qu'on entend s'oc-
cuper. C'est donc à cette dernière que le mot doit être réservé.
Cette distinction faite, les faits si confus que t'en rapporte
à propos des sociétés australiennes s'éclairent singulière-
ment. Les principaux droits et obligations domestiques sont
alors, et sont même encore dans des sociétés plus avancées,
les suivants 1" le devoir de venger les offenses faites à un
parent vendetta); 2" le droit de chaque parent sur le patri-
moine familial 3" le droit de porter un certain nom 4" le
devoir de participer à un certain culte. Or, tous ces droits et
ces devoirs sont attachés au ctnn et &lui seul tous les por-
teurs d'un même totem jouissent également des premiers et
sout tenus également aux seconds. Lectan est donc la {amitié
par excellence. Sans doute, il renferme des groupes de con-
sanguins moins étendus; i'homme, sa femme et teurs enfants
tendent naturettemcot a s'isoler et à (aire bande a part. Mais
entre les membres de ces groupes, il n'existe pas de liens
juridiques. Ce n'est pas le fait d'appartenir à tel de ces agrégats
et non à tel autre qui détermine la nature des personnes aux-
quelles on doit la vendetta, le nom que l'on porte, la religion
n'a
que l'on pratique. De même. comme, tant que la tribu
pas dépassé l'age de lachasse et de la pèche, toute la propriété
foncière est la chose du clan, ces sociétés plus restreintes n'ont
meubtes
pas de patrimoine. Chacun possède bien les objets,
dont il se sert, mais c'est à titre personnel; il eu (ait ce qu'il
veut. Le seul rapport où l'on pourrait soupçonner un carac-
tère juridique consiste dans la dépendance où les enfants
sont vis-à-vis du père, qui peut les tuer ou les vendre à
volonté. Mais si la société ne proteste pas quand il agit ainsi,
elle ne lui garantit aucun droit. Si t'entant se sauve, le ctau
n'intervient pas. C'est affaire au pèro de s'arranger, avec ou
sans l'assistance de ses amis. Ce n'est donc pas un droit, à
à
parler exactement. On peut comparer ce pouvoir paternel
AXALMM.–t.mu.t! 331

celui que l'opinion, aujourd'hui, reconnait à l'occasion au


pcre naturel sur ses enfants naturels qu'il a élevés. Pourtant,
le groupe qu'il forme avec eux ne forme pas actuellement une
famille, au sens juridique du mot. It en est de même de ces
petites associations qu'on observedans les clans australiens.
Ce sont des associations de fait. non de droit Elles dépen-
dent du gré des particuliers, se tonnent comme elles veulent,
sansôtre tenues des'astreindreaaucuHe norme préataide. Elles
ne constituent donc pas uHe institution sociale. On peut y
voir des germes pour l'avenir mais ce no sont en tout cas
que des germes. C'est en dehors d'elles que se trouve alors
i'<HJ)<<f)<<<OM</OM)Mf~Mf.
!)e ce point de vue, l'évolution de )a famille reprend, à la
fois, sa complexité et son unité. Elle est d'une extrême sim-
piicité telle que )a conçoit M. Crusse au début comme à la
fin, il trouve également la famille particulière, dirigée par ie
père et le mari. Les changements qui se seraient produits
chemin faisant, se réduiraient a de simples nuances; ceux,
plus importants, dont Il est obiif;é. ça et ià, de constater
l'existence, font plutôt l'effet, dans le tahleau qu'il nous
retrace, d'anomalies locales ou passagères. Il en est tout
autrement si le point do départ est le cian; car alors, c'est
par de laborieuses et complexes transformations que, peu à
peu, du sein du cian, confus et inorganisé, ont émergé des
familles de plus en plus restreintes, à arbres généalogiques
dénnis et d'une organisation de plus en plus savante. Mais, eu
même temps, le développementde la famille apparaît pins un.
Car on ne comprend pas bien, dans le système do M. Grosse,
comment le cian, inconsistant dans le principe, se consolide
pour un temps très court au milieu de son évolution, pour
s'efïacer ousuito à nouveau. La vérité c'est que, depuis l'ori-
gine, il régresse sans interruption. A mesure qu'il se tixe sur
te soi. le totem perd son caractère primitif; il nnit par ne
plus devenir qu'un emblème collectif, un nom particulière-
ment vénéré. Le clan devient village c'est-à-dire que sa
nature de société domestiquen'est piusguëre qu'un souvenir.
Ce qui progresse réellement au cours de cette régression, ce
sont les familles du type de i:) Zadruga, soit avec (iiiation
utérine, soit avec filiation agnatique, et que M. Grosse a
indûment confondues avec le clan. Il est vrai que, en même
temps, l'organisation politique devient plus stable et plus
ferme mais, justement, cet affermissementvient do ce que le
3~ t/AX~M .<U):H)).OUtorH.
1897

clan, morcelé eu famittes moins étendues quoique vastes


encore, a cessé d'être ce qu'il était à l'origine.
Mais si importante que uous paraisse être cette erreur, il
s'en faut que ce livre soit sans résidu objectif. Parmi los
résultats auxquels aboutit Fauteur, il en est d'importants qui
peuvent, croyons-nous, être regardes comme acquis ce sont
les suivants
I" L'hypothèse de ta promiscuité obligatoire, telle que
t'avaient imaginée Hacttofen, Giraud-Teuiou. Morgan, etc.,
uous sonbte définitivement réfutée. Précisément parce que
M.Grosseno uie pas comme Starcke et \Vestermarck ia réalité
de ht famille utérine, son argumentation sur ce point n'en a
que plus d'autorité.
ii a bien démontré qu'il ne faiiait pas confondre la
famille avec filiation utérine et le matriarcat, entendant par
ce dernier mot une organisation à la fois famiiiaie et sociale
ou ia femme jouirait d'une véritable suprématie. Sans nier
l'existence de tout cas de matriarcat, il en a fait très juste-
meut une auomaiie et une exception. D'où il suit qu'on n'a
pas réfuté ia ~énéraiité et l'importance de )a (amii)e mater-
neite, quand ou a fait voir que le matriarcat était une rareté.
3" ft a bien établi que, metne dans ia (amiiie maternciie, il
n'y avait pas absence de toutes relations entre le père et
l'enfant. Si celui-ci dépend plus immédiatement de sa mère
et des parents de sa mère, il ne laisse pas de soutenir avec
son père des rapports définis, quoique moins nettement
réglementés. D'où ii suit, entre autres conséquences, que ce
n'est pas l'incertitude de la paternité qui a détermine le
modedf filiation.
4' Enfin, en utilisant tes travaux de Cunow, il a fait voir
que le cian peut s'accommoder de ia filiation agnatique,
puisque nous rencontrons le cian agnatique dans les sociétés
les plus inférieures que nous connaissions a côté du clan
utérin. Toutefois, ii y aurait lieu do rechercher si, comme
nous t'avons montré plus haut', le clan, en cessant d'être
utérin, ne perd pas certaines de ses propriétés caractéris-
tiques. Le totémisme semble bien n'y être plus qu'une survi-
vance. Mais la question n'existait pas pour M. Crosse, parce
qu'il a méconnu le rapport si étroit du clan et du totem.

\)'x ~3.
ASAU'SXt. – ). FAMH.LH H33

LEtST. – Alt-AriaoheaJusoivite.(~'o<<
-ApionhMt.Ttmn<vn« f~'n/t <'if<<
civil ttt'.t.t.T~<
pt'<M~<<<«M
~f)~('<t <«~<'««M;~'partie.) téoa. Flécher, 18Hu,4i4 p.
ia-8".

Par une série do travaux, conduits avec persévérance,


M. Leist a entrepris de déterminer le droit primitif des difté-
reutes sociétés aryennes, tt a commencépar comparer à cet
égard les Grecs et les Italiens, et ainsi est né le livre qui a
pour titre: f;<w<'o-<<a<<~)<' ~Mf~t'/tft". Puis, il a t'ap-
proche t'tudc de ta (~rècoet de l'Italie. Partant de cette idée
que les régies juridiques, communes a tous tes peuples de
race aryeune, dcvaieot être auterieurcs & !eur dispersion, i]
a cru pouvoir atteindre, ù l'aide de comparaisous métho-
diques, cette forme initiale du droit europeeu. Tel est l'objet
de sou .t~tnA'c/tM./tH~'M~MM Nous M'avonspas besoin de
faire remarquer tout ce qu'il y a de douteux daus un sem-
blable postulat. Mais il n'est pas nécessaire de le discuter
pour examiner les conclusions de l'ouvrage qui va être ana-
lyse. D'où que viennece fond commun, il existe, il a partout
les mêmes caractères distinctifs et il représente une phase
déterminée de t'histoire de ces sociétés. !) correspond à
l'époque où elles n'étaient pas encore constituées à i'etttt de
cités ou de nations, mais formaient de vastes agrégats de
claus, saus contours définis, et régis par ta coutume reli-
gieuse c'est. en enet, le trait caractéristique de ce droit loin-
tain qu'il n'est pas écrit et qu'il est sacré. H n'émane pas de
l'État, mais des dieux. Peu à peu, sur cette base première, on
voit s'élever un droit nouveau, œuvre de la cité et destiné à
servir les intérêts de ta cité c'est le droit civiL Dans t')~.
~nitt'/tM jus <'«;<(', M. Leist se propose de retracer cette
genèse, au moins à ses débuts. C'est surtout Mornequ'il a en
vue mais pour bien dégagerce qu'a de particulier l'évolution
du droit romain, il met sans cesseen regard des changements
que l'esprit romain a fait subir au droit originel, les trans-
formations qui se sont produites parattetement chez les
peuples de la mémo race.
Dans la première partie de l'ouvrage, parue en 1892, Fau-
teur s'était borné à faire voir quelle forme spéciale le vieux
droit religieux avait revêtue à Home. C'est seulement dans la

(t) h'-oa.Fis<))f.r,t8M.
(:*)/&«/ i8)f9.
?4 ).'AS?!)!K <!W
MOOUMX~'t!.
seconde partie, dont nous allons nous occuper, qu'est vrai-
ment abordé le problème qui vient d'être énonce. Cette
seconde partie comprend eUe.meme doux tivres l'un traite
du droit domestique, l'autre de la procédure. C'est le premier
seulement que nous aiions anaiyser.
Le MXf/'M~f (p. HJO-iKu). D'après l'auteur, ie mariage,
dans le droit primitif des peuples aryens, comportait trois
phases dont on retrouve d'ailleurs les traces jusqu'à une
époque très avancée. 11 y avait d'abord les fiançantes, ]a
jtpOMOM des Latins. i'<Y'< des Grecs; puis, la tradition de la
femme entre les mains du mari (~'<«M<b,o~t;) enfin, t'iutro-
duction de la femme dans son nouveau foyer, cérémonie qui
était accompagnée de simulacres de violences (</<'</t<f~'o il,
doHtxmn)f«'!< T:');~). De ces trois sortes de pratiques, les
deux premières sont les conséquences logiques du mariage
par achat. La .spoHSM, c'est l'entente conclue, entre les parents
de la femme et le mari ou ses parents, sur les conditions de
la vente ia ~'<«<<«'o, c'est la prise de possession par le mari
anirmant les droits qui résultent de l'accord antérieurement
établi entre les parties. Quant à la fM«c/<o,c'est un reste de
l'antique mariage par rapt qui se maintint et survécut à ses
causes premières parce que, ~ràce au caractère public et
même bruyant de la cérémonie, c'était un moyen commode
d'établir <wf<M< p~jxh le moment précis où commençait le
mariage. M. Leist explique qu'elle ait été utilisée sous cette
forme par ce fait que, chez les peuples aryens, l'emploi de
l'écriture ne s'est vulgarisé que tardivement. Les cérémonies
déclaratives du mariage ne pouvaient donc être qu'orales, d'où
la nécessité de leur donner un éciat qui les fixât le plus pro-
fondément possible dans le plus grand nombre de mémoires
possible. Aussi le caractère oral est-il resté un des traits
distinctifs du mariage uryen. tandis que, chez les Sémites
où l'écriture a élé pratiquée beaucoup plus tôt, c'est un acte
écrit qui est devenu très vite la formalité matrimoniale
essentielle (lettre de mariage, lettre de divorce).
Mais il n'y avait là aucune organisation dénnie. Ces trois
opérations ne constituaient pas des actes de droit, dérivés de
certains concepts juridiques ce n'étaient que les principales
et ordinaires démarches par lesquelles, en fait, on fondait
d'ordinaire un foyer nouveau. Ou n'avait même pas alors la
moindre idée du mariage, tel que nous le concevons aujour-
d'hui, c'est-à-dire comme un acte dont ta valeur et les ettots
AXALt'.OM.– t.At'AMH.hK 335i
`.· -U"l.f 1
dépendent exclusivement de son rapport de conformité ou de
non-conformité avec une règle préétablie. 11 M'y avait pas,
dit Leist, do mots dans ces difiérentes langues pour exprimer
une telle idée (p. 108). Le grand changement introduit dans
ces coutumes par le droit civil, quand Il se constitua, fut
précisément d'ériger l'une des formahtés usitées en critère
exclusif de la relation matrimoniale. On éprouva le besoin
de marquer un moment précisapartir duquel commencerait
le mariage ce moment fut mis hors de pair parmi tous les
autres et il dut son importance, non à sa nature intrinsèque,
à son rôle effectifdans la constitution de la nouveiio famiiie,
mais simplement à ce qu'on convint de lui attribuer cette
vertu. Or, la ~<'</)«'<toétait un souvenir do l'ancien mariage
par rapt qui, de plus en plus, à mesure qu'on prenait davan.
tage l'habitude de voir dans i'épouse une égaie et une com-
pagne, perdait toute raison d'être et toute signification. Les
pratiques qui s'y rattachaient devinrent donc de plus en
plus de simples usages cérémonieis. Au contraire, celles qui
correspondaient au mariage par achat devinrent prépondé-
rantes. C'est à partir du moment où l'on put considérer
l'accord comme définitif entre les parties, que le mariage fut
regardé comme conclu. Suivant les peuples, c'est ou à la
i!poM4')oou à la <f«<Mfto que fut attaché cet effet. Le premier
système est celui des Grecs, le second celui des Romains. La
~f/Mcft'one se maintint avec ses anciens caractères que dans
la mesure où le vieux droit religieux persista sous le droit
civil.
/.Mfamille. La famille chez les anciens Aryens est une
communauté qui comprend les parents, tes enfants, les
esclaves, les animaux domestiques. Le chef en est le père.
Mais le père a des droits très diflérents sur les esclaves et
sur les animaux d'une part, sur les personnes libres de
l'autre. Sur les premiers, ii a des droits de propriétaire, sur
les seconds, il n'a que l'autorité qui appartient à i'adminis'
trateur de la chose commune (ou«<jK<;). Tel est le sens de la
po~<M des Latins; c'est le pouvoir en vertu duquel ia famitie
est gouvernée. Maisce gouvernement est monarchique toutes
les personnes libres, malgré la diversité de leur situation, y
sont également soumises.
Or, à cet égard, le droit civil détermina à Rome, mais à
Rome seulement, une profonde transformation. Les membres
libres de la famille y tombèrent au niveau des esclaves et des
33U ).<<xt!H st)(:tt)t.f)(!)~[-R. )s''7

choses; ils devinrent l'objet d'un droit réet. Eu (irocf, ils


n'étaient que des sujets ;M-<xj!y'm) u Home, ils turent des
dépendances du père f.<«). Du moins, si les mu:urs conser-
vèrent beaucoup des anciennes coutumes, le droit propre-
ment dit s'en sépara radicalement. C'est de cette situation
particulière du père que dérivent toutes les autres particula-
rités de in tannHe romaine, notamment celles qui concernent
le droit successoral. Lu où le père n'est que l'administrateur
des biens de la communauté, il ne peut pas en disposer libre-
ment, ni de son vivant ni après. Au contraire, s'il est per-
sonneiiement propriétaire du patrimoine familial, le droit
de l'aliéner, d'exhéréder ses enfants devient tout nature).
Quant à l'explication que donne M. Leist de co caructt're
original de la famille romaine, elle est des plus simples. C'est
que les romains ont occupé le Latium en conquérants le sol
fut donc partage entre eux f<n'~)), et le chef de chaque com-
munauté familiale en reçut une part. Ils constituèrent ainsi
une aristocratie et comme ils étaient tous des pa~-M, la
classe qu'ils formèrent prit le nom de p<t<<«'«.Mais. comme
toutes les armées, ils étaient pauvres en femmes; ils durent
donc aller en chercher dans les familles des peuples soumis.
Ces femmes se trouvèrent naturellement vis-à-vis de leurs
maris dans une situation d'infériorité et de dépendance, voi-
sine de celle occupée par les esclaves et la même subor-
dination s'étendit aux enfants nés de ces femmes. Telle
aurait été l'origine principale de la pa~'M potMf<M, telle que
ta conçurent les juristes romains.
~.Mo~utc.'x/x <c~ <'<('<<. – De la famille est spontanément
sortie, par voie d'extension spontanée, la {/eMf{ des Romains,
la phratrie ou la curie, enfin la tribu. Cesdifférents groupes,
tout en étant institués en vue de la guerre et tout en ayant,
pour cette raison, un caractère militaire, avaient avant tout
pour base la consanguinité et la parenté. Seulement, ta parenté
était d'autant plus tâche et plus indéterminée que le cercle
de l'association était plus étendu c'est pourquoi elle était a
son minimum dans la tribu. Chez tesanciens Aryens, l'orga-
nisation sociale n'atlait pas plus loin. Les tribus différentes
vivaient côte à cote, sans avoir entre elles de liens durables,
sauf quand la nécessité de lutter contre un ennemi commun
les obligeait à se confédérer. Tant que les.sociétés restèrent
dans cet état, le droit, de son côté, resta ce qu'il était primiti-
vement.
– LAfAM~ht!
AKAf.YiOM. 337
Maïs,peu à peu,
eu,sous l'influence
t'iunucncede diOérentes
diCérentescausesdont
la principale fut sans doute I;) guerre, les rapports eutrem
tribus voisines devinrent plus réguiiers;tesconf6dération&
prirent un caractèreplus stable. Eu un mot,des sociétésnou-
velles prirent naissancequi comprirent daus tour sein, eu
qualitéd'éléments,plusieursdes sociétésantérieures;et les.
pouvoirsnouveauxqui turent ainsi constituéset surajoutés.
à ceux qui dirigeaientles tribus isolées,devinrent la source
d'institutionsjuridiquesnouvelles.Cettetransformationn'est
pas spécialeaux sociétésaryennes;il n'est pas de peuplequi
ne se soit forméde cette manière.Maisvoicice que ce chan-
gementeut de particulierchezlesAryens c'est quetes anciens
cadressociauxne furent pasabsorbéspar la nouvelleorgani-
sation. Ils se maintinrentplus ou moinsintégralement,tandis
qu'ailleurs, on Egyptepar exemple,ils disparurent complè-
tement. A Home, en Grèce, en Germanie,la société resta
diviséeen tribus, phratries,curies, etc., ou en groupessimi-
laires. Or ces groupesn'étaient que des famillesagrandies,
organiséessur le modèlemêmede la famille.Uen résultaqu&
l'État reproduisitle mêmemodèle,que la constitutionpoli-
tique fut un rouetde la constitutiondomestique.
Yoitace qui expliqueles caractèresnouveauxdu droit qui
apparatt alors. Le père de famille,chezles Aryens,n'est pas
un être sacré, investid'uneautorité religieusequi l'élèveinfi-
nimentau-dessusdes autres membres.Ce n'est que le repré-
sentant de la communauté.Ce n'est pas un dieu, mais sim-
plement un maître respecté;encorene peut-il pas prendre
de résolutionimportantesans le concoursde la famillequ'il
dirige. Il devaitdoncen être de mêmedeschefsde l'État nais-
sant.Et eneffet.partout,on trouveleur puissancelimitéepar
celled'une aristocratieplus ou moinsétendueou mêmedu
peuple entier. Nulle part ils n'ont ce caractère sacro-saint
que les monarchiesorientalesprêtent à leurs rois. Par suite,
les pouvoirsnouveauxqui apparurent à ce momentne pou-
vaient manquerd'être taîques,ainsi que le droit qu'ils insti.
tuèrent. Cedroit, c'est le droit civil.
Ainsile droit civilne serait pas né, par voiede développe-
ment, du droit coutumieret religieux.Mais il dériveraitde
sourcesdiiïérenteset chacun d'eux aurait ses organes spé-
ciaux. Le droit archaïqueavait pour terrain la tribu avecses
divisionsen phratries,~eM<M, familles le droit civil serait
produit par la coalescencede plusieurstribus en sociétésplus
E.t)L'XKMm.–Ant)M'0.-i").it)97. S
338 L'AXXfiE <M7
SOC!OU)(tt<;rH.
vastes et il émanerait des nouvelles forces sociales qui se
seraient dégagées de cette coalescence. Cesdeux formes de la
vie collective se présentent même partout a t'etat d'antago-
nisme. Aussi en est-it do même des deux sortes de droit qui
y correspondent. Le droit ci vit(~M;'n'est pas ie prolongement
du droit religieux (/«<); mais le premier s'est superposé au
second, l'a fait peu à peu régresser, et finalement t'a presque
totalement recouvert; car te droit nouveau ne s'appliqua pas
seulement aux relations nouvelles déterminées par le nou-
vel état des choses, mais it s'étendit aux anciennes, refoulant
de plus en plus le droit qui les réglait depuis des siècles.
C'est surtout à Rome que l'antithèse entre ces deux concep-
tions juridiques est manifeste, puisque, à l'ancienne organi-
sation de la parenté, si directement fondée dans la nature de
la famille, s'en substitua une autre, totalement difïërente, et
qui fut tout entière créée par l'État, c'est-a dire par ia cite et
pour les besoins de la cité.
Telles sont les conclusions de ce livre; ettes sont évidem-
ment d'un esprit original qui a cherché à se frayer dans
l'histoire du droit une voie qui lui fût personnelle. Nous ne
croyons pas cependant qu'il y en ait beaucoup qui puissent
être directement utilisées par la sociologie. L'auteur aborde
ces problèmes dans un esprit trop formaliste il est trop
enclin à voir dans le droit une réalité en soi, qui ne sort pas
des entrailles de la société, mais la domine, et qu'un abtme
séparedcsautres manifestai ions de la vie collective, pourqu'il
lui soit possible d'apercevoir les causes qui en ont déterminé
t'évotution. Onavu de quel simplisme étaient ses explications.
Maiscomme il a passé sa vie dans l'intimité du droit romain,
il a, des caractères distinctifs du droit en générât et du droit
romain en particulier, une sensation très vive, parfois très
juste, et qu'il s'euorce, sans même craindre assez les répéti-
tions et les longueurs, de communiquer à ses lecteurs.

A. MOttKT.– La condition des féaux en Egypte, dans la


famille, dans la société, dans la vie d'outre-tombe (~Mt<f;
dM ~'«wtM <'<a/<]tà Mt'M~/e ~~t'CMMecl a~f)'eMM<
t. XtX).Paris, !!oui)to)).

L'auteurmontre comment,en Egypte,les tap~oftsModauxfurent


le typedes rapports famitiauxet potitxjm'sdansce mondeet dans
l'autre.
– LAf.tMn.LE
AX.U.~tM. 339
ACtMOY!C(Vont«v.~). –Ueborstcht desserMachenErbrechte.
v.~). -Ueborstoht desserMachenErbrechte,
im H!nbllok sauf eine Reform desselben( ~~M'f« </« </M/<x«r.
w)'&c, co t'Mtf/'M))fn'/bfMe (t y ~'of~ffre). – tn /u'&w/<
<'<M«~~
der M<M7M<)'MM/<'M t'ffft'Mt~MM~ /'f'!r t'f~/eft'/fMtf/f 7?<'<)<'t'<t-
M<«'Aa/TKH<~ r'~<t'«'~<tH/?/fA<'< <897,<tf/t<'t7MM9, p.i"0-t3S.

Le t<j{is)ateurscrtx* a entrepris en )8H de codifier le droit domes-


tique est t'adaptant aux couditiuns nom't'ttcs de la vie sociah'. Ma)!-
il <-st{Kuti d'un pt'incipcfuux; il a ('«t~id~ cototnc deux fot'tnf.
de fan)i))<''Mhsohttnent distHK'tcs ):t ~K/)'«~< et j'Mw<, t't~cette
distin':tiua est devenue ht bit-e (tu droit suct'MMrat <!<<))))) par cctt)'
)c(tii!)!)ti"n.Ut-,est rea)itt\ ce!!df'ux s'o'tfs de famine !:ont dt- tn~tn'-
nature. t/mo' et t'autn* t'eposent sur )'; cotntnunistne domestique.
Elles <nn'<'t'entseulement f'n <'t''ndue. Ut ~(/<'M~ comprend tous
tes cottateraux même )es j)))t.< etui(<nes.autant qu'ifs peuvent cuhabi-
<er<'nsen)t))e; ta fatnittt: /HOAMMM est faite unxjuftnent du père, de
lu mt're f't des enfants. Mais dans lu seconde pas plus (jne (tnxs ta
pretttiete, te père n'est le prupt ietuire de ta chose cuttunuue. )t n'<'n
peut disposer sans le consententeut de ses tits. tt n'en ['st pas nt~nte
t'admini'.tratetn' de droit; il peut être dépose de ses functiuttt et
remplace. C'est d'ja ce qu'août etahti Mot:isicdans son tratait I)e
/« /f«'M<'<?<; inokosna </f /« /ffM<7/erM/'«~ <tM &'rAo( et /M
CMH/M(Paris, i88~). l'our avoir tneconnu cette identité fondatnen-
tate, un a institue deux droits successoraux ditTerents et dont t'appti-
cation, par suite, doune tMissancea d'inextricahtes ennttits. t.e seul
moyen d<' tes fait-t' cesserest de mettre la )et;istation est harmonie
avec l'état des cttoses.
it y a tit'u de remarquer lu méthode suivie dans cet article, t.es
refbttnes pratiques proposées par fauteur ue sont pas déduites dia-
)ectiquc)n<'nt tte principe:! juridiques, mais d'une étude objective
def!mH'urs et des coutumes populaires.

MH-EH(EKXKsT). Die HauakommuNion derSadsIavem (/.« wm-


MMtMM~ </OMM~t<t'f/<M ~ft'M f/K .S'M<<).
Metne tCCUeit,i80'T,
i'&f/t<)M~,p. <90.aS2.

L'auteur fait un historique rapide de ta XadrutM,dans tes diffé-


rents pays slaves du Sud, en insistant surtout sur la législation la
plus récente. Ce qui ressort de cet expose, c'est que le tepistateur.
après avoir essaye de tutter contre la Xadruga, semhte y avoir
renonce prottt'cssivement. On a reconnu il t'expericnee que ta des-
truction de cette vicitte organisation famitia)e aurait, chcz ces
peuples, de désastreux effets pour t'agricutture. C'est ce qui est sur-
tout évident de ta Croatie et de ta Stavonie.
L'auteur signale (p. 205 et 2)3) t'existence de Xadrugas nobles qui
aujourd'hui sont soumises & un régime juridique spécial, mais
N40 L'.tXXtit! d897
SoUOt.nCtQCf!.
itutf'fuis ne M' distinguaient )):).<(tes autf's. ).a fottnntiun de cette
uo)'t''s':).')u)u!nt'n')t)t!ntcp:)saud<'):'tthtxv)'')'tdux\))'it'<:tf'.
L'étude df ce syst'm'' f~'d!)), ainsi ()t[c d'- ft'hti <)u't')) )"'ut ''xcoce
ot)';)')'pt- chM )<'<Sttm'~ du ~ot'd, nid~t'Mt t.h)~uHft'en)ent&t'iutctti-
~t)t;edf'taf'd!)iit~t)('t:idL'ntuk'.

)\.–LKMAtUACH

t'Ut'M.tft.XKMMU

Ëo.MEYNIAL.– Le mariage après tes invasions. (~o)t-


re<~/<fp«c/)t'oW~)«*de droit /)'<!My«M(~(t~ft', 1896,
n" 4 et 6; 18U7,n° 2.)
L'auteurse proposede recherchercomments'est constitué
le droit matrimonialdu moyenâge.
Ce droit s'est formé sous une triple influence la loi
romainetelle qu'elle apparaît à la fin de l'Empire, les lois
barbares,l'Église.C'estle premierde cesapportsqueM.Mey-
niat entreprend de déterminer dans les trois articles ci-
dessusindiquéset qui no représententque la premièrepartie
de sonétude.
Les/brMM<~< Mxu'Mj/c. Quoique,eu apparence,l'institu-
tion matrimonialesoit restée dans la Romedu Bas-Empire
ce qu'elle était à la fin de la République,en réalité, une
profonde transformations'est produite. Dans le principe,
commeLeist nous l'a montré plus haut, les ~tMf<foxp~'a'
comprenaienttrois phases tes fiançailles,simplepréliminaire
qui ne participe pas encore a ta nature ni aux effetsdu
mariage,la ~'<~<fto,la (M«efto ce sont ces deux dernières
cérémoniesqui constituaientvraiment tes justes noces. Or,
peu à peu, elles tombèrenten désuétude. Ëties n'avaient
d'importanceque parce qu'elles étaient solidairesdu culte
des ancêtres: elles disparurent avec lui. Ettes survécurent
sans doute pendantlongtemps,maisà l'état d'usagesdépour-
vusde toute utilité juridique.Le fait générateurdu mariage
devint, non la formalitérituelle, mais le consentementdes
parties. Or,ceconsentementrésulte de la cohabitationvolon-
taire et prolongée par suite, la cohabitation, si elle nefut
jamaisla conditionnécessairedu mariage())Kp(«MKOHcoHCM-
&<<tM,setlconsensus/o<'t<),
en devintla conditionsuffisante,en
tant qu'elle était symptomatiquedu coMCMtM. Maisalorsles
AXAt.Y)!E.<. – LH M.~tAUE 34)

justes nocesdevinrent,à ce pointde vue, Indistinctesdu con-


cubinat, qui n'estlui aussiqu'une cohabitationconsentie.Au
début, il est vrai, la concubinese distinguaitde l'épousenon
seulementpar l'absencede formalitésmatrimoniales,mais
encore parce qu'elleétait et ne pouvaitêtre qu'une personne
de conditioninférieure.Maisle jour où l'on put prendre
pour concubinescellesqu'onprenaitpourfemmeset inverse-
ment, cettedistinctionmémodisparut.
Uneseuledifférencesubsista ce furentles fiançantes.C'est
pourquoi,d'acteextérieurau mariagequ'ellesétaientd'abord,
les fiançantesendevinrentde plusen plus l'élémentessentiel.
Tout un travailse fit dont le résultatfut de les élever à la
dignité du mariageproprementdit. Toutesles règles qui
s'appliquaient au mariagefurent étenduesaux fiançailles.
Elles impliquèrentmêmes conditionsd'âge, de consente-
ment elles furentsoumisesaux mêmesprohibitions,engen-
drèrent lesmêmesobligations,etc.Cefut un mariageà terme,
mais dont le termeseulfut laisséau libre choixdes parties.
Commeles fiançaillesjouentégalementun rôle prépondérant
dans le mariagegermanique,ou voitque, de lui-même,le
mariage romain tendait à se rapprocherde ce dernier ce
rapprochementspontanédevaitnatureiiemeutfaciliter leur
fusion.

Lesco~t'ft'w!(<«Htanagw. Primitivement,ledroitde con-


sentir au mariageest un attribut exclusifde la puissance
paternelle; d'où il suit qu'une personne <!« y<«'Mn'avait
besoin d'aucun consentement.H est vrai que les femmes,
même quand eites n'étaient plus soumisesà l'autorité d'un
pa~f<m<<KM, subissaientencorela tutelle des agnuts. Mais
on ignore si cottetutelle conféraitle droit de consentir au
mariage en tout cas, elledisparutsousClaude.Maissous le
Bas-Empire,ou constateun retour à l'anciennelégislation
la femme,même~«t~'«<'M, est de nouveausoumiseà un cou-
trôle plus étroit; seulementles personnesqui l'exercentne
sont plus les mêmes.Ceuxque l'anciendroit excluait sont
maintenantappelésà cettecharge d'abordla mère, puis les
propt'K~Mt.Quoiquecetteexpressionnesoit nulle part définie,
il est très probablequ'elle désignaitles cognatsaussi bien
que les agnats,peut-êtremêmeles voisinset les membresde
la mêmeclassesociale.Enfin,quand il y a désaccordentre la
femme et sa mère et les p<'op<M~«, c'est l'empereur ou le
342 ).'AXXÉH SOCtUUXitQLH. <M7

juge, son détcgué, qui tranche le différend et choisit t époux.


Le pouvoir impériat prit ainsi pied dans ta famille et on
alla jusqu'à lui reconnattre le droit de suppléer au consente-
ment non seulement des parents, maisdes époux, et d'imposer
le mariage. Ces faits prouvent qu'il se produisit alors une
concentration nouvelle de lit famille, c'est une des {ormesque
prit le réveil de l'esprit corporatif qu'où constate a cette
même époque. L'un et l'autre sont dus à ce que tes individus,
pour n'être pas écrasés, sont obligés de se grouper et de
former des groupes aussi forts que possible. Mais on voit que
cotte concentration du groupe domestique se fit sur des bases
très différentes de celles qu'it avait autrefois.
Une autre nouveauté, non moins importante, c'est t'avëne-
ment du <'oM~M&MWt<M) (union de deux esclaves ou avec uu ou
une esclave; au nombre des unions regutiëresetrégtementées.
Primitivement, la toi ne s'en occupait pas; Hue produisait
pas d'eflet ~égat, n'engendrait pas de parenté proprement
dite. Peu à peu, au moins dans certains cas, il prend le
caractère d'un mariage, inférieur sans doute, mais reconnu.
Ainsi, ea même temps que le concubinat se rapproche des
justes noces, le MK~M/w/ttXMt se rapproche du concubinat. On
verra que ces unions incertaines se rencontrent fréquemment
à ta période barbare, et qu'elles y ont joue un rûio impor-
tant.

tMf'W.'i dit m(u't'<jt('. Le grand changement qui s'est pro-


duit à cet égard, c'est que le mariage tend de plus en plus à
devenir une institution spéciale, distincte de la famille et
lui servant de base.
A l'origine, à Rome, la clef de voûte de la famille n'est pas
le mariage, mais la p«~'«< /~M~<s. Le mariage n'a pas
nécessairement pour effet de fonder une famille nouvelle,
mais simplement do faire entrer dans la famille du mari
un membre nouveau. Par lui-même, le mari n'est rien ou
presque rien c'est le ;M<M'/«m<<«M qui est tout. Cen'est pas
à son mari que la femme est soumise, mais au ~M~<!m<<t<M
de son mari. C'est seulement comme patfr/«w<<«Mdo sa
femme que l'époux peut châtier t'inudetite conjugale, etc.
Le pouvoir marital n'est qu'un aspect du pouvoir paternel.
Maisà mesure que le second décline, on voit te premier s'en
dégageret se constituer à part et plus fortement, Le mari a des
droits en tant que mari, notamment celui de punir l'adultère
AXAU'.OM.–t.EM.UUAOt! 343

ou d'eu poursuivre la répression. Le coup!e conjugal, d'abord


perdu dans la masse famitiaio, s'en détache, devient un
groupe ~t<t~<'Mm~qui a sa physionomiepropre et sa régle-
mentation spéciale. C'est surtout au point de vue pécuniaire
que cette transformation est sensible. Originellement, la dot
de la femme entrait dans te patrimoine du ~MfM'/<~t~«M du
mari, et, s'il y avait restitution, eitone pouvait être provoquée
que par le pM<M'/u))))<ta< do l'épouse et eUe avait lieu à son
pt'oHt. Peu à peu les choses changent. La dot entre dans le
pf<'M<<«Mt du mari, puis elle est déetarée complètement indé-
pendante du patrimoine familial. En même temps, le con-
sentement de la femme devient nécessaire pour qu'il y ait
restitution et toutes sortes de mesures conservatoires sont
instituées pour conserver au fonds dotal sou caractère propre.
tt se constitua ainsi, en dehors du patrimoine familial de
t'upoux et de celui do l'épouse, un patrimoine conjugal que
l'usage de la </OK«<to «M<<'MX~'fMvint encore grossir. Ainsi
la société matrimoniale se trouva fondée sur une base éco-
nomique qui n'était qu'à elle.
Sous l'influence de ce nouveau contre d'action, l'ancien
groupement familial se transforma. Au noyau formé par les
deux époux et ainsi isolé se rattachèrent tout naturellement
les enfants. Très vite ou leur reconnut des droits spéciaux
sur ce patrimoine conjugal, et par conséquent ils soutinrent
dès lors avec leurs parents des relations inconnues jusque-là,
puisqu'elles étaient indépendantes de toute pa<WapotMhM.En
un mot, sous l'ancienne famille, fondée tout entière sur cette
autorité ««' ~CM~'M du p(tf<'<<M)t~M, il s'en formait peu à peu
une autre, toute nouvelle, qui reposait sur te mariage et les
liens de consanguinité auxquels il donne naissance.
Ici s'arrête, au moment où nous écrivons, cette intéressante
étude. Dans la suite, que l'autour promet, it mettra en regard
de cet état de la législation romaine les dispositions corres-
pondantes des lois barbares.

KARLFR!EDER!CHS.– PamMienstufen und Eheformen


(Types famille c</brmM(Tem'<r<~e). ~<'t'«cAt'~fiir cer-
S~tcAeM~e
/(ecA~<CMM<Mc~a/ t. Xt, p. 458 et suiv., t897.

L'objet de cet article est de montrer qu'un même type de


famille peut très biens'accommoderde formes matrimoniales
diSérentes. Les faits abondent. Dans la X«<<<'tt~a
slave, telle
344 t/AXX~K t~T
MCtOMOtQH!.
qu'elle existait il y a peu de temps encore, la monogamie était
rigoureuse. Au Thibet, ou retrouve la même organisation
domestique, mais le mariage est collectif tous les frères
épousent une même femme. Sous le régime de la famille
maternelle, on voit très bien un groupe de smurs épouser un
groupe de frères, ou épouser un seul et même homme (sorte
de polygynie d'un genre particulier), ou chacune épouser un
mari dinèrent, etc., etc.
Mais la proposition, pour être exacte, a besoin d'être res-
treinte elle n'est vraie que de cette partie de ta régtetnenta-
tion du mariage qui concerne le nombre des époux qui
entrent sous )a raison conjugale. Jusqu'au temps où ia mono-
gamie devient légalement obligatoire, co mode de ia société
matrimoniale n'est pas détermine les parties le fixent à leur
gré, suivant les circonstances. Tout au plus, y a't-ii des cou-
tumes géncrHtement suivies dans un môme pays, précisément
parce que les conditions d'existence sont génératomeut les
mêmes pour tous. Et encore trouve-t-ou parfoisdes différences
très tranchées. Par suite, les combinaisons les plus diverses
peuvent avoir lieu, alors que pourtant le type de la famille est
le même. Mais il n'en est pas de même des formalités du
mariage, elles sont beaucoup moins variables. On ne trouve
pas le mariage par achat avant un certain moment do t'evo.
tution et on no le trouve plus qu*a l'état de survivance des
que cette phase de l'histoire est dépassée.
Mêmeainsi dcthnitee, la loi est importante, Il s'en dégage
plusieurs conséquences
t° La famille ne peut être définie par la nature de la société
<~U}ugate; il faut donc renoncer à distinguer des familles
potyandriqucs, potygyniques, etc. Cest ailleurs que doivent
être recherches les traits caractéristiques de la famille.
3"Un coroltaire de ce qui précède est que le mariage n'ex-
plique pas lit famille, puisqu'une môme famille comporte des
sortes de mariage très ditïércntes. On ne doit donc pas plus
expliquer ta filiation utérine ou les nomenclatures de Morgan
par t'hypothese du mariage collectif, que la filiation agnatiquo
par les conditions dans lesquelles ont lieu les justes noces et
la présomption qu'elles fondent.
3" Plus généralement, on voitcombien est erronée cette opi-
nion de sens commun qui faitdu mariage la base de la famille,
puisque celle-ci n'est que si faiblement affectée par les usages
matrimoniaux.
AXAH')! – LE M.UHAOE 348

QARUi-'t(C.-A.).– ilinnhn'Im
Ricerohe a.If aai w~1~11
auerttna1 nuztalt w..1
ne! .111..
medio
evo in Sicitttt, coo documentiinédit (/<<'fA<'t'cAMx«t'/M
«.M~M KUpN«)~'«t< moyetttiyefMSicile,<!t'<'Cdes<<OCMM<
Paterme,chez AtbortoReber,1897.t03 p., grand
!M<'</<~).
iu-8".
La Sicileest l'un des paysd'Europeoù le plus de races et
de civilisationsdifférentesse sont trouvéesen présence.Les
Grecs,les Latins, les Juifs, très nombreuxpendant le moyen
âge, les Arabes,les Normandss'y sontcoudoyésà un moment
donné.De ce mélangeest résultéune civilisationcomposite.
Chacunde ces peuplesa marquede son empreinte le droit
sicilien, qui par suiteest très différentde celui qui était en
usage dans la péninsule.H a une physionomiequi lui est
propre. C'estce que M. Garuna voulu établir pour ce qui
concerneles usagesnuptiaux.
Ce qu'il a de particulierà cet égard, c'est d'abord que les
pratiques cerémoniettesne furent nulle part aussi nom-
breuses,précisémentparceque les Siciliensempruntèrentun
peu à tout le monde.Le mariagecompletse composaitau
xtv*sièclede trois couchesde formalitéssuperposées. Il y
avait, en premier lieu, les anciennes(iançaiites(N;)OHM~a)
auxquellesl'Eglised'Orient avaitdonneuncaractèrereUgieux;
puis, une démarchepar laquelleles épouxallaient à l'église
rendre grâcesà Dieuet recevoirla bénédictiondu prêtre
enfin, entre ces deux usages s'en intercala un troisième,
apporté sans doute par les peuplesd'origine germanique.
C'estune transformationde ta cérémoniepar laquellet'époux
acquérait le Mtt~'ttmsur sa femme.Et ces trois formalités
étaient nécessairesà la validitédu mariage.
Nonseulementellesétaient nombreuses,maiselles se fai-
saient avecun luxede fêteset de paruresdont on ne trouve
aucun exempleen Occident.Festins,représentations théâ-
trales, promenadesaux flambeauxse succédaientpendant
plusieursjours. Cettesomptuositédevinttellementexagérée
que les rois normandsessayèrentde la refréner, commele
prouvent un très grand nombrede lois somptuaires dans
toutes tes villesde t'tte. On trouve dans plusieurs fueros
d'Espagneles mêmesprohibitions;d'où it suit que les cérô.
monies nuptiales y avaient le même caractère. Cet éclat
exceptionnelne serait-il pas une importationarabe?
346 L'AXX)!t! <M7
!!<)CMt.O(!tQt'E.
Emt. SCHULENBURG.
Emt. SCHULENBURG. Die Spurea
Die Br
des Braatptmhes,
Spurea des
Brttutka.ufes und aenlicher VerhMitnisae in den
îfa.nzooaischen Epen des Mittelalters (~-«CM dit
m<«~<' p(«' /'«~, (/MM««M~0~<«'«c/<f<tf( (/e p<'««~«Man«-
<0<y«M (/(««t <M t~O~f'PS du MOt/t'M
/«;t{'<!M('< <~f). /<'<f-
"f/t/if r<<'<'c/)tw/<'/<<'<<~«'fMt')Mc/t~t. Xn,p.i~-t4u
eHUt-MC.

Dansles poèmes épiques dumoyen~ge, un chevalier eutëve


très souvent, par force ou par ruse, la femme qu'il ttitne; or,
on considère que cet enlèvement constitue, au profit du ravis-
seur, uu veritabto droit à épouser la personne enlevée. Dans
d'autres cas, ie chevalier est oblige, pour mériter la main
d'une jeune tttte. de se soumettre de véritables épreuve: de
témoigner de sa bravoure par quelque haut fait ou tttôme de
rendre un service signalé aux parents de sa bien-aimce..
M. Sct)u!enhurs voit dans le premier de ces usages un reste
du mariage par rapt, et, dans le second, une survivance du
mariage par achat.
Si, par ces mots, mariage par achat, mariage par rapt, un
entend le rapt symbolique et l'achat régulier de ia fiancée,
tels qu'ils sont pratiqués chez des peuples relativement avan-
cés (Slaves, Grecs, Hébreux, été:, le rapprochement est arbi-
traire. Ces deux cérémonies sont en effet des procédures
définies, ayant une signification juridique déterminée. Elles
accompagnent la transformation de la famille mitterneiie en
famille aquatique et elles en résultent; elles sont destinées à
permettre au mari d'incorporer dans sa famille natale les
enfants à na!trede son mariage. H n'y a donc rien de commun
entre ces institutions régulières et ces coups de force et
d'adresse, tant en honneur au moyen tige. La tolérance dont
ils jouissaient alors témoigne simplement que la société était
en train de s'organiser; par suite, beaucoup de faits échap-
paient à la réglementation collective, encore débite et incon.
sistante, et beaucoup de situations se dénouaient par la vio-
lence, qui par conséquent jouait un grand rote. C'est ce qui
arrive, sous dos formes diverses, toutes les fois que les forces
socialesn'ont pas encore atteint un suffisant état d'équilibre
ou l'ont perdu. A cet égard, les usages dont nous venons de
parler ne sont pas sans analogie avec certains faits que t'en a
constatés dans les sociétés tout à fait inférieures, comme les
tribus australiennes, et qui ont été également confondus à
A'<A).YSH'–t.At'E)fE 347
tort avec io mariage par rapt ou par achat. Chexces peuples,
ii arrive ou que le jeuno homme eniëvola femme sans le con-
sentement des parents, ou qu'il acheté ce consentement. Mais
il n'y a point là d'opérations juridiques destinées à produire
certains effets do droit. Unhomme prend une femmede force,
ou, pouréviter une vendetta,désintéresse les parents; ce sont
des arrangements privés, plus ou moins fréquents. mais sans
valeur etsans sanction sociale. Il n'y a rien dans tout cela qui
affecte !a structure de la famille. L'analogie avec ce qu'on
observe au moyeu âge est assez frappante et olle pourrait
s'expliquer par ce fait que ces deux sortes de sociétés étaient,
M«ta~ ~)<f«t)</<.<. dans un état correspondant d'inorganisa-
lion, chronique dans un cas, provisoire dans l'autre. ii n'y a
pasia de survivance. Seulement, les sociétés supérieures qui
débutent passent par des phases où elles rappellent certains
traits des sociétés inférieures, avec cette différence qu'elles no
s'y arrêtent pas.

Uutt'cles travaux jH'cc~dcnts,ou tt'uuvctades )'cn"pignf'ments


d:u)!!)'< ouvragesci-t!t'suu! qui ont ~t' :ma)ys~'s
it))pt't'(!U)t': ;))us
))ttUtsouslit t'u)'t'i<)U<*
~Ct-t'H~t'f
fC~t'ftMf
MA<tY
ti. KtX<.St.HY. Travels in West Africa (v.p. 180).

t.. SCOTTnOHEHTSUX. The K~Crs of the Himdu Rush


(v. p. i8~).
J. Kt."n~C. Tagbuoh oimerRûise in ïnner Arabien (v.p. )89).

C. HAttX. Kaukastsohe Relsen und Studien (v. p. t90;.

))E)txuA)tu
STERX.– Zwisohen Kaspi und Pontus p. tM).
Tous les uuY)'af!('s
tuentiom~isouslit ru!)rit)u':~'u/<e<~mM<)'~tM
(p. i90 a p. 2t0j.
A. HUJ.HXHAMtT.Vedische Opter und Zauber h. p. 230J.

V.–LAPËtSK
t'm'M.UmKMtM.

L. GUKTMER.– Die Idee der Wiedervergeltung in der


Geschichte und Philosophie des St)'a.&'oehtes. ~<tt
<<~<!<<'M.
~«<0)'MC/<~Jïtt(tC<C~~MMa'
BM~'«~~Mt'L'HtPPrM<
348 L'.tXXÉË tM7
SOOUUMt~'H.

IH*Abth., i" Maeifto.(A'~c <<<'


fc~a~~ t/oMof/tM~v
</«!MÏHp/«7o~/«c </u(/<-o<f~)~. Contribution &t'idstoire
générate du développement de ce droit. Troisième partie,
première section.) Ëriangen, 1895, chez Hiasing ~'xxxvnt.
CS8p.).

Quoique cet ouvrage date de 1895, nous croyons uti)c de le


mentionner et d'en indiquer les tendances générâtes, parce
qu'il doit avoir une suite que nous aurons présenter à nos
lecteurs quand elle aura paru.
Par représailles (t)'«'f/cn'<<ft(M~ l'auteur n'entend pas
seulement le talion proprement dit. Si nous comprenons bien
sa pensée, il désigne par ce mot toutes les modalités et tous
tes caractères de la peine qui ne sont que le reflet et ta repro-
duction automatique des modalités et des caractères corres-
pondants du crime auquet elle est attachée. En tant qu'eue
est destinée à améliorer le coupable ou &intimider les imi-
tateurs possibles, il n'y a aucune raison pour qu'elle res-
semble de près ou do loiu à l'acto qu'elle réprime. Si l'on
veut qu'elle réussisse à neutraliser les penchants malfaisants,
soit chez le criminel lui-même, soit chez les sujets prédis-
posés à suivre son exemple, c'est d'après le tempÉrament du
criminel et non d'après ta nature du crime qu'elle doit être
construite. Or ii se trouve que très souvent elle est consti-
tuée de manière à n'être qu'une répétition totato ou partielle
du mat infligé à ta victime. A des degrés divers, tous les
peuples ont admis qu'il y a entre le crime et la répression
une sorte de parenté. Ce sont ces particularités de la peine
que Gunther attribue à l'idée de représaittes, c'est-à-dire au
besoin de rendre le mal pour le mal. A cet égard, les repré-
sailles ne se confondent pas avec le talion, quoique le talion
en soit la forme principale. Il n'y a en eltet talion que quand
ta peine est la reproduction exacte et matérielle du crime
(œit pour (Bit. dent pour dent). Or, elle peut n'en être qu'une
image symbolique, elle peut soutenir avec lui des rapports de
grandeur sans lui ressembler qualitativement, )a ressem-
blance peut se réduire à une analogie, etc., etc.
Cette tendance à dériver la peine du crime n'existe nulle
part à t'état de pureté partout la peine présente des pro-
priétés qui viennent d'une autre origine. Jamais elle n'a eu
pour unique objet de satisfaire des besoius vindicatifs on lui
a toujours assigné d'autres fins et on t'a conçue en consé'
AX.U.y~K.'t.–LAt'KtXK 34&

_t..I- tu
quence. Mais ce courant n'en existe pas moins; puisqu'il
dépenddo causesqui lui sontspéciales,il u sonindividualité,
et par conséquent il peut être isolédesautreset considéréà
part. C'est ce que s'est proposéde faire M. Gunther. !t a
entrepris de retracer t'évotutioM de ce courant depuis les
originesjusqu'auxtempsactuels.
Les deux premièresparties de l'ouvrage,publiées l'une
en ~889et l'autre en 189t,nous présentaientun développe-
ment do l'idée de représailleschexles peuplescivilisés de
l'antiquité et dansles sociétésgermaniquesjusqu'au milieu
du xvm"siècle. Dansla troisièmepartie, dont la première
section va nous occuper, l'auteur poursuit son étude jus-
qu'aux peuplescontemporains.Ce qui se dégagede cette
exposition,c'est que la notiondola peine-représaittestend à -A
s'effacerdevantd'autres conceptions,sans quepourtant elle
aitentièrementdisparu.Ellemarqueencorede son empreinte
de nombreusesdispositionslégislatives.L'auteur y rapporte
d'abord toutes les prescriptionsen vertu desquelles les
auteurs de violences,mortellesou non, sont totalementou
partiellementabsousquandl'acteincriminéa été déterminé
par une provocationpréalable.C'eston ellet une consécra-
tion dernière du droit de représaiiics,et Gunther confirme
cette interprétationpar ce faitque,chezles peuplesles moins
avancés d'Europe (Monténégro,Espagne),l'absolution, en
pareil cas, est beaucoupplus complètequ'ailleurs. La per-
sistancedela peinede mortseraitégalementune survivance
de l'anciennerègle d'après laquellele sang appellele sang.
Les autres traces du mêmeprincipeque M. Gunther relève
dansle droit contemporainsontlessuivantes lesdispositions
en vertu desquellesle faux témoinou le juge prévaricateur
sont condamnésà une peine,ou égale,outout au moins pro.
portionnelleà celle qui a ou qui aurait pu atteindre l'inno-
cent cellesqui mesurentla peineprononcéecontreceux qui
font évaderun prisonnier,oulelibèrentillégalement,d'après
la peine mêmequ'il était en train de purger.Enfin,dans un
grand nombrede cas, il y a un enort de la toi pour faire en
sorte que le châtimentressembleau crime. Ainsiles crimes
qui dénotentde bas sentimentssont punis de peioeshumi-
liantes (un accoutrementfémininimposéaux taches,le fouet,
le pilori) les délits dus à la cupiditépar des peines pécu-
niaires, etc., etc. Plus généralement,il n'y a pas de code
européenqui n'admetteque la gravitéde la répressiondoit
!!M ).'A'<XÉH t~f
MM::0).0<no)'H.
être en rapport avec celle du crime, c'est-à-dire qu'il doit y
avoir un lien quantitatif entre ces deux termes.
On peut justement reprocher à cet ouvrage le caractère
trop idéologique de la méthode'qui y est suivie, et par suite
la trop grande indétermination des notions, même fondamen.
tales, qui y sont employées. M. Gunther pose comme claire
l'idée de représailles et n'en donne nulle part de 'définition
précise. Elle aurait pourtant grand besoin d'être précisée.
S'agit.ii de représailies individuelles ou de représailles col-
lectives? Des unes et des autres, sans doute. Mais elles sont
très difïérentes, et par leurs causes, et par leur nature, et par
l'eflet qu'elles ont eu sur révolution du droit. Elles ne peu-
vent donc être confondues sous une mémo rubrique. Toujours
pour la même raison, c'est-à-dire parce qu'une telle notion
lui semble etémentaire, il lui parait bien facile de discerner
ce qui, dans les divers systèmes répressifs, peut être impute
à cet esprit de représailles. En réalité, une teUedissociation
ne peut être obtenue qu'à l'aide d'observations, de comparai-
sons, d'opérations très compliquées. Un peu d'introspection et
de diatectique ne 8ui!it pas pour faire la part de chacun des
facteurs d'où résulte la peine. Aussi la manière dont il fait fu
partage est-elle souvent très contestable. Ii considère comme
une évidence que la règle du talion en vertu de laquelle la
peine est la copie exacte du crime, n'a pas d'autre origine.
Cependant, par eux-mêmes, les sentiments vindicatifs ne se
contentent pas aussi facilement ils tendent, au contraire, a
obtenir une réparation supérieure à l'ofïense. lis réclament
la mort pour unesimple injure; ce n'est doncpas leur influence
seule qui peut expliquer l'homogénéité des deux actes. De
m~me, il est fort douteux que la persistance de la peine de
mort s'explique comme le voudrait l'auteur. Dès l'origine, elle
existe pour les attentats religieux, et dans ce cas elle n'a
aucune ressemblance avec les délits qu'elle réprime. Pour-
quoi sa persistance ne viendrait-elle pas de ce que les crimes
de sang nous font aujourd'hui la même impression que les
crimes contre les dieux faisaient à nos pères 2?
Mais quoiquefondées que puissent être ces critiques, ii reste
que la peine est en partie fonction du crime, et non pas seule-
ment du criminel, comme le voudrait l'école italienne la
relation qui unit la grandeur de l'une à la grandeur de
l'autre en est peut-être la meilleure preuve. Et puisque ce
caractère de la peine se retrouve, plus ou moins masqué, à
AXAU' – t..t t'MXjt 3M
toutes les époquess de l'histoire,
('histoire, on doit croire qu'il lui est
essentiel et qu'elleo ne peut le perdre totalement sans cesser
d'être ette-nteme. C'est ce qui fait que l'ouvrage de M. Cun-
ther est une utile contribution à la sociologie pénute. tt est
d'aiiteurs très soigneusement informé et t'eu y trouvera une
multitude de renseignements sur la législation pénale des
différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours.

J. KOttLER. – Studien aus dem Str~~ocht. D&s Str&-


R'ocht doritfttientsohen Statuten vomiS-i6 Iahrhun-
dert (~<)M/M /.F~'o<f/~Mf<M.<fa~t<«italiens
f/c(<<'o<tp~t<!<.
</«xu" (tu xvf ~c/c). Mannheitn, 1898.1897; 09 p., in-8";
chez Beastteimer.

Ce travail, non encore termine, a paru en cinq livraisons


successives dont la dernière est de ~7. t) a pour objet d'ex-
poser le développementdu droit pénal dans les cités itaiiennes
du xn" au xv)" siècle, c'est-à-dire de la période où le droit
municipal est à son apogée jusqu'au moment on l'action des
juristes devient prépondérante. Toutefois, l'étude ne porte pas
sur toutes les villes d'Jtaiie; l'auteur a laissé de coté ritatie
inférieure et la Sicile parce que le droit pénat ne s'y est pas
constitué sous ies mêmes influences. Danste Kord, c'est l'édit
des Lombards et ledroit romain qui ont été le point de départ
de i'évotution juridique; or ce queAf. Kohter a voulu recher-
cher, c'est ce qui est résulté de cette double influence, d'au-
tant plus que le droit qui en est sorti a fortement auecté les
législations modernes sur la même matière.
L'ouvrage est divisé en deux parties, l'une géuérate (p. 1 a
3~, qui traite des peines et des conditions de la respousabi-
lité en générât; l'autre spéciale, qui passe en revue les diflé-
rents crimes et délits.
H est impossible de résumer un pareil livre. qui est avant
tout un recueil de matériaux. L'auteur a dépouillé avec le plus
grand soin les nombreux codes en usage dans les différentes
villes de l'Italie septentrionale, en a classé méthodiquement
les dispositions par ordre de matières et les a mises en regard
des prescriptions correspondantes que contenaient soit i'édit,
soit le droit romain. Mais il s'est contenté de grouper les faits
sans chercher à généraliser. Peut-être s'est-il réservé pour la
dernière partie de l'ouvrage, q ui est annoncée commeprochai ne
Quand elle aura paru, nous aurons l'occasion d'y revenir.
3S2 tM7
L'AXKÉE SOCMLOGtQL'E.

tt y a pourtant une conclusiongéaéraioqui se dégagedèsIi


présentde cette recherche.C'est que le droit pénaldescités
italiennesest, a l'origine, beaucoupplus douxque le droit
romain; les peines sont surtout pécuniaires,rarementcorpo.
relles, et, dansce dernier cas, ellespeuventtrès souventêtre
rachetéesà prixd'argent. Peu à peu, les choseschangent.Le
systèmerépressifdevient plus impitoyable.Le dernier sup.
pticeest d'un emploide plus en plus fréquent; la possibilité
du rachat est subordonnéeà des conditionsde plus en plus
étroites.Enfin,entre !exv et texvfsiècte,ta iégistationpénale
devientd'une barbarie qui surprend,étant donné ce qu'elle
était dans le principe.
M.Kohier attribue ce changementà une doublecause à
l'actionpuissantedu droit romain,avecson indiiïérencepour
les intérêts individuels,et à la rudessede mœursque doter.
minèrent,dansles sociétésitaliennes, des sièclesde guerres
extérieureset de luttesintestines.Mais,sans vouloirnierl'im-
portancede cesdeux causes, H nous paratt douteuxqu'elles
suffisentà expliquerune telle transformationmorale.Jamais
l'enseignementdes juristes ne sauraitêtre assezefficacepour
modifieraussi profondémentun systèmepénal; car celui-ci
exprime!'état de la consciencepubliquedans ce qu'ellea de
plus fondamental,et la dialectiquejuridique nesauraitchan-
ger ainsi les sentimentsmorauxdes peuples. Ellen'agitque
sur les partieslesplus élevéeset, partant,les plussuperficielles
de l'esprit national.Quantaux guerres, mêmeciviles,il n'est
pas démontré qu'elles aient sur le droit pénal t'ettetqu'on
leur attribue.Ledroit des Germainsparait avoirété relative-
ment doux, et pourtant l'état de guerre y était chronique.
Lefait signalépar M.Kohter nous parait avoirune portée
plus générale.Steinmetz,dans un livredontnousallonsavoir
l'occasionde parler, a bien établi que, dans les sociétéstrès
primitives,les crimescommispar les nationauxeux-mêmes,
et non par des étrangers, sont traités avecune indulgence
relative.Le groupen'intervient pas toujours ou n'intervient
qu'avecmodération.La disciplinecollectivea quelquechose
de paternel.Du Boys a égalementremarquéque notre droit
pénal était relativementdoux pendant tes premierssiècles
de notre histoire;il ne s'est aggravéque plus tard. L'obser-
vationde Kohterne viendrait-ellepas simplementconnrmer
les précédenteset ne s'exptiquerait-ettepas de la m6me
manière? Pour que le droit pénal soit rigoureux,il tant,
– LA)')!)X)!
AXALYitKi:.
Hembte.t-it, que la sociétéait atteint un certain degré de con-
centration et d'organisation, que l'organe gouvernemental
suit constitué. L'état inorganisé,te nivellement
démocratique
qui caractérise, soit les peuples inférieurs, soit morne les
sociétés plus avancées au début de tourévotution, se concilie
difftciiement avec une répression trop impitoyable. Voilà
comment it se fait que l'adoucissementdes peines,
que l'on
signale aujourd'hui dans toutes les grandes nations euro-
péennes. peut s'observer également à t'époque où elles étaient
seulement en train de se former.
En dehors de cette conclusion géoéraio, on trouvera dans
ce livre plus d'un fait instructit. Dans un
grand nombre de
it
villes, existait des associations formées par libres contrats
et destinées soit à poursuivre la <'<w/~ pour le
compte des
associés qui se trouvaient lésés, soit à
payer pour eux le prix
de la composition, si au contraire ils s'étaient
exposés à une
légitime vengeance; exemple, ajouté à beaucoup d'autres, de
la spontanéité avec laquelle des groupes sociaux se
forment
en cas de besoin pour se substituer a ta famille,
quand cette ci
est obligée de délaisser certaines des fonctions
qu'elle rem-
plissait antérieurement?. 21). Uneparticularité plus curieuse
encore est l'étrange disposition que l'on retrouve dans
sieurs statuts et en vertu de laquelle, quand un crime plu-
avait
plusieurs auteurs, la peine principale n'atteignait qu'un cer.
tain nombrede coupables; les autres étaient, d'office, consi-
dérés comme simples complices et punis moins sévèrement
!p. MS). Parfois, un seul était frappé. Nonmoins remarquable
est le principe, très générai, d'après lequel, dans la détermi.
nation des peines pécuniaires, la situation de fortune des con-
damnés devait être prise en considération
(p. 28?< L'amende
était-ptus forte pour le rtcbe que pour te pauvre. Pour ta même
raison, les peines étaient plus sévères, souvent du
double,
pour l'homme que pour la femme, pour le M</Mou I't'~)«'~t'r
que pour le popx~, etc. Nous ne citons ces faits qu'a titre
d'exemples et parce qu'ils nous semblent de nature à intéres-
ser plus particulièrement tes sociologues.

MARCELMAUSS. – La Religion et tes Origines du droit


pénal. Deux articles parus dans la ~ecxe de <7/M<o<n'</M
7~t'oM, 1897, a"' t et 2.
Ces deux articles consistent en une étude
critique du livre
E. DcMMtt). – Ann<!eMtio). «97.
3S4 L'AXXHKtOCtOLOC~m. tM7

de Steinmetz ~AHo/o~Mf/<e Sft«/«'Mj;«t' <'<'xff«


~M~ct'f~xo~
der ~(t'a/e(Etudesethnographiquessur le développement pri-
mitif de la peine; L'auteurse proposede dégagerce ({uola
sociologiepeut et doit retenirdes doctrinesde Steinmetx,eu
même tempsqu'il montre, dans uue discussiontrès docu-
mentée,sur queis points elles ont besoin d'être rectifiées
pour prendreun caractèreproprementsociologique.A l'un
et a l'autre titrece travailmérited'être analyse.
L'apportde Steimnetxa ta sociologiepénaleest double.
En premierlieu, il a établi, avec un véritable luxe de
preuves,le caractère mécanique,< inintentionuel de la
peineprimitive,autant du moins qu'elle n'a pas dépassela
phase de la vendetta,tt n'y a alors aucune relationlogique
entre le (ait qui allume les sentimentsde vengeanceet la
nature de l'objet sur lequel ces sentimentsse satisfont.La
peine est une décharge passionnelledont le premier venu
est la victime, sans qu'il y ait rien dans le patient (lui le
rende particulièrementresponsablede l'acte incrimine(V.
pour les faits le chapitre de Steinmetzintitule /~e co~
MH~'tc/tMp ~<e/«',l, p. :M8et suiv.). Elle ne se discipline
que plus tard.Dausle principe,elleest sans but.
Mais unservicebeaucoupplus important, rendu par Stoin-
metzà la sociologiepénale,est d'avoirdémontreles origines
religieusesde la vendettaet des peinesqui en sont dérivées.
II a fait voir en ellet qu'il y avait un rapport étroitentrela
vengeanceprivéeet leculte desmorts.Pour apaiserl'esprit du
défunt, il faut une victime autrement, l'amo invengéese
vengeraitelle-mêmeet ses colèresseraient terriblespour ses
ancienscompagnons.Le fait qui parait à Steiameti:justifier
d'une manièredécisivecette interprétation,c'est que, très
souventla victime expiatoireest, au su et au vu de tout le
monde,complètementétrangèreà la mort qui détermineces
seulementce n'est pas le coupable,mais
reprèsaiHes\~on
ce n'est pas un de ses parents. On part en expéditionet le
premierindividuque l'on rencontresert de patient (v. 1.1,
p. 334et suiv.).Il y a mêmedescasnombreuxoù il y a ven-
detta sans que la mort soit due à un acte criminel.Parfois.
c'estle coupablelui-mêmequi s'en va chercheraudehorsles
victimesnécessaireset qui les immole.
Cesdeux propositions– l'absence de finalitéde la peine

<))S vu).Lcydeet Leipzig,«9~.


AXAU'SKA.–).\pK!XK ~;S

primttn-e et son caractère


nrHPtAt'nt*at!ttrta)*v~«~tAH~tt–
religieux paraissent à M. Mauss
définitivement étabiies. Maii).sur des points
essentiels, ia
théorie de Steinmetz lui semble gravement inexacte.
Suivant Steinmetx, la peine, tout en ayant des
origines reii-
~euses, s'expliquerait par des mobiles purement individuels.
Il pose en principe que le sauvage est
cruel, vindicatif. Il en
conclut que les vivants, prêtant aux morts les sentiments
dont
ils sont eux-mêmes animés, sont naturellement
enclins à
croire que la victime d'un meurtre ressent avant
tout une
grande soif de vengeance. Cette colère, ils la com-oiveut a
i imagede celle qu'ils éprouvent, c'est-à-dire eommeindéter.
minée dans son objet. De même
que, quand ils sont irrites.
ils se soulagent aux dépens du premier
objet qui leur tombe
sous la main. ils admettent que le défunt,
pour satisfaire son
ressentiment, peut parfaitement s'en prendre a des innocents,
et par suite a ses anciens
compagnons, par ceia seul qu'ils
sont plus immédiatement à sa portée.
Mais, inversement.
cette ~différence dans te choixde ta victime
permet d'échapper
au danger par voie de substitution. Tout ce
qu'il faut, c'est que
quelqu'un soit tué, peu importe qui. Telle serait la source do
la f<'M(«'~a.
Mais. objecte M. Mauss, le mort ne doit pas ôtre moins
irrité quand le coup mortel lui a été
porté par un parent, un
membre du ctan. que s'il a été
frappé par un étranger. Or, il
résulte d un très grand nombre d'observations
que, dans Je
premier cas, le coupable n'est pas poursuivi Très souvent
ou le laisse en paix. La vendetta est tout entière
tourne? vers
iexténeur; elle ne s'applique pas il l'intérieur du
groupe
famha! Smith a mémo pu définir le clan arabe un
où il n'y a pas de vengeance de groupe
sang Pourquoi la colère du
défunt désarmerait-eite quand le
meurtre, étant commis par
un proche, a un caractère
particulièrement atroce? Ou n..
voit pas non plus comment, dans la théorie
de Steinmetz,
onpentoxpiiquert'usagesigeneraidet'anthropophagieritueiie
des parents. H est très fréquent
que les parents, au cours d'un
banquet reiigieux. mangent les restes de celui qui n'est
Une pareille cérémonie a évidemment une plus.
tout autre cause
que la peur de la malignité du mort. Elle vient, au
contraire
d un besoin de rester uni avec lui, de retenir dans
ie clan
toutes les vertus qui sont en lui. C'est
qu'en enct tout le clan

~) V.Sk'itxuet~
toi-tM)'))))',
t). ).'i3.)7(i.
3S6 i8t7
t.XX~KSOO'n.mitft'K.
est considéré comme un seul corps, comme une seule et
même chair chacun des membres qu'il comprend contient
une parcelle de l'esprit qui anime le groupe et fait sa vitalité.
Par suite, toute mort est pour la collectivité une cause
d'allaibiissement, dont on prévient tes enotspardivers moyens
L'un d'eux consiste a rester quand même en communion avec
ledécédé par delà le tombeau, et cela grâce nu repas mystique
dont nous venons de parler ou à quelque autre pratique
magique qui tend au même but par des voies différentes, Un
autre procédé consiste a aHuiblir dans la même mesure et de
la mémo manière quelque clan voisin de façon à ce que
l'équilibre relatif des groupes limitrophes ne soit pas modifié.
C'est ce résultat que produit la vendetta. Celle-ci a donc,
avant tout, pour cause, non ta peur individuelle du u rêve*
nant et les sentiments individuels qu'on lui attribue,
mais, le sentiment collectif du clan, l'attachement il la com*
munaute, à la fois familiale et religieuse, qu'il forme. Sans
doute, c'est parce que te cian, l'être collectif, a un carac-
tère religieux aux yeux de tous ses membres, qu'ils sont
tenus de ne pas le laisser diminuer. Mais ce caractère reli-
gieux est du, non a des préjugés particuliers et il des consi-
dérations privées, mais au sentiment de solidarité qui unit
tous les associes et les détermine Il mettre bien au-dessus de
leurs lins personneites tout ce qui concerne la coiteetivité.
Voita pourquoi ta vendetta n'est pas seulement un procédé
d'hygiène religieuse, utile à qui veutécarter un danger inquié.
tant c'est un devoir strict. Voilà aussi ce qui explique com-
ment la vengeance privée a progressivement décru &mesure
que le ctan perdait sa cohésion primitive et sa suprématie
morale.
Mais une autre erreur de M. Steinmetx est d'avoir considéré
la vengeance du sang comme la forme première de tout le
système pénal, comme la source d'en toutes les autres peines
seraient dérivées, Il n'a pu arriver it cette conception qu'en
négligeant une masse imposante de faits. Des les sociétés les
plus primitives, à côté des règles qui menacent le meurtrier
de la vengeance familiale, il y a une multitude de défenses
religieuses, sanctionnées par la peine de mort. Tout ce qui
soutient un rapport un peu intime avec le culte, homme,
animal ou chose, est sacré, ou, pour employer l'expression
usitée, ~o«('. A tout objet tabou il est interdit de toucher et
la violation de l'une quelconque de ces interdictions est sévè-
– ).A)')!)XË
AXAt.MKit. 3S7
remeut punie Il'60.1ft""no
c'est le cas a.,
de la femmequi eutre dans un
lieu saint, du profanequi regardet'être qui représente la
divinité,du fidèlequi troublenue tète, qui sort eu public en
tempsprohibé,etc., etc.Cescrimesne tésentaucuuindividu
par conséquent,la réprobationet la répressionn'eu est pas
déterminéepar les seutimeutsqui sout à la base de la ven'~
geauce privée. Maista cause est doit être recherchéedans
l'institutionreligieusedu («&OM. D'aprèsles croyancesprimi-
tives, tout objet tabouérecèleuneforceterrible qui se com-
muniquecontagieusementà quiconquey toucheindûment.
Le violateur d'un tabou est donc un être dangereux, une
menacepourceuxqui l'entourent par conséquent, il importe
de l'éloigner,ou dele supprimer,ou de le rendreinoffensif
c'est à quoi tend touteune catégoriede peines. Le système
pénaldécouleraitdoncd'unedoublesource la vendettaet le
sentiment de solidarité religieusequi en est l'âme, d'une
part; de l'autre, les interdictionsrituellesqui résultent des
pratiqueset des croyancesrelativesau tabou.
Telleest la conclusionde cesdeuxarticles.L'auteura bien
voulu la présentercommeinspirée par nos théoriessur la
peineet la religion ettes viennenten effetconfirmerce que
nous avons dit ailleurs sur les origines religieusesde la
peine Maisl'originalitéde cette étude ne reste pas moins
considérante.Nousavionsbien pu établir le caractère reli-
gieux des peines primitivesd'une manièregénérale; mais
nous nous en étionstenu ta. M.Maussa su démêlerdans le
tabou l'institution religieused'où dérivecette religiositédu
droit péaat et nous croyonsl'idée féconde.
if est un point toutefoissur lequel des réserves nous
semblentnécessaires.Nouscroyonsprouvéque la vengeance
du sang dépend essentiottementde sentiments religieux
rotatifsà la nature du sang et que ces sentimentsont un
caractère collectif.Mais il nous parait ditïicited'admettre
qu'elle ait pour objet de compenserla perte subie par la
substancespirituelle du clan. D'abord,une pertesimilaire,
imposéeà l'un seulementdes clans voisins,ne saurait réta-
blir t'équitibre,et par conséquentne constituepas une com-
pensation.On pourrait répoudro,il est vrai, que la colère
déchaînéeest aveugleet nocalculepas avectant de rénexion
les effetsutilesde ses emportements.Maisil est un ordre de

(t)V.~tt'Mion
du<<-aMt<
Mefay. not<u))ttMnt
~<tM)<)), p. Mot suiv.
).'AXX)!H !HJt:)(tt.f<t.)Q(K. <8t)7

faits qui est plus inconciliable encore avec cotte iuterpreta-


tiot). ti arrive parfois que ta victime expiatoire, en cas de
mort naturelle, est prise dans le etan tui-meme. L'expiation,
sans doute, ne va pas alors jusqu'à la mort mais elle con-
siste très souvent en mutilations ou en coups distribués à tel
ou tel des parents survivants. S'il nes'agissait que de
répare)'
la blessure faite à t'amo du groupe, une telle pratique serait
absurde. Nous croyons donc que cette expiieutiou religieuse
de la vendetta, vraie en principe, doit être pousséo dans un
autre sens. Si le sang répandu, en vertu de sa nature reli-
gieuse, constitue uu danger pour toute la collectivité, ce n'est
pas seulement parce qu'il eu t'esutte pour elle un appauvris-
sement ce doit être pour une autre cause qu'il y aurait lieu
de rechercher.
Quoi qu'it en soitde ce point, t'anatysedes ouvragesqui pré-
cèdent montre que lit théorie de la peine ne reste pas station-
naire. Les explications simplistes dont on s'était si
longtemps
contenté sont de plus en plus délaissées. Ou u la sensation
qu'en se trouve eu face de phénomènes très complexes dont
los sentiments très sitnpies, qu'atteint lu conscience itnme.
dtMe, ne sauraient rendre cotnpte; on comprend qu'ils
dépendent de forces inconnues et obscures, dont la nature ne
peut être déterminée qu'à l'aide de procèdes détournés et labo-
rieux. C'est de cette idée que procèdent les consciencieuses
recherches dont nous venons d'exposer les résultats'. L'en-
tente que nous avons constatée entre dos auteurs qui, maigre
la divergence de leurs points de vue, s'accordent pour voit-
dans la peine un rite religieux, est particulièrement siguifica-
tive. Nous voila loin du temps où l'on croyait pouvoir expli-
quer la peine en la comparant aux mouvements réflexes par
lesquels l'animal réagit contre les causes de destruction qui
menacent son existence.

')!Ci)"t)!i''«n')T.t)ttH))<'i)).<[)in'p!n'('<'tn~<th'Sft)tit))t'nt.)'<)m't'ant'<)''
LMn'')-. Die SrAMM/'ut-xx'tf Nf tw~~ic/tM~tMonacAn- M))<~<~Mta/ftc/)ft'
~()<MHy. tj-itfzij.t. ttUtj H-))~ Hirsd)f<ht).
AXALYftM.
– OMt.AXt<AT!t)'<
iiOOAt.K 3S9'

tt. t– <'«(.AXtSATt()!<SOf:)Af.K
)'tH'M.f)m)iMt:tM.

BADE~-POWELL(B.-IL). – Thé Indian VIMa~e Commu-


ntty(/.« fHmMtM««Mf<<'rt<~f<~<K<! ~K</<').Loudres, Long-
mans, Green et C' i8HC,xvt-450p., in-8".

