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CeROArt

Numéro 4  (2009)
Les dilemmes de la restauration

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Roland May
Patrimoine(s) et Conservation-
Restauration(s)
Quelques réflexions pour une théorie globale
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Référence électronique
Roland May, « Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) »,  CeROArt [En ligne], 4 | 2009, mis en ligne le 14
octobre 2009. URL : http://ceroart.revues.org/index1235.html
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Éditeur : CeROArt asbl


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Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) 2

Roland May

Patrimoine(s) et Conservation-
Restauration(s)
Quelques réflexions pour une théorie globale

Un postulat originel
1 L’étroite relation entre patrimoine et conservation-restauration relève du postulat.
2 Dans le domaine culturel, le patrimoine1 est un bien qui, pour diverses raisons, doit être
transmis aux générations futures. La conservation-restauration rassemble les méthodes et les
moyens pour assurer le mieux possible cette transmission.
3 Mais bien que liées de part leur finalité, ces deux notions ont néanmoins une histoire différente
et ont évolué séparément. Au regard du contexte institutionnel, à savoir la validation et la
mise en œuvre par les autorités et les communautés de pensée, de politiques et d’actions de
conservation et de restauration du patrimoine, la première s’est construite au cours du XIXe
siècle, la seconde s’est définie dans la première moitié du XXe siècle et s’affirme notamment
dans la Théorie de la restauration de Cesare Brandi en 19632.
4 Qu’en est-il de ce lien lorsque l’une des notions connaît une évolution significative, ce qui est
le cas de « patrimoine » depuis ces trente dernières années ? Divers exemples montrent des
discussions, des décalages, des incompréhensions, des questions en suspens ne révèlent-elles
pas un dilemme qui s’est fait jour entre des valeurs et des conceptions anciennes et nouvelles ?
5 Ne faudrait-il pas nous (ré)interroger aujourd’hui sur ce lien et nous pencher sur l’interférence
entre ces deux notions, trop souvent abordées séparément et non à travers cette relation qui
en fait pourtant le fondement ?
6 La théorisation de la conservation-restauration s’est élaborée, en Europe au cours de la seconde
moitié du XIXe siècle pour se finaliser au milieu du XXe siècle3.
7 Elle a ainsi été définie dans le contexte d’une conscience patrimoniale institutionnelle
se référant essentiellement aux «  beaux-arts  »4, construite sur des valeurs esthétiques ou
d’ancienneté, héritées de l’Europe des Lumières, non dénuées de hiérarchie, d’élitisme voire
d’un certain conservatisme.
8 Ce contexte se traduit ainsi institutionnellement et politiquement en France jusque dans les
années 1970, voire 1980.
9 Le musée d’art moderne inauguré à Paris en 1937 abrite une collection somme toute
assez classique dans sa conception et ses matériaux, et ne va guère s’ouvrir, en terme de
contemporanéité à des courants moins classiques –surréalisme, fluxus,… - avant la création
du centre Georges Pompidou dans les années 1970.
10 En 1958,  André Malraux n’intègre dans ce premier et nouveau ministère de la culture  que
les musées conservant des œuvres issues de la création de l’esprit, - musée du Louvre, musée
d’art moderne …-, laissant les musées relatifs au savoir-faire et à l’environnement humain, -
Palais de la Découverte, Musée de l’Homme – au sein du ministère de l’Education5.
11 Cette «  attention ministérielle  » au profit de la prédominance de l’art trouvera son point
d’orgue médiatique lors des grandes campagnes de rénovation muséale des années 1980 qui
vont majoritairement concerner les musées d’art « classique », terrain propice d’ailleurs pour
affirmer et conforter une politique de conservation-restauration mise en place en France avec
Gilberte Emile-Mâle et Madeleine Hours6.
12 Ainsi