Quoique cet ouvrage touche A la question de la propriété


foncière, comme il est surtout riche en renseignements sur
l'organisation sociale de t'tnde, nous avons cru preférabt&
de Je ranger sous celte rubrique.
Depuis Sumner ~taine, on a pris l'habitude de considérer la
communauté de village comme le type de ia communohin-
doue. Or, d'après M. Baden-Powe)!, il est des villuges, entrés
grand nombre, qui sont organisés sur une tout autre base.
Les caractères principaux de la communauté de village sont
les suivants )" Le village n'est pas toujours cuttivé en com-
mun c'est mêmele cas le plus rare. Mais lit part de citacun,
au lieu d'être déterminée par les résultats économiques d~
chaque exploitation {amitiate, est fixée par des règles gène.
raies et hnpersonneiies, consacrées par ta tradition. Parfois !e
partage est périodique. ~° Les terrains en triche sont ta pro-
priété commune de tous tes habitants quand tes circonstances
obligent à les diviser, c'est toujours d'après un principe défini.
Génératement, le lot do chacun est proportionnel au lot de
terre arable qu'il exploite. 3" Les indigènes ont un droit de
préemption sur la part de leurs congénères, de préh''rence
aax étrangers. 4° La commune est administrée par un con-
seil élu de propriétaires, le p<ïHf/«!~<f.5" Enfin, le corps
des propriétaires se considère comme investi d'uue sorte de
droit seigneurial sur le sol. Cette particularité, sur laquelle
l'auteur insiste beaucoup, est assez évidente quand les pro.
priétaires se servent de tenanciers pour cultiver le sol. Mais.
ils n'auraient pas de leurs droits une autre conception, quand
ils sont eux-mêmes agriculteurs. Ils revendiqueraient alors
lis terre non en qualité de cultivateurs, mais en vertu d'un
titre supérieur.
Mais cette organisation, loin d'être générate, n'est répandue
que dans le Panjab, les provinces du Nord-Ouest, dans
FOudb et le Bihar elle se rencontre encore, mais à t'état
sporadique, dans ta partie occidentale de t'inde supérieure,
3CU L'AXX~:SOt:)f)).0(!WK.<897
dans
dans le Dakhan
Dakhaoet dans certaines
et dans certaines régions du Sud. Partout
régions du
aitteurs, ou observe une forme de viitage qui est très di)!e-
rente de la précédente et que fauteur appelé ~«yf<<K'f~-<. Hla
définit ainsi 1° Les terres sout divisées et les domaines sont
exploites indépendamment les uns des autres. Aucune trace
de culture commune. ~° Les terres en friches qui entourent
les terres arahies ne sont pas une propriété commune. En
principe, elles n'étaient l'objet d'aucune appropriation et les
habitants en disposaient suivant leurs besoins. Plus tard,
l'autorisation du Maja ou du chef de la commune fut exigée.
3° Enfin, le village est administré par un chef héréditaire.
C'est peut-être par ce trait qu'il se distingue le mieux des
communautés de village de Sumner Maine; car ce dernier
considère lui-même le caractère électif du pHMf/«<t/<« comme
la propriété distinctive de l'organisation qu'il décrit.
Ces deux types distingués, quelle est leur relation histo-
rique ? Très souvent on a fait du village communautaire la
forme primitive dont l'autre serait dérivée. Celle-ci serait
simplement due à ce que ta propriété, d'abord collective,
est devenue progressivement privée. L'auteur s'eteve contre
cette opinion. Si elle était fondée, on devrait trouver la com-
munauté de vittage.d'autant plus développée que la popula-
tion appartient àdes races ptus primitives; or ii n'enest rien.
Trois grandes races ont précède les Aryens, dont on peut
encore trouver des traces tresapparentes aujourd'hui ce sont
les Thibetains, les Dravidieus et tes Kotarions. Or, dans les
pays où leur influence a été le plus marquée, c'est la forme
7<a~<f«<'<que l'on trouve. Le communisme familial, la~'oM-
/«m<~ de Sumner Maine, ne parait même pas y avoir jamais
existé (p. tM). Enfin, même tes Aryensprimitifs ne semblent
pas avoir connu la communautf de vitiago; it n'en est pas
question dans les lois de Manou (p. ~u4). U'où il suit que, si
elle est d'origine aryenne, les Aryens ne t'ont pourtant pas
apportée avec eux dans l'Inde; elle doit douc résulter du fait
de l'occupation. On s'explique déjà de cette manière le carac-
tère seigneurial du droit que ces sortes de propriétaires s'at-
tribuent sur le sot. lis te possedenten qualité de conquérants.
Maisd'où viennent les autres caractères ? D'où vient l'es-
prit communautaire et démocratique de ces villages? Une
seule et même réponse ne peut pas être faite à cette question;
car ce type n'est pas réduit à un seul genre, mais il comprend
des espècesdiuérentes qu'il y a lieu de distinguer.
ASA<.YS)!.<. – ')K)!AS)!<.tT)uX !:«(:tAt.H HGt

.n_.r_ _I_
Parfois, le village a eu pour origine un clan ou un frag-
ment de clan tout constitué qui s'est étabti dans un pays par
droit de conquête. Tantôt, les conquérants se sont assujetti
un village existant dont les propriétaires ont été réduits à
l'état de tenanciers; tantôt ils ont occupé un sol vierge qu'ils
ont eux-mêmes défriche. Mais. dans un cas comme dans
t'autre, ils ont forme par leur union uu village nouveau toute
la diuéronce, c'est que, ici, il s'est surajouté à uue commune
plus ancienne qu'il a utilisée, tandis qu'ailleurs il a du
être créé de toutes pièces. Mais, quelle que soit la manière
dont il ait pris naissance, comme il se produisait dans des
conditions nouvelles, il devait aussi s'organiser d'après des
principes inconnus de la population indigène. Les nouveaux
venus n'exercèrent pas ledroit de propriété qu'ils s'arrogeaient
sur le sol comme avaient fait jusque-là les tribus préaryonnos,
et c'est ainsi que le ~x~-t'f~f se substitua au village ~«/<t(-
<(W<.
Deux causes auraient déterminé ce changement. C'est
d'abord l'intensité particulière qu'acquit chez les Aryens, au
cours de la conquête, le sentiment de solidarité qui unissait
entre eux les membres de chaque tribu et, secondairement,
les membres du ctan, subdivision de la tribu. Quand celle-ci
occupait un territoire, comme elle avait fortement conscience
do son unité, elle le considérait comme la chose indivise du
groupe, et par suite, quand elle en déléguait une partie ù l'un
de ses clans, ce dernier, de son coté, s'en regardait comme
propriétaire au même titre et de la même façon, tt était donc
posé en principe que chaque membre de cet agrégat restreint
avait un droit égat sur le sol. Delà, partage; de là, toute sorte
de précautions pour prévenir toute inégalité, notamment l'al-
totement périodique. De là aussi l'habitude de traiter les
affaires en commun, la pratique de ta responsabilité collec-
tive, en un mot tous les caractères par tesquets on définit le
vittagecommunautaire; expression d'uilleurs inexacte, car il
n'y a eu aucun moment où l'exploitation ait été, à proprement
parler, faite en commun. En second lieu, une institution spë-
ciate, )a~'otM/«m< c'est-à-dire le communisme familial, qui,
toujours d'après l'auteur, ne se montrerait qu'à une époque
tardive dans l'histoire de l'Inde, a contribué à produire !o
même résultat en renforçant encore ces idées égatitaires et en
permettant au sentiment de solidarité domestique de rester
vif et actif dans un cercle étendu; ce qui empêcha le groupe
L'AXXtiK sHOULOtit~t-K. <M7

fondateur du village de se dissocier en groupes


indépen-
dants. Quant aux causes qui auraient produit ces deux
parti-
cularités do ta civilisation aryenne, M. Baden-Powett croit tes
trouver dans )a nécessité ou se trouvaient les Aryens de se
tenir étruitement unis pour tutter contreles races
hostitesqui
les entouraient.
Les choses ne se seraient pas passées autrement toutes les
fois que le village a été fonde, non par un clan ou une
por-
tion do ctau constitue, mais par une famille
particulière, qui.
étabtie sur un point, aurait, par voie
d'essaimage, occupe peu
à peu tes terres environnantes. Mais il a une forme
y do~m'Mf.
rt~f qui aurait eu de tout autres origines. Une fois que
les rois furent considères comme les
propriétaires éminents
du territoire, il arriva qu'ils déléguèrent ù des bénéficiaires
qu'its voulaient récompenser, tours droits sur têt ou tel vil-
lage dans d'autres cas, ce furent tours officiers, préposes à
l'administration des villages, qui usurpèrent d'eux-mêmes ces
droits lorsque la décadence du pouvoir monarchique leur en
fournit t..s moyens. Le droit de propriété
quasi féodal que les
uns et tes antres acquirent ainsi se transmit naturottement a
tours héritiers: et comme ceux-ci restaient dans l'indivision
en vertu du principe de ta ~t')t<<tM)t<)/,it en résulta
qu'au
bout d'un certain temps des groupes assez étendus se trouvé-
rfnt être cottectivemeut propriétaires do différents
vittages.
C'est même presque exclusivement dans ce cas que t'en
peut,
sans abus de mots. parler de propriété collective; car il eut
y
reettemcnt exploitation eu commun, au moins par l'intermé*
diaire de tenanciers.
Le principal mérite de cet ouvrage se trouve dans l'effort
fait par l'auteur pour arriver a une classification des diué-
rents types de villages hindous. On y trouvera en outre d'utiles
renseignements sur l'ethnographie de l'Inde. M.Baden-Powett
s'est surtout servi pour son travail de documents de premier
ordre; ce sont les rapports de cotonisation. Seulement ils ne
sont pas toujours faciles à utiliser; car ils
manquent nuturel-
lement de critique historique. Or les conclusions
qu'il en a
tiréessontdes pius contestables; la démonstration surtaquelle
il a établi sa thèse nous parait assez faible.
Et d'abord, on est assez étonne de voir confondus dans une
mémo classe les villages à constitution
démocratique, dont
tous les membres sont égaux, et ceux qui sont
organisés féo.
datèrent, c'est-à-dire où un groupe plus ou moins étendu
AXA).MK'–<))U.AX)!.AT)')X!<Mt.U.R 36X
exerce sur le reste de lu population un droit de suxeratuete,
quece droit ait été acquisparconquête, ou par unedétégatio)
du pouvoirsouverain, ou par usurpation. Pour justiftet'ce rap-
prochement, l'auteur prétend que, mémodans le premier cas,
les copropriétaires qui cultivent le sol ont sur lui un droit
seigneurial, un droit supérieur. Mais du montent qu'il n'y a
pas de tenants, pas de vassaux, on ue voit pas ou quoi ce
caractère seigneurial peut consister.
Maisce qui parait surtout bien peu prouvé, c'est la Otiation
admise entre les deux sortes de vittage. Toute la théorie
repose sur cette hypothèse que les tribus aryennes avaient
un plus vif sentiment de teur solidarité que les tribus ana-
ryeunes mais à l'appui de cette supposition on ne cite
aucun (ait. Tout au contraire, il ressort de l'exposé même de
fauteur que, dans les races primitives de l'Inde, ta tribu était
beaucoup moins centralisée qu'elle ne le fut plus tard c))ox
les vainqueurs. Or c'est un fait historique que ta centralisa-
tion monarchique a pour etïet t'anaibtissement de t'organisa-
tiou tribate et des sentiments qui font l'unité du ctan.
Les affirmations relatives à ta formation de ta ~<Mf-/f<Ht)'~
sont encore moins bien établies. L'auteur recounait lui même
que citez les Xaîrs. qui sont de race dravidienne, le commu-
nisme familial existe; la famille se recrute, il est vrai, par
voiede filiation utérine, maiselle n'en est pas moins commu-
nautaire (p. t78). f) n'est pas douteux, d'autre part, que la
même institution ne se trouve déjà dans les lois de Manou.
Toute l'histoire comparée du droit proteste d'uilleurs contre
une telle conjecture. Jamais on n'a vu la~M/Mt'~ uattfe
d'une iamitte plus restreinte. Tout prouve qu'elle est bien
antérieure. Si donc elle est solidaire du~tff~c, celui.ci
n'est pas de date aussi récente qu'on te croit. Il est' vrai que
l'auteur admet comme évidente l'origine patriarcato do la
famille; mais cette théorie est difucitement souteuaMe aujour-
d'hui; en tout cas, après tant de recherches qui la rendent
au moins suspecte, elle ne peut plus être posée comme un
axiome.

JOBBÈDUVAL. – 'La Commune annamite (in A'OMr~e


MfCKf/tH<or«yxt'(<edroit /)'«H{'«Met <attjjw, octobre et
décembre 1896).

Ces deux articles résument les travaux les plus récents


'AXXÉKSOUtULOUtQtK.
tXM
sur I.- «
l'organisation de la commune dans l'empire d'Au
uam
('«rac~'M ~t~'««~-(/c <Hc~n)n)t<tt<' <tM<MM)<<Elle cons-
titue une unité religieuse, politique, administrative et
judi-
ciaire.
Chaque commune forme une association religieuse placée
sous lu protection d'un ou de plusieurs génies. Cette solidarité
religieuse s'atteste dans des tètes rituelles, accompagnées de
banquets en commun. Ces banquets out en même temps
une signification politique ceux qui
y participent affirment
ainsi leur qualité de membres de la même comtnuuauté.
C'est évidemment un reste de ces repas solennels et
mystiques
par lesquels les membres des sociétés primitives établissaient
ou renouvelaient périodiquement les liens
qui les unissaient
les uns aux autres et à leurs dieux.
Hu second lieu, tout en étant subordonnée à
t'cmpire d'An-
nam, la commune forme un petit État qui Il sa vie
propre.
C'estelle (lui doit collectivement l'impôt, etettepeuttibrement
frapper ses membres d'impôts focaux. Quoique, eu principe,
l'empereur ait le pouvoir législatif, elle peut établir pour elle
des régies juridiques spéciales. Enfin, ce sont les notables
qui
exercent le pouvoir judiciaire, et s'il y a appel, il est
porté
devantle chef du canton, qui, touten servant d'intermédiaire
entre la commune et i'Ktat, n'appartient pas
cependant au
mandarinat.
Cette communauté est tellementétroite qu'elle s'ouvre très
difficilement à des étéments étrangers. C'est par la filiation
qu'on en devient membre. !) n'est pas moins difficile d'en
sortir; celui qui quitte sa commune sans autorisation est
regardé comme déserteur.
0~<t«M<~<oK <M~w (/c /« coMmMoc. Elle comprend trois
classes les notables, les simples contribuables, euHn ceux
qui, pour cause d'indigence, ne figurent pas sur les registres
d'impôts. A coté de cette division en ctasses, il en est une en
hameaux (f/ffwj. Le t/«w est simplement une commune
plus
petite, confédérée avec d'autres. Mais cette organisation ne

()) CMomnt):<-s ;,<!)tt )'. Oty. /< cuwMtttMe a<f«a<Kt~au ïttHJMtt.


J'ori~ i89t. – )- Luf).Le <tHt)a<M. ~</<-«M<-
/'<M~))tM/tWtpe<t.
~Kf MCt'a/f lies/<MMaM«<M. t'aris. tK)!. – A. Lande; La commune
<!Mt(am)~. Satftcn.t8)j0. – Syb~tre. ~MafM <f~HHaM e< le peuple
aM))<!N)t<<.
t'Nft<.ttNtM.
AX.U.Y-K! – (')Hi.«'!AT)n\' MmAt.K 38K

repose pas, comme en Chine et eu Germanie,sur une division


décimale de la population en divines et en centaines. Le
nombre des familles ou des tonneaux qui forment une com-
mune est indéterminé.
!i y a aussi une division en ctans ~t'K/t).Pont partie du
même ~«A tous ceux qui portent le même nom patronymique;
or, il n'y a pas plus de quarante noms patronymiques dans
toute l'étendue de i'empiro, d'après ce que suppose un obser-
vateur. Il est vrai que l'importance sociale du ~M/test bien
diminuée cependant elle M'apas disparu on ne peut entrer
dans une commune qu'à condition de porter ou de prendre
un des noms patronymiques qui y sont eu usage.
Les orgaues de la commune sont les suivants )" L'assem-
blée généraie, qui comprend tous ceux qui sont inscrits sur
les registres d'impôts. Htte joue un rôle passif et ne fait qu'en-
registrer les décisions qui lui sont soumises.2° Le conseil des
notables c'est lui qui tient le véritable pouvoir. L'auteur croit
reconnattre à certains signes que t'age y donnait autrefois
une influence importante, mais qui a à peu près cessé d'être
réetie. Les notables se divisent en deux groupes, les uns qui
délibèrent et les autres qui sont des agents exécutifs. 3° Enfin,
au-dessus des chefs de la commune, il y a le chef du canton,
qui n'estaucunementun fonctionnaire d'État, mais représente
auprès des mandarins les intérêts dela population communale.

/.a ~'o/)nW /bK<n'. Le village annamite n'est pas pro-


priétaire de son territoire tout entier. Les documents attestent
l'existence de la propriété privée aussi loin qu'ils permettent
de remonter. Mais cette propriété a un caractère familial. En
eiïet !° La partie du patrimoine consacrée l'entretien du
culte des ancêtres, appelée ~xo~tm), est inaliénable. 2" La
vente des autres biens, meubles ou non, n'est pas définitive
eu principe. Ii faut que, en outre, l'acte porte la mention
Pour vendre définitivement 3° En l'absence de cette
clause, le vendeur et ses héritiers peuvent, pendant trente
ans, racheter la chose vendue.
Le domaine communal présente plusieurs particularités
remarquables. Il comprend t° les biens affectés au service
public, c'est-à-dire les pagodes et tout ce qui en dépend; ils
sont inaliénables 2"des biens achetés par la commune avec
ses fonds disponibles et qu'elle possède comme ferait un
simple particulier 3"enfin, des biens vraiment communs. Ils
).H SU~O~tï~tR. )8U?

sout de deux Cft~aa


ftfttttHfx~nv
sortes t~<t
les tt~~
uns ~t~. ~.t.~ ~î-t~
consistent
;<-fit~-f/«'M) en rixieres;
tes autres (<wt~/<d! sont occupes par les habitations, leurs
dépendances et tes cultures autres que le riz. Un auteur,
M. Ory, croit que, à l'origine, les uns et les autres étaient
cultives par les habitants Atour de rote, comme le sont encore
les biens des pagodes. Mais actuellement ils sont
périodi-
quemeut partagés. Le partage ne se fait pas en parties égales.
Les contribuables sont divisés eu quatre groupes hiérarchisés
et chaque groupe reçoit en proportion de sa
place dans la `
hiérarchie. H y a plus les membres d'un même
groupe ne
sont pas traités également, Car eux aussi sont hiérarchises
entre eux et ce sont les premiers inscrits qui choisissent lea
premiers leurs lots dansla part totale affectée au groupe. On
voit par ce qui précède que l'Annamite bâtit sa
maison, l'autel
des ancêtres sur des terres communales
(fM~oj qui, par
suite, n'appartiennent pas a la famitte.
Une autre propriété dont l'organisation est fort i
originate
est celle des neuves, Ils sont exploites par des communes de
pécheurs entre tes~uettes le roi a partage les différents cours
d'eau etqui en ont ta pleine propriété. Ces pécheurs ne vivent
que dans leurs barques et n'out pas le droit d'habiter à terre.
C'est la commune iluviate ainsi constituée qui possède. < On
ne distingue plus ici la propriété privée et la propriété corn.
munale !p. fut).. ·
Dans tous ces cas, les traces de propriété collective sont
assez marquées. L'auteur recherche brièvement comment ta
propriété privée s'est constituée sur le fonds commullal, Mais
ses conclusions sont assez hésitantes.
L
MAXtMKKOVALEWSKY. Le système du ottMt dans le
pays de Galles. fu M('r)«' «t<('nM«t~H«<e<fe MCtofomc.
marstSU?.

Courte étude à propos du livre de Frédéric Seebohm, T/tc


Tribal ~<'M< in )<'«h' (Londres, ~89S' L'objet de cet
ouvrage
est de montrer que l'organisation sociale comme
l'organisa-
tion économique des anciens Gaëts repose sur une base essen-
tietiement familirtle. Mais, suivant Seebohm, la famille, chez
les Celtes, aurait été individuelle ce ne serait pas une com-
munauté famitiate dans le genre de la Zadruga. M.
Kovatewsity
conteste cette proposition qui lui parait contraire à tous les
enseignements du droit comparé.
AXALYMS. – m UMtT 0)! PKOt'MttSTH 3~

Vtt. –).KDH(UT))Ht')t")'tUt!:)f:
t'trM.E.t.Mt.

RËV1LLOUT.– La propriété en droit égyptien.


Paris, Leroux, t897.

Nous devons signaler l'ouvrage considérabte de M. Revit.


lout sur iu propriété, ses démembrements, )a possession et
leur transmission en droit égyptien comparé aux autres droits
de l'antiquité Nous ne voulons d'ailleurs que )o siguater
il est impossible on enet de tirer des conclusions sociolo-
giques de théories conjecturâtes, quelque intéressante)!
d'ailleurs qu'elles puissent être. Sans vouloir insister sur
certains partis pris et même sur certains préjuges qui don-
nent parfois au savant travail l'allure d'uuo œuvre du polé-
mique passionnée, je demande seulement il dire quelques
mots du point de vue auquel fauteur s'est placé pour appré-
cier les institutions qu'il décrit, io droit dont il est vrai de
dire avec tui mêmequ'il en a crée la science. M. ttévittout
procède notamment par voie.de comparaison et d'opposition
entre les principes des législateurs de l'Egypte et ceux des
législateurs de Home; ta différence lui parait être essentiel.
lement d'ordre mora); le Romain est l'homme de la justice,
l'Égyptien est l'homme de t'équité, ou, encore, le Homain est
l'homme du fait, l'Égyptien est l'hommedu droit. Pour rendre
dans toute sa force la pensée de l'auteur, it faut dire au vrai
le droit égyptien seul est un droit tout a~fait mora). Un lei
procédé critique paraît d'un emploi particulièrement dan-
gereux quand on prétend le faire servir à la connaissance
d'un droit que nous ignorons. Peut-être eut-it été préférable
de chercher simplement, en s'appuyant sur les textes, quelles
institutions juridiques étaient possibles, quelles procédures
pouvaient fonctionner. Par exempte, M. R. oppose l'acqui-
sition de la propriété à Rome et en Egypte à Home, on
acquiert les choses par occupation; en Egypte, par succes-
sion telle est la théorie fondamentale de ce livre. H aurait
été nécessaire de montrer quelle était la dinérenco pratique
qui correspondait à cette prétendue différence théorique
est-ce qu'à Rome un individu triomphait dénnitivement
dans la revendication en démontrant qu'il avait acquis une
MM ).'A'<x<!K suc)o).t)(.)~rH. <??

chose? Est-ce que, nofnnt~nirn


c)t())!a'?Kst.fnft!)n au contraire, il!tt..))<t!tan
fallait en Hgypte, pour
prouver son droit. remonter d'auteur en auteur jusqu'au pro-
priétaire primitif? Solutions a la tois illogiqueset hmppti-
cables.

JlEiffUt;))CUMOW.– Die Bozl&le Verfaseung des Inka.


reichs. Etne Untersuchung des Attperuantachen
Agrarkommunismus ((~'<?«HMa~'OH
.wft't<<c <'<'Mtp<<' </M
/n<'<«./<ff/<M'fAf
<!<«- c«'«.r ('on<M<KM<.<w<'
«{/rat'<'c</«/V/'nxj.
Stuttgart, Dietx, !??.

Cet ouvrage est la coufirmation et le développement de


théories indiquées par l'auteur dans ttHe étude parue dans le
.t«~u«/. ~Jaht'K.C~. t. XHt-XUV. ~«' .4<~frtMMMf/<~
M)tt<J/«r~('HOM<'M<!C~t/~H.)
JI semble certaiu que dcji't h)))!;)p))ipsavant la domination
des Incas fsans doute à ~)Uans avant l'invasion espHguote),
le Pérou a connu une civilisation relativement élevée. Les
populations n'y avaient point en gênera) une organisation
d'ensemble; toutefois, partout on y trouvait des ~roupetneuts
de races auxquels correspondaient des divisions territoriales.
Bartoiome de las Casas ((/<* ~t MM<<~)w.<! (H ~'r«) nous
~<'M/<'<t
les montre dirigés par des chets qui les protégeaientcomme
des parents, qu'ils respectaient comme des enfants. Chaque
district, chaque < Puebto avait son existence propre, ses
m(Burs, ses lois. Les groupes avaient peu de rapports outre
eux. sauf lorsque les liens de race qui les unissaient étaient
étroits. Pour la succession au pouvoir, le chef désignait celui
de ses fils qui lui semblait le plus capable, à défaut son frère
ou un parent, à défaut une autre personne éprouvée.Parfois
aussi le chef était choisi à l'élection. Un tout cas la royauté
n'était point héréditaire en droit. La base est la communauté <
de village, qui le plus souvent était en même temps une
communauté de race (.tt~ho ou centaine (Far/MMt).Très
souvent le Ayttu ne comprenait qu'une communauté de
village; souvent aussi, dans les régions montagneusesil en
comprenait plusieurs. Habituellement plusieurs centaines
formaient un groupe commun (pt'tMt'</M< ayant notam-
.-<)/«M),
ment un cutte commun. Plusieurs groupes dû cette sorte for-
maient une race, une nation (H«M<.t<'u))a), dont l'unité semble
d'aUteurs n'avoir du se manifester qu'en cas de guerre.
Suit!*étudede!'AyHu. I) comprend presque toujours une
.<.t).Y~K)!.–f.KMO)Tt))!)')t)))'t)))iTH 309

communauté de viiiage possédant en propre une partie du


territoire de lit race Si nue centaine s'était établie en
plusieurs viiiagesou si du viiiagoprincipat s'étaientdétaehés
de petits villages, ceux-ci M'avaientpoint. de marcite iode.
pendante. Chaque village avaitij) jouissance d'une partie de la
terre arable de la tnarche le reste n'était point partage.
H y avait d'autre part de véritables vii)es, comme Cuxcoet
CHxamarca. où plusieurs Rentes étaient établies ensembie;i
chacune avait son quartier ceiut de murs, et chaque quartier
avait ses champs; tnaisia prairie et lit brousse restaient indi.
vises entre tous.
Ainsi l'ensemble de lit population n'était point unifié, ni
même organise, d'où ia faible résistance aux incas.
Quand ceux-ci eurent conquis le pays, l'ancienne division
en races, phratries et marches fut renversée en principe.
modifiéeseulement dans ta mesure où ics tncas avaient inté.
rét a une transformation. Les races devinrent les Hunus
groupes de dix mille;, les pitratries les iiuarangas (gruunes
de miiie les centaines restèrent ce qu'eiles utaient aupara-
vant. Kxceptionaeiiement des races peu denses furent con-
fondues en un seul Hunu. Quand une race avait un chef.
cciui-cifut en principe maintenu si au contraire elle n'avait
point de dirigeant, les jncas choisissaient dans l'aristocratie
un maitre; toujours ils le prenaient dans une famille du
groupe auquel il devait commander.
Eu gênera), ies Incas faisaient d'une race deux groupes
i'un < Hantansnyu l'autre iturinsuyou le chef (curaca)
de ce dernier était sous ia dépendance de celui du premier.
Le successeur du curaca était habitueih'tnent un frère uté-
rin ou un fils, sauf approbation des représentants des Incas.
Au contraire, le chef du Huaranga était élu par les chefs des
centaines qui )u composaient, et parmi eux.
La marca ou centaine resta en principe ce (ju'eiio était, sauf
certaines portions de terres que prirent les Incas et sous
réserve de prestations diverses il eux dues. Cette portion du
sol enlevée aux autochtones fut partagée entre les conqué-
rauts, le reste consacré à la religion.
Cette division en races, phratries, marches, fauteur la
compare notamment à la division romaine en tribus, curies,
gentcs ii fait remarquerque vraisembiabtement lit division
par dix et multiplesde dix n'était chezeux, commeau Pérou,
qu'approximative; si cette hypothèse est fondée, it y a là une
E.Dc))KM)M.–n))'h'i!0('io).<MT.
N70 ).X~KS()t:)t)).tM.~t-H.t8U7
1
sérieuse réponse &la théorie d'après laquelle lu gens compre-
naut un nombre variable d'individus ne pouvait constituer
une unité politique cette théorie suppose en eflet que cette
unité politique aurait été nécessairement invariable (Cf.
Mommsen, 7(ff«w/«'<<H<«t'/<f<]). ~6-SM).
A la tête d'un groupe de quatre races, quelquefois seule-
ment de trois, quelquefois auss! de cinq, selon les limites
géographiques du territoire, tes Incas plaçaient un chef
~Tucricue) qui avait en tous points la haute direction on
peut comparer ces Tucricuc aux résidents anglais dans les
Indes; leur fonction consistait essentiellement à maintenir
l'indigène en état de dépendance.
Au-dessus était le gouverneur de province, Capac ou
Capac Apu tout le Pérou était divisé en quatre pro.
vinces.
Les derniers chapitres sont consacrés a l'élude particuii<-re
de ia marche des tucas. L'auteur prend pour type la ;marcho
des régions de culture. La marche, c'était l'établissement
d'une centaine en un territoire détermine. Si toute la centaine
s'iustaitait dans un seul village, le chef de centaine (Pachac-
curaca) était en même temps chef du village(Llacta camayoc)
et chef de la marche marca camayoc). Si, au contraire, la
centaine s'était installée en plusieurs villages, chaque village
avait son chef, subordonné d'aiiïeursau chef de centaine.
Dans te territoire de la marche, chaque village prenait
une certaine partie qu'il cultivait (Ltactapacha plus souvent
characa), le reste était propriété commune du AyHu. Les
charac:)s étaient aunueiiement partagés en champs (tupu)
que t'ou attribuait aux habitants conformément à certaines
règles coutumiéres. L'étendue du tupu parait avoir été très
variabie, suivant les régions. Au reste, les characas très proba-
blement n'étaient point partagés d'après le nombre des habi-
tants. mais plutôt d'après celui des chefs de famille; c'était
seulement quand les enfants formaient à leur tour un mé-
nage indépendautqu'iis avaient droit au partage. Les chefs de
groupe avaient une part bien plus considérable que les autres
habitants ainsi )e lot d'un Hunucuraca était dix à douze fois
plus important, celui d'un Pachaccuraca trois à quatre fois.
Le chef de village avait ta direction de la culture. Dans les
districts du nord (chinchasuyu) tout le travail se faisait
habituetiemcnt en commun, par groupes de dix (chuucas)
sous la direction d'un chet (chunca eamayoc) qui avait &la
AX.tt.y!!K!–LHt))tU)T)<)!)'U«t')ttt!TK 3?t1
tois la charge~,1-1-
de )a .a--
direction des travaux et de la surveillance
de lit moralité du groupe. Hommes,femmes, enfants partici-
paient a !a tache, chacun selon ses aptitudes d'aiiteurs, la
récotte n'était point l'objet d'un partage spécial, chacun pré.
nant ce qu'avait produit la terre a iui attribuée.
Pour avoir droit à un lot, it fallait être né dans la marcha
et y tmbiter était défendu tout acte de disposition sur le lot
était puni le fait do quitter une marche sans autorisation du
chef et de se mettre sous la protection du chef d'une autre
marotte.
Le terrain a bâtir laissé à chaque chef de famille était
comme sa propriété toutefois ce bien n'était foint dans t&
commerce. Droits héréditaires sur cette part (Hacienda) dans,
lu province nord elle allait au fils préfère, et celui-ci avait
alors la charge des autres enfants; à défaut, à un frère ou à
une autre personne désignée. L'épouse lie pouvait hériter
elle appartenait presque toujours en ellet à un autre Ayttu.
Quand son mari mourait, cite devenait la femme d'un frère
de celui-ci ou elle restait chez le fils qui avait hérite le (tts
était alors le mattre de sa mère elle ne pouvait d'ailleurs
point retourner dans son propre Ayttu, étant devenue par
achat la propriété de son mari.
Pour la succession d'un chef de centaine, elle advenait à
celui qui succédait à la fonction ceiui-ci avait le devoir de
protéger les fils du défunt.
Dans tes régions montagneuses it n'y avait, il ne pouvait
en fait y avoir que des Haciendas.
Dans certains districts étaient des troupeaux appartenant
au village et dont les chefs de famille se partageaient les
produits.
La forêt, la brousse étaient toujours la propriété commune
d'une marche, sauf droit de préférence à chaque village
quant à l'usage de la partie à lui contiguë. Les règles a ce
sujet étaient plus ou moins précises, suivant que ta forêt était
plus ou moins riche relativement aux besoins des divers
villages.
EnftnM.C.examine les obligations auxquellesles marches
étaient tenues envers les conquérants incas. Le vainqueur,
toutes ies fois qu'il s'était emparé d'une région, avait com-
mencé par faire d'une portion ia part tributaire qui devait
être cultivée à son profit; le travail n'était pointaccompti par
chaque Hatunruna individuellement, mais en même temps
HM L'AXX~ËSOCtOU'UtOt'H.M''?
aux époques convenables
convenubtes par l'ensemble
t'enscmbte des habitant)!
capables d'y collaborer. D'ailleurs, bien que ia récolte fat pour
les Incas ou tours prêtres), tes habitants ne s'en considéraient
pas moins comme propriétaires du so), si bien qu'après la
domination des tucas les indigènes continuaient t'(exercer sur
le sol leurs droits dans les mêmes conditions qu'ils tes exer-
çaient auparavant.
Dans les districts où l'élevage était chose importante, le
tribut se payait en tamas les tncas en prenaient une partie
dont ta plus grande portion était pour eux, la moindre pour
le culte.
Les habitants étaient en outre soumis il des corvées reta'
tives notamment au travail des mines et du service de guerre,
le tout proportionne à l'importance de la population; d'où
des recensements pendant lesquels des marches s'efforçaient
de dissimuler leur importance numérique.
On soutient que ces recensements avaient aussi pour but
la création, selon les circonstances, de nouvelles centaines.
L'auteur montre les contradictions dans lesquelles sont tom-
bés ceux qui défendent une telle opinion )'et't'eur fouda-
mentale consiste à chercher .dans les différents groupes un
nombre de membres absolument égal à celui deschitïres par
lesquels on les désigne ce nombre est en réalité celui des
membres du groupe a l'époque de son établissement.
Certaines régions avaient fi fournir un certain nombre de
jeunes hommes (Yanacnna; pour le service des divers chefs
et fonctionnaires publics des Incas; les yanacunas perdaient
leurs droits originaires ils étaient sous la protection directe
des tm'as ils avaient d'aittenrs une situation sociale supé-
rieure à celle de la population libre. Le tribut consistait aussi
parfois en nties de huit a douze ans, destinées soit il être
sacrifiées aux dieux, soit à devenir les concubines des Incas
on ne tenait aucun compte, quant à ce dernier tribut, de la
proportionnalité.
Indépendamment de ces obligations, chaque marche con-
servait ses droits et son organisation les chefs avaient
notamment, comme auparavant, les pouvoirs de justiciers.
En définitive, on ne trouve pas dans cette société une véri-
table organisation politique, mais un agrégat d'éléments
indépendants qui ne se trouvaient associés que par une
influence étrangère, sans d'ailleurs que cette association fut
jamais soumise il des règles bien précises.
ASAU'–t.KXK'XTPHt'KOj'mKTK 373

MAURER (Luc. vo~). Einleitung zur geschiohte der


Mark-, Hof., Dort- und Stadt-Verfasaung und der
Otfenttiohen Gew&K (~)~o(/M<'<<oM Il <t«f~<t'e <~ la
mfn't'/ff,etc.). édition, i89u.

C'est une t'eprodttctioo pure et simple de t'ouvmge de von


Manrer tel qu'il a été pubtié en ~M:t. Toutefois, une préface
de M. Cunow le complète et le corrige sur certains points.
J'examinerai plus particulièrement tes idées sur lesquelles
M. Cunow attire notre attention, après avoir rappelé ce que
contient dans son ensemble ce livre depuis longtemps clas-
sique et toujours actuel.
L'auteur y traite esseutieiiement de la propriété primitive
chex tes Germains et accessoirement de leur organisation
sociale puis il recherche comment, à partir des invasions,
teur propriété et leur organisation sociale se sont transfor-
mées. Mais cette seconde partie de sou étude est beuucoup
moins compiùte et aussi moins personnelle que la première.
Ce que fauteur voulait écrire, ce qu'aujourd'hui nous voû-
tons lire dans son ouvrage, c'est la forme d'appropriation du
sol chez tes Germains. Pour Maurer, cette appropriation fut
partout collective même à une époque ou tes populations
germaniques vivaient est partie des produits de ta terre, le
sol était possédé en commun et la société, alors, était une
société de marches avec communauté de terres Sans doute,
chacun des membres de cette marche ou plutôt chacun des
associés avait eu propre une maison et un enclos. Mais sur la
terre arable il n'avuit qu'un droit d'usage qu'il exerçait, on
commun avec tous ses coassociés.Ce n'est qu'cxceptionuette-
ment que l'on aurait pu trouver soit un village sans terres
communes, soit des établissements isolés et indépendants.
Dans le village germanique (Xachbarschaft, villa, etc.) les
hommes libres (Ceschtechter, ingenui) ont donc en propre
un domaine (attod. eigers, prop)'ium,.ete.; plus tard Erbe,
hereditas, sors, terra satica, terra vcrnacuta). Chacun rece-
vait un espace ega), qu'il devait enclore. Et c'est t'eusemhte
de ces terrains bâtis et clos qui forme le village. Ce village,
Maurer le décrit euceinte carrée ou oblongue, clôtures et
portes.
Point do village sans r'etdmark, qui comprend la fo.rét, le
mont, tes terres arables. Point non plus de Fctdmark sans
vUtage. Ainsi vittcttnit par être synonyme de marca. Toute-
H74 L\'<KKSWK)).t)tit~K.))M)7
fois, chaque village n'avait point sou t'etdmark propre. Si le
.groupequi s'était établi sur uu territoire était peu considé.
rabte, il s'installait eu un seul vittage jusqu'à ce que l'acerois-
sement de population obligeât une partie A s'établir en un
autre endroit de la marche, ir y fonder un autre village dépen-
dant du premier (Fitiatdorf. Si, au contraire, le groupe pri.
.mitif était important, il s'étabtissait de suite en plusieurs
villages, tout en ayant une marche commune. Ainsi les
:Suèveset Sénoues avaient )00 pagi et une seule marche.
La terre arabio était partage egatonent entre les associés
il y avait égatite eu quatitf et eu quantité. Chaque étendue de
:terre d'égale importance était l'objet d'un partage spécial.
La marche do village comprenait donc habituettetnent trots
(parties le village, les terres divisées, les forêts et champs
indivis. Ainsi chaque associé avait f son euctos; ~° des
champs divis; 3* lu jouissance indivise des biens communs.
Primitivement la part do biens divis et indivis était une
dépendance de t'cnctos. Ce n'est que très tard que cette part
put être aliénée indépendamment. D'ua autre côté, la quatite
même d'associé était une conséquence de l'acquisition d'un
bien. Ledroit de cité n'était qu'un eMctdu droit de jouissance
commune.
L'auteur nous montre cette situation modinéedéjààt'époque
franque, mais surtout au moyen âge, par l'établissement de
communautés serves ou mixtes à côté des communautés
libres. Si la communauté était serve, le droit'du paysan était
une sorte d'usufruit, la propriété restant au seigneur, au pro.
tec~eur. Si la communauté était mixte le paysan pouvait
cependant avoir un droit de propriété.
Par contre, le droit de cité, le droit de bourgeoisie se déga-
gea peu à peu du droit de propriété.
EnfinMaurer indique, mais indique seulement, commontle
principe de souveraineté s'est de son coté dégagé de l'exercice
des droits des associes.
Ce qu'il y a de particulièrement intéressant dans l'ouvrage
de Maurer c'est sa théorie sur l'origine et l'importance de l'or-
ganisation des marches gentibuscognationibusque*. Avant
lui, cette organisation est considérée comme étant t'cBnvre,au
moyen âge, de la réunion aceidenteUe de domaines indépen-
dants pour lui, elle est ta forme première d'établissement (cf.
en sens contraire Sternegg. Dahn). D'ailleurs, il faut reeon-
aa:tre que M. n'a pas nettement vu comment s'étaient for-
– ).t!)))t"tTMEt'XOt'ttt~H
AXALYStM.
més ces premiers établissements, qu'il «'a pas tourne vu que)
éta!t ie problème de teur formation. Que sont ces gentes, ces
cognattones, est une question qu'il n'examine point, qu'il ne
se pose point vraiment. La difficulté ne pouvait eu effet être
résolue ni même entrevue au moyen de documents et d'idées
rotatifs au droit des choses, et no menant qu'indirectement
au droit des personnes. Ce août les recherches postérieures
sur l'origine de )a famille et de la tribu qui ont montré com-
ment ia question se posait et comment elle pouvait être
résolue, et la connaissance de la marche pouvait d'autant
moinst'y mener que le terme mémo de marche n'a pas con-
servé son sens ethnique originaire de territoire propre à un
groupe et a pris dés le tx" siècle le sens géographique d'unité
territoriale.
Pour les mêmes motifs il n'a pas bien examiné non plus si
au groupement social correspondait une organisation mili-
taire, si par exemple aux gentes, aux phratries, au groupe
total ne correspondraient point les Iluudertscbaft, Tausend-
schaft. Xehntauseadscttaft ~cf. Lamprecht, /)cf<~c/<.~-c/t.,
t. t, p. )4~).
Mêmeen ce qui concerne l'organisation du village primitif
au point de vue réet, le système de M. est très discuté. Certes,
on admet très généralement que personne n'avait sur te champ
undroit de propriété. Toute terre était propriétéd'une collecti-
vité. Maison discute vivement sur le mode de partage provi-
soire de cette terre. Maurer, et avec lui Itosclrer, Sybel, Lam-
precht admettent en s'appuyant sur les textes de César <M.
~N«., tV, t, et Vt, ~) qu'il y avait chaque année un nouveau
partage du territoire. Itansen (~c/fft/if /Mf rlie ~M«wmtf
.~<M~M')'M<'H~a/'f. t. XXXtV; –.t~'aW<)<!<M'MC/t<h/<f<Ht«MK~M,
t. 1) objecte t'impossibitité pratique d'un tel système d'après
lui, ta jouissance du territoire d'une marche appartenait tantôt
à un groupe tantôt à un autre, mais la propriété en était com-
mune à tout un peuple ou à toute une portion d'un peuple.
t)ans ce système, tes divisionsterritoriales étaient immuables;
c'étaient tes groupes possédants qui, conformémentà un ordre
traditionnel, se remplaçaient mutuellement. D'ailleurs, ces
mutations périodiques ne s'opéraient qu'entre groupes appar-
tenant a un même Cau. (Ho ce sens Lamprecht, ~ffwAf
t.Mc/ttcA~,t. p. ~8.) Sans examiner ce qu'il y a de prohté-
matique dans cette théorie qui suppose une communauté de
groupes primitifs en Germanie, M. Cunow se contente de la
370 ).'t\)!K s<.)(;h)t."ut<jt'K. tM7

réfuter par le texte de César (Vt, }npaee nuttus et eom.


munis ma~istratus, sed principes regiouum atque pagorum
inter sues jus dieunt controversiasque minuunt Invoquant
un argument d'analogie tire de l'organisation des Slaves aux
x~ et xn' siectes, il montre la communauté de village prati.
quant tu culture extensive, se transportant périodiquement
tout entière sur un territoire partagé entre tous, tandis que
in terre arabte pn'cedemmcnt occupée restait. jusqu'à ce
qu'elle fut à nouveau terre de culture, simpte terre de
pâture.
Nous ne pouvons omettre en terminant de rappeier la cri-
tique faite par )-'uste)de Coûtantes sur le principe mefne do
ces (ii)It'rents systèmes, a savoir la propriété cu\'is:tKeeeu
droit ~'i-tnanique prunitit connue attribuée a lit collectivité,
comne refusée d'une façon ~exeraie il l'individu. C'est en
vertu de conceptions a priori, soutient i'iuustre auteur, que
j'ou en trouve la preuve dans les textes très nombreux rap-
portes pur Maurer et pat'ticuiierefnent dans les textes de César
et Tacite. Fustet reconnatt d'ailleurs (lue cette propriété
appartient moins à l'individu qu'a )a famine Sans même
examiner si cette concession n'est point en opposition avec la
thèse de Fustel, il y aurait a rechercher si lit manièredont il
interprète les textes principaux qu'on lui opposen'est point la
coniirnMtion de la doctrine adverse et si ta difficulté ne porte
point avant tout sur une question de tet-minotogie.Il nousdit
par exempte /o/~wM </Mon~M la ~f<~)'«M/b)(c)~'f',
p. 7) César ne montre nutiement une mart~euossenschaft
qui serait une association de paysans cultivant en commun
le sol dont ils seraient propriétaires en commun, suivant ta
théorie de Maurer; il montre, ce qui est fort difterent. les
chefs de canton disposant arbitrairement d'un sol dont ils
paraissent ~tre seuts propriétaires, et transportant chaque
année ça et litsur ce sol les famiites et tes groupes d hommes. t
Kt il en conclut que ces familles. ces groupes n'ont point un
droit de copropriété. Mais cette conclusion est ette la ue~a.
tion du système de Maurer' Le rapport entre tes chefs et tes
associés de la marche, entre les représentants du pouvoir et
les membres du groupe, n'est-ii point le même dans l'une et
l'autre doctrine? Ce qu'il appelle avec hésitation ta propriété
des chefs, it resterait seulement à voir si elle n'est point une
conséquence de teur pouvoir, de leur souveraineté, s'il n'y
avait point alors citez les chefs et citez les associés confusion
– ).Kt'K())Tt)Ht'ttOt'KtHTt!
A\.U.t'!K<. 377
entre les droits publics et tes droits privés, si le sentiment du
droit individus), sans lequel il n'y uni propriété ni copro-
priété, existait des tors.

BATTACHA. – Bull' ordinamento delta, propriété, foa-


di&ria. neU' Ita.tt& meridionale sotto i normanni e gli
suavi net aut rapporti oolle instttuztoni poMtiohe
'Or~(tM!M~«M f/<' /« /<t~<-Mt'<~(C~~('
<( /<(t<i'c
~OXX
les A'or-
Mt<tH(~).– i'atermo, Hebet', i89(;.

L'ouvrage fait suite aux travaux de l'auteur sur ta propriété


en Sicile sous les Musulmans '.ht~o~' ~<«r«/«'<'</<C«/«)tt'<
an.Yt,fasc.t)t,p.)83.
!/ttuteur n'admet poiut, contrairetnent à l'opinion ~nérate,
que !ttt}!f;i''ro ait procédé à la division tripartie du sot.
Hu~giero se contenta de donner aux soldats et & t't~tise des
terres en fiefs, sauf a se réserver la suzeraineté.
Les Normands ne surent pus assezse mettro eu garde contre
te pouvoir.soiUafque, suitecctusiastique.tjui s'étahtissnitainsi
eu fuce de t'f:t:tt. L'auteur étudie notamment, dans le ~w
/'<'<h/<f<r«)M.le sort des domaines concèdes nu diocèse de
Syracuse, au monastère de Saint-Jean, etc., surtout à t'arche-
veche de Monreate. JI est particulièrement intéressant d'exa-
miner l'histoire du fief de Hruccato. En t Cuittaume t"'
donne ce fief à t'archeveque de 1'aterme. La question se pose
de savoir si, en réclamant de ce fief < Broceatum feudum,
scilicet sex mititum le roi lui impose un service ~nerricr
nouveau, ou s'il se contente de recevoirdu vassut tes services
que ce fief devait traditionnettement. Ku d'autres termes, y
a-t-il ta une obligation de la terre ou une obligation particu-
lièrement imposée au feudataire?(Cf. Luigi Audrich, .t/'c/xt-tn
CtMn'f/f'fo,t8')ti,p.:)'')!
De même il examine, au moyen des documents rapportant
donations de Ru~icro, ta questiou de savoir si la juridie-
tion spéciale est ou non une conséquence de t'immunite. Ou
peut se demander si une étude plus ample de droit compare
ne serait point nécessaire pour trancher une question a pro.
pos de luquelle ou ne sait souventsi tel document pose un prin-
cipe ou établit au contraire une exception.
Suit l'étude de ta condition des communes eu Lombardie
l'auteur nous montre tes communes luttant contre ta monar-
chie; eu Sicite.au contraire, ou le pouvoircentrat est puissant
'<KH.«)t:)t)).u(!~t'K.)M7

et les protège, les citadins défendent lit monarchie contre tes


grands feudataires.
Au-dessous des bourgeois et des citadins, le paysan ici
c'est tévotution lente qui va de la servitude romaine a la
liberté moderne. Aux xn" et xm" siècles, leur condition va
de la situation de cultivateurs libres à celle de serfs de ta
glèbe. tt y avait deux sortes de vilains non libres les uns
étaient vilains de dépendance personnelle, les autres de
dépendance réetie et ces derniers pouvaient posséder à un
titre tibre des biens en dehors de leur
seigneurie. M~me
parmi les hommes libres, des distinctions étaient à faire:
ceux appartenant à des races guerrières avaient en fait une
condition politique supérieure; les autres formaient une
classe intermédiaire entre honuues vraiment libres et
vilains,
les rustici.
Ayant ainsi étudié rapidement les classes sociales en Sicile,
Fauteur établit un parallèle entre les services
publics d'alors
et ceux d'aujourd'hui, préférant ceux-ta
qui étaient moins
pesants et se résolvaient d'habitude en prestations en nature.
tt faut attendre, pour apprécier les méthodes d'observation
et de critique de ce travail, des plus nourris, lit
publication de
la secondeet dernière partie de l'ouvrage, dont nous n'avons
encore qu'un fragment.

ARfsTfMBATTAUUA. – L'evotaziono sociale in


rap-
porto alla proprieta fondtaria. in Sioitia. (/.Wco~/«~
<oc<«<<</atM«' ~<M'/<! «f<'c ~'o~-<tW/bHCt~'e<'«
~«'<<<').
Paterme. Reber.

L'auteur préconise pour la Sicile une certaine socialisation


du sol. H invoque des arguments tirés du
droit, do l'histoire,
d'observations minutieuses sur i'etat actuel en Sicile, les
hommes, tes choses, les institutions, enfin, des principes de
l'économie politique.
Après des généralités sur le mouvement socialiste, B. donne
un tableau d'ensemble de l'état de la
propriété en Sicile La
Sicile a 2.4UO.OOU hectares dont 34~.236 sont soumis a la
culture intensive, t.393.395 comprennent des terres
arables,
M)6.!n9 des pâturages, S4.W sont
improductifs ou bâtis. La
moyenne de la récolte étant de sementi, le propriétaire
8
prend satma, 9 tumuto une satma = 2 hectolitres 7S litres
décilitre; un tumuto == titres 2
décilitres); le fermier.
.U.Y':H<.–).H))MO)TM)!)'M!J)')t))!TK N7K.

sctma, M tumuto. Do plus, l'impôt foncier, qui atteint de


33 à p. iOOdu revenu net, retombe en définitive sur lui.
En fait, toujours le passif de l'agriculteur, même réduit à son
minimum, dépasse l'actif. Pourtant les insulaires ont une
moralité qui semble plus grande que celle des hommes du
continent sur 100 condamnés, les récidivistes du continent
représentent H.I4 p. ~)0; en Sicile, au plus, C,74 p. 100;
et d'autre part, sur )<Mcondamnés du continent ~8, t4 p. Mo
appartiennent a ta population paysanne; en Sieiie, ~4,9p. 100
seulement; or, les habitants des campagnes y sont plus des
deux tiers de la population totale.
Dans les enquêtes agricoles, lesadministrateurs demandent
notamment l'augmentation des salaires, le partage des biens
communaux, la diminution de l'impôt foncier, le crédit
agricole.
Ce qu'il faut essentieiiement, c'est modifier ou supprimer
les rapports entre celui quiproduit et celui qui possède. Mais
le peut-ou? La propriété est-elle sacrée et inviolable? Non
l'État en prend une partie au moyen des droits de succession,
qui, en quelques générations, ont toutabsorbé la contribution
foncière prend la moitié du produit moyen. On déunit la pro-
priété le droit de jouir et de disposer de la chose de la façon
la ptus absolue mais pour ta propriété mobilière, elle dépend
dela possession; pourla propriété immobilière,ta loi dépouille
le propriétaire par la prescription de dix ou par cel lede trente
ans. En (ait, l'histoire des valeurs mobilières montre qu'il
n'existe plus de fortune remontant au moyen âge depuis le
xnf siècle, la richesse a diminué de 96 p. iM) par la dépré-
ciation de ta monnaie, de 7S p. 100par la diminution du pou-
voir d'achat de l'argent, de 6 p. 100 par l'abaissement du
taux de l'intérêt.
Il eut été bon que fauteur montrât avec plus de rigueur le
lien entre l'argument qu'il invoque et ce qu'il entend démon-
trer. C'est se donner beau jeu que de chercher si lu propriété
est un droit sacré, inviolable. !i fallait démontrer qu'elle n'est
point un droit individuel or l'histoire des richesses ne nous
renseigne que sur ces richesses et nullement sur le lien juri-
dique qui existe entre elles et les individus; les droits do l'État
sur les propriétés ne sont pas plus la négation du droit du
propriétaire que ses droits sur le citoyen lui-même ne sont la
négation de leur personnalité; enfin, que la propriété soit
acquise par la possession ou par la prescription, peu importe;
~0 ).'AX\t!t: «UT
St)t:tt)LOtUQt')i.

elle M'en est pas moins eutre les mains de celui


qui pos-
sède la propriété, tt fallnit montrer aussi qu'il n'y avait point
contradiction a argumenter dans le même sens dos avantages
du propriétaire, où l'auteur voit un privilège injuste, et des
vicissitudes des fortunes, de leur importance toujours
moindre, de leur disparition fatale par l'effet des lois juri-
diques et des lois économiques. L'auteur n'a pas assez distiu.
gué a notre gré le droit de propriété et son objet d'une part.
le sort de la propriété et celui des propriétaires d'autre
part,
le point de vue juridique et le point de vue
éconotniqu' te
point de vue individuel et le point de vue social. Surtout les
arguments de droit qu'il invoque ne sauraient est tout cas
prouver le besoin d'une meilleure répartition des richesses;
par l'analyse d'une institution, on ne peut que voir ce qu'elle
est. on ne peut en déduire ce que j'en voudrait qu'elle fut.
Quand bien même il aurait prouvé que ta propriété est un
droit de nature sociaie. il n'aurait point par ta démontré
qu'elle doit être, dans une certaine mesure, un droit collectif.
Hien plus intéressant f't plus précis est l'argument qu'il tire
tout simplement de l'histoire eu Sicile du droit de propriété,
nous montrant ta lutte qui dure depuis le moyen âge entre le
souverain, les grands feudataires et les gens de la gtébe. Pri-
mitivement. le baron n'a que lisgnrdedu fief, au nom du roi
mais peu a peu les barons, profitant de la faiblesse du pouvoir,
tentent de convertir leur droit en un droit de propriété. En
vain parfois les rois déclarent qu'ils ont le domaine direct,
finissant cependant par reconnaître le domaine utile aux
barons. En vain. ils font confectionner des registres de biens
domaniaux les usurpations ne cessent point les barons font
disparaître les registres; ils font commercedu fief maigre la
défense royale; ils se font reconnaître sur lui un certain droit
de succession. Mienplus, si un feudataire meurt sans héritiers
légitimes, les voisins s'emparent du fief, saut à demander
une investiture dont ils finissent même par se passer. Enfin,
Frédéric d'Aragon autorise t'atiénatiou du fief. D'ailleurs, les
populations qui habitaient sur les terres (éodaies avaient, soit
en vertu de droits anciens, soit par concessions, le droit de
prendre ce qui était indispensable a teur conservation, d'oc-
cuper l'espace de terre nécessaire pour construire, do faire
pattre leurs troupeaux, d'ensemencer un lopin do sol, etc. Et
les prestations personnelles qu'ils payaient au baron, ils les
payaient eu principe comme serts attache:; à la gtebe.
AX.\t.MK:t. – LH XMtttT t)f! )'))())'n))!T)i H8i

Après avoir rapport dans ses urandes phases cette lutte


féodate, l'auteur insiste particutierement sur ta constitution
du~Bjtfittct!8!2;t)arette.orKanisa!ionot)~arcbiqueremp)ace
le système féodal, lu terre dont le domaine direct
appartenait
auparavant à t'r:tat (ut ta propreté absolue des possesseurs
actuels. M. H. voit dans cette constitution un
empiétement
des barons, en principe simples délégués du roi, sur les droits
du souvo'ain, d'une part, en tant qu'ils
s'arrogent le
domaine <)irt'ct, et des habitants, d'autre part, en tant
qu'ils
se comportent it leur é~ard eu propriétaires. On
peut se
demander cependant si cette constitution n'établit point sim-
plement – sauf applications abusives une séparation,
conforme aux idées modernes, entre ia propriété et ta souve.
rainete. De ce que les droits payes par les paysans n'étaient
point perçus par les barons en tant que propriétaires, il ne
résulte point strictement que t'Htat avait la propriété du sol,
que les habitants en avaient l'usage. Ce sont M des concepts
qu'il est hardi d'appliquer à l'organisation (eodateoùta terre.
bien plus que l'individu, est l'unité sociale, oit l'homme
dépend du sot, bien loin que le sol dépende de lui.
Le chapitre tu est consacre à t'cvohttion de la
propriété
et ta nationalisation du sol Après des considérations
géné-
rules sur ta propriété collective en\isaf;<'ecomme conforme
au droit naturel, et la propriété individuetie ayant
pour base
la violence, l'uuteur examine l'évolution de la
propriété en
Sicite. Le droit romain n'y avait point déforme ta nutiou de
propriété. L'aiteu, propriété de lit maison, du jardin, du
verger, y est d'origine très ancienne; i'atteu famitiat y vient
sans doute des Cretois, l'alleu individuel de colonies athé-
niennes. A côte, t'ager puMicus que t'Ëtat auermait,
ager
regalis pour lequel on payait une prestation fixe, a~erdecu.
manis pour lequel on payait ta dîme. S:<nsdoute les droits de
l'individu furent en partie absorbés par les exactions des Ho-
mains et des Byzantins, puis par les abus de lit féodalité, mais
les droits essentiels aux besoins de ta vie restèrent
toujours
respectés. C'est le système moderne de ta propriété indivi-
duelle qui les a complètement sacrifiés; ce système est t'a'uvre
de la t-'rance révolutionnaire, qui confisque le sol pour des
raisons d'ordre politique et en fait commerce pour des raisons
d'ordre fiscal. Ce chapitre est la mise en œuvre
théorique
trop sommaire notre gré, et dont tes affirmations parfois
étonnent, des faits exposés au chapitre précédent.
~?2 U'AXSÉH
!!t)C«H.tM)~)
X. <?)?
Nous ne pouvons reproduire, encore moins contrôler, les
ebinres et les faits avec lesquels M. B. examine en Sicile,
d'abord d'une façon géufrute, puis plus particulièrementt
dans un territoire de Sicile, l'état de la population et de
l'agriculture. Il en résulte que le mal n'est point dans lu
nature terre féconde, population saine, – mais dans la loi,
accordant une part des produits du travail a une minorité de
parasites. Cette part, on tu! donne aujourd'hui comme base le
droit de propriété immobiiiére. Examinons un des principaux
contrats au moyen desquels elle s'obtient, )a mexzadria. C'est
l'ancien colonat partiaire en Sicile ii a toujours été une
société dans laquelle le massariote fournit les animaux de
culture et les semences, et le mezxadroson travail. S'ii y a un
bénéfice, on en fait deux parts égaies. La part de produits
appartenant a l'intermédiaire, i) ne l'a point comme proprié-
taire, mais commeassocie ceeiesttraditionnei. M.H. insiste
sur ce point pour nous, la question au point de vue social
est beaucoup moins de savoir si en droit il y a société ou
louage que de rechercher si, en fait, le mezzadro est et dans
quelle mesureil est à la merci du massariote, de celui qui, en
définitive, et quelle que soit ta nature juridique du contrat,
permet à cetui-ta de cultiver le sot. Aussi trouvons-nous beau-
coup plus intéressantes les pages dans tesquettes fauteur
nous montre ce que devrait être en réalité le produit. It se
partage normalement entre l'État, le propriétaire, le fermier,
le mexiHtdro.Soit un produit de 6 satmes. Le fermier en
prend H. Mais des trois autres on défalque te prix do la
semence, l'intérêt des sommes avancées, etc., etc. En fait, tou'
joursundéficitpourtemezzadro. L'auteur, pour préciser, prend
pour exemple un territoire composé de onze anciens fiefs;i
étendue ~.S(!0satmes produit net 77.300 lires; valeur
environ 1 million et demi. Ce bien a été payé sous le régime
féodal 300.000 tires; t'ahotition de la féodalité a fait que le
droit d'usufruit qu'y avait le bénéficiaire a été transformé en
un droit de propriété. Supposons qu'il n'y ait sur ce domaine
qu'un fermier; son passif peut être apprécié à t20.0u0 lires
environ. La moitié des ~.SCUsaimes, ':80 salmes seulement,
peuvent être ensemencés. En fait, on eu sème 2GOenviron
chaque année, produit moyen do ~0 = I6S.7?<0lires. Maisla
moitié, en principe, est pour le mezzadro reste 82.87Hlires
avec un passif de t30.0M). L'auteur montre ensuite que les
produits des terres à pâture ne sauraient combler le déficit.
AXAt.YfiK:–t.K))))f))T)')!t'MOt'M)~ HttS

Sans insister sur ces calculs et celui dont nous donnons


le résumé n'est qu'un exemple notons seulement que l'au-
teur avait diminué d'une certaine part la moitié revenant au
meMadro lorsqu'il appréciait le sort de celui-ci, et qu'il omet,
pour des raisons que nous n'avons point à discuter, de le
(aire lorsqu'il apprécie ensuite le sort du massariote.
Quoi qu'il en soit, fauteur croit pouvoir conclure que l'on
ne peut prendre une part quelconque du revenu du sol sans
atlamcr la population.
La faute, en Sicile, est d'avoir brisé légalement l'évolution
en changeant le droit du baron, en transformant en aiteu la
terre sociale. Il est vrai que la loi du H décembre 1841 recon-
nuit lu propriété des communistes sur une partie du tief. Mais
cite est défectueuse, particulièrement en ce qu'elle pose le
principe de la propriété absolue de la terre aux communistes;
en fait, le pauvre vend sa part il faut que la loi lui impose
une prévoyance qu'il n'a pas; en outre, t'emphytéoso des
biens communaux n'a donné aucun résultat satisfaisant les
enchères (ont monter à l'excès le cens; son taux ajouté au
poids de l'impôt foncier ne peut ctre supporté par le cultiva-
teur qui épuise la terre et l'abandonne.
Le tort essentiel est d'avoir attribué à la terre, particulière-
ment :'tcelle à culture extensive, une valeur commerciale. Par
tu tous les droits pèsent sur ta chose et indirectement sur le
cultivateur. En Sicile, les salaires vont en diminuant dans
les premières années du xvf siècle, une journée de travail
valait 0 i. HMS.Le blé valait alors I. 88 parquiutai métrique.
Aujourd'hui, avec le btéàSt tires environ, on voit des salaires
de i. M, 2 lires, 1 i. SO, etc. Examinant le budget d'une
famille de cultivateurs, l'auteur conclut que le travail des
adultes suHit strictement à la conservation de la famillo, a
t'amortissement du travail Oit est donc la prétendue
rente du sol? Si l'on suppose des terres plus fécondes, alors
le prix nécessaire u la vie est plus étevé. Sans doute on
peut admettre que, par les progrès de la culture, le produit
moyen augmentera, mais cette augmentation ne sera point
due à la terre elle'méme, mais aux procédés, aux engrais qui
constituent uu capital indépendant.
L'auteur, reprenant alors le point de vue historique et juri-
dique, attaque particulièrement le contrat d'emphytéose; c'est
une conception contraire à l'esprit de la féodalité tout le
territoire était possédé eu fait par tous; les rapports de vas-
L'AXX~H S<)t:t))).("!)~) H. t8M

salitt n'Étaient eu principe que des rapports de contribution.


Le titre au nom duquel était tenu k' fief était un titre ree),
non personne). jusqu'ù la eoustitutiou de )M~. Or celui
qui
n'est pas wattrc ubsolu ne peut établir sur une terre
un.rap-
port emphyteutique. M. B. exatniuedans un aperçu intéres-
saut les différentes conceptions que )'on s'est faites de ce
contrat. A notre avis, ces discussions ne sont utiles au point
de vue focioiogique qu'en tant qu'eites nous montrent lu
façon dont, a une certaine époque, une société, ou tel groupe
sociut se représente t'organisation qu'ette a ou qu'ette désire-
rait avoir.

VU).–UtVKKS
t'ar~)M.Mjnss.))mt:Kt;tH<'t).KVY.

Jcuus JOLLY. Recht und Sitte tEinschtiesstich der


eintteimisciten Litteratur) in Gruodriss der Indo-Arts-
chen Philologie (~ro)f et m«'t«'<!<~c<t<fc). Strasbourg,
Trubner, )8')6, tC" p., gr. in-tt".
Bien que le résume de M. J. soit presque exclusivement
destiné aux indianistes de profession et qu'it se présente
avec toutes les difticuttes d'un traite intimetneut technique,
plein d'abrcviations et de termes sanscrits, les sujets étudies
sont si peu <'dHirciset si importants en m<hnetemps. le tra-
vail de M.J. est tellement magistra), que nous sommes heu-
reux de pouvoir en donner ici une analyse.
Ceux qui n'ont pas une certaine connaissance de la littéra-
ture brahmanique ne pourront réettementutitiser cette par.
tie du livre, profondément neuve, que fauteur consacre a
l'étude des sources du droit hindou. H y a ta une seriation
remarquable des textes, des dissertations de beiie et sobrephi-
lologie pour établir la filiation des différents codes, décom-
poser leurs origines. Mais la classification générale est acces-
sibte au grand publie trois couches dinerentes apparaissent:
)" les sutra ;dhannasutras guides de la loi) qui se ratta.
chent immédiatement a la littérature védique et font partie
de la çruti (rtivétation) 2" tes castra (dharmaçastras ensei-
gnements de la toi; qui font partie seulement de la .M«'~t
(tradition), en tête desquels vient le Manava dharmaçastra
K)(lois de Manou), le plus ancien et le plus illustre (du
AXAL~HS.–ttn'R!~ tMS

\'n" siéctedc notre A)'nY f ne <tHYA)'<utt~


ère). Les ditïéronts tnvtna
textes f.:nnt
suut ttftn MOtttH-
non seuto-
ment distingués par leurs périodes respectives, mais sont
eux-mêmes répartis entre un grand nombre d'écoles védiques
(caktta) ayant chacune une tradition très difïérento des
autres; 3' les commentaires faits sur ces castras, pendant le
moyen Age.et les compilations modernes. – On voit de suite
l'importance d'un pareil expose Maine, les Anglais, tout le
droit comparé à leur suite ont commis l'erreur de considérer
les lois deManuucomme le code mémode i'tnde, et certaines
adaptations sans valeur comme le droit braixnanique. Ur,
uueshnpteuomeuctature des textes remet lesclioses en ptace;
les Manavadharmacastra ne sont quête coderetravaiiic d'une
école, pendant le haut tucycn a~e; ii neretrace qu'une partie,
un moment, uu aspect du droit indou. La tache se complique
donc pour qui veut faire du droit compare. Maiste travail
n'est pas décourageant; maigre les profondes diuf ronces
entre les lieux, les temps, les écoles, les textes, te fond m~me
du droit est suffisamment uniforme. Un second renseigne-
ment résulte encore des recherches de M. J. Les textes juri-
dit{ues indous sont les codes des Hrahmanes, ce ne sont pas
les lois de)a population entière. J'exagère certes, mais à des-
sein les ksatriyas y sont bien l'objet d'un corps de régies,
mais tout io reste de la population, Yaiçyas, <ûdra, déclasses,
n'est considère que par rapport aux castes aristocratiques
(dvijas: deux fois ues). Les textes sanscrits, les lois de Manou
en particulier, ne nous donnent le tableau que de la vie du
brahntitnc, un peu do celle du ksatriya, et des renseigne-
meuts épars sur les autres castes.
Ceci fait, A!. J. Il reparti son étude en trois grandes divi-
sions droit familial et successoral, droit reei ctobti;;a-
tions, droit criminel, procédure. L'as dernière partie
concerne les mœurs et usages. Signaions-ia de suite ici cite
intéresse plutôt i'historien des mmurs ou do la religion que to
juriste. La tecturo n'eu est pas moins indispensable, parce que.
dans les recueils indous, les préceptes moraux (éducation,
politesse), les commandements religieux (sacrifices, sacre-
ments, impureté, interdictions alimentaires) sont aussi inti-
mement mctés que possible aux règles juridiques. Les textes
comme les choses ont en de tout temps cet aspect, et ce qui
frappe le plus te sociologue dans t étude des sociétés in-
doues, c'est la pénétration extrême des institutions sociales
les unes par tes autres. Pour ce qui regarde les tribunaux,
H. UmKME))). Annce sucio). !897.
38(} L'AXXÉE !!t)t:tm.Ut:K;CK. tMÏ

leur organisation, les pouvoirs judiciuires, ta procédure, la


preuve (cinquième partie;, remarquons, a un extrême, le
caractère religieux et aristocratique de la juridiction royate,
à l'autre le caractère familial du tribunat du paùcayat (con-
seil des cinq anciens du vitla~e). M. J. nous montre aussi
quelles gradations complexes les séparent. Le droit iudou
n'est pas plus simple comme (ouctioauemeut (}ue comme
fond.
l'our arriver à faire de sou étude sur l'organisation de la
famille iudoue un chapitre remarquable, il a suffi a M. J. de
suivre les textes et dotes classer avec la plus grande rigueur.
La famille collective repose sur la communauté d'habitation,
de repas, de culte, de propriété p. Chacunde ces termes
est a retenir 1" connue étendue, elle comprend théorique-
ment, a partir d'un individu, trois générations d'ascendants
et trois du descendants: l'adoption e'-t possible; il existe un
très {!raud nofnbre do filiations juridiques; la propriété
hmnobUiere est cullective, lu propriété mobilière (salaire)
est indi\'idueite. mais la famille est soiidairetnent respun-
sable des dettes (tu) H" il y a un chef de famiiie et t'atue
succède au père dans ses droits. Ou devru iuuer M. J.
d'avoir rattache, avec h's textes et le boti sens, le droit
successorat a l'organisation de lu famitie. La propriété des
immeubles est indivise, celle d<'s meubles est sujette a par-
tage parle père, mais sni vautdes proportions rigoureusement
detenninees par la lui d'après le rau~que tes nts occupent,
au point de vue de t'a~e, de la pucete, de la caste, ou de la
fonction sociale (S~. ici. outre le groupe ainsi hu'me par te
père et les enfants, apparaissent deux sortes de tiens fami-
liaux t" le ciau t);otra) outre les membres duquel il y a
successibitite absolue )X<); i!"la (amiite collective dont nous
venons de parler les héritiers, les dayadah ont aussi ce droit
imprescriptible de succession ce sont tous ceux qui parti-
cipent au tneme sacrifice tuneraire, qui mangent ensemble
le gâteau sapindah.. En d'autres termes ta fannite comprend
trois zones concentriques clan a descendance paternelle.
famille a~ua~que indivise, famille patriarcate. – M. J. nie
qu'il y ait dans le droit indou aucun reste d'une filiatiou
maternelle (p. M;.It a certainetneat raison en ce qui concerne
la famille proprement dite, qui, eu ellel, exclut toute parenté
parles femmes. Mais, sans excepter que le fils suit presque
toujours l'état de sa mèrc, nous trouvons (p. ~) mentionné

AX.U.Y.<)!<. un'KHi! 387Î
au rang des fils, secondaires il est vrai, un
pOtrikaputra, fils
de )!) sœur ttéritiéro. et (p. 86) il est
parte de l'héritage de
t'onetc muterne) (bandhu). Ce sont des traces,
je crois. sufH.
santés d'une ancienne descendance en
ligne féminine,
La société matrimoniale a ta forme ordinaire aux
familles
patriat-cates ta femme est unie au mari par un sacre-
ment religieux, indissoluble ou a
peu près, même en cas
d'adultéré elle lui est tiée nx'mc au dcta do lit vie. et doit
rester veuve (§ 20). Le sacrifice de la veuve
provient de là,
institution de développement très récent. et
pendant long-
temps spéciale aux castes t-oyaies. Ce qui. ajuutonste, o~t
à
tout fait régulier, te sacrifice de ia veuve étant le
ptus sou.
vent réserve à la tombe du chef. Le iévirat existe
'p. -TO-'t)
et fonctionne normatement.
La poty~mie est permise, le
concubiuane aussi, surtout en cas desteriiité. La situation
de la femme était certninement plus etevee a
t'uri~ine nu'au-
jourd'itui. Pour te tnaria~, i) fatiait observer t" des con-
ditions d'âge; a l'origine l'initiation du
jeune honnne etaH
t-cquisG c'est postérieurement que s'est développée lit-cou-
tume du mariage d'enfants; les prohibitions: la fomne
doit être vierge, d'ou exclusion des veuves de m~mc
caste,
d'un autre ctan. d'oit stricteexosamie
(p. t9-(M qui s'est res-
treinte actuettemeut a ta famiite agnatiquo; 3-' les
formes du
mariage f§ Xi) présentent réunis tes différents stades de
l'évolution mariage par rapt. par achat, par tibre et
simple
choix, par cérémonie (requis pour les brahmanes). M. J. a
réussi & localiser ces coutumes et a montrer à
quelles struc.
tures sociales elles correspon()ent.
Le droit iudou connaît comme,
probablement, tout droit,
la dtstiuction outre les meubles et les immeubles.
Pour les
biens fonciers, ta propriété est soigneusement
séparée de la
possession. La prescription existe, sauf contre les mineurs,
et il y a une théorie de ta preuve en matière de
propriété
(§ ~6) ce qui est d'autant pins remarquable qu'it ne peut
être question ici d'une influence occidentale, la
plupart des
plus anciens textes fsutras) remontant a des dates antérieures
a Alexandre. – Reste la question de la
propriété collective
M. J. y répond de la façon que je crois la
ptus juste et la plus
sensée, en distinguant les lieux et les espèces. La
pâture,
en effet, est partout exercée sur des
communaux; au con-
traire, depuis une très haute antiquité, il y a eu propriété
familiale des lots de culture, comme le
témoigne la teg:s!a.
:})? ).x~<M:)<n.()':tQC)!.)Mf

tiondu bornage; H n'y a d'exception que pour le Pendjab oit


l'exploitation du sul de la commune est faite pin' tous, eu vue
de l'impôt et d'une repartition des bénéfices. Les soi-disant
droits de retrait ou de préemption de !a commune, eu eus de
venter un éh'anucr, M. J. tes rattache non pas it une commu-
nauté primitive, mais bien a l'isolement juridique du village.
Les régies de droit qui refissent les biens menbtes sont
multiples l'ublisation, la donation, le ~a~ ta société, les
dommagesintérêts, la location et vente, ont été connus par
les indous; les contrats, leur (orme solennelle, leur rédac-
tion (p. :!45)semblent au moins contemporains de t'introdue.
tion de l'écriture dans ics Indes (nu" siècle avant J.-C. envi-
ron,. Depuis,un véritable droit commercial s'est constitué. On
voit quelte matière innnimfnt ricito (le faits spécifiques ic
droit illduu ottrirait à des études de droit compare.
Ledroit criminel est reste foncièrement religieux. Lestextes
traitent autant et plus des péchés et expiations que des délits
et des peiues. Il y a ptas. la notion même de la faute est pro-
fondément imprégnée de ce curacture :M), et la hiérarchie
même des crimes est dominée par le principe religieux !M'.
Dans ta plupart des cas, c'est d'une pénitence <)u'its'unit plu-
tùt que d'amendes et de châtiments: te fm'taa~e intime des
peines spirituelle'; et des peitu's puhli'jues, l'importance extra-
ordinaire que l'histoire et lit tt~ende ajoutent aux premières,
sont caractéristiques (le la fonctiou morale des rendions hin-
doues. )'n fait remarquable est u signaler c'est un principe
très vieux du droit indou que celui de la prnp"rtionnatitc de
la peine a l'intention du coupable si les Hrahmanes y sont
parvenus bien avant les sociétés européennes, ne serait-ce pas
à cause de leur confusion fondamentate entre la loi religieuse
et la loi sociale, entre le pèche et ta transgression (les règles
publiques Sauf les plus K''avcs des crimes religieux, les
délits, civiis et publics, sont punis par le roi de prison ou de
coups les fonctions du roi suut d'ailleurs essentiellement de
dire ta justice, de protéger les mœurs et les propriétés.
~ous n'avons (ait qu'une sèche nomenclature des questions
traitées par M. Jott; Le livre doit '~trc Utattentivement. C'est
la plus importante des études d'ensemble faites sur le droit
indou la confiance doit s'attacher aux vues générâtes comme
aux vuesdedetait. Quelque dimcito qu'en soit l'abord, c'est à
ce livre qu'il faudra se référer.
MAMEt.MAUSS.
Af.u.YSH.<. –)))\'m« SM)

KOut.HH. Die Reohte der UrvœUter NordamerUtas. (/,f


f~ft </('«~CM/</M (/f <M«''r<f/«<'</«A'u~.) lu ~ct/M'A.
/«'t'tM<7</i(
tw~h'«'w~'/<<'t-/<hft't'Mf/t<eA(f/ )8M' p. 3:i4-UC.
).es sociétés étudiées dans ce tf'avai! sont tes tribus indiennes
situées au nord de Mexico, y cumpris h"' Kstjuint.'tux. Toutefois ces
derniers eoustitueut un tit'uu)~' cti))n')!r:[j')ti')tn'& j'aW ft d'mt k'~
U't'A'S!<m)(d't'i)< ~j!!tt'X!Ut.
Xuus )n' ))uuvu)ts)jn'imti')m't- h's ~)j''ts tmit' Ou trum't'tit d:U)s
<'<(urUch' de ttcs n!i)t"! t't'tt.')<'ij:tn'tu<'nts .<Hrj'ttt~nistttiott suciaic
df t'es soci~s (ut~aui'-atiu)) i't hi~' fiuttiiiittc) – &nt' )fUt' droit
itttcruaUuuat ()). 3M~j – <m' )'t'i'c!:n'H}(' – .m'le. t)'.M~'st'ctatih il
)'i))tj'"sitiu)t dtt t)um, i'tt'inUmtiun dM.j'-mx'ns (p. :<:0- – ;.m'
t''s sociutt''siit'ct't't's (p. !n:i – .~tn')< t)'t;h"i t)ui cunccrtH'nt tf sann
ti)t't)sh'u<t'.)'4 –stn t''fH!tnu~<[37S-8U ;–)':n)(.'pUon :<Ut-
k- deuil iM3-U9M.;– ))' druit de {froft-h'-t' (399405; – t.- droit
p~out ft ):<pt'm'edu)' (H)5-H6;.

J. Kom.Hi(. – Zum Reohte der Australmeger. Nouer Bettrag.


(.Vottt'C/e t'UO~'t&Mff'HXOK~)'U<7t~'f! .<~)'M ~«.<«~'<'<«.) M')nc
itccuci), t~, )). ~t~ (-t.<uh-.
Shn)' addition Aun'' <tnd'' du t))~)))'*autctt)' su)' 1~n)<?mcsuj''t
t't pMruud:ms je nn'tm' XfCUt'i),t. \t), )). 32) et suiv.

V. TAMASStA.– n MDharna Min Germania ed imGrecia?


(/~<'< /~ff«w< f<t7<ff'.</f''<t (t'ef'mf</f)'f
Wf/t (x'e *;«<(:«/« .Sc<f«-
(tel ~t'n'~ iM~, 2 )MS. p. '!0.-t suif.
<</<'('«

l.e <tJhat')):[ est n't usHm;indou, en vertu duquc))<' ocancicr,


'lui v~'utse f'ai)'<'payr d'un d~'tntctu'')u! t't'tusf, vi''n) s'at.s'-oi)'sur
te !)'ui) ~f la toaisot) uccupt'-)' par c~ d<'rt)i''r t-t y n'st'' :') .jrùtx'r jus-
qu'à <:)'()u'i) uit n'emur' M cn''an~ lu )t)urt dut-))'' eu t'~nu'T.
C't uu'' nn'uac<-de »' hti~r tftuurir si i'~n n'est )':[.<tctuhuur.
Stunn'')' M:m)<a n'trott\~ ):<tut'ttt'' coutuutc (taus t'un<;it'u druit i)
)at)duisde (a tn:)ui''r<' lu jdus ith'tjutcstatdt' ).i"t :t cru t-n dt'-ruu-
vrir des trac'), tuais trf-s douteuse' daus te dr"it af).K)'saxut)
Y. T.naassia. dans j'articte ci-de.<su- se detounde si )a Ut~tuc insti-
tution a existe eu (tenuatiie et eu <!re<'e.
).os ))t'euves tju'ite)) duuue puur lu <!ermauit'nuus jMtraisseuttrès
suj''tte.'j a cautio)). Mais ceties qui ecm'ernent ta t.reee sf~ot [dus
dOnoustratives et )dt)S intéressantes. L'auteur si~nate d'.d'urd <)U~
les t.) ecs avaieut de )a Yi<iune conceptiuu jn'esfjtte aus-i mejancu-
)i())te 'juc tf's tuduus. Les suicidtMétaient fretjuents chez eux. Mais

()) toc/Mf'ft!UM/Acm)' /tM/<«'y


e/M/~M<<OM,t!!TS,)).
~«-.ttWKAft'y'M~K/tMm,)'. 47u,aute
?0 L'A\X)!E ~OC)OH)UtQt'E. t<9T

<'cqui est ptusn'tnar'juabtc, c'est tjucfesmcidt'j't'oj't'L'nK.'utiudou,


H<')ui!;u[tunt<)ui<tt<~i<.)Ufwctttim)'tit)tn'ddns)n))t-ntit)m'du
m)urnu,t't-tdit'tc.snicidt.'p!U'j'ùn<)ru)ut)t!y:t<t~a)'~t:tt
d')ns)ituti'mMciu)'Au)u-t!)t'ntj)[)urtc()u<'h'ssuicid';sd''c<'
~fnr<nmt'ut')~<))~c)u)L')tK'ttt~tudit'-sp:u')L'tn<d<)Ctns~)'t'es<)Ut
!tV!m't)td'tt'm'iu't('tt"n))~'t'd''jt)[u'.<))cct'ftit's)!uut'<}m'ia))t~t't
fUt'utttU.Huti)),t'tLtt!tt~)K.'))uust'a)))"jt'k'UMCit-.t)uit-u)'j'<')~'tte
U'<)')'u''ttp'induu.Att:tx.'t);"n',t(ui avait L't)''))<nd!H)ttu))t;tt'u)~s
connu')L'rut)S';ith'ru)'diuait't'd''t't''tic)'s, .-ifYitab;tudut)ttCt't)tt'')iti~
[)inc'd';rn)L')-u))''tui-t)m't:t<k'ittMsct'ut\'<')jnn'.tt)~utututo)'!idt'
~e)ais!-ertt)"U)'it'd'')'a)tn~.2.
L'htt~n''td''c<;tt'))ati')UPMt<)U'<;Hc<t'<ft'rc~vidt')nttK'ntuuu''
y)!u')Ufuui~<c()nttMtAC)ttt'j)articu)i''t'i~t;u(.'ntdf!!titu<idt'tuuk'
~[actiutt.ut')!))'))L'cttduttc.<y)ut'tunmti'ju<'d'nncvttfU)tt''[utdu
dt'uitcuntt'a'tUf).

Ht'SAKUV.–- Délits et contrats, '.Uud(; d'hi~tuitc jutidi~u'


Mu.scun.)MO,tvui.itt-8".
Xuu.sne cunttMis.sun-; cet otnf':n.()Uf )'!<)-une!tn:dy.fj)!u'm'dan-
la .\H(«'<'</<'
/<~t'«<'/«s<o<'<M<' <<«(~t'ut< umis ttt t.'utKtusiun nous eu
parait hup))n)!<jt-)unt)-)n'U)'n')t-p:t-!sit:t)M)t''<U'<)pr<'sruut<'ut',)<'
t\'p)'du';unt)'Mtp)'in))tifn'MurHiteh''ui)<u)n)':)th'nn<'),co))onc)u
sti~u)!t'ion.niit'<jntr:ttt'<'),t'<))tune)t't!tt''t.'L~)dus:u)ci('nm'dfs
ob)i~!<Uun.s<t(:itM<tnitesu)t<'d'de)itsfth'(!)us.tnci<nd<con-
t)~t!i'tc<-hu<)Ut!!cfu)'tu''ctun't':tttt<'H)'dnd'tit('t~:tvicti)t)''
puut')'t~H)')it')it['ftix,j)t~t't'nit'L't\')-nj;<t))';t't'))')<'t't'i))d''nt)ut'?.' a
~f-droit t'u)th'Mctu'')dt''t-i\'t'):)itdt)n<dttdtt')t)'~u<t),et )du';sp)''t;i:tit'-
M<'t)t,d)'ht))M!'tit'dct;('dt'uit<)tnounct't')t'tM~'im"i<titfsprh'<e!
peines qui Mntt'))c.<-)))~nx.un ~ucct'dan''de ):[Y<'ndeU!t~tntnia)'
E.Ut.'ttKUEM.

CAttLOLESSU~A. – Doveri sooiaU de! diritto giudiziario


ci~Ue (/.M </<'<'m'M&M'fMMj'
(/« ~'u<'< ~'M</f't'f'(«'<'<'
c«'f7.; Turiu,
UuccH,tM7.

t.'imt'-Ut'<'Mt))i)K~!mpuintt)''yut'h~ts)!ttift<pt')))t.'ipa)pi')nstitu-
Uon.jutti'')!ti)'cs''t )))'o''<'dura)<'s,)'cch);t'ch:mt avant tuut si elles pro-
H't!f))t MV<'c efficacité le droit <Jccft)x<tttiunt!)t['t:uJpr contre des
p';ts'j!t)t)t;t)<)))tits<t<)"'))d<'ntt''cotK))))itjm'm<'nt. X'.)tt!;)tt'r'')')'o-
duitou.s point )';s id~cs 'jtt'.m'c bfaucuttp de force et d'h:t)'itet<?il pru-
sente ''c snot des opinions, ce ne ~ht '{uc des npinions. Xous
aurions voutu, et cette (rurrc attachante en iM-l'ireie désir, que

())))!. tO.i!
We</e7'<<t-M<,
ch. XVM.
AX.\u'<K!–nn'HH-i M)

M. ).Mso))n(~tudiiUles h)'!)itutinn'i dont il s'occupe par rapport & h)


'.()ci~(t''j)<t))t')!«)U<'))'t)<'s)f)))''t)()))))<'nt,untit)dt<'ctt<o<;it!tMa à
tt'avt'rs ces in'!titutio))s, t'o'h't'chtU connm'nttt'H'ta npit et t'~a~it on
t)r't)':('d<'<'t')tt's-t'i.Sit'on't))()i'<it))j')<')n''t)tt'f.'<)n''titutiot)s<')t
<'Uc!i-m~)t)("on risque fort tic it'sappt'~L'ict'aumoyen d'idées qui )H'
<u))tt)ucth'spt''Uti<u)Stt<')))'iu<'ip''t'Ut)Ut'd'ir!U!:ons([('st'ntHn<'nt.
~ussi ))!<'))M. )..<t-t-itw)tnutti<)u''n)t't)tdaMC('((''ht'oct)U)'umo))-
(rcr'tueiaproc~thn't'peut (''()'<'Ut)(')'j';td\tud''pour le st";i')]ujj[uc.

Ht.RYY.
:'Î
(j)LA'nU)':MHSKC't'tO~

SOCIOLOGIE CHiMINËLLK
)'arM.(:M()'i)(tCt)Attt'

AYHOTtSSKMHXT

Si ta sociologieest en général l'étude des modifications que


le groupe fait éprouver a ses membres et si, de la vie du
groupe résultent des régies de conduite imposées aux indi-
vidus, ces rentes peuvent être étudiées scientifiquement de
deux façons.On peut chercher commentelles se sont formées
et modifiées,en suivre !a filiation depuis les sociétés les plus
simples jusqu'aux plus composées on peut aussi chercher
comment ces régies agissent efïectivement sur lu conduite
individuelle, dans quelle mesure elles sont obeies ou trans-
gressées, queite résistance elles rencontrent de la part des
habitudes, des sentiments, des croyances de l'individu, Lit
proniere étudeest t'onice de la sociologie génétique,la seconde
est celui de ]a sociologiecriminette.
Cettescience est un intertm'diairo nécessaire entre la soclo-
logiegeuetiquc et la sociologieappliquée. Tout d'abord, grâce
a elle, ta prévision sociologique cesse d'être une sorte de
divination ou plutôt une vague intuition des formes sociales
futures. C'est ta connaissance des troubles profonds dont un
etatsoeia) est immédiatement menace. Mais iiya plus tasocio-
togie appliquée ne peut avoir que des prétentions modestes:
elle ne saurait être l'art de détruire et de refaire l'ordre
social sur ut) pian rationne), mais seulement l'art de prévenir
des maux et de remédiera des troubles qui ont pu surgir dans
lu vied'un groupedetermim'. Orta sociologie criminelle étudie
sinon ces troubles en eux-mt'mcs, au moins les symptômes
quilesdecetent.
La sociologiecrimiaeiie se divise à l'heure actuelle en deux
A'fA).Y<KS. –it')(:)<)).<Hi)H':MtMtXKU.t: 3{)H

branches, dont chacune correspond à un moyend'investiga-


tion spécial. L'une de ces branches est lu statistique morale,
application de la méthode comparative u l'étude des varia-
tions, du taux sociat des crimes soit dans le m~me groupe
humain, soit dans des groupes dinercnts. L'autre est )'an-
thrupologio ct'itninetteou t'etudc descriminels etdcs milieux
oit ils surgissent, étude qui s'edorcc de découvrir un tien cau-
sal entre tes infractions et Fêtâtsoilde l'organisme individue)
ou de la conscience individuelle, soit de la conscience collec-
tive ou de l'organisation économique.
Comme on doit s'y attendre, ia statistique morale et l'au-
thropotogio criminelle ont, jusqu'à une date très récente, vécu
dans un état d'isolement. Néanmoins il est aisé de voir u
quei point elles se complètent.
Sans le concours de la statistique morale, l'anthropologie
criminelte serait une étude biologique ou psychologique
dépourvue d'intérêt social. Mais l'étude du taux suciat des
crimes appuyée sur ta comparaison de ta criminalité mascu'
line a celle des femmes, de la criminalité des enfants u celle
des adultes, de l'homicide au suicide, revête l'existence de
facteurs sociaux générateurs du criminel, facleurs qui
échapperaient au pur aulhropologiste et dont !a révélation
t'oblige ù s'occuper des milieux sociaux non moins que de
l'organisation individuelle ou du climat.
Ku revanche, le pur statisticien voyant le crime et l'accrois-
sement du taux des crimes perdre tout caractère accidentel
est exposé soit a y voir un fait normal et inévitable, soit u
recourir à un critère subjectif pour les distinguer des faits
anormaux. L'anthropologie crimineHeen rattachant te crime
à ta conduite d'un homme anormal fournit au contraire un
critère scientifique de cette distinction. La constance des
crimes et surtout leur accroissement revêtent donc quoique
dissolution sociale partielle ou genemte sans taquette tes
milieux où se trouve l'homme criminel n'existent pas.
Actuellement, le premier de ces dangers est pour t'avenir
de la sociologie criminelle beaucoup plus redoutable tlue
l'autre. On n'a guère songé a classer te crime au nombre dt's
faits sociaux normaux. M. Durkhcim a attiro)'' le caractère
normal du couple formé par le crime et la peine, ce qui est
tout différent. Autre chose, parler, comme a fait Lombroso,
des bienfaits du crime, autre chose, soutenir qu'une société
où se produisent des infractions aux règles sociales n'est pas
394 t.'AXXKHsno'o.outOtE. tM7

.n'- e..r_ _v .}.f,


pour cela anormale, si ces infractions sont réprimées, tandis
qu'une société sans relies pénates serait par là même une
société indéterminée.
Au contraire, l'anthropologie, telle que Lombrosos'est
efïorcéde h) constituer, risquait d'isoler le problème crimino-
logique et le probteme sociologique. Si le criminel est uu
type anatomique, la sociotogie n'a pas compétence pour fétu'
dier. Mais la théorie lombrosieune, purement dédnetive sous
une apparence de fidélité à la méthode expérimentate, issue
visiblement de trois sources .ta phrénologie de Gall modifiée
par Comte, ta théorie darwinienne do ta variabilité des types,
enuuta doctrine de Maudstey atHrmaut l'existenced'une zone
mitoyenne entre le fou et t'homme normal) a vu peu à peu
ses prémisses t'abandonner. L'idée que le développement des
sentiments altruistes dépend de la conformation du cerveau
était déjà bien peu scientifique. L'école tombrosienne a du
renoncer à définir le cerveau et le crâne du criminel. L'idée
qu'un type est chose instable, que les caractères du typesont
exceptionnellement réalises chez les individus est une con-
clusion déduite bien témérairement du darwinisme, bienetoi-
gnee en tout cas de l'esprit du transformisme contemporain,
et cependant l'école tombrosienne ne pourrait justifier l'exis-
tence d'un type criminel sans t'invoquer. Emin, rapprocher
le fou moral et l'homme primitif sansautre preuve quetafai*
blesse relative du pouvoir d'arrêt chez celui-ci était un défi
à toute espèce de méthode. Aussi l'assimilation du criminel
moderne a t'homme préhistorique, au sauvage, u l'enfant
et à la femme a-t-elle reçu de l'observation des démentis si
muttiptiés et si énergiques qu'une sorte de désarroi se mani-
feste aujourd'hui daus les rangs de l'école italienne. Une
transformation dont tes principaux auteurs sontFerrero.
Sighele, Ciraoto-ttamnett, Florian, Cavaglieri, Ferriani, etc.,
est sous nos yeux en voie de se produire.
Dans les lignes qui vont suivre, nous étudierons la tendance
qui porte ta statistique et l'anthropologie criminetto l'une
vers l'autre. Xous la verrous coïncider avec la spécification
des problèmes et des études.
– STATt-T~L'Ë
AX.U.Y-.K.<. MuMAt.K :WK

!.–STAT)S'r)~t.'H Mt))<A).K

A. ~<OMt<f«/<
At-'GMTRBOSCO. – L'Omicidio negli Stati Untti d'Ame-
rioa. (/oM<(-<(/e a«.f A'/M~-L'MM.)
Extrait du ~M~c<:M
/Hf<'fHa7<bH<
(le ~/«Y«t<~t<c,
t. X. Home, Hertero, 1897,
T2pages.
L'auteur s'est proposé decomptéterctde confirmer par une
étude de l'homicide aux États-Unis les conclusions de
l'ouvrage bien connu d'Knrico Fcrri Latacite ici était par-
ticu~retneutdifueite. Lcsgouvememeats des ditMreats États
de t'Uuiou ne pubHeut pas de comptes rendus comme ou le
fait en Europe. La tfgistation peuaie, qui est celle de
l'Angleterre tfgèretneut modifiée, n'est pas exactonent ta
même dans tous les États. M. Bosco s'est
appuyé sur le
recensement des prisons fait en juin )890 et sur do nom-
breuses études locales.
Le )' juin t8!K)les prisons des dinerents états et territoires
de t'L'nioa contenaient 7.S5) détenus pour homicide, soit
7 p. iUUdes détenus de toute
espèce. On ne seioigue pas trop
de la re!)Ht6en évaluant à 7.0u0 le nombre des homicides
annuels. Le taux est donc de )3 par KM).OM) habitants H
est donc plus élevé aux États-t'nis que chez les uations
européennes tes plus éprouvées, t'ttatie, i'Espaguo et la
Hongrie. L'ttatie qui marche en tcte ne compte que t ))omi-
cides par 00.000 habitants.
~!ais l'Union américaine présente en reaiit6 trois sociétés
distinctes, ruNp dans les États de t'Hst, )a deuxième dans les
États du Sud, la troisième dans les États et les territoires de
l'Ouest. Dans la première subsistent les traditions dos fonda-
teurs de l'Union. L'homicide n'y est pas plus fréquent qu'en
Europe i) décroît au Massachusets. Dansles États du Sud, le
taux du meurtre est très élevé grâce à la présence de ta race
noire. Les États de l'Ouest nous offrent le tableau d'une
société en formation, société formée d'emigrants européens
et chinois et où l'autorité politique et judiciaire est très
faiblement constituée.

(1)L'OtoichtM) nell' Antmputogia


crixtiMh'. CunAllanteantropolo
<!)t:o-!i()tti<(i);u.
Turit),B ucMMre! «?.
39C ).'AXX)!H SOCtttt.f'~Hjt'E. ~U7

Dans les États atlantiques du Nord, qui comprennent les


vieilles colonies de la ~ouvette-Angteterre, il y avait en i8M)
six prisonniers homicidns pour tUu.OOt)habitants. Co chiure
était deux fuis plus fort dans les États atlantiques du Sud
il monte enfin fi :? pour ttJO.OOO tiabitants dans les États de
l'Ouest.
Plus que t'Murope, les États-L'nis présentent l'union du
progrès économique et de ta régression morale. Ils soutirent
de la criminaiite de deux phases sociales distinctes, de la
criminatité astucieuse des sociétés très civilisées et de la
criminatite sanglante des sociétés primitives.
L'tiuteui- note avec finesse le rapport de la régression
morale et de l'immigration. L'immigré a rompu les liens de
famille, abandonne la tradition nationaie. Toujours a la
recherche d'uu travail rémunérateur, il lie réussit que diffi-
cilement à contracter du nouvelles habitudes morales. Hieu
d'étonnant si les homif'ides sont ptus communs parmi les
immigres que parmi ies Américains d'origine. On compte
)') détenus pour homicide sur iOO.UOO habitants de cette
dernière catégorie, alors qu'il y en a )4 sur lOu.OM)de la
première.
Avec ia régression morate coïncide une régression juri-
dique dont le lynchage est ia conséquence. Ce mode de
défense contre le crime survit partout a ses conditions
d'apparition et devient iui-meme un crime. Tandis que la
législation accorde aux accusés des garanties presque exces-
sives, la vengeance populaire retahtit une procédure som-
maire et souvent fait précéder l'exécution de tortures
prcaiabtes. La repartitio)) du iynchitge n'est d'ailleurs nuttc-
ment ia mêmeque celle de l'homicide. < Des ~i7 lynchages
notés dans ia statistique de 18~0, aucun ne fut commis dans
les Htats atlantiques du Xord; le plus grand nombre ~4)
appartient aux États méridionaux: le reste aux États du
Ceutre (i:~ et de i'Ouest (i t.. Le tynchage est donc un épi-
sode de la lutte entre ta race blanche et lit race noire.
Bien que M. tbsco partage tes vues générâtes de l'école
italienne et qu'il admette la distinction du crimiuet-ne et du
crimine) d'occasion, sa grande conscience scientifique l'amène
il attribuer l'homicide américain presque exclusivement aux
facteurs sociaux. Sans doute la participation fréquente des
nègres il cette forme du crime confirme à ses yeux les vues
de Ferri. Toutefois il reconnait que même parmi eux les
– ST\T).<T)(;t'K
AX.U.YSHt. M')MA).H ?)?

facteurs économiques concourent,avec ta race, la situation


des ueKt'es uyant constamment empire depuis l'émancipa-
tion.
On peut espérer que les t~tats de l't.'nion perfectionneront
tour statistique f'rimitx'tte; en attendant, il était difficile de
tirer meilleur parti que ne t'i) fait M. Hoscodes renseigne-
ments qui lui étaient otïerts.

H. /.<*~M/fff/c.

HMn.):mjRKtIHIM. – Le suicide. M'«/f </<'<M';<~(f.


) vol. itt-X'de la ~f~tM/'tf < ;tf7'M'«<' cf~)<7<)~or«u)f,
pages. t'aris, Félix .Ucau, 1897.
M. i)urkhei)n reciterche pour quelles causes le taux du sui-
cide varie d'une société n une autre et d'un moment du ta vie
d'une sociét6 a un antre moment. II est amène à conclure il
l'existence de fort'cs coHecth'es assez reeiies. assez puis-
santes pour ithonr l'instinct de eouservittion personneUechez
UMcertait) nombre d'individus. C'est ainsi qu'une simple
monographie faite méthodiquement lui permet de proposer
une solution au problème qui partage tes socioto~ues it
l'heure actuelle et peut se formntcr ainsi Le fait social
consistc-t-it dans l'action pins ou moins intense et variée des
individus les uns sur les autres ou dans l'action du groupe
sur l'individu ? ·
Le taux social des suicides varie d'un peuple a un autre.
C'est là un fait inconteste. Comment l'expliquer Tiendra-
t-on compte des motifs individuels qu'enregistrent les
bureaux de statistique? Impossible puisque, lu où croit le
uomk)'e des suicides, ia contribution de chaque motif reste
d'année en année proportionnellement la même. Admettra-
t-on l'action croissante d'une /b<«' sM<f«/f'/Ce ne pourrait
être qu'une monojnanie. Or la monomanie suppose des facu)-;
tés mentales indépendantes. H faut donc chercher des causes;
générâtes et l'on est amené à choisir entre les causes phy-
siques, les causes biologiques et les causes sociales. L'auteur
de la monographie la plus célèbre, Morsetli, invoque les pre-
mières qu'il ramëue à deux, la raceet le climat. M. Durkheim
s'attache à démontrer dans la première partie de son travail
que le taux des suicides ne varie pas régulièrement comme
le facteur ethnique ni commela température. D'oùil suit que,
?? L'AXX~t:
~ncKtt.omOt'K.
H97
ou bien U faut t'énoncer tt en rendre compte, ou il faut
l'expliquer par des causes sociales.
Mais ou sait que la définition des facteurs sociaux partage
les sociologues,notamment eu France. Les uns n'admettent
en dernière analyse que i'innuenf'e de l'individu sur l'indi.
j vidu et ramènent avec Tarde cette influence a l'imitation.
.) Lesautres reconnaissent une action réellement exercée par
le groupe sur l'individu, action directrice ou coercitive,
médiateou immédiate.
M. Ourhheim soumet ù un examen approfondi lu théorie
sociotogiquede l'imitation ~)iv. I, ch. n-). i) s'attache d'abord
à ia distinguer dp plusieurs autres faits avec lesqueis ou
l'a confondue, savoir )* la tendance des membres "m
groupe a penser à t'unisson; 2" le besoin qui pousse nn it.di-
vidu &se mettre en harmonie avec la société dont il fait partie.
Agir par crainte ou respect (te l'opinion, ce n'est nuHement
agir par imitation. L'imitation c'est la reproduction automa-
t tique d'un acte. <t) y a imitation quand uu acte a pour anté-
cédent immt'diat la représentation d'un acte som))tHb!e.
antérieurement accompli par autrui, sans que, entre cette
représentation et t'executiou. s'intcrcaie aucune opération
intellectuelle, expHcitc ou implicite, portant sur les caractères
intrinsèques de i'hnitation p. t)~!
Sans doute il y aurait beaucoup :')dire sur cette dénnition
restrictive; les théoriciens de l'imitation, Bûche: Bagehot.
Tarde, ont seulement entendu désigner le fait très simple
grâce auquel l'honxne est mr<a~ des sa première enfance
et soumis spontanément à l'autorité du groupe. Toutefois il
était bon d'obliger cette école :'t devenir moins uaitaterate et
la crititjuo de notre auteur y servira sans aucun doute.
L'imitation ainsi définie, M. Durkheim se refuse &admettre
qu'ette rende compte le moins du monde du taux social des
s sides. Si cette influence existe, c'est surtout dans ta répar-
tition géographique des suicides qu'elle doit être sensible.
"C'est donc la carte qu'il faut consulter, mais il faut t'inter-
roger vfc méthode. Par exemple, est-il vrai que le suicide
se tran~nette des villes aux campagnes, des grandes villes
aux petites, et qu'en France il rayonne de la capitale aux
départements? Cette opinion a eu pour elle l'autorité desstatis-
ticiens de premier ordre. < Cnerry disait que si l'on part d'uu
point quelconque de la périphérie du pays (Marseille excepté)
en se dirigeant vers la capitale, on voit les suicides se mul-
AXALY~ES.– STAT~TtQCKMU)tAt.E 399

tiplier de plus en ptus à mesure qu'on s'en rapproche, mais


si ta carte par départements pouvait donner une apparence
de raison à cette interprétation, la carte par arrondissements
lui ôte tout fondement. H se trouve en effet que ta Seine a un
taux de suicides moindre que tous les arrondissements cir-
couvoisius. Htte eu compte seulement 471 par million d'habi-
tants, taudis que Couiommicrs en a Sut); Versaittes, 3)4;
Melun, 5t8; Meaux, 8~; Corbeii, SM);Pontoise, Stit; Pro-
vins, S6~.Même les arrondissements cinunpenois dépassent
de beaucoup ceux qui touchent te plus à ia Seine ttcimsaIl
~Ut suicides; Epernay, !i~; Arcis-sur-Ant'e, !!M; Cttateau-
Thierry, 62H.DejHdans son étude sur le Stu'ftWfft< .S'f'<t)e.c<-
.)/am< ie docteur Leroy signalait avecétonnement ce fait que
l'arrondissement de Meaux comptait relativement ptus de
suicides que ia Seine (p. H3).*
Uref, ie suicide, tuin de se disposer ptus ou moins excen-
triqnement autour de certains tbyers &partir desquets il irait
eu se dégradant progressivement, se présente an contraire
par grandes masses it peu près homogènes (mais a peu près
seulement; et dépourvues de tout nuyau centrât. Une telle
configuration n'a donc rien qui dt'cete t'influence do l'imita-
tion. Jamais un pays que des conditions particulières prédis.
posent spécialement au suicide n'impose, par le seul prestige
de l'exemple, son penchant aux pays voisins, si ces mêmes
conditions ou d'autres semhiabtes ne s'y trouvent pas au
même degré.. 'p. t~-)~).
Mais sufUt-ii de conclure que le taux social des suicides
curie avec l'action du groupe sur l'individu? Xo (aut-ii pas
cunuattre la nature de cette action N'ya-t-it pas des classes
différentes de suicides" t'robiemc impossible u élucider Les
statisticiens ont etabti que dans toute l'Europe, les militaires
se suicident ptus que tes civits, les protestants plus que les
catholiques et teschrétiens plus que les israélites, les divorcés
et les célibataires plus que les ~poux, les époux sans enfants
plus que les pères et tes mères de nombreuses familles. X'est-
on pas en droit de chercher si le suicide du militaire est de
m~me nature que celui du protestant, le suicide du divorcé
de même nature que celui de t'épouse sans enfants?
M. Durkheim, daus une étude publiée en 1888 par !a /<<')')«'
p/t<<<Mop/t«~«*,avait cru pouvoir formuler une loi empirique
c'est que, en France au moins, le suicideest en raison inverse
de la densité familiale. Le recensement de t891 lui fournit
.MO t.'t'iXt!H-')t:tot.t"!t'jm.tNn

uue confirmation éclatante do cette tôt. La carte de la nata-


lité et ta carte du suicide se correspondent en ce sens qu'à
une natalité faible correspond uu taux élevé des morts volon-
taires.
liuseiiield, Étudiant te suicide dans les armées européennes.
avait montre une inversion singulière du suicide militaire et
du suicide civil. Le coefficient d'a~ravation du suicide mili-
taire est d'autant plus faibte que t'armée se recrute dans une
population plus inclinée au suicide. M. Durkheim est conduit
par un examen nouveau des données statistiques & confirmer
ce n'suttat.
Chacun sait avec quelle rigueur de preuves Hertitton il
établi ta correspondance universelle du suicide et du divorce.
Maisles populations ou le divorce est fréquent, ht Suisse
protestante, l'Allemagne, ie Danemark, ont presque toujours
une forte natalité.
Le suicide du divorce est donc d'autre nature que celui de
l'époux sans enfants le suicide de l'un et de l'autre difJere
du suicide tnititaire.
Mais ceci peut être généralise.
A quelle cause attribuer te suicide du tniiitaire? Au de~oU
du service? au céiibat? etc. Ces explications superneieites
tombent devant un (ait c'est que la contribution des ofliciers
et des sous-otticiersest plus grande que celle des soldats, celle
des vieux sulduts ptus grande ([ue celle des jeunes, celle des
armes d'otite plus grande que celle de ta ligne. Le suicide est
doue ici une conséquence de l'esprit militaire qui porte les
hommes a tenir peu de compte de l'individu et do la vie indi-
viduelle. Mais la morale militaire est une survivance; elle
ressemble u celle des sociétés primitives, caracterisÉo aussi
par l'ctfacement de l'individu devant te sroupe. U faut doue
chercher si le suicide n'est pas fréquent dans les sociétés de
ce ~enre. Or, nombre de tribus sauvages imposent à leurs
vieittards la mort volontaire; il en était de même chez les
Ibères et les Germains d'un autre côte, l'Inde est la patrie
d'un suicide rituel, fréquent surtout dans la secte ja'miste.
Dans un cas la tribu exige dans son intérêt le sacrifice de
membres impuissants à la servir dans l'autre, la conscience
religieuse est assez forte pour annuler l'instinct de conserva-
tion. Appelonsaltruisme l'absorption de l'individu par le
groupe et nous constatons l'existence d'un .««'t'f a~'«(.~<
N'en resulte-t-il pas que l'on peut faire un seul groupe des
– ST.tT~'ftQrt!
AX.\).Y'.K' Mfttt.U.K 40t

suicides qui accompagnent la faible intégration de ta famille


et la (aibte intégration de t't~gtisc? Si t'epoux sans enfants se
suicide plus fréquemment <tuele père, et le protestant plus
que le cnlholique, n'est-ce pas parce que t'ego'fsme. te cuite
exagéré du moi, tc~/y./fV~H~pousse à t'extrOne prt'vaut cttez
eux sur t'attruistne? L'auteur n'hésite pas Mle penser. La
preuve avancée par lui est que l'intégration sociale sous
toutes les formes préserve du suicide, tandis que l'accroisse-
ment du taux des morts volontaires coïncide partout avec la
présence des symptômes qui attestent le dectin do ta tradi-
tion. Les révolutions ont un ellet singulier loin de faire
prendre la vie en dégoût, elles repriment ta tendance nu sui-
cide et d'autant plus qu'elles sout ptus intenses et plus
durables. Unt'a observé en France eu t8:-iu,en ~8~8et m~me
en 18'n et eu 't8!M),années de grandes crises politiques; on
t'a observé egatentont en Attemagne et en Danemark en t8t8.
La vie publique envahit alors davantage le champ de ta cons-
cience iodividuette, la vie du parti est au maximum et la vie
de l'individu s'identifie Hcette du parti. Dans un m~me t~tat
où toutes chosessont exactement comparables, en A-ttemagne,
dans ta Suisse allemande et romaude, en Autriche, les pro-
testants se tuent partout plus que les catholiques quoique le
protestantisme ne condamne pas moins le suicide que son
rival. Mais il y a une église protestante beaucoup plus tradi-
tionuatiste et plus fortement intégrée que les autres, c'est
l'anglicanisme. Le taux du suicide n'y est pas plus élevé que
dans beaucoup de pays catholiques, presque moitié moins
élevé qu'en France. X'est-ce pas une preuve que la tendance
au suicide est réprimée par une tradition organisée ? En voici
une autre preuve le suicide croit universellement comme la
tendance a) instruction instruction primaire et suicide sont
partout deux termes corrélatifs. Les populations protestantes
fréquentent beaucoup ptm "école que les populations catho-
liques et on sait quelle propension plus forte elles ont au
suicide. L'Italie contemporaine nous montre partout le
nombre des morts vot~ taires en progression là où celui des
illettrés est en diminution. Le savoir inspiret-it donc l'hor-
reur de la vie? Heponse bien superficielle! La vérité est que
le goût de l'instruction ne prend de force que ta où ta tradi-
tion religieuse s'unaibtit. Ne trouvant plus hors do lui une
règle suffisante, l'individu doit chercher à s'en taire une. La
science seule le lui permet.
E. ttt:M:M))t. Année ~ocio).1M7. 86
402 L'AXXtiK
SOOOLnuKjt'E.<MÏ

Voicidonc un type égoïste à cOté d'un type altruiste, un


courant <!)«(')Ww/('M'' propreaux sociétés supérieures, bien dis-
tinct de celui qui s'observe chez les sauvages, car il ne peut
apparattre sans que l'autre soit déjà très ailaib! Cette dua-
Hté des types sumt-eHe à rendre compte de toutes les
variétés? Le suicide de l'époux divorcé est-il un suicide
égoïste? Sans doute il résulte d'un afïaibiissemeut de la vie
sociale. H faut toutefois faire intervenir un nouveau facteur,
le dérèglement, r<!NOM<t'. Le suicide du divorcé doit être rap-
proché de celui du failli, de celui de l'industriel, patron ou
ouvrier, éprouvé par une crise, bref du suicide qui procède
de causes économiques. Le rapprochement peut sembler bien
artificiel. L'auteur le justifie à t'aide d'une conception pro-
fonde du rôle des institutions sociales, conception, fort clas-
sique eu somme. Toute institution, toute règle sociale est
utile parce qu'clle nous préserve du dérèglement des désirs. 1
Elle nous afiranehit en nous disciplinant. Le désir sexuel et
Je désir des richesses peuvent s'étendre à i'inuni dès que rien t
ne les contraint. Le mariage règle t'uu, d'autant mieux que
la règle conjugnie est plus inflexible, mieux sanctionnée par
les mœurs et t'opiniou. Le désir des richesses est régté par
la hiérarchie des fonctions, seton laquelle un certain degré
de bien-être est attribué a une certaine forme de travail. Le
divorce, qui, d'ailleurs, est uneffet, non une cause, et fanran-
chissement total des forces économiques détruisent cette
doubte discipline. L'incertitude, l'impuissance des seules
forces individuelles Heontenirdes passions que tout surexcite
déterminent un mécontentement qui accroit les chances de <
suicide. A t'anomie conjugale et économique répond donc
un troisième courant suieidogène assex dinérent du courant
égoïste.
D'aitteurs ta société peut agir sur l'individu de trois façons )
iette attire à elle ses sentiments, c'est l'altruisme elle déter-
mineune répulsion du sentiment personne), c'est l'égoïsme;
enfinelle discipline plus ou moins ses penchants en ajoutant
à l'inhibition individuette une inhibition collective infiniment
plus forte. Les trois types de suicides répondent à ces trois
modes de l'action sociale.
En résulte t-it que le suicide soit un fait normal ? qu'il y
ait, comme l'estime Ferri, un droit de l'individu à renoncer
à la vie?
M. Durttheim distingue entre l'existence du suicide et l'ac-
AXALY.OM. – XTATtSTt~t'R MOM.tLt! 403

croisement du taux des suicides. L'altruisme, le cutte de la


personnalité, enfin la lutte des hommes do progrès contre les
règtes traditionnettes et a la suite de cette lutte une certaine
anomie sont choses normales; il n'est pas de morale sociale
qui ne les suppose. Donc, de (aibtes courants suicidogènes ne
peuvent manquer d'exister dans t'état social le plus régulier.
Le suicide en effet peut se rattacher par une série d'anneaux
aux motifs d'action les plus touabtes, le dévouement à la
patrie, la pitié, )o sentiment de t'honneur. tt n'en faut pas/
conclure que le suicide soit un droit de l'homme sur lui
môme. Autre chose t'égoïsmo, autre chose le cuite do ia per-t
sonnalité, culte qui s'adresse à !a nature humaine abstraite-
ment considérée.
Bien qu'il y ait en gênerai une inversion du suicide et de
t'homicide, il ne faut donc pas se hâter do voir dans te suicide
un fait bienfaisant. 1)'ailleurs il y a une classe de suicides
dont l'accroissement est parattete à celui de l'homicide, c'est
le suicide auomique. < L'anomie en effet donne naissance à
un état d'exaspération et de lassitude irritée qui peut, selon
les circonstances, se tourner contre le sujet lui-même ou
contre autrui. Voilà pourquoi, aujourd'hui, un certain
paratiétisme entre le développement de t'homicide et celui
du suicide se rencontre surtout dans les grands centres et
dans les régions de civilisation intense. C'est que l'anomie y
est à l'état aigu (p. 408
Est-il vrai que l'aggravation du taux des suicides soit la
rançon de la civilisation? L'auteur nous donne une raison
sérieuse de ne pas le croire. A Rome, au moment où l'em-
pire atteignit son apogée, on vit également se produire une
véritable hécatombe de morts volontaires. On aurait donc pu
soutenir alors, comme maintenant, que c'était le prix du déve-
loppement intellectuel auquel on était parvenu et que c'est
une loi des peuples cultives de fournir au suicide un plus
grand nombre de victimes. Maisla suite de l'histoire a montré
combien une telle induction eût été peu fondée car cette
épidémie de suicides ne dura qu'un temps tandis que la cul-
ture romaine a survécu (p. 42t).
Quel remède appliquer au mal ? H faut considérer que l'ag-
gravation est due, moins au progrès qu'aux conditions, peut-
être anormales, dans lesquelles il s'effectue de nos jours. –
Inutile de songer au rétablissement des peines on usage au
moyen âge, bien que l'opinion soit prête & accepter que qui-
404 ).'AXX)!H.<t)(:)f)).')':K'r)!.i8''7

conque se soustrait a ses devoirs soit trappe dans ses droits


correspondants. C'est le courant suicido~ene qu'it faut endi-
guer. Se confiera-t-on a lu puissance de l'éducation ? !.e plus
souvent on lui attribue une efficacité qu'elle ne saurait avoir.
Elle n'est que t'imite et te renct de lit société. Elle l'imite
et la reproduit en raccourci; elle ne la crée pas. L'éducation
est saine quand les peupies sont eux-mêmes a Fêtât de
santé mais eUe se corrompt avec eux sans pouvoir se modi-
fier d'etto-m~me. Si le miiicu mora! est vicie, comme )es
mattrcs eux-m'~mesy vivent, ils ne peuvent pas n'en pas être
pénètres. Comment alors imprimeraient-iis à ceux qu'ils for-
ment une orientation difïereute lie celle qu'ils ont reçue''.°
Chaque génération nouvelle est élevée pur sa devancière, il
faut doncque celle-cis'amende pour amendercelle qui la suit.
On tourne dans un cercle ~p. 4~).
Le suicide altruiste va disparaissant, même de t'armée; le
suicide égoïste et le suicide anomique deviennent plus fré-
quents. Kuxseuts appettent un remède. Il n'y en a qu'un c'est
de mieux rattacher l'individu a la société. Mais à taquette ?
Sera-ce :'t t'r~tiso ? Mais ii faudrait demander te rétablisse-
ment des retirions les ptus archaïques, tettesque le judaïsme.
Sera-ce it la société politique f Mais tt~tat est aussi impuis-
sant qu'il est envahissant.
restent le groupe professiounct et ta famille. It faudrait
restaurer, non !a corporation de t'ancien régime, mais une
corporation coextensiye a ta nation ette-meme. it faut aussi
limiter la faculté de divorcer tout en émancipant la femme,
c'est-à-dire en lui ouvrant de nouvettes sphères d'activité.
L'auteur termine en montrant quelle portée sociotogique
peut avoir une monographie du suicide; ajoutons à la con-
dition qu'elle soit faite par un sociologue tel que lui.
Ce iivre est donc un de ceux qui justifiant toutes les espé-
rances que les spectateurs ectaires de la grande crise que
nous traversons fondent sur la science sociale. Les partis (et
parfois aussi les individus) se servent de la science sociale,
mais e!ie n'en sert aucun. M. Uurkhehnle prouve. Socialistes,
économistes sont par lui renvoyés dos à dos avec un brevet
d'incompétence. Que reste-t-il de la thèse de l'antagonisme
des classes, considéré comme une loi fondamentale de la
structure sociale s'il est prouvé que le régime de la concur-
rence ittimitée porte atteinte au bonheur et à l'existence de
la classe capitaliste plus encore qu'à ceux du protétariat Or
– sT.\T).<TtQt'H
At.U.Y.KS. MuHALH 40!}
cette thèse n'est-elle pas, et plus que jamais, le fond du socia-
lisme dit scientifique? Mais comment cetebrer, avec tes vieux
ftdetes de l'école de Manchester, l'émancipation des forces
économiques si l'ou voit it quel point ces forces dechatuees
peuvent <Ut'ehomicides, il quel point la chasse a ta richesse
engendre le dégoût de l'existence?
Néanmoins. peut-être M. tJurkiteim a-t-it compromis une
ttiéorie féconde en la poussant il l'extrême et en la rendant
exclusive. Il existe des forces collectives et ta fréquence dos
suicides exprime, soit ta pre~euce, soit plussouvent l'absence
de ces forces. Mais pourquoi parterde f0!«w«t -<M«'«~M!/
L'idée nous semble plus coutestuble.encore que l'expression.
(jardons-tMus des metapttores soctotogiqnes: Celle de t'orga-
nistno social nous a (ait assez de mat et je frémis ù l'idée do
l'abus que certains pourraient faire des courants générateurs
de faits sociaux. J'admets volontiers que le suicide religieux
et militaire puisse être dû a une impulsion collective au sacri-
lice (lui dans de certaines conditions serait déviée, mais com-
ment et pourquoi t'anaibtissement de la vie sociale s'expri-
merait-it par ia création d'un courant collectif assez fort pour
abolir chez certains l'instinct de conservation? K'est-it pas
plus vraisemblable d'admettre que cet instinct s'est identifie
avec les conditions d'existence des groupes sociaux et que,
celles-ci venant à manquer, l'instinct de conservation person-
neite se trouve a son tour allaibli, d'autant plus qu'il est phy-
siotogiquement plus (aibie.-
Au lieu d'expliquer les variétés du suicide par différents
courants suicido~ënes. j'inclinerais à les rattachera des types
psychologiques. Pour employerla nomenclature de M. Hibot,
le suicide militaire semble être un sensitif, comme l'est si
souveut l'homicide; le suicide égoïste est un apathique le
suicide anomiqae, un instable. C'est ta sans doute une simple
vue de l'esprit; elle a l'avantage de laisser une question
ouverte.
Le courant suicidogene éliminé et le facteur individuel
rétabli, t'ieu n'empêche d'accorder les deux points de vue si
(ecoudsdonton a fait sans grande raison comme tesdeux termes
d'une antithèse, j'entends l'action individuelle et l'action col-
lective. J'y vois deux facteurs do toute vie sociale et ne réussis
pas à comprendre ce que l'explication sociologiquegagne en
clarté et eu forceà ce que t'un des deux soit nie. L'imitation
(qui d'ailleurs n'est pas ta seule forme de l'action qu'un indi*
4M L'AXXt!)! SOC)Ut.O(:~t'E. tMT

vidu exerce sur un autre) n'est pas l'unique cause des varia-
tions du taux social des suicides, bref le suicide u'est pus une
mode,bieu qu'il soit quetquefois uue coututno. M. Durkheim a
mis vigoureusemeutce point eu lumière. ~eamnoius uut Mese
suicide s'il n'est imitateur ù uu plus haut degré que t'homme
moyeu, car l'imitation est un réftexe psychique dont i'inteu-
site répond il la faiblesse de la volonté.
Aiious plus loin. SI le suicide primitif, altruiste, n'avait
pas existé et si la société ne recevait pus de son passé uu
héritage de survivances, vraisembiabiemeut le suicide égoïste
n'existerait pas. Or le suicide uuorniquo ne parait guère se
développer que dans des miiieux qui ont connu le suicide
égoïste. Pourquoi Fegoîsme et t'anotnie ne ruveitieraient-its
pas l'instinct de conservation? Pourquoi cet instinct, s'il
n'avait été affaibli par la constitution morale des premières
sociétés ne suffimit-ii pas à contenir tes dérèglements du sen-
timent personnei. do i'amour de la propriété et de l'iustinct
sexuel, sentiments qui sont beaucoup plus faibles? Créé par
les exigences de la vie sauvage, le suicide est devenu ptus
tard un moyen de prolonger i'extase religieuse les groupes
militaires est ont hérite et l'ont inoculé à ia société civile; it
est devenu à l'usage des instables et des neurasthéniques uu
moyende résoudre les difficultés de l'existence.
Remarquons-ie, ces critiques ae peuvent aiïaibiir en rien
la portée pratique de t'ouvre de M. Durkheint. Il a prouvé
que ht sociologie pouvait aborder les probietnes les plus genc-
raux par là metne qu'elle étudiait metitodiquement un fait
détermine, 11a prouve aussi que la statistique morale permet
l'analyse des soutïrances de la société et eu révèle les désordres
à qui sait ia lire. La sociologie que la pliilosophie générale
tend trop à absorber, au moins en France, avait besoin de
cette forte leçon.

C. /m)jy~/t'<M.

A. NtCEFOM). – La mecc&nlca. della migrMione e la


crimina.tita (~.fm<MH)t'</<; r~M/f/raftOH et la ('t-<M<fH<<~
in St'xo/«p<M)~'('<t,
7° année, n" 7, février 1897.

Le mémoire de Xiceforo comprend deux parties, l'une est


une théorie de la lutte des classes à propos de rémigration,
l'autre justifie en quelques pages le titre de l'article. La pre-
.~ALY!!KS. L'AXTHmn'ut.Ot.t)!
OHMtXKt.t.K 407
miere est au-dessous de lu critique scientifique c'est une
(euvro de parti dont nous n'avons pus & parler. Dans la se-
conde l'auteur montre t" qu'a une population clairsemée,
comme elle l'est en Sardaigne, ou Sicile et dans ta campagne
romaine correspond le brigandage qu'à une population
agglomérée, surabondaute n'pondront non seulement une
forte mortalité infantiie, mais encore de nombreux attentats
commis sans violence contre ta propriété.
En Italie s'observe uue inversion des poursuites judiciaires
et de l'émigration. < La courbe de t'cmigration est eu raison
inverse de la courbe des faits dénonces uux juridictions pé-
nales. En t880, t'emi(;ration descendà t33 pour tOO.MMbabi.
tants, et nous voyons le nombre dos délits dénonces crottre
jusqu'à tO~.Ni pour 100.000habitants: en 1881 t'emigration
monte Mt4<!et les délits descendent à 0~9,48; eu t8M i'emi.
gration monte à 238, tes délits descendent à t)15.37; en 1883
t'6migration donne 238, les délits tombent à 897,1~ en i884
t'emigration descend à 2(JU,les délits toutefois, au lieu de
remonter, descendent aussi à 862.62; en t885 immigration
atteint ~6~, les dciits tombent à 8)7,68.. Etc.
La poUtique traditionnelle qui est une politique de classes
a pour fin la formation d'une population surabondante. A
l'avenir, on devra tendre & un équilibre entre la population
et les salaires, équilibre du a une natalité modérée et une
emigration bien conduite.

H. – ).XTtnU))'<H.Ot:)H':)t))t)Xt:t.t.K

A. Lecrime f( ~Mraces.
CORRE. L'ethnographie criminelle d'après les obser-
vations et les statistiques judiciaires recueiUies
dans tes colonies framçftises,) vo). iu 8°, 5~1 pages.
Paris, Reiuwtttd.

D'après l'hypothèse tombrosienne, le criminel reproduit


les caractères biologiques et psychologiques des ancêtres de
t'homme actuel, animaux ou hotnmes préhistoriques. C'est
donc dans les races intérieures qu'on devrait l'observer le
plus souvent. Aussi l'école italienne cousidëro-t-eHe la race
comme un facteur important de la criminalité homicide.
On sait que Ferd explique la fréquence inégale de t'honu-
408 t.'AXXtiK t<H'7
StK:)m.W:<QCR.
cide dans les
cide dans lesdivers paysd'Europe
divers pays par une
d'Europe par dméret d'apti-
une dinérenee
tude des Lutins, des Slaves et des Cermaias a la criminalité
sanglante. Au contraire, en France, l'école de Lyou rejette
tout facteur qui n'est pi's proprement social. Le docteur A.
Corre a pensé qu'une étude de la criminatité dans tcsdiverses
colouies françaises, que su qualité de médecin de la marine
lui a permis d'étudier toutes, iuaugurerait une méthode apte
à préparer )a synthèse do ces théories exclusives. Quoique
ce livre date de 18!~ et sorte par M même du cadre qui nous
est impose, nous n'hésitons pas à le faire figurer ici &cause
du nombre et de l'importance des éléments qu'il introduit
dans ta discussion.
Les colonies françaises, mente si on néglige l'Algérie et la
Tunisie, comprennent des échantillons des principales races
humaines. Mélanésiens et Canaques de la Nouvette-Catédonie,
Kegrcs du Uahotuey et du S<'n'a), reuhts et Toukoutors du
Soudan, Baatous du Congo, Matais de Mada~sear, Dravi-
diens de i'fnde, Cambodgiens, Laotiens, Annamites. Tonki-
nois et Chinoisde Hudc-Chine, aucun des degrés de t'echeUe
anthropnio~ique ne fuit défaut. Il en est ainsi des civitisa-
tions. Ptusieurseotonies, les Antitiesetia Meunion, prolou-
geut la civilisation de la metropoie en Asie, ce sont les
vieilles eiviiisations, celle de ia Otine, renetee par celle de
t'Anuam, celle de t'tnde, en (jjueique sorte momifiée au Cam-
bodge. Au Sene~ai et au Soudan, la culture musulmane se
montre entée sur la barbarie noire; enfin, au Congo et daus
la \nuvettc-C:)tedonie, on a sous tes yeux les divers degrés
de t'ctat sauvage.
t'ne t':tudeconsciencieuse de ta criminalité dans ces divers
milieux permet donc de découvrir lit solution du problème
posé par t'anthmpntogie evotutionnistc. Les divers degrés de
la criminalité (criminaiite vioteate et criminalité astucieuse.
ollenses aux personnes et otteuses aux propriétés, associa-
tions de nmtfaitenrs et criminalité individuelle) répondent-its
à des stades sociuux dinerents? Ëxpriment-its au contraire
des troubles plus ou moins profonds qui accompagneraient
l'evotution sociale'! Jusqu'ici, grâce à l'ascendant de l'écule
italienne, ta première solution a seule été discutée, car cette
école est loin, comme paraît le penser M. Corre, de nier le
déterminisme social du crime. Ferri a maintes fois exprimé
sur ce point la pensée de tous ses collaborateurs, mais te
déterminisme social tel qu'il le conçoit n'est pas autre chose
– t/.t'<T)tttt)MUM)H
A.f\).Y!:){S. H)UM)SH).).H 409

qu'un milieu économique évoluant de la concurrence brutale


à la concurrence atténuée. M. Corre nous conduit au coutrau'e
&voir dans la criminalité sanglante l'indice non d'un milieu
social inférieur, mais d'une civilisation profondément
troublée.
L'auteur étudie d'abord les colonies dont la civilisation et
la constitution sociale sont restées étrangères à celles de la
métropole; il les examine en suivant un ordre purement géo-
graphique (Afrique occidentale, Madagascar et Iles adja-
centes. Indo-Chine, Tahiti et Xouvelle-Caledoniei il étudie
ensuite les colonies assimilées, c'est-à-dire les Antilles et ta
Nouvelle-Calédonie.
On comprend que nous ne saurions le suivre pas à pas. tl
nous sutUra de dire que ces ditïérentcs études sont claires,
nourries de faits et de données statistiques précieuses, qu'elles
sont faites avec une réelle impartialité scientifique, d'autant
plus remarquable que l'auteur a visiblement des passions
politiques ardentes dout l'expression fait parfois érup-
tion. Nousdevons signaler l'JMtéret très vif des chapitres v
%tvt consacres ù et au Tonkin.
Mais nous avons hâte de dégager les résultats généraux de
l'œuvre.
On peut les ramener a cinq propositions
Il Les races inférieures a celles qui peuplent l'Europe n'ont
pas une aptitude plus grande à la criminalité sanglante.
Parmi elles, les plus basses intellectuellement ne sont pas les
plus homicides par exemple, les races civilisées del'indo ont
des peuchunts criminels beaucoup plus développés que les
races noires de l'Afrique et de la Nouvelle-Calédonie.
Ce ne sont pas les dispositions spontanées de la race,
mais bien la lutte des races, fait politique, qui rendent
compte du taux élevé de la criminalité au Tonkin et dans les
colonies assimilées.
8° L'évolution de la criminalité présente dans toutes les
colonies françaises, à quelque race qu'elles appartiennent,
les mêmes caractères que parmi les populations européennes.
C'est partout et toujours la substitution de la criminalité astu-
cieuse à la criminalité sanglante, de l'attentat individuel à
l'attentat collectif, du petit détit multiplie au grand crime
relativement rare.
4" L'exemple et l'action de l'Européen activent t'évoluttoa
criminelle des populations indigènes sans apporter à celles-ci
4t0 L'AXX~H tMT
SO(:)OLOti!Q)'Ë.
la moindre amélioration monde. Militaires, missionnaires, et
fonctionnaires rivalisent d'inHuenco néfaste. Mienmieux,
le Français emprunte aux populations conquises, notamment
& leurs classes gouvernantes, leurs vices, leurs crimes spéci-
fiques et les inocule à ia métropole.
X" L'importance du climat est beaucoup plus grande que
celle de la race. La race colonisante est d'ordinaire mai
adaptée au climat de lu colonie, car tandis que ia colonisa-
tiou se fait du Kord au Midi, l'adaptation des races humaines
a des milieux physiques différents se fait normalement du
Midi au Xord. Toutefois il n'eu faut pas conclure queia
chaleur détermine le crime. Loin de là c'est ta saison fraîche
qui, dans ies colonies françaises, surexcite l'activité sociale et
avec elle la fréquence des délits.
Si ces diverses propositions étaient démontrées, les vues
qui ont prévalu jusqu'ici dans l'anthropologie crimineiie
devraient être considérablement modifiées, ou, pour mieux
dire, cette science devrait se fondre dans la sociologie. Kxa-
minons donc les preuves apportées par M. Corre.
1"Unegrande ville peuplée d'hommes de race jaune devrait.
si la théorie de Lomhroso et de Ferri était conforme aux faits,
donner annuellement un nombre de crimes, notamment un
nombre d'homicides, supérieur à celui que fournit une ville
européenne également peuplée. Hanoï compte ~UO.OuO habi-
tants:,qui sont presque exclusivement Annamites, Chinois ou
Minh-Maongsmétis d'Annamites et de Chinois,. Cetteville est
depuis douze ans soumise à ladomination française. Or, com-
ment nn magistrat français, io procureur Assaud, on apprécie-
t-ii ia criminalité? M. Corre a pu se procurer ce document
confidentiel, aussi précieux pour i'ethnoKt'aphie qu'humiliant
pour les prétentions et l'or};ueii des conquérants. < L'Anna-
mite possede-t-it réellement, au point de vue criminel, ce-
degré de perversité atteint par les nations européennes? Je no
le pense pas. C'est à peine si, depuis quatre ans que je suis
procureur de la République à ftanoï, j'ai eu connaissance de
deux ou trois assassinats en matière indigène commis dans
le périmètre de la ville et de sa banlieue. Quant aux crimes
contre les propriétés, aux vols qualifiés, ils se produisent
habituellement à l'approche du Têt; et quand on relève à
Hano!, à cette époque, cinq ou six vols audacieux et présen-
tant les caractères d'une certaine perversité chez leurs
auteurs, c'est un gros événement dont parlent les touilles
AXAUtK!– t.'AXTttKOMLOtitE
t:)UM)XEL).H 4H
locales. On recommence alors le chapitre des récriminations
contre los indigènes. Or il est indiscutable que, < si la popu-
lation de la vitte do Hanoi comprenait 2UO.OOU Huropeens à la
ptaco des indigènes, il faudrait immédiatement réorganiser
ta force publique et en quintupler t'e)!ectif. Mâture ceta, tes
assassinats, les vols avec enruction, les infanticides, etc., mar-
cheraient tout' train et te personnel du parquet pourrait sans
inconvénient être triple si l'ou voulait qu'il suM a ta
besogne (p. 37S, 87G).x»
Des grandes races qui peuplent les colonies françaises lit
race noire africaine est lu plus basse; la race induue est au
contraire cette qui se tient le plus près des populations euro-
péennes. Or la statistique criminelle de l'Afrique occidentale
peuplée eu très grande majorité deXe~res, donne une crimi-
nalité peu etevée. La criminalité générale est assex faible.
Ktte ne semble pas s'accroitre dans ta même proportion que
la population. Dans ta période tMM-tSC)avec une population
déjà dense, puisque, pour Saint-Louis et ses faubourgs seuls,
elle comprend 2t.000 habitants et, pour Gerce avec ses dépen-
dances, )8.000 habitants, il y a Moins de 10 affaires d'assises
en moyenne par an et le chiffredes accusés n'atteint pas )4.
A une période plus rapprochée, avec une population de ptus
de 90.~00habitants pour les communes de plein exercice et
tes territoires d'administration directe de la Sénégambie, la
criminalité a un peu monte il y a de H a ? affaires d'as-
sises et de a 24 accusés. Mais i) vient aboutir a la cour de
Suint-Louis des affaires de tout t'ensembte de nos établisse-
ments de la côte occidentate, c'est-a-dirc ressortissant a un
cbitïro de population considérable. Dece simpto aperçu il y
a à tirer une conclusion bien en rapport avec le tempérament
semi-négatif et apathique du noir; ses impulsivités, parfois
d'ectat violent, sont en {;e')erat peu intenses; c'est l'Africain
qui imprime sa note priucipule a la statistique judiciaire en
raison de sa prépondérance numérique et t'en voit combien
le taux de la criminalité reste médiocredans la région où il
domine ~p. i27).
Quel contraste avec le sombre portrait que la criminologie
doit tracer de t'tndou < Nulle race n'onro à un plus haut
point la marque dcgcnerative et l'estampille criminette. Le
champ de la conscience s'est citez l'Indou peu à peu rétréci
sous l'obligation de se soumettre, sans réflexion, aux devoirs
les plus extravagants et les plus contradictoires, les plus
H~ t.tXXt!KSuc)uu":)QLH.'t!M7

opposes parfois aux instincts de ta nature; il a cesséd'entre-


voir les notions de lit moratitc saine à force de les confondre
avec tours contraires et, dans le complet abandon a su sen-
suatité, it Machève de perdre son énergie. Chex lui tout est
passion et toute passion est d'une intensité anormate, répond
sans contrepoids, sans proportionnatité aux mobiles qui lu
sotiicitent vers l'acte. Comme t'égoïsme et l'auti-attruisme
restent la dominante chez l'individu, dans chaque caste, chex
tes catégories vis-a-vis les unes des autres, les sentiments les
plus susceptibles de produirf tes impulsivités criminelles sont
en éveil pertnaoeat, t'esprit de vindicte, ia julousie sexuelle,
ia haine. la convuitise et ta cupidité. Ces impulsivités font
explosion a propos des circonstances les plus futiles et avec
des violences parfois formidahies. Kiies dénotent frequent-
tnent, sinon i'aHiance avec des états d'aliénation caractérises. 1
du moins avec des états provoques similaires (ivresse haschi-
chienne ou toujours immanents et analogues (fanatisme et
superstition). Les mêmes facteurs qui donnent naissance à )a
criminalité en d'autres races et eu d'autres tniiicux sont aussi t
dans i'fnde le point de départ de t'attentât, mais à tel de~rt-
qui ne suffirait pas ailleurs a produire celui-ci, ils le font
éclater citez t'Iadou (p. !?.. à,
Selon Corre tout cotoaisateur est un parasite et jamais il
n'y a colonisation sans lutte entre les races, fi en résulte que
la race victorieuse impute à crime a la race vaincue de
simples actes de défense sociale, soit nationale soit indivi-
duelle. Ce que nos famiiies coloniales appellent des assas-
sinats sont trop frequemtaent des actes de résistance à un
envahissement, des tueries de vraio guerre où l'embuscade
préparée est pour les faibles un moyen de compeuser les (
avantages des forts, ou bien des vendettas individuelles, jus-
tinees aux yeux du sociologue indépendant et logique par
l'arbitraire odieux de quelques fonctionnaires <p. Ht"
Dans les colonies assimilées, la lutte des races innue plus
visiblement encore sur lu criminalité. Le Xe~re, excité par le
1]
muiatre, est en état d'hostilité perpetueile contre le blanc, II
n'est pas de période électoraie qui n'amené son cortège d'in-
cendies et d'agressions. Locooiie indou, traité souventcomme
un véritable esclave, victime de contrats dérisoires, apporte
dans la vengeance la fougue de sa race. – Le banditisme et
la piraterie citez les Annamites confinent au patriotisme et à
la Metitc aux traditions nationales. Notre chouannerie eu
4<X
AX.U.YS!–<A.'<T))))n<'u).t)ti)Kt:HtM).'<Kt.).t!
donnerait une image nssox exacte. Quette erreur ce serait
d'attribuer aux penchants de ta race des actes qui sout dus
aux deptorabies conditions d'existence (jue lui fait l'invasion
étrangère
S" Kn Kurope.et) i''ranpe))ota)nme))t.ta criminatitt'avoine
du crime relativement rare au dctit fréquent, det'om'nse aux
pnrsonnesa t'attentât aux biens, des attentats commispardes
associations aux attentats individuets. Si l'on étudie les
colonies assimilées .(tuadetoupe, Martiniqm'. Ht'union,.on y
constate une évolutionscmhtabio quoique moins rapide. L'au-
teur ta suit pas il pas dans te cours du siecieet montre quitte
s'aeceierc sous i'Hmpire et ia troisième itepubtique. nonobs-
tant te re~ne des politiciens de t'ecote (te Sctuiitctter.– Dans
t'iude, cotonie où la population, en partie assimilée, garde en
grande majorité ses anciennes t'outumes, il y a neannx'ins
substition du défit au crime et de t'attentât individuel n t'at-
tentât cottectif. Hn t833. il y a pour une population de
)(!7.3u habitants :Maitaires correctionnettes et 38 atTaires
criminelles; soit un crime pour4 4t: habitants et un dciit
pour 7jm. < Maisl'action judiciaire est encore mat dessinée
sous ses formes nouvelles: les fonctionnaires enquêteurs ue
pénètrent que très imparfaitement dans les mœurs et tes
habitudesdumiiieu. Bien des manquements doivent demeurer
ignores. Si nous sautons a ia dernière statistique, celle de
i8W), nous observons des changements considerabies. La
population est de ~2.'Mc habitants, dont ~<).?<<K) lodous et
Européens, creoies ou mixtes. Les aftaires crimineties
sont au nombre de 3?),soit unnsurS.fHi) habitants; diminution
qu'it ne faut pas acccptt'r comme une preuve d'amendement
absoiu.caretteestptusque compensée par t'augmeutation du
défit cng'fobant une partie des crimes correctiouoaiises. Mais
il est à remarquer que, sur les 63 accuses, 8 seulement figu-
rent sous la rubrique .Yf'<'t. <« mhMx'o'< '<H.<'««' ftM~v
M<oHt('/<'f!t)rnt'<toustes autres sauf un d'origine inconnue)
sont dectares d'origine asiatique, c'est-à-dire fndous n'appar-
tenant pas a nos possessionspar la naissance ou le domicile
fixe. Pour le deiit je n'ai point des rcievés d'eusembte, mais
seulement la statistique du tribuna) eorrcetionne! de Pondi-
chéry, celui dont )o ressort est )<:plus important. La ville et
ses dépendances oui H.830 iutbitants; !e ct'iftre des aftaires
correctionneiicsestdeSUl, soit un detit pour )07 habitants,
proportion énorme, double de la deiictuosite mÈtropotitaine
4t4 )/AXXt!H«)':)U).m!~L'H.t89T

(en France, un délit pour ~00 habitants). Mais sur S63 pré-
venus de ces délits jugés à Poudichéry, il n'y a plus que
t'8 étrangers; tes autres, au nombre de 40S, sont des individus
nés dans lu colonie. Le délit doue reste bien intrinsèque
(P. BtH-~tUj.
Dans l'Inde, tesassociationsde malfaiteurs sont nombreuses
et les femmes y prenneut une grande part. Toutefois c'est
plutôt dans t'Indo-Chine que l'ou peut étudier expérimenta-
lement ia substitution de l'attentat individuel à t'attentât col-
tectif. Il suffit de comparer ta Hasse-Cochinchine, soumise
depuis longtemps à l'influence française, au Tonkiu conquis
hier. Les faits de piraterie et de brigandage qui s'observent
au Tonkiu,ont désolé tu Cochinehine dans les premiers temps.
L'auteur étudie minutieusement ta piraterie tonkinoise et
les associations qui l'exercent. Nulle autre partie de son
œuvre n'est d'un aussi grand intérêt pour ta sociologie crimi-
nelle.
La piraterie a toujours été la forme de banditisme propre à
i'Indo-Chine annamite qui y avait été initiée par les Mataiset
les Chinois. Elle a disparu a peu près de ta Cochinchine.
< Mais au Tonkin elle bat son plein. Les tjandes, composées
d'Annamites et de Chinois, souvent très fortes, tiennent la
campagne dans les massifs montagneux, à proximité des
<;uursd'eau, ou, plus réduites, toujours prêtes à se disloquer
et à se reconstituer selon les circonstances, elles stationnent
aux embouchures, circulent sur leurs barques au travers des
arroyos des dettas. Leur force est moins dans le nombre de
leurs contingents actifs que daus celui de leurs auxiliaires
latents, intéressés par la cupidité ou la crainte. Le pirate a
pour complices ou associés les gens des villages et quelquefois
la population de cantons entiers; les autorités locales ne sont
pas lesdernières a leur fournirce dont elles ont besoin, vivres,
munitions, renseignements de toute sorte (p. 321). Cesasso.
dations font évidemment penser à celles de Napleset de la
Sicile, Toutefois M. Corrc. qui ailleurs a si profondément
étudié la criminalité de la Bretagne, préfère comparer la
piraterie tonkinoise à ta chouannerie. Celle-ci en évoluant
présenta, ou le sait, deux formes, l'une politique, l'autre
professionnelle. De même au Tonkin it y a deux sortes de
piraterie, la piraterie politique et la piraterie professionnelle.
La première est l'œuvre de patriotes annamites plusou moins
encouragées par la Chine; elle a surtout sévidans les premiers

A:<.U.Y-!)M. t/AXTmtOt'Ot.nCtR CHfMtXEUE 4iS

-}lt.- t.n_1- ~_t -». ~m

temps de la conquête, lit secondeest exercée par une camorra


internationale où les Kuropéens ne sont pas rares. Chez les
chouans, a cûté do !a raison politique, il y avait la raison
éconotnique; la haine contre les bleus se doublait de rancunes
depuis longtemps accumuléescoutre le Oseet, au souvenirdes
duretés des agents des fermes du tabac et du sel môme après
le changement des conditions opérées par ia République,
les fureurs déchaînées croyaient frapper juste en n'accordant
aucune pitié à tout ce qui était d'étiquette administrative.
Les premiers chouans turent des contrebandiers; plus tard ils
se recrutèrent de nombreux paysans chasses de leur foyer
paria famine ou par de maladroites persécutions; plus tard
enfin de déserteurs, de réfractaires, de criminels profession-
nets et l'objectif politique fit place à l'objectif des cupidités
Individuelles à satisfaire. De mente au Tontdn. Ii est indé-
niable que le roi df'-trônéa conservedes fidèles, mais il est non
moins certain due le monopole do t'opium a suscité bien des
mécontentements et a donne naissance a une contrebande très
active; des famines que nos autorités n'avaient su ni prévenir
ni pallier, des exactions qu'elles n'avaient pas davantage empê-
chées ont multiplié le chiure des miséreuxet des irrites. Toutes
ces circonstances ont eu leur inttuence sur la formation des
bandesqui, d'emblée résolues a l'exploitation du milieu par le
crime ou d'abord politiques ou indifférentes, ensuite, a mesure
de l'élimination des patriotes et de la pénétration des suspects,
plus ou moins pillardes et aventurières, ont en outre ren-
contre un puissant moyen d'action dans l'organisation dos
sociétés secrètes (p. H~-3~5). J
On le voit, la colonisation violente d'un pays suffit à elle
seule My stimuler la criminalité la plus sanglante et la plus
antisociale. Les pirates professionnels du Tonkin pillent à
main armée les villages ouverts, détroussent et assassinent
les voyageurs et les marchands, enlèvent des personnes
riches pour en tirer des rançons par la menace des tortures,
ainsi que des femmes et des enfants qu'ils vont vendre en
Chine. Les caractères des associations criminelles de la Sicile
et de Naples sont ici répétés et accentues.
4° Néanmoins la colonisation est réputée vulgairement apte
à répandre la civilisation chez les populations restées à un
stade inférieur, t.'est qu'on néglige trois grands faits, la nature
du colon, )'it))I~!nce qu'exerce sur lui le milieu colonial, la
réaction des 'tons sur !a société métropolitaine. Mission-
4i(! !AX'<~KSf)t;)«).f~i)Qt-H.iS97
nuire, militaire ou fonctionnaire, le coton, déjà tnat adapte à
la civilisation de son pays, ignore et méprise la civilisation
de t'indique et tes conditions de son développement. t) n'a
nulle idée, nut souci des perturbations qu'il cause à ta soci6t~
où il entre, l'ar exempte, il ira détruire les tombeaux consacres
par les Annamites à leurs ancêtres, sans s'inquiéter de
t'appui que ce culte apporte à ta moralité de l'indigène.
Homme de culture inférieure, il prendra en Afrique les
superstitions du Nègre, en Cochinchine les mœurs dépravées
de l'Asiatique. Fonctionnaire, il se laissera donner par le
mandarin des teçons d'improbite. Encore, s'il taissait sa
régression morate dans ta colonie quand il lit quitte! Mais
hetas, i) t'emporteen Europe. Qui oserait refuse)' une large
part (t'influence a de pareils éléments, môtes en plus ou
moins j;rand nombre aux etemeuts non déplaces de nos cam-
pagnes et de nos viites, dans t'emorescence si caractérisée de
crimes et de vices traduite par nos mœurs depuis près de
vingt ans? tt y a tout fin moins ù relever une coïncidence
entre la transformation de cettes-ci et l'extension de notre
domaine colonial tp. tti.
!)' Hn somme, il n'y a dans la genèse du crime aucune
influence à attribuer a ta race si on entend par ta une consti-
tution anatomique et physiologique; carautre chose ta race,
autre chose la lutte des races. Xous avons dit qu'en revanche
Corre accorde une n'eito innuence au milieu physique. Le
colon est toujours mat adapte au milieu, car il émigré du
Kord vers le Midi aiors que les lois de t'aduptation t'astrein-
draient a un mouvement en sens inverse. I) présente donc un
état nerveux maladif. Mais tandis que la chaleur t'abat, la
saison (raiche le surexcite. La courbe de la criminalité est
en rapport avec les minima thermiques. Or it a été reconnu
que la saison fratche n'agit ainsi sur ta criminalité que grâce
a l'intermédiaire des faits économiques. Ici encore les exp)i-
cationsde t'ecote italienne sont en défaut.
Bref, nonobstant une trop grande propension aux allusions
politiques, cet écueil redoutable de ta sociologie criminette,
t'muvt'e de Corre est une des ptus nourries et des pius
méthodiquement conduites que cette science ait produites
depuis son origine. La vraie conclusion serait, non pas un
procès de la civilisation, a ta Rousseau, comme celui par
lequel fauteur termine, mais la négation de toute relation
définie entre les stades sociaux ou ethniques et la criminalité.
AX.thY!!)! – t.'AXTt))M')'fH."tHH <:)()M)'<EH.H 4)7

La gnn'ité des formes de tu cdmioatite ne revête pas autre


chose que Fittteusite des troubles qui uccompagneut une
evotuUon sociute.

F~RHHRO.–La. morateprtmitiva e t'atavismodetdeMtto


(/.« J/o<Y~<'p~'tMtttrf f<~«r«tw<'</« <~<< in ~r<«'f)'o (~
.4M~'opo~<«ct'<m<M<~<
7~ic/)/«~-<t<s'F«'M;FpfM«<«'f série !f,
fasc. l, H, )?))).

Ou parte trop souvent en France de i'ecote italienne de


criminologie cantate d'une sorte de secte fennec et absorbée
tout entière dans )a personnaiite de ses fondateurs. Ou croit
en avoir uni avec elle quand on a réfuté les thèses prin-
cipales de Lombroso auxquelles les mieux informes joignent
quelques vues d'Hnrico Ferri. C'est là une erreur qui cause
maint jugement superftciei. Issue du darwinisme et de la pbre-
noiogie comtiste, t'ecoic italienne évolue sans ,cesse sous lu
double influence de la psychoio~io experimentaie et do la
soeiotogie génétique; elle compte parmi ses partisans des
esprits d'une entière liberté qui n'aecepteut que sous béné-
fice d'inventaire t'herita~e des maîtres. En première ligne, il
faut citer Guj~ietmo Ferrero. Collaborateur de Lombroso
dans ta compositiott de la Y-'<'M<nt<'
ct'fMntf~f, H a écrit, on le
sait, les meilleures pages de cet ouvrage. Le mt'moire que
que nous attons analyser, et qui est un resumede la prentiëre
partie d'un livre sur le /'<'o~'(~M~'«! eo voie do publication,
va nous ie montrer soumettant à un nouvel examen ia thèse
capitale de Lombroso, l'atavisme du criminei-në.
I) estime que < Lombroso et Ferri ont conçu l'atavisme
du délit d'une façon trop extérieure, tropmaterieHc. Ils ont
voulu démontrer que t'homicide. le vol et en gt'nerat les atten-
tats les plus graves sont des pttenomenes rt'~nticrs de la vie
primitivede i'i<umuuiteet que tes sauvagestaent et voient avec
i'indifto'encc qu'ils apportent dans ieurs actions habitueUes.
A cette titt'orie beaucoup ont répondu en opposant des docu-
ments qui prouvent que, chez maint peuplesauvage, tes délits,
et spécialement le vol et l'homicide, sont très rares, qu'ils
sont même plus rares citez les populations tout à fait infé-
rieures que chez celles qui commencent à se civiliser. Ledélit
devrait doncêtre considéré comme un premier fruit vénéneux
de l'arbre de ia civilisation, théorie qui, à ne considérer que
la représentation extérieure de la vie sauvage, a pour soi des
E. Dt/MfMtM. Ann<;c «K-tut. )t!97.
4)8 t.'ASKHH SOCt(tU)'!tQCK. )897

arguments peut-être plus nombreux que lu théorie adverse r


(p. 34).
A une comme a t'autre. Ferrero oppose lit ~«~<'«'</f/'<«f<-
r;jtM!c ~(«' f'«ff't)~'M/.L'atavisme du délinquant consiste (tans
sou esprit d'insubordination contre lu loi du travail et son
impulsivité. – L'etîort de Ferrero est de montrer i" que
t'imputsivité est inséparable du défaut d'aptitude Mun trayait
régulier; que i'évotution sociale et psycitoiogique do
l'espèce humaine a consisté dans la formation de l'aptitude
j autravait et ia diminution de i'itnpuisivite.
i Les caractères qui distinguent do t'homme civilisé le sau-
vage ou leLat'bare sont i'hnputsh'ite, l'inertie et i'exeitabiiite
physico-psycitique H est tire d'uu état ordinaire d'assoupis-
sement p!)r les besoins d'une violente excitation muscutaire.
Knpreuve on peut donner tes dauses vertigineuses auxquelles
se tivrent presque toutes les races inférieures. Tacite avait
note ces caractères chez les Germains il n'est pas une obser-
vation moderne qui ne tes retrouve citez les sauvages.
Or i'impnisivite et ia tnoraJite s'exenjent; ta tnoratiten'a
) d'abord été que la modération de t'imputsivite avant de four-
j nirdes motifs d'action &la conduite.
t'ne nature impuisive n'est pas nécessairement malfaisante
aussi tongtentpsqn'ctte n'est pas excitée par des motifs hai-
neux. C'est pourquoi on a vante si fnciiemeat ta bonté des
sauvages. Hnreaiite, les sauvages se montrent bons seulement
parce qu'its vivent dans des conditions où les excitations au
mai sont rare~et faibles.
Le travail exige le contrôle de soi-même. L'inaptitude à
un travait regutier et l'impulsivité sont donc deux phéno-
mènes psychotoniques connexes. Le primitif peut aimer des
travaux violents, mais de courte durée il repousse la besogne
re~uticre et la répétition de t'euort.
0<t peut distinguer à ce point de vue les occupations
humaines en quatreclusses i" la chasse, ta pèche, lit guerre;
2° t'agricutture; !<"les métiers exercés par un individu indé-
pendant 4°les métiers exercés sous la surveillance d'autrui
et selon une règle rigoureusement fixe.
Les branches supérieures do l'espèce humaine présente
résultent d'une sélection qu'on aurait grand tort d'attribuer
aux gouvernements. Les gouvernements aetuets se montrent
impuissants à réprimer un graud nombre de criminels. Que
penserdes gouvernements du passe qui disposaient de moyens
ANALYSE.–).T))MW)).'H:tKCH)MtXHt.t.K 4t9
d'action si faibies? Lu sélection u été t'ceuvredu travail. Les
races incapables do s'adapter au travail ont du périr, quet
que fut d'aitteurs teur courage militaire. Les races améri-
caines ont péri; ta race nègre, capable tout au moins d'exer-
cer les travaux qui exigent la dépense rapide d'une grande
somme de forces musculaires, a pu survivre.
La sélection du travait a laissédes rebelles et des irréduc-
tibles. L'horreurdu travail estia clef de tapsycitotogie crimi-
neitc; on en a la preuve si t'on compare tesct'imiueisd'ttabi-
tude aux criminels d'occasion. Le malfaiteur n'a pas l'aversion
de t'etiort musculaire, car sans un tel enort ii ne pourrait
perpétuer le crime il a l'aversion de ia discipline et de la
régularité initérentes au travail agricole et industrie).
Ou voit quel sera l'intérêt du livre de Ferrero. t~a socioto'
gie criminelle et la sociologie génétique seront rattachées
l'une a l'autre par un iicn moins artificiel que la tix'orie de
l'atavisme. Néanmoins lu formule del'f(<«M<H'' <«'f«/<')<t
resterait t'qui\'o<)t)esi l'auteur ne t'identifiait pas purement
et simplement à la loi de régression dont AL ttiuot, dans sa
ps\'eho)o;!iedes sentitnents, a montre toute la portée. L'apti-
tude au travaii n'est pas organique; elle doit se reformeraà
chaque génération certaines conditions sociates et domes-
tiques, aidées parfois par ta dégénérescence, font obstacle à sa
formation chez t'entant; de ta le vagnbond et le mendiant
r
d'abord, le criminel ensuite, Ici pas d'atavisme fatal; rien'
qu'une bonne hygiène sociale ne puisse prévenir.

H. '/)<rr<M<
F«cfe«Mp<tf<<'<'M/<cr<!
(A)tt'.SOXC. M)')"!)tt('j
pt'nfexsiuM.

HXOt-'ËRRtANt. MiNoremni-Delinquenti.) '<'p.t<-


fo<w/<«<<'«MHt<(/.f.t f/f'/t'H~MNM~<)«<t<w< Ktude de psyctto-
togiecrimiuetiej, 1 vol. in-S", ?}7t.Mitan,Max Knntorowicz,
i895.

La criminalité infantile et juvénile ottre à la criminologie


un de ses problèmes les ptus attachants: elle apporte une
contribution croissante à ta criminatitc générale et cependant
la nature de t'entant n'a pas change. Commentrésoudre cette
éaigme? Koartonsla solution étrange donnée par M. A. Cuii-
lot. Tout s'expliquerait par l'institution de la neutralité reli-
gieuse dans lesécotcs! Si cette solution flatte un part poli-
4~0 ).'AX.'<)!HS«):)t)t.m.~t-K.tM7
tique puissant, elleest peu digne de ta discussion scieutiftque.
Eu France, si ta criminalité des mineurs a monté de 1881:')
!8Ut de~aHu.!)~ettoetait passée de !?;) a )St)t sous
titi régime sectaire opposéde 2~ M:?!M de t8H it )8~i.
la progressionavaitété beaucoup ptus rapide encore, de t4.'?8)
à ~S.~iO.Cette extension est générale en Huropc, bien que
t'orf;auisation seoiaire y varie avec les pays.
L'école t'xobrosiennetronche ta~uestiou en se jouant. Ette
voitdans i'ettfant)image de l'humanité primitive dont tecritni
net-né est par atavismele prolongement. L'énigme serait donc
que t'entant restât étranger à ta criminalité. Mais, si peu sé-
rieuse flue soit la théorie scotaire.p)te nous semble encore moins
décevante tjuecelte-ci. Voicideux images de t'itumanite pri-
mitive et sauvage, i'enfant et le ~t'and criminet. Oritse trouve
qu'au-dessous de seizeans les mineurs, au moins jusqu'à une
date récente, n'ont nsurc sur les statistiques criminelles que
pour des quantités ne~ii~eahtes! Et fou viendra expliquer
cet accroissement du nombre des délits commis par les jeunes
geus de seixe à vingt et un ans par une analogie generate,
mais tardivemeut manifestée, entre la constitution de i'enfant
et celle du malfaiteur ou du sauvage! De telles explications
sont faitespour encoura~ef tequictismequisourità l'idée que
les méthodes scientifiques pourraient <I'ctairerce ténébreux
domaine
Lino Ferriani, procureur royat à Corne, n'est pas du
nombre des esprits que satisfont soit les explications verbales
tirées des préjuges d'église, soit les théories préconçues. Il
cousuite plutôt son expérience que les thèses soutenues par
les criminalistes ses compatriotes. H a en commun avec
Lombrosoet Ferri certaines vnes; il étudie les MNX'M~MtH-
</w<Hh! et non tes délits des mineurs. Par là il prend raug
dans t'anthropotogiRcriminctte. Comme Lombroso il estime
que t'entant, mempnornta), a beaucoup des traits du matfai-
teur comme t-'erriit est partisan des «<<MMM/A-/(/ ~'t'of;
on peut même dire que son livre est un des meilleurs plai-
doyers en faveurde cette généreuse et féconde doctrine. Mais
en même temps il délaisse t'etude des caractères anatomiques
et des stigmates pour celle des milieux sociaux il emprunte
beaucoup à t'ecotede Lyon et peut être considéré comme un
des continuateurs de Hitux qui, un des premiers en France, a
commencé à apporter quelque précision en cette matière.
Magistrat, Ferriaui va au but par la voie ta plus directe. Le
tXAn'.K'–).T))Kt')'").)K':)))M).'<t!t.).K Ht
but, c'est ta création d'un système d'institutions pu)))iques et
privées, destinées :')préserver t'ttatic de ta muitipticatiou des
jeunes maifaiteurs. Il en résulte que le jirobieme théorique
est quelquepeu passe sous silence. On ne saurait ccjtendant
t'eiudcr. Le propres de ia criminalité des adolescents pro-
vieut-it de ce qu'aujourd'hui, pur suite d'uu atïaibtissemeut
de t'education, les pcMchautssauvages de t'eufant sont éman-
cipes ? Vient-it au contraire de ce que t'enfaut est soumis trop
jeune aux excitations d'une civilisation vieillie et tnatadive?Y
Kst-cc.ic fruit d'un infantitisme tardif ou d'une s't)i)ite pré-
coce'' L'enfant, insutUsumment compritne, tnauifeste-t-it su
vraie nature? H'it.-iidresse au délit n)u)greia résistance de su
nature L'évolutionnisme unitatend opte pour la première
solution, mais ta seconde n'est nu)!etnent contraire aux lois
KÉnt'ratesdGt'evotutiou humaine.
En tisant les pages do Ferriani, on reste eu suspens. L'en-
faut a des penchants malfaisants; il est paresseux, ruse.
cruel, menteur, destructeur, impudique un milieu corrompu,
une famiite dégradée par la misère met à profit ses disposi-
tions voiia le jeune malfaiteur forme. La solution est ingé-
nieuse, éte~ante, mais elle M'entratucpas lit conviction. Le
fils d'une famille dégradée ue devient ])as un matfaiteut', "u
mémo simpiement un mendiant, sans uu certain dressage, et
ce dressage suppose qu'où a dans une certaine mesure fait
violence à ses penchants. Nous ne nous trouvons pas en pré-
sence de t'absonce d'éducation, mais d'une éducation déviée.
Laissés à eux-mêmes, les penchants de l'adolescettt te con-
duiraient au viot et au meurtre impulsif, bref a des crimes
<[uela statistique enregistre de moins en moins. lis ne le con-
duiraient pas ù cette criminatite astucieuse et voluptueuse, à
ces petits délits muitipHesqui fatiguent ia répression.
Toutefois rien n'empêche qu'il existe deux types de erimi-
uatite juvénile, répondant t'un a l'absence d'éducation. l'autre
à une éducation pervertie, types plus ou moins développés,
chacun soton les pays et l'état social.
Cette lucune signalée, lacune qui n'est que l'hésitation
devant une dimcutte des plus graves, nous avons hâte de
mettre en relief les mérites du livre, c'est-à-dire de résumer
tes observations et les inductions qu'it contient. Ferriani,
après avoir écarte les fictions poétiques qui ceignent,comme
d'une couronne ta tête de l'enfant, étudie successivement les
facteurs de ta détinquence, ses formes principales, puis la
4~2 t.'AX'<)':H't:t<'),f)).~t'H.t!!C7

condition de l'enfant avantet après tu condamnation. Il pitsse


seulement alors a t'étude des réformes qu'appetient et te
réKimepréventif et le régime répressif.
( Les (acteurs de la détinquence sont !a nature même de
t'entant et le milieu corrompu où il évotue, à quoi viendra
j s'ajouterte n'aime répressif tui-méme, euteudons t'ensembte
des leçons de l'académie et de ta prison.
L'entant n'est point t'être innocent que nous peignent tes
poètes, lu famille n'est pas non plus en bien des cas te milieu
idvttique où tes mauvaises tendances summeittent pendant
que les bonnes mûrissent. On peut avec Félix Voisin distin-
guer quatre classes d'enfants – les pauvres d'esprit, les nor-
maux, les extraordinaires, destines à fournir tes grands
hommes et tes grands scélérats, et enfin les aliènes. Or. t'eu-
faut normal tui-mOne, au moins dans ses premières années.
a, comme l'a indique Lombroso, les principaux caractères du
criminet-né et du fou morat. Hn gênerai, il préfère le mat,
ou pour mieux dire la rebettion au bien, &la docilité parce
qu'il y trouve un surcroît d'émotions, et que sa vanité est par
là mieux satisfaite. Il se ptait a faire des dupes, car la ruse est
compagnede ta faiblesse.C'est a lit rusequ'il emploie d'abord
toute sou intetti~euee et t'entant le plus leut a t'etude se
montrera vif. eveitte, prompt a concevoir si on lui propose
quelque bon tour à jouer. U se pluit a motcster autrui l'es-
prit de bravade est fréquentchci: jui enfin il est unh'ersette.
ment eoetin au vo). Honct'eufaut le plus normatentent cons-
t titue peut devenir un malfaiteur si une mauvaise éducation
vient se~renersurta nature.
Mais dans quetmitieu vit et grandit le jeune malfaiteur?
On sait que .Raux a observa au quartier correctionnet de
Lyon ?!) jeunes détenus et constata que 3~! appartenaient it
des famittes cosmopolites privées soit du pure et de in mère,
soit de t'un ou de t'autre, et que, des t<Mautres, un K~'ud
nombreavait été .éloigne du foyer p!)r,ta ntisere et les mau-
vois traitements, que 4~ fois le père ou ta mère avaient sul)i
des condamnations et que t87 enfants appartenaient à des
(amitiés de mauvaise réputation. t-'erriani a applique la même
méthode en élargissant le champ des observations, tt a étudie
ifM) mineurs délinquants dont ?) avaient de huità dix ans,
24't de dix &douze ans, 3!it)de douze ù quatorze ans, 4f!3de
quatorze a seize ans, 5')4de seize à vingt ans. Xeuf avaient été
condamnes pour assassinats ou tentatives, ~3 pour meurtre,
AX.U.YSKS.– t.'AXTittmt'ot.OUtK(:)t)Mt.'<Ht.).H 42H

!(? pour blessures graves, m au .m,w attentats


4) pour sévices, 38 pour
aux mœurs, tiU pour outrais et rébeitiou, 141 pour \'ot.
42 pour fraudes,) H pour port d'armes prohibées; t .'JUtétaient
récidivistes. Or, 70t appartenaient à des famiiies de mauvaise
réputation, iC!) à des (amittes de réputation incertaine,
H3 uvaient vécu dans un milieu entièrement dépravé;
8{)u avaient reçu de mauvais exemples, ?7 étaient <its de
condamnes. Les indications de haux sont donc ampiemeut
confirmées. Le miiieu, beaucoup mieux que i'innéitë des dis- n
positions, explique la criminalité juvénile. La famille y est
désagrège, mais t'autorité paterneite qui y survit devient
plutôt uefastc. t/ehfant n'est pas laissé sans éducation et
Hvré à ses instjacts ii est éduqué.pour le vol ou ta prostitu-
tion et subit, pour ceta un véritaMo dressage, it est surtout
é)evé dans t'~orreur du travait et de bonne heure n'a d'autre
idéat que la vie du cabaret.
Les jeunes déiiuquants se laissent ramener en générât it
deux grands-types, le type prédateur et le type sanguinaire.
Sur les H'uU m~tfaiteurs (;u'H a observés Ferriaui comptait
).)M vuif'urs et 3111receleurs. L'accroissement considérante
des vois est du presque exclusivement aux jeunes gens.
Cette tendance se constitue génératement chez eux a ia
période de ia puberté, mais la gourmandise en était l'origine.
Très souvent aussi les mauvais traitements inHigés par les
parents y excitent. Très fréquemment le jeune voieur devient
récidiviste. Hauxavnittrouvé parmi ies jeunesdétenus deLyon
I!) p. )00 de voleurs récidivistes et ~0 p. tUUde vagabonds;.
Ferriani observe lu récidive)!< fois sur i()0eu moyenne.
Les crimes de sang lui ont donné ?!(! sujets. Cechiure si
étevé le porte à penser que, sous i'iuttuencc de t'itérédité. de
t'imitation, des boissous aieooiiques ou des passions juvé-
niles, !'cn(ant des classes dégradées est pres<)uedès sa nais-
sance porté a se faire justice a iuhn'~nc le couteau ù ia main.
Toutefois i'impétuosité n'est ()u'apparentc. eiiedécèto presque
toujours t'idéc d'une vengeancedepuis longtemps caressée et
bien souvent l'instinct sanguinaire ne se sépare pour ainsi
dire pas de la cupidité.
Or, que fait i'état social pour remédier a lu criminatité
juvénile ? It a créé t'écoie, t'audicoce et ia prison. L'écote.
t'erriani n'est pas de ceux qui la dédaignent, mais il n'y voit
pas l'orgaac éducatif qui pourrait faire contrepoids a t'in-
uuence de ia tamiUe. 11lui reproche en termes un peu vagues
4~4 ).'A.'<XKR~t)t;)f)Lf)H)'JCH.)'<BT

de ne pas développer t'idea). Il rééditeavec une certaine com-


ptaisancctesattaqucs de Jutes Simoncontre t'atheismeofficie),
comme si le sentiment religieux s'enseignait du haut d'une
chaire, commesi t'indinvrence religieuse de t'eeote n'hait pt)s
la conséquenceextrême et hx'vitabte de celle de la société
Néanmoins, to rfgitue préventif n'existe p:)s. (Juant au
régime répressif, il est pire que le mal. <ht le magistrat, rend
le jeune detinquant. sa famitie, comme s'it voulait qu'elle
put en perfeetionaer l'éducation criminette, ou bien il ren-
voie passer quelque temps dans une .prison ou le contact de
malfaiteurs pius expérimentes et plus endurcis a'-hfvera de
lui donner le pli professionne).
Cependant les remèdes existent. Ferriani. après avoir
ouvert une enquête auprès d'un certain nombre de socio-
togues et de philosophes italiens et étrangers, conclut a la
reatite du pouvoir de t'fdueution, mais il ne s'agit pas ici de
l'éducation domestique, car dans la classe d'où sortent les
jeunes délinquants, ta famille est incapable d'édu<)uer cttc
est réduite ù tout attendre de t'écote. Or, l'éducateur de l'en-
faut normalest incapable d'éduquer l'enfant anormat. H faut
donc séparer les enfants anormaux des autres, et voici l'au-
teur oecupCù nous tracer le plan d'une école de ce }:e))rc.11
y aura au plus tS-élèves parctasse le maitre ne sera soumis
à aucun programme impératif t'entant sera autant que pos-
sible retenu à t'~cotc et soustrait a faction du milieu domes-
tique. On combinera étroitement l'Instruction proprement
dite avec le travail manuel on n'hésitera pas à faire appel à
l'enseignement evangetique. Une telle eco)e,à vr:ti dire, n'aura
quelquesuccès que si l'on a d'abord modifie l'assiette Écono-
mique de ta société.
Après le n'aime préventif il convient d'étudier le régime
répressif. U ne saurait être question en effet d'y renoncer
entièrement. L'auteur suit ici fidèlement les vues d'Knrico
Ferri. 11écarte d'abord le problème académique du ~.«vntf-
mcttf. La possibilité de la récidive est la seule question à
considérer quand oa est contraint il frapper un enfant d'une
peine. H tranche ensuite.ta question des courtes peines esti-
mant que la méthode expérimentale prononce contre leur
emploi. Le système actuel est ainsi jugé par son fruit habitue),
la récidive. Que lui, substituera.t-on? La colonie agricole, où,
selon le vmu de Ferri, le condamne sera gardé aussi long-
temps que sa libération pourra être dangereuse pour lui-
AXAt.Y.-itM. – ).XT))H")'))t.<))!))! <:)m))XH).).K 43!)

môme et la société. Encore, lorsqu'il sort, doit-il trouver


l'appui de sociétés de patronage, sociétés nomttreuses en
Angleterre et en France, a peu près inconnues eu ttatie?
Ce livre sera-t-it utile 7 L'auteur.se pose non sans amer-
tume cette question au moment où il prend congé du lecteur.
Entend- par ta que de longues années se plisseront avant
quête tégjstateuraccueitte lesréformes qu'i) propose? \ous
le craignons, car de tels problèmes n'ont rien de commun
avec les intérêts étectoraux. Maiss'agit-ii d'une contribution
a la sociologie criminette.sciencequi un jour modifiera l'opi-
nion publique? ators le doute n'est pas possible, l-'erriani a
su traiter une matière rehutaute et douloureuse en unissant
t'étoquence fi )a méthode il a su unir et combiner les raisons
de la science et les raisons du cœur magistrat, ii su juger
avec indépendance le système pcna) dont il est te serviteur;
eu donnant a ia société contemporaine un K~'e avertisse-
ment. il a su se préserver des passions rétrogrades. Qui
nierait t'utitité du livre qu'itaécrit?

DOUCLAS MOHtSO~. Juvenile Offeadera 7<')<Kf).


t vot. iu-8", un pages. Londres, !ist)er L'n\vin,
t'<'<M't')<f~j,
î8!J(;.

M. Dougtas Morison étudie ta criminutité juvénite et infan-


ile a ta lumière des institutions spéciales créées par t'Angte-
terre pour la conbattre, uous voulons parler des écoles
J, industrietteset des écoles de réforme. Son étude, rapprochée
de celles qui ont été faites en France et en Italie, présente
ainsi les caractères d'une application approchée de la
méthode expérimentale. Ferriani, dans le livre dont nous
venons de rendre compte, parait estimer que les réformes
auglaises sont suffisantes à arrêter les délits des jeunes;
Morison étudie t'accroissement du taux de ces déiits dans un
milieu social où ces institutions ont été appliquées. L'un de
ces ouvrages rectifie donc l'autre en le complétant.
Dès le début, fauteur identifie, non sans raison à notre
avis, le problème de la récidive et celui do la criminalité
juvénile. Simplifiant les classifications habituelles, il ne
reconuait que deux types de malfaiteurs, le malfaiteur
d'habitude et le malfaiteur d'occasion. La distance qui
sépare un de ces types de l'autre est très rarement franchie
a t'age mûr elle l'est au contraire très facilement pendant
4~ t.xX);HS))):)t)).<)~)K.)M7

t'enfance ou t'adotesceuce. Les sociétés ne reussit'ont doue a


arrôter tu récidive, ce qui est l'objet même du droit péoa), r
qu'à ta condition d'écarter t'entant de ta carrière criminette./
Doivent-ettescompter sur un système répressif C'est ce que
t'examen des jeunes malfaiteurs peut sent apprendre.
Le livre de Morison est très metttodiquement divise en
deux parties consacrées. ia proniere aux conditions du crime
juvénile, ta seconde au traitement de cette ntaiadie. Cet)e-ci
est écrite surtuut au [mint de vue de ta te~istution anglaise.
ceHe-tàinteresse i'untttt'opotogie critHineUetout entière.
L'auteur étudie successivement i'extcusioH du ct-hne juve-
uiie, sa distributiut), tes rapports qu'il soutietttavec t'age et
te sexe, entia les cunditious pitysiques. meutates, faniitiittes
et économique!,des jeunes malfaiteurs. H écrit avec la plus
i:raude ctarte et sait être cotnptet sans pn'iixite ni contusion.
La criminaiite infaxtite est partout en voie d'accroissement.
ti n'ya aucundoute pour ta Franceet ta Het~ue.Hn ttoitande,
les délits commis panni tesenfants au-dessous de seize ans ont
doubtÈ depuis Yin~tans en Attema~ne, tandis que (tans les
dix dernières années l'accroissement de ta population a été
de adia HOp. ))"),celui du crime juvénile a (''te de ~) p. HJf)
en Russie, en Honin'ie, eu Autrictte, eu Hatie, les dctits des
jeunes croisi-t'ntaussi ptus rapidement que ia population. H
en est de même aux Htats-Unis d'après les renseignements
incomplets que t'en peut se procurer.
Le mouvement gênerai de la criminalité et celui de ia cri-
minatitc juvénile sont solidaires les crimes des jeunes se
distribuent comme ceux des aduttos ils sont très nombreux
ta ou ta criminatitc etie-tneme <'sttrès forte. Les jeunes ~eus
commettent uue forte proportion d'honucides )à ou le taux
de i'homicide est tui-metne eieve, comme il arrive dans
t'Europe meridionaie. Ceci conduit Morison à écarter en
quelque sorte d'embtt'e, à peu près sans examen, t idéed'une
analogie entre les dispositions de t'entant et cettes du crimi-
net-ne et a admettre plutôt une corruption de ta jeune géné-
ration par t'ancienne, au moins dans les grandes cites.
L'aceroissementde la criminalité juvénile est ainsi considérée
comme un (ait socia!, non comme la tnuuifestation d'une
nécessité physiologique.
La distribution de ta criminalité juvénile repond-ette a
celle du paupérisme? Au premier abord on serait tente de le
présumer, mais t'observation de t'An~teterre repondrait
.tX.U.tSHS.–t.'AXTt)ftOP()f.f«.tK(:KtM)'<Kt.).K 4~7

négativement. Morison va jusqu'à admettre une inversion. Le


paupérismes'observe surtout danstesdistricts ruraux. Orc'est
là que le caractère iudivîduet est le moins vicif, ta cupidité
la moins excitée; c'est t& que le malfaiteur a le moins de
chance d'échapper &ta justice. A quel fait social répondrait
donc tacruninatite juvénile? L'auteur n'hésite pas ù fépondre
que c'est a ta concentration des entreprises industriettes.
Mais cette vue sommaire ne suffirait pas et ne tiendrait
pas lieu d'une étude analytique des conditions au milieu
desquelles apparaissent les jeunes malfaiteurs. Or une mine
très riche est offerte à l'observateur par les diverses écoles
que lu lui anglaise a créées pour remédier autitut que
possible it l'emprisonnement des enfants et des adolescents,
savoir les écoles industriettes et les écoles de reforme.
Une première donnée, c'est ln primauté du sexe masculin.
dans le jeune âge connue dans t'age adulte. Xon seulement
les garçons commettent plus do délits que les (ittM, mais ils
en commettent de plus graves presque tous les attentats
aux personnes leur sont attribuantes. Constatatioft singuliè-
rement embarrassante pour ta thèse tombrosie.tnet Car si t:)
femme, cette <r««u)(f<««/<cet être <H/<u)f<7f si voisin du sau-
vage primitif ne limite s:) contribution au crime que pour ta
donner si ta prostitution, comment observer que t'exccs de ta
criminalité masculine puisse être observe dès l'enfance et
bien avant t a};eou la prostitution est possible ?
L'Ageexerce aussi sou influence et il importe de distinguer
t'entant et t'adotesceut. Morison admet une certaine anuto~ie
entt't' te caractère de t'enfuntet celui de tboanne primitif;
t'entant mat survcittc est porté a prendre goût à ta vie
errante, a devenir un vagabond et parfois aussi un petit
voleur. Mais ce n'est pas à cet a~e qu'i) commettra des
attentats de quelque gravité, mais quand ses facuitus auront
une puissauce voisine de celle de l'adulte. (~'estalors qu it
deviendra un criminel d'habitude, adaptera ses facultés à
t'exercico d'une carrière antisociale qu'il sera ensuite inca-
pable d'abandonner. On voit quelle part mesurfe l'auteur fait
a l'atavisme. L'enfant ne devient pas criminel parcMqu'it a
les tendances impulsives et les penchants destrucleurs de
t'animai il ne s'écarte pas du crime a mesure qu'il sf
rapproche du niveau montât de t'adutte; en d'autres termes,
ses penchants criminels ne dérivent pas de t'iafaatitisme. Le
contraire est vrai.
MS ).'A.<~H'!t)):)<)t.O!!)~t'H.t8'7
Ht) résutte-t-it que t'entant soit un être norma) qui choi-
sisse, sous t'empire d'une sorte de vocation, ta profession de
matfaiteur ? L'ouvrage de Morisoa est tout entier consacré a
détruire une tette opinion.Si t'en écarte les fantaisies nnthro-
potogiques,il reste un certain nombre de conditions définies.
propres a rendre compte de la genèse du jeune détinquant.
Parmi ces conditions, tes uues sont individuelles, les
autres proprement sociales, soit domestiques, soit écouo-
miques.Encore, tout bien considère, tes premières dépendent-
elles des secondes, car si, au point de vue physique et
tnentat, les jeunes nMtfaiteurs sont des d'~eneres, la dc~ette-
rescencedont ils souffrent, est avant tout t'etïet du milieu.
Morison constate en premier lieu ta mortatite étevee des
eteves des écoles industrieties ou des écoles de refortne. Dans
la première elle s'élève si 9 p. 1000, si l'on tient
compte de
toutes les données, tandis que dans t'cnscmbte de la nation,
le taux mortuaire de la population enfantine de tnéme
âge
n'excède pas 3,7 p.) .ft'JO.Dans ces écoles la tait te moyenne est
d'un quart intérieure à celle des autres enfants; te poids moyen
donne lieu a une remarque semhtabte. \VMrner. qui a exar-
miné les eniants des deux sexes dans tes écoles industriettos
de Loudres. en trouve S9t soit ? p. tOU)qui présentent des
défauts physiques plus ou moins graves. L'observation des
écolesde reforme confirme ce resuttat. Si nous réfléchissons
que les jeunes malfaiteurs appartiennent presque sans excep-
tion it une classe qui doit vivre du trayait de ses hras,
nous voyous comment t'infériorité de vigueur physique peut
les rendre impropres ù exercer un métier d'une façon conti.
nue.
Les aptitudes mentnles ont à tel point teurs conditions dans
le bon état des organes et des fonctions que t'en pourrait,
sans de grandes chances d'erreur, déduire des observations
précédentes t'infériorité meutate des jeunes délinquants.
L'observation directe témoignerait dans le même sens. Il est
a peine besoin de dire qu'il ne s'agit pas soutement de t'apU-
tude à acquérir des connaissances, mais encore des sentiments
sociaux et du contrôle personnel, t'arrni les jeunes gens
qui
peuplent les écoles industrielles et les écoles de réforme,
30 p. tCO ont perdu en bas âge un de leurs parents sinon
tous tes deux, 3~ p. avaient été négligés ou abandonnés
par leurs parents qui assez souvent étaient eux-mêmes en
prison. Les autres plus favorisés en apparence avaient aéao-
– ).'AXTHH~'(~)t!)K
AXA).YSK.<. t:M)M)!<Ht.t.t: 4~U
moins vécu dans des milieux vicieux où aucune éducation
n'existe. Aussi sont ce les sentiments surtout qui citez ces
infortunés sont défectueux. Beaucoup paraissent n'avoir
jamais ressenti t'innuenee bienfaisante des anections de
(amitte. Toutefois it ne faudrait pas se luiter de leur attri-
buer une intettigcuce au niveau de la moyenne. La formule
psychologique du jeune délinquant, d'après Munson, serait
eetie'ci < une iuteitigonce faiblement développée combinée
avec la grossièreté (btantness) des sentiments et l'instabilité
do la votontf
La genf'se du jeune criminel est expliquée en grande partie 1
par le milieu domestique. Sauf des exceptions négligeables,
ou il u'u pas de parents, ou it a des parents vicieux. A la pre-
miëre catégorie appartiennent les orphelins et les enfants
naturels. Chose (dite pour étonner, t'orpheUn est beaucoup
plus exposf que l'illégitime, t';u Angleterre, les naissances
naturelles sont surtout fréquentes daus les campagnes or.
nous t'avons déjà dit, c'est surtout dans los grandes villes que
se forment les jeunes malfaiteurs. Les naissances naturelles
tendent vers te minimum dans les comtes ou ta population
a ta ptus grande densité et atteignent le maximum ta où
la deusitc est la plus faible, La marche de ta criminaHte,
adulte ou juveuite, est inverse. Eu revanche, la contribution
des orphelins aux délits est considérable. t)e 188i à iX!)t le
nombre des enfants conftesauxeeotes industrielles et qui, au
moment de teur entrée, n'avaient ni père ni mère montait à
4~ p. 000. Les orphelins de père ou de mère sout naturelle-
ment beaucoup ptus nombreux. La condition des uns et des
autres n'est pas la même. L'enfaut qui a perdu sa mère est
souvent abandonne par sou père il est moralement negtigH,
mais, ces cas exceptes, ses besoins matérielsont chance d'être
satisfaits; de plus, il se sent somnisà uue autorite, tandisque
t'orphetin de père sounre souvent d'une misère plus profonde,
se résout &vivre a ses propres risques et devient vagabond.
Quant aux enfants de la seconde catégorie, le nombre etevc
de poursuites dirigées contre eux par les autorites scolaires
prouve assez combien ils sont négliges.
Les facteurs économiques viennent se joindre aux précé-
dents pour leur faire produire tours ellets tes ptus nuisibles.
Le jeune homme que nous vcnous do décrire n'aurait qu'une
chance d'échapper a ta carrière dudélit ce serait d'être
<}t)gag6 assext6t dans une profession régulière et bien remu-
MO ).f)5K!i<M:)").)~tK.)89'r

nérée. Or sa famille, quand il en a une, est trop pauvre pour


lui faire apprendre un métier. La population des prisons est
composéepour une forte proportion de~<'M''t<(< <o6ot«'<'r,d'ou-
vriers sans spéciatité. voués &des travaux durs, médiocrement
payés et iatennitteuts. Le travail ne se présente donc au
jeuue délinquant que sous sa furme h plus rebutante il est
astreint à des chômages qui mettent obstacle il ta formation
des habitudes laborieuses. Dès tors. il tombe nnatement entre
les mains d'uu criminel de profession qui le dresse a une
forme d'activitésouvent tropeo harmonie avec ses penchants
et lesexemples qu'it a reçus.
La deuxième partie du livre est consacrée tl un examen
comparatif des deux systèmes que l'on peut opposer à la cri-
minalité juvénile, le répressifet te préventif. Le régimeanglais,
si admire sur te continent, trouve en Angleterre desdétracteurs
qui préconisent le retourà langueur. M.Munsun n'a aucune
peine fi montrer l'impuissance éprouvée du régime répressif.
La loi pénale tente de faire écbee aux mobiles criminels, mais
ne les empêche pas de uattre. Au contraire, le régime pré.
ventif a donné des résultats hautement satisfaisants. La moi-
tié des jeunes ~enscontK's aux ecotes industriettes ne donne
lieu à aucun reproche pendant tes trois années qui suivent
la sortie de t'ecute.U'aiDeurs fauteur est visiblement partisan
des reformes sociales qui retëveraienUa situation des popula-
tions ouvrières et remédieraient aux maux que cause l'ex-
treme concentration des industries.
H était dinicite, à notre avis, de faire une étude criminoto-
Kiqueplus méthodique, plus complète et plus lumineuse. Si
on laisse de cote les conclusions pratiques. d'aitteurs fort
importantes, le résultat de cette étude est de faire une dis-
tinction comptete entre la criminalité infantile actuelle et le
t'écote tombro-
prétendu infantilisme criminel défini par
criminel n'est pas un sauvage, c'est un déchet
~ienne. Le jeune
de la civilisation.

< C!HAOLOHAMXETT. – Delitti femminiU a Napolt


Studio di sociologia criminale (M~f/t'Mt/M<t!<« .Y~cs,
) vot. grand iu-X",~8~ pages.
A'<t~< .OfMh;/«'<-<-«)«M<'«<
Miian, MaxKantorowiez,t897.
Onsait que la contribution des femmes à la criminalité est
faibleen Italie, ptus faible encore qu'eu France mais Naples
– t.THXm't~UUtKt:MM)\)!U.)i
A'iAU'StK. 4!!t
fait exception ta règle commune. Lacriminaiitë féminine y
est benuconp plus forte que dans les outres grandes villes,
notamment Venise, homeet Paiermeo)') cependant elle est
bien au-dessus de lu moyenne. 11y avait donc grand intérêt à
consacrer une étude propre à ce curieux phénomène crinu-
uolugique, ainsi que t'a fait (:. Ciraolo Mamnett. C'est ainsi
que t'ou peut (Mirede ta sociologie crimineite une véritable
science experimentaie.
La civilisation a subi li Xaptes. si t'on compare cette ville
au reste de i'itaiie, un véritable arrêt de développement. La
densité de la population y est extrême; S25.000habitants y
vivent sur une superficie de ?8t) hectare. Les quartiers de
Porto, Pt'ndinoet Mercutoqui comptent en tout )S).Ot)0habi-
tants n'occupent qu'un kitometre carre, ce qui donne de (! &
Mmètres par habitant, lundis qu'a Londres chaque Individu a
3tt nôtres carre:; à sa disposition. t)e là deuxconsctjucaces
iapt'etniëreestt'inteusitedetutte pour ta vie. la deuxième est
l'absorption de la vie personnettc par la vie cotteetive. La
lutte pour l'existence sévit, non entre i'hummeet les choses.
mais entre les hommes. L'intonsitHde )a vie cotiectiveiocate
emp~ctie ia formation du caractère individuel, en sorte que la
socintitc y est tout t'opposede l'altruisme et de la moralité.
La vie de (amitié subsiste it peineen ce milieu social: la femme
du peuple n'a ~ueredo foyer ;t'existencese patsepoureite dans
les rues et les carrefours. Loin de nourrir la femme, l'homme
vit souvent de son travai);ette est dot~astreintea exercer
des sa jeunesse une foule de petits commerces et de petits
métiers qui mettent sa moralité en péri) elle y prend de
bonne heure le ton, les manières et les sentiments de
t'homme.
Ces causes ne sont pas les seute& et le principal mérite de
t'autenr est, a notre sens, d'avoir tenu }!randcompte des don.
nées historiques, donm'esquc les ant!)ropoio;;istesordinaires
traitent avecun si parfait dédain. Ces facteurs historico-sociaux
sont au nombredcdcux, i'inttuenceespa);noieetie t'Aiede la
camorra. Encore pourrait-on les réduire à un sont, car la
camorra a été importée d'Espagne dans t'fmcienroyaume des
Denx-Sicites.Les Xapotitaines ont tesquatitesdesHspa~notes.
mais elles en ont aussi la fougue, les passions explosives, le
tempérament voicanique: de là une conceptionpropre de t'a-
mour qui leur (ait un devoir d'aider en lotit t'homme qu'elles
aiment, de subir avec une résignation i))imitœ les mauvais
4M t.'AXSKKtttCtUt-tMtQt'H.tSB?

traitements qu'il leur innige, mais df châtier férocement l'lu-


tideiité.
Lu camorra profite de ces dispositions. Appartenir &un
eamorristc est pour la femme (tes bas-fond'') deXaples un titre
d'houuem'. Cette étrange association. qui sortes Bourbons
exerçait au profit de ses membres les attributions protectrices
de l'État et dout l'action persistante entretient citez les ~:)po-
litaius le scepticisme politique eu leur inspirantdes l'enfance
un mépris tranquille des pouvoirs publics. cette association
trouve ainsi chez une foule de femmes pauvres des instru-
ments d'une singulière efficacité en m~ne temps qu'elle les
peuetre, elles et leurs enfants, de son esprit untisociai.
Les Ht'andes forces morales et politiques, !a religion et le
gouvernement, sont ici sans action. Peu de villes néanmoins
poussent aussi loin que Xapies t'iiitoiertmce religieuse; )('
culte y est associe a tous les actes de l'existence, mais pur ia
même il devient impropre a symbo)isertavie tnoraie. Urace à
t'actiondu régime espagnolsuivi du régi mebourbonien, iare)i-
giou est'devenue plus qu'aUteurs un rit.uaiistneoutciet et un
manteau dont toute passion peut s'habiller. Quant au gou-
vernement, les Napolitains se sont accoutumés à y voir, sous
les Espagnols, nn agent de l'étranger et, sous les Bourbons,
une secte partiale et oppressive, toujours prête à recourir,
pourse maintenir, au servicedes hommes les plus suspects ou
les plusodieux.
Les crimes des Xapoiitaines sont surtout pussionneis
directement ou indirectement l'atnour en inspire le plus
grand nombre tantôt la jalousie on ta vengeance tes arme
tantôt le culte voué à un malfaiteur les porte il lui prêter
main-forte. Ajoutez ic cela leur humeur bataiiieuse et que-
relleuse, entretenue par le séjour assidu dans ia rue et la
{reuHCMce des rixes. Toutefois on se tromperait fort en
attribuant a ces femmes l'horreur du vol; volontiers elles
deviennent receleuses pour le service de leurs amants, sur-
tout s'ils appartiennent à ia camorra.
Ciraolo Hamnett a su écrire cette Étude en ce style à ia fois
chaud et coloré, vif et pittoresque, qui ne nuit en rien à l'au-
torité du savant. Son oeuvredonnera à rcnecbir aux lecteurs
trop prompts à accepter les vues exposées par Lombrosodans
la FfMtMc (TtwtMe~f.Si la femme commet à Naples a peu près
autant d'homicides que l'homme, ce n'est pas par <Msc<)«M<<('
c'est par passion ce n'est pas sous l'intluence des caractères
ASA). –
).'AXT))H<)t'OLO)i)H t:K)MtXH).).K 4HH

sexuels secondaires, c'est sous l'action de conditions sociales


bien déterminées. Ajoutons que ces dernières ne sont
pas
purement économiques. Kaptes pourrait avoir uue population
de densité e~ato sans que Jes ttommes abandonnassent aux
temnx's une grande partie des travaux et surtout sans
clue la
f<!Mton'<fs'y fut implantée. L'auteur f) montre quelle action le
passé politique d'un peuple peut exercer sur sa criminalité
actuciia.

GA!nuHLTAHt)E. – La ortmiNalité professionnelle


(Rap-
port présente au congrès de (ieneve), dans les .c/ijpM
<tf<</)/'fj/<o/<~«' – )i" année, n" (io, i5
t-)'<M<HcM< sen-
tentbre i8HO.

La lecture de ce mémoire est une ohHf;ation


pour quicon-
que s'intéresse aux progrès de ia sociologie criminelle. L'au-
teur de tant d'muvres attrayantes ou profondes a tnontré ici
autant de précision dans l'analyse d'un problème
particulier
qu'aiiteurs ii a fait preuve d'ampteurdaus ta synthèse.
On sait avec quelle lourdeur et quefieetroitesso de vue les
statisticiens ordinaires ont traite de la ct-i)nina)itc profession.
netie il ne s'agit pour eux que d'évaluer numériquement ta
part de chaque profession a la criminalité gcnCrate. M. Tarde
montre que cette étude est d'un médiocre intérêt si l'on con-
sidère que,au fur et a mesure de l'assimilation
démocratique
des sociétés, la profondeur de l'empreinte
professionnelle sur
l'individu va s'affaiblissant au profit de
l'empreinte sociale il
proprement parler et politique, sinon nationale Lacrimi-
naHte professionnelle peut être entendue dans un tout autre
sens et designer le nombre de dctits spéciaux et caraetéris.
tiques d'infractions à sa morale propre que chaque profession
fait éclore Ici, il y a matière une veritaMe étude socioto-
gique.
A vrai dire, il s'en faut que la statistique morale nous ren-
seigne egaiement sur la criminatitc de toutes les professions.
Les infractions des prêtres, des militaires, lui
échappent; il
n'en est pas (le même du délit commercial par excellence, la
banqueroute, ni du délit des notaires, l'abus de confiance.
Le mouvoneat de ia criminatite professionnelle ainsi
entendue est-il autonome ou depend-ii des variations de ia
société dont ta profession n'est qu'une fonction, des <eo)t.
~OMCM .MOH/M, pour parler comme M. Tarde ? L'auteur inctine
K. Ut-MUEtM.– Anttw ~wio). i!M7. ~!{
4 ).'A\H'!<)t:)"t.'HH~rt!.iMf
franchement ver~ih) seconde solution. Hn preuve. il étudie les
conditions dft'itcf'roissement si anormal des abus de con-
fiance citez tes notaires. Les notaires français ont tongtemps
été cités avec raison comme une corporation remarquabte
pour son impeccabitité. Depuis, trois circonstances se sont
produites t" le prix des études s'est partout étevé le rende-
)nM)ttdes onice!t a plutôt baissé; ces itommes de ptus en
plus besogneux ont eu davantage tu tentation et la (acuité
d'opérer des détournements de fonds. Le prix des études s'est
étevé parce que lu diffusion de t'enseignemcnt a rendu le
notariat act'essibte a ptus de jeunes gens le revenu des
ollices a baisse parce clue ta même cause a rendu le ministère
<tesNotaires moins utiic enfin le paysan a plus épargne et
s'est précipite avec une confiance moutonnière cttex le
notaire sou voisin Ce sont donc des circonstances sociales
qui ont altéré ta moralité d'une profession et amène ta mul-
tiplication d'une classe de detits précédemment rares.
De l'étude de ~t. Tarde il résulte donc qu'un groupe profes-
sionnel éprouvé par une crise devient, qu'on nous passe ce
terme, un «t~« ~'<tM~o' La crise est d'autant pius grave
queia moralité professionneite du groupe est plus ebrantee.
plus voisine do son entière dissolution. Elle peut consister
encore eu un t'onfUtentre la moralité propre a ta corporation
et les exigences de la morate sociale, quand la grande
société est interessce à la non-répétition d'uu acte qui, très
répandu dans ta petite société profossionnette d'où i) émane
mouitta~e des vins, fraude commerciale et falsificationsde
divers genresy est absous parles mœurs de ce milieu spécial
Mais, des deux cas, te plus grave est évidemment te premier.
11nons semble que M. Tarde a apporte une contribution
précieuse à l'étude de ta multiplication des detits. tt a soin do
nous faire remarquer que, si t'iodividuatitc de la corporation
a disparu, il subsiste des groupes étendus de professions
similaires entre lesquelles se répartissent les membres d'une
société contemporaine, avec une chance bien faibte pour cha-
cun d'eux d'en jamais sortir. C'est le groupe des professions
intellectuelles, le groupe des travailleurs agricoles, celui des
travailleurs industriels. Or c'est le troisième qui apporte à ta
criminalité ta contribution ia plus forte. Le délit se distribue
sur la carte de France exactement comme l'industrie. Toute-
fois, laissons de côté ici bucoliques et géor~iques puisqu'en
beaucoup de pays étrangers le villageois a ta patmedu crime.
ASA!.M)M. – L'AXT)t)tU)'('Lût))H ):M)M).\KLLK 436

Mais lit professionrurale, assujettie Ades règles


fixes imposées
par ta nature extérieure, a échappe a l'instabilité générale. Il
n'eu est pas ainsi des professions industrieiies exercées g6n6-
ratement par les groupes urbains. La dissolution des corpo.
rations a été le moindre coup qui ait été porté à ieur constitu-
tion moraie: depuis cet événement si diversement
apprécie,
ta série des tâtonnements de )a science appiiquee, unie à ia
concurrence illimitée, t'anonie économique,pour employer
un terme citer ù M. i)urk))oim, ont cmpechÉ toute recons-
titution de ia moralité professionneiie. Or, il est vraisem-
biabie que si l'un soumettait citaque corporation à i'extunen
dont le notariat a t'te l'objet de ia part de M. Tarde, ou decou.
vrirait des faits de même ordre. Tout au moins vernut-on
sans doute ia dissolution de la conscience professionnelle
activer lit désintégration de la famille et par suite rendreplus
précaire l'éducation. M. Tarde aura rendu un service do plus
à lu sociologie critnineiies'iitu-iteved'eciairer ce côté obscur
de la genèse du délit.

Docteur L)':(:it.N.. – Conséquences sooiales de FaJ-


coolisme des ascendants au point de vue de la
dëarënëresoenoe et de la criminalité. Extrait des
comptes rendus du iV congres international d'antbropo-
logie criminelle. Session de Ceneve, 18!M;.

L'apôtre bie)t connu de lit lutte contre l'alcoolismeen France


s'est proposé d'eciairer l'obscur problème des rapports de
t'aicootisme et de lit criminaiite, probieme (lui met aux
prises
les statisticiens et les critninaiistes de t'itaiie et ceux de ia
France, de i'Aiiemague, de l'Angleterre et des i~tats-Unis.:i
fournit ou, du moins, prépare ia solution de lu difficulté en
nous montrant dans i'aicooiisme la cause d'une
régression
Kenerate de la race, régression dont l'accroissement de la cri-
minalité, grande ou petite, est un symptôme.
Le mémoire que M. Legraiu a présente au
congrès de
Genèveest t'abrège d'un ouvrage beaucoup pius étendu
qu'il
avait publié en )8W; sous le titre /M/t'nw('Mf<'Mt-M<(- <-<
M~coo~Mwf'. Moretavait montré que t'aicooiismeentraine l'ex-
tinction d'une famille en quatre générations, mais non sans
avoir provoque à ta quatrième génération
l'apparition des

()) i t'otuM'in-8,S5Spt~jes.Piir< tn-«)-s"-i


Cttrn'.<;ditcu)-,
t89S.
4Kt! ).'A\<t!HS(M:)(').t)t,)tjt')!.«')7

meurtriers et des suicidés. Les travaux de M. Legraiu le con-


duiseut a cooOrmerces données et ù en tirer une véritable
toi. < J'ai suivi, nous dit-il, quatre générations de buveurs
dans ~t!) fumiiteset les résultats de mes statistiques sont suf-
fisamment démonstratifs pour que je tes reproduire ici.
Dés la première génération, 108 familles comptent déjù
des dégt'ncrés 'notamment déséquitihmtion simptc. (!3{ois;
débilité meutidc, 88fois; folie morale et impulsions dange-
reuses <Hfuis Eu outre, beaucoup d'enfants disparaissent des
le premit'r âge pour cause de chétivité' native (6 sur8 dans un
cas, «J sur )C dans un autre; les six restant sont déséqui-
libres, faibies d'esprit, épiteptiques). Dans3!) (amitiés je note
les convulsions, dansS~t'épitepsie, dans tut'hystérie, dans H
la tnènit)ë;ite: t0t<(amittessur ~tS, soit sur comptent des
atcoo!iques(}uid'')irent pourta plupart. Enfin, chitïre énorme,
'itt){famittes comptent des atiénes. ·
< A la seconde génération, ? observations me donnent les
résultats suivants 34 familles comptent des dégénères graves
(imbéciles et idiots), familles ont des tous moraux. Les
naissances avant terme, la mortalité précoce et la misère phy-
sioiogiquc tont une vMtaMe hécatombe d'enfants, d'autant
plus qu'ici l'ivrognerie du père et de ta mère devient com-
mune :M)fois). Lesconvutsiousse rencontrent dans 4~tamines.
l'épilepsie dans 40. Dans tous les cas, sauf S, l'ivrognerie est
signalée ta folleexiste dans ? familles t ta plupart des autres
ne comptent encore que des enfants.) u
A la troisième génération, observations me donnent un
total de tf enfants; tous sont arriéres, 2 sont atteints de folie
morale, 4 de convulsions, d'epitepsic, d'hystérie. ) de
méningite, de scrofule. ·
Si j'additionne maintenant toutes les suites (soit 8t4)
comprises dans ces ~)3 familles, voici ce que je trouve
4~0 p. )00 sont devenus aicootiques; <!«,')«p. WO sont
dégénères; t~tO p. )00 sont fous moraux; ~JO p. !0"ont
eu des convulsions; i/5'' est devenu hystérique ou cpiieptique
et t!) p. tt") out versé dans la folie. En outre, 174 ont disparu
presque avant de vivre. Si l'on y ajoute 1)3cas de tubercu-
lose ou de misère physiologique voués à la mort, on atteint lu
proportion de !H,(iOp. t"0, soit la moitié représentant to
déchet social brut par hérédo-atcootismo.
JI y a donc un hérédo-atcootiquc. L'auteur pense qu' < it
réalise mieux que personne le tableau synthétique auquel
– ).'A'<T)OM)'m.')!.tR
A'<A)<Y-!)!<. U)ttM)XH).).K 437
on a apposé l'étiquette de criminel né C'est cet ix'rédo-
alcoolique que l'on retrouve bien souvent dans le eriminoi
précoce. < Dans mon passage de 5 années a lit colonie de Vau-
eluse où j'ai traité plus de tillOjeunes dégénères. j'ai vu inter-
venir le crime dans un tiers des cas et j'ai pu établir que tous
mes délinquants étaient issus du parents alcoolises. 1
il nous semble toutefois que l'auteur vu trop loin lorsqu'il
écrit qu'il est permis d'affirmer que la disparition de l'alcoo-
lisme des « ascendants équivaudrait à ta fermeture de la plu-
part des prisons Litconsommation moyenne de l'alcool est
Il fois moindre eu Italie qu'en France (0,SOi- contre 4,~t)
or, ia criminalité géuerate y est plus considérable l'homicide
six foisptus fréquent (M!contre ~Spourl.OOU.O(K) d'habitants).
L'auteur nous apprend tui-meme qu'en Norvège, do <S43à
)87U,on voit ia consommation d'alcool par < têtediminuer de
') litres :'t 3,'). Dans le merne temps le chifïre des coudamua-
tions s'abaisse de 34!)pour ~.ut)0 habitants à )8U,tandis que
lit population crott de t.305.000à ~.UfH.OOO.tt nous permet
de mesurer ainsi, en un milieu donné, la contribution réelle
de l'ulcoolisme u la criminalité. La criminalité s'est abaissée
seulement d'un quart tandis que ia consommation de l'alcool
diminuait de plus de moitié.
Nous estimons que la lutte contre le crime ne doit pas
revêtir une forme unique, que le soin des enfants négligés et
abandonnes, ta protection du travail des femmes, la reforme
du régime pénitentiaire sont choses aussi importantes que.la
lutte contre l'alcoolisme. Toutefois faire diminuer la crimina-
lité générale d'un quart en faisant disparaitre. ou à peu près,
une habitude contraire a l'hygiène et it l'épargne est un but
séduisant. On conçoit que l'auteur y convie éloquemment et
l'état et l'initiative privée.

C. – /on)(M ~c«:/<t <'«fM/t.

Kut.[:!)MFLOMlAXet Gono CAVAGUHR!.– 1 Vagabond!


(tes fa~ott'f.), t. t, t vol. gr. in-S", 5~ pages. Turin,
Bocca frères, m!t7.

Le vagabondage est une forme de passage entre l'activité


délictueuse et l'activité normale. En iui'môme le vagabond
est inutile, mais non malfaisant toutefois il rompt avec la
vie sociale régulière et c'est par le vagabondage que l'enfant
4'~ ).'AX\t!K!:<)(:«').0(!)urK.tM7
et le jeune homme s'initient Mh) carrière criminel. De plus,
ainsi qu'<))';ttingent'a montre depuis longtemps, c'est eu mut-
tipHant les vagabonds et les mendiants que les crises indus-
tnftieset tes disettes contribuent it t'accrui~sement de la cri
minaiitc. On avait donc les plu's grandes misons de soumettre
ce fait a une étude méthodique en combinant l'investigation
statistique eU'anthropoiogieo'imineHe.Xéanmoins te livre de
MM.Fiorian et Cavagiieri est peut-être ta première étude a )a
(oisspeciate et synthetitjue qui y ait été consacrée; ils n'en
ont encore publié que le pronier volume, consacre ptutot au
vagaboudagoqu'aux vagabonds le second examinera le pro-
btetne proprement anthropologique. Tel qu'ii est, ce livre
constitue nëaumoins un ensetnbte il présente une unité assez
rare dans les œuvres écrites en coUaborution. M. r'tonau a
traité de l'évolution et de ia régression du vagabondage.
M. Cavagtieri u étudie de préférence les moyens destinas it le
prévenir et il a )''te conduit par lit a une véritable théorie
soeioiojtiquede l'assistance.
L'idée (ondamentide. dominant !e livre entier, est ta distinc-
tion d'uu vagabondage normal, physiotogique et d'un vaga-
bondage criminel, antisocial. Le vagabondage est normal
quand il concourt l'activité de in production, anormal quand
il !a contrarie. Cettedistinction resuite à la fois de l'évolution
du vagabondage et de ta comparaison des moyens qui y ont
été opposés par les diverses sociétés modernes aux diuerents
moments de leur devetoppement.
Les témoignagesde ta paJethnutogie, confirmés par ceux de
l'ethnographie comparée, etaMissent que les petites hordes
qui vivent de pècheet dechasse sont perpetucUemeoterrantes;
elles nous présentent le spécimen parfait du vagabondage
normal. A bien des égards, il en est encore ainsi des tribus
pastorales, mais au stade agricole, notamment après )a cons-
titution de la propriété foncière, ta persistance des disposi-
tions a ta vie errante contrarie les exigences de la production.
Le vagabondage criminel apparait; on peut même dire que
ce stade économique est caractérise par )a lutte entre )'esc!a-
vage et le vagabondage, represontt' par t'csctave ou le serf
fugitif. La constitution de ta petite industrie corporative n'ap-
porte à cet état de chosesaucune modincation apprcctabtc, car
l'apprenti et le compagnon sont enchaînes &la corporation à
peu près comme le serf à la g!èbp.
Tout change avec l'apparition de la grande industrie on
A'<.U.Y.tK-t.ST'))t")'')).<)(!)H':H)M)<<KU.K M!)

voit alors reapparattre, &côté du vagabondagematfaisant, un


vagabondage aussi normat que celui des temps primitifs. Lit
grande Industrie a besoin d'une armée de réserve le cit~mage
le lui fournit l'existence de l'ouvrier sans travail est partout
un organe quasi nécessaire de in grande entreprise. Mais
cette nécessité douloureuse n'est ni discernée ni surtout
acceptée dès l'apparition de lu grande industrie. H y a une
phase de transition qu'on peut observer dans la Russie
moderne, qui a caractérise la société anglaise dans les trois
siècles postérieurs à ia reforme, ia France et i'Aiiemage peu-
dant ie xvn"et surtout le xvnf siecte. On ne sait pas encore
distinguer l'ouvrier a ia recherche d'un travaii du mendiant
et du demi-brigand, bref du vagabond parasite. Lu vérité, que
l'auteur n'a peut-être pas assez mise en relief, est que ia pro-
priété foncière, encore à demi (éodaie,conserve ses anciennes
prétentions à confisquer il son prolit les bras du travailleur,
comme le prouve encore aujourd'hui t'exempte de la société
prussienne. en sorte que la liquidation totale du régime
fcodai est ia condition d'un nouveau vagabondage normal.
Ainsi le vagabond est dans une première phase le chasseur
ou ie pasteur nomade, dans une seconde l'esclave ou le sert
fugitif; dans une troisième, qui dure encore, c'est, selon les
cas, tantôt un parasite social, tantôt un ouvrier atteint par ies
rigueurs du chômage.
C'est dans ia période de formation de la grande industrie
que le vagabondage antisocial a présente te maximum d'in-
tensité par exemple, eu France, d'après Necket'0.ut)u vaga-
bonds furent misenétutd'an'estationdansia seuieannée H~.
Mais bientôt les hommes de ia Révolution française viennent
définir la seule attitude que puisse prendre une société à éco-
nomie capitaliste ils veulent à la fois ia répression du vaga-
boud oisif et mendiant qui doit être contraint au travail et
l'institution de secours eu faveur de ceux qui se trouvent
incapables soit de travailler, soit de trouver du travail.
Si maintenant, laissant l'histoire, nous faisons une étude
de ta téjdsiation répressive appliquée au vagabondage par tes
sociétés européennes, nous découvrons une uniformité réeite
dissimulée par de nombreuses différencesde dotait. Or l'unité
des conditions économiques peut seule t'expliquer. Ou a
assuré à l'ouvrier la complète liberté de circulation dont il a
besoin comme organe de lu grande industrie on s'est attaché
à le distinguer du mendiant et du malfaiteur errant, à l'aider,
Ht) ),'A'<XMHS(t<;t('LU).t~rt!.t!)7
non à le punit'. Lit Russie fait exception cite exige, sous des
peines sévères, un passeport de celui qui se trouve eu dehors
du lieu où il est domicilia; c'est que ht grande iudustrio y est
encore dans la phase de formation c'est que les habitudes
créées par le servage n'y sont pas encore efïaeces c'est enfin
qu'elle doit réagir contre les dispositions d'une partie des
races qui )a peuplent ivla vie errante.
A mesure qu'a reparu un vagabondage nonnat tié aux con-
ditions de l'industrie, les sociétés ont associé et l'on peut
mémo dire substitue un régime préventif au régime répressif.
L'histoire de l'assistance publique confirme celle du vaga-
bondage. Une distinction doit être faite entre les sociétés qui
ont subi t'iunueuce de )a réforme et les autres. Les premières
ont de bonne heure créé une assistance publique, obligatoire
et légale, même en faveur des aduites. Hhex les autres, qui
sont la France, les nations de l'Europe méridionale et lu
Russie, les traditions de l'Église chrétienne se sont perpétuées
et c'est &faction privée qu'a été conné le soin d'assister les
gens sans travail. Néanmoins il convient de remarquer que
la bienfaisance secourt plus de personnes en Franco qu'en
Angleterre. 'Notons eu passant que l'auteur sembte ignorer ia
récente législation française sur l'assistance médicale obli-
gatoire.)
Cavagtieri s'attache à montrer par une étude génétique
assez précise et assurément nouvctte que les institutions de
bienfaisance organisées soit par t'~giise, soit par t'Ktat, soit
par les associations privées, ne sont nullement des iiiiialies-
tations spontanées d'un altruisme dont les racines plonge
raient dans le monde animai, mais bien des correctifs ap-
portés aux inégalités d'origine économique. JI proteste contre
l'opinion traditionnette qui en attribue tout le mérite au chris-
tianisme, car ces institutions ou d'autres analogues ont pré-
existé à t'ere chrétienne et ont grandi d'abord avec ta pro-
priété féodaie, puis avec l'économie capitaliste, tt faut
conserver des bras a l'agriculture et il l'industrie et par
suite soustraire des victimes à la détresse. Cet ottice incombe
d'abord aux grands propriétaires féodaux, puis a la classe
qui possède les capitaux. Selon les moments et les régions,
on prend comme agent de distribution soit) Kgtise, soit une
administration publique.
La conclusion est que le vagabondage, distingué de la
mendicité, tend à sortir peu à peu de la classe des faits
44t
ANALYSES.–).'AST))ttOM').i)tf':H)MtXK).LH
tes. tandis nue
i)punissables, par dineronts
que ta société tente uar dttïurouts moyens
de prendre it sa charge les travailleurs errants.
H serait injuste (te signaler dans l'étude d'un premier vo.
lume des lacunes que les auteurs auront sans doute souc! de
combler. Le mérite n'était pas médiocre, non scutoHeut de
défricher cette matière, mais encore d'arriver à une vue syn-
thétique. Visiblement MM. Fioriaa et Cava~ieri se sont
laissés inspirer par la doctrine du déterminisme écono-
mique mais ils u'ont pas été, comme tant d'autres de leurs
compatriotes, dominés par elles au point d'y plier arbitraire-
ment les faits, ti leur reste à étudier le vagabondage anurmat
et criminel, les relations qu'il soutient avec le parasitisme,
les tendances régressives qu'it paratt tnanifestet'. Kux aussi
ils se préparent il rompre avec l'hypothèse tombrosienne, car
un pur lomhrosipn n'eat pas manqué de nous montrer dans
les vagabonds sinon des sauvages, au moins des représen-
i tants de la phase pastorale et de faire du vagabondage un cas
d'atavisme.

Scipio StUHELE. – La delinquenza settarta.)~<~< ~<


<oc<«<~t(t(~ Cn'M«M<<~</(')!Mf~M.Contribution sociolo-
gique..fvoi.in.8°,~ p. Miian, Trêves frères, t8!)7.

Ce livre atteste un effort intéressant dont le but est do


rattacher, par l'intermédiaire de la psychotogie eottecttve,
rauthroputogio crinuuettc il la sociologie. Sighete estime
avec raison que le délinquant ne doit pas être étudie seule-
meut dacs les prisous. U existe une crimioaiite Meute à
taqueite participent largement les itautes classes, c'est ta cri-
m!uatite des partts. Le parti M'estque la secte traustorntce.
Or la secte u une psyehotogie qui lui est propre, la psychoto-
g!e de la foule modifiée par faction du temps et le rote d'un
chef qui, s'it exerce une domination absolue sur ses coreli-
~ionnaircs, est tui-ntOne entieremeut asservi a une idée fixe.
La moratite de )a secte diffère radicalement de ia moralité
privée et d'autant plus que l'extension de la secte est plus
grande. Elle est une condition de la conservation de l'orga-
uisme collectif constitue par la secte. it en résulte que le délit
sectaire a son utilité. S'i) froisse la moratitc privée, il assure
la durée de la secte; or celle-ci est un agent de destruction
ou d'innovation nécessaire à !a vie sociale.
44~ t/xxëK~Kn.<m~t'K.t~'7

La fouie est l'origine de l'Utat, .~n:t't


fnfnttt<tnntt'~t'tt~t't/t.tt
mais par l'intermédiaire
de la secte, de ta profession et de ia classe. La foule et tu
secte, si ou )es compare à l'état développe et civilise, restau-
l'eut un type social et primitif, mais ))ar la m~me elles dé-
truisent des formes sociales et politiques vieillies et rendent
possible t avënementde formes nouveHes.
Nous ne songeons pas a nier le talent dont l'auteur a fait
preuve. 11est d'ailleurs intéressant de voir un iombrosien
seutir aussi profondément l'iusunisance du point de vue du
mattre.
Toutefois la lecture de son livre nous laisse des doutes.
L'muvre se ramené il deux propositions tnaiuisément cunci-
liaMes; ia première est qu'il y a des délits échappant aux
classifications puuates et aux poursuites hontes, les délits
des partis; ia seconde est que ces délits ne sont tels que
comparés aux exigences de lu )nor:t)e privée, car en eux-
mêmes, ce sont des manifestations d'une morale propre, infé-
rieure en qualité à la morale privée, mais toutefois utile et
légitime, la morale sectaire. Mais dès lors pourquoi parler
d'une criminalité sectaire?<!

Ltso FE)Uti\Xt. DeUnquenti sc&ltrt e fortumatt..Sh<-


f/M~<~<M/m/M('Mt<MCt~ e MfM/f (C'<««M< <M~t<H<<f
/M/-
/«<~<7ff<'
CM<<(!«(' Htude de psychologie criminelle et
socinie). i vol. iu-8", 8') pages. Cotne. Omarini e Lon-
gatti, 18!)7.
Le fondateur de ia statistique morale, Quételet, a fait
observer qu'elle n'enregistre qu'une partie de lu crimittaiite.
mais qu'entre la criminalité enregistrée et la criminaiitc
ucculte il existe une relation constante. Cette hypothèse.
nécessaire au statisticien, appelle évidetntnent l'examen.
Toutefois, comment aborder l'étude du problème de ia cri-
minalité oceuite? Les données n'en cenappent-eiies pas par
leur nature même à toute espèce d'analyse ? Lino t-'erriani ne
i'a point pensé, t! y a des faits que ia ici laisse impunis, mais
qui sont pourtant très semblables a ceux qu'elle frappe ils
révèlent donc l'existence d'une ou plusieurs classes de mal-
faiteurs caractériséespur la prudence et l'habileté. Démontrer
l'existence de ces malfaiteurs, analyser leurs caractères, eu
chercher l'origine dans !e milieu social est l'objet du présent
volume.
AtAU'SM. – ).'A.\T«)t«)'nt.f)mR <:M)M)XK).).t! 44~

On peut distinguer cinq classes parmi les délinquants qui


se soustraient & l'action de )a justice punissante 1" les
inconnu: les malfaiteurs connus, mais totérés et par suite
encouragés &cause do rabaissement des mœurs M'ceux que
t'insunisaoce des indices empêche de poursuivre; 4" ceux
qui sont acquittes eu raison de leur prudence ou do icur
bonne chance S" ceux il qui teur astuce ou l'habileté de leur
défenseur évite une condamnation proportionneUe à la gra-
vité du délit commis.
Ferriani estime que l'impunité des délinquants croit avec
le caractère Intellectuel que revêt ta criminalité: or l'impu-
nité est par elle-même une cause de ia muttiptication des
délits, Ici fauteur se sépare de ta doctrine des substituts de
la peine a laquelle il avait cependant élevé un monument
remarqttabtc en écrivant ies .M/tt<w/)Ht fM/Hf/MfnN.
L'impunité de grandes catégories de malfaiteurs suppose
un certain ('tôt de la société et des caractères, une complicité
sociale dont il faut étudier les causes. La cause généraio est
ta substitution des formes intellectuelles de in concurrence
vitale aux formes violentes mais à cote d'elle il faut dis-
tinguer i" une complicité due à la boute mat comprise
~° une autre complicité due à une insensibilité partieiie aux
délits; 3° l'absence d'éducation politique qui porte tant
d'hommes u prendre parti partout et toujours contre les
agents de l'autorité; 4" l'indifférence de ta personne:')tout
mal qui ne ta touche pas directement S' les habitudes pro-
fessionneites grâce auxquelles un boucher est comme pré-
paré au meurtre, un écrivain public au faux en écriture.
Ferriani consacre ensuite ta plus grande partie du volume
à l'étude des formes de la criminalité occulte. A vrai dire,
toutes les classes de faits punissables y contribuent, les
délits contre t'honneur, contre la propriété, contre ta per.
sonne. Partout fauteur s'attache à justifier sa thèse gcneratej J
t'existence d'une correspondance entre la criminalité impu-
nie et les tuttes intettectuettes. L'étude du parasitisme lui
permet de tenter une synthèse hardie de ces divers points de
vue. Il note (faits ta société contemporaine la présence d'une
camorra des parasites, et il cherche à fixer les traits des
principaux personnages qui constituent t'aMtiation, le faux
pauvre, parasite de la charité, le spéculateur délictueux, le
manufacturier qui transgresse sciemment les lois protectrices
du travail des enfants, le propriétaire d'horribles tauieres
t.<<XKH-.tj(nnt.t":)~t'R.)M7

uuatifteesmaisousd'ouvriers.t'entn'prenourd'industriestnsa-
lubres, enfin t'ioceudiairepur escroquerie. L'auteur sait faire
rentrer ces agents de l'exploitation humaine, si diucrents
qu'ils soient les uns des autres, dans une seule classe; it nous
montre les lieus qui les associent et les portent tous :'<chercher
l'aisance ou h richesse dans l'exercice d'un travail Hctif.
Ce livre est loin d'être inutile ù t'antttropoiogie criminelle,
quoique ta méthode en soit peu rigoureuse. La marche
ascendante du detit est clue, aux yeux de fauteur, &t'indut-
'j geueede la société pour des formes de conduite fort scm-
b)ab)esà son activité commune et moyenne. Lu criminatitë
t OHicieHemeut défluie se retrouve ainsi rattachée a t activité
normale et pertnet d'eu reconuattre les troubles profonds.
Toutefois l'auteur n'est-il pas pessimiste à t'cxecs? Hst-ii
vrai que l'élévaliou moyenue de l'intelligence profite a ce
point aux pires membres de la société La vérité He serait.
elle pas que )a justice et la policeont été bien plus exercées
a lutter contre les formes brutales et anciennes du crime
que
contre les formes astucieuses et récentes' Xe serait-elle
pas
aussi que ia peiue, ta coercition agit beaucoup plus efficace.
ment sur le graud criminel que sur le petit
délinquant en
raison même de i'iutettsite qu'on peut alors lui conférer 7
La conséquence n'est-elle pas qu'il faut recourir
aujourd'hui
'aux substituts de la peine?

D. /<
RAFAKL SALILLAS. – Eï delinouente eap&nol. El len.
guaje f/c Cr<wtM<'< c.~<«/Ho/Sfw ~H~/o, i vol. iu.8",
~43 pages. Madrid. Victoriano Suarez, I8Hu.

L'usage ordinaire d'une langue spéciale, t'argot, est un des


caractères qui distinguent le plus le malfaiteur d habitude,
non seulement de l'homme uot'mat, mais du criminel d'occa-
sion. Ou conçoit donc que t'antbropoiogic crimitiette sou-
mette l'argot a une enquête méthodique. La nature de cette
tangue peut donner lieu a deux hypothèses opposées. L'une y
voit un retour aux tangues des races inférieures; l'autre, une
tangue professionnette, partant, une simple variation mor-
bide de la langue nationale. La première thèse est celle de
l'école lombrosienne M. Satittas apporte a
l'appui de ta
secoude une grande abondance de preuves.
AXAt.YSES. – ).'AXT)))()))'Ot.f)fitH t:)))M)XH).).H 44S

L'argot des criminels espagnols n'est nullement une


langue sauvage; plus pauvre que h langue normale, H cor.
respond toutefois nu même stade linguistique, C'est une
langue proft'ssionnette qui exprime, nou pus )'état mentat
des personnes qui ta partent, mais t'nctivité des associations
constituées par elles. Elle tond &un double but r~-('«'M~t'
vivement les actes (tes associés et les ~.m~x< a ta société
régutiero. Dissimulation et représentation, telle est donc ta
formule de t'argot espagnol.
L'auteur a soumis a une étude minutieuse la ~f/w~M/a.
langue des associations criminelles proprement espagnoles et
le (.'«<n~<<, langue des gitanos. t) s'est attac))é à nous
donner un dictionnaire complet de l'une et de t'autre. H
constate ce curieux phénomène; c'est que, grâce à la vie des
prisuos, le Cft/o a rempiacé la ~'Mt«n<«, non sans lui
emprunter beaucoup de tours et de ioeutions.
On le voit, Finterprétation de l'argot divise les anthropo-
logistes, comme font les autres données de t'observation
apptiquée aux criminels, H nous SMnbtetoutefois qu'une
synthèse des deux doctrines est ici possiMe, sinon aisée.
L'argot des malfaiteurs indo-européens reste une tangue
iado européenne; il ne revêt pas, aux yeux des linguistes, les
caractères (les langues parlées par les races noires ou jaunes
l'opinion tombrosienne à cet égard ne soutient pas t'examen.
Toutefois l'argot est l'expressiond'une~octivité d'ordre infé.
rieur, exercée par un groupe parasite~H présente donc les
caractères d'une régression et serait impropre a l'expression
d'idées ou de sentiments sociaux normaux. Il correspond
donc, en une certaine mesure, à l'infériorité psychologique
de ceux qui le parlent. Danstous les cas, ta rotation de l'argot
et de la vie chminctto montre que )e tangage n'est pas un
fait extérieur à lu société, comme le pensent les sociologues
économistes, mais un élément social de première impor-
tance.

~tCËr'OHO. – n gergo net norma.U, net dégénérât! e


net crimina.U (/«~N< c/x'j <M nwmaM.f, les f/~te~
pt ~McnMX'Hfk),1 vol. grand in-8", )8u pages, ~urin, Bocca
frères,-t8t)7.

L'argot, selon Xiceforo, est un moyen de défense; il atteste


ta tutte d'uu groupe humain contre la société ou une partie
446 ).X\HH SOt:h)).'))!t~t'K. tM7

de la société. Ce phénomène présente trois degrés le pré.


mier est une modification de l'ordre des lettres le second
est marqué par ta prédominance de métaphores génératement
hideuses le troisiOne présente un nouveau système do
phrases complètes. Ou t'eut observer ces divers moments do
t'étude de l'argot chex )e coupte amoureux. chez ta prostituée
et te <fM<), dans le peuple et enfin ehex les criminets. L'argot
des ouvriers est un cas particulier du phénomène de ta tutte
des classes. Au contraire, l'argot des matfaiteurs a pour cause
une lutte soutenue contre la société tout entière. )t doit donc
être beaucoup plus développe aussi ta complexité en est-
elle portée au maximum dans le jargon des associations de
mutfaiteurs. tels que les camorristes. les ttabitants des
carrières d'Amérique de la ViHette, les Égyptiens et les
Hottémieus.
Quetques-unsunt voulu voit'dans t'arRot une langue nou-
vetteeu voie de formation. Xiceturos'eteve ttautement contre
cette opinion. L'argot doit s'adapter au milieu social (lui
l'emploie, et ne survit qu'A cette condition; )oin d'être le
Kenne de lu tangue que parieront les hommes de t'avenir,
c'est un cas de régression. L'argot rappeUe tes tangues des
sauvages c'est ta même prédominance des formes concrètes,
le même usage des métaphores. Cette explication trouve dans
le système d'écriture qui accompagne cette langue une cou-
tirmation. Les malfaiteurs qui partent ar~ut se servent, pour
écrire, de hierog)yphes et de symbotes ainsi que les popula-
tions primitives.
Ou le voit, l'auteur perfectionne et complète Ja théorie de
Lombroso sans ta modifier substuutietiement. La méthode
qu'il applique est génétique en apparence, déductive au
fond. Si le criminel est un sauvage, l'argot doit être un
retour à la tangue des sauvages, telle est la formule que l'ou
pose avant t'examen des faits. Mais pour vériner cette thèse
il faudrait établir que l'argot est créé par des associations de
crinucets-néa et non, comme le soutient SaiiHas, par des
groupes professionnels. La preuve tirée des hiéroglyphes
n'est guère convaincante. Les peuples qui, comme les Hgyp-
tiens, les Chatdeenset les Chinois, ont créé le systèmeidéogra-
phique n'étaient rien moins que des sauvages, tdentiner t'état
sauvage et les stades primitifs de la civilisation, lesquels
attestent des formes mentales très élevées, est commode,
mais c'est en abusant ainsi de !'à peu près que l'école !om-
~ALYSHS. – t/~TH~Pf~tHH CMtMiXHU.H 4~77

brosiennes'est
o u'nut si
ot rn'tttnn~Anxint discréditéeet
profondément~îcnt'Attit~~ ~t na ~t* At~~
pu être
accuséepm' Vh'chowde faire unecaricaturede ia science.

H. – ~MM~OM
~«-«M.

PERHEttU et StGHKLK. – CromMhe criminali itatitme


c<«ttM<M ~«~'<'M<tM:.
if'/<roM«/(«'.t Mitan, Trêves frères.
tHUC.
Dans ce volume, dont lu lecture est attrayante et même
eutratuante, les auteurs étudient la crimiuutité itaiit'nne à
l'occasion de plusieurs procès récents dam i'un desquels
t-'errero a figuré comme prévenu Cesprocès ont pour objet
des faits politiques aussi bien que des crimes de droit coin-
mun. MM. Ferrero et Si~'eie out fart d'en faire une sorte
de tableau de la vie morate de t'ttatie, nue étude de la com-
plicité de t'Htat italien. C'est, par exemple, le tabteau du
brigaudaRC, toujours vivace en Sicile et surtout eu Sardaigne.
où t'autoritc traite avec lui commeavec une force sociale, où
l'opinion populaire l'entoure d'une assex chaude sympathie
c'est le récit d'une attaque nocturne dirigée le 13 novem-
bre <894 pur une bande de cent brigands contre la maison
d'un riche propriétaire sarde du bourg de Tortoli, une légcnde
du moyen â~e transportée eu pleine vie actuelle; ce sont les
funéraittes d'un camorriste qui, retire des afïuires criminelles,
meurt entouré de ia vénération publique c'est un crime
d'amour commis par uu pompier napolitain et qui, sans
qu'on voie Lieu qucts traits )e distinguent de cent autres du
même genre, émeut jusqu'au délire la mobile population de
Naptes; ce sont les atroces et iniques applications faites du
domicile forcé à de prétendus révotntionnaires c'est le
procès d'une société secrète résumanttes aspirations confuses
du socialisme italien, sa foi naïve en Marx dont, comme
t'avoue t'errero, les mieux informés connaissaient la pensée
pour avoir lu le titre de son livre.
Cette (cuvrc confirme eu style pittoresque l'enseignement
que donnent les sévères statistiques de Uodio. Elle nous
montre l'Italie soutirant à la fois de la criminalité violente,
dont te brigandage sarde est la plus grave manifestation, et
de ta crimiuatité astucieuse et voluptueuse, réputée compagne

i)~H!.)-i)
)))'oi<t(k't))n.'';u'it !fij<)td'um'jXtUMuitc
in.jtit' put'lu jtuti-
t)<(urY
?
448 L'AXXÉH 1X97
SOCtOUH.tQrK.
de la civilisation la plus ratHnée. Elle nous apprend aussi
que le sentiment de la solidarité morale est en «atie insut!t.
samment développé, sinon on He verrait pas diriger contre
les révolutionnaires et les socialistes tous les ellorts d'une
magistrature parfois complice du I~rigandage. Le bizarre
socialisme de i'ttatieest a lui seul un indice de ce défaut de
solidarité, car, à l'Inverse de ta Frauco, de t'Attemagne, des
Pays-Bas et de t'Angteterre, c'est surtout là où ii n'y a pas de
prolétariat industriel, c'est dans les régions arriérées de
t'Ëmitie, de ia Calabre, de ta Sicile que ce socialisme est
développé. H u'n pas réussi & s'itnptanter dans la grande
ville iudttstrieite de Miian c'est que les classes cultivées ont
couscicucc de leurs devoirs, tundis qu'aiiteurs elles ne
songeut qu'à exploiter les ressources précaires de l'État.

EfRtœFRRtU. – Les criminets da.ns l'art et la littéra-


ture. traduit de t'itutien par Eugeue Laurent, t vot. iu-t~
de la N<M<«~«<'</f~</o)fo;)/«c<'<jH/<'mpo<'f«ft<Paris, Félix
Aican, ~t):.
Taudis que les criminalistes de t'ecote classique étudiaient
les diverses catégories du crime eu t'attribuant à un homme
moyen, les artistes et les écrivains, devançant ta tâche de la
science étudiaient le criminel et recueillaient des observations
précieuses ordinairement faussées par des vues subjectives.
Telle est l'idée generate que Ferri développe dans ce petit
volumeavec l'abondance et la etarte si appréciées des lecteurs
de ses uiuvres principales.
Les arts plastiques ont peint incidemment le criminet-'né.
Les données do l'art sont toutefois negiigeabtes en compa-
raison de celles de ta littérature. Les dramaturges et les
romanciers donnent au criminel la première place. Sans
doute ils négligent les microbes de la criminalité, ces petits
délinquants dont chaque pays civilisé compte des centaines
de milliers. C'est presque exclusivement l'homicide qui les
intéresse. Des cinq grands types criminels reconnus par
l'école italienne et qui sont le criminel-né, le criminel aliéné,
le criminel d'habitude, le criminel d'occasion et le criminel
par passion, la plupart n'ont peint que le dernier. Générale-
ment its ignorent la psychologie criminelle et attribuent au
délinquant les émotions, les raisonnements et les remords de
l'homme normal.
– L'AXTXM'X'OMt!))!
ASAU'SK)!. CKtMfXHLf.)! 44H
Le génie de Shakespearel'a préservé de cette erreur.
Macbeth. Hamtet, Othetio(pourquoiFerri ne cite-t-il pas
Rici)ardHt?) sont les représentantsimmortets,le premier
du crimiuet.ué,le deuxièmedu criminelatiéné. te troisième
du meurtrier par passion;Shakespearevajusqu'à Mousmon-
trer Macbethsujet &t'épiiepsiepsychique,ots'it peintdans
iady Maebeti)ia femmecriminoiie, it ta fait, avant Lom-
broso, plus insensibleet plus froidementrésolue que u'est
l'homme.
Parmi les romanciersmodernesDosto!evskyrivaliseavec
Shakespearepour la profondeurdes analyses,la précision
des observationscontenuesdanslesSnaff <)«' f~h MtMMOM <<<~
mortset la vérité enrayantedu type incarnédans l'étudiant
Raskotnikoiï.
L'authropoiogiecriminelleet ta psychiatriecontemporaine
inspirent certainesœuvresd'Emile Zota, de Bourgetet de
Gabrield'Annunzio.Le JacquesLantierde la /?<<'/««)<(!<?<'
prétend représenterle criminel.né,mais Lombroson'a pas
trouvé le portrait ressemblant.Zolan'a d'ailleurs rien com-
pris aux lois de l'atavisme.De ia psychologiecrhniaette
Bourgetignore les premièreslignes,réellementinférieur en
celaà Gabrield'Annuaxioqui a su nous peindrele criminel.
né sousles habits de l'hommedu monde.
Aujourd'huile criminelrelèvede la méthodescientifique,
non de l'analyse tinéraire. La littératurea une tacite plus
noble. < L'art n'a que tropglorifiéles criminels il faut qu'il
tourne dorénavant sa lumière radieuse vers la multitude
des malheureux.Déjàt'en peut voir poindrei'aube do cette
évolution. L'art qui, grâce à la C«w<fc<'ot!c<<' r«m, de
M" Beecher'Stoweet uux CoM~de TourguenetÏ,a donné
une impulsion décisiveà la consciencecollectivecontre l'a-
bominationde l'esclavagedomestiqueen Amérique et en
Russie, l'art qui, par les .'?<Mt'<'<)<~
</e~<mat~K )Ho<-<<!
de Dostoïevsky,a provoquél'indignationdu mondecivilisé
contre les infamiesdo l'esclavagepolitique, l'art donnera
à la société future, prévue par ceux qui étudient anxieux
t'évotution sociale, la force d'un sentimentcoitoctif pour
combattre l'esclavageéconomique,ia source et la base de
tous les autres (p. H8). <

H.))):))tiME)M.–Ann''<<)"i<)).t!K)7.
4M) t.'AXXt:)jS()t:m).o(!)<!rK.t'!H7

mr mrtnw~w.w·m.u_ -L__u.~
U' DALLEMAnXH. Stigmates ana.tomiquea de la cri-
minalité. t vut. iu.K". paris, Masson et CMuthier.Vinars,
!tt96. – Stigmates biologiques et soctoïoefiques de la
criminalité. vot. in-8". – Thëoriea de la criminalité.
1 vol. iu-8".

Les trois petits votumes publiés par M. Dnttemagne com-


posent en réiditc une seule œuvre. C'est uue vue d'ensemble,
une étude critique générate de t'authropotogie criminette,
une synthèse des résultats qu'elle a douués. L'auteur n'a
pas l'esprit uttitaterat, maiss'il accepte, accueille et coudtio
toutes les vues vraiment scientifiques, il laisse les morts
enterrer leurs morts, je veux dire qu'il laisse entiet-oneut de
côte ta doctrine ctasstque. Sonsouci est de s'c)ever au-dessus
des querelles violentes qui ont cciate au Couvres de Cenève
entre les deux écoles scientifiques, dont t'une cherche
les racines du crime dans t'orgauisme individuel, pendant
que l'autre n'aperçoit que des causes sociales et expUque par
un tnitieusociid modifianteles nombreux stigmates présentes
par la tnajoritc des criminels.
– Les conclusions du premier volume, consacré a l'ana-
tomie dncrhnine), sont surtout négatives. L'auteur est conduit
par une étude du squelette, des viscères, des organes des
sens, des téguments, des membres et du poids, il une double
conclusiou; ta première est qu'it n'y a pus de type criminel,
la seconde est que les tares de ta dégénérescence, les stig-
mates anatomiques s'observent pius fréquemment ehe~ les
criminels que chez les hommes normaux.
DaHemagne s'appuie surtout sur les données du grand
ouvrage de Haer,/.<* ('<'<«)<Mf<au point de CMC <n~/u'o~)«'.
Ce livre, qui date à peine de quatre ans, est ancien si t'en a
égard à l'influeuce qu'il a exercée. Pour ta première fois,
t'ecoteitatienue était combattue sur le champ même qu'elle
avait choisi elle se voyait opposer nneampte collection de
faits authropotogiques, recueillis avec précision dans les pri-
sons de t'Attemagne. L'ouvre de Baer est restée peu connue
en France, et Dattemagne a bien mérité du pubtic en en fai-
sant passer les principaux résultats dans son livre.
Quel est pour t'anatomiste le problème de l'anthropologie
criminelle? C'est de savoir si la structure du crim iuet présente
les caractères principaux, soit des races actuettes les plus
basses, soit des races préhistoriques; c'est encore de savoir si
AXA).Y!:K! – L'A'<Tf)Kf)'f)MntK(:tt)M)S)it.).K 4S~

le criminel partage certains caractères avec les espèces infé.


rieures a t'ttomme. Selon i'écoie italienne, Haurait souvent
te pied préhensiie comme les singes; ta longueur de ses bras
serait supérieure &sa taille, comme il arrive chez beaucoup
de races sauvages où les bras sont ptus longs que les jambes:
il serait prognathe ainsi que les races noires et beaucoup de
crânes préhistoriques; les sutures du crâne présenteraient
des synostoses plus tôt qu'il n'arrive citez les hommes nor-
maux t'ossiiteation s'y ferait d'avant en arrière comme
chez les races inférieures; enfin la capacité du crâne serait,
dans 40 p. tOOdes cas, intérieure a ta moyenne. Le cerveau
présenterait des auomaties, telles que le dédoublement do la
première circonvolution frontale, et metne certains caractères
communs aux mammifères inférieurs. Daiiemague montre
que, sur tous ces points, les observations (aitesdans tes diffé-
rents pays donnent des résultats contradictoires, fi s'attache
surtout à prouver que. te crime étant une manifestation intel-
tectuctie. le type criminel, s'ii existe, dépend avant tout de la
structure et de la capacité crânienne. Or il conclut
1° avec Ladame qu'il n'existe aucune anomalie constante
dans la capacité crânienne des criminels *,etque quelques
cas isotés de types anormaux dans les séries extrêmes ne
constituent pas une vraie atypie. Le volume du crâne ne
diffère pas du tout dans ta très grande majorité de celui des
non-criminets. Jamais on ne pourra conclure &la non.cri-
minaiité d'après la grosseur du volume de la tête, encore
moins distinguer par ta des catégories spéciales de délin-
quants a 'p. St): avec Debierro < que le cerveau des cri-
minets ne présente aucun type pnrticutier, aucun caractère
spécifique et les fréquentes anomalies atavistiques que veut
y voir Lombroso, lorsqu'elles existent, n'ont aucun carac.
tère de cause à eitet

H. L'étude dos stigmates biologiques et sociotogiques est


ptus féconde en n'-suttats que i'étudeaaatomique. Ou voit se
dessiner non plus un type zoologique, mais un type tnorat et
social, manifeste moins par les traits du visage et l'allure du
corps que par la conduite, par la taçon de réagir sur la
société.
H suftit à l'individu, nous dil l'auteur, de se conserver et
de se reproduire. Les stigmates anatomiques et
physiologiques
affectent ces deux conditions. Mais les animaux se conservent
4S~ L'ASSIS SOCMLOtttQt'K.M')?

et se reproduisent sans former la plupart du temps des


groupes sociaux étendus, La conservation et le progrès des
sociétés ont donc des couditions propres. L'absence de quel-
qu'une de ces conditions constitue le stigmate sociologique, it
se ramené a !««<~fff'oH, laquelle est totale ou partielle.
L'inadaptation partielle est relative a la race, à ta nation, à
la famille, à l'individu l'inadaptation individuelle a elle-
mempdeux tonnes extrêmes, la méconnaissance de la len-
teur de i'évutution et le misouéisme. La gravite de lu conduite
criminelle répond aux différents degrés de l'inadaptation.
Les inadaptés ne sont point tous des criminels, mais tous
les critninets sont des inadaptés, depuis le voteur homicide jus-
qu'au criminel politique qui sacrifie sa vie a ses convictions.
Les stigmates sociologiques Mese présentent que là ou exis-
tent des stigmates biologiques, parmi lesquels il taut compter
les stigmates psychotoniques.
Les stigmates biotogi<)uesproprement dits sont l'analgésie,
la disvutaerabitite qui t'accompagne et enfin le défaut d'inhi-
bition. L'auteur estime comme t'eeote italienne que le cri-
minet a une sensibilité moins développée que l'homme nor-
mal, en d'autres termes qu'il est accessible a des classes
d'émotionsmoins nombreuses, en revanche que cette sensibi-
lité incomplète est plus irritable, ptus impulsive, moins aisée
à mattriser.
Les stigmates proprement psychologiques sont avant tout
l'aversion du travail et l'imprévoyance, puis le défaut d'atten-
tion, la faiblessede l'invention, la faiblesse des sentiments de
famille, l'absence de sens moral.
L'auteur, vu la brièveté de son œuvre, n'a pas cherché à
montrer la dépendance des stigmates sociologiques à l'égard
des stigmates psychologiques et de ceux-ci a t'égard de la
classe inférieure mais le lecteur quelque peu habitué à la
psychologie y suppléera aisément. On sait quels liens étroits
unissent l'attention à l'inhibition, le travail a l'attention,
l'adaptation sociale au travail.
La lecture de ce livre contribuera beaucoup à la diffusion
de l'anthropologie criminelle transformée en une simple
application de la psychologie expérimentale et de la sociologie
comparée à l'étude des criminels.

IM. – Ee troisième volume du savant belge est consacré à


noe revue des doctrines professées par les anthropologistes et
AS.U.Y!t)M.– ).'AST)tM')'()t.<K!tR
CH)MtSR).).R 483
I_ ~u 1_- _Lu'I. 1 'i_11.
les sociologues sur les criminels. L'auteur prétère l'ordre
logique l'ordre historique. 11étudie tes titéories qui, dans lu
genèse du crime, accordent lapréduminanceaulucteur indi-
viduel (Lombroso, Benedikt, (!!trofalo),cetlesqui t'attribuent)
au facteur social (Tarde, Lacassagne et l'école do Lyon,
Orchausky, Haer, Naecke et la nouvelle école attemande).
celles eudn qut teuteut une syuthese des vues opposées (ex.
la théorie de la dégénérescence, celle de t'infuutitismo, enfin
la théorie a la fois anthropologique et économique d'Enrico
Ferri). Cependant les variations sont étudiées historique-
ment.
Sans aucun doute il y a quelque rapport entre l'ordre
logique et l'ordre historique. 11faut que les antithèses se
soient d'abord heurtées, pour qu'une synthèse puisse étret
tentée. Néanmoins ces écoles qui ont toutes une conception!
commune, la notion du déterminisme scientiRque,participent,
toutes aussi aux metnes idées directrices toutes admettent te
déterminisme psycho-physiologiquedes actes humains, toutes
admettent la solidarité sociale et la possibilité de l'étudier
scientifiquement sur ce point Lomhroso et Marofato ont
toujours pensé comme Tarde et Lacassagne, et, comme
E. Ferri le rappelait dans un article récent sur le Congrès de
Genève, il est faux que i'ecote italienne ait jamais contesté
soit le rôle du milieu physique, soit celui du milieu écono-
mique. Seulementl'école italienne a pris pour point de départ
le darwinisme; cite y a vu non une simple hypothèse, mais
une vérité démontrée, c'est pourquoi elle a identifié sans hési-
tation le criminet-ne à l'homme préhistorique et au sauvage
actuel. Là sont sa note propre et sa périlleuse originalité.
Ajoutons que les quelques lignes consacrées par Datte-
magne aux travaux de Baer, de Naeckeet de Koch ne peuvent
guère donner une idée de t'importaace prise par t'écoto atte-
mande, et de l'influence exercée depuis quelques années sur
la psychiatrie criminelle par ses représentants.
Ces réserves faites, l'ouvrage de Dallemagne présente une
série de notices claires, suffisamment complètes et aptes à
initier rapidement le lecteur aux discussions et aux travaux
de l'anthropologie crimineUe. S'il passe ainsi cette science en
revue, c'est d'ailleurs pour en mieux indiquer les lacunes et
en mieux formuler le problème fondamental.
Elle débuta par une théorie du type criminel fondé sur des
caractères anatomiques. Ce type était présenté comme un cas
4S4 ).'AX:<)!H!M)(:tf)).()~t~'K.)tM7
d'atavisme, comme la réapparition d'une variété des races
inférieures au sein de la société civilisée. Mais )a critique
obligea Lombroso à modifier ses vues, à abandonner i'idée
d'un type anthropologique opposable à celui des races nor-
males. it manque au typctombrosien lu persistance, lu régu-
larité, l'hérédité, commele rappelait l'opinion de Virchow*·
)p. 4~. A côté du criminet-né, Lombroso a donc ptacé te
fou morat, t'épiteptique. le criminel d'occasion, le criminet
par passion. L'œuvre de Lombroso était née t avec plusieurs
tares originelles anthropologiques. Htte versait dans l'erreur
des classiques qui avaient érigé le crime en entité juridique.
Puis, après avoir englobé la collectivité des erintinets sous
une seule rubrique, ettc commit ta faute de paraître étudier
et caractériser exclusivement le criminel à t'aide d'uae série
d'attributs, les attributs anatomiques. Elle conclut impru-
demment u l'existence d'un type criminel auquel eite s'efforça
de ramener toute t'armée des délinquants. (p. i7).
t! est impossible à la critique de ratifier ce jugement. Lom-
broso a été, avec Comteet Marx, la personnalité ia plus hau-
taine de la science contemporaine. Qui lui fait une objection,
même une objection de fait, devient indigne d'être discuté.
Debierre et Naicke foMt-itssur les crânes des malfaiteurs ou
des fous moraux des observations contraires aux siennes?`l
Debierre et Xa~ckedeviennent aussitôt des hommes au-dessous
de la moyenne'. Virchow appelle l'anthropologie criminelle
une caricature de tu science Virchow est donc convaincu de
H!<A'oH<w«', c'est-à-dire de démence sénile. Lombroso n'a rien
concédéà ses adversaires. Ses variations apparentes sont des
conséquences de sa théorie du type, théorie dont I)altemagne
cite précisément ta formule. Le passage insensible d'un
caractère a un autre se manifeste dans tous les êtres orga-
niques il se manifeste même d'une espèce à l'autre; à plus
forte raison en est-il ainsi dans le champ anthropologique où
la variété individuelle, croissant en raison directe du perfec-
tionnement et de la civilisation, semble effacer le type com-
plet. Ondoit accueillir le type avec la même réserve qu'on ID
met à apprécier les moyennes dans la statistique.

tt) < San'bhe!nMt))f fd inftfxnntnsiente<))'))'


<t)tt'xi!!t
<:mttittn~'ht)<U!)V<t
se noi «-<:n<h'ssi)nu
!<cu')):t a t'u!!))in<)''n'.
prendt'ndot'' «'fio.o)h'jnn-fM
sul
obbieziotti ''hf. ri t)tu"t'ut)onotttitt)mottoal ttisotta')';))!< (-otua
tttt'di)).
NM't-tfe. Xakar)'wi!):i..
Mt')uuv)-i'r.)h'))i':rn', ~Lttttthfo-o.
i«.<ct)'t-M.erie~,
voi.Il. p. 9t.)
AXALY-!Ë.<. – t.tXTHXtn'U).')'.))! t:K)MtXHt.t.H 4S5

Aussi le problème a.t-i) été pour Lombrosode découvrir


les anneaux qui relieraient le criminei'né à l'homme normal.
Parmi les auteurs des crimes privés, i) u d'abord découvert
l'épileptique, le fou moral, puis les criminels d'habitude,
d'occasion et de passion. C'était trop peu lu criminalité poli-
tique lui a revoie d'autres anneaux il en demande mainte-
nant a la criminalité occulte.
S'il n'existe pas de type criminel, s'il est impossible égale-
ment d'identifier, comme l'a fuit Benedikt, le crimine) et le
neurasthénique, faut-il se rallier soit aux vues de Tarde, soit
Acelles do Lacassagne, faire du criminel un produit social et
conclure que < ies sociétés ont toujours les criminels qu'elles
méritent? L'auteur constate la prépondérance de ce point
de vue dans lu plupart des pays d'Europe, mais il ne peut s'y
rallier, vu que les stigmates de dégénérescencesont beaucoup
plus nombreux chex les délinquants que chez les hommes
normaux.
Il admire )a synthèse exposée dans la S<!CM<of/<f f<'t'M<Hf~<'
d'Enrico t-'erriet y voit t'exposele plus scientifique et le plus
méthodique des opinions de l'école positiviste (p. i93).
Le crime serait l'ellet do conditions anthropologiques,
physiques et sociales. Le facteur individuel seul permetd'ex-
pliquer pourquoi dans un même milieu et dans les mêmes
conditions de misère, d'ignorance, d'éducation nulle ou viciée,
sur 1UUindividus M)resteront honnêtes, S préfèrent le suicide
au crime, 8 autres se font mendiants. !<deviennent aliénés et
~Senfin délinquants. Chaque ordre de causes intervient diffé-
remment dans chaque catégorie de délits. Lescauses sociales,
qui prévalent dans la genèse des vols, ont beaucoup moins
d'influence sur celle des viols ou des meurtres.
Toutefois Dallemagne ne peut se rallier aux vues de Ferri.
La généralité de cette théorie, t tout en !a soustrayant aux
objections et aux contestations, ia soustrait également au
domaine de la criminalité; car tout acte està ia fois résultante
de l'organisme et du milieu, et le crime, en restant dans la
règle commune, ne s'cn trouve pas plus expliquépour cela
Cette critique n'aurait quelque force que si les organismes
et les milieux ne comportaient aucune différence, aucune
variation
Quelle marche faut-il doue suivre? L'auteur rappelle que
les besoinsconstituent les éléments toujoursactifs qui cons-
tituent la trame de notre vie nutritive, génésique et psy-
4SC L'.tXX){KS()t:tf)Lut!t~rK.t)tt)T

chique Maisles besoins sont modifieset spécialiséssous


t'influencede révolution individuetteet du milieu < l'en-
semblede ces modincationstraduit l'adaptation ou i'inadap-
tationsoustoutes ses(ormes inadaptationque permettent
d'étudierles stigmatessociologiques.
Lesdéviationsmorbidesdu besoinpeuvent servir de base
a une étiologiefonctionnelledu crime Elles permettent
d'on déterminerle véritablefacteurbiologique.
Dela résulteuu programmed'anthropologiecriminellefor-
mulétrès clairementen ces termes
Envisageri'évoiutiouindividuelle et l'évolutionsociale
commesubordonuéesà trois ordres de facteursque, fautede
dénominationsmieux appropriées; nous appelonsnutritifs,
génésiques,intellectuels.Hamenertout acte normal, iudivi-
duel ou socialà l'action plus ou moinsdirecte de l'un deces
trois facteursou de lu résultante do plusieurs d'entre eux.
Rechercherdans les actes pathologiquessociaux les dévia-
tions morbidesou tout au moins anormales de l'un ou de
plusieurs de ces facteurs. Comprendredans ces déviations
tout d'abordles effetsde la non-satisfactionpure et simple
des besoins,ensuitela non-satistactioud'un besoindéterminé
auqueldes circonstancesparticulièresont impriméun carac-
tère qui peutle rapprocherou l'éloignerconsidérablementdu
besoin normal, physiologique.Enfin, rechercher dans les
états dégénérésou déséquilibrésta filiation des anomalies
successivessubies par l'un de nos facteursou de plusieurs
d'entre eux, anomaliesdont !a résultantefinaleconstitueou
engendreles états de dégénérescenceou de déséquitibre-
ment. ·
'Ut')f:MHSECTtO!<

SOCIOLOGIE ÉCONOMIQUE

t. – THXofUHSÉCO~OMtOUKS
!'iH')).t''MX';0)sSt]t)A!H).

~M~MC~'OM.
It ne serait pas possibte, ni du resteconvenableau dessein
de ce livre, de passer eu revue ici toutela très abondante
littérature économiqueactuelle.Pourtoutesles études toch-
niquessur desquestionsspéciales,tellesqu'eu ce momentle
métattismemonétaireou le protectionnisme ou t'agrarisme,
pour tous les travaux plus concretsqui concernentla tégis.
lation économique,projets,résultats,critiques,pour toutes
les nombreusesrecherchesde faits, statistiques,monogra-
phies, etc., accumulationméthodiquede matériaux pour la
sciencede demain,on no peut que renvoyeraux publications
appropriées.Maisles probièmesgénérauxde l'économie,la
portéed'ensemble,la méthode,intéressentla sciencesociale
tout entièreet ont peut-êtrebeaucoup&tirerd'elle. Pour être
surtout spéculatif,cet ordre de travauxn'enest pas moinsfi
tort condamnépar certains, laissédo côté par beaucoup
d'autres lesétudesplus concrètesou plusspéciales,la simple
observationmôme,impliquent,qu'ellesle veuillentou non,
une solutionau moins provisoireà ces problèmes,ti est légi.
timo,en marchant,de se demanderoù t'en va; et, de fait, on
va toujours quelquepart, pourvu quet'en marche.
Quelest l'état présent de la théorieou des théories de la
valeur? Qu'ya-t-itd'acquis,qu'y a.t.ii a rechercher encore
et peut-êtreindéfiniment,touchantla nature et touchant la
mesuredela valeur? 9
Eu quel senset dans quelle mesurela science
économique
M8 t.'A'MKK .<u):)~)."(i)Qt.H. t<7

actuelle peut-elle fouder dos systèmes pratiques tels que sont


les systèmes socialistes '??
Quelle conception de principe est essentielle a tu science

économique en tant que science soeiate? Kst-ette ta science

primitive et tondamentate, lu vie économique <'taut ie substrat


et tu condition de toute ta vie sociate, ou est-elle dépendante
de la science sociale générale, ou même en quel sens et il
quelles conditions est-elle une
science sociale '?1
Telles sont les questions que nous donneut occasion de poser
un certain nombre d'ouvrages récents'.

A. /.« <'«~«)'c<la M)<'sKt'<'</<'


la M/cur.
Dott'" BKHARUI. – La legge del Valore seconde la dot-
trina deMa UtHitA Limite (~(t loi </c <« r«~«t' w~M lit </o<
«-«'<~ <'«~7;'<t-' /«(t<). Uutogna, Gartigiititil e ngti, ~8:)5, in-8"
Ml p. Œstratto dai numeri di settembre ed ottobre i89S dei

f/Cjy~ A'COOOMt.<<<
<t'«)<'MM/<'

On a beaucoup écrit, en ces dernières années, sur ta théorie


de ta valeur'. Ce mouvement d'études est du saus doute à

ili Xuus avon). D'-nni i-uos )a t'ttbri'jM'' ~«'fM mt rrt'tMin t)~tnhn' ')'"u-
YtTi):< ')"i «"H!' sunt parvL'aus et 'lui n~ Mtt~'ht'ut pas ttUt );t'undt'!<
<jm.~ti«ns j)rA-t''<)t'nt<<.
f~~ AjX)' )t's uuvntt! i"tt')aot<'Htam <h' )tt'n)!<'r. Cf'MM(A'!«<M t'u/
M'<f/.tcA«/~i)fMt'e.f!<T) – t.. \Y<)t'tM. t't'')n«tM«' po~~t~Mf /'<ft'< t87t.
Md.t!<8U. StKtttcy Jt'vu)))!, T!t<)t- o)' ))t))iU<-tUc<'ot)"")\. )8Tt –
X''unmm). n'<'t'/M'/<M/W<7«~f'Mnt/tf'yft/r'* <)'m< h' /f«Hf/t«('/t do Mch't)-
))''t'ft:– Le n)~mt'.<?)'Mnf//<f'?f</<'<'('oMi!K'«'~t<<M/MfA<'<Ti)ttitW)t. t)!8U;
.) peut '-it'-r Putxtiti!. )t'f<'f. /'r<-«KM</.tW«'t'<. )ttM). (:))H')f.t'A~Mu.
/;A'/ n~ t'a/Mf, Xt'w Knxhmdt't'. juli )M!!t. – Yo)))'t)t<«)r~. /M/emu «/ ca~o
;v/H<«u </< ~nM/M:<f<n~.)tnh<j<tn'. )S!H. – Von Wic~er, t'f~t'MM~ </<
t)'f)-<M. \Vi'')t. ))û)<h'r. )SSt. – f~' tn't))' ~f MH<a;<cAe n'f~/f. Winn.
BntUtoftHt'r, ))t(!H. – L'' ))h''Mh-. ï'Ac /A<< o/' )'«/«< Atnuds of Uff tmtt'ri-
ciui At'inh'nn-. )!im. – t)u)nn-)t.t\tt-t'k. <t)'K<)f/:t?f/<'</<*<'77«'«nf des tf't't't-
A<t«~<(-/«'K ~aff-f-)''(-)-/<<. JahH.. t'.nat.);. u. Stat. X. t- Xtt) )!').. )K8K.–
Lt* tttUm'. Ad. U')' thut!: ) ~f(M<r~'<<'<-4«t'/)t/M- .S<«MhM't.<.tm.c/f«/'<en.
–W'<t))'u''tc/tff t'out U'fr/.X~'it"')). ). <). ~<!)<)H)t~' StM~tswisit.'tt~t.'ttiift.
XXt) lid.. tS!t)i. –t!ar)))''r. t.'etf<'</«' Mft/«'e .\«ft«'f/m<)'cM<tM))'<t<'MK</f<'<'<-
B<'t'a<'<!Xt<'Aft;;HMH 'ff r'')'!H-ttt<'(<<'Mftt tt'<')'(&<'a'ir<. Xt'itich. f. )t. )tt'i!. St.
Wis<. Ktiitt. !!)')t!t))in)t. H'<'<'«/'Mf't<'M. H'fr~/Mft:. Jtthrb. f. txtt. <h.)<.
u. Stttt. X. t- X\'). )t.t. t8!t!i.– Wick!.)-)..«/)/<f<~< «y f<W)oMfca<.S<-t<'n<-e
t. ~fotfMb of //<<*<)' o~ )''<f«< <!)!«!. Lot'ift. ta /mr<H del <'<«<'<'
Mf~(~<wmMfM<< t/«/f<M<. An'hhi" ~iuh'ti' XXV))t. – Le m~th' ~0 .S<M'~M
aMf<t'Mt'«,ttimi t'Kcunootia [tutitit'~ tmttth~ia. CX. –Gt-iuiMtti, X<<)'<aM-<-
«fM M<a /f0ff<t </<< t'u~~ in //«/fa. Mihm't. tS89. Mot~aotui. <'<tM/f<-
<<<(/"nM«.t<<)rt'M <<fMa/«)f'f'MfMt'f<to<'<' <)<~f<tc''<f)'< )<'t/t«M<.Mihn". ))<!<*).
t-'htow. ~<t<d!t attt' ttfn ~'e)'«'f'/t-< X''it'-<;h.f. <). );<'M)oteStautsw)!
AX.U.YSM. – TttKnXtKS ticoXOMtQL'H-i 4M

l'apparition,à peu prèssimultanéeet d'ailleursindépendante


en trois pays', d'une ingénieuseet séduisantedoctrinequi
se dit nouvellelet se prétenditdéHaitive,la doctrineappeiee
de i'~<<«<'<tM< ou encorede )'«<<<<? /<M<t/fou de t'xtt~f'
m«~tK«<<
Depuis l'origine de la réflexion écononique, io principe de
la valeur oscillait outre le besoin humain, cause et tin de t'éco.
nomie, et t'etïort pour satisfaire ce besoin, moyen de t'éco-
nomie. Le besoin étant mesure
par t'utitité ou propriété do le
satisfait-e, il était tacite do voir que la gradation de la vateur
ne répondait pas à la gradation de l'utilité d'où une correc-

~ttO. Lehr. U'f)' <;ffM:utW M. ~ffto. Jttto-)). f. tmt. <h'k. u. Stat.. X)X.
<)!)?. – Kmuu)-i!\tt!.ki, ~ff H'fff (M der Mo<tWmH'«-«f/ Wion. itjt!)).
– Sttjtin". /.a ~<'<a (M m/uff e /M
<c~f fM m'Mf'MM Nt<u, <!iurn. dngti
Efonontisti. tH!). – .\U!<j)i(i- u. t<i))'n. rtt<t'.M<-AM~fM <?&<-)-(lie r/tMff
<<M <'<'eM<-<t,
[.cij)Ht{. Uum-k'-t-u. Hum)!)nt. ))!?. – Xuckerktind). &«' MeeWt
f/M PtVMM Ktt<tf~OMt/ft-ft-M<'t'actfttcA<<~MM~ <<<'<'
~C/ft'C/tf/tt'/tt'M ~t)/<0<cAf
/«K'/ </?;-/.{-An', U'ij)i!ic. Omtt'kt'r u. nutn)))')). i88't. – (iothu )). t'<'t<'t-<<-
Nff/t'o~MMj/M )'t<MA«/V<t'<<c<- rAfiff'/tf't (Kt'ititt-t~ )':t0~)!n)t)):n xu <)et)
WetH<;t!t')-u Y<M)M<tf);, Knit' !hiit))<' u. Wimt'r). t~tta. ))<!)().– ))it'ti!t't.
~te Ma~MC/tf H'ft'tfofif M<ft<die Mcot'tf t'um Hf-Mt:MM<;M. Jattrt) f. nat.
()<-k. u. Ktitt. X. f. )).). XX. t8!)0. ).))). X«'' Mo~w/tt-o H'f< M.
<t.t</<Mf~. t).i.).. :<). M.).). )8Ut. -.t)i~-n..<h)t)s.M (- n)'unns..).U.hf.
AM~(it/. Xtt';kwk)ttx)<. <))!.).. f. M. XXt: <k t'M)tt-n.)).id.. 3 t'. B.). Il;
d.' HO)t<n.H;t\\Mrk.Utid.. X. t'. tht. XXt t't a f. ttd tU. – Ytt~-ttti. <to<-«t
(Mt'a/u)- Hotna. )mu. –Atf.o.it!. ~< ~<'o<-<f<Mfa<t«-<'n<'<<-f<N)tt'ot'))/et'MO,
Torint). iSttU.– Smart..t« tM~'M/«t-<;oM lhe MMt-~ u/' M<«f. t~tndon.
MactoiUao, Xi'J). – f~' tu.~m.S<Mf/f«ft) t't.-onomtM. )~n<)"M, Mat.'ttti)))t<t,
<X9S. <:):n-)f.!<? M~t'tn«~ )ff«M~o'(/ «~ r<f~f. Ya)'i M'-wh-w.nov. t8U2. –
Fieh'ir. ~f<M?ma<«'«< t'MCM/~o/t'oMjt<M~f t/t~t.t/ «/' m/M<-«Ht/ /<tw<M.
Trat))!tt<'Uut~of tht: <:<jtttt<tit-ttt A'-adtitoy. ju)i )!t9~. – T&KK't. ~.o <fo''<«
MottOMtCM<<<ff'a~o</(/ttw/M:fMK, Hmtttt. t8'a. –Wi<-ks.')). <f)' n'<f/.
~th<< und «cM/e n'tfA tien KfMOM ..Y<'<«~aMAct<nMMfA<'M r/tfut-tfM.
<<!tm.tsax. – )h-tthti, M)'«<<))'<'e ~« f!t<na«)-f&tt:;o))f ai tfoi !!f)-)tM)en<«<).
Mari. )8iM. – Xatt'aki. /.f<</ffo<'<f<<<' /<; ra/fMf <t;tt jimguf rm~ Ka<an.
i893. – Mu' \'<tm-, .Ma<'j/<Mft< «<f/t<y aM</ t'«/M(, Qu!trt''rh Jouraid "f
Ht-ttnutttit's. Aprit tK'JÏ. – h<' tucott'. JusMaf) <A<'ot'yoy fM/Mt.AtUtnt): u)
atm-fit-an Aoutt-nty. n"v. tttUS. – \'«i({t. Cef nto)t<'M<M<fe<)'<-<'<</fr
~a/f)', Xett~-h. f. d. KM. St!Mtt!wi: ttM. – KKMtoann./<' AfArf wm
tt'~<. ttatutturjt. t!i'J:t. – tUn'.t S.t)'')-t)<)./.H ~fun'M<M n(/«<-f <)f«« Afo.
ria </<f </<)MWM<' et (M ~t ecoHOtMt'c;. «otoa. )X'.)t. – S. hr.ldcr. ~ff
M<)-~f/<a/t'c/<e t)'«'<. U~rtio. t'nttk<tt)«-t- u. Mah)t)h-(-)<t. )HM. – Voit
fKtitt tuu~ tm ptmcijtjtux tt'ititM d't~-uhunm')n)ti(h)m'.
~tj Y. tM uuvt'a);fs citt' d'; MM. Me)W'. Statd'-v Jfv~ns et L)''t)M
WattU!
<2)On a tnontt-M <h')mi.<~u't')))' M t~tuvatt d~jA. u p'-n ).n'.< )'xp)t<'it'
nx-nt. t-))M!t'A-.motttiftt. tro~ jx.tt .-<)))))))von Thum-n. (:r. \)itx. 7*/taHe..t
tt~W/t/eAM r~<<c/«'M M)i<(/M U'<-)-<AM)W< <')«/~)' «?«<'<-<'<)
.<M<o<eo.
M<t!)e,t8i)6. )'t And)(.'r. AM 0)')'/«)M <<MjM<'«tH)fM)f <«< fM .<'7nftf/Nf,
t'ari- <8')7 tj). <0:t.jU)i~.– rn )n)<m.'m-f)-.u)'t!<. thtj.ttit, <;t.;« At)..)tta):n.-
UuMen, !i()ttt v);tt)c)tn'ttt eit<t cuttmM'd< pn~ura-ut-
4t!U ).'A'<\)iKSUOOt.Ot,)~')!i'<t)7

tion tirée de l'idée de rareté. Mais les choses avaient-elles


vraiment une valeur indépendante du fuit de l'homme ? ~était-
ce pas ce quet'homme ajoutait aux choses qui en faisait tout le
mérite? ~'était-ii pas ptusoxact doue, la notiond'etîort réduite
&celle de travail, de rendre compte de la valeur par !o tra-
vail? N'était-ce pas la production qui réglait les conditions
de t'échange plus encore que la consommation? – Peut-être
alors la solution était-elle d'expliquer diHérennnent lit valeur
d'usageetta valeur d'écitauge, éclectisme facile, adopté souvent
en somme par l'école, mais peu soutenable rigoureusement.
De toutes façons, la science devait etie traiter des besoins,
des efforts coacrets et particuliers, et non plutôt du besoinet
de t'eibrt? C'était une tendance légitime que de rechercher
une notion avant tout objective. U semblait qu'une notion
psychologique, comme était le besoin ou i'euort, ne pouvait
être considérée objectivement. L'utilité restait très voisine du
besoin, et n'était-etie pas, après tout, affaire d'appréciation ?
Le travaii au coutraire n'otïrait-it pas l'avantage de pouvoir
être défini extérieurement à ta psychologie, indépendamment
de l'appréciation subjective de l'effort, grâce à la réduction
de tous les travaux à un travail dit normal 'ou socialement
nécessaire), et a la mesure de ce dernier par le temps? – H
y avait enfin ce danger que la méthode d'analyse, forcement
suivie en ces recherett~s, pouvait, a t'iusu même de ceux qui
t'employaient, conduire a ce que f/<'r««f('<* ta valeur, plutôt
qu'à co qu'elle (liait. Fort de la théorie déduite, on pouvait
prononcer de la fausseté ou do ta vérité dos estimations
actuelles. Ainsi i'enort des tendances conservatrices était de
se couvrir, et celui des tendances réformatrices était de se
fonder par une doctrine de la valeur aussi solide et consé-
quente que possible.
Sur ces quatre points essentiels, nature du principe de la
valeur, unité ou duatité, objectivisme ou subjectivisme.
portée dogmatique et pratique, la théorie nouvelle' bientôt
appelée théorie de t'ccote autrichienne) prenait position.
Elle fut d'abord un retour très net au principe de t'utitité,
mais avec une addition, selon elle, décisive. Les besoins de
l'homme ne sont pas indéfinis a satisfaire; une chose utile,

0) (h<"n tf)ttv)'ra<)'<''x))<)!st')~)))t't)t)Uti'.<
t'h<-]:ttohot-thtwt')'):.art.
«'<*<f)ttM<t«'We)'&K<t < .S/Mn/M'M.tMMf/M/YfM, t'tt
)t)Ht) f)'Ut)':Ui.< OtUf
d'' )''x' a))nh'itttf)ns
<<NtM )!t«<')'«<'
<A'coMM)M'~o<<<«y«f, tS'4; <'tct~'t
0). <!)()< ~'tMc</)M<<<-«)tHM(tepe<</t~Me.
U'c'). t'ttft! )))'?.
AXA).MKX. T)tKOHtK!< AcfMoM~rKA 461

c'est-à-dire propre à satisfaire des besoinsde l'homine, peut se


trouver eu quantité telle que, ces besoins intégralement
satisfaits, elle ne soit point épuisée (t'eau à la rivière) la
chose n'a alors aucune valeur (ce qui est en trop n'a même
rigoureusement pas d'utiiité); maiselle en prend une, dos que
!a quantité eu étant, pour une cause nu pour une autre,
limitée (une provision d'eau dans le désert), ne permet pas
ta satisfaction intégrale du ou dos besoins correspondants, et
qu'alors l'homme, appréciant la qualité relative des besoins
ou le degré de la satisfaction, renonce progressivement aux
satisfactions les moins importantes ainsi la chose utile en
quantité limitée a une valeur qui est mesurée par l'intensité
du dernier besoin satisfait ou du dernier degré de besoin
satisfait. Ou s'expliquait d'ailleurs que le travail ait été pris
pour le principe de la valeur io travail étant pénible, les
produits du travail sont eu quantité limitée, et ils sont d'or-
dinaire utiles. H n'y avait qu'un principe de la valeur,
t'utitité(au sens précis qu'on a dit); et la valeur objective
dans t'échange se fondait uniquement, en dernière analyse,
sur la valeur subjective dans l'usage. – La doctrine était
ainsi en même temps une francité reintroduction du facteur
psychologique, mieux encore du facteur psychologique indi-
viduel et concret on partait des besoins (et non pas même
~t<besoin) de t'homme isolé ou suppose tel, et de la satisfac-
tion de ces besoins; et c'est par dérivation et complication
qu'on expliquuit les phénomènes muitiptcs observes dans
l'économie sociale. Mais, a moins d'un moyen de donner,
à ces estimations atlectives où s'arrêtait t'analyse, une com-
mune mesure, ou seulement une normate, toute valeur ne
devenait-elle pas relative et arbitraire ?Et que fonder là-dessus
que d'artiticiet dans le présent comme dans t'avenir?
M. Berardi, dans sou étude, fait surtout une critique de
détail, et néanmoins il s'adresse à la doctrine de l'utilité-
limite, et non à tel ou tel de ses auteurs il y a dès lors cet
inconvénient que, souvent les détails différant, sur les points
délicats, d'uu auteur à l'autre, la critique peut manquer ou
de justesse générale d'application, ou de cohérence. On peut
regretter que l'auteur, avec la connaissance qu'il a des textes,
n'ait pas commencé par dégager des variations individuoites
l'essentiel de la doctrine autrichienne, pour le soumettre
ensuite à un examen approprié.
La réforme terminologique de la nouvelle école, d'abord, ne
4M L'.tXX)iES)H:)u).<MiHft'H.<M7

paratt pas heureuse M. Berardi elle ne fait qu'apporter de


ta confusion dans un gt'oupede notions claires et acceptées de
tous les ('conomiiites'. La prétendue vateur d'écimnge objec-
tive n'est pas autre chose que le prix, et ta valeur d'échange
subjective est une simple extension de lu valeur d'usage. U y
aurait avantage à reprendre, au seus classique, les notions de
valeur d'usage, de valeur de coût ou coût, et do valeur
d'échange ou de mérite. H faut maintenant distinguer
soigneusement l'étude de la cause de lu valeur et celle de la
mesure de la valeur. La cause de ta valeur, suivant t'ecote
autrichienne, est ta limitation quantitative des biens. C'est ta
une triple erreur. Ce n'est pas la limitation des biens qui
cause )a vateur, mais le fait qu'Ils sont appropries. La limita-
tion est, en tant que la vanité de t'honuneest satisfaite dépos-
séder des choses rares, un motif, entre d'autres, d'utilité; et
cela, Turgott'avait déjà vu. Enfin c'est confondre ta cause et
la mesure de la vateur t'or vaut plus que le fer parcc qu'il
est en moins grande quantité, mais pourquoi l'or et le fer
valent-ils quoique chose'? – La valeur est mesurée, dit
l'école nouvelle, par l'intensité du dernier besoin satisfait, ou
du dernier degré de besoin satisfait c'est la toi de saturation
ou encore d'utilité décroissante (la raison est est etîet que le
besoiu diminue à mesure qu'il se satisfait, et passe enfin à la
timite zéro), it serait exagéré de soutenir directement t'in-
verse, c'est-à-dire que c'est ta vateur qui mesure t'utitité-
limite. Mais il faut remarquer que la théorie a confondu
décroissance de satisfaction ou de jouissance avec décrois-
sance d'utilité t'utiiité proprement dite reste constante. Mais
surtout il y a un postulat caché à la doctrine c'est que l'uti-
tite-timiteest supérieure encore au coût de production, sinon
la valeur d'une chose serait inférieure à son coût de produc-
tion, ce (lui ne peut être un état normal. Ainsi l'utilité-limite
est supposée coïncider avec le cout-timite; mais cottesuppo-
sition est arbitraire – Arrivant enfin à t'échange, la doc-
trine autrichienne explique la fixation du prix par ta théorie
du f<M~f'-<<H«t<' 'on part de l'hypothèse d'un vendeur et d'un
acheteur eu présence pour que l'échange soit possible, il
faut que le vendeur estime subjectivement l'objet moins haut

<t!)h'mn)i.Op.c)< p. 5<'tG.
A/ p. it-tf.
M.. p. ït-N.
AXAU-K-i.– T)))!('M)K<
)!(:nXttM)<~)
K.< 4<M
I.- 1
que ne t'estime l'acheteur, le prix sera compris entre ces
deux estimations; puis on complique t'hypothese de plus eu
ptus pour arriver au cas d'une série d'acheteurs At, A,, A:
At. A:).aux estimations subjectives décroissantes, en pré-
sence d'une série de vendeurs H,, H,, M,, lis, M, aux esti.
mations subjectives croissautes le prix sera compris entre
une limite supérieure formée par l'estimation du dernier
acheteur admis à t'6chant;e. A~par exemple, et par celle du
premier vendeur oxctu, B,. et unelimite inférieure formée par
l'estimation du dernier vendeur admis à lu vente, iï,, et celle
du premier acheteur exclu,AI; c'est ta le coupte.timite). Mais
d'abord, cette théorie ne fixe que deux limites maxima et
minima, et ne nous dit nullement en quel point determiut',
entre les deux, se fixera le prix. ni pourquoi en ce point.
Elle suppose, de plus, que les évaluations personnelles sont
connues de tous les intéresses, ce (lui ne se produit jamais
en fait. Matin on donne comme fixant les limites du prix
le dernier acheteur admis ou le premier vendeur exclu mais
ils n'acquièrent cette qualité que par ta fixation du prix
n'est-ce point là un cercle Les influences sur le prix recou.
nues par la nouvelle école se ramènent en somme &t'ofîre
et à ta demande. M. Berardi n'a pas de peine à critiquer la
prétendue loi, si elle prétend exprimer un rapport de pro-
portion inverse. Mais autrement, que signifie-t-ette sinon
que le prix se fixe dans la zone où t'onrc égaie ta demande?
La cause de ta diversité des prix est donc autre que l'offre
et la demande L'ecote autrichienne avait encore ta
tâche de fonder la vateur des biens productifs, ou des choses
qui ne servent pus directement satisfaire nos besoins. La
théorie devient de plus en plus compliquée et on ne peut ici
ta suivre dans le détait; le dessein en est de montrer que la
détermination de la vateur provient toujours en définitive de
futilité limite du produit dernier d'usage immédiat tte pro-
</t<t<Httff)et d'établir, contre la doctrine du coût de produc-
tion, que le coût est déterminé par ta valeur, au lieu de la
déterminer; et pourtant nos auteurs s'efforcent de ne pas
condamner intégralement cette doctrine, de prouver que cela
revient au même, et enfin ils admettent des cas où s'applique
la loi du coût. Mais ces tentatives n'ont pas do raison, s'il est
vrai que t'utitité-timite, le couple-limite, le produit-limite

~j Xt'tunt).0~. <-<<{).39-M.
464 L'AxxXK somuLo'itQt'K. <M7

mesurentrespectivementla vateur des biens immédiats,le


prix dans t'échange,la valeurdes biens de production.Ces
tentativessontvaines, si elles prétendent conciliert'incon-
ciliable,la théoriede l'utilité et la théoriedu coût, le plaisir
et lu douleur
Est.itbesoin de dire que ces critiques de M. Merardi,et
d'autresencore,moinsimportantesou moinsnettes,n'out pas
toutes ta même valeurLes meilleuresvont se retrouver
aitteurs et d'autre part il en manque peut-être,et des plus
décisives.

LEOvosBUCtt. Intensittat der Arbeit, Wert und Preia


der Waren (L'eberdie Elementeder potitisebenOekono-
mie, Erster Theit~.(/«f('H«~~ ~« ~'«r«<<,r«f<ww ~<'<'j-
lies
M«rf~<w/MM. Elémentsd'économie'politique,)"' partie.)
Leipzig,Dunckerund liumblot, t896. t vol. in-8",i4Up.
En présencedes imperfectionsde la nouvelle théorie, ne
couviendrait-ilpas de revenirà cettequ'ellea prétendurem-
placer,à la théorie do la valeur fondéesur le trayait? C'est
sansdoutece qu'a penséM.von Buchqui t'a repriseoul'avait
laisséeMarx.Marx lui avait rendu le grand servicede le
débarrasserd'uncercle les produits du travail tiraient leur
valeur de coûts de travail ou frais de production,lesquels
étaientestiméseux-mêmesen produitsde travail Marxavait
retiré le travail du circuit de t'échangepour y mettreseule-
ment la forcede travail, marchandised'ailleurs unique de
son espèce,capablede reproduireà l'usageune valeursupé-
rieure à sa valeur d'échange.La théorie marxiste marquait
de plus un puissanteffortvers l'objectivationdo la valeur:
non seulementce travail qui, incorporédans les choses,en
faisaitla valeur, n'était pas le travail dépenséen fait et par
les individus,maisétait te travailsocialementnécessairedans
un étatdecivilisationdonné; c'était encoreun travailmoyen
ou normaloti les travaux différenciésétaientramenéset qui
dés lorsne se mesurait plus que par le temps. – C'estpré-
cisémentsur cette réductiondes travaux différenciésau
travailsimpleque Marxs'est insuHtsammentexpliqué; et le
point est pourtantessentiel.Il cstdiHtcitede soutenirque les
travauxdiversne comportentpas des différencesde qualité

())Berafti.Op.<< )).M-7S.
AXALySES.– T)t)!UK))MficoxOMtQt'K-! 4(R;
il y a ta des tors un passaged'une diitérenctatton
qualitative
itunediftérenciationquantitativequi demandeli être éclairci.
Si t'en ne tondeici une méthoded'estimationeu
ta qualité, i'évatuatioude tousJe!}travauxeu quantitéde
tempsde travail
simple n'est plus qu'une appréciationarbitraire et relative,
et du coupl'objectivitéc!)orcheedisparait. Le titre de
t'ou-
vragede M.von Buch pouvaitlaisserpenserqu'il
a ceproblème on est déçu. s'attaquait
Lanotiond'intensitéde travail,dontil
part dèsle début est
en efïot purement quantitative.Le travail humain étant la
traasfortnationdel'énergiepotentielledo l'organismeen tra.
vailmécanique,riuteasité se mesure la
par quautitede travail
mécanique fom-M: dans l'unitédo temps Et c'est sansdoute
un euortd'objectivationque de ramenerle travail
humainau
travail mécanique,et encorequedese demandersi la
physto-
logie peut déterminerla quantité de travail normal'. Mais
le plus intéressanteût été de nous montrer
que la diversité
des travauxse raméneàdesdegrésd'uneintonsitéainsi
et que 1 élémentpsychologiquede tout travail définie,
humain peut
ainsi être négligéau profit de i'éiément M. von
Buchne s'est pas donné cette tacite:tel physique".
qu'il est, son travail
revientsimpiementà changerl'ordre de
grandeurpar lequel
sera mesuré le travaU,supposéiui.môme une grandeur a
mettreau lieudu temps la force ou &combiner
les deux; maisde prouver que lemécanique,travail humain peut être
trane commeunegrandeur,et quelle
condition,il n'est pas
question.
C'estpeut-êtremettreplus de portée danscette
rechercheque l'auteur n'a prétendu. méthodique
L'objetvéritabledo son
étude parattetre d'établir, commeunevérité
trop
méconnue,quel'intensité dutravailvarieon raisonlongtemps directede
la part de l'ouvriersur ta valeurproduite,eten raison
dela durée de la journéede travail Lalimitede inverse
l'intensité
du travail (optimum)serait doncatteintela condition
l'ouvrierellt le produitintégrâtde sontravailet que
que la durée
'<)VunBuch. Op.<-<<p.2't/M)M<m.n.;Mnitt.t dfla valeur, «)(.pt<
?) M..)).4e~MM!!fM.
(.t)&.qui ,t .tu))c..)M.t
i.t.)i.ja<..).~MM eMl'unité&ht..a.)t.. il
réduitesth.travailsoci.).i,ph.ui. suiv.nt)..<..ivi)i~i.s.
r~u' ~n~
luclàaucundegré. qui ~M'~
(t) Von
-1~ Buett,
0~.eM.,p. 96-99.
)-Uu)M:MEM.–A))nw!,o<-tu).ttf)T.
4<M t.oiH soout.OtUQfË.
)??
de la journée fut normale (c'est-à-dire vraisemblablement de
8 heures). Cette loi est-elle, dans la pensccde l'auteur, fondée
deductivemeut ou induutivement ? Ceta u'est pas très clair
pour )u seconde proposition. l'hygiène nous apprend que ta
timitation du temps de travail est la condition d'uue bonne
santé et par conséquent d'une force maxima pour la pre-
mière, on peut dire que te bien-être du travailleur est la cou-
ditiond'un bon travail. Mais l'auteur s'efforce de prouver(lue
les faits concordent avec ta théorie. I! croit pouvoir mesurer
t'tntensité du travail par !a quantité du produit (quand les
conditions techniques sont egatesd'aitteurs). et ta part del'ou-
vrier sur la valeur produite, par ie rapport du salaire aux prix
des marchandises vendues; ta durée de ta journéeétant connue
d'autre part. it vérifie, principalement avec les statistiques des
industries du lit en Angleterre, en France, en Amérique, en
AHemagnc, si les rapports des ehittres reets se rapprochent
des rapports calculés mathématiquement', tt serait superflu
de montrercumbicn cette méthode est peu rigoureuse et con-
tient de chances d'erreur, et qu'eu tout cas l'observation est
trop étroite pour fonder une génératisation.
Quant à la correction au marxisme, elle est plus apparente
que réelle; lorsque chez Marx t'attongen'ent de ta journée de
trayait augmentait ta plus-value, il était entendu que le tra-
vail lie variait pas d'intensité et une variation d'intensité
~quantitative) pouvait toujours s'exprimer en variation de
temps du travai) simpte". La loi de M. voit Buch signifie seu.
lement en somme qu'en fait, actuellement, les pays où les
salaires sont les plus eieves et la journée de travail la plus

~/).<-f7.p.TU.
~) \'<)t)ttMc)!.
M.. p. t~o-t:)'
.:<!M. Vf'ntttf'h <t''ti''))t p:t!' uu fut))))))'suftistmt<)'*)Mttx~ttu'<)M
)~ jfh~.Yah)'- t'-httiYt-. – Cn'-tnnr'' <'rit)~U!- tint)' it M)tr\ ptit-aftjo'M
t~nth' La fun't' ')'' )ra\ai) h'' '.am'.ntrtn' un'' nt.t)'h!m')!t'j)Kn'"
!))t'<;tf<t)'t (luela))h)\i.<ion <'nwn't'xi''j)oh'ttti<')!t'
t)'*o'~tt'<!t'f<i"H.u"t)tg
t't)')t'' t'fxmx~Kn))))-(')' tth''r!mi~')' Lit tMtxtonoitthfX < )''<
Mti<m')))<fn
fun~'')'' tnniii) 1-,t fait ')'' )'r!tntti.<n)' <)<!)n' ht htti' <t<')r!H'<tit
tu'
))ro\'i''))t 'h'
j'fts )'~ntuit.< ) tt)traviti).Mais. H t' rn))tp)<)'<wr;<i'' poh')).
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ti)'))<' ~dutn'L'muu)~' ttan<m<tv~<'t'v~tt' tf !.<'mit hutt
))![" j))U!- Utm
tt))U'<)!m')i~Kt)"")) )'iu)h' <t)'x"t. le tf'~Mi)huxoun))' <'ttn:'i.-tf
j.ttH<U!' 'jH'it ' )"t)~'rit Ut)!' fon' n.ttMr''tt''<u')t)th)nc.t'hit«i')m'uu hioto.
)ti';)H'. t'"<'t')isi<m <)f~'<'):rc<'r ~M..)).M nott'L
(t; ~t. v«n)tu'')tj).u')<- tt'tn s<-ui'')t)t'"t
<)nsafoif'.t)M)<de ta jxn-t~ur
)<'jtfmhtiL ')'' tt'initi)ti'tt'oatttu )'"uvri''<M<n'' )'ti)«wti~n <!<: <'t'tt<'
)t)H't
p~mtt <'ut))')'U')' ' ') il 't f')r)tt'hoii'~iht''
')<)<' ))tv~nution abso)))''
'tu
'-ahitfittt' <)'ab')t'<tt'ouvrx'r 'mtattt'') p)tt!!'jm*lu \nt'ia)iot)n.'tNthM.
AXA).YS)ii!.–T)))!t)M)ti!!jj<:OXOU)U)Kt 4(M

courte sont en même temps les pays de la productivité la


plus
grande mais comme ni les influences sur ta productivité
autres que celle de l'intensité du trayait, ni les causes de
variation d'intensité du travail, autres que l'élévation do la
rémunération et )a durée du travail journalier, ne sont suui.
samment étiminées, ce rapport de concomitance apparaît
comme contingent et ne sutnt pas à fonder un
rapport de
causalité. En tout cas )a théorie de ia valeur n'en est pas sen-
siblement modifiée dans l'esprit, sinon dans la lettre, et le
défaut de la doctrine marxiste reste entier.
Voir Sorel, ~< f/o'n/'t'cMwjMfc (/<-lit )'a~'«~,Journal des
Économistes, IMH. Loria, /.« (<w'<(tMat-~<<M</t'<M/of-c.
Riforrna sociate, mars )897.

DrJmtAx~Ks WEUXICKH. Derot~ective Wercund Prêts.


CrundteRung einer reaten Wert- und Preistheorie. (t«
f( <t'pn~. Fondementd'une théorie positive
fa/f)«-o~'<'<'«t'<'
de la valeur et du prix.) !eua, Gustav Fischer, )89t!, ) vol.
ia-«''J)6p.
Ou distmgue courammeut.tes theunes subjectives et les thm).
ries objectives de la valeur, et l'on n'a pas tort. Maisil faudrait
savoir ce que l'on veut dire. Qualifie-t.on la théorie autri-
chienne do subjective, parce qu'elle foade lu valeur sur le
besoin ressenti et lu satistactiou éprouvée, et lu théorie
marxiste d'objective, parce qu'elle l'explique par le travail
incorpore en quelque sorte dans les choses? it est aisé de
montrer que le travail ne peut pas plus être séparé de t'enort
et de la peiuo, que, de l'avis commun, l'utilité ne l'est du
besoin et de la jouissance. Si subjectif veut dire en somme
psychologique, et objectif, qui no l'est pas, il n'y a pas de
théorie de la valeur qui au moins implicitement, et par la
racine, ne soit subjective en ce sens. Mais, au point do vue
de la connaissance, phénomène objectif signifie uniquement
phénomène soumis à des lois, phénomènequi n'est pas arbi-
traire, qui n'est pas individuel, et phénomène subjectif le
contraire. Assurément nous ne connaissons ou ne croyons
connaître comme phénomènes subjectifs que les phénomènes
psychologiques, et il demande à être montré que, contraire-
ment aux apparences, il y a des phénomènes psychologiques
objectifs cotte confusion do notions n'en est pas moins ittc-
gitime et mauvaise. Toute théorie de la valeur, au moins jus-
408 L'AXftfH !'0<:Mt.(M:WH. <tM7

qu'ici, et autant qu'on peut le concevoir, est psychologique


mais les unes rendront compte de ta valeur par les apprécia-
tions ou estimations soit du la satisfaction du besoin, soit de
la peine de i'cHbrt. individuelles et arbitraires; d'autres
prétendront q'ue ces appréciations ou estimations sont, au
moins pour une part, soustraites &l'arbitraire personnel, et
s'imposent aux individus. Lit théorie autrichienne ne nie pas
que, dans notre état do civilisation compliquée, dans notre
société soumise depuis longtemps au régime de t'échange.
nous ne recevions ies évaluations toutes faites et ne les
employions même contre notre gré personnel mais elle
est rigoureusement subjective eu considérant que ces valeurs
socialement établies ne sont que le résultat d'une combinai.
son et complication d'estimations individuelles et arbitraires
passées. La question de la vateur objective ou subjective est
donc excellemment posée par M. Wornicke en ces termes
< Entre les valeurs individuelles d'uue part et, d'autre part, la
valeur sociale et le prix (<<<*r fo~«'<'WwA«/)<<c/<f )<<*<'<MM</
~VM),y a-t-it opposition ou rapport d'influence réciproque*?
Lavaleur subjective, individuelle, est-elle la valeur originaire
dont la valeur sociale est dérivée comme une résultante
d'estimations particulières ? ou bien est-il a penser que la
valeur objective sociale (et le prix) est la valeur f fnot-t à
laquelle se rapporte n po-t'oW, en la modifiant, ta vateur
individuelle subjective'? M. Wernicke prétend constituer
une théorie objective de la valeur, en prenant comme position
que l'ensemble est un donné a pnon' par rapport aux indi-
vidus, qu'il existe vraiment, non comme une simple fiction,
mais comme une puissance rcetie extérieure aux individus,
et se trouve avec eux en influence réciproque'. »
M. Wernicke veut donc montrer que la valeur et le prix
dépendent de facteurs s'imposant aux individus comme
donnés dans la société en tant que telle, et de facteurs égale-
ment objectifs, des conditions de la production. H se place
d'abord au point de vue de la consommation et de la répar-
tition. La psychologie sociale peut dresser une liste gra-
duée des besoins de l'homme en société, et distinguer deux
caractères des besoins qui sont en raison inverse l'un de
de l'autre, l'urgence (/)nK~t'<'Mf~)et l'importance (<rt<

(h Wt't-ni'ti'(~. '< )'.


(~ A/ )'.
A't.tLY!)K!i.–T)t)!)m)HSÉt;<)XOtt)Ot'K'< 4<M
<ff< L'étude de la production montrera que les moyens de
satisfaire nos besoins'sont en quantité limitée. et d'autre part
la qualité en est en raison inverse do la quantité. Ces moyons
do satisfaction ne sont pas laissés~ notre arbitraire, du moins
pas entièrement, Ils sont mesurés et limités par ie revenu de
chacun (A'tMA'OMtMtCM',qui dans notre société est exprimé en
monnaie. L'emploi do ce revenu est en grande partie soustrait
à notre arbitraire individuel pur les conditions sociales,
usage, habitude, mode, etc. et i) l'est d'autant plus que
notre revenu est plus faible les revenus limités à ia satis-
faction des besoins matériels (nourriture, vêtements, loge-
ment.) n'ont presque aucune indépendance d'emploi. Aux
classes de revenus correspondent des moyens de satisfaction
proportionnés, qui s'étendent à plus ou moins do besoins'.–
Au point de vue de la production, la loi fondamentaleest que
les moyens de satisfaction sont en quantité d'autant plus
limitée que les besoins satisfaire sont plus éicvés. II semble
que l'utilité ue corresponde pas a la rareté mais il n'en est
rien, si l'on fait dépendre de l'importance des besoinsle degré
de l'utilité. Ou montre aussi qu'il la rareté correspond à pro-
portion la difficulté d'acquisition, et à la difficulté d'acqui-
sitiou correspond exactement le travail. Nous subissons ces
conditions de la production de biens, elles nous sont données
et ne dépendent pas de notre arbitraire. Il ne dépend pas
plus de notre arbitraire de nous soustraire dans une société
déterminée au régime économique d'ensemble, à l'attribution
qu'il implique, division du travail, etc. Tout cela est ce que
l'auteur appelle l'ensemble des chances naturelles en y com-
prenant la technique*. 1.
La valeur objective et le prix dépendent de ces facteurs,
t'état donné des moyens de satisfaction, et l'état donné des
chances naturelles, do la technique et du degré de civilisa.
tion. Pour un bien considéré, elle sera déterminée parce que
peut y consacrer de son revenu la dernière classe capable de
l'acheter (classe de l'acheteur-limite, ~-<'K~«/f~<<M~,cela
combiné avec la nécessité normale de couvrir, des frais

(t) Wfnm'kc.Op.<'< jt.):i-tT.


~) 0 (tit)tt-i)x d'' tmun'r t'n fnint.'uii!
uxf tttutu'-tion.AluM~t.MdM
<-)t'ott)))t<KJ<
<)<-Net/Ht-~
au M-t)!.<tct'uutt'Ut- )t<-t-
M)ttfi!itdie Suttox'-
<t<'r!h'M''tttf!unftsntittt!t..
(~. <-< tx. «puf<t
((.tout)
~3)M.. p. S6.3t.
(~ M..)).34-tt
470 ).X\)5K<('t:)<)).(niH~t'K.tX''T

do production, le plus cher producteur'. –M. Wernicke


insiste assez longuement sur cette adaptation & sa doc-
trine de lu théorie des frais de production. Les frais sont
en rapport d~thu avec l'utilité du produit. Les frais de
capital se laissent réduire en travail, au temps de travaH de
reproduction. Le travail qualifié, exerce, le travaH intettec-
tuet même sont réductibles au travait manuet ()e travail
exercé est égat au salaire plus les frais d'instruction). La
rareté est équivalente au salaire du travail ordinaire, plus le
salaire du travail exercé spécial, plus les frais d'un travail de
reproduction conçu, parfois impossible'. Ainsi t'importance
des besoins, ta qualité des travaux, la rareté des biens, lu
grandeur des frais sont en proportion directe entre elles On
voit que tous ces facteurs sont objectifs – La thcurie sub-
jective de la valeur n'est pourtant pas sans utilité elle
explique les estimations de valeurs faites subjectivement
dans t'economie isotee; et elle explique les fixations de prix
individueites fondées plus ou moius sur le prix objectif, etc.
Mais ces variations individuelles s'annulent en masse, et
n'ont ainsi pas d'importance pour l'économie sociale.
Le principal mérite du travait de M. Wernicke est peut-
être d'avoir bien pose le problème. tt n'est point surprenant
que ta solution ne soit pas du premier coup tou. à fait heu-
reuse.Ce qui s'y trouve de plus remarquable, bien qu'insuni-
samment mis en lumière, est, semble-t-il, d'avoir fait
dépendre ta valeur non plus seulement de la production, ni
de la consommation, ni des deux a la fois, mais encore et
surtout peut-être de la répartition. La théorie du travail ou
de la production oublie qu'on ne produit que pour quelqu'un.
La théorie de t'utitité ou de la consommation néglige, pour
l'étude de ta satisfaction des besoins, celle des moyens de les
satisfaire; on a bientôt fait de dire qu'ils sont en quantité
limitée il faudrait voir que, dans notre société au moins,
cette limitation provient souvent du régime de la repartition
ptus que du lait de ta nature ou des conditions de la produc-
tion. Toute demande n'agit pas sur le marche économique,

0; W.-rnirft.(~.t- t:i.t7.<'t:.)-T.t.
(j; M.. [).:<7-!t~.
(3)M., )). et )).t)!i.
(~ L'anteurfuitt'ut-on-Hn''th'ri'' ')'' lu t'ah'ut'''n n)u))))<m!
vtdu)<ri![.
t'!<)<;tai)
t)<H)!! <)'* il est inutih'<)')ttn'r.
ta'jUt'Hf
AX.U.YSKS.
– T)t)it)M)M
)!<)\()M~rt!S 47)l
mais seulement ta demande admissible ô t'échau~o, c'est-ù-
dire cette qui peut payer il se peut que des besoins superfi-
ciels soient satisfaits il Rrandsfrai)!,quand. à coté. des besoins
essontiets ne le sont même pus au moindre prix Ln valeur
des choses dépend non seulement de l'appréciation subjective
des individus, mais de lit part de revenu disponible de ceux
qui t'apprécient. Le régime de repartition économiqne étant
évidemment un {acteur social, c'est ta une raison de plus
pour étudier socialement ie problème de lu valeur. Mais,
cela mis à part. les grosses ditïtcuités du sujet lie sont-elles
pas tournées un peu trop tacitement' Si ta valeur dépend en
dernière analyse soit d'une appréciation de besoins, soit d'une
estimation d'cfîorts, le dinicite est de .fonder ou de justifier
objectivement une comparaison et une gradation des besoins
ou des efforts, c'est-à-dire uneopération essentiellement
qua-
litative. M. Wernicko se donne tout simplement ta notion
do qualité objective en question, torsqu'it série les besoins
suivant leur importance ()r<cA~f)<) autrement que suivant
leur urgence (~to<y<<'<<t<'«), seule notion objective non arbi-
traire en cette matière les besoins impoptants sont ceux,
dit-il. qui cunccrneut le dcvctoppementdes individus et de
la communauté l'égard de ta civilisation et de la puissance
Mais qui en juge ainsi? L'auteur reconnatt plus loin
que
pour les pauvres gens ce sont les besoins matériels ou pres-
sants qui sont en même temps les besoins importants.
L'appréciation donnée est-elle donc le fait seulement d'une
classe sociute déterminée, peut-être même seulement de cer-
tains individus? It manque ici t't'tude de psychologie collec-
tivo ou sociale qui seule pourrait fonder une théorie sociule
et, par m, objective des besoins. – Les moyens de satisfac-
tion, dit M. Wernicke, sont d'autant plus rares que les besoins
sont ptuseteves ou importants, car c'est une loi fondamentale
(un fait naturel, dit ailleurs fauteur; que les biens sont eu
quantité d'autant plus faible qu'ils sont moinsgrossiers, plus
beaux ou plus nobles. D on vient encore cette notion de qua-
lité, sinon de l'appréciation des hommes? Et c'est une ques-
tion de savoir si cette coïncidence de l'estimation et de la
rareté lie tient pas simplement a ce que la rareté est une cause

(t) Voit')')'i!))n'ionif'rrA't't n)!f)Ut'<')t!.<'


d'tttn'j))'t~ anuh))!))''
thnit
Attdtur,Ot-tf/MM f/HMCt'f~Mmc <t'/a<fM.t/~m~ttc,jf. ~:tt)-X!t.
t~!WctttK'k)'. Op.cil., )). )<i.
47~ L'.tXXt!KSfK:K)).<M)~rE.)X't7

d'estimation (par l'intermédiaire de l'intérêt personnel ou de


la vanité des hommes).- La rareté correspond a l'utilité, dit
encore M. Wernicke, pourvu qu'on tienne compte de degrés
d'utilité selon la dignité des besoins l'or est ainsi pins utile
que le fer, si t'en considère que le besoin d'or est plus ramné
que celui de fer. C'est ta simplement transporter dans la
catégorie de l'utilité la notion de qualité Introduite dans la
catégorie du besoin. En est ou plus avancé ? – Toute la théo-
rie du coût est encore sujette à ta même critique. Toute
théorie de la valeur est, au moins par le fondement, psycho-
logique si l'on veut qu'elle soit objective, il faut lu faire
dépendre d'un facteur psychologique objectif. Un facteur
~c/M~!(/<(t'.Mfit~, s'it en est de tels (distincts des facteurs
individuels. s'imposant comme donnés chez les individus)
remplirait cette condition. Mais qui nous le définira.'.1

RUDOLF STOLZMANN. – Die Soziale Kategorie in der


VoUMWirtacha.ftsIehre. ). Grundtegeuder und Kritiseher
Tbeit (/.« <<<yo/<' sociale </a~M/« ~<'«'/<fff/f /'(w~m<c M-
c«~< 1"' partie Principes et critique~. Berlin, t'uttkamer
u. Muhtbrecht, t896,11 vol. in-8", vtt)-4~ p.

Il faut distinguer, estime M. Stotzmann, de la catégorie


purement économique ta catégorie sociale A une
époque donnée, de l'état donné des ressources natnrettes,
des forces de travail et du développement technique dépen-
dent la quantité et la qualité qui peuvent être produites des
biens capables de satisfaire les besoins humains c'est ta le
domaine des conditions purement économiques. Mais toute
économie collectiveest de plus soumise à des influences d'un
autre ordre qui tiennent au fait de la vie en commun, du tra-
vail en commun, aux conditions historiques du développe-
ment social, à t'état juridique et politique. Ces conditions
sociales sont, comme procédant du fait de l'homme,variables
de leur nature, au lieu que les éléments strictement écono-
miques sont relativement constants; elles doivent donc être
l'objet d'une étude spéciale, puisqu'elles contiennent en elles
toute la possibilité des réformes. La véritable méthode de
l'économie nationale doit tenir un compte égal de la catégo-
rie purement économique et de la catégorie sociale elle se
garde par là d'une part de tomber dans l'utopie, d'autre part
d'oublier que la production n'est pas une fin en elle-même,
Aif.U.Y' – TtUtOHtKS ~)MMtQt'KS 473

et que le souci de l'homme et de la œttistactionde ses besoins


doit rester le principal. 1.
M. Stotzmann a entrepris de montrer l'importance et la
(éconditc de cette introduction de ta catégorie sociate dons !a
science écoxonique. Avec ce premier volume, ii veut traiter,
dans cet esprit, du concept fondamental de l'économie: de
ta valeur. Mais tes trois quarts de cette mutre très com-
pacte et peu dégagée sont remplis par un historique long et
tratnant, qui passe en revue les diverses théories de ta valeur
sous trois grands types théorie du coût du travail avec
Adam Smith, Ricardo, Stuart Mitt et les théoriciens socia-
listes qui se rattachent ù eux. HodbertusetMarx thcorie qui
combine )a valeur d'usage et tu valeur de coût, ayant son
origine citez les physiocratesetsedéveioppant avecJ.-B. Say,
Hennann, Scttaeffte et Knies (ce dernier tient une grande
place dans t'expose); théorie enfin de t'utiUté-timite, rappor-
tée en grand détail, d'abord d'après Menger, puis d'après
Buhm-Bawerket von \Yieser. tt est clair que ce u'est pas
ici le lieu de reprendre et de suivre avec M. Stotxmann tout
cet historique de la question, mais il faut noterque l'exposi.
tion des diverses doctrines, quoique consciencieuse et témoi-
gnant d'une érudition estimable, est peu claire, peu uette, et
en somme peu utilisable. Elle est accrue souvent et surchar-
gée des théories du capital, de l'intérêt, du crédit, de la
monnaie, sans doute très voisines de la théorie de ta valeur,
mais qui gagnent &eu ~tre distinguées par t'analyse seientï-
fique. Enfin la critique est fréquemment métée et confondue
d'une manière gênante avec l'exposé.
La quatrième partie, intitulée ~)<Mmw<'n/<M)tt<n~ '/M' posi-
f<r<'K~c&Ht.Mf, est encore, en dépit du titre, plus critique
que dogmatique, ou plus négative que positive pour une
bonne part. La théorie propre a l'auteur demeure assez con-
fuse au moins dans l'exposition qui nous en est donnée. Les
points les plus nets et les plus intéressants sont ceux où elle
s'oppose à la théorie autrichienne. Elle lui reproche en somme
principalement de demeurer dans l'économie individuelle, et
d'être insuffisante et mal (ondée dans J'économie sociale.
Est-etteméme exacte dans l'économie individuelle? Person-
nettement, nous continuons de graduer les besoins au-dessus
même du besoin correspondant à t'utitité-timite nous attri-

0) St'tktuann.Op.c~ )).8.
4744 ).'A'<\)!H!.t)(:)«U)ti)OCK.)8')T

huons doue an-dessus de i'utitite-limite des valeurs que l'utl.


iite-limite n'explique pas. Htcnnn n'y a-t-il pas interversion de
la cause et de l'eltet? Ce n'est point parce que l'utitite-tinnte
est grande ou petite que chaque bien do lu provision et ht
provision cn)if)-eont une valeur grande ou petite, mais c'est
parce que ia provision est, en tout et dans ses parties, evalueu
haut ou bas seton des lois que )a théorie de l'utilité-limite ne
fonde pas), que l'emploi eu est étendu jusque ta satistac-
tion do besoins plus ou moins importants'. Mais il y a
mieux cette théorie prétendue d'économie isolée implique
dans son fondement la société. On pourrait soutenir que
l'estimation de iu valeur par l'utilite-titnite suppose que l'in-
dividu se place en pensée, sans peut-être s'en rendre un
compte exact, dans l'hypothèse de t'échange possible. Mais
voiciquiestptus direct c'est la limitation des ohjetsqui u
induit les hommes a se les approprier, dit la théorie autri.
chienne: it est aussi selon M.Stotxmann, qu'un bien,
parce qu'il est approprie, est rare. en ce seosqu'it est devenu
un bien économique, un bien que t'en ménage, que l'on n'uti-
lise ptus sans devoir une compensation au possesseur – Ne
pourrait-on ajouter qu'en somme, en avouant que dans notre
société, avec les rapports très compliques de l'échange, l'in-
dividu reçoit le plus souvent une estimation toute faite, un
prix courant ta théorie autrichienne cesse d'expliquer, an
moment un il serait le plus nécessaire de le faire ce sont les
phénomènes observes, en fait, dans notre société dont il s'agit
de rendre compte (et leur complexité augmente lu difficulté,
mais aussi l'intérêt de lu tache;, et non pas les phénomènes
qui se passeraient ou qui ont du se passer dans une économie
plus simple. Ou bien, si l'Économie complexe et sociale qui
est sous nos yeux s'explique en dernière analyse par l'écono-
mie simpte et isolée, c'est sur ce passage ou cette dérivation
qu'il faudrait insister, si t'on ne veut pas que ceta reste une
simple supposition commode.
Le livre présent de M. Stotxmann n'est qu'une première
partie, on peut espérer que de l'fBUvre achevée apparaîtra
plus nette ta réalisation de l'heureuse intention qui t'a
inspirée. Ce n'est pas en vain que se rencontre à la fois

<hSt!))i!))t)mt).
< <-< )).SCT.~S.
~t /< p. SM-ïM.
~t!(:).ttahot-Bawt-k.
M<tM</K-'<t'f.
< y/«<M'.Art. U'cWA.
ht Hm'.
AXALYttiS. – T)))!()KttiS ~OMtttm't!" 47K

chez plusieurs théoriciens la préoccupation d'étudier et de


définir, dans l'économie, ce qu'ù défaut de meilleur terme on
peut appeler le facteur social. Ceta marque peut-être un
arrêt dans ce retour au subjectivisme qu'avait provoqué un
objectivisme exagéré ou factice. Mais ou semble en rester
encore à des tâtonnements. On trouvera cependant dans le
livre de M. Stnmm)cr, analyse plus lolu, un puissant enort
pour déterminer une science économiqueproprement sociale.

MAunicn BOUncUiX. – La mesure de la valeur et la


monnaie, Paris, Larose. ~96. 1 vol. in-8°, 27Gp.
M. Bourguin n'entend traiter ici sous le nom de vateur
sans qualificatif que de la vateur d'échange, laquelle est
d'atUeursdans notre société ta vateur par excellence'.–tt
importe d'abord de rappeler ta notion scientifique de la
mesure. < Mesurer, c'est déterminer la valeur numérique
d'une quantité concrète, en étabtissant le nombre d'unités de
mémo nature que cette quantité renferme On distingue,
pour les quantités d'ordre physique, ta mesure relative qui
est < ta mesure d'une quantité au moyen d'une quantité de
même espèce arbitrairement choisie comme unité et maté-
rieitetnent réatisfe pour servir d'étaton la soute qui puisse
être Hpptiquée aux grandeurs primitives, longueur, temps,
force ou poids dans le système métrique, masse dans le sys-
tème C. (. S. et la mesure absolue qui est ta mesure d'une
quantité au moyeu d'une unité de même espèce, mais non
incorporée, conçue idéalement comme pouvant être cons-
truite, suivant une règle mathématique, au moyen d'unités
d'espèces dinércntes qui, elles, sont matériettement repré-
sentées, et qui s'applique aux grandeurs dérivées, surface,
vitesse, masse dans le système métrique, force dans le sys-
tème G. G. S. (cette mesure n'est d'aitteurs pas, a rigoureu-
sement partor. absolue, puisqu'elle résulte de mesures rela-
tives, faites au moyen d'étalons soumis a des variations
possibles').
La théorie marxiste de la valeur est un effort pour faire de
la valeur une grandeur susceptible &ia fois d'une mesure

M/).<'< p. 3.
0) Mout-xuit).
~)'/< ),.
(:~Y< )).!i.').
47(! L'AXttiKSOOOLUti~t'E.<?<

relative et
retative et d'une
d'une mcsm'eahsntnf. ou du mnina.
mesure absolue, ntw)n moins, selon M.Bour-
guin, ou peut logiquement t'interpréter ainsi. Lit valeur, on te
sait, est mesurée par le travnit socialement nécessaire incor-
pore dans les choses. C'est une mesure relative de tt) valeur
que la mesure fournie par l'estimation des bteus eu monnaie
(mesure d'une valeur donnée d'un bien déterminé, c'ost-a-
dire de ta quantité de travail nécessaire à la production do
ce bien au moyen d'une unité de même espèce incorporée
dans un étalon matériel, savoir de ta quantité de travail né-
cessaireà la production de l'unité de monnaie). Et une mesure
absolue nous est donnée par l'estimation des valeurs au
moyen d'une unité de valeur idéale, conçue comme constituée
à t'aide d'une unité d'espèce dinérente, de l'unité de travail,
c'est-à-dire l'heure de travail simple moyen (il ne faut pas
oublier en euet que, pour Marx, le travail qui constitue les
valeurs n'a par lui-même pas de valeur; ta force de trayait
seule est une vateur). tt y a, entre cette mesure absolue de la
valeur et ta mesure absolue de ta force en dynes, cette dine-
rence que les quantités Amesurer, sommes de travait néces*
saire & la production d'une marchandise dans un milieu
<tonné, et t'unité de mesure, heure de travail simple moyen
dans un état de civilisation donné, sont non des quan-
tités concrètes, facilement saisissables, mais des quantités
abstraites et difficilement déterminabtes; mais cela est sans
importance an point de vue théorique, tt est a remarquer
que l'unité de valeur n'est pas rigoureusement absolue, puis'
qu'elle dépend de l'uuité de temps, qui n'est pas théorique-
ment invariable, et surtout du travail simple moyen dépensé
pendant l'unité du temps, travail qui, de l'aveu de Marx,varie
avec les temps et les pays mais il ou est de même, au moins
théoriquement, pour toute mesure absolue de grandeurs dé'
rivées (même si le travail humain pouvait être intégralement
exprimé en force mécanique et t'étément psychologique ainsi
négligé, la mesure de la vateur, bien que M. Bourguin ne
le dise pas, mais suivant les principes posés par lui, ne
serait pas encore, en théorie, rigoureusement absolue 1).
L'auteurn'entreprend pas ici la critiquede la théoriemnrxiste,
laquelle. estime-t-il, va manifestement contre les faits, et passe
à d'autres conceptions.
D'autres tentatives, en enet, ont été faites pour considérer

~t)t~urptin. Op.<:<<)). it-)'.t.


AX.U.V!.)! – TH)!()Ht)!S É<:OXf)MtQrH!' 477i

la valeur comme une propriété intrinsèque des choses et


susceptible de mesure. La théorie de ta valeur fondée sur
le coût de production eu est une. Mais les embarras où elle
tombe proviennent de ce que, par une confusioniuextricable,
en considérant ia valeur du produit, eiio se place au point
de vue individuel des producteurset des échangistes, et qu'en
considérant les facteurs de la production, elle se place au
point de vue social et vise le sacrificesocial (ait pour ta pro-
duction. Ou bien, si elle entend simplement que le coût de
production est leprix do la valeur des choses employées à la
production, il n'est tui.meme qu'une valeur dont il faut
rendre compte. Le problème est recuté indéfiniment
On a, récemment et plus ingénieusement, ramené lu valeur
d'échange à la .valeur d'usage et à l'utilité. Mais la valeur
d'usage u'est qu'un rapport nous évaluons l'utilité finale
par comparaison avec les utilités Huâtesd'autres biens; nous
évaluons l'intensité d'un désirou d'un besoin parcomparaison
seulement. Maintenant, si l'utilité peut être dite une qua-
lité intrinsèque des choses (en ce sens qu'elle est concevable
sans comparaison nécessaire), en revanche elle ne saurait, en
elle-même, fonder la mesure de la valeur et la raison en est
que l'utilité n'est pas une grandeur susceptible d'une mesure
mathématique. Et si l'on remonte au facteur psychologique,
au besoin ou au désir, comment mesurer un état d'amo?
Poser ia question, c'est la résoudre M. Walras part, dans
ses calculs, de l'intensité du dernier besoin satisfait comme
d'une grandeur appréciable, mais en postulant ce qui est en
question. < Je suppose,dit-il, qu'il existe un étalon de mesure
de l'intensité des besoins ou de l'utilité intensive. Dès
lors, soient deux axes de coordonnées Dira-t on que la
mesure des valeurs dans t'échange nous donne justement la
mesure de t'inteusité du désir, ou du degré d'utilité (ce qui
du reste ne résout plus le problème) ? « H(aut au moins dire
que la valeur d'échange traduit et mesure l'intensité d'un
désir cottectif or ce désir collectif est une abstraction, une
moyenne de désirs individuels incommensurablesentre eux,
et l'on ne voit pas comment des chinres peuvent le repré-
senter même indirectement ·
(t) Bouquin.Op.t' p.27-9!).
ti) M., p. 30-33.Mcf.v'ti
&Watru! ~meMh<<'c<)No«)«'
/)o<</)'/M<'
pM<f,
là.TU et t0).
(:))M.. p. M.
4f8 )/AXX~E <??
'tfK:H)).)M)<jL'H.
Ainsi les théories Échouent successivement à faire ft de ta
vatûttf une nroDt'iÉM!utritis6oue
valeur propriété intrinsèque des(les choses. C'est
C'a qu'elle
n'est en eNet qu' un rapport d'éctmngo, uu rapport d'égalité
dans t'échange avec uue autre marctmudisodo quantité déter-
minée*. Et M. Boturguioeo tire que lit vateur n'est ni une gran-
deur primitive ui une grandeur dérivée, qu'elle n'est pas une
graudeur. Et en voici la raison Il n'y a pas /« ('<~c<«' d'une
marchandise comme il y a la tM~uaur ou le poids d'un corps:
il y a seulement la valeur d'une m&Mhandisopar rapport a
t'or ou it l'argent, par rapport au blé, au travail et aux diver-
ses autres marchandises il y a donc, pour une marchandise,
non pas sa valeur eu générât, mais autant de valeurs particu-
lières qu'il y a de marchandises différentes susceptibles d'être
mises en rapport d'échange avec elle It n'y a donc pas, à
proprement parler, de mesure de la valeur. Et cela ne tient
pas à ce que la monnaie a une valeur variable, car tout étalon
matériel est variable. Il n'y a pas d'étalon de ta valeur, parce
que ta valeur n'est pas une grandeur. It n'y a qu'un étalon
monétaire '.te frauc dans les lois françaises a toujours été
denui comme l'unité des monnaies Dire qu'un hectolitre
de blé vaut vingt francs n'est pas mesurer une certaine pro-
priété commune aux deux marchandises, ia valeur, c'est cons-
tater simplement cette circonstance de fait que t'hcetoiitre
de blé s'échange courummeut contre ~0 pièces de monnaie de
5 grammes d'argent c'est-à-dire mesurer l'équivalent
considéré dans sa valeur propre, comme quantité physique
Mn (ait, ta mesure de la monnaie remplit le môme ofïice
qu'une mesure de la valeur, mais ta théorie rigoureuse doit
faire la distinction. Rien n'empêcherait de prendre, pour
jouer ce même rote, une unité de mesure d'une marchandise
immatérielle, comme serait le travail humain, mais la nature
intime de cette mesure n'eu serait pas changée. Ce qui n'est
pas possible, c'est d'admettre une mesure tout idéate de la
valeur, c'est-à-dire au moyeu d'une unité simplement conçue
par l'esprit. Nous sommes à cet égard le jouet d'une illusion
psychologique à manier sous le nom de franc des choses
aussi diftérentesque des espèces en or et en argent, dota mon-
uaiedebittonetdesbittetsdebanque, nous prenons l'habitude
de tenir le franc pour une notion abstraite. Mais une unité

f)/).c)< p. N~.
~t))t!')n-f;uin.
M..)<.HS.M.
AX.tt.tXR't.–T)~')ntH'ij!t:)).\t)U~)'K< 470
."s»"même dans la
de mesure qui. _,r_
pensée, ne s'incorporerait nulle
purt, n'aurait pas de sens pour nous. Et la même raison fait
que < ta monnaie n'est pas le symbole d'une valeur invariable
nxée par !e testateur Néanmoins. pouréctaircircomptè-
tentent la nature et le rôle de la monnaie. M. Bourguin
entreprend une longue étude de )a monnaie dans sa fonction
d'étalon des prix, eu atteignant le problème du monomé-
tallisme et du bimétallisme, – recherche technique, docu-
mentée, bien conduite, où pourtant nous n'avons pas à le
suivre ici.
U faut iouer M.Bourguin d'avoir apporté dans le problème
de la valeur ta notion scientifique et rigoureuse de la mesure,
et d'avoir montre par sou ingénieuse théorie qu'au pis aller,
c'est-à-dire si ta valeur n'était décidément pas proprement
mesurable, comme n'étant pas une grandeur, la mesure de la
monnaie pouvait pratiquement y suppléer, et qu'ainsi la
science économique n'était pas, comme on aurait pu le
craindre, toute compromise par cette conclusion. Maista rai-
son donnée pour que la valeur ne puisse être une grandeur.
savoir qu'elle u'est pas une propriété intrinsèque des choses,
mais uu rapport, ne parait pas décisive. Toute grandeur est
mesurable, on théorie au moins, et un rapport n'est-il pas une
grandeur M. Bourguin ne nous a-t pas rappeié lui-même
que dans le système C.C.S. la masse était définie « comme
étant, pour un corps domn', le rapport constant de lu force à
l'accélération qu'elle imprime au corps ? Nierait-it donc
que la masse fut une grandeur? Ht puis, qu'est-ce qu'unepro-
priété intrinsèque des choses7 Où peut-on arrêter, dans le
monde extérieur que nous connaissons, ce (lui est relatif à
nous et ce qui est absolument ? La chaleur, la force, la résis-
tance, l'étendue même sont-elles, indépendamment de nous, ce
qu'elles nous apparaissent? Non, ce n'est point )à pourquoi
la question se pose de savoir si la valeur est vraiment mesu-
rable, e'est-à-dire si elle est une grandeur. Si la valeur se
ramène en définitive à des éléments psychologiques, les phé-
nomènes psychologiques étant essentietiement des phéno-
mènes de qualité pure, comment leur imposer la catégorie de
la quantité pour on faire des grandeurs ? Comment transfor-
mer t'hétérogéne en homogène? Là est le problème. On a vu
que pour M. Bourguin ce problème-là n'existait pas Croit-

(~. < ().8.


0) ttf)t)rt{Utn.
488 L'AXXtSK !(0<:tuU)t:tQt'K. «9T

on possible de mesurée un état d'âme ? Poser la question,


c'est ia résoudre. »Il est vrai que les tentatives fuites jus-
qu'ici out échoue la psycbophysiquedeFechneretdo ses suc.
cesseurs a fait au fond ce que M. Bout'guin a reproché avec
pénétration à M. Watras elle est parvenue a mesurer le phé.
noméne psychologique, parce qu'elle l'avait supposé mesura-
ble, ce qui est précisément toute la question. Mais qui répon-
dra qu'un mode d'abstraction heureux ne puisse réussir a
saisir le phénomène sous le rapportde la quantité, sanseu tais.
ser par ta même échapper tout le caractéristique, d'autant que
les phénomènes d'ordre psychologique dont il s'agit ici sont
déjà, en uu sens, objectifs, étant sociaux plus qu'individuels?
Si au contraire le problème est insoluble, serait-il possible
de démontrer cette impossibilité définitivement ? De toutes
façons, ce restera un mérite d'avoir posé le problème dans
ses termes derniers. La théorie propre de M. Bourguin nous
aura montré par avance qu'au cas même où la solution serait
négative, la science économique ne serait pas désespérée.

D' CnRtSTtAN vos EHRENFELS. – System der Werttheo.


rie. 1 Band. AUgemelme Werttheorie, Psychologie des
Begehrens (S~w<* </c <« ~on'f </<* r«<f~ -1~ vol.
7'/)<fc<j~H<~<'</<'la c«<<'«r.Psychologiet/« </t'«'r).Leipzig,
0. R. Heistand, t897, vot. in-8", xxnt~77 p.

M. v. Ehrenfets annonce trois volumes le premie)', seul


paru, est, comme le titre l'indique, consacré à une théorie
générale et psychologique, le second doit traiter des faits de
valeur éthiques, et le troisième étudier les faits et problèmes
de la valeur éthiques-économiques, et soumettre la théorie
purement économique de la valeur à un examen logique et
psychologique. La partie qui nous intéresse ici, on le voit,
reste encore à paraître. II suffira doue d'indiquer briève-
ment, pour le moment, le point de départ de la recherche.
M. v. Ebrenfets pense que la notion de valeur ne doit pas
être renfermée et rétrécie dans l'économie, qu'elle concerneà
titre égal la psychologie et l'éthique, et qu'il y a lieu donc de
construire un système de la valeur. H convient de commencer
par une théorie générale de la valeur, et par la psychologie
du plaisir et du désir où elle repose. L'auteur commence par
s'attacher à établir que nous ne désirons pas les choses parce
qu'elles ont de la valeur, mais qu'elles ont de la valeur parce
AfALÏ)!)! – TM)h)M))M
)!t:f)X')MtQt'K!! 48<

que nous les désirons; combat telles doctrines qui cherchent


a rendre compte du désir tui-mémeen le réduisant a un autre
phénomène, et. réservetelles autres qui essaient de fonder une
vuteur absolue !a valeur rotative, admise par tous, doit être
étudie d'abord: si elle explique tout, il n'y aura pas besoin
d'une valeur ahsoiue. En ce sens, )a valeur n'est que ta
< désirabiiité
Elle n'est pas une propriété ni une faculté des choses, elle
est une relation entre un objet et un sujet, exprimant que ce
sujet désire l'objet. Détermination des notions spéciales et des
notions dérivées (vateur temporaire, valeur normaie, valeur
individuelle, etc., estimation, évaluation, etc.), division et
classification des valeurs en immédiates et médiates, distinc-
tion des valeurs propres et des valeurs d'effet,etc., mesure des
vateurs (chapitre inspiré de la théorie autrichienne., étude
rapide des valeurs collectives, des erreursde valeur, etc.: telles
sont les matières de la première partie. Une deuxième partie
du travail estconsacréoa ia recherche des loisdes changements
de valeur; une troisième à l'analyse du désir. – H ne reste
qu'a attendre l'emploi qui sera {aitdaces préliminaires psycho-
logiques dans ta théorie ultérieure de la valeur économique.

Sur cette question de la valeur nous ont été connus trop


tard pour être examinés

GOTTL. –Der Wertgedanke, ein verhülltes Dogma der


Natiootttœkonomie. Kritisctte Studien zur Selbstbesin-
nung des Forschers im Bereiciteder sogenannten Wortteitre.
lena, Fischer,'t89'T,gr. iu'8, '?6p.(.s7««~<'<M..S<Md<Mj?/~M-.)

L!TWtN!SZYN. – Arbeit und Gewinn auf Grund einer


neuern Wert-andPreistheorie. i. Stirn. Krakau. Veriag
der Buchduckerei der cxas 18H6,gr. in-8, Ct p.

WHtTTICK. – Value and a invariable unit of value (an


important discovory in économies),Phiiadeiphia, \hitUek,
~897, in.8- ~38p.

TAYLOR. Vatnes positive and relative. PhHade!phia.


American Academy o(po)it. and soc. Science, Itt'n (a" t9i).
t:. t)mt:M)M.– Annefsocto).189i. 3t
4M t.'AXS)5K soctu).m:tQm. <M7

Voir aussi:
CROCtNt. – L'elemento Mggettivo nella teoria del va-
lore. Gioruale degti Ecouomisti, 't897, avril.

B. A'oct(~MH«~
et science<'fonOMt'~t<f.
<:ASTON RMUARU. Le socialisme et la science sociale,
Paris, Akan. (B~hut~xc df p~toxo~xe cott<M(pon<t))f),
1897, < vot. in- 2(M)p.
Ce petit livre est sans doute exotériquo, comme t'indiquent
ta présence dedetaits pu rementanecdotiquesoubiographiques,
et le tour peu technique tant des exposés que des critiques.
L'auteur s'est d'abord attache it définir le socialisme ou
plutôt ce que, dans son livre, il entend par socialisme. Car ce
lui reste une opinion personnelle que de laisser Jtors du
socialisme Saint-Simon et Fourier entre autres, ainsi qu'on
l'a déjà remarqué'; que de ne reeonuaitre d'intérêt ù Rodber-
tus et à Lassatie que comme précurseurs de Marx~, et do
négliger par conséquent le socialisme d'Etat, ce qui, surtout
depuis t'Œuvre de M. And!er\ parait inexact et injuste; que
de ne trouver à la doctrine socialiste depuis Marx que des
modifications insignifiantes 1(enexceptant seulement Loria),
ce qui est méconnaître d'une part le mouvement des partis
socialistes en Allemtigiie, eu France et en Angleterre, lesquels
sortent de plus en plus de l'orthodoxie marxiste, et d'autre
part (puisque M. Richard dectare chercher la doctrine socia-
liste chez les théoriciens plus que dans les déclarations des
partis) les (puvres théoriques considérables d'un Otto Encrx,
d'un Theodor ttertzka. d'un Sidney \ebb d'où se dégage un
socialisme fort distinct du marxisme. Et sans doute < socia-
lisme doit prendre un sens large pour comprendre des doc-
trines aussi diverses aussi est-il bon de caractériser par
une épithéte la forme du socialisme à laquelle on s'attache

))) nm-tfht-ittt.
?-(-.p/.i/ )t«<H <8')7.
<!tRit'htMt. 0~).<< ).. M.
Ch.An')k'r.Lesot-tf/xx'.t </«~o<<«/MMt<' <7a/ m.t</fMa'/Mf. t'ari~,
Ah'tt)*.ttim.
(t) Op.f't/ Il.M.
!!))t!st <'<* !)U'«)<a)t))t'ncpa)t',i!. tt's vnrimtittn~ du iofiati.ttx: <'t<'t'
<)')ntot)luifuitun tt'f '"unnc !-)un''t!:N\'ft' <)<'
pctxufhumain)'pouvait
jaottus)''tn.'<!)< <'t')''<h)itivct)t''t)t
<tti't'?' xatx ft)' ftt)'))'?''jt)tt't&t<n':um
de !!t)'ntiMutdt-mo~.
– TMÉUMOM
A'<A).YSK-<. )!<:t)Xt)M)Qt't!S 48~
en l'espècec'est le socialismemarxistedont M. Hichard fait
un examen.
M. Hichardtient avec raison la théorie du capital pour
essentielleau marxisme.Le capitala sonoriginedans te sur-
travait. – On sait que Marxcite quelquepart 1 l'exemple, où
le surtravailest manifeste,du paysandes provincesdanu-
biennestravaillanttrois jourspour lui et trois jours pour )&
seigneur,pour l'opposerau cas do notreouvrier industriel
dont le surtravail est dissimuledans la journée de travail
même. M. Richard attribue une grande importanceà cette
comparaisondu régimede l'entrepriseavecte servage,et se
donne la peinede prouverque du serfà l'ouvriermoderneil
y Il eu progrèsen indépendancepersonnelle, ce qui est si
peu nié par le marxismeque la liberté politique,entraînant
le droit de disposerde sa forcerie travai), est, avec le fait de
ne disposerque d'elle, la définitionmêmedonnéepar Marx
du prolétariatmoderne, et que la substitutiondu
régimede l'entrepriseau régimede la corporationest insé-
parable d'un développementsocialtrès générât – ce que
le marxismenon seulementn'a jamais contesté,maismêmea
soutenudes premiers, et a expliqué,commelesautres trans.
formationspassées et commela transformationannoncée,à
sa manière, c'est-à-direpar sa philosophiegénéralede l'his-
toire, lematérialismeéconomique.
M. Hichardvoitavecjustesseque le fondementde la théo-
rie du capital,de lu plus-vttluoet du surtravailest la théorie
de la valeur,et il opposeà ta théoriemarxiste'<deux points
fondamentauxmis hors de doutepar les économistes' que
la valeurd'un produit dépendde l'étenduede ses débouchés
et du nombredes producteursqui se disputent ces débou-
chés, et que la valeurde tout produitdépendde la valeurdes
produits que doivent consommerceux qui l'élaborent. –
Pour le premier point, la loi de l'offreet de la demande
indiqueque le prix se fixe lorsquet'ourocouvreexactement
la demande, mais pourquoi diversesmarchandisesplacées
dans ce casont-ellespourtantdes prix différents?Cetteloi à
elleseulen'en peut rendre compte.La chaleurfait varier la
longueurdes corps: la chaleurn'expliquepas cependantque

U)MaM.P<M A'~f/< X,
Ri'tmni.
O/t.ci/ p.XM.
? M..p.«t.
484 t.X)!HM'(;)m.O())f~'K.i"97
les corps aient une longueur. Pour le second point, une école
importante et récente, on )':) vu, soutient que le coût de pro-
duction se règle sur la valeur, bieu loin que la valeur so
règle sur le coût de production.
Le marxisme (poursuit M. Hichard) qui trouve normal le
cercle d'échange M A M (Marchandise monnaie mar.
ehandise et anormal le cercle A – M – A' dela société actuelle
où A'est plus grand que A, condamne donc l'épargne, et veut
la consommation immédiate de tous les biens. – Maisd'abord,
dans le marxisme, rien ne peut être qualifié proprement de
normal ou d'anormal ce qui est devait être et si le circuit
A – M – A' est destiné à disparaître, ce n'est pas qu'il soit
anormal ou btamabte, c'est que le mode présent de production
doit amener nécessairement un état social nouveau.Et ensuite
la notion d'épargne est ambiguë veut-on dire la retenue et
mise en réserve d'une part de gain personnel, c'est-à-dire
t'épargne provenant de l'abstinence? Elle n'est ni approuvée
ni condamnée par le marxisme, n'étant pas en question': le
capital dont s'occupe exclusivement le marxisme est celui
qui provient non pas de t'abstinencc du capitaliste, explica-
tion jugée insuffisante, mais d'une plus-value dont il a
cherché l'origine et dont l'état social annoncé et prévu réser-
vera le bénéfice à la collectivité au lieu de le voir appro-
prié par quelques individus. Et le marxisme n'a jamais
tendu à la suppression du capital, entendu comme l'ensemble
des moyens de production, ni par suite à lu consommation
immédiate exclusive, ce qui serait en effet un retour à la bar-
barie il a simplement dit que ce capital ne serait plus objet
d'appropriation individuelle.
La doctrine marxiste n'a pas seulement expliqué d'où
venait te capitalisme, elle a dit encore ce qu'il deviendrait, ce
qu'il engendrerait. C'est donc sur la prévision des états
sociaux futurs que M. Richard t'examine en second lieu. ït
fait remarquer que l'évolution du régime capitaliste décrite
par Marx s'applique à l'Angleterre, mais non à la France –
Mais c'est contester l'observation faite sur la société actuelle,

(i) Rictutfd.Op. cil., p. liM.)~S.


~~M.)<it-)t)uitinv)~)u<-)t))tt)t)ui:.t~j)urt:n('tu)')V<-hant!t'M)t)ii
ttjathjui n't'st tt'aucunc m~nM-t-o un~ auturitf pour )'intcrpn!ta(iuMdu
tMKfJti~M)'
(3) Rictmrd.Op.cil., p. t30.m.
AXALTSK~. T)))!o)t)K~)!f)X'Mt~t'K< 485

et non la thèse générale du matérialisme historique.


M.Richard trouveeodéfautia sociologieethnographique dont
Engels avait tiré argument. De plus, a considérer le système
en tui-meme, c'est &ta physiologie,notamment à la phyeio-
logie cérélo'ale qu'il faudra surtout faire appel pouf consti-
tuer une théorie positive de l'histoire' Or l'histoire, si on
la subordonne a la physiologie, est le tableau du développe-
ment de la coopération, ou elle n'est rien On voit que
M. Richard n'a pas attaque le matérialisme économique
franchemeut, en sou principe philosophique, et lie lui a pas
fait l'honneur d'une discussion approfondie, comme l'a fait
M. Stamtnter'.
Dans ta loi d'accumulation du capital, M. Richard trouve
plusieurs contradictions dont )a principale est !)! suivante
Point d'uccumulation de capitaux si ta force de travail n'est
non
pas l'objet d'un commerce libre; point d'accumulation,
ta céder au
plus, si l'ouvrier qui lu vend n'est pas tenu de
plus bus prix Libert~d'unepart, contrainte d'autre part,
la contradiction serait manifeste en ellet, s'ii y avait ià autre
chose qu'une amphibologie du mot liberté. M. Richard nous
la signaie tui-mème plus loin Cessons de confondre ta
liberté des personnes et des conventions avec la libre concur-
rence". N'est-ce point de la libre concurrence qu'ii s'agit
uniquement dans la première de nos propositions préten-
dues inconciliables, et uniquement de la liberté des conven-
tions dans !a seconde?
L'auteur déciare en terminant que la liberté des contrats
et du travail est le but a atteindre: que la liberté n'exige pas
i'efïacementdu rôle de l'État; qu'il est partisan de l'atténua-
tion de la concurrence". H admet que < la concurrence écono-
de notre acti-
mique peut n'être plus qu'un ressort secondaire
vité; la doit tendre 1 évolutionsociale et l'fduei)lion de l'hu-
manité. car l'anranchissement et le relèvement de la personne
humaine sont à ce prix' Beaucoupde socialistes pour-

.t! Ktohtt-d. (~.cM.. )'. tM.


M.. )<.t:t8.
)'a)))tty~()''n'M<c/)o~
(:;)\ir .-i..)MM))!i MM<F .teM.R.Stumuter.
Me<<<
(4, Mi'-tmr'i.Op.e~ p. 115.
(S)Ici..)'. '9S.
(6) )'. i<M.~e.
/(< p. i97.
48M t-'AXSHK i'OCtOt.OUt~Ë. ~97

raient concilierleur socialismeavec ces propositions, et même


le fonder sur elles. II ressort dune que le socialisme M'estpas
incompatible avec lu science sociale dont nous devons croire
que ce sont, d'après M. Hichard, les conclusions. Au demeu-
rant, sou livre a cté écrit avec un louable effort d'impartialité
scientifique. U'uu critique insu)u9ammet)t informe, lorsqu'il
est exempt de parti pris, on peut appeler Mlui-même. mieux
informe. Tout socialisme étant une doctrine complète d'un
objet dont l'étude scientifique est seulement commencée,
aucun ne peut être )a science soeiaie ette'méme ou doit
simplement demander à chacun de ces systèmes d'être au
courant de )a science de son temps. La marxisme, vieux de
plus de trente ans, est donc vraisembtatjtemont aujourd'hui
eriticitble au nom de la science présente; mais les arguments
de M.Ricitard ne sootpeut-otrepas les meilleurs. A supposer
~a critique décisive, c'est une forme du socialisme qui serait
atteinte, et non le socialisme, toujours renaissant sous des
formes nouvelles, tant qu'un fait, celui de la misère, sera
constaut, etqu'uuL sentiment, ta volonté avant tout do la sup-
primer, agira chez quelques hmnmes.

TaEOBOR HKKTZKA.– Die Probleme der menachMchen


Wirtaoha.ft. – I. Band /~M~ot~'M) </<'<' ~«~r. A't':<'«-
~MKj/(/.M pf~~MM </f /VMMOM;<' A«M««te,vol. 1. – te
ProM~tc (/fs ~«'tM. ~<w/«t'(<o)tj.Beriin, Fard. Dummier,
1897, 1 vol. in-8", tv-HCSp.
On ne fait pour le moment, ici, que signaler quel intérêt
et quelle importance présentera lit nouvelle Œuvre de
M. Theodor ttertzka, si i'on en juge par la première partie
qui nous est donnée. Mais, pour l'examen, il convient d'en
attendre les deuxième et troisième parties annoncées, afin de
saisir, avant tout, dans son uuit)5et son intégrité, le système
de l'auteur de ~'M<f<M<
Le problème essentiel de la science- économique n'a pas
encore été défini avec précision. Si cette science est née avec
les temps modernes après être restée inconnue de l'antiquité
<*tdu moyen âge, c'est qu'une question nouvelle et surpre-
nante dès l'abord s'est posée avec eux. Jusque-là la richesse
avait varié comme les facultés et moyens de la produire.
Avec t'age moderne, au contraire, ceux-ci ont crû beaucoup
plus vite que celle-là. C'est pour résoudre cette difficulté que
– TH)!uK)HS
AXAH')iK<. )!t:nxuM)QrH)t 4tt7

le mereantttismecrut découvrir<[uela richesse dépendait


seulementde l'abondanceen métauxprécieux,que le physio.
cratismesoutint que toute richf'ssevenait do la terre, que
l'économieclassiques'épuisaen etïorts sur la théorie de la
valeur, distinguantvaleurd'usageet valeurd'échange,sépa-
rant valeur et richesse, et les opposant parfois l'une à
l'autre'. M. Hertzkareprend à son tour la théorie de tn
valeur.La valeurestessentiellementla propriétéque possède
une chosematérielleou immatériellede satisfairele besoin
humain (/<-besoin,et non ~Mbesoins,la valeur a pour
conditionla possibilité'de t'échange).Valeuret richesse ne
à
s'opposentpas, mais indiquentle mêmerapportdes choses
t'homme.La valeurest forméepar le travail, mais ce qui
lu
produit uue chosene doit pas être confonduavec ce qui
constitue.Lesthéoriesde la mesurede ta valeur, de la fur-
mulede ia valeur,do la valeurdu travail montrent que la
valeur varie avec les forcesproductives.Or, en fait, dans
nos sociétésmodernes,la richessen'a pas crû proportionnel-
lementa l'accroissementconsidérabledes forcesproductives.
C'estque ta richessene dépendpas seulementde la produc-
tion, mais de la consommation.L'accroissementde la
richessedépend de l'accroissementdu besoin.Or, le besoin
est retenudans des limitestrès étroitementdéterminéespar
l'ordre socialen vigueurqui retientà la massedes hommes
le produit de leur travail et c'est ainsi que la consomma-
tion de fait (non pas la consommationpossible)a cessé
de correspondreà la production. La surproduction n'est
pas absolue, mais relative, comme le dira M. Stammler.
tt ressort de là que la misère sociale est non la consé-
quence, mais la cause de l'impuissanceà produire l'abon-
dance pour tous les hommes' Sur ce résultat s'arrête
le premier volume.Voicice que l'auteur annonce des deux
autres
Le secondestconsacréà prouverque cet ordre social en
vigueur,causedu présentproblème,bien loind'être immua-
blement fondédans l'intime nature de l'homme et de la
sociétéhumaine,n'est que le résultatd'une phasede t'évoiu-
tion humaine s'accomplissant;et cette phase appartient

<<)Hcrt!!)f!t. )-M.
Op.c<<p.
~2)M..1).41.
t9)M.,t\
L'AX~t: SO(:)0).0))~H!.t<97

principalementnu passé, car l'ordre socialen vigueurest en


opposition irréductible avec les conditions actuelles de
l'existencede notre race. C'est pourquoi nous nous trouvons
déjà eu fait au milieude cette évolutionsocialequi doit con.
autre l'humanité au seul ordre social
correspondantà ses
conditionsd'existencechangées,à l'ordre de la libertéet de
la justicesociale.
Le troisièmevolume exposera nettement les fondements
de ce nouvelordre et prouveraqu'il ne s'écarte en aucun
point des principes que l'ordre bourgeois régnant reconnatt
pour siens, bien qu'il ne les mette pas on pratique, et mon-
trera les voies par où l'humanité moderne se
cette fin, dirige vers
On reconnaîtdans ce programmeles traits
du socialismede M. Hertzka, mais la nouvelle caractéristiques
<Buvroaura
sans doute une portée systématique et doctrinale
n'avaient pas au môme degré les précédentes. que

C. – L'neconceptionHOt«'t'«C<j'<'
f('<-OMOm«'
sociale,
D~RUDOLF STAMMLEtt. Wirtsohaft und Recht na.oh
der material1stischen
Gesohichtsauïrassua~ etne
8oz!a!phnosophisohe Unterauohna~. (A't'oHomtc poli-
~</)<t'et /)<-0<f
<<t~«\< MM~~OKMt<«! </f l'his-
~u'f. J?f'fA<'<-cA<-
<~ p/t<«f .w<'«~<)Leipzig, Veit und
Comp.,~896,1voi. in-8', vttt-608p.
Il est difOciiede faire entendre, en
quelquespages, tout ce
que renferme,tant explicitementque virtueiiemont,ce livre
plein d'idées, œuvre d'une penséevigoureuse,effort remar-
quablede philosophiescientinque. Les sciencessociales
commel'économieet le droit ont besoind'une unité de
prin-
cipequi les fonde le droit comparé ni l'économiegénéraie,
la philosophiedu droit ni cellede l'économiene
remplissent
cet office, car toutes ces disciplines supposent !a société
humaine, et qu'elle est soumiseà des lois or c'est précisé-
ment cette f;M<m«<M<~<etie-méme de la vie sociale
humainequ'ils'agit d'établir et de définir.C'estun problème
de critiquede la connaissance(M'~MM~HM~McAc
~tt~Ac).
Le contenuparticulierde la sciencesocialeest indifférentà
cette recherche ce qui en est l'objet propre, c'est la forme
même de généralitéou de nécessitédont est susceptiblece
– TH)!u))))!S
AXAn'fK'i. )«:t)Xt)M~HM 489

contenu, et qui doit être l'unité de principe des conditions


de la connaissance scientifique sociale 1.
Un seui système s'est jusqu'ici affirmé qui répondit à cette
question, et bien que beaucoup ne s'y soient point rattiés,
aucun autre système n'y il été expressément appose. C'est ta
conception matérialiste de l'histoire ou, plus exactement, te
matérialisme économique. Les lois particulières qui valent
sous des conditions empiriques données, reposent sur cette
loi fondamentale, valable pour toute vie sociale, unité for-
melle donc de toute la science sociale, que l'existence sociale
tout entière dépend nécessairement de l'économie sociale'.
–' L'auteur
expose donc avec précision et impartialité les
principesdu matérialisme social et le fondement théorique du
socialisme appelé scientifique qui repose sur lui il met en
lumière le véritable sens et la portée de la doctrine contre ies
erreurs de compréhension et par suite de critique trop fré-
quentes. Le socialisme marxiste ne f/CMtatx~pas un autre
ordre social qui serait ptus:<~< il en a~H<<un qui est
M<'CMjm<n', en vertu de l'économie de la société actuelle,
laquelle, en conflit avec le droit encore en vigueur, produira
nécessairement un droit nouveau pour lui correspondre on
ne peut qu'une chose, aider à l'enfantement qu'on prévoit.
H y a deux manières de critiquer ce socialisme on peut con-
tester que son observation de la société actuelle soit exacte.
qu'il y ait concentration du capital, qu'il y ait conflit entre
l'économie nouvelle et le droit étahii c'est atteindre non le
principe, mais l'application à notre société donnée de ce prin-
cipe. On peut au contraire s'attaquer au principe même,
à ce rapport de dépendance causaio entre l'économie et la
vie sociale, ou (car la question s'y réduit essentiellemeut)
entre l'économie et le droit. Mais ici encore, où doit por-
ter la critique? On oppose par exemple certains faits, les
croisades, la Révolution française, ou des événements intel-
lectuels, politiques, ont, semble-t-il, causé des changements
dans l'économie mais à supposer que le choix de ces faits
soit heureux, le matérialisme économique n'est nullement
une généralisation des faits", il est la condition fermette de

(t) Statnmtcr.Qp.ct/ )). <-M.~)'t)M<Mny.


?) M.. p. 2Mt.
(3)Coa<de ses ))<trti~n< font pn~fnt''<))n!ii
()Mi t'ottt<).)m'
othiMiftos
qu<t s en'i.Voit'
L uritt..4oatM </eM« et
proprielàc<!pf<ff/M<<ca. t'ouvra~'
basde Mettu:!).
!n'ti~M<')ttu<
490 L'A\XÉKSUt:tttU'm~'H.t8m

la possibilité de lois des phénomènes sociaux, et il soutient


uniquement et « p'<o<'t({n'en remontant la chaiue des causes
complexes des phénomènes sociaux, on arrive toujours au
substrat de la vie sociale. &i't'couomie sociute. -Ce principe
est-il donc iudispellsahle à iu constitution d'une science
sociale comme science Voiia on est la question. Mais on
s'aperçoit que le matériaiisme économique n'a jamais défini
avec pn'cision ni vie soeiate ))i économie sociale. C'est ce
soin qu'ii faut d'abord prendre'.1.
A t'analyse de la notion de société humaine, on trouve que
la caractéristique en est l'existence d'une règle extérieure de
la vie eu comnum (.~?M~ /<'M M/ (t'<r<t'p/< ~<'r<~t'~f.<
~MMMtMfttMt'H ton ~fM<«'«' Cette règle n'est pas la
toi imposée par un Htat on peut concevoir des sociétés sans
droit proprement dit et sans H)at; dans nos sociétés cette
règle, outre le droit, comprend la coutume, les mœurs, etc.,
tout ce que l'on peut réunir (par opposition au droit,
régie d'obligation) sous ie nom de règles conventionnettes.
Les deux ont ce caractère commun d'être satisfaites par i'ob-
servation tout extérieure ;eu quoi elles se distinguent de ia
règle morale). Cette régie Il d'aitieurs non pas une priorité
de fait, mais une priorité logique sur la vie en commun
qu'elle régie. Sans règle extérieure il peut y avoir juxtapo-
sition physique des individus, mais non société. Do cette
règle de nature double, juridique et conventionnelle, if fait
que nous ne connaissons historiquement aucune société ou
se soit rencontrée seulement ia seconde à l'exclusion de la
première, va permettre, pour simplifier les analyses subsé-
quentes, de ne considérer qu'un élément, ia règle juridique,
laquelle serait la /w-w<'de ia vie sociale. A cette forme

(<)S[attt«t)t'f.<~).cil. ~t- «KcA..S/an~ t'M~e.ti. ~7.8!


S) M.S!)m)t)tt<'r nf <)i.<tHtf!t"'
)'a<Xtuiosd. <-it)'j'tt))))<)M fortt)in'?n'nt!i
du tx'tt~riat – t. Vie!ia)t- .~t tri <.)))).«'.t .tist<Mt-<- de )')<on)tMt-
)!i'))<Mx-m) <-''xt.'ri.-utv<tt''))t
!:i){nit!)' n'K)'' '– Un'' df
).)x''<)i<-)ttion
t-M)<?))))<-)'
t:t'M< '"ft<;t-i<'urct)t)'t)t)\'t:tt?('onfornh~ucxt u un<!toi t-iiUnn-
nt')h' t-.)t)f<)t-tm!)n('ntt UM'!'tt-ftani~ti'tn ntti«nt)e)))'
<-t~ftititm'd'' )'hu-
tntmit'-tr't )t-!H.'nt ')' 'jut-~i'~n !:t«'i)t)<' –3. (.')*!.ensus.)! <-<tnfu<
tn)ti!.d'~tn' t)~ Mtjut'nt orximi.~ttittnsofiah' s'upjKMt- u~tmisa-
Uon ii)<cnt)t".t't) t-<'<)u't.)tt'
()ir<'<-tc<t))'nt
<)'<tut")'it' au )i''uMtt-uttfur)tt<'itutt)))<tnt-it<i<)und.t'ts'it<tjMM)'
<)))'')'<mtn't-t)U!-i!it<'
& tt)<iri)K)i)wtt-tt)t')tt.
ft) tiu~-ittmtunt'Mrcit't'fpontattc<)f!!tntttjiJM
tnMtitt)-t)t.'ut, ittdhidMeb.
t. Sm-ia) )!'o))pos<' & potithjUM S.. Knt'ittte~t''))))))oyc pour
t<M <)<:
fftpportit natutt)cu)n'ctttiunMt;)to catroI).'sindividusparuppositiua
aux mpport!!Jufi(tiquM.
.~H'SHS.–'tm~n(t!S)!t:0'MM)QftM 4M

il y a une HMft~f.Oupourrait croireque cettematièreest la


nature Itumaiueavecses propriétés,tHnisc'est là l'objet do
sciences naturelles et nou d'uue science soeiaie ou bieu
qu'elioest l'appropriationde ia natureà nosfins, mais c'est
là, pris en soi, l'objet d'une technologie,valable pour
i'hommo supposé isolé comme pour t'ttommovivant eu
société. H n'y a ià quelque chose de proprement social
qu'autant qu'il s'y trouvecollaboration,action en commun
sous des règles extérieures.La matièrede la vie socialeest
donc l'actioneu commundes hommesteudantà la satisfac-
tion de leurs besoins ((/Mox/'/Mu<)«M~f/t'<p~)(n~ gerich-
Mc wf<tM'/i<t'<«' –
~)M«MtMt<'K!t'M<'M). Et il u'y a pas à dis-
tinguer entre besoins supérieurs et besoins inférieursou
matcrieisdont s'occuperaitseulementl'économie outreque
la distinctionne peut être absolue,ellen'intéressenullement
l'économiesocialequi étudieproprementla réunion,ta con).
binaison des activités humaines pour la satisfactiondes
besoinset noncesactivitésou cesbesoinseux-mêmes.Autre
chose est connaître les lois physiquessuivant lesquelles
roulent lesdés, et autre chosesavoirles règlesdu jeu
Le droit est la formedontl'économieest la matière, Il y a
possibilité d'étudier la forme à part en tant que forme,et
c'est la sciencetechniquedu droit.Maisil n'y a pas de droit
naturel, au sens qu'un contenupourraitêtre assignéau droit
a priori. Il faudrait trouverdans la nature humaineun fac-
teur de causalitémécaniquepour ainsi dire, alors qu'elle est
simplement un mode générai selon lequel les hommes se
posent un but et poursuiventune fin. Il y a un droit naturel
aveccontenuchangeant on entendrapar là ces propositions
juridiques qui, sous des conditions empiriquesdonnées,
renfermentle droit théoriquementjuste. Quelest le principe
d'unité fondamentalqui rend conformesà des lois,c'est-à-dire
objectivementjustes, les volontéssociales?Tout ce travaila
précisémentpour but d'y atteindre
Si la formepeut êtreétudiéesansla matière,l'inversen'est
pas possible la matièreéconomiquene peut être étudiéepar
la science que sous la condition toujours d'une règle juri-
dique (ouconventionnel te). La raisonen est que, du moment
où on ne tient plus comptede règleextérieuredéterminée,la

ft)Stttmmtcr.
Op.cil.,S'"BtU'h.
t)f)'G<M«tt)~
< So:)aftfMt<'<Mf/t<t/'<.
t2)/(< p. t6HM.
4M ).'AXXH)!~)t:fu).<J(!tQt'K.lM7
matière donnée cesse d'être sociale, ou d'être considérée du
point de vue social. Le troc entre deux sauvages suppose une
règle juridique fondant t'appmpriation et ht translation de
propriété que cette règle soit exprimée dans un droit positif
ou sous-entendue, il n'importe pas ici. Que reste t-ii de n'im'
porte quelle théorie de la valeur, si i'ou retire ht condition,
sous-entendue dans tous les raisonnements, d'une appropria-
tion individuelle des bieus ou de certains biens et ia possibi-
lité d'un échange garanti seion certaines régies? Un peut
mettre au dén de citer une notion ou une proposition écono-
mique, concernant la vie sociale des hommes en tant que
telle, qui n'ait pour condition l'existence d'une règle exté-
rieure déterminée de ta vie commune
tt y a sans doute une économie isolée, et non sociale; mais
elle se résout en science de la nature et en technologie; elle
étudie les choses, leurs propriétés, et les procédés avanta-
geux pour les approprier a nos besoins. Mais cette économie
natnrette-technique n'a rien de commun avec l'économie
sociale il n'y a pas une science économique générale qui
aurait deux branches. L'économiste doit assurément réunir
en sa personne les deux compétences; mais les disciplines
sont distinctes. La division du travail, en tant qu'elle permet
uuo économie de temps, un accroissement d'adresse, etc., ne
relève que de la technologie: elle n'entre dans le domaine de
t'économie sociale qu'en tant qu'ette implique ou constitue
un mode d'action en conrmun, extérieurement régie, une
espèce déterminée de vie sociate, socialement oraonnée.
L'introduction de la machine à vapeur n'est qu'un progrès de
technique le machinisme n'intéresse l'économie sociale que
parce que, les machines coûtant cher et les fortunes étant
inégates, l'ordre juridique existant fonde l'appropriation par
quetques-uns de l'avantage résultant du progrès technique,
et rend les autres socialement dépendant, dans leur action, de
ces quelques propriétaires des moyens de production désor-
mais indispensables. 11est impossibte de considérer une caté'
gorie proprement économique en dehors de toute hypothèse
d'une vie sociale et d'un certain ordre sociat donne
Dès lors qu'appellera-t-on phénomène économique? tt
s'agit toujours ici, on le voit, d'une exécution concrète d'une

(t) Stanoxh'r.Op.<< p. 20t.


(2jM., ttt-itMipah.'ttM-nt MMNi.
iM-tM.)M-i!M.
AS.UASK! – TM)!o)(t)M )!<:0'<omQ)')M 493
A 1- -1 11.
vie socialesoumise à la conditiond'une règle déterminée.
Les systèmesjuridiques historiquementconstitués laissent
aux hommesqui y sont soumis,à coté d'ordres directs, de
simplespossibilitésde rapports.Ils déterminentla façonde
se lier, si l'onveut se lier, et les conséquences,lorsqu'onl'a
voulu; mais ils ne tient pasdirectement.ce sont les individus
qui, de teur initiative,ontà se liersouslesconditionsposées.
C'estle cas pour tout ce qui concernela satisfactionde nos
besoins,nourriture,etc. En ce sens, la vie socialeest i'en-
sembiodes rapportsprivéssoumisà une règle qui s'étabiis.
sent entre les hommes.Touteréalisationconcrète de vie
sociale,pour autant qu'elle ne provientpas d'une influence
centrale directe, s'accomplitpar la formationde rapports
juridiquesentre les particuliers.Unde ces rapports ne suffit
pas à constituerun phénomèneéconomique il on faut un
grouped'analoguesplus oumoinsconsidérable.Ondira donc
qu'il y a phénomèneéconomiquequand il se produit un
ensemble de rapports juridiques semblables(Ktn <ptotto.
mMcAM ~Aft'HOMMt A<')M< o'nf ~<<«'AAMf<t<'A<'
jtfaMCttftwA~-
ttM~ rot) ~fc~wA<f<<K<Mp ') ainsi une prise à bail ne
constitueraitpasà elleseuleun phénomèneéconomique,mais
ce sont des phénomèneséconomiquesque le fermage, le
métayagedans notre sociétéoù cette sorte de rapportjuri-
dique est trèsfréquente.– De)àuneclassification des phéno-
mènes économiquesd'après les rapports juridiques qu'ils
impliquent,doubleclassification analytique,qui considère
ces rapports en eux-mêmes synthétique,qui les considère
dans leur réunion selonles personnes,sujets de ces droits.
Il y a des phénomèneséconomiquesnégatifsconstitués
par l'omissionou la violationen massede certainsrapports
juridiques(chômage,surproduction,prostitution,etc.)
Lestermesdu problèmeinitialvontmaintenantêtre posés
ainsi qu'il convient.Commentse produisentles phénomènes
économiques? Deuxcas sont possiblessuivant que t'état du
droit reste le même ou varie.Si le droit ne change pas, les
modificationséconomiquesne portent que sur la quantité
maisencoresous quelle cause? Les progrèsde la technique
ont une inituence,mais indirecteseulement elle n'a lieu
')) St)m))«)''r.
Op.ct< p.Mt.Cf.p.NM:~Mtcmttt/K'M~xwx'tM'jnn~
'<tt'/)M)'~tf/<'
J)faMfMf<'tfAf<MM))~ft)
M:ta< Mt)<f<'
~M'fj~tft'~f:)f/)MM9M
~tMf/fftt.
(i!)Id.. p.S6M8t.
~94 t.'AXXt!K S()Ct"H]t!)QC8. <897

que par l'intermédiaire de l'action humaine. Et il y a en


second lieu l'influence de l'homme; et en réatité c'est la
seule directe. Ces phénomènes ont Us lieu selon des lois,
nécessairement ? La question revient à rechercher une con-
naissance exacte des raisons empiriques de l'action humaine,
à établir une causante des actes humains considérés. Lesditu-
cuttés de cette tâche sont grandes, on no peut guère fonder
positivement que des observations particulières, tt est donc
impossible de parler ici de cause et d'effet au sens rigoureux
des sciences de ta nature il vaut mieux parier seulement de
tendances (7'f~<'M:pH),en entendant ainsi la connaissance
d'un développement uniforme des phénomènes sociaux tel
qu'un événement correspondant peut être attendu*.l,
Le cas où le droit change, et non seulement le phénomène
économique, pose le problème essentiel. De quelle manière
les changements du droit sont-ils soumis à des lois? En quels
sens sont-iis nécessaires? Comment fonder, comment appré-
cier la légitimité objective de ces changements ? – Le droit
ne provient pas de causes autres que des causes sociales. 11
n'y a pas dualisme dans la vie sociale, le droit et l'économie
ne procèdent pas de causes distinctes; la forme et la matière
detaviesociatenesauraientétreindépendantest'unedet'autre.
H n'y a pas lieu non plus d'invoquer une cause première,
commune et supérieure aux deux, un t'o~e< Il convient
de soutenir le monisme de la vie sociale, non seulement on ce
sens que l'objet de la science sociale est un, mais en celui
encore que tous les mouvements de la société humaine sont
conçus dans une seule et même (<<w/j~M<~i-<'<f. Les phé-
nomènes sociaux produits, dans un état de société donné,
par les rapports juridiques donnent naissance, en se déve-
loppant et se compliquant, à des posées, désirs, efforts qui
tendent à une transformation du droit, nécessaire pour mettre
la forme en harmonie avec la matière, tt n'y a pas de classe
de phénomènes ayant le privilège de causer les transforma-
tions sociales, comme Marx le prétendait pour les ptiéno-
mènesde la production. Logiquement un modede production
donné est compatible avec plusieurs modes de consommation
différents. Historiquement la cause de la crise moderne est
moins en ce qu'un mode de production nouveau s'est établi,
qu'en ce qu'un mode de consommation et de répartition

<t)Stammh'r.
0~. <-{<p. 9~.30!i.
AX.tLYSH- – T)))!')t)))! 49S
<!t;))NMM~)'K''

ancien s'est conservé.La surproductionest seulementrela-


tive, c'est-à-diretient à ce que le régimede répartitionde
l'état socialantérieurest tel que beaucoupont des besoinset
n'ont pas d'argent. Les hommesse sont assemblésafin do
produire,dit Marx colaest incomplet tes hommesse sont
assemblesafinde produire~ottrf/)«'<M'Mft
Le conflitest donc entre ht matièred'nn état socialdonné
et ht formequi dure encored'un état socialantérieur.Est-il
vrai, commele prétend le matérialismeéconomique,que né-
cessairementà ta matières'accommodera la forme?– Est-ce
un strict rapport de causalitéqu'on veut poser?tt est clair
que ta formesocialene saurait avoir pour cause la techno'
togio qui n'est même pas sociale; il s'agit doncdo l'action
communesocialepour ta satisfactiondes besoins le rapport
alors n'est pas de causalité.Dit-onque ta défensede lu patrie
est la cause des armementset préparatifs,et non pas que
ceux-cisontles moyenspour cettefin ? Le droit est destinéa
régler un mododonné d'activitésociale;te droit est donc le
moyen et la vie socialeta fin. Le droit n'est qu'un moyen
pour le but de la production. !t y a conflitsocialquand le
droit établi est en oppositionavec la fin mêmedu droit'.
Quelleest cettefin?
Une téleotogiesocialeest nécessaire.Unefin individuelle,
étant toujourssubjective,une fin empirique,étant toujours
contingente,ne peuventfournir le principeobjectifet obliga-
toire du droit, l'unité régulatricedetoutela viesociale.La(in
socialedoit être proprementsocialeet a priori.Aucun con.
tenu matérielne peut lui être assigné.Ledroit est un moyen
pour desfins humaines le droitest la conditionde lu mora-
lite le droit est un moyennécessairepourque la viesociale
soit conformeà uneloi.La finsocialeest doncpurementfor-
melle: c'estla liberté.Unesociétéd'hommesdelibrevolonté.
voilà le but dernier, inconditionnéde la vie sociale (/)«*
<t<'mctMc/«~t /re< M'o«<'M</<'r Vouloir librement,
~<'«<!c/)ftt).
c'est,affranchide touteconditionempirique,poseret choisir

Op.'-f<.p. M!i.3M.
«j S)M.Ht)w.
t~ Voir av'f t)U<')te Mt'nt'-tnttion )'<tutcnr montre quo to nmt<'ri)t)!n)c
<!Ct)t)')mi()U<))')« tW' < i"t''n''ttif la tinttiM 'httti! )'<M'('uoch'
t<K'ntdu ta iiot'Mt'' futu)'< «)))tt)t''Mt (-hoxir ''otn' h'nfttMt <it la m'-tt' sinon
pourun'! rai~'M do thuHtMt L<t ~ociathttU'm dus biens Ni jtnxhti)')). itmt!'
pt'itH' <)'' )))ort j)t)Ut' )t' pt'oMtNt'tttt qui <'))tpt'c)~'<(UHnous ne cono.'ntiuttt
ù f't'Uo Htort. sinun une raison d'* tintttit'! t
496 L'.tXXÉESO<:)t)t.t~WR.)M?

de telles fins, qu'elles tendent au but dernier absolu; libre


volonté veut dire position d'une fin objectivement valable.
Une société d'itommes libres est donc une société dans
laquelle chacun fait siennes les nos objectivement justes des
autres. Voiià eu quel sens ou peut opposer au matérialisme
social un idéalisme social'.
Un idéai réalisé ne serait plus UHidéal la question sociale
est donc insoluble. Ou ne peut qu'approcher indéfiniment de
la soiutiou. Mais il no s'agit pas de dépenser noa efforts à
atteindre un état Idéal absolu, il s'agit seulement de les cou.
sacrer a obtenirune vie sociale objectivement juste, c'est-à-dire
un état social qui, sous ses conditions concrètes particutieres,
possède la propriété formelle d'être conforme à une loi. Et
cette possibilité est là qui peut se réaliser, pourvu que nous
voulious bonnes pensées apportent bonnes actions C«~'
t.'f~H~'H //nM~fK~<' y/M~'M C'est sur cette formule d'intet.
lectualisme optimiste que s'achève le livre.
L'ouvrage considérable de M. Stammler ne parait pas avoir
besoin de commentaire, la pensée y ayaut revêtu dès l'abord
sa plénitude d'expression et se recommandaut d'eiic-meme
par sa valeur. !i n'est guère plus besoin de critique. – Ce
livre contient en somme au moins trois œuvres harmonisées
en une seule une discussion du matérialisme économique,
une conception de la science économique, une métaphysique
sociale. La discussion du matcrialisme vaut d'abord par la
force qu'une exposition à la fois impartiale et pénétrante a
donnée à la doctrine visée, puis par l'excellente position de
t'exameu auquel eUeest soumise il s'agit de vériner un rap.
port établi entre la vie économique et ta vie sociale; ne faut-
il pas définir préalablement avec précision < vie écono-
mique et vie sociale "? Or, c'est justement ce seul travail
de définition qui, une fois fait, se trouve avoir rendu insoute.
nable le système considéré. – La métaphysique sociale,
comme toute métaphysique, ne serait critiquée que par la
construction ou au moins par la supposition implicite d'une
autre métaphysique. Ce u'est pas ici le lieu d'entreprendre un
pareil travail. H serait intéressant d'autre part de rattacher
historiquement à ses origines philosophiques et surtout aUe-

dj StM<tt))t)w.
Op. cil. Viet~cs Duels, So:)<t~ MM~it. F6Hftf!iBach.
J~ M<'<'A< dea ~<<<M.
t!) M., p. 040.
AXAt.~E:– THtMHtKS
)!cuXUM)Qt')i< 497
mandes cette conception caractéristique de la liberté et de ta
flu humaine, individuelle et socinto. Pour ta conception de
la science économique, elle aurait besoin d'abord, sembto-t-H.
d'être dégagée de cette opposition un peu scolastique et ver.
bule de la (arme et de ta matière. Et ensuite, pourquoi
NI. Stummter a.t-it, même pour le temps seul de l'analyse,
restreiutla re~te sociale extérieure, dont dépend l'économie,
a la simple règle juridique''L'fpithete de < conventionnottes
qu'i! applique aux régies de la seconde catégorie, coutume,
mœurs, etc., prête à croire qu'elles sont plus arbitraires,
moins imposées aux individus, moins socialesen un mot, que
la re~te juridique, ce qui est une pure ittusion. ti serait inté-
ressant de rechercher comment l'économie dépend de ce
second ordre de règle sociale. Le concept de < social avait
été assei! soigneusement etabore pour mériter de n'être pas
dissocie au cours de t'etude. Maistu voie ouverte est féconde.
C'est la distinction, si remarquablement instituée, entre ce
qui ressortit, dans le complexus économique, a la pure tech-
nologie, et ce qui y appartient à t'cconomic, c'est la définition
du phénomène économique en fonction de facteurs sociaux,
qu'il faudra reprendre et approfondir, si l'on veut constituer
une science économique qui soit proprement une sciencé
sociale.

D. – J~'rfM.

A\v. Y~cE'fxo MHD.t'S).– La funztone eoonomioa meUa vita


politica, con)'t''ft))'i<n'' di H.\mcut''KHKt
(Z.«/b))e<<oH
A'MMMt'~Me
f/«Mtla t't'e)wM<Mf'.ttoma. EonaminLocscitt'rand C", <895,
t sol.)n-8",\)t)-tM;).
Cet oun'a)! )(')M't')x))a tt~otonstt.tti'm.d~it't tentât', ttutnntt~'ia-
tistuc~C['no)ni()uc –
pat' h's fitits. La fonctionde nutrition est ta
tttttctiuniottispet~attieet fondanu'tttatodf lavit-ur~Uttqm'.Tout tt!
tKvptoppemt'nt putiUqtK;t't est (-onditiont)~ pin' t't'vohttion~co-
m'miquG. L'auteur passe <-))tt'vne )'))istt<it'<'
dMnotre Khinsation
uccidcotatt',en s'f'))m'<;ant de prouverqu'il et) a <!tcainsi a t'ori-
~ine .pt'opri'te cotntuun'*do ta tt'rrt', p. XO,etc.), dans l'antiquité,
au moyenaj<e(ta nohteMC fondée uniquententau début sur lu fur-
tune, p. 38),dans les temps modernes(la ttevotutionfrançaises'ex-
pti'juantpar une transformationde la propriétéfoncier' connsca-
tion des biensnationauxet suppressiondu domaine éminent de
i't~tat,p. SO).Aujourd'ttUi,da))!;ta potitiquecontemporaine, tout
'taMit ta prépondérance du facteuréconomique la législationfaite
K.t)M)iM:tM.–Ant)''('Buciut.i89T. 32
498 L'.t<fXHK.«'t:)t)).<)(!)~)H.)S'n

MUpw<ttd'')ach)«t'pt'da))t<'<'tdiri~<'i)nt')'it)()wtn'<-d'-)!t h)))))'*
i'auqm'd.UtS t(~('U))S<'i)st!()))Y(')'))t')tt'-t)t!tU\.<'tr.,t'tc.
))))<'f.Httd('m-
pa.<!tH<'))dt't-d''s[)us.<(-.<di)~<)ntt-s,d'')')-:tut,d<-sn''fur)))<<tui.
<aht''s:))'~i;)'t'<'M))td'f))'<-)Ut''m('s,)Ku'h'dt:YL')t)p))t'n)('utnK';t"
!!tnrt.'d<')\u))<!)))i<
ûaYuitt)Ut')('t)MYund)'M.M)')h)'-in'it.inutc~u<'t-t'Mux ))m)th".
dut)ti)st-rt'chutK':M:u'x,tp)usdm'ch')))t-tt))).Lut'i!)tduntt'<uvn'
<tqua)ith''t'qm'tqm'p:))t.p.t7,d'<i)))pt''t'i~.<!th)t't;.t.im)'mt'itit
ptutùtpt'hht<))u!)ui,intn)oius('npt'ish')):ia<tus!)t)t't'-con!
ntt')U('d<)u)i))):u)<'(".t:t.sMv:)~U)',)')))'))\'st)))us<.t)'i(;t<')tt<'ut<o))s-
titu'p:tr)t')))"dfdcpt'<dm')iunik')~t!i)))t'd'')aj)t'u))ri<t<f'd<~its"u-
v<')tt'tt't'cu))si(h''n'')dtttt'(.))tt)tt' untn~dcdt'x'-pnttitiuttqu''
'-t)t))t)X'Ut) )ttudcdt'j')'<'d)trti~u.j';t puis't'tc'f-st tâtons~)':n'<'))))<)))<'
)'t's<tb)t'.quid'![i)tt'm-sn'')-Hh-)'st'p:)ss<'u)t')))''tttt'tM.M'')tt).<i),)''
tnatt~-)!t)isnH'~ct'n"tuit)u<'d<ifn'utoit's''f()ndt')'))isto)'iqm')tt(.'tit.
('x)~)')m''n)!t)t')))''))t)'om'ainsi di)'c''f))t se nt))))(')h')M-dt's.ustf'
f«Wt'Sob.«')VMtiut)Sd<'M.StUM))ttct'.

L.-).. DUC)' – Money and its rotations to Prioee, )'<-i))p.tn


iMtjuit'yH)totht'cau')))('<)!Ut'c)m'nt,Mnd('(f<t-ti.oft-)Ktn~[".in
tieutit'ut pticc!-(/.« Mw<M(f<'<'f<
<t ra~M~j! nt'ff' /M p<'ft). t.undo)).
Swan Suum'ni.cht.'in:md H".t.unttun, Kfw-Yutk, Charles !'ic)'i)'))<'t'<
Sous, <MG,i yot. i)t-t2, o-XOOp.

C<;IhTe!)t;t'Mit!ttU)))'r).'ch''td''ta)~utK'dutiYt'<'d<'M.th)t))'f!ui)t
<)U'una,)))ushimt.iaissf)'d<'cûU'<f.stHY)'<'d<;)':u~'ns't)itvau\.
dont t'honn')<'t~ et ia tn~thodc.<ci(-))tiO')u''S!t<tn'ounu''}., qu'i) cot)-
Ytp))dt'i)itd'<tudift')a qucstiu)) :.) c<m)))!t-Xt' t-) si d'attucdc ta tn"tt-
nMit'ctd(')av!t)iutiundt's)!)t.M.))uUtt:ttin~'t'st!ttta<')))''j)at)i('n)it'
t'etnf))titd~'t''ttnit)t'tAttMY('tSt)"trf)ti~t«tt't'<cn))Otni<)n<'))')'(t)<'dt'
)'~ta)M)n)0))~tait''f't)n')Uf'sHfmf)nmt't:t))isn)~.C'<t)('t)t't)h)(')))('
)')u'!g~))''ndd'')nv!u'iati<')td<')'f')~cm)')t'd(".pt'ix<)UfM.ti';f)t Il
<-SMy~d'h)<'i(tt't' histo(i')Uf))x'))t. ).f pn'tnic)' soin ttevait t'h'c d'-
re<'))Ctchc)'connncnt t'n pumuit tncsuMr h' chnnt:f'n)f'))t r') d<
pt'ix. M. t'tirt' t'xiunh)'' tt's ditï~rcnts systOncs propost' cxpo!!t;<-)
c)itn)U'' )h)ta)))))h't)tt''s d)Yf')':tttudcs d'/w</<f Mt<M&<')'f; dont ou H
voulu se !,<'t'y)t'h.t:t''t"!ttU)''))()))<)('et utih't~udfdomcthud''
statistique, fuis itf[udi)')Mt't!tx<'t tes ('ons~tjm'UK'sdaosI'fcouu-
)nie~)n~:d''<'tp:u'ticu)it'n' <)MY:tt'iMtiu))sdes prix (ch. ))).))II
pxutnit)'' i-uct-ci.i.ivt-nx'nt )')ev<t)it)ndes j'tix qui a suivi ta decou-
vet-tcde t'Ant'iq~ '<')<.)))~ )'!thai.-s(-nMt)td< p) ix im cuuM de i:t
prcmit'rc piutic du xt\' '.it''c)t' (ch. ni r~i<'Ynt:on des pt-ix qui ))
suivi )a d~'ouvHrtf d''s ntincs d'ot fn C:t)ifm'nie et. en Austrati'-

~)Y.)))us)t<mt)).t8M.
(% Y. plus h)mt p. ~TU.
A'<VSH.<.–T)'MtH)K'')!o'<"MtQt)M 4MH

(ch. v);)'n))aiss('mentdf.<
~isscmcntdf'.tf't'ix 'lui s'est produit''n'esvinpt
prix (;ni der-
nt'w)nit''n';t:'i'vi))f:t(Icr-
ni''res années (cit. Yt~.L'autetu-s'attend, dans t)nf tnatien* aussi
''()ntrov(')'ee,a))epa<'t!at:t)er)'asse))ti)nentd''tm)sse):)ecteut')t)ai!!
i)pretend!t~)'eapp)i(n)ea))epa'!a\'an<('rd'assc)-ti"t)strop'-oj)tes-
tatdes, a présenter des opiniuns fondées sur t'ettute attentive des
faitsetFexamen sérieux des théories antérieure". f)n peut tui rendt'f
cette justice <m'ii a suivi ce )!rt't:ra)))tt)e.)ts'e-!ta))ste))u de previ.
siens téméraires touchant t'incertain avenir. Xatitoite sa tAche A
retudpet«)')ti!.toiredespfi)ft'ipa)esv«ti(t)io)t'.depfix'{U(o)ftcu)icu
danscesder)ner.ssiee)es;i)asus'ena':tp~itt!'retnepase))
!.orti),n)eriteuuin'est))as commun.

< )tLMH).)X. – ProMëmos d'économie politique et de statis-


tique (Cot)ection d'auteurs étranger-! t'ontcmjwrahts.t'aris.ttui!-
)autni)te)t:iM6.tvot.in-8",vHt-3S9)!.
On a <')<oi.si,pour les traduire en )'rat)';ais et tes reuoir sous <<-
titre, tes articiesJUttes tes p)ttS))ro)'resaiute)-e'<€)'t''put!)i('fran'
''aisdansIes/<f</t'/f«/t(/~M/!tf?~fde)<Utnetiu,recUt'itdese-travam
tes ptus importants. <;e sont des morceaux déjà anciens (tonti)su)-
th'!Kt<')'appf')('t'ici)< titres: U)))<!tiond'une )<u!-<'cia)c.)XG'?.–th
ta tt«tit')n(''j"'u)')t')'«?),<.SK:–).<U'u(iti~M<'t't ja ))Mr:tf'<X74:

– !)*' i'u)))'-t d'; la i.tuti~tiqm'. <M3; ~uti~t) t't dun'c d'un'' );))'
t'utif~n:– S)tt')<<th~orh'sdc Matthus; – Vittc t't Ca)n)':tt!))'–Cu)-
ton' oturith' t't cutturc intt')!ctu<'))< <876: – De t'))at'itudc, i8'!9:
–t)<'t:tSUt'j)Upu)!diu)),tttttt.

).~o.\ \VA).)t;\S. – Études d'économie sociale (y'Ac'««'t'f/t'/« f~««-


t)'<t'u«</t' /« t't'c/fMf ~t'/«/< – LauMtXK',F. )<<'Uj;c,<'t Paris.
F. t'ichux, i8t'6, < vul. i)t.8", u))-t04 {'.

M.L<!onW!)h'asat<'))onc~a('xj)"!«'t',dan!.(h'ttxtt'ait<st)tti
auraifnt con'L'Sjx'ndu aux /m«)<)! <fCfMOMft'<m/f7<~«'' ~Wt'f<etud''
(les lois ))!ttm't')tfs df ta vatt'urd'~chaujjft't de )'<< imn~c,uuttK'urIr
d'; la ticht'Sitc sociaft'), les deux autres parts d'' ~aduct))))'' ct'utttt-
Mitjue ~tst)cia)c:)'ctud<; des eonditious tes jttnsfavurahh'sd'')'.),!)-)-
L'utture,dt')'indui.tt'it',dm't'tn)nt')<'f,ducr~dit,uut))r<:))n'd'')i))')'
ductinn de )a m'hos' (t'f' t)u'i) apjx'Ht'/cM<uM«'/«~f'/f'tMff/~<h~tff'c
''t iYtudc dM t))<'it)t'tu''scf)))ditiu))sd)')a prop))')' t't d'' )'i)))pùt. ou
t))f'<')icd'' )a n'-partitiû)) d<' lu richesse (''<' (ju'i) appt'tte /f-oMnwx'
ifuct'a/f). !'uur supph'p)' autant <)uepoM))')'' il tt's trait' il r'~mit.
'')) les <o)up(ctant et tesordoxuant, de. études, m~muires, t'tt: dt\i)')
)!ub)i~s. ot) il a abordt? tes points principaux du sujet, et y donne h'
titt'C d't«<M <f'MKOm< ~0<t'<fy«e~t/t~t«'f et d'~M<< <<'ft'OMOMtf
<ocf«~f.Ce Yutume-ci est le prenuer publié; comme faut) <;contien-
dra en outre un résume de )'eu!ie)n)))ede la ductritx', il contieut
de t'attend)' pour une étude conndete de )'u'UY)cde M. Wa)ras. –
~M (.'AXX){);sm:)o).nf!~Hi.)897

). présent votume contient une théorie ~enO'atc déjà société fconr':


profMseentM7.<;8,p.23-t':)).un<-«U)'texpos(''desa)net))ode,)ne-
thodedecon('itiationd'')asyttttt<se(p.i'203),ecritent868;un''
tt)eot'iedeta)n'oprit'')'sous):tforn)e:u)KtytiqueettMatheM)atique
(/«<'w<'tf<~<<t!<96),p.2M-246.qui)'etieatatt)eoriet!et)erMtede
tttso<'it''te<)utt)'oriedet'idea)so).-iat.tat))eori''de)areati'.atio()do
t'idt''at.<oti:tt outhéorie dupri.t des terres et de )em'rachat par t'J~tat
n)athf'u).'tti')ue)))ent conduit''<p.2CT-:<5U);etennt)diverses études
sur )a théorie de ('impôt déjà pub)it'cs:u)teur~. M. Wa)r:t3 reim-
pri)ne(''t;a)etnentuHtt'av:ti)sur)).-)L.<!osse))Je précurseur)ot)(;ten)ps
tnecunnude)'econontiepo)it)t[ue)nathe)))i)tiquc.

t)))Jo)nx-\K)!r;rt~tCKH. System der nationalen SohutzpoUtik


naoh Aussen. Xationute Hntuk' (iasht'~uut~'t'f :ttn'h (tf)tt'idu-),
Kutuniitt-,\iin'tmns-. ).)')<[-, m)dAt'hfih'r-Schutit-putitik. KinHfmd-
huch fiirdi)')«'hi)dt'k'n :t)t''t' Stiind'' '.S~wt<'f/<w~'<<t«' t<c~)'
<<!f/t'c«)«t<<&M<tfe
t'mttt'c <f<'<!<~<*<tL-uu, (:. t-'i.sctK't,t8MC,in-8".
\-SM['.
Le .<yst)''t)x'd<' J\L'u)f' <tt' Mant'tx'stt't' ou dMlu tibn* <:oncm')'<')tc<
tfM('ti('ttuti)''ai:un)i<'m'a)")utit':)it!t)'~)it)tit)!ttiuuuU!'t)'t':t''(;-
mfttt<tt"if!u)'s,t!U)t''))tt')'"findh'idU!i';u\'nttvt''sHt!(ts.i(I'
t't".trit't!uns<'td<'s)i)nit'n'y~tai<t)t:t)'pot'[w.i/ns<'n))')<'()<"i
t))''sut'td'm'drc divers par tt')!))tt':))t'suu)'h:ttprut<):if tr:n':tit
ttMtim)!d<-untn')act'u'mT('nct'~tt'i)nt:<n'<'stc't't)u'')).Wf'f'ttic)i:('
!t))j)'')i)'ia))u)iti'tm'd<')u'utMti<L'n)t!tti<)n!t)''cu))H')'ctri))))!C)'.ti!
t'm)~s<'d:)U!icftin<'d(')t)''ttn')t'sj)t't-)inMcu)ti\~Mt)ucuur.mt
d''Sf)t)t)))'<'<'ux)'t''ji!t)''t)tt')t');.<d't'attus.tou.<d'Hct)miit~,qu't')ft'cu)u-
j'ot')' it tt'!ti)<d'ai!urd (tf <-)'~)tticonstitue tu ))o)iti<))n'co)M))frciu)''
))r<))'rt'n)t'ttt dite d< droits protpt'tfurs, historiqu' fo))d''m<'))t,
tnudc~,D'-suttat~; df's tt'itit'~ d'' t;"ttUUt'r<;<t't'i)iin< tarits cuuvutt-
tiou)n')!i,'')uu!i'' df tu natiott lu j')us iin'<'tis< ctauscde recijtMci~
des pritxes il r<portation de I');tab)issctnt')ne))t de purts francs;
des tt;msj)orts, navigations, chemins de fi'r de ('institution dM
confuiat~. ~'t'st une autre form'' d'* )a po)iti<nt<'de protection ttatio-
naie 'jue lu pu)iti<)uecu)uniah'. C'en est. une autre encore ))uf lu
j'otitiqu'; muxetaire et tinancirre nx'm'ntetttttistne et himetititisme,
''redit, han<)n)'. change. Toutes cf's (juestinns sont donc passées en
revue par M. Wernicke. tt cftnsacrc une e'ude spefiate au pt'ohtemc
si impotant dans ta ))f)titi<jueactuette de ta protection asticote
mtu'che des ))t's. droits sur tes ce)'t'!d''s, pt'ojK'sitions des U):r!trien'
Enfin i) exposela question des ouv<it'rs étrangers.
t)n voit que le livre de M. Weruiettc est t'ien un nmuuet" de
potiti'(u<*protectrice. L'expose est était',)) présente avant tuut des
faitsetde:t données, et lie procède j)i<s d'unparti pris dogmatique trop
fréquent est ces matières qui intéressent ta politique contemporaine.
L'information statistique est soignée, et, pour uue part, résulte (!c
.tXA).YSt!.<.– ).K!iMMH'KMHXT!!
)')U))-'HS.<fO.'<X)!).SOI

r<'ch<')'cht'!<(n'i);in!t)<'s.
).'))<'ttib))<)~t':)[)t)i<'
utitf'st itjout'a j'omra~c.
).tt')<'U)'fr!U)r!H!<tt'UttY<')'i(S!tt)'tddUt')))'* )'mt''d''M. \r-
nn:t<t't'tsum'<'))tfiut''<tU)")i))~d''t'u''t"t''h)'!)f't'')!t~"iit)')UM''t
tte)'tn(t(''ch')'!t'))Ut.')))nt)'h'tpou)-t-t')it)<jMU't'in<uj))j)u)'t'')'«-.
't'a)))')icatiu))~n't'!t)<C'est t'im;~HM)tit;ntim~'hu))t<'d''tuutt)'av!u)
(t't?c"notni('itatit'na)t't'otn;)'('(<

H.–t.KS CtU'L't'HMHNTSt'HOFESStttXXRLS
¡¡
f'MM.At~rtMtt.HACO.

ALFRED DOREN. – Entwlcklung und Organisation der


Florentiner Zûnfte im d3. und 14. Iahrhundert. (/~r<
~ppfnx'n~ et <(;tt<Mf<Mt ~M cw/M~t~'onx '/<' FhrfMrc.)
Leipzig, Dunckert et ttumbtot, t )4 p. in'S" (dans la collec-
tion de G. Schmoller, Staats-uud sociahnsseuschftttUcho
Forschuugea).

Pour !a période antérieure au xm" siècle les matériaux


nécessaires à cette étude font défaut. Cela est à regretter,
car les origines nous échappent pour les corporations floren-
tiues. comme pour tant d'autres associations semblables des
villes du moyen âge mais en somme le xur*et le xn"'siecte
ayant été pour la grande cité toscane des époques de splen-
deur et de richesse, la connaissance des institutions de ce
temps surtout importe pour l'histoire économique et sociale.
L'organisation sociale de ta cité ttorentine est établie sur
l'existence de diuérents métiers ou corporations; chaque
citoyen devait appartenir à un art les nobles durent se
faire recevoir dans l'une des corporations.
M. t)oren divise les corporations florentines en deux caté-
gories t" celles des f/fKf!(/e w~ffrs et pro/cMt'om~rf~M et
celles des <M~<M~'<M tM'f<<M.
Dansles premières, tes juges et
notaires, les boulangers, les marchands de légumeset d'huile,
les charpentiers et menuisiers, les fabricants de clefs, les
teinturiers et fabricants de boucliers, les fabricants de, lances
et harnais, les forgerons et serruriers, les marchands de vin
et aubergistes, les fripiers, marchands de toile et tailleurs, les
médecins apothicaires et merciers

(t) Un'MtpointfjUMtion dus t'hanfMUMet bMtUif)' dont le r<~efut


<-at<ita)u~ bttM'tuicr
devintptas tardlep)m<:t:.
50~ L'AX'ŒHSOCtttLUtit~rK.
i89t.

Au point de vue social, ce qui caractérise ces premières


corporations, c'est que les hommes qui en font partie sont
d'une condition économique et sociale il peu près sembtabto.
Au point de vue de leur dévetoppement, ce qui les carncté-
rise aussi, c'est le démembrement de ces professions en un
plus ~rand nombre, au fur et à mesure de révolution générale
et de la division du travail.
M. Doren cousucre ensuite une longue étude aux corps de
métiers des industries textiles. La proportion plus étendue de
ce dévetoppemeot correspond bien a l'importance que ces
industries eurent réellement dans t'économie sociale do !a
mediévaie Fiorenec. D'abord les i-'torentins acqnin'nt une
notoriété européenne comme uppreteurs et marchands de
draps ils achetaient <'n France, et principalement dans les
cités manufacturières méridionates. des drapsjj;rossift's ({u'iis
remettaient sur le métier, retoucitaieut et retrempaient puis
ils fabriquèrent des draps eux-mêmes et fournirent à t'Europe
les plus ete~ants et les plus ricttes; quelques villes de
Ftandre seules rivatisaient pour lu beauté de leurs produits.
Au xm' siècle, le commerce uorentin est ceietM'epar ta vente
des draps français apprêtes 'art de Caiimata) et par !a vente
des draps indigènes (f«'.</«H«' Au xm" siectc la confection
des ctotïes de soie fait la richesse de la vittc.
Ces industries textiles travaittent pour l'exportation, et
elles ont socialement amené la formation d'une opulente
classe de ~«n'/«w/.< et d'un p~'«M(«'M<o«r~'«'< une lutte
sociale s'est ensuivie te résultat a été, après de longues
résistances, une tendance des corporations a l'organisation
démocratique
L'intérêt de l'étude n'est point uniquement celui de la
connaissance de la structure sociile de Ftorence les métiers
avaient aussi un rôle politique la constitution donnait le
pouvoir a vingt et une corporations.

J'ai puhti~ <))U)!< la HcfMf ~< .Sot'to/t (t)i'J7) un )trti<'t<'.ur )M tutt':


<)''<<')a'<Si'SM))'')!U)'ht')m)tb'n.<)hj')U)nunt~<'t)tt)t)~'t)(t'<)tt'tisim.<
tt":tih-<s')~!th'ntt))'«'tt)t<).<)t)t<t')):u)')«'tav!n''ntt)t)'n<'<)ut-<mtt)<-tt<
.i~')'<)!t)utt')!)~tmi'~t!'t't!<itt)t'.J')H'iti.sf.ix«!t)!<)M'mtt'ttt'h'))tnt))-
prut-J«'t)))'nt<tuituf.tit-nh-)''<htU'h't')tt.<('.<!)ttiunt<.t)r~it)!H)~ )<
')''<)': ~<'utst!<t')i"t' 't')"y'ttK);M')"<'t)'"<
t'ttmdt'e!i, ttt':tn!M df dt'a~i<:M(jui tniv~ittcut puur t': KUttttm;r<;<:itt~nM-
tiunut.
AXAt.YtKS. '.– ).K< tiKOt t'KMHXT!) t'Ht)FK<.<)OXXKt. S03

HKHMAN ViM utiKUNDEN.


VAS .~n Tt'Mm.'V ––– T~a
Les <m~~n tM~tt~tt~M~~n
Gildes marchandes
dans les Pays-Bas au moyen âge. Gand,t89)t, Ctemm,
!26 p, itt-8".(Reçue!! des travaux publiés par la Faculté de
Pttitosophie et Lettres.

L'excellente monographie de M. Van der Liuden nous per-


met de saisir comment la bourgeoisie marchande des Pays-
Bas au moyen âge s'est constitut'o en classe organisée pour ht
iutto économique et pour )a domination politique.
Les Pays-t!as ont été au moyen âge un grand centre de
grande industrie, je veux dire d'industrie qui occasionnait
ua grand mouvement commercial tant par l'achat des
matières premières a l'étranger, que par ia vente, aux grandes
foires de l'Europe du moyenâge, des produits manufactures,
ces beaux draps que les Flamands avaient tissés. Trafiquant
pour l'achat des laines et ia vente des draps, les marchands-
sont devenus une puissance.
Mais à l'origine ces marchands ont du se protéger les uns
les autres, au cours de leurs voyages, ils se sont réunis, ont
forme des associations. Peut-être d'aitieurs ces associa-
tions comprirent-eites dès l'abord les fabricants, ta ctass&
industrielle aussi bien que la classe marchande. Mais,
petit ù petit, les associations acquirent des monopoles et des
privilèges et elles songèrent à éliminer de leur sein t'etement
plébéien, ou mieux les riches écartèrent tes travaiiteurs.
En thèse gencrate ont peut affirmer que toutes les grandes
villes iudustrieties des Pay-Bas au moyen âge eurent leurs
associations, jatouses de dominer le marotte toeat mais ta
Flandre et le Brabant au cours des siècles modifièrent en
sens divers leurs systèmes d'associations.
En t''iandre les villes associèrent leurs (.<MMmarchandes
eu une union generaie, la Hanse de Londres, qui accapara le
commerce avec t'Angtetorrc progressivement ta Hanse de
Londres deviut l'association des riches marchands des grandes
cités flamandes elle réunit tous les éléments du patriciat
commercia! elle représenta tous les intérêts de la caste,
écarta les industriels et, grùco a l'appui qu'elle trouvait dau&
les coHi«'<b aristocratiques desviites, elle dominait )o pays de
Flandre, et réglementait le travail des industriels suivant ses
propres intérêts les Gildes marchandes locales disparurent
alors; elles n'avaient plus de raison d'être.
Dans les villes du Brabant, le patriciat urbain -non com-
804 L'Axxt'E !'m;)f)).ofit<R. )~n

merçant, ne se fondit pas avant le xtV siècle avec la Gilde;


dans les différentes cités, les Gildes subsistèrent à côté des
conseils de ville, endehorsd'eux. Les marchands ne dominant
pas les villes, ils ne purent confondre leurs intérêts poli-
tiqueset commerciaux avec ceux des villes voisines. D'ailieurs
leurs intérêts n'en étaient pas moins confondus avec ceux des
conseils de ville et )a ciasse patricienne trouvait son instru-
ment de domination et dans ces rouages politiques et dans
ces rouages économiques les Hitdes se firent reconnattre des
droits par les conseils elles se firent concéder une compé-
tence judiciaire et une compétence administrative sur lu
classe industrielle, les drapiers principalement.
En résume, ies Citdes des Pays-Has furent des syndicats
d'intérêts commerciaux ces syndicats do marchands tendi-
rent progressivement fi i'exptnitation de ia classe iudustrietie.
Aussi les industriels, fuuluns, drapiers, teinturiers, etc.,
reagirent-iis coutre les Ci ides, voulurent en forcer t'entrée
pour participer à t'adtninistration économique de ta cite ce
fut l'origine du mouvement démocratique.
A ia fin du moyen a)!c la prospérité des Gitdes diminua, tu
où elles avaient subsistt' ()uaud la prospérité économique
fléchit. Xecs au moment de lit sptendeur économique, ces
associations disparurent avec elle.

ËTtKXM: MAHTtX SAIXT-Lt~X. – Histoire des corpot'&.


tions de métiers depuis leur origine jusqu'à leur
suppression en 1791, suivie d'une étude sur t évolution
de l'idée corporative au \tx si~eie et sur les syndicats pro-
fessionnels. Paris, tM~. ehexCuittaumin. 6f!<!p. in-

C'est un livre très gros. très compact. n comprend plusieurs


sectionsdont les titres sont prometteurs: L Origine des cor-
porations. H. La Corporation au xm' siecte. – itt. Les cor-
porations de )<?:!i4ui. – IV. Histoire des corporations de
1461à i6iu. –V. tHstoirc de i(i!0 a i7i! – \'t. Histoire de
)7i5 à leur abolition définitive. VH. ~tude sur révolution
de l'idée eorporative au xm" siecie. I,e présent et t'avenir.
Ce livre, qui contient nombre de conceptions surannées, est
d'autre part insuffisamment informé en vain sur ta question
des origines chercheriez-vous des renvois aux ouvrages de
Liebeuam~MrCMfAtcA~Mn~O~Mt'M/MM ~M/<tfMM<«'M t'cn'tK-
)fMf!!s,de Waltzing, les Co<'po<-(«<otM p~'o/e~oHM~ cA~ les
– LtM
AXAt.tSKS. <i)«'L')'EMf!XTS
t'noFK~'uXKHt.t )!<?
n.A.n cf /'t ,r
ou même, les Cu~M~'ottit t'OMMtttM
/!oMHt<M, c~<rWou
bien, pour les associations gern)aui({ues, quelque allusiou
que ce soit aux L'«~M«fA«H~'<t ~'«' ~'McAt<)«' </<*<'
A'«M/'M««)tt.<-
!</<'wf/M~<~f/««~< de Uoren. t)e la première partie du livre
ou ne saurait tirer grand profit.
L'étude sur le xm"siècle était faite depuis longtemps. Crace
aux travaux des Depping, des Pagaie: etc., ou n'aeu ici qu'à
résumer de bons ouvrages qui depuis longtemps sont publiés
et ont alimenté la littérature historique.
L'histoire des corporations parisiennes serait bien intéres-
sante si ou pouvait suivre leurs vicissitudes mais ici Fon
est utie un peu vite et, s'it est capital de savoir daus quelle
mesure les mouvements populaires de la Ligue ou de ta
Froude ont été favorisés par les métiers, cela est loin d'être
fixé, et tout érudit scrupuleux demandera ici uu supplément
de preuves.
Je remarque d'autre part que la politique des rois concer-
nant les corporations a etu l'objet de plusieurs chapitres, que
les corporations parisiennes principalement ont été étudiées.
Mais les provinces ont été pour ainsi dire laissées dans
l'ombre et je ne tiens pas pour sutusantes les quelques pages
qui leur sont consacrées.
A ces réserves j'en ajouterai d'autres. M. Martin Saint-
Léona voulu, (lit-il, écrire t'histoired'uno institution qui a été
pendant prfs de sept siècles ie type essentiel de t'organisa-
tion du trayait Je ne saurais souscrire a cette proposi-
tion le travail industriel au moyen âge et dans des temps
moderaesne s'est point entièrement faitdans les villes, on pour-
rait mcmedire qnec'est dans tes campagnesqu'a lieu en grande
partie cette transformation des matières premières en objets
d'usage qui constitue le travail industrie) et les campagnes
ont échappé jusqu'à ta fin à l'organisation corporative. Les
campagnes tissaient, faisaient de ta dentelle: les campagnes
étaient les centres de l'industrie metatturgique. – La corpo-
ration urbaine est tout autant une organisation do marchands
qued'industriets ta corporation groupait les boutiques et les
échoppes.
La Révolution a balayé les corporations que Turgot n'avait
pu que supprimer temporairement; ce système a pour toujours
disparu. Les conditions économiques ont changé des idées
nouvelles out surgi; l'ancienne corporation est morte à ja-
mais quandon l'a supprimée, sa décrepitudeétait notoire; les
~OC
t.'AX.'<)!H.<()t:)o).f)m~t'E.~M

procès que les dinerents groupes corporatifs s'intentaient


deceiaiettt l'un des vices les pius graves du système & la fin
de l'ancien régime, cette organisation idyllique n'avait su
concilier les intérêts des patrons et ceux de leurs ouvriers.
qui de leur côt6 formaient des societ<s secrètes et sentaient
combien iisutaient peu de chose dansla
corporation. Aujour-
d'hui l'idée des groupementsprofessionueis a fait fortune ou
a crie que c'était un retom' au passe ou ne
saurait, partant
ainsi, dénoter avec plus de candeur une doubtc ignorance de
l'histoire des corporations et de t7«.</o«'<'
</M.~)<t-«~; entre
les deuxtypes d'ot'~nisatioo tout diflere ia corporation avait
pour fin Je monopole, l'accaparement par quetques-uns du
marche ioca), pour base )a regietnentatiou du truvuii. – Bien
que les groupements professionnels contemporains soient
souvent toin de satisfaire a l'idée de concorde sociate, ils sont
cependant autres que les corporations; ils groupent les indi-
vidus dans un but détermine, mais l'adhésion est libre, le
nombre des adhérents n'est pus Hmite. ti suffit de signaier
ce double caractère pour opposer deux organisations sociaies
du passe et du présent qu'un tenterait vainement de con-
fondre. C'est par une sorte de contrat que l'on entre dans les
groupes modernes, et t'exempte de ia société industrielte
anglaise contemporaine permet presque de penser que les
ciasses opposées par des intérêts arriveront egaiement à
r<'g!erleurs relations par voie de contrats et de conventions
t'utre les groupements ouvriers et patronaux, et par l'inter-
médiaire de leurs représentants respectifs.

?At;t.DEROt'StERS. – Le Trade-Unionisme en Angle-


terre Bibtiotheque du Muséesocial '). Paris, Cotin, 1897,
35Cp.rn.t8.
Ce n'est pas l'histoire de la formation des associations
ouvnèresangtaises, ce n'est pasuon ptus i'examen de toutes les
associations professionneites britanniques que i'on trouvera
dans ce livre, mais un MM<;Mjtr<~j'/< les (/<'<)/M/b<'m<<
~«f pr<'Mt)<')~/M ~'OK~fm~~ OMP/'t'C/t .!<«'f(«t//M ~<~t'K/M
(H<<tM/<W.<«M~t«'~M ils a/KfMt.
A quelle cause rattacher ce puissant mout'entent d'associa-

~It(:n livré,-e~1Imillil:11\ In cnllulurealiml ~lu~ur, da Cai-liellitit-1.


Ht-ury<-t
nt f:~th-r'-
F')y. M.<t Wpu)))!'? – av)'
i)h'*)))). f~'.~«tfe
ht <))))t))ur.tU"n
«;<-ta<
<).~dM
ubtifMM.
ctt <)';
uutr'Carhottnt').
un t!)')6.
'teuxt'irctthito:.t)" 4 ft T. ~crifA.<urles anioMif ant;)'
.\X.\).Y"H.<. – ).H!it.Mt't't'HMEXTSPK(tfH!tOXXH).s !)07

tion qui caractérise aujourd'hui tes tendances des groupes


ouvriers, conscients de leurs intérêts ? – Alors que ta corpo-
ration ancienne est morte et que sa décrépitude favorise les
attaques des adversaires d'une institution incompntibte avec
la liberté, conçue suivant l'esprit desorthodoxes de t'econo-
mie politique, voici qu'en Angleterre, le pays où ces doctrines
furent surtout puissantes et populaires le groupement l'em-
porte sur t'individuaiismeet l'isolement.
Ce phénomène social est intéressant alors qu'au moyen
âge les associations curpuratives sembtentavoir été organisées
par les marchands et pourles marchands (v. M/« ), il l'époque
contemporaine, c'est dans te monde de l'industrie et dans la
classe des ouvriers que ta tendance est générale. L'Angleterre
Il donne l'exemple de l'organisation; ta France a ses syndi-
cats, t'Attemagnc ses f<f«v~r<'M)M<' et ses ~«'fr~ta/f~t tous
les pays de civilisation iudustriette tendent vers une semblable
organisation.
Nous trouverons exposées dans le livre do M. de Honsiers
quelques-unes des causes du mouvement trade-uniouiste,
ainsi que les modes de ces manifestationsde groupement. –
La nécessitedu groupement syndical résulte pour l'ouvrier des
formes nouvettes de l'industrie le machinisme a pour con-
séquence Ics grandes usines, Ics grandes agglomération!;
ouvrières.– Les ouvriersreunis semblent mieux comprendre
leurs iaterets; peut-être (mais ceci nos autours ne le disent
pasj que le rapprochement et la similitude de condition de
nombreuses famines leur donnent une sorte de conscience
de classe, comme disent les socialistes allemands. De toutes
les façons le machinisme rend vainc la lutte individuctte
pour l'amélioration de la conditioa économique de t'ouvrier;
les unités sont impuissantes et ne comptent plus. Pour
valoir quelque chose; il faut s'unir. D'autre part, les cou-
ditions du commerce ont change. Jadis, à l'abri de solides
tnuraittes douanières, les commerçants rivalisaient onchaque
pays comme on un champ clos on faisait supprimer la con-
currence étrangère par l'intervention gouvernementale. Au-

(t) Uhut tt'initnjUt'rM')!, t ox'n ~'n~,que)f h)ac)<hti!.t)«' o'~ point


!:t'u)<'t)h.ttm'
)< ):f<m))t'tn''t)t!< tt.ottt'rne
)if)'ttt.<t)i'' f'f'Mt'fur lu huai))'
h' j'hts ~'UY':nt )'< x" '< ")'h)!.tnf~ fot'))M'î)t''n
)'.t\'sdt*hottit
K'tt'!i.t.A-t)in; s'' ptt'M'nt''t hn'!t)ii''))t t!j<phi')u<'tx'!t)t.Tout'-<'<
tUmi~'M uni.<<'n))''u ')'' vin' ~nt ptu!'j))ti!t!m)< 'jn'itsn!')<:s';Micnt<i.
au )"tu))tU!isi ttutttbn-UX, teUMmi))C< étaienttrf'~~juijjnwth;~UtM~ des
<tUtn:<.
SOS
).'A<fXt5f!S()UM:.Ut!)~rH.iM7

jourd'hui les barrières sont renversées, ou presque, dans lu


plupart des pays; le mouvement commercial entratne dans
une générate concurrence toutes les nations tous les
pro-
ducteurs doivent produire aux mêmes prix; ils tendent
a faire travailler leurs ouvriers aux mêmes
conditions ils
créent chez les ouvriers des difïéreuts pays une similitude
de situation qui les amène à se grouper pour lutter contre
les patrons.
M.deRousiers. qui indique nettementcet état deschoses,
et qui légitime ta forme trade-uniouiste, semble
pencher
bien moins en faveur de l'entente internationale des travail-
leurs; les opinions personnelles pour ou contre n'importent
d'ailleurs guère, mais ce qui était important à
marquer, c'est
que la tendance des ouvriers au groupement, à l'intérieur
de chaque pays, a pour corollaire le groupement interna-
tional des ouvriers de mêmes industries, et ce nouveau
phé-
nomène social général est d'une portée extraordinairement
grave c'est un des mouvements géncraux les plus puissants
et les plus gros de conséquences que puisse enregistrer
l'histoire.
Le phénomène indiqué, les causes dites, on a
marqué
comment ce besoin d'organisation ouvrière, partout ressenti,
s'est manifesté suivant chaque genre de métier. L'on montre
ainsi que, < suivant que les ouvriers sont groupés en usines
ou dispersés en petits ateliers, qu'ils surveillent une machine-
outil ou qu'ils travaitteut à la main; qu'ils fabriquent un pro.
duit de consommation courante bu un produit de luxe, un
produit transportabte ou non transportabte. jtx/Mnf ~)M
/<< M /f/t-/MM< (< <'<M7/««M<~<oM </M<MM<<,les intérêts
professionnels que les unions représentent varieront dans
leur nature, nécessiteront plus ou moins le
groupement
des ouvriers. La question ouvrière change notablement
d'aspect suivant les conditions d'outillage et les débouchés
de chaque industrie (p. 3~. Et c'est pour ces raisons
que
l'on a étudié des métiers de types difïérents
représentés par
leurs unions unions d'ouvriers du bâtiment, d'ouvriers
agri-
coles, de dockers, unions dans l'industrie minière, dans les
constructions navales, mécaniciens, unions dans l'industrie
textile.
AXAt.YSfM.– t-ES CHf))')'HM)iXT.<
t'H'tt'EsstuxxHLS 80H

MAXHHtSCH. –Die BntwicMan? der Abettefberuïisve-


reine in Grosabrit~amien und DentscMtmd. 7)~ft'h/~f-
MtfOt<<Mf/t'MM~M ~<'0/f'MMHH('h(/efraff«~t't<MfM
/iM~/f<<'n'<'
ff ('H .)/<<'M<H~M('.
Bertiu, Hermann Hattr's Buehhandtuttg,
)896, 76 p. iu.8'

Depuis longtemps le nom do M. Max Hirsch est insépa-


rable do toutes les questious concernant le mouvement syn-
dical en AUetnagne.At.Max Hirsch est un des promoteurs eu
pays allemand du groupement des ouvriers à la façon des
trade-uuionistes. Alors que le socialisme se repandoit en AHe.
magne sous l'actiou do la propagande iussulienne et tnarxiste,
M. Max Hirsch a rêvé de pousser les ouvriers de son pays à
relever leur condition, commet'avaient faitceux d'Anf~sterre,
en se coalisant pour l'augmentation des salaires, ta dimi-
nution d"s heures de travail, en se groupant pour se soute-
uir de là les associations permanentes.
Aujourd'hui le mouvement syndicat atiemand est remar-
quable par son organisation, par le nombre des adhérents
mais ce ne sont pas seulement les hommes du < parti du pro.
grès qui ont organisé des associations professionnelles le
parti démocrate socialiste s'appuie lui aussi sur des groupe-
ments syndicaux et les socialistes chrétiens ont eu recours
à de semblables unions. On ne nous a pas encore dit
la dinerence d'organisation de ces divers syndicats ouvriers
dont les principes et les fins sontsi dim''rents.
Dans sa très courte brochure f7Sp.), M.Hirsch nopeutque
tracer une esquissedu mouvementdans les doux pays, encore
iusiste't'it sur t'Attemagne plus que sur t'Angi<!terre pour
laquelle le livre des Webbnous fournit toute documentation
suffisante, et en Allemagne c'est naturellement sur les syndi-
cats formés sous sou inspiration qu'il nous donne des rensei-
gnements. On distinguera t° la lutte des groupes ouvriers
contre les entrepreneurs pour t'améliorât iondelour condition:
~l'organisation des groupes en tantqu'ils fournissent auxtra-
vaitteursdes caisses de retraites, de secours aux invalides, des
bibliothèques, en tant qu'ils permettent de créer des coopé-
ratives de production ou de consommation.
UtO ).'A.\X)!E.<()t;t<H.(H:ttt'H. <)!!):

H).–)U.<H'nt)(Kt)UTft.\Y\)t.
)'<U-M.mEHTA)tt.t<AtU.

Ça. LÉTOL'RXEAL'.– L'évolution de l'esclavage, dans


les diveraos races humaines. Paris, )8~, Vigot, M8 p.
in-8".

M. Létourneau n'a point voulu étudier la condition juri-


dique des esclaves, mais it a prétendu fournir une contribu-
tion il l'histoire du travai). Cette intention est nettement
exprimée t)e manière ou d'autre, avec plus ou moins de
brutaUte, la somme du labeur nécessaire au maintien des
sociétés a presque toujours été imposée à une fraction seule-
ment des populations, c'est-a-direaeteservitc.
Cet ouvrage est conçu d'après la méthode ordinaire de
Fauteur le phénomène social de t't'sctavage est étudie dans
les différentes races humaines: on a même poussé l'investiga-
tion jusque dans la série animale, chez les fourmis où l'ou
aperçoit la division eUa spécialisa tiundesfonctionssociates.–
D'ailleurs l'esclavage no se rencontre lits chez tous les
peuples les Fue~iens, les ttottentots, la plupart des Ksqui.
maux et des Peaux.Rouges, les Australiens l'ignorent. –
5t. Létourneau dt'ctare que. pour que ridée de l'esclavage
vienne aux hommes, certaines conditionssont nécessaires et
elles peuvent se résumer en une sente, ta possibilité de tirer
de l'esclave un parti avantageux. Si l'on examine le
mode de recrutement de l'esclavage, on s'apcrçoitquct'homtne
devient esciave comme prisonnier de guerre (certaines races
auraient mis en réserve les captifs comme viande de bou-
cherie a manger pt us tard~on devient esclave encore, comme
enfant de personnes serves, par déchéance suivant l'insolva-
bi)it6 du débiteur. Je ne saurais suivre l'analyse de l'ou.
vrage chapitre par chapitre. Pour qui sait les exigences de ta
critique historique, il paratt diniciie de croire qu'en peu de
pages on puisse résumer l'histoire d'une institution trèsre-
pandue et qui mériterait tant de monographies de détail
rigoureuses et documentées de façon critique. L'auteur
d'autre part semble,en de certains passages, hésitant, lorsqu'il
compare, à la condition des esclaves, et celle des femmes
dans certaines civilisations inférieures qui leur imposent la
.t.Y!tHS.–))).<T())MK))L'TMAY.Ut. !!t) 1

part la plus forte du labeur social et celle des proté-


taires dans ta société actuelle. Mais il ne saurait y avoir
de doute ni le protétariat, ni l'asservissement des femmes
no peuvent rentrer dans une étude sur l'esclavage et, si on
avait é)iminé ces deux sortes de développements, on aurait
fort aitegé le tivre:qu'ii y ait dans ces deux derniers cas
comme dans celui de j'esciavage uue forme des abus que
commettent les forts sur les faibles, c'est ce qui est indéniable.
mais o))ne traitait point ici de l'histoire générale de l'exploi-
tation humaine. – Je nie demande encore pourquoi une
étude sur l'esclavage dans l'Europe historique » et dans
les colonieseuropéennes dei'ancien régime n'a point été faite.
Pourquoi le servage du moyen âge n'u-t-ii pas été étudie
On ne peut tout dire, il est vrai, mais pourquoi de préférence
alors choisir les peuplades mal étudiées et les périodes obs-
cures encore de l'évolution historique?

TnoHOLD HOGEHS. – Histoire du travail et des salaires


en Angleterre depuis la fin du xnr siècle. Traduction
avec notes par Castelot. Paris, 1897.

Xous sommes habitués à considérer t'Angieterre comme


un pays essentiellement industriel et commerçant c'est on
etïet le caractère actuel le plus frappant de l'activité écono-
mique de !a nation anglaise. Mais ce pays a jadis consacre
ses labeurs principalement a l'exploitation agricole du sol
aussi bien est-ce normalement ta phase première du déve-
loppement économique.
M. Thorold Rogers, qui l'un des premiers en Angleterre a
mis en honneur l'histoire économique, a donné déjà une
grande //<~o«'f </f<'<t~<t'«~t<n'
<'<f/M~n.r; mais l'ouvrage que
M. Castclot a traduit récemment pour le public français,
ouvrage paru il y a quelques années déjà, a permis à l'uuteur
de résumer ses recherches personneiies et de les combiner
avec les données des travaux de Young, Kden, Porter.
Ce livre et celui de Asliley permettent aujourd'hui de
suivre révolution économique de l'Angleterre; M. Thorotd
Rogers a été plus particulièrement porté à développer la
phase agricole.
La vie urbaine au xm*siècle n'attire point principalement
l'attention de l'historien économiste, mais bien la vie rurale i
les campagnes sont composées de manoirs ou viiïages dont
!H2 ).'AXXËH.<tjCh)LOti)Qt-K.JM1

ta population comprend, socialement, un seigneur (qui


possède un domaine; et qui exerce une série de droits sur les
paysans. it y a des francs tenanciers et des serfs; progressi-
vement les prestations eu nature furent remplacées pur des
redevances en espèces et les tenanciers devinrent des Co-
~A<M<'<'<! ou tenanciers suivant )a coutume. Dans les villages
du xur'siecte, tous vivent de t'agricutture; ou tisse aussi la
grosse toile et les lainages grossiers pour les usages domes-
tiques. Les seigneurs, eo dehors des revenus des terres cédées
ivdes tenanciers, béufficient, de ceux de leur domaine propre
qu'ils fout valoir directemeut. L'Augteterro dans cette période
du moyen âge cultivait le froment; chaque domaine consa-
crait à cette culture une superficie en rapport avec la récolte
que le paysan devait attribuera sa nourriture. Mais t'<I')evage
était une source importante de revenus agrh'otes les mou-
tons principaiement se pressaient eu nombreux troupeaux
leurs toisons alimentaient l'industrie drapiere de la très in-
dustrielle Flandre et eu partie cellede Florence les droits
prefeves à l'exportation permettaient aux rois d'Angleterre
de mettre des armées nombreuses sur pied.
Au xtV siecie la condition des travailleurs s'améliore d'une
façon inattendue à ia suite d'un fléau la peste noire qui
desotait le continent sévit aussi en Angleterre; un tiers de la
population disparut. < La peste avait <te surtout meurtrière
pour les hommes dans )a force de t'~ge et elle eut pour consé-
quence inunediate ta raréfaction de la main-d'œuvre, un
rencht'ns.sement extrême des salaires et une grande dini-
cutte à rentrer les recottes, surtout celles des grands pro-
priétaires chez qui les prestations serviles avaient été en
temps ordinaire insuftisantes.
Le Parlement intervint pour obliger par les lois les tra-
vailleurs demeurés maltres du champ de bataille à travailler
pour un salaire inférieur à celui qu'ils exigeaient de là
te célèbre statut des laboureurs qui resta en vigueur jus-
qu'à l'époque d'Elisabeth en vain la loi tarifait-elle le
travail et y contraignait-elle tous les valides la loi ne fut
pas respectée les travailleurs au xv siècle obtinrent des
salaires qui, en proportion des prix des objets de consomma-
tion, restèrent les plus élevés que l'on ait connus d'après
M.Th. Rogers, dans l'histoire des travailleurs anglais; en t38t
les artisans et les travaitteurs ruraux avaient organisé une
formidable insurrection temporairement vaincus, ils res-
AXAU'SKS.–tnSTOOtHm'DtAVU). 5)}<
tèrent pendant un siècle environ en une situation excellente.
D'après M. Thoroid Hngers, trois causes entraînèrent ulté-
rieuronent h) paupérisation des classes ouvrières J'altération
des monnaies,)a confiscation des fondsdos sociétés de secours
mutuels de l'époque, ftnntetnent les mesures prises par Etisa-
beth Nu) ne pourra exercer un métier manuel si ce n'est
après un apprentissage d'une durée de sept ans faveur appa'
rente, (;f)rles juges de poixtmetnbres de l'otigarettie possé-
dante) tarifent les salaires des ouvriers des corps de métiers
aussi bien que ceux des travaitteurs agricoles.
Les derniers clulpitres du livre sont consacres a l'étude dos
transformations de l'exploitation agricole au xvnr siècle et
au relèvement d'une partie de ia classe ouvrière, ({race au
trade.uuionistne; on désirerait que les manifestations de l'ae-
tivité industrielle des An~iais aient été marquées dans la
période de l'histoire moderne, maist'autenru'a fait qu'emeurer
le sujet; c'est aitieurs qu'il faudra chercher des renseigne-
ments sur cette put'iode de l'histoire dutravai), et i'on s'iu-
formera sansdifncuttes.

SCtH'LXE(.AVHRXn'X. La grande industrie, son rôle


économique et social étudie dans l'industrie coton-
niere. Traduit par Georges Cuerouit. Paris, Guillaumin,
~9<3iCp., in-8".

L'étude que nous présente M. Sc))uii:e-G:h'ernitzest une


monographie ori~inate: ta thèse soutenue par fauteur, bien
qu'elle paraisse paradoxale si on t'applique à d'autres indus-
tries qu'a l'industrie cotonnière anglaise, a ce mérite qu'elle
nous oblige il soumettre à une critique scvere les tieux com-
muns dont les tivresd'économie sociale exposent tes abondants
développements.
La question que se pose M. Sch. G. est ta suivante: < t)ans
quelle mesure le progrès économique est-il tic au progrès des
classes ouvrières? On sait la rÉpunse que les socialistes ont
faite il cette question, en n'employant d'ailleurs pour leur
argumentation que lesdocuments fournis par les économistes.
D'après eux. la prospérité industrielle d'une région n'avait
aucun rapport avec le bien-être des etasses ouvrières. Pour
ainsi dire. ta conséquence du développement de ta grande
industrie était ta déchéance progressive de ta classe des tra-
vailleurs.
H.Ut')')!M:)M.–Atn)M'i~).t!<t)T. 33
!'t4 ).<X);K~)<:tuLU(i)<jt't!.)M
M. Scttutxe-t.iivernitz répond & son tour que te progrès
économique, le perfectionnement de ta tectmique d'une
industrie, ta prospérité de cette industrie dans une contrée
ont pour conséquence t'etevation du bien-être de ta ctasse des
travailleurs. Kt pour arriver a sa démonstration, it prend
conxne exempte l'industrie cotonuiëre eu Augteterre C'est,
dit-il. ta piusam'iennegrande industrie; elle s'est développée
au xvm'sifcte en dehors des entraves que )a regiemcntMtion
née au moyen:~e imposf li )'industt'ie drapière elle a immé-
diatement passe u une technique perfectionnée avec )e!:
Arkwri;;ht. etc. E))eu groupe autourde ses centres d'activité
des !ttf)?)ot))et'a!)<Jt!s
enortnes d'ouvrier, part))) iesqueUes on a
pu étudier tes phénomènes les plus voyants de h) vie econo-
mique et soeiatc.On a d'abord eu une période de crise durant
h)quc)te h's doctrines sociatistesout tr.)uvedesadc])test)armi
les ouvriers, mais plus tard tes machines, devenues très per-
fectionnées,ont exise un personne!spécial iesproduits furent
étahtis a des prix triomphatement inférieurs n ceux des autres
centres manufacturiers, en raison des achats très favorabiesde
la matière première, en raison de t'etabUssetuent des tissus a
bon marche, grâce a l'immense production. Le mondeest a)ors
devenu tributaire de l'industrie cotonuiere an~taise. si supc-
rieure à toutes les similaires du continent et des autres pays,
et les ouvriers de cette industrie out pu faire accroitre leurs
salaires dansics marges d'un bénéfice, déjà très considérable,
réalise par les patrons. – M. Schutxe-Gaverttitx Montre ators
dans un tableau intéressant t'etat morat et économique de tH
etasse des ouvriers cotonniers anglais.
Si i'on oppose a M. Sch.*< que dans certains centres de
production eotonniëre autres que ceux de t'Angteterre ta con-
dition de t'uuvrier est encore mauvaise aujourd'hui, notre
auteur répondque ces centres d'industrie sont encore intérieu-
rement munis d'instruments de travail et que les conditions
d'achat de ta matière première sont mauvaises. – L'industrie
allemande de ta soie, supérieurement outittee, a permis aux
travailleurs attemands de )a soie d'atteindre a une coudition
qu'ignorent encore tours camarades d'Angleterre. Or on peut
juger, par les progrès techniques d'une industrie et Icstode
de son devetoppemeut, du sort des ouvriers qui s'y rattachent.
Maiste grandargutnenttiredu développement de t'industrie
anglaise du coton se réfute tacitement; on ne saurait certes
nier l'amélioration progressive du sort des travailleurs de
A\A).Y!.H<. – )!Vt)).rT)')X t;OMME!M:)At.E M5 i

l'industrie cotonuière anglaise. Mais t'attribuera-t'on seule-


ment au progrès de )a technique, aux multiples conditions
favorables a i'étabiisscment d'une marchandise créée pour
lutter victorieusement avec tous les produits similaires des
industries ett'anget'cs concurrentes? ~00 certes; il ne faut
point ouMier ici ie deveioppenteut du trade.uuiottisme c'est
aux résultats de la coalition ouvrière qu'il faut attribuer
encore, pour une forte part, les progrès de l'aristocratie des
ouvriers cotonniers anglais. toi ja coalition a eu d'heureux
résultats parce que les industriels pouvaient améliorer la
situation de leurs multiples collaborateurs en maintenant la
leur à un niveau très cieve. Dans grand nombre d'industries
mal outillées la classe patronale, en ellet, ne résiste à la con-
currence qu'en payant mal les travailleurs de ses usines et
manufactures. On dira donc que le progrès de !a grande
industrie est une cause nécessaire pour l'amélioration de la
classe ouvrière, mais ce n'est point une cause suffisante.

n.–t.'HVOU'TU'X <MMEM):tA).E
PtuM.AhmAU).

Cn. LHTOUnXHAL'.– L'évolution du commerce dans les


diverses races humaines. Paris, Vigot, i897, ?) p.,
iu.S".

M. Létourneau étudie les M~t«M(/« ('M~tcy-cfchez les Fue-


t;tens, les Australiens, les Veddahs de Ccytan, les Esquimaux.
La première partie du livre est cousacrcc au commercechez
les races noires, la deuxième partie aux races jauues. Ou ne
nous avertit pas du passage des races jauues aux races Man-
ches,et, sans coupure, sans distinction typographique, ou nous
amène aux peri-Ëgyptiens, à l'Ethiopie, t'Ëgypte, aux Arabes,
Juifs ou nous conduit en Mésopotamie, en Phenicie, dans
l'Asie aryenne, eu Crece, à Rome, dans l'Europe barbare et
médiévale.
Ce livre est abondant en renseignemcuts intéressants; it
est écrit dans un esprit libérât et l'auteur a voulu se débarras-
ser des préjugés fréquents étiez les gens de science au sujet
du commerce; it n'a pas non plus verse dans les éloges que
certains économistes accordent généralement au mercanti-
lisme.
Stti t8M
).XXHK':<)(:Xt).('t~)'H.
A signaler que des réserves nombreuses sont ù faire sur la
documentation.
Pourquoi citer ici M. Sutty-Prudhomme 'p. ~Onne (ait
plus aujourd'ttui du citations comme cettes-ci (p. tSt Cook
(/'f'fM'f<-t-~f~f;. – Cook. <~(/. /<«.<f«t).– 0)) ne cite plus
Prescott pour le Pérou, lorsqu'on a Markbam (~<m')/ n/'
~«, tM' et Middcttdorf tUM et IS't~. –t-:n j'esume,
M. Létourneau a fait un tivrc qu'it faudra tire, mais en le
tisant il faudra toujours te coutroter et te eompteter.

At-HXAXt'ËHvx HitAXU't'. Beitreege zur Geschiohte der


fif&nzcBstsohen HandetspoUtik von Colbert bis zur
Cegenwa.rt. Coutrihution à l'histoire de la putitiqne com-
mf'rdah' franr-itiseduCothert a nos jours. Leipzig, Dunckert
etHmnhtot, )8i'o.
Suivant quels principes et t'n faveur de quet': intérêts un
Htat re~tet-it ses retutions comtnerciates avec t'etran~er? Ce
livre pertoet d'examiner cette question en ce ([u! concerne la
politique cfunnK'rciatede ta France du xvn' siecteù nos jours.
H faut tenir compte de deux facteurs qui interviennent
danst'etahoration d'une politique conunerciatc les doctrines
prédominantes de t'efonomie politique et tes réclamations
des producteurs ou des consotnntatetu's. Ce qui rend de plus
en plus compiexe cette question, cest a t'heure actuette te
conflit des doctrines, le contnt des réclamations. )" des pro-
ducteurs ~"des consotnmateurs: ~'des commerçants. Toutes
les doctriaes. toutes tes rectamations se font entendre: i) n'en
a pas toujours été ainsi.
La doctrine des hommes d'État de l'ancien régime était te
protectionnisme consommateurs et producteurs étaient con-
sid''r<s comme protêts. :)u point dp vue as'co)e. par tes
reniements sur ta circulation des grains; les droits d'outrée
sur les objets manufactures protégeaient les manufactures.
usines et fabriques l'industrie était mise a t'ahri de la cnu-
currence ctran~ere; les industries étrangères dont h' pays
était tributaire étaient acclimatées. L'argent et t'or ne sor-
taient point, ainsi, du royaume.
Apres ta propagande des économistes du xvm' siecte en
faveur de ta liberté, la politique eommerciatc de la France
changea brusquement en t780; la porte ctait ouverte «ux pro.
duits manufactures de l'Étranger.
A'<.U.tSK<.–MVot,)'Tt«X<MMK)M:)tt.K !)t7
Cette politique nouvelle, dictée par des principes nouveaux
d'économie politique, amena une première manifestation des
producteurs français; les manufacturiers eu état d'infériorité
vis-a-vis de l'Angleterre poussèrent des clameurs de regret i
les pays agricoles et particulièrement viticoles qui acquéraient
de nouveaux débouches, les ports de commerce, les commer-
çants qui trouvaient une activité nouvelle furent dans ta
joio.
Tcties furent les premières réactions sociates d'un traite de
commerce conçu en dciturs de ta doctrine protectionniste
pure..
De fUM à )8M), ta politique commerciale est de nouveau
redevenue protectionniste! il est aise d'en saisir les raisons
!a lutte de ta Hevoiution et de l'Empire contre l'Angleterre a
et6 aussi une lutte Économique; la France, pour triumpttcr,
a essayé de supprimer de l'Europe les marchandises anglaises,
tente de substituer les siennes sur le marche; sous ta ttes-
tauration, les grands industriels ont continué a se faire pro-
léger par le gouvernement, gràce au régime censitaire qui leur
permettait, de pincer leurs intérêts en première ligne. Or il
s'est trouvé que les intérêts des propriétaires fonciers étaient
les mêmes.
Après t848.tes idées démocratiques trouvent leur corollaire,
sur le terrain économique, dans te iibre échange qui s'appuie
sur t'interet des consommateurs. Le gouvernement autori-
taire de XapoieonItt, acquis à ces idées nouveites. a rompu en
d85(iavec l'ancienne politique commerciale de ta iU'votution,
de t'Hmpire, de lit Restauration et de ta monarchie de Juittet.
A soixante-dix ans de distance les mêmes plaintes et les mornes
ovations se firent entendre mécontentement des industriels,
jote des commerçants et des viticulteurs.
Sous la troisième Jlépublique, les partis économiques se
sont reformes et ont tente do ramenerta France a ta politique
de ta Hestauratiou Les industriels ne sont certes pas en
générât outiites pour résister à la concurrence de l'Angle-
terre, de t'Aitemagne, etc. C'est une question de savoir s'ils
ne veulent point acquérir cet outillage ou s its ne le peuvent
pas.
M est difficile de dégager les régions de France naturelle-
ment protectionnistes, celles aussi qui sont naturettonent
libre-échangistes. Dans le département du Nord les produc-
teurs de blé, comme ailleurs, sont protectionnistes les indus-
!H8 <'<?
).'A\HH~M:)t)t.))U)QrK.
triels, admirablementoutillés ici, sont libre-échangistes.
Les régionsindustrieitesmal outHtce!;rcctatncntta protec-
tion les départementsviticolesduIlidi ont été iihre-echan-
gistes et changeut d'opiuioueu présencede l'accroissement
de la productionvinicoleétrangère. I! paraît évidentque
tout pays superieuretneutoutillé demande Je régime de ta
plus grande )ihe)t6; ce régime est aussi réclame par les
grandes agglomérationsurbaines, où les groupes des con-
sommateursperçoiventplus nettementleurs intérêts, en tant
que consommateurs.
S)X)t-:M)':SHC'm)X
DIVERS
ParMM.Mn-'t-'AXC. t'AL'C't:')' M PAttUOt
UCHKHKtM.

h'A?<'rn)t"t'"SO):)(').'W:)K
IF

11 a pu sembler parfois que l'anthropologie tondait à


rendre inutile la sociologie. En essayant d'expliquer les phé-
nomènes historiques par la seule vertu des races, elle parais.
sait traiter les faits sociaux comme des epiphëuomènes sans
vie propre et sans action spécifique. De telles tendances
étaient bien faites pour éveiller la défiancedes sociologues.
Mais i'.ttix~ M<'<o<o<t<c a, avant tout, pour devoir de pré-
senter a ses lecteurs un tableau complet de tous les courants
qui se font jour dans les différents domaines de la sociologie.
U'alilleurs, on ne sait jamais par avance quels résultats
peuvent se dégager d'un mouvement scientifique. Très sou-
vent, alors qu'il manque ce qui était primitivement son but
principal et sa raison d'être apparente, il produit, au con-
traire, sur des points secondaires des conséquences impor-
tantes et qui durent. Pour toutes ces raisons, nous devions
faire une place aux recherches de t'anthroposociotogie, et,
pour que notre exposé fût aussi (idéte que possible, nous
nous sommes adresses pour ce travail à un partisan de
l'école qui a bien voulu nous accorder sa collaboration.
E. D.

G. M LAPOLGE.– Les sélections sociales. Paris, Fon-


temoing, 1896. Corrélations ananciéres de l'indice
oéphalique, dan8ta/<cr«et<coMOM!Mpo~«y«<Mars18t)7.
MO ).<<<)!H S))C)0).U)i)~')!. tt!M

Ossuaire de Guérande, dans le /~<«<<«de la Société


scientiuque et médicale de l'Ouest, 4" trimestre )MM.
L'indice céphalique des conscrits du canton de
Rennes, t895-t8;)t!, dans le mente /~<~t)t, 2" trimestre
)8Mi.

C'est en )~87, dans la /<ff«c (<ht//t«~oh'/«', que l'idée


fondamentale de t'Authroposociotoj~ie a été exposée pour la
première fois. Dans un article sur la dépoputation de la
France, un savant encore peu couuu, M. G. de Lapouge,
expliquait la diminution de ta natalité par la moindre fécon-
dité des métis entre eux, les populations actuelles n'étant pas
des races pures, m'tis composées de métis issus du métan~e
de races anthropotogiquement dittérentes. Cette tttéorie ne
sembla pas d'abord très solide et l'on objecta que, dans d'autres
pays que la France, ta même cause agissait aussi, sans nro-
duire cependant les mêmes enets; mais elle couduisit son
auteur a toute une théorie des races, dont il devait faire la
base de ses recherches et de ses ouvrages ultérieurs.
Cette théorie est en résume la suivante les populations
actuelles de l'Europe ne représentent pas des races pures. En
dépit des expressions courantes, il n'y a pas de race germa-
nique, de race stave, latine chaque peuple se compose en
réalité d'étémeuts difïérents combines et métan~es pendant
le cours des siècles, et le rang d'un peuple dans la civilisation
est en raison directe de la quantité d'éléments anthropotogi-
quement supérieurs qu'il contient. Or cesétéments supérieurs
sont représentés en Europe par la race désignée sous le nonl
conventionnel de race aryenne, qui des pays du Nord s'est
répandue A travers le monde, et dont les traits caractéris-
tiques sont la haute taille, le teint clair, les yeux bleus, les
cheveux htoods et !a doHchocéphatie

(tt t) )«' s''rit]M~inuti)'h'tini)'i''i')U(')!j))< ))')'«)''<


))nt)))f<j)«h)):jM'
L'indh'crf)))mth)m' t"-tta htt'jït'urntiniotit<tu<'t'uh'utu)ti))tirt'
j)!n')t)t)et
<)it'if-M')Ktt'f)t)t)))f"M'')')HYi))f!i (;f
du rr.iftc. fjUutit'Ht <'N)'i'tff);'t'irant
t'ntrc70t't ~tni<"t).
L<;stt;nn'< d'!ti!-h')'hat' ''t « hrnchyct'pha)'' ~"nt ouptoy)~
<Mt''<t au ~n~ !t)~<!)t). uu «'n<n'tMtif.<) h' :tut''Mrsne .<'<ht
t!U)h'!t pa~
.<ur)atitnit''<)uii'~pat'cla hrtK'hvc~phatM*
<)*)t<'fù)'<) de )it dutk'h'x'ujttmtic.
)htn<tasuit''')'' ''<'tarth'h'.n~u.<appt'ton~dofirhufvjtha)'" h'i j'"ptt)Mti«ns
d"ft) t'indict'<t iof~tn'm'M)!0; t)m<'))\c~j)))ah"t't))~<)')ttt)'in'tn'L't'iit
iiM))~)n;ur t't K);)w.<<tti')')t)t)cs,<')'))<dont t'indi' <t <'M)r''XO c) 85. Au
tit'udf t))t's)tti'))hat<')<)ditm)'i d")i';))f)id< 'xt ))nn')to)d<~ton '(u':
w) )<)))!<
<'i)tf)i<'f );<'<dfXOou<)<; )!
//<"MO t'Mt'o/MftM.<)') lu nu'); htothh'.<)))))ch'"v)))m! ')<:hnut';tttittf.
– L'AXT)))t"t'u~Ut:t))t."UtH
AXALYSES. Mt

Suivante. deLapouge, l'histoire uous montre qu'en


domina.
Europe les races blondes ont toujours été tes races
triées. Dans ia suite des siècles, elles se sont métées aux
autres races, brunes et brachycéphales; les caractcres phy-
siques se sont croisés, et aujourd'hui qu'il ue reste plus que
des métis, les individus appelés ù jouer dans la société les
rôles les plus importants sont ceux qui. par leur constitution
des
physique et psychique, se rapprochent le plus de 'a~race
maîtres d'autrefois.
-soo't~Met
Dans d'autres articles, intitulés .s'c'<<'t'f<n/~
dans
~t'Mf~o~t'p«rtttf les ~oMtmfx M. de Lapouge établit que,
un même peuple, la proportion de sang aryen varie suivant
les époques, et qu'au cours de l'histoire ia plupart des
grands hommes ont appartenu au type dolichocéphale biond.
ou un type métisse qui ne s'en écartait, pas beaucoup.
C'était la pt'Mniero fois que la théorie uuthruposociolo-
gique était formulée avec netteté et précision. Cependant
M. de Lapouge avait eu en France un précurseur, Cobineau.
Celui-ci, dans un livre intitulé ~<' <'w/«<<~(~ <'<«'<'<
AuM«««M,
ou
paru en i85S, réimprime en i884, expliquait la grandeur
la décadence des peuples par la présence ou l'usure des éié-
ments de race supérieure. Pour les anthroposociutogues, il est
l'hommedo génie de ia science nouvelle, celui qui eut le pre-
mier l'intuition des lois qui aiiaieut se démontrer bientôt par
des faits exprimés en chiHres. Kncnet, M. de Lapout;e établit.
en comparant des craftesde ~eutitsitomtoes et de paysans de
de
Montpetiicr datant du xvu siècle, (lue les crânes
seigneurs avaient un indice céphaii'tUGde 14 et tes crânes de
p)6béions un indice de 78, c'est-à-dire que les premiers étaient
fois
plus dolichocéphales que les seconds. C'était la première
que la supériorité de la race dolichocéphale était constatée
par des chiffres
Le problème une fois signaté, les matériaux s'accumulèrent
et les vérifications arrivèrent a la fois de l-'raucc et d'Ailc-
mague.

MoMO.~)t't)(M.la t'a' brun' hM<'hy'~))hM)' !)'-taUtc('tu'i petite.?)<««


~MM~U~wn~p~
~thn)H')!t't~M<-tM.t)'At)!<hi..i').tt;M..f<<'M.i''Tu'uu)'Au.
~V<'f/<f<<-«K'-M.
v'-rftfmt! t'- :<!))n')ihtitt.r.\))<t)~)U.
~)~~h~~w<
~) Yoh't!.')'' ).!)))')U~< ''t t-t'MM' ptty'-tn~.
t:)'m' t)t't<ntit..))')tt<ttt)'.<
d«fM)'.<M/Aw/w/u.«'. )8!t. :)n-:m.
SiM ~Ats~H soctOMmot'B. t89?

En même temps que 0. Ammon, dont nous signalons ptus


loin les travaux, et même un peu avant lui, M de Lapouge
découvrait et formulait ta toi de lu plus grande dotichocé.
phatie des urbains, nommée aujourd'hui ~< f/tntmo/f, et
qu'on pourrait, aussi bieil appeler loi lie (;. </<-/.<Mw/f. j)
signalait en même temps ce fait assez curieux que les indi.
vidus qui sont attés s'établir hors de leur département
d'origine sont plus dotichocépates que les individus demeu-
res dans leur département même, d'où il s'ensuit que
t'étément dotichocépate étant t'étémeut migrateur, on peut
lui attribuer un plus grand esprit d'initiative et plus d'acti.
vité dans la recherche d'un plus grand bien-être, d'une vie
plus targe. Le brachycéphate reste attache au sol qui l'a vu
nattre le dolichocéphale s'en détache plus facilement pour
altéra la recherche d'un sort meilleur.
M. C. de Lapouge a réuni et développé ses théories sur
t'anthroposociotogie dans sou cours libre à tTniversite de
Montpellier en 1888 et t88U. Ce cours est devenu l'ouvrage
intitulé les .A'c~MM~on'ft/t'j:,paru eu t89U. Le titre du livre
en résume l'esprit et l'objet.
Toute révolution sociale, d'après M. < de Lapouge, est
dominée par la sélection, c'est-à-dire par uue sorte de
triage qui met en évidence et favorise certains éléments
anthropologiques plutôt que certains autres. < Les evéne.
ments historiques provoquent des mouvements de sélection
et la sélection à son tour amène des événements historiques.
Les faits sociaux s'expliquent par la lutte d'éléments anthro-
pologiques diuérents. et l'histoire entière n'est qu'un < pro.
cessus d'évolution biologique Mais M. de Lapouge dis-
tingue la sétection naturelle des sélections sociales. Par le
fait que l'homme vit en société, la sélection prend un aspect
particulier, elle devient une sélection MM-M/c. La sélection
naturelle assure généralement le triomphe du plus fort et du
mieux doué; la sélection sociale assure trop souvent le
triomphe des médiocres et des faibles, et produit J'élimina-
tion des éléments supérieurs, des <'t<~M~«M.Tandis que la
sélection naturelle est progressive, les sélections sociales sont,
pour M. de Lapouge, lamentablement régressives. Qu'etles
soient d'ordre politique, militaire, religieux, économique.
elles gênent les supériorités naturelles au lieu de les aider à
triompher dans la lutte, et avec les progrès de la civilisation,
elles s'exercent dans un seus de plus en plus péjoratif.
– ).'A'<T))K')M!M)CtO).Uti)K M3
AXA)AS)!

Considérons par exemple la sélection militaire. celle qui


s'accomplit pur l'effet de la guerre. Aux temps anciens, ou
aujourd'hui chez les sauvages,elle favorise la survivance du
plus fort. Chez tescivitisés, olle épuise rapidement les nations
qui s'y livrent. Depuis cent ans, les guerres européennes ont
coûté la vie à )3.(MO.(MO d'hommes, d'après unestatistique, à
20.UOO.OOU d'après une autre. Et malheureusement ta guerre
reste fatale et nécessaire entre des nations dont la fusion en
Ëtats-Uttis d'Europe semble pour longtemps impossilile.
Chaque nation, pour subsister, a besoin d'écraser ta nation
voisine. Mais la sélection militaire, telle qu'elle s'exerce
aujourd'hui, n'élevé même pas le niveau de la race victo-
rieuse. Chaque année, les conseils de revision prélèvent sur
une population les meilleurs sujets les refusés restent au
pays, se marient plus tôt et transmettent leur inaptitude phy-
sique a une nombreuse postérité tes meilleurs, pris par le
service, rentrent dans ta vie civile après trois ans de caserne,
souvent atteints des maladies syphilitiques ou initiés au mal-
thusianisme. Les éléments supérieurs sont donc stérilises
dans une forte proportion.
La sélection politique est une des plus nuisibles etto tend
à éliminer les indépendants, les énergiques, a favoriser les
simplement habites, les fourbes et les menteurs. C'est elle
qui a fait périr par t'exit. par t'échafaud, par h' prison, par la
guerre civile, un grand nombre d'hommes supérieurs, au
moyenâge, sous l'ancien régime, sous la Révolution et dans
les temps modernes. Au point de vue des résultats, l'analogie
est saisissante entre les luttes de partis et les guerres de
nations de toute façon, elles aboutissent a t'éthniuation des
éléments supérieurs.
La sélection religieuse a contribué non moins activement à
cette élimination par te célibat sacerdotal ou par les persé-
cutions. C'est une loi générale que les persécutés sont supé-
rieurs aux persécuteurs. La révocation de t'cdit de Nantes,
par exemple, a enlevé a la France nombre de familles d'élite,
dont les descendants se sont illustrés &l'étranger. Le célibat
ecclésiastique, d'autre part, stérilise, pour le plus grand dom-
mage de l'espèce, bon nombre d'éléments relativement supé-
rieurs. Knf!ntes mensurations révèlent que la bracbycephalie
est intense dans les régions où la sélection religieuse a sévi.
La sélection morale, comme la sélection religieuse à
laquelle elle se rattache, agit aussi dans un sens péjoratif. Ce
?m )/.tXX)iHs<)cx)Ln(n).)t'H.)8U7
ne sont pas en effet les grandes qualités, mais tes moyenneset
les médiocres qui sont favorisées dans ta lutte lu médioerit'!
est trop souvent une garantie de succès, et il ne fait pas tou-
jours bon d'être trop intégre ou trop scrupuleux dans ses
façons d'agir.
La sélectiou tégatc, qui seule fait expressément intervenir
l'idée d'utilité sociale et seuto s'exerce d'une façon cous-
cieute, est aussi justement la seule qui perde actuellement du
terrain. On oublie beaucoup trop qu'it importe avant tout de
supprimer les délinquants et t'en s'attarde bien a tort aux
idées de relèvement et de régénération.
Mais, d'après M. de Lapou~e, lt plus désastreuse des setec-
tions sociales, celle dont les cnets s'aggravent tous les jours,
c'est ta sélection économique, celle qui se traduit par les
besoins de luxe et de jouissance toujours croissants, par ta
stérilisation des éléments urbains, celle qui provoque le
dépeuplement et ta dégénérescence des campagnes, et t'eti-
tnination de l'aristocratie intellectuelle.
Les mensurations fournissent ici des donuces précises. Les
urbains sont ptusdotichocephates que les ruraux il y donc
eu sélection. Les campagnes s'appauvrissent sans cesse. au
profit des villes, en cimuent:; supérieurs, et les villes absor-
bent et détruisent en deux ou trois générations les étéments
supérieurs dotichocépbates, bionds ou bruns, qu'elles ont
attirés.
La sélection urbaine est le plus ~rand danger qui menace
la civilisation future. Les meitteurs sont attirés dans tes
villes, t urbanisme détruit tout ce qui nous a été laissé de
meilleur par de ton~s siècles de sélections désastreuses. Ainsi
périt le monde hetténique, ainsi périra la civilisation tout
entière, si t'homme ne veut pas diriger ta force de l'hérédité.
dont la science pourrait faire sortir le satut et lu vie, et en
appliquer les fois a ia formation d'une humanité supérieure.
Mais ici, si les possibilités scientifiques sont très étendues.
les applications pratiques restent très vagues et mal explo-
rées. Cependant des tentatives se produisent et se produiront
encore. Desassociations se sont fondées, eu Amérique notam-
ment, pour empêcher ta propagation des individus mat doués
et favoriser la multiplication des eugéniques, tt faudrait
familiariser les masses avec les idées et les phénomènes d'hé-
rédité, d'évolution et de sélection, et déterminer un mouve-
ment d'opinion contraire au mariage des individus tarés, et
.\X.\).YSK'–).T)))M')WtU<'t.')'!)K S2H
confort))'; aux veritubies devoirs de chacun envers t'espèce.
Mais (tevaut des problèmes aussi num'eaux et aussi peu
étudies, sur des données uussi values, il est hnpfMsibte de
pt'optK'tiserce <)nise fer!). L'aveHir seul (H)'!)que) parti t'ttu-
n)Mt)it''pourra tirer des lois ncquises de t'anthroposocioto~ie.
science trop jeune encore d'aiiteurs pour fortnuierdes n)Htn-
tpn:)nt dest'eûtes de conduite absoiues et définitives.

Il

f). AMMOX. – Die Gesohiohte einer Idee, in ~<««~t'/<~«


< (<f-H<K-/x'<)/<'t<f«fy, !890, t, )M;-t')7. – Die GeseM.
acha-ftsordnnng und ihre naUtrUchen Grundiagen.
/</«'«/tt' .s'ojM/t?t~<y/f, ~° édition augmentée.
tenu, Fiscttcr, )??.
M. 0. Attonon, de Kartsfuite, a rOsmne)')nstoire de i'an-
throposocio)<)}!ic en !;6u6rat et dMses découvertes en particu-
lier, dans ta s6rie d'artictes iutitutes //<~o('n' f<'«M<'
«Mf, et
qup nous citons en t6te de ce paragraphe.
Kn t8Xti,des recherches anthropoio~iftups furent entre-
prises sur les conscrits du ~rand-duché de Bade, par une
société sHvantcde Kartsruhe. i) s'agissait primitivement de
deternxuer les caractères physiquesde ta poputatimi du duché
et d'en tirer des conclusions pur'inx'nt anthropot't~tues.
MaiMces recherches amenèrent un situant de Kartst'uhe,
M. 0. Atnnton, a des constatations d'ordre bien difh'reut, qui
dépassaient en importance celles ([ue Fon cherchait, et qui
faisaientp<'m''t)'erj'anthropoiogieduxstc dotnaiuedc !a soeio-
togie.
Hu ehthorant les données anthropotos'ques recueillies.
0. Annnon <'onstata qu'entre la poputution urbaine et )a
popuiation t'uraie, il existe des di)!eronces constantes au
point de vue (te ht coûtent' de )!)peau, des yeux, des cheveux,
et au poiut de vue surtout des fortnes de lu tetf. Ces dine-
reuces se présentèrent dans le même rapport, pour tes quatre
vittesott avaient eu lieu les recherches, à Mannhcim, à ttci-
detberg, u Kartst'utte et ù Lorraeh.
Dans ces quatre vittes, ta population nrhainc renfermait
ptnsdedo)ict)occp))ates, avec un indice intérieur a 8t), taudis
que ta population rurate renfermait plus de bracttycephates
MC t.<XSt:KS<tt;)<)).(tt!)~'H.t)tM
avec un indice supérieur à 8!i. Le même phénomène était
constate en France & tu mêmeépoque par M. Ci.de Lapouge,
(lui n'avait pas connaissance des travaux d'Ammon.et, bien
avant M. de Lapouge, par M. Durand de Crus il a été cons-
tate depuis (tans toutes les villes de France où on en a essuyé
la vérification: ittoseravraisembinbiement partout où
t'o<~ A'<f~;M'H)f se trouve eu présence de t'<o .t~««M,
<M;)istaseu)entent.
Lit plus grande dotictiocéphatie des urbains étant un fait
bien étabii, il restait à t'expliquer. Tout d'abord, on écarta
l'hypothèse d'une intlueuce dotiehocéptmtisantc de ia vie
urbaine, soit d'excitations iutellectuelles plus vives
et plus fréquentes, soit d'une fréquentation plus protougée
des écoies. En effet, des mensurations effectuées sur les
mêmes sujets à différentes dates ont démontré que l'indicé
varie peu de douze à viugt ans, et ne varie plus après vingt
ans, sauf de rares exceptions.
Une solution pius vraisemblable du probiéme posé, c'est
qu'il existe une relation entre certaine (orme du cerveau et
le {toutpour la vie urbaine et l'aptitude a s'y maintenir. Les
dolichocéphales seraient donc attirés vers les villes en vertu
de leurs aptitudes et de leurs tendances psychiques, et ta vie
urbaine e!ie-mé)ne exercerait une sélection qui détruirait ou
éiiminet'aitiesététnentsbraehycephates.
Cette explication de la plus ~f'Hnde doiichocephatie des
urbains, et la loi de dissociation par déplacement qui en
découle, concordent d'ailleurs à merveitte avec une théorie de
Hansen snr les courants de Réputation, théorie exposée
dans un livre paru a Munie))en i88'<. La campagne fournit
un excédentde natalité beaucoup de ruraux en conséquence
sont obfigésd'aiiergagner leur viea la vitfe. A ia vifie, ia plu-
part sont étiminés, eux ou leur postérité, par la misère ou la
dégénérescence.L'n petit nombre seulement 'élèvent jusqu'à
la classe bourgeoise ou cultivée. Ces favorises sont, d'après
Ammon, les plus dolichocéphales et la loi de plus grande
dotichocéphatie des urbains constate et lormule l'aptitude plus
grande de l'élément dolichocéphale a vivre dans les villes et
ayréussir'. t.

f~thn~'tt. ««' </tW'~<'r'<'M<'t'MK'/&<<u/<'«.


Munit'h.t.iHdnM)')',
fiKi'.L
~<Mt')'~f.nt.tt)".t'hitrn')))t)t!-)'tmyM(t).'Uv.i)))))))rttinttt'-<).t)Htt<'n'
.Yn/A<)M~f.«'. ).t)), Fi~'h.-t-,))!?.
– i.'AXT)t)t'))'<)S))t:)ftt.<tti)K !'27
.tXA).Y~H<.
t)es faits que nous venons de résumer, Amtnon a tiré toute
une sociologie et toute une théorie politique, qu'it <texposées
(tans sou livre <f .m<'M<f/'«p~ tft ~(M~M~/«/v//M.Le
titre indique les tendances de l'auteur. Un politique c'est un
conservateur, mais un conservateur qui prétend appuyer ses
théories sur les donnufs de lit science euutempuraine. Parti
exactement des mêmes faits anthropologiques que M. U. de
Lapoufte, it arrive a des conclusions toutes différentes. Pour
M. de Lapouge, les sétectionsMrM~ agissent, a t'encontrede
ia sélection Mft<M<'<c, dans un sens péjoratif et sont des
f!eaux acharnes après l'humanité. Pour 0. Amtnot), sélections
sociales et sciection Hatureite se confondent. L'ordre social
est un mccanistne merveitteux de précision et de complexité,
dans lequel ia sélection naturelle s'exerce par des institutions
variées, adaptées à leurs buts divers, et qui servent a porter
chaque individu au poste auquel it est le plus apte. Ces insti-
tutions sont principalement. i° les concours et examens
divers lesclasses sociales. Les concours arrêtent à t'en-
trée de chaque carriëre les incapables ou du moins les empê-
chent de s'élever; ils aident au contraire a s'élever les indivi-
dus heureusement doués qui sont ta vraie richesse d'un pays,
qui doivent être appelés aux premières places dans le corps
socia). non pas pour la satisfaction de leur ambition, mais
pour le bien de tous, en vertu des lois de ta division du tra-
vail et de l'inégalité des hommes. Quaut aux classes sociales,
elles sont par excellcnce l'instrument de la seteetion natu-
rettc grâce u l'existence des classes, les individus qui ont
réussi dans ta lutte pour la viese marient dans leur classe et
ont plus de chances de transmettre leurs quatitcs a leurs
enfants grâce a l'existence des classes, ces enfantssont isotes
des enfants de la classe inférieure ils reçoivent une éduca-
tion plus soignée, une nourriture meilleure; il sont ainsi
places dans les conditions les plus favorables au complet
épanouissement de leurs qualités physiques et psychiques,
et s'ils sont reettemeut doués, ils parviennent aux situations
les plus élevées. Si par hasard lit sélection s'est exercée &
faux, si les sujets n'étaient pas suffisamment doués, dès la
seconde génération, ils retombent dans les situations infe
rieures ou disparaissent complètement.
Les classes sociides sont douc un instrument de sélection
non régressive, mais éminemment progressive. Telle est
l'opinion d'O. Ammoa. Mais ces classes ne doivent pas être
L'A~K~C~t.Otï~t'K.~

des castes fermées par des barrières infranc))!ssabtes. Les


f)<ternctpaf<tp)ttAnQiftnt*~nn?h~<'t'!AMe)!tt)ft'Mm

classes supérieures, et) etïct, doivent, ponr ne pus disparaître


rapidemen), se rencuveio' sans cesse par le continrent des
individus, heureusement doues, issus des classes inférieures.
Car les classes supérieures s'épuisent bien plus vite, par suite
du travail intetiectue) plus intense, par suite des conditions
spéciales de la vie urbaine, par suite enfin de leur stérilité
relalive, voulue ou non voulue.
Pour combler les vides qui se produisent dans les classes
supérieures, il faut que lit société possède eu réserve un
nombre suffisant d'individus dans des conditions d'existence
saines et simples, qui aient un grand nombre d'enfants et
leur transmettent ieurs aptitudes latentes ces individussont
les paysans.
L'élaboration et ta miseau point des individus en voie de
dissociation ont lieu dans les villes, saus que les intéressés
s'en doutent.
Les immigrants, à leur arrivée dans ta ville, sont employés
dans tes situations inférieures, mais ils reçoivent plus d'ex-
citations intellectuelles et une nourriture meilleure. Des
qualités psychiques jusqu'alors latentes se revêtent cilez les
uns: chez d'autres, le bou et le mauvais se font équilibre;
obex d'autres enfin, les mauvais instincts se donnent iibre
carrière. Danst'espace de deux ou trois générations, la ditle-
renciation des classes est un fait accompli après des cri-
btagesrépètes, tesétements supérieurs sont portés aux situa-
tions supérieures, tandis que les otements inférieurs, les
individus manques, s'enfoncentct descendent de plus en illus
jusqu'à leur élimination finate, soit par le jeu des lois natu-
rettcs, soit parceiui des lois de ta justice humaine.
Enfin, pour que les classes sociales subsistent et se main-
tiennent, il tant dans les classes rurates une surnatalité qui
compense ia surmortalité des classes snpcrieures. Tandis
que les ruraux se multiplient jusqu'aux limites du possible,
les classes supérieures s'aneantissentpar te fait memede leur
succès dans la lutte pour l'existence.
Tel est, d'après Ammon. l'ordre social, non par création
d'un ~énie supérieur ou d'une assembtee délibérante, mais
'ouvre desiliecies acctunutes, progressivement élaborée, déve-
loppée et perfectionnée par les innombrables ~'nerations qui
y ont travaiite inconsciemment; œuvre admirable, maisd'ait-
leurs non immuable de même qu'elle a été contiuuettemcnt
ANALYSE: – ).'AXTH)U')'OSOmo).Ot))K M9

perfectionnée dans !e passe,


dans !e elle doit
passé, elle doit t'être
t'être encore
encore dans
dans l'ave-
t'ave-
ntr, et il reste de Ja place pour )'activit6 des réformateurs. Par
suite de la transformation incessante des conditions d'exis-
tence, des reformes sont inévitables et indispensables mais
encore hmt-it qu'elles reposent sur des théories scientifiques
exactes et non sur des préjuges non vurif!6s, sur des aspira.
tions vaguement sentimentales ou sur des mensonges de
politiciens.

Ht

Xaus résumerons ici t'a))i(k'ment '{Ufhjucs ouvrages, on artictcs


retatit' &t'antttt'oposuciutope, ft <tuiretevent des théories de t~pouge
t'td'Atumou.

t.tYL
– AmtropometrifunUitMe. Homa, i8M – Cet ouvrage mo-
nu)nen)at est une statistique aut))ropoio):iqm'com)))ete dci'ttatie,
portaut sur 300.000 soldats. !t a été pubjie par le ministère de ta
guerre d'ttaHe.
Il 'tabtit que. dans l'Italie du Xord, la loi des indices urbains 8M
v~tittt' M)tun<' en t'taMC<;ou o) ;U)t')uat!u<' tes urbains sont plus
dotichuccphatcs que Ja poputation environnante Mitan il 8~,8 les
t'nvixms dt' Mitan, 8t,3; FIomm-f, 8t~ environs de Florence, 83,! i
<'te. Mai~dans le sud de ntidic, les urbains, j))us do)it;hoc<?pha)ex
il est Yt~i qu<' h's urhains du Xord, suu) moius doHchocephatM
que les ruraux envirunnauts, moins doiichocephates, mais non
t)mch)'ce))tta)c' Ainsi Messine, 'f! province, 78,8 Bari, 82,4 pro-
vince, 80,7,-etc.
A prcnut're vu)', il y u ta t-ontradictiun avec les lois d'Ammon et de
Lapoupe. tt n'en est rien cependant. D'abord doiichocephatic et bra-
ehy~phatie n'ont pas ''n ''net le scnsahsotu et magique qu'on serait
tent~ de )eur attribuer d'abord. Les fuis de Lapou~e et d'Anunon ne
sont vataMes que pour h's re~iou-. où )<-do)ieho<:t''{)tm)c aryen.
Et«'<~M!tM, se trouve en ptesence du brachycephate, /MM. Il
''st tout nature) que d'autres rapports anthropologiques se présentent
<)ansune re){io))ou dontitK'nt d'autres etemcnts de population, tels
qu'ici dans !'ftat! du sud, r'emcnt méditerranéen. La race medifet'-
raneenne est d'aiHeurs, elle aus: dotichoc~pttate, mais )a dotichoce-
pha!ie la elle seu)e ne sij;nine pas nécessairementsupériorité, et cer-
taines rac~s excessivement dotichocephates, tettes que les degrés, ne

(<) Voir unf ant)\!'e très cantptt'te)h' cet f)uvmf;cdun<un ar)ic)e de


Chef<'it), J««~M/ </e/<t.~<M'<f/f
f<f~«<M~«<'</f/'af~, decetttbM<if90.
M. t))MU)!tX.– Antfefi0(!o). 189Ï. 3t
530 IMt
L'AXX~ËSOCMt.OUtQt'ti.

semblent pas aptes a s')ever beaucoup au-dMsu!: de ht barbarie. Ht


peut-être y aurait-it une hiO-arcttie sociale du do!ic))nc~phafearyen
au bra<'hyc<pha)c et de eehn-ci uu do)ichoce]))ta)e m~dito'raneeu.
Mais,en deftnith'e, tes resuttats de t.ivi ne contredisent donc pfs tt's
lois de t.apou(:G et d'Anxnon e))es tnontt't'nt seutetxt'nt un autr'
aspect et une appticatiou din'cn'ate des lois de sek'ction.

OLOHtZ. – Distribuoion geograRca del indice cefalico en


Bapama. Maddd, M«ya, i89t.

BEt)t)OE.– Sur l'histoire de l'indice oéphatique dans les lies


Britanniques. (/tM</<r.,tS9t. Ct3.S'29, CS8.6~3.) Tite M<-MM/'
~H'<a~).London, TrufbHer, 1895.
Ka Kspaptie, les tcavaux d'Otuiii! ont tuotttt'M<[uc lu puputatiuu
présente )a tn~me cotoposition aotht'uj'uJt'~ifjUf que celle de ritaiit'
du sud. Htt An~h'tfn'e ~~fttom'ut la population para!) t'cmat'tjuaMc-
ment homogène et {a'csque t'))tictcm''nt doHe))(n'<'pha)t'. X) <'n
Espa{tnf ni <'n An~tetPtt'M ou ne constate h) cocjfisk'Mcc des ~t<?-
nx'nt'i anthropotofi'iqucs, /i'tft'<~(t'M et /t/<M<M.' il est doue
tout natur'') qm-ces <'t')<ion! ainsi que ntatic du sud, lie i.t' prttent
pas à la v~t'incation des lui, dt; t.ap"Ut!K et d'Ammon qui pt'esuppo-
seut t'xprcss~ment la pn~t'ncc simuttance de ces ~nx'nts (tans um'
région. Et parce que ce. <t~n)''nts tu* coexistent pas partout, ces
lois n'en sont pas moins des lois scicntinqtH' Kncs <ta)dissent que,
si tel antécédent est dutnn' tn~)an~ de dotictxtc~phatt's nryens ft
de b)'nchyc<?p))aiM, i) s't'xsuit'ra d<'s phenotn~aes dt;t);t'tnint?s, dissu-
ciation des cément!! antht'ujtoto~iqu' conceatration dt's dt)nt;))"c~.
phah'x dans les villes, formittion th'.< ctasscs, et bifu d'autres Mns
doute qui t'csteMt&étudier et a <tMt'ouvor.

D' Il. COU.KtNO?<,médecin-major il l'Ecote supérieure de gut'rrc


de Paris. L'Anthropologie du sud-ouest de la Franoe, dans
.Mmot'Mf!de /f< &<c«'M <h<</u'o/M~t'e f/e /~a<'M,t. l, 3° serif,
1893-95. Carte de l'indice céphalique en Franoe, dans
/ht))a<M</eC<'o~<'«~/t<f
de Ytda)-).nb)a<:))c,janvier i896.
Ce qui fuit l'intérêt des ouvrages du D' Couignon, c'est qu'i) n''
s'occupait primitivement que d':n)thropoiof;ie pure. C'est sous la
pression de i'evidence <{u'i)a accorttC son adhésion il qm'iquf's-um's
des tueories de i'antht-opusocioto~ie, devant )<'s<}u<'))'i il était rest~
d'abord prudemment sceptique. H Il not~tntttent veritie par lui-
même l'exactitude de lit loi d'' la concentration des dotichodef. dans
les villes, et en a fait ressortit' etcquMnnx'nt toute )'i)n))()rtiu)'t; a la
iïn de son mémoire sur )'ant))('opo!o(jit' du Sud-Ouest de ln Franc*
pa~fs t26 et <S'?. < L'importance de ce fait, dit-il, est sans ega)e.
Cette loi nous dcnxMitt'cen c<!ct, pfut-cfrc pounuMs-nou~ Jc prou«'r.
A'<WE!<. – L'ASTi)M~!<mi)"U))!)K 83i

<)uet'ct)ue)Mu.snppG)on!tA))"trc<'pf)<tuet)'o)t)d~<M<«~M~
C/<MM!M, «'est M)tf"))d, sous U))CfuttUC!t"S) httttt''t)dne que d<'tt)ttf.
)u~(}u'u))t')utt''d<')'acM.C'<di'.uns-it',)ahttt)')'nt)'pt''shtn-
<')ty('~phuh's('t)<'sdf')ich<'c~p))!)!<,<ux-(-i,t:<'))!!Ai'csp)'it))m'u-
tt'ut', (tv'ntut'eux cf. sous um' fur)))'' diverst', aussi tcmuaut!) de Mu~
jt)Ut'<t)Ut'tVtait'))ttfUt's)ai))tMi))'m''ôtn's<))tt<')))psdest<)i)<t'atio))).
hiuhin't's. cf-ux.ta, )nu''x p)'t'-d''<-t"i.cu)'s, (jui phts)puioibtes '-t )iM pa<
d''s)i)<!))i"n<m!'n) t-n tant tju'uf:)icn)tf'tn't, rcjn'~t'nh'nt dans notn'
(;o))'tivit'? t')"'it fro))o))«'t't t'f)t!))i, nxtis e"t)St't'VMt'Mt'.0
t.tt c~t'h' </<*
<«t'/t'cf <'<~t/«t<t'~Mf CM/Mncf Mt h' t'sum~ de tmvtmx
''«))<id~)'ni))''<<'t<tctn''t)surttti<'nsf<!i[f'<!pf)ut'tapht)Mtt't))tu'r!tuteu)
hti-n)~)c.)/)nnn''ns)tt'dusuj~faitt)u'')('!in'-)tuttat<!)-Mtt'ntt't'ovi-
suin"ip<jur()ue(qt)<d'~M)'t''n)('))t!i,n'!ms).'d)t)])'titnofnb)'<'d'indi- i-
vidus nn'tt'iUt't'-s.C'est n~mutt~itts un tritVttitde ):t plus hitute impôt.
am:(! et 'tui iiCMuu point de d<p!u't{"'ut' de umn'cUc!!)'cch<'r':hc!

CHAt.L'ME.U'. – Influence de la taille humaine sur la forma.Hoa


des classes sociales, (.t'ucw. <8M. – Les races et les popu-
lations suisses. ~KrMf~</f~<t'~<~Kc<t)<)'Mf,XXX)!,4.
Chutmncau dans ces deux opU!ut< "<'r<tt!icaux vttf'sde Utpougc
ctd'tnmt)tt.L('<ypt'du)it;))<JC(~'h(tt('ht('))ddt'i)autctai))c!!t'pt'
st'tttt' du)t< t'))!)')u<*
p)'ofMsiontt'uutHntjdus Mf)UR)nnt<'ntque ta pt'c-
ft'ssiun t'xit: p)us d'aptitude"! intt')h'ctut:)h" )) existe ut)e hit't'Mt'chh'
scciatf ni!n-<tUfepin- )a t:ti))e.

C. Ct.OSSOX.– Dissooiation by displaeement, a phase of social


seleotion. (<<M<'<e~y<'K~)o<H/'A'roMoMtt'M de Bui'tuu, X, 180.
Becont progress of social anthropology. ~<<n)«<«/*po/<'<«'<t/
/fOMOMyd<' Otici~ )V, 4tU. – La dissociation par déplace-
ment. /<<'f.t'o~'M.</e ~n<')'u/.df t'<ui! )V, $H. – Ethnie Strati-
aoation and displaeoment. Cooffer~ JoM~Motof ~fOHOMtMdf
Mo.<to)),X!,UZ-tC8.
M. Closson, disctpiodp t.npnupp. a fX))o'i<!(htnsces <u'tic)esla toi
d'' t-apou)! <'t d'n)t))f'n, ou loi d'' c(U)c''ntMtiua des dotichnc~phatt'it
d:)))'' )<'svincs,t')) i)«i<ti)nt sut'cf fnit <p)e)Md'))i<:)toct?pha)es
repn'-
~nteut )'<?)t?<nc)tt le plus )Mobi!fet te ptu'i cntrcprcHant de ta race.

Ot)):S. – Genèse des grands hommes. fm')!, Wettet-, t8C6.

t'Jt-).YY. – Les Aryens. Pâti: Mussun, t89J.

!U)').HY. Ethnie innueMes in vital sUtistios. tn ~NM<'<t'«M


~<<t'~t'('«f<Mmt'M/MM,<8M, )S-:0.
Huf)u on trouto u pouf)<'souv)'a!('s ptus anciens mx' biidiographio
ptus comptt'tc ditns les .W<'f<<o)M
Mc'M de M. 'te Lapone.
S3s! t.)!)!S(M:)M.t'<,W< ~M

Quant aux con"equenc('s pratiqm's a tirer d" ces tttenrics. des


discussions in'!pi)'t'-esd'ai)h'Ut'pMt'des principes trf'sditterents out
paru dan.<les travaux fuivant!

L.Ct.ALX. -Du SelectiomBiBme optimiste au Seleotionniame


pessimiste. /<ft'«e <oc<'«<M~f,juith't
t8!'7.

C. UOHiLH.– Anthropologie et démocratie, ~'«c Hx'~Ay-


<f~Mff<t/c morale,juillet, i897.

j. KOVtCOW. – L'avenir de la race blanohe. C~~Mf </«~fMt.


m~MCcott~m~ofot'n. Paris, Atcan, i897.

M. XovicutY,le titre de t'uuvt'agc )'itnii()Ut', s'appHque &n''fut<;ttf


pe~sinnsm'' fontoupoMUt, et, s'-hm sou ('xpt'<'ssiu)),&te <-uu)tu'ttr<'
& lu froide Mt i)ttp:t)'t)utc ctitiquc des ctutît't's, des fttits, dfs \t't'i-
t);$ acquises it ht scieuce (p. <0). Il y cependant, dans le tivn'
<te M. ~ovicoK' soutcnt plus d'ftMntMtMns put'e.<e) ~itnpiM <jm-<.)<
fhi)!'<'eset défaite.
C'esl uuxlivres n et ttt ttuc l'auteur s'aHaque aux théories antht'o-
potugiqm"; de ditHt't'ats auteucs etdt' M. de Lapuuj~cn jtarticuin't',
saos (ju'i) pat-aisse toujum's avoir ptcim'ntpnt contprish'UM principes
ptjcsrfsuMats obtenus.
t'at' exemple, ?:){;)' 70, M. ~uvicow ~ct'it *![ n'y a jamaist'u. pt
il n'y am'o jt<miti.<de typ)' )ix'\ jMtsphx <')).~ng)<'t'')')c(ju'nittt'm-s.
Xous répondronssimp)em<'n)tpn't'indi<'c'))))!tnqued<s Aurais est
unifot'n)'!tnent 78 d'un bout a i'autr'' du pays, et qu'à CHpoint de
vue au moins, la population est h'))no(;<'n< c'pst-a-dire ))\(~ E))
Franct', t'indice ct?pha)i<)ucvarie de 78 à 88 selon les r~ons, ce qui
indi~Ut.' noc poptdation composée d'etcmfuts hien di<îerents. Voit'
ta-dessnsJ. Heddoc, MM('M<'H &')<nfn, )ja~t; 231, pour les indices des
Anglais, et CoUignon, (.'«t'/c </f <~t</t't'ec~/t«/<9Mee<t/<'<t«cf,pour
les indices des Français!.
t'ap' T). < t~a fut'nK' du crâne, ta dotichoecphatie, In HMMticepha-
lie et la britchyct'phuti'' «'ont pas rcsoht )<;pruhif'me (de rinc~ante
dpi= races humaines), t'arnu les iodi<i<tus pnssedaftt tes metnc-!
indices cephaUques, un a trouve des itn))Mci)esft des tateutshuts
)i{!net. Evidemment, mais d'abord ce n'est pn-isut't'indicfcepha-
ti'}ue s''n) 'tue les at)t)))oposocio)o}!ucsetahtissent ieuri) théories
cnsuitf quand ils font intervenir t'indice emphatique dans leurs con.
sidérations, ils n'opèrent pas sur tel ou tel individu, mais sur des
)!roupf's aussi nombreux que possible d'individus appartenant a In
metne région. & ta même condition sociale. Et si, pour un individu
isote, it est impossible d'affirmer sa supériorité ou son infériorité par
le seul examen de son indice ccphatique, it en est tout autrement
pour tes groupes. C'est ainsi qu'un auteur plutôt prudent et scep-
tique,)'- t~Cottignou en estycou arcconna!tre,avee les restrictions
AXAhYSR'– ). soctnf.ËonKAt'mH S3~
_ah_II..1.-t.n
d'aith'urs o~cM'MUt'C!« )'inf''t'iorit< iutcHert<tt')tede lu racu hmchy-
<;<!ph:))t'Y)!U-vi!id<t')H-('U)'u))<t't)t~'sdo)it:hO('t''))h!t)')' s
Ui'-n))!.'t'!n))t'ut s <)ttfsi )'<')(v~ut [!"rtt'r uu jux<'ment sur )'ftnUu'
))t)<nt-n')t'ttit',)t)K'suff)t]'n'«)<')!!A)))''t'"Ut)<')<))n't')<<co))<.<)U''n<'f')!
p)')tH<)UC!!qn'ou('nfuttin't'.K)lM!.onb)''))tY!H'if'raY''ch"'tf)np~-
)())))''nt''i't(tiYi'h)<')s.:M.d''U'p<n'<H))!ts)nontr'auMi
fri)))c!~c)m'))tp<'ss.i)nist<'f)))<*M.f'.Anunt)t)()[)tm)ist<'?)'<'st't)')'St'nt
!t <)mi())ft) )')')< s<'f))'')tK't)tA<!<'.it))p)<'sprocès
)'!Htt))t'o('o';ocif)i(tf{if'
df t''ttdu))<-f!<,))):tt!i&un ~~rn'ttx cxatn<'nttcs fait: des chifft't's. df"'
statistiques qu'elle ajusqu'ifi ra'i!it'mbh''s.
O.Mrtu~

U.–t.AS(H:t(H!~<K.\t')nH

RATZËL(Ftt) EnKMt:u). – DerStaat und sein Boden geogra-


phisch beobftchtet. (/f ff MMsol ~fM~t'A~'o~)'«pht-
~«cnx'nt.)Leipzig, Hirxet, ~8{)6,)~7 p. in-4".
On sait les etïorts faits par M. Ratzel, notamment dans son
.4H~fropo(/(~'ap/«epour élever la géographie au rang d'une
science vraiment explicative qui aurait pour objet, nou de
décrire simplement l'aspect superficiel de la terre, mais do
déterminer la manière dont la configuration du sot atlecte la
vie humaine en généra). Dans le présent ouvrage, c'est le
rôle du facteur géographique dans l'organisation et le déve-
loppement des sociétés que l'auteur se propose spécialement
d'étudier.
On a bien des fois comparé ta société à un organisme. La
comparaison ne se justifie que si l'on a soin d'ajouter que
c'est un organisme d'un genre spécia) c'est un organisme
imparfait. En euet, la caractéristique des êtres vivants les
plus hautement organisés, c'est la radicale diflérenciation des
parties dont ils sont composés et l'étroite subordination qui
en résulte. Les éléments vitaux, cellules, tissus, organes, ne
vivent pas pour eux, mais pour le tout auquel ils appar-
tiennent. Ils sont rivés à une place et à une fonction détermi-
nées. Au contraire, t'étément social, à savoir l'individu, est
un tout qui peut se suture à soi-même et, par suite, quelle que
soit sa dépendance vis-à-vis de la société, il garde toujours une

()! ))' CoOiK't'M'</)//)<'<~t</M.?t<'<M~'M"< </f /a


dang .WMte«'M
Sef~M<~M<A<-o~o~,<'<' t. ). ï' 'ri' p. M.
f/e~«)'t<f.
S34 HfT
).x)!H.<()t:t<)n<ti)~t'H.

large autonomie. H se meut librement d'une partie du pays &


l'autre. chatte de (onctions ennu, quelle que soit la diversité
des rôles qu'ils remplissent, tous les hommes qui forment le
groupe resteut des hommes et, eu ce sens, sont semblables.
La spécialité des tac))es dout ils sout ctiargés n'entame pas
l'identité (ondamentate de leurnuture. La cohésion sociale ne
saurait donc avoir les mêmes causes que l'unité des orga-
nismes elle ne peut pas être dueà l'interdépendance mutuelle
des parties dinerenciées, mais elle vient principalement du
support commun sur lequel évoluent tous ces individus sem-
blables et qui les relie les uns aux autres (p. t7).
Les liens sociaux qui ont leurs sources dans le territoire
sont de deux sortes.
H en est de purement physiques. Le territoire rapproche
matérietiement les membres d'une même société de ta vient
la tendance a en faire ta base de l'organisation politique. C'est
cette tendance qui détermine les peuples inférieurs à se grou-
per ttu centre du pays autour de lu demeure de teur chef, et
c'est ta même cause qui explique l'organisation de la cité,
avec la concentration qu'elle implique, chex les Grecs comme
chez les Sémites,
Mais il est des liens moraux qui dérivent du sot. Ce qui
fuit l'unité d'un peuple, c'est en grande partie l'habitude de
ta vie commune, ta communauté du travail et des intérêts
économiques, le besoin de se défendre en commun coutre
les ennemis du dehors. Or cette communauté d'existence
n'unit pas seulement les individus les uns aux autres, mais
aussi à la terre qu'ils habitent. En etïet, les fruits du travail
dépendent du territoire, de son étendue et de ses propriétés;
pour satisfaire aux nécessités de la défense, on trace des fron-
tières, on élevé dos forteresses qui ont pour objet de proté-
ger le sol et qui en font partie intégrante (p. )8). ft n'est guère
d'idées ou de sentiments collectifs qui ne soient affectés par
la mémo cause. Suivant que le domaine social est plus grand
ou plus restreint, les sociétés out un sens très différent de
l'espace qui est nécessaire il leur développement politique.
Plus elles se meuvent sur de vastes emplacements, plus elles
éprouvent le besoin de vastes horizons. C'est ce qui fait
l'humeur conquérante des nomades (p. 12).
Le territoire n'est donc pas simplement le lieu des phéno-
mènes sociaux c'en est un facteur puissamment actif. Une
société n'est pas pensable sans une partie de la terre qui s'y
AXAt.Y!!f{!i. – LA !!0<:«)UÉ(M'KAPHtK S3!)

rapporte. Ce n'est pas assezde dire que le sol appartient fI


i'État it on fait partie, il en est une conditionessentielle.
Voitapourquoi < nous voyons,au coursdo l'histoire, toutes
les torcessocialess'emparerdusotet ne formerdes Étatsqu'a
cette condition.Professionset sociétés,commerceet religion
puisentà cettesourcede puissancepolitiqueet dedurée. C'est
encorece mûmesentimentqui se traduit dans lesaspirations
nationalistesde ce siècle.Quandon dit LesAllemandssen-
taient le besoindecréer une formepolitiquequi s'appliquât
à toute la communautéallemande,on entendqu'ils aspiraient
à une continuitéet à uuedélimitationterritorialequi assurât
à cette communautéun sol qui lui fut personnci (p. i9).
Mais ie sol n'est pas seulementlit basesolide sur laquelle
reposent les États en dépit de son immobilité,c'est un des
moteursdu progrès; l'autourn'est pas loinde penserquec'oa
est le moteur principal.
En effet,le territoire, avons-nousdit, contribueà former
la consciencede chaquepeuple.Maiscette conscience,un&
fois formée,réagit sur le territoireoù ellea ses racines, elle
s'efforcede se l'assimiler,do l'organiserau mieux des fins
qu'elle poursuit. Si, pour une raison quelconque, it lui
résiste, s'il n'est pusen harmonieavecelle, elle ira chercher
au detàde ses limitesactueitesdoquoise satisfaire.Ainsidea
pays distincts, mais qui formentun tout géographiquement
un, une !te par exemple,acquièrentplus ou moins vite le
sentimentdecetteunité naturelleet éprouvent alors te besoin
de mettre leurs territoiresen harmonieavecelle. Ils tendent
donc à ne pas rester enfermésdans leurs bornesprésentes,
mais &s'unifierterritorialement,soit par voiepacifiquesoit
autrement.De même, un pays trop densetond à s'annexer
d'autres pays sur lesquelsit puissedéverser son excédent
de population un pays de côtes, commela Datmatie.tend!
vers les régionsintérieuresqui le complètent,etc. En unmot,
dos États nouveauxet plus vastesse constituentdont la for~
mationétait prédéterminéepar la nature ette-méme.Il y a
donc dansla configurationmêmedu solun principede mou-
vement.Il semblemêmeque,d'aprèsM. Ratzel,ces raisons
géographiquesexpliquentcomment,d'unemanièregénérale,
les dimensionsdes sociétésvont toujoursen s'accroissantà
mesure qu'on avancedans l'histoire,sans qu'il soit possible
de marquer un termeà ce ~'oce~tM.Eueffet, il admetl'idée
de Ritter d'après laquelletoutesles parties de la terre s'im-
S36 ).'Ayx)iHSOt!t()U)t!tQt'8.
iM?

phquent mutuellement. parce qu'elles appartionnoot & un


même tout dont elles dépendent couima il dépend d'elle3.
La situation de Saint-Pétersbourg ou de ])rontheim n'est ce
qu'elle est que parce que les autres parties de l'Europe sont
ce qu'elles sont ~p. Hn\ En somme, tous les pays du monde
font un seul et même système solidaire et ta seule unité
géographique vraiment et pleinement naturette est celle que
forme le globe tuut cHtier. Si donc les territoires qui s'appei.
lent les uns les autres sont comme nécessités &se réunir, ou
conçoit que les peuples s'efforcent toujours de dépasser leurs
frontières pour atteindre un plus haut degré d'unité.
C'est cette discordance entre les limites naturettes (entendez
rationnelles) et les limites effectives des peuples qui est la
source du progrès. En effet, les nations ne peuvent s'étendre
sur do plus larges espaces sans se differencierdavantage. Cette
différenciation vient ette-n~me, pour ta plus grande part, de
causes territoriales. fidèle à son principe. M. ltatzel nie
que t')':tat puisse entamer ta nature individuelle assez profon-
dement pour que tes individus puissent devenir aussi distincts
les uns des autres que les cettutes d'un organisme. Suivant
lui. tes diuerencesqu'ils présentent ne sauraient ~trceonstitu
tionneties; elles doivent donc tenir surtout à des causes
externes, c'est.u dire géographiques. < Le facteur qui est ici
au premier plan, c'est l'opposition des provinces périphé.
riqm's et des n'gions centrales, des côtes et de l'intérieur des
terres, des ptaines et des montagnes, etc. (p. u8j. De la
différenciation qui se produit ainsi résulte, par le même
procédé et dans ta mcme mesure, la division du trayait, la
fusion des organes similaires, la concentration des fonctions
solidaires, etc., en un mot. tous les caractères des sociétés
supérieures.
En même temps que l'espace social devient plus étendu, le
rapport entre les sociétés et leurs territoires devient plus
étroit. La terre est, de plus en plus, un facteur vital de ta vie
collective. Dans les peuplades inférieures, elle compte pour
peu; c'est ce qui fait qu'on lit vendators avec une telle aisance
et pour si peu de chose. Une tribu nomade ne tient guère au
sol sur lequel elle se meut aussi en change.t-ette facilement.
Commence-t-elle à se fixer ? seuls, les lieux où se trouvent
concentrés les organes politiques du pays ont de la valeur.
Plus on s'éteigne de ce point central, plus l'intérêt que le sol
a aux yeux de )a cottectivite va en décroissant. A la limite,
A'!A).Y!!)!S.–t.AitOCfOUÈOnMWtH! ?7
c'est-à-dire à )a périphérie extrême, il est nul. C'est pourquoi
une société rudimentaire n'éprouve aucun besoin de fixer ses
frontières, mais les laisse flotter, indéterminées. Il en est tout
autrement chez les peuples cultivés. Unfléau peut entever cent
mille hommes à une nation européenne sans qu'elle soit pro-
fondément ébrantéo; elle ne peut perdre cent kilomètres
carrés sans être atteinte dans sa vitalité, et c'est de iaque vient
notre extrême susceptibilité pour tout ce qui concerne le
domaine national. Pour nous, ii n'est pas de point du terri-
toire qui n'ait sa signification et son prix. Aussi quel soinnos
sociétés mettont-eiies u fixer avec précision leurs bornes res-
pectives Enfin, tandis que jadis ii est arrivé à tout un peuple
d'être transporté d'un pays a un autre, aujourd'hui, unie!
transfert, même pour une seule province, est radicHiement
impossible. Les peuples tiennent à la terre par tant de liens
qu'ils n'en peuvent être arraches sans périr.
La cause de ce changement, c'est que la société, en même
temps qu'elle se répand sur do plus vastes territoires, les
pénétre plus profondément. Parce qu'elle y incorpore plus de
travail, elle y met plus d'eiie-méme et s'y enracine davan'
tage. Pius ou vit, en ejlet, plus la surface du sol est trous-
formée par l'activité sociale, et, s'il en est ainsi, c'est que
l'initiative de l'individu devient toujours plus grande. Au lieu
d'être retenu étroitement sur un point, autour du chef ou
dans sa sphère d'action immédiate, il devientplus libre de ses
mouvements par suite de cette liberté plus grande, la popu-
lation, au lieu de rester massée au centre, se disperse, occupe
un plus grand nombre do points qu'elle fécondede son travail
et qui prennent ainsi un prix social. Sous i'inituence de !a
même cause, ies.énergies individuelles sont surexcitées par
cela seul qu'elles peuvent se développer plus librement et le
travail est plus intense. Hu résumé, de même que, en prin-
cipe, c'est l'autonomie de l'individu, jamais aboiie, qui fait
l'importance sociale du territoire, à mesure que cette auto-
nomie devient plus grande, le rôle social de i'éiémeat terri-
torial devient aussi plus considérable.
Si l'on peut regretter que les idées exposées dans cet
ouvrage n'aient pas toujours toute ta détermination qui serait
nécessaire, on ne peut méconnaître qu'eiips provoquent uti-
lementla réflexion. Sans doute, les principes généraux sur
tesqueisest appuyée ia théorie sont des plus contestables. Les
sociétésne sont pas faites d'individus autonomes, sans autre
S38 L'AXX~H <"t:M).OU~t't!. tMf

lien entre eux que le sol sur lequel ils vivent. La division du
travail social et la spécialisation des fonctions qui et) résulte
n'ont pas des effets simptoment superticiets et il y a quelque
chose de trop ingénieux Aen réduire il ce point l'influence
pour pouvoir mieux mettre eu relief celle du territoire. Mais
t'idt'e géuérate n'en reste pas moins. H était opportun de
rappeler aux sociologues l'importance trop négtigée du fac-
teur territorial. S'il ne semble pas avoir d'action immédiate
sur les faits de l'ordre juridique et morat, il pourrait bien
affecter directementcertaines représentations cottectives; par
exemple, la manière dont les peuplesse représentent l'univers
n'est peut-être pas sans rapport avec la nature de leur habi-
tat: En tout cas, la structure générale dessociétésan dépend;i
t'étendue des segments sociaux, leur degré de coatescence
varient nécessairement suivant que ie pays est montagneux
ou tout en plaines, selon ta fécondité du terrain, etc. Enfin,
puisque ce sontdes besoins territoriaux qui ont, de tout temps,
poussé les sociétés à s'étendre et qui ont. par conséquent, été
le principal moteur du mouvement historique, i) parait diM-
cile de nierqu'it y ait dans le territoire quelques causes qui
incitent l'humanité au mouvement. Reste à savoir si lu nature
de ces causes a été suffisamment analysée par fauteur. Sa
pensée sur ce point nous a paru particulièrement enveloppée.
On trouvera également dans le détait nombre de vues qui
méritent d'être retenues. Teite est notamment la loi d'après
laquelle il se produit entre les sociétés et le sol un rapproche-
ment de plus eu plus intime à mesure qu'on avance dans
l'histoire. Toutefois, une distinction est ici nécessaire; elle
ressort, d'ailleurs, des considérations mêmes présentées par
M. Hatzet. Ce n'est pasdu soi, en tant que tel, que les sociétés
deviennent ainsi sotidaires; ce n'est pas par ses caractères
physiques qu'il détermine ce plus grand attachement. Si eties
y tiennent, c'est qu'elles lui ont surajouté une autre nature;
c'est que, on y incorporant les produits d'un travait de plus
en plus intense, elles en ont fait un phénomène social de
première importance, un rouage essentiel de la vie collective.
Elles no peuvent plus se passer de lui, parce qu'elles ont mis
trop d'ettes-mémes en lui. Mais, ainsi entendu, il cesse d'être
un fait purement géographique et peut, beaucoup plus juste-
ment, 6tre rattaché il t'ordre moral, juridique, économique.
Or, dans le cours de l'ouvrage, ce double aspect du territoire
n'est pas suffisamment distingué et de là Natt parfois quetque
AXALVSf! – MHU)!MU<i)).t)')))K
Ot-H.STtUXS S39

confusion. C'est ainsi que, ou un autre sens, on pourrait dire


tout aussi bien que les sociétés deviennent de plus en ptus
indépendantes du sol; car une technique ptus devetoppeoteur
permet de te transformer suivant leurs besoins tandis que,
dans te principe, elles en subissaient ta !o! au lieu de lui
imposer la leur.

MfXDHLKF)-– Thé inauenoe of géographie emvironnememt.


<~f tMt'~CK~f~t~Mf),
(/«/?M<'Kt'f in /<M«ffM< </tf <4Me<-t'<'««
Ceo~M~Ax-f~;S«t'«'<y,vul. X\)X, n" t.
).'a))t).'))t'~)t)<)i<'
)'i)))!u''th' du fiteteut' t!~of:t-ap))!((uus)u')'m'~iu)i-
Mtion sociatc de ''et'toinfs (t'ihus indit'not's de i'A)n'hif)tt<'du Xord,
ttutamtncnt sm- tcut' systf-too t))yUn)tuj:iquc, ttt diiih'ibuticn d'' f:)
['uputMtiut),r!u\-)ntt'ctt))'c, etc.

f- t)KM.UtTO.\X)' – Vie des peuples du Haut NU. HxpHeation


<)<-trois c.'n'k's itnttx'cpo-ogt-aj'hKtUMS. (;U«)<t~ </<!~t'a~/tt'f,
tM6 et tM')

Apcticattun à mx' vacation parti<;u)K't'M


des id';c:. de RatMt, auquel
t'auteor sf t'~fct'f fxpres~tOfnt.

Ht. <)t:)));Mf)),)<AP)))R
QCESTtO~S

t'B.S. NtTTt. La population et le système social. Edi-


tion française, in.8<,376 pages. Paris, Ctard et Brière
(BiM.SociologiqueInternationale),1897.
M.Nitti n'abordodirectementle problèmede la population
quedans la secondepartie deson livre (p. 114-2(!7). Dans la
première(p. 9-H8),i! étudieles causeshistoriquesdes prin.
cipalesdoctrinessur la population.11se proposede montrer
< que la théorie n'est qu'un reflet de la réalité et que < tes
théoriesles plus abstraitesse sont ressentiesdu milieu qui
les a vu nattre Par suite, aucunedes doctrinesdémogra-
phiquesn'exprimeobjectivementlu véritableloi dola popu-
lation.Toutessontétroitementfondéessur t'état momentané
desphénomènesdémographiques au tempset dans te pays où
elles apparaissent.Toutessont influencéespar des préjugés
sociauxet ne sont,en somme,qu'un effortpour défendredes
privilègesde classeou les attaquer. < Etle critiqueimpartial
est frappé d'étonnementen s'apercevantque lesmêmesargu-
8M t/AXX~ESOCtOLUOQt'K.
t~
monts sont employés selon les Époques il soutenir des causes
différentes.. Si, avant Matthus, l'optimisme est presque
général et l'abondance de lu population considérée ordinai-
retnent comme un signe de prospérité, c'est que
l'imperfec-
tion des connaissances géographiques faisait considérer
l'espace réserve à l'humanité connue sans bornes; que la pré-
occupation principale du souverain était d'avoir lu puissance
militaire, qui demande de nombreux soldats; et que, la sta-
tistique étant a peine née et les communications dimcites, les
souvenuns les plus éclaires ne réussissaient pas à établir une
proportion même approximative entre les hommes et les
subsistances. Le pessimisme malthusien est expliqué par la
situation économique et politique de l'Angleterre à l'époque
de la névolutiun et par tes préjuges sociaux de ta classe à
laquelle appartenait Malthus. M. Nitti montre longuement
que l'M; ~</ <<'~«tc-~f (/<' la ~f~M~fw); fut une muvre de
politique conservatrice, qui satisfit t'individuatisme efiréne i~
des classes dirigeantes, en lui offrant une doctrine do fatalité
économique ta et l'excès numérique de la ctasse
ouvrière étaient présentés comme le résultat de son
impré-
voyance, et l'indifférence des riches ainsi que io maintien do
l'organisation capitaliste étaient justifies. Apres Malthns
toutes les doctrines de la population out pour but de défendre
ou d'attaquer la sienne. Selon que la population d'un
pays
augmente considérablement ou reste stationnaire, selon aussi
que les économistes sont conservateurs et prennent les inté-
rêts de ta classe possédante, ou réformateurs et s'attachent
aux intérêts des prolétaires, ils sont malthusiens ou no le sont
pas. Dans t'Attemagne menacée d'hypordémie, les tendances
malthusiennes ont généralement prévalu. Seuls les socialistes,
et Marx en particulier, attaquent Malthus encore quelques-
uns d'entre eux subissent-ils son influence. En Angleterre, le
malthusianisme règne presque sans conteste jusqu'en 1878,
et jusqu'à cette époque la population s'accroît rapidement.
Depuis t878, le taux de la natalité s'abaisse et aussitôt une
réaction antimatthusienno se produit. En Franco enfin, où,
depuis ~840, la dépopulation devient menaçante, malgré
l'opiniâtreté avec laquelle les économistes s'attachent aux
traditions orthodoxes, les théories de Maltitus sont d'abord
timidement modifiées, puis violemment attaquées et reniées
par ceux mêmes qui les avaient professées.
La critique de Malthus est la préoccupation constante de
AX.~YittM. – Of~TtOXS OK Mt!t)0<iBAt')t)H Mi

M.Nitti, et rien ne feramieuxcomprendreson pointde vue


propre que l'indicationdes principauxreprochesqu'il fuità
Mattbus.La grandeerreur de Malthus,c'est d'avoir cru que
la loi do la population était une loi naturelle immuable.
réglant d'une manièrenécessaireet universelleJe rapportde
la populationaux subsistances,quelle que soit d'ailleurs
l'expressionnumériquedoce rapport. Or ta productiondes
subsistancesd'une part, la réalité, la mortalité,la longévité
d'autre part, sont essentiellementdes phénomènessociaux,
et quand mêmeune loi naturelledu rapport do la population
aux subsistancespourrait être formulée, elle n'exprimerait
jamais qu'un rapport possible,toutidéai, abstractionfaitede
toutes les conditionssocialesqui sont prépondérantes.Le
taux do la natalité u'est pas le m'huedans toutesles sociétés,
ni dans tous les rangs de ta société il dépend de conditions
sociales qu'on peut déterminer.Le taux de la production
dépendde l'état de la techniqueindustrielle,des conditions
du travail, de l'organisationéconomique,etc. Enfinla quan-
tité des subsistances nécessairesà chaqueindividudépend
aussi de causessociales le terme subsistances est un mot
indénni.Cesont des facteurssociauxqui font varierà l'infini
le standardof tife Onne pourra donc formulerla loide
la populationqu'après avoirdéterminé commentl'organisa-
tion sociale agit sur la natalité, sur la production, sur les
besoins. Par suite, te pessimismedéfinitif de Malthus est
absurde Il vient de cetteillusion que !a lutte de l'amouret
de la faimest une nécessiténaturelle qui se réalise dans tout
état social donné; il reposesur ce préjugéque l'organisation
socialeest immuableet doitne pas changer. Par suite aussi,
le moral restraint, seutremède proposépar Malthus,est
inapplicableet vain. Le taux de la natalité ne dépendpas des
volontésindividuelles c'estun phénomènesocialqui dépend
de lois sociologiques.Pouragir sur lui, Il est nécessaireet il
sufnt d'agir sur les causesqui le conditionnant.
Antithèseà la doctrinede Matthus,la théorie de M.Nitti
est la synthèsede théoriesadversesqu'il exposeet recueille
au courantde sonétudehistorique.Cesont cellesde Spencer,
de Marx et d'AchilleLoria, de Guillard, d'ArsèneDumont.
AvecSpencer,M. Nitti admetque l'abondancede la popula-
tion dans le passé, stimulantle progrés,détermineune indi-
vidualisationplus parfaiteet limiteen mêmetempsla fécon-
dité. Les forcespréservatricesde chaquegroupe animalsont
S42 L'.tXftSti Ma?
xooot.ontQtE.
doubles, savoir l'aptitude de chaque individu à s'adapter et
à se conserver, et l'aptitude a reproduire d'autres individus
semblables &iui. < Lagenèse constitue un procossus de désin.
tegration et par conséquent un processus contraire il celui de
l'intégration (individuelle). Donc, si nous réunissons sous le
nom d'individualisation tous les actes qui complètent et sou-
tiennent la vie de l'individu et sous celui de genèse tous ceux
qui servent & la formation ou au développement d'individus
nouveaux, nous voyons que l'individualisation et la genèse
sont nécessairement antagonistes. Cet antagonisme s'observe
dans toutes les espèces animales. Mais, pour les sociétés
humaines, la théorie de Spencer est incomplète. Sa ici biolo-
gique n'agitqu'a travers le système social, qui !a contrarie ou
ta favorise. Dans la société, comme dans tout organisme, la
dinérenciation progressive et le perfectionnement des parties
ne sont possibles que si ces parties deviennent en même temps
plus étroitement solidaires. On peut donc auirmer < qu'un
maximum d'individualisation ne sera possible que dans un
maximum de socialisation et que par le développement
complet de la solidarité économique et de ia solidarité morale.
Or le régime capitaliste est essentiellement opposé a toute
solidarité économique, et c'est pourquoi, ainsi que l'ont
démontré Marx et Achiite Loria ie mode capitaliste de dis-
tribution des richesses détermine nécessairement une très
forte natatité dans la classe ouvrière et chez tes pauvres.
Comme ils établissent aussi que ce même régime limite la
production, il devient ctair que le rapport de la population
aux subsistances indiqué par Maithus est principalement le
produit d'un facteur économique, le tnode de distribution des
richesses. C'est pour prouver cette thèse que M. Nitti étudie
longuement les rapports de ta natalité et de la richesse et
recherche les motifs économiques et psychologiques qui pous-
sent les pauvres a proliférer abondamment. Acceptant lu
théorie de la capillarité sociale de M. Arsène Dumont, il
montre les individus faisant tous des efforts pour s'élever sur
i'échette sociale, pour améliorer leur condition économique.
Mais, seuls, ceux qui possèdent déjà, les petits propriétaires,
peuvent espérer s'étevcr ies prolétaires sont condamnés a

(tjUMtt'"UY''rft)c.<it)'<')''M.L<)t'itt.!im'<'u!<uj''t.t'<u))<M;s))a lui
mf'nx' ')axs fon livre /'<'o~M)<MMft<<M.rt'{tH/<*mp<M'a)'M't vu), ift-it'. finit,
(imr'tt'mrX-n'.tM'r).
– t~t'fMT)'~
Ax~rstt.'t. t)Ktt~Momt.u'tttH S43
rester des salariés. De là l'extrême prudence des premiers,
qui procréent peu pour éviter la dépense et te partage de leurs
biens, et l'imprévoyance des seconds qui n'ont rien à perdre
et espèrent au contraire tirer prolit du travail des enfants.
La natalité est donc d'autant plus forte que la capittarité
sociale est plus faible, et comme la capillarité sociale n'agit
que dans la mesure ou l'individu peut prétendre à améliorer
sa condition, it faut faire de t'orgauisatioa politique un des
facteurs de la loi de la population à conditions égales, les
sociétés qui ont un régime absotu, des classes ou des castes
fermées ont une natalité bien plus considérable que les
sociétés démocratiques.
L'influence des facteurs moraux, – moeurs, systèmes de
morale, religions. – est étudiée par M. Kitti comme l'in-
fluence des facteurs économique et politique, mMis d'une
manière beaucoup moins précise. !t se contente, en somme,
de montrer qu'il y a des rapports entre la manière dont
varient les idées morales et celle dont varie la natalité. Le
manque de solidarité morale, l'individualisme cgotsto et le
pessimisme lui apparaissent comme des causes qui arrêtent
la natalité et menacent certains pays do dépopulation.
En tenant compte de tous ces facteurs, M. Nitti formule
cette loi qui lui para!t scientifiquement inattaquable dans
toute société où t'individuatité sera fortement développée et
où le progrès de lit socialisation ne détruira pas toute activité
Individuelle, dans toute société où la richesse sera largement
subdivisée
et où les causes sociales d'inégalité seront élimi-
nées grâce à une forme élevée de coopération, la natalité
tendra à s'équilibrer avec les subsistances et les variations
rythmiques de l'évolution démographique n'auront plus rien
d'enrayant pour l'humanité. a.
Le livre do M. Nitti est rempli de renseignements histori-
ques et bibliographiques. Comme on l'a vu, il étudie le pro.
bteme de ta population et critique les théories antérieures à
un point de vue vraimentsociotogique. Cependant on y trouve
des propositions étranges dans la bouche d'un sociologue
L'homme primitif, lisons-nous (p. 243), n'était ni retenu ni
gêné par aucun lien social, il n'avait de devoirs u remplir ni
vis-a-vis do la famille, ni vis-à-visde l'association. II était un
être absolument individualiste ou encore (p. iîMt < le but
de <OM<~ les religions est de diriger t'ame vers une fin loin-
taine, le salut individuel Maisle plus grand défaut <!et'ou-
S44 L'AXXt!)! M07
i!Ot:)0).OGtQ);R.

vrago est do manquer de précision scientifique. Ù reste une


synthèse un peu confuse des ~ot'<M sur la population et n'eta
blit pas rigoureusement une loi inductive de la poputatioc
fondée sur une revue générale des faits connus. On a vu
combien )a formule Mnatc, dans laquelle t'aoteur s'exprimt
au futur, ressemble peu a Fenouce d'une loi scientifique.
Comme dans tout l'ouvrage, le probtemo pratique est cou
fondu avec le probieme sociologique. Il aurait fattu établir
d'abord quelles sout les causes qui fout varier le chiffrede la
poputation et se demander ensuite quel taux d'accroissement
pouvait, dans une société donnée, à un moment donne, être
considéré comme normal. Dans tout le cours de l'ouvrage,
c'est tantôt t'accroissonent de la poputatioa, tantôt ht dépo-
pulation qui est considérée comme un danger et nous n'appre-
nons pas à quoi se reconnatt une évolution démographique
qui n'a < rien d'etTrayant pour nnunantt6

OTTO SEECK. Die Statistik in der alten Gesohichte.


(La M«<<~<<~Me <<««<!f/<M<o<rp aMCi'cMKC.)
Junus BËLOCH. – Zur Bevœlkerungsgesohiohte in J<!At'.
~«c~fr ~«' ~oHH/cf'JkoMOMx'c «M~S~~M~'A-, 3", Fotge, XIU,
Baud, p. ICI et 321, février et mars !897. Icna, Fischer.
M. Seeck a engagé une polémique avec M. Beloch au sujet
de l'application do la statistique a l'histoire ancienne. Il con-
teste que ta connaissance que nous avons de t'antiquite puisse
nous permettre autre chose qu'une statistique conjecturale',
et il proteste coutre le creditqu'on accorde a cette prétendue
science depuis le livre de Betoch' dont tes conclusions,dit-il,
< menacent de devenir canoniques*. !t se propose donc de
montrer une bonne fois aux économistes combiextes résultats
obteuus sont peu certains et même peu vraisembtabtes.
Ce que Seeck reproche surtout à Beioeh, c'est l'arbitraire
et ia hardiesse excessive dans la critique et le rejet des textes.
L'histoire, dit-H, ne peut s'appuyer que sur les témoignages
transmis. Ces témoignages peuvent être sans valeur et il faut

(t) ~M/ef-M<« Bet<n!~e :«<-~ettiM«'M))~/fA)'t. Lt'ijtzig,Dunker,t.


Die Bft'"Wft't<M.f/der })'<ee/tM/<<Mh'tAeM U'eM.<8!)<L'auteurannonce
un<iiiffoHtb' j'artit. – Cf.)':s aHh'tcs
< )oKttuttn)MMyfrtinrla t'o~M~a-
~tan~
<foMaH~«e )~at)</M)H<'<ef'AMt'/«/e)'S<t«thM!me<M<'Aa/'<M, Il, p. tt3;
sur le livre <)''Bt-toch(in /<t/t<-&Ne/t?< <)!MS.
tX, p. 723;.S e<'<:){
triti'jUf
aussi t)'t!stttti~itjUM do Mans))e)bru);k.Do' M~efmaHf~tMaM und
Staal. ft'reussMche Jtthrbddu'r,<)?<.p. tTS.)
AX.U.~ES.QCfMTftM!i
OKDEMaaHAt'MOS B4!!
alors les rejeter. Mais on ne doit le faire que pour des raisons
impérieuses, car quand on a rejeté les témoignages il ne reste
rien et nous sommes réduits à l'ignorance. L'historien
moderne peut démeier dans l'histoire de l'antiquité des rap.
ports de cause à efïet qu'ont méconnus les anciens. Il peut
donc redresser leur interprétation des faits, mais il doit leur
emprunter les faits eux-mêmes, et il ne peut contester un
fait rapporté par l'un d'eux qu'on s'appuyant sur te témoi.
gnage d'un autre. Appliquée à la question de la population,
cette méthode rigoureusement philosophique nous fournit des
données pauvres et fragmentaires, mais solides et qui seules
méritent confiance'. C'est précisément cette méthode pure-
ment phiiotogique et forcément conservatrice que rejette
Betoch. On no peut, suivant lui, se contenter des données
statistiques que nous ont transmises les textes. H faut les
rapprocher les unes des autres et en tirer une statistique
générale do la population do l'antiquité, en Grèce et à Rome.
Car on ne peut se soustraire a l'obligation de se faire une
opinion sur la grandeuret te mouvementde la population dans
J'antiquité. Que peut ctro l'histoire de la guerre si l'on ignore
la force des armées? Comment parler de la situation écono-
mique d'Athènes au temps de PericJës, tant qu'on ne sait pas
si la ville comptait 10.000habitants ou en comptait t .O00.(j00.
Et qui objecte que ces deux chiffres sont absurdes, montre
seulement qu'il s'est fait, inconsciemment et sans méthode,
une opinion vague sur la population athénienne. Or une
opinion sur la population, quelque confuse qu'elle soit, ne
peut être exprimée qu'en chiitres. C'est se teurrer soi-même
que de croire échapper a cette nécessité. Toute opinion sur la
population doit s'exprimer par deux chiffres donnant le
maximum et le minimum possibles, et d'autant plus rappro-
chés que les chances d'erreur sont mieux éliminées. 'Les
résultats ainsi obtenus sont évidemment approximatifs, mais
Infiniment plus précis que les opinions incertaines dissimu-
lées sous les mots.
< D'une manière générale, dit Beloch, je n'ai
jamais eu
l'idée de présenter les chiures que je donne dans mon livre
comme absolument exacts. Monbut principal était de donner

Il) Scccktfnvuie&son)h)f <:M<'AtfA/edes (~/<M-~<M~der <M~hM)


tV<-«. et & P<)t))tt)ann.
Die<f&<t-t-et-MHf/
<~)'ott~es Ct-oMM<<-(Pr~.
fchrinenderJabtowiski'Mhen (iMeUschaft,
XXtV).
H.r)OK):Mt)tt.–t)))<?MHK-iu).M9T.
&4K t.'A?(SÉR"u.:)<)t.nt))~t'tt.<M~

à la recherche une base solide, en établissant les chiffres


minima vraisembhtbtes. Ses évaluationssont, d'une ma-
nière générale, intérieures aux évatuationa traditionnelles,
notammenteu ce qui concerne Je nombre des esclaveseu
Grèceet a Home, lu poputntion tutato de lu Grèceau V et
au tY°siècle, et celledo ia Homeimpériale.Cetochlosconsi-
dèreconnuetes résultats économiquesles plusimportantsde
sou travail.Pour les obtenir, il ne croit pas devoir se cou-
tenter, commo Seeck,destémoignageshistoriques.Lesdonnées
numériquessout, plus que tous les autres textes,exposéesaux
injures du temps, et ni la grammaire ni le contextene
permettentde rétablir les vmies leçons.En outre pendegens,
mêmeaujourd'hui,out te sens duce quesignifientleschiltres;
lesévaluationspersonnellesdeshistoriensn'ont qu'une hubtc
valeuret veulentêtre contrôlées. Cr ce contrôle ne peut se
faire que par d'abondantes comparaisons, tt ne faut pas,
commete fait Seeck, étudier deux ou trois passagesdistincts
et montrerque, pour chacun d'eux, une autre opinion que
cellede Beiochpeut être défendue. Il faut, eu usantde !a
totalitédes matériauxréunis pourta premièrefois parMoch.
construirecommelui un systèmetotal et bientic de ia popu.
lation antique. Alors on pourra, on rapprochant les consé-
quencesqui découlentd'affirmationséparses dans les histo-
riens, contrôlerles aMnnations eites-tMemesetles rejeter s'il
y a iieu. Si l'lie d'Égine avait disparu, et que nous n'eussions,
sur l'état économique de ia Grèce, que le témoignage
d'Athénée,nousserionsforcésd'admettreaveclui qu'il yavait
à Égine47U.OOO esclaves.Au contrairenotre connaissancede
t'He et du rapport de la population servite lu population
librenous permet de rejeter ce chiure commeabsurde.
Il faut aussi, selou Beloch, arriver à donner auxchiffresun
sens concret et à se représenter ctuirentcntles états histo-
riques. Les philologues s'attachent aux mots et non aux
choses. Ils prouveront, d'après les textes, que Romeavait
plusieursmillionsd'habitants, et ne s'apercevrontpasque ce
ehinre, étant donnée la superficiede la ville, est absolument
inacceptable.La population d'un paysdonné,dans un temps
donné,estle produit des facteurs économiqueset historiques
et nous pourrions la connaitre uniquementpar te calculsi
nous avionsune pleine connaissancede cesfacteurs.Nousno
t'avons évidemmentpas. Nous partons donc d'une sériede
donnéespositives, mais nous en savonsassezsur les diué-
– Qt'MTMSS
AXALMtM. P6 C~MoGH.tt'tttB 847
rents états économiques de l'antiquité pour combler les
lacunes de la tradition. D'ailleurs, )M«f«fMK<xf«M(< nous
agissons exactement de la mémo manière pour les autres par.
ties de l'histoire antique. Et ta statistique historique a sur les
autres parties ce double avantage, d'abord que les phénu
mènes démographiques varient suivant des lois plus régu
liéres et plus simples que tes autres phénomènes, et en outre
qu'ils échappent &l'influence obscure des facteurs psycholo-
giques que l'histoire ne peut éliminer.
On trouvera dans les deux articles d'où se dégagent ces
idées générâtes, d'intéressantes discussions sur la population
d'Egypte d'après Uiodoreetd'aprësJoséphe, suria pcpuiatiou
totale de ta péninsule grecque, surle chinre et la composition
de ia population athénienne au v. siècle d'après Thucydide,
sur la densité de la population à Rome à l'époque impériale.
sur le nombre des esclaves par rapport ta population totale.
Les nombres relatifs à lu population que nous transmettent
les textes ne s'appliquent ordinairement qu'aux hommes
faits, susceptibles do payer l'impôt et de porter les armes. 11
est donc nécessaire de les multiplier par un certain coefficient
pour obtenir le chinre de lu population totale. Beloch pro-
pose et défendle coefficient! qui supposel'égalité numérique
(tes sexes, et le nombre des garçons au-dessous de dix-sept
ans égal à la moitié du nombre des hommes faits, soit il !?
p. MOde la population masculine totale.
Pour les esclaves, Betoch pense avoir ruiné l'ancien dogme
fondé sur les textes d'Athénée, qui considérait la population
serviiecomme formantplus de la moitiéde la populationtotale.
Il démontre qu'il ne peut pas, à beaucoup prés, y avoir eu à
Athènes 400.000 esclaves au temps de Démétrius do Phalère;
que le nombre des esclaves domestiques en Grèce était très
faible, et qu'il existait seulement de grandes masses d'es-
claves dans les villes industrielles; qu'a Rome, ville indus
trielle sans importance, le nombre des esclaves ue peut avoir
dépassé a l'époque impériale 200.000ou 300.000, et qu'il fut
très probablement beaucoup moindre.
Pour la population totale de Home au t'~ siècle, Beloch
donne t .000.000d'habitants comme le chifîre le plus élevé
qu'on puisse admettre. Il justifie ce chiffre par des raisonne-
ments très ingénieux sur la densité possible de la population
dans tes quartiers pauvres. Tous ces chiffres, donnés seule-
ment comme vraisemblables, présentent au point de vue
S48 L'AXXHt! <M?
soKMLOmQt'K.
1-1-_.1- 4
eociotogiqueun intérêt beaucoupplus vit que la critique
toute négativede Seeck.
I~ft FAucoNXKT.

LEt<)t)J!~È.HKM).:t.~)~:j'()t'H.A'f)')X

i)' JACQ.BERTILLON. – De la dépopulation de la France


et des remèdes & y apporter. Broc))., Ber~er-Levrautt,
Xancy,;t896. Le problème de la dépopulation. Broch.,
Armand Colin, Paris, )8U7.

M. DAGAPt. – Un aspect de la dépopulation (V~cw


Mtf~/tf/Mc et de H)ora<<mars 1897).
D. PARODÏ. – A propos de la dépopulation (/&«< mai
)8;n).
D' J. BEUTILLOX.– La puériculture (~frMc<fA~<~)c,avrit
~97). Alliance nationale pour l'accroissement de
la population française, programmes et statuts, exercice
)89().

H.LEVASSEUR. – La dépopulation de la France (/h-r.


)0 octobre Ht'n).
~o~t~Mp~p«W<'M!e~<)'<-<
P. LEROY-HEAULtEU. –La question de la population et
la civilisation démocratique (/<<'ct«'</M/)<'t< Ilondes,
tS octobre '!?').

Sans que les nombreux articles parus cette année sur


)a depoputatiou aient chaogc la position de ht question,
et bien qu'ils soient presque tous, comme il était naturel,
orientés vers ta pratique, ils auront contribué sans doute à
mettre mieux en lumière et ia nature scientifique du problème
et l'espèce de sotutions qu'il comporte. Ainsi M. Bertillon,
dans ses articles et ses brochures si documentés, reconnatt
que
tous ceux qui ont voulu en donner des explications sim-
plistes, soit médicales, soit économiques, se sont trompés; et,
en accordant que le degré des croyances religieuses
peut
exercer quelque influence sur le chitïre de la population, Il
est bien près d'accorder que les phénomènes
démographiques
tiennent à un état social tout entier. Pour lui cependant
– LRPMBLÈMK
AXALY'!t!.<. ))R).AM~POt'fLATtOX
S~9
il y a une cause infiniment plus Importante que les autres et
plus ou moins contingente, qui faitdotadépoputation un mai
essentiellement français, et qu'il s'est donné la tacbe de corn'
battre eu fondant t'~«MHc<')tf<<<OH<!<c ~f
pour <'f«'<;<'o)'M<'M)fn~
~Mpx~t'Mi /t'«n~<Mp c'est < )a préoccupation de la fortune
à conserver < partout où cette préoccupation disparaît. )a
natalité prend un essor considérable (exemples frappants
de ta petite commune de Fort-Mardick et du Canada); plus
elle est vivo et plus le taux de la natalité est faibte (compa-
raison des départements les plus riches au point de vue agri-
-cote et des plus pauvres; comparaison des divers arrondis-
sements de Paris); et si c'est en Franco qu'elle nuit le plus à
l'accroissement de !a population, c'est que la France est plus
qu'aucun autre un pays de petits propriétaires. Aussi ne fau<
drait-it pas que le nombre des enfants fut une < ruine pour
les familles et sans rechuner une refonte complète du Code
civil, M. Hertitiot) demande l'urgence pour un p)an de
réforme fiscale relativement )nnder6 ii pose en principe que
le fait d'élever un enfant doit ~tro considère comme une
des formes de l'impôt, et que, pour que cet impôt soit
acquitté par une famille, ii faut qu'elle élève au moins trois
enfants, les deux premiers ne faisant que remplacer les
parents, et le calcul des probabiiités montrant que, sur trois,
il y en aura au moins un qui mourra avant de s'être repro-
duit De là l'idée d'établir comme une écheUe fiscale pro-
gressive pour les familles ayant moins de trois enfants,
régressive pour celles ayant plus de trois enfants.
Deux objections s'imposent à l'examen de cette tbese, si
large qu'en soit la part de vérité d'abord, en faisant de la
préoccupation de fortune ia cause capitale de la dépopulation,
l'auteur ne peut plus expliquer, et que le même phénomène
ne se produise pas d'une manière identique dans tous les
pays régis par le Code Napoléon et soumis au même régime
de propriété et d'héritage, et qu'il paraisse se dessiner, bien
qu'à des degrés divers, dans tous tes pays d'Europe. Sans
compter que, ne se demandant pas comment, à quelles con-
ditions et dans quel milieu une telle cause peut amener un
pareil etïet, il en arrive à fonderles lois démographiques sur
la seule statistique, et ainsi a tes concevoir à la fois comme
tout empiriques ou inintelligibles en soi, et comme rigides et
absolues.
C'est le sentiment de ces difficultés qui semble avoir motivé
8M) L'AStt~ !«M:<m.umQt'K. )!9T

deux réponses toutes récentes et assez vives de ton. – Celle


(te M.Levasseur n'onre pas, à vrai dire, un grand intérêt
scientifique d'abord parce qu'il y reuvoie trop souvent ù
ses démonstrations antérieures, mais surtout parce qu'il porte
la question sur le terrain, non seulement pratique, mais
même politique. C'est aux remèdes de M. Bertillon qu'il en
veut; et, après avoir t'appelé que le taux de la natalité
n'était pas plus éievé en France au siècle dernier que de nos
jours, il prend la défense des « droitsde l'individu "qu'attein-
drait tout essai législatif pour décharger les familles nom-
breuses ou surtaxer les célibataires, et dénonce les dangers
de toute mesure qui, par ses tendances socialistes, pousserait
4 c Immigration des capitaux mobiliers I) reproche à son
adversaire de ne pas admettre la résignation < On me
<lira Vous êtes des impuissants qui abandonnez le malade à
~anature. Je me permets de répondre que c'est quelquefois le
'parti que prennent de bons médecins et qu'il y a des malades
qui guérissent ainsi.
D'une portée plus haute est l'étude de M. Leroy-Reautieu
après un intéressant historique de ia question depuis Malthus,
Fauteur essaie d'établir que les causes de la dépopulation
<ontplus profondes et plus générales encore que ne le suppose
M. Bertillon. !)e ce que le taux de la natalité décroît partout
en Europe depuis un quart de siècie, sauf en Russie et dans
les États méridionaux, et surtout en Angleterre et aux
États Unis, il conclut qu'il faut l'attribuer au mouvement qui
entraîne tout notre monde occidental a la décadence des
idées religieuses, a la conception nouvelle de la famille, au
féminisme, à l'instruction généralisée. & t'effort des classes
pour s'élever dans la hiérarchie sociale, au retard dans le
mariage et à l'âge plus avancé des époux. En d'autres termes,
la vraie cause, c'est que, dans tous les rangs de la popula-
tion aujourd'hui ou désire ardemment que, d'une génération
a l'autre, la famille s'élève sur l'échette sociale en d'autres
termes encore, c'esUedévGtoppementdel'esprit démocratique.
D'où il suit que toutes les mesures légales ne pourront être
que des palliatifs, et qu'un relèvement de la natalité ne
saurait venir que de l'action énergique de causes morales
modifiant notre conception de la famille – Nousne repro-
cherons à cette étude(d'ailleurs un peudinuse)qu'unecertaine
allure de polémique et comme un soupçon de parti pris poli-
tique le terme de démocratie n'est-il pas équivoque en effet?
A.y:'K.<. )'H).~ t)t!['(t)'t'LAT)OX SSt1
).Kt'MuBh&NR

H'a-t'it pas t'air ()o.endre un régime particutter, et plus ou


moins contingent, responsable d'un phénomène, qu'on peut
combattre sans doute, mais qui n'en est pas moins liasuite
naturelle d'un mouvement nécessaire et (atat. ()n progrès
métne <)elit prévoyftttceet <)e ta civitisotion? – II n'en reste
pas moins que le caractéreavant tout moral et l'extrême com-
plexité de la question apparaissent ici plus nettement que
partout ailleurs
C'est aussi ce qu'a contribué a mettre en plein ro!iet,
croyons nous. une polémique soulevée dans ia 7<('<'(«' (~ xt~«-
<'f~<'MM)Y<<f.
phf/jttf/Mf Matsatisfait par toutes les expticntions
actuelles du problème, un économiste de l'école positive et
matenaHsto, M. !)agan, leur reproche à toutes de s'arrctet' à
des raisons morales, c'est-à-dire, car pour lui les deux choses
n'en font qu'une, non scientifiques. Tant qu'on n'aurn pas
considéré le phénomène économique de la dépopulation
comme t'enet tout fatal d'uue cause strictement économique
etie-métne, c'cst-a-dire mécanique, on n'aura pas {ait œuvre
sérieuse. Pour éc!aircir)a question, it sutUra d'aiiteurs, selon
M. Dagat), de ne pas chercher une loi fixe et unique de la
dépopulation, une loi s'appliquant a toutes tes classes, mais
de reconnattre qu'il peut y avoir autant de lois diverses qu'il y
a de milieux sociaux diftérents. Se fondant sur des statis-
tiques anglaises récentes, il croit même pouvoir {ormuter
cette loi pourla classe ouvrière: < L'apparition do t'industrie
des manufactures accroit le nombre des travailleurs par
suite, toute famille nombreuseaugmente ses chances de bien-
être, et ta population augmente; paraissent au contraire les
machines, et la diminution de la main-d'muvre, le nombre
plus grand des ouvriers inemployés, ta substitution dans les
ateliers des femmes aux hommes ont pour résultat forcé la
diminution de ta natalité et ta dépopulation. !t en résulte
que toute tentative pourarrêter ce mouvement fatal est vaine
et chimérique. Ainsi, si les théories de la dépopulation
paraissent souvent erronées ou superficielles, c'est parce
qu'elles sont mal posées, tt en sera toujours ainsi tant que
les démographes continueront d'envisager le problème du
point de vue abstrait de la nation (?). Pour le momeut, tes
»
groupes sociaux demeurent le critère vrai.
Ona essayé, en répondant&M.I)agan, de mettre en lumière
te vice de sa méthode et l'arbitraire de ses conclusions.
L'économe politique ou la démographie, sciences complexes,
SB3 L'AX~Ë so[:)nt.oa[QC){.!??

loin de vouloir s'isoler de toute autre, doivent emprunter


sans cesse leurs cxptieatious aux sciences ptus simples
qu'eUos supposent avant ettes. Un tait écoaomiquo ne peut
jamais eu enet résulter directement d'une cause économique
celle-ci ne peut agir que par des iutermédiaires, ou méca.
niques ou psychotoniques. C'est ce que Stuart-Miii reconnais-
sait déjà iorsqu'it écrivait « Quelle que soit l'action que
d'autres causes puissent exercer sur les phénomènes sociaux,
elles ne l'exercent que par l'intermédiaire do lois psychoto-
niques. On ne pourra déterminer d'une façon démoustra-
tive les raisons de la dépopulation qu'en cherchant les facteurs
psychologiques immédiats qui peuvent y pousser et l'on
reconnaîtra alors qu'elle suppose le concours de plus d'une
condition < Les causes économiques n'agissent qu'en tant
qu'elles fournissent aux hommes des motifs de se déterminer
en tel sens ou en tel autre. – De ce point de vue, la dépo-
pulatiou apparaît comme supposant trois conditions au moins,
dont l'absence d'une seule peut empêcher le phénomène de
se produire t" comme elle implique ia subordination d'un
instiuct naturel à des considérations d'ordre intellectuel,
il faut que l'idée en soit fournie par l'imitation des hautes
classes. elles-mêmes à ia fois corrompues et réfléchies et
cette idée, pour être comprise et adoptée, exige encore et la
facilite des communications, et un minimum de réflexion,
en un mot une civilisation assez avancée il faut encore
une raison d'adopter cette idée et de s'imposer cette
réflexion, et cette raison pourru être de nature très diverse
suivant les classes ou les lieux pauvreté, appréhension
égoïste des soins qu'exigent les enfants, peur de démembrer
le bien patrimonial. etc.; M"il faut enfin que fassent défaut
le!:raisons contraires, quemanquent par exemple tescroyauces
morales ou religieuses, ou peut-être aussi les mesures légis-
latives encourageant à la procréation. – !) suit de la que
M. DaganetM. Hertitton peuvent avoir raison à la fois; mais
que ni la pauvreté ni l'intérêt ou les vices de la législation
ne pourraient agir dans ce sens si. la corruption des mœurs
et l'absence d'uue discipline morale ne leur laissaient le
champ libre.
Malgré des divergences partielles, la même conclusion se
trouve ainsi sous la plume de M. Bertillon et de M. Levasseur
ou de M. Leroy-Beaulieu; et c'est elle encore qui résulte de
l'examen critique des idées de M. Dagan la dépopulation a des
– LEt'KOttt.&MK
AXAU'SR; M LA))~'tt)'t;LAT)OX583
causesessentiellementhumaines,c'est.à-dlremorales,et l'on
peut des maintenantconsidérerce point comme acquis. Et
c'estchoseacquiseaussi,croyons-Hous. et qui ressort de la
diversitémêmedes solutionsproposées,qu'un mouvement
démographiquede cet ordre tient à tout uu état social,
qu'on ne saurait le considérercommel'effet direct d'une
causesimple. Cequi revienta direencoreque les statistiques
ne peuventêtre pour le sociologue,conune du reste l'obser-
vationpour tout savant, qu'un point d'appui, et plus tard
une pierre de touche pour ses analyses,ses hypothèses,ses
inductionsou ses déductions,tousmotsqut ne désignentque
des aspects d'un même processus intellectuel, celui par
lequelou comprend,on expliqueet ou démontre.
J). PAMO!.
TAHLE DES MATIERES

t'ttt'MCK.

PRËMtËHË PARTIE

MÉMOIRES ORIGINAUX

LoproMM)onde<'<noe<teetM<of~fnes.p:u'E.DL-K)msM.. t
T!<
t
~U.Comment<es~o''mesMCM<MMm~nt<ennen<,tm)-G.StMn)!t.

DËUXtËME PARTIE

ANALYSES ET NOTICES BIBLIOGRAPHIQUES

t'HHMH~KESHCTtû)!. SocMtogMgén~Mte, pat- M. Boctj~.


tn(ti[M)a<'tt"n. Ht

1. SOCtOMGtB
C)))MSO['))tUUE

<}.TAnt'K. L'Opposition antvtMeHe. K~sai 't'uno th<?«ri''des


tontmircs. <t)1
P. BtttfM.– Die PhUe<ep)'ieder CeMMchte«ta Sociologie ~t Phi.
)us<)p))i''()t't')))!!tu)rt't)upu)atde\'Ut'i!'M'mtuxiqaK) <)*'
FutiC):MttKST.MO. – LaBet~XMBMMe <S3
Vtcitts. – La Mience eedate d'apte* tM principee de Le Hty t~
ST~oT.Mtt.t..– L< tegiqM dM BctenMt<ocMe*(tr<n)u<-tion Bctot). tSS
nMo~'iR. –ï.tSeeMegte par &Mg.Comte. t~ '<~

)). socMMOEmnf.ontttL'E

Nevteow. – CoMetence et vttMM tMtttet <i!"


U)!Mûo«.MAssAM<'t YAXNERVtLBE. L'EvetatiM regMe<!ve ea
Mete~eetMeic~e. 03
SStt T.\Ht.R t'KS MATtÊKt:<

Rmmum
StXT.tttAM* nc
DE 1),nrrncc
P.tRKt'Ks. pl
Et wnwnnn·n Aa
de nman7arnn
cenMpto erganhmo eootat (t. con-
<'ej)td'urt!ttni.<mfsm'iM)' tH

t)t. – SOCtOLOfitH f'SYC)tOLO(i)uU)-: n' St'tOF~t'Ë

GtBt))fos.– Tha pr!ae!pte< of Soeicto~y <t'rinei))c<


de iiut'tuto~t' m
StXMtt.. Supertority and Subordination (Sup~t'iot-ih' et suhonti-
m~ )M
(_Bnu6t.e.–Qa'9Bt-MquettSoctetogte?. iM
pAïf)! Thé Relation of Seotole~y to Psychology(Happort~df
fttSuc)u)uj$it'<;ttt)iiuP.wht))<)(;k'). iNi

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tK'nA )'))i"tt"t\'de lu rt'tiHiun) i60
SABATtex. Esquisse d'une pMioMpMe de t« MMgtoad'apret la
ptychotegte et t'MBtotre iït
XocH.– Dte Psychologie in der ReU~entwieMnBehatt (La piychu-
tu~i<j(ttns la iieioncodu )« n'tigion~ <77
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t). – HEUGM~g
)')t)MtTtVt~
HSOËXÉKAt.
f~f N. M~cM)

K).sm'. Travelo in WMt Atrica (\n!tK'< 't!tn~ t'AMque o'i-


<h'))h));) <79
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niiittMamtte) <?
NoTtCts.– itaxtiMn. Kfa))' <M
Hataitte. Kt'')t)t'ket-.&)w)'< YeU).K&kcnttm).Crunvfdet. Mever.
Cuol.ttutt). 187
Tribus non civilisées de r!nde et de t'taOo-CMae. Moheft~un,
UrottdfMut,Uuddtin, Wuudthttrpp,Oppeft. «7
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hrlmu'iix. ))?
Atte <eptent)'iona!e. – Stfnivnctii.Wint))! Stt'Min.St'rofhfw~k!,
Urutie 189
Anciens peuples indo'earop~Mt. – Siecke,Sh'in. L'jftthy 189
Sarvivtoeet de* religions primitives chMles civilisés. )':MtiH(t.
Hthn. Stt'rn, Stiudtt. 189

)<). CCUTË (par!). )ttt:M)


OOHMTUjUK

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t'tmcienncRome). 190
K«T)CM. HMtets. Mtthcwi). LuM-tttiu. 8)tn:yt)cki.
Hsko. Ktuttdo M7
TAHLK
0<MMATt&XKS S87

)Y. CROYAXCËS
FTt'KATtQCES
COXCEM'<A'<T
).KSMORTS
()wrM.M~M)

STf!MM<!K. – CtattnMttet eder toha wd Strate im JeaMtte der


WHden (P)'itM-tctttict)m))cn!i~;<)e;ta vie d'oatre-t'XtttK'chc!!)c<
faUVX~'x). )')<
CAL~u.– DieAttindhehenTcten-und Bettattungegebrteache «it'-s
ot fufjcmttfi!dut)"rtod'' ttH''h'ti)K').
)))u)')U)tit')'). jMO

t'ftt'~ {!.tt<['x«). Scutptured Tombaof HeUat(La s<utjttutTfunc.
ntir'' ')' t)c))t'n<) j'os

XoDKKs. PrëMstortque. Mad~'n. CopchmdH~t-tuM', W~tfxtmx
Mt'fb)~.J'att'oMi.HM))a)-)t,h'tittdt'Mt't-tfn-,~h!.)x~) iM7
t'e<tpte<non eMUt~t. – KMMnow. ït)8
Aathropophagte reUgieuse. – ~)ati(-<))ot. Kcm, Ktiiunz sot!

AnUq~iMgrecque. )''rit~ ~«wAfn Ct~&t'f<«- KttMtîttmnM, U)'
Riddor ;?!<
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Divinisation dtt princea. Kacr;,),Mti.'pt'ro, Cutnunt. :KK)
Orandet religions. <j<')d:!i)<r, WiJkowi:)(i.
)))t)t)t)«u))), ~to

CH.'n'SPOPCt~mËS PUS t'AttTtCL'UÈMMEXT


t!K(itiXÉMt.. AOUMtiS
M.))ttM)
()<u-

CttooK)!. Thé popular ReUgioa* and Folklore o< Northern tn-


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Kairtf, )'rt'tt,Biuu))t<)t')<),on)ft))Ht)n,<tt')!.)!k'r.
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Tentt))c,Mnttun.tirant, Tut'httMnK. :S<

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t!).t<<r.L~VtV. h'n))'i)!t't, Uu.ii.Sch\\at). K))tU.Otdt'ttbt'K.
tiuit)K'r,Cftr)f'y,An<))<)',Uut:t!t'.).t' fM
M~endet populaires. t)'jn".<,Mt-uo,Yerm't, MtUt'y. Lidittxtt-fki.
Bud~tjttt-fiett. ÏM
Mythologie ehr~tienoe. – t'at~uu~,Hutti'c,Ufuncett~ 2M

\'tU. DUCULTH.
OttGAttSATMX NOMOHSHK

ZotcKLttt.AetMe and Mcenchtttm tAsfvUstncet MmMt'h~ot~ ïK


– H'*m)bitfht')'.– W"mUtuUM*.
– Fp!'<ti))an<t.
KoTfCtS. – M"U)t)t!t).
–LiHK'rick. ~it

NOTtOm SLHUi~ <t(tA\t')~)tHt.tGtUSS


MYBtM&S EXti~t.ttA)

Centtttatian etd~veteppementdudcBmehtbntïqaeet israélite.


jMt)t)<.K)m;tM('h)Hur,S''«)n, Mu))t'r.t)u))',Xuut))unt).))uy't-,
Manjuart, )tat'aMk. Friedtu'nd<'r. Manuno. Nit
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A!t)).Luis)',0)t)<y. ai''
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Crt-lit)tt,ClititosiLc)ek, V
Utt<hc!!m'.Ct~'it(Mt,CtintonLw)i,
I)ue-liegtie, incent. f,udlij%v
Viticetit. Ludtuw. ~'7
tt,7
NtiM~nM et expantton do chrtttianiema. – )tc%Utt'.~'st~ Mc~'r.
Luckut'k,UoUt-gt'u)!Bot'tx'ttmnn,KuH<)bu~<'h.Atthaus,Knappt'rt. S97
BouftdMMte.– K'-rn. Wu~itit-tr. Tak~ku~iu.Cavf. Nix
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L t.MHA).EASLKLBDKOtT
Tt~OtUES ETLAMOXALB
fpMX.)~Kt).

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– Il preNema deUe ohatni det dtrttte (Le!!origine!;
FxAOAt'AXt!.
du droit)
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et )))')tt)')Uf).
d'un'' '?t))it)Ufi't'icMtHttjUt;
Bthlk !Ba!i<:i! ~u
RueMtTV.– L'Ethique. Le Psyohisme toeiat. ?)
BMi<t.< Société et mentJe i!M
LAzA)t<:s. Dae ï.e!)en der Seete (La Viodf )'&)))').

H. SCKLE!!MUiUHS
OMECTtYtB
&Tt;t))!S (parM.)."<

– et
\')M);At:M. NttotMBtJterund Kutto)'vet)[e)'(t'KM)))<'<ptnnitih
peMptMch'Uitës).
s_
TAHLS CM MATtÈMK!! 689
Hx.oexMiiu. Reeht and Sitte «et dee veMcMedenenwiftachatt.
lichen MtNMtnten (t~)! )t)«'a~<'()<'droit xm ttitKtThtc~nhttsM
')e)'t'<'u)t)))OHt'('u))t))ui<jU'). M5
UMM).- ta Moraleprttiea degli aaticM
MMtfeaoUMt.tuh- pMti'juu
df!'<tHci<'n'tMt)):it'tt)))!!). 30~
t'~t.tTMMKt!. Ethooor(tph:e Nordeet.Atf!)M<. DieCehtt~ Cuttur
derC<tM)tH,t'tf.[L)tcuHut't!)uum<dt'iUatMk!)!<t<). 30!)

)t). LAt'AMUlt!
(jar M. )h-m)t)tM).

KoMt.M. lur Ot~eMhiehte der Ehe. Totemitmttt.


Orappeaehe,
mutterMeht (Cuntdhutiuf)A)')))<h)iMpt'hoitiv du m)H-i<txe 3U);
(i«oss(;. –D~rwmenderFMaUteuaddteFormea dtrWirKchttt
(Lt'Kfufmf<(t)i);t fftfttiHfc) )t..<t'm'ou'ft)k' )'ttrti\-it<!~Kunt~tti'jm'). atU
.LM!fr. Att.AtiMhMJet eMte. Attttu.ifung(t)t-«iteh-it
tMnSles 6U<;it'tt.!< uriHtittf
Mfyc«MH<) 333
MuttKT. La condition des MtttUten Egypte, dans la famille, daae
la société, etc. S3g
ActMovtc. CebaMicbt dee MrMaohenEfbMchtt 'Atw)~M <)))th~U
)!u<'re<oratiwrbo). tgM
Mtnsft. – Die HaaMMaatun~n der Sfidslaven (La cM)ttou)Mutt-
'tuomittujuefhc!! tc'.<StttVMdu Sud x~

)V. t.KMÏmOtt<pMM.
))t<.M.t).).

~u
tMMmt..–emar!<tee<p)rtttetlnvM:OM.
t'ttttifMtOM. ramUieMtntta and Bhetennen (Ty[M'<de fmnUte
ft fu)Htt'!ide ttt<tt'Mffe) 3t3
~Atttff. Meo-che tagU uai nMMt ne! média ev« in Sicitit
(L.<)t);MMM~MU.'[')t')ttSM)t'nu))tuyctt&)~ !)t!,
'ScHot.tiOtt'ao. Die Spnren des BrMtMMtee, ''<< (TtaM'itdu tut-
j rt<tgc [))n't-t~t. eh: ~M

V. U t'ËtXE()w M.thMM.t.).
'J–

'iusTHM.-Die tdMdar WiedtrvergBttune!n der Se<eh:c!tte.).


(L'Mt''Md't:):piati'M)d)in<)')ti.<tuin'.t')t-.). a~
~.Sttt.M. – Studien tM dam Stfatreeth, etc. (Htudciide <)ruitp<?))o); 3St

M*m. La reMa~e et tM oftgiMe du dreit pAnat 3:a

\). [.'Ot<(!.tXhMTtO:<
SOC)A).Ë
!)KtfM. tXM.t.x,.

B~MM-t'owm.t.. –Thé Indien VUttge Cemmmtity(Ls c<MuMontmt<!


't'vittagcdamt'fnA'). 3S9
Jom~HuvAt..– La Mmmane MMmUe. 3)Kt
le~aMmeda ctMt dans le paya de GaUee. 3tt6
~KoYAU~'Mf. –
860 DESMATtEBES
TABLE

V)t.-LECKO)TPË<'ROWUËT6()MM.)-t.'tt).

en droit ~ypUen. :'6T


Mnt.Lour.-taproprMM
Cu~ Die Mtiate VerttMMngdee ïn)tare:chet Bine Unterau.
chxng dM attperaaniMhen aBrarkommunbmMe (t.~ coHttnu.
nwfttttruire dauit'titKien t'ffuu. ~tt
MAt'MX. Etntettung sur CMehichte der Mark-Hot-Dert und Stadt
()u vittaf~,
VerttMung ''t' (ft)tfudm'tiu)ià t'histuiM d'; t(t'rMM-hp.
de ta ville, <!(<) ~:<
BATTAau*. L'ordinamento dette pt~prieta fcnd~Wa neM'ttatta
moridionale, ete. (La pn'prMt'' funcicM dans t'tttttie tn'mtiona)c
sous)(. !<<'t'M'unds,tc.).
BATr*o).M.[/evetM!one looiale in rapporto alla proprieta ton-
diaria in SieiUa (L'Hvu)utiun<u<ia)cd~n<:'!e!,M)t))ur~ ave la
fun''i''t'<;t'MSicih').
pr«prK'(<i

V))). MVKKS )hM'


(pu HM.MMM. '-tE. Un).

Juu.Y. Recht und Sitte im OrandriM der tndhchen. Philologie. :K'4


Koat-M.– Rechte der UrvoettMrNerdAtatriJfae. – KoHLM.Reehte
der Auetretneger. – TAMAM~.H Dharna in Germania ed in
Orecia. -UwsAKov. DAUteetoontMtB. LEseoxA.Doverisociali. :M7

QL'A't'Rt~ME SECTtOX. – SocMo~e criminelle (pat' M. HtcM.utH).

\AvcrtiMCtt)'nt.

). LASTA'nSTtUCË
MOKALH

Boscu. t.'0mtc:dte neati SM Ututt. (L'hotuicu~-auxKttHs-L'ni!'). 395


3vi
cetmMHM.–jhajmipM~-
'T<~MMM?–I.~meeaotea deûa mieraziene et ta criminaMta (L"
t))<'cMis))tt!dc)'etnig'i)imteU<t<'t-int)Mtit)'.). t'M

n. ).'A!)T)tKOPOLOC)ECR)MtXE).).E
~<
et les ~afM.
A. – te C<'<Mt<

t07
CoMttB. L'Ethnegraphit cr!m:neUe
FMMHo. – La Morale primitiva e t'ataTiome del deMtte (La mo-
H7
Mepfin)itivc<'t)'atavift!ne<'nd';tit).
TAMt.Ktt~ MATt&HE!' SO't

)).–t'f<c~<'«)'!t/~«'<<M<«'<'<f/«frff')<

t')!tt!t)A!t).
– MtnorenniDe)taqMoM.Ut'Hn')Mant<)))it)''utA) tt!)
MoM!tOx.–Jnv9nUeOffM<terB(Jcun)'t'rimi[n')<). 4M
CtMot.ot~'t'iKTT. DeMtUfeminili a Nopoli (tM)i~ t.-t.tini)~ &
Ktj)h'). t30
ÏA)tt)< Criminalité pMtM'!enae!i9. M3
LKUttAtx. – Conséquencessociales de MeMMMMau point de vue
detact'imtnaMM. M&

<–o)'M)M~t'm<m<j'M</('/<7.

– t Vag~boedi(L'-s vm;'t)'t!')
t'MBtAset CtVAut.ts<t. t3T
StuM):).)!.– LtdettnqMNM MttMia (Lttt'ritniMtit'' ')' scctt's; tti
f'~xMAft.– DetinqMeatt<eattr! e fortuatti (La <Ti<))i)ta)it'?
w'u]t<). 4M

t).–t'M<'jjf<'<.

Stu).As.– Et deUncuenteetpanot. El tenguage (Le crixtiot') t'i.ptt-


){t)u)ct!tonf)in){")t''). 44~
,X)Ct!)'o)to.–U(;er9o.<t<(t/ttr)<ù)). 4t&

H. – (<HM<tOM
f~tO't'f*.

h'~MtttiMo
ft Kx.MEt.E. – Croatche o'tmtaaHtttMane ((;htf)tti<j<n'~
<-)i-
Ht))))'))?!)
itu)icnt)t's) <tT
Ff:KM. – Lea Criminels dans l'art 4M
)tAHKit.tG!:E.– SttjtmttM anttomtquet de la criminalité 4M
– – SUgmttM biologiques et tecteto~Mee. 4M
TMorte* de la M-tmtMtitt 450

C~QUtÈME SKCT!OX. Sociologie économique.

). TOJtOKtE~ ont M. S.).


f:a)XOMtU):ES

~tntrodttetion. <S7

A. – Mt~K)'el /« M)M«<</<*
la t'a<e«<\

BxMM).– La legge dtt Vatere Meendo la dottriM detta UtUtta


Mmite (t~ loi <)f)« tntcu)-~t'ho)la <)o<-tr!ne
de t'uU)itf titoitc).. <S8
V. Buct). – !nteMitMt der Arbeit. Wert und Pré!* der WarM (ht-
(eniiitMdu <mvni).\'a)ettret jx-ix<h'a))Mf<:))an')hci<) 4M
YtXKtCKE.– Der objective Wert und Pfeia (t/c)'-tnt'nt objectif de
)ava)t!Ufet<)uj)ri![). M7
K. UemfHMtt. An'd' "ociu). «?7. 36
KM TAMt.tfUMiiMATtÊKtM

STo~MAf). -DteeMiate Râtelé tn derVothBwtrttchattttehre (La


<:dt~){0)'i)'.<neiith't)!itt<tu''<it'tn't;dt't't~'()m)t)tk')'t)))M'ti\'t'). tM
Bomons. -Lametnredetavateurettamcantie. t?n
KutESt'Et.s. System der Wertthoorie (Sy';tt')t)t'df h th~uri'''h*ht
Vtt)''ur). Mu

tt. – .Su<;<«/«M<'
< .W«'Mf<'
t'CUMOMtf'/M.

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i))!)nx);A.– Die Probleme der menBchtîchen WirtMhttt ([~~t"'u.
)))'ntc<<)''i')ttt)tnit.')uunuim'). t8)i

< – t'/tf cut)<'f/</f0«


/<u<«'<c'/<*/('ftf<atMt<'m('fn<f.

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ohichttaMtfaMMng~n'n)))'' <'t '))'")) tt'MjWs)'' )t)at''ntt)i'!tn''
historitjUt'). it)8

t). – ~f'tf<

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'omm)i<)m'dttM.)<i\'ifp'<)ith)U' W7
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rapports )tYt't-)r!,)tt-i\). t'K(
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WMMtti)!. – SyBtemder nationalen SchutitpoUtitt nach aMBen
~y.<K'))«'<t<'ftttmnti<)M''j)t'«tc<'ttunni!'t''). KM

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)')<OF)iSStO~E).S(t.<u.))..A.
Mtuttt).).

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(LM!!<'wp<))-ttt)Ot)!Htt')wn<:cj. Mt
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!!iot)m.')!!d''tnn-ai))purspnAM);)<t<w<-t('nA))et))Nf!Ut'). S09

Ht. HtSTOiXE
DUTttAYA)).
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.LETOt:tt!i)SAU.–Eve))tUondereMtavage. Ste
HoeEtti;.– Hietetre du travail et des tatatra* en Angleterre Stt
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T.tftt.RHfMM.tTt&Kt!S SC3

)Y. ).t\'()).UT)0~ ()'r M.A. M.M«;).


CUMMBMOALE

t.t!TOm!!M).–)[/EtOlMt!0)tdUM!Om9Mt.
Vo!tMxASt'T. BettrOftesur OeBeMchteder tMmMBthchenHaa
t'M'-toin.' de lit potiti'jM' e"tu<n''reitt))'
dettpoMti)<<Cuntri)iution<~
<)t!t)tF)'!Ht'). ~«'

StXf~MH
SEC't'tUX.OfMrs.
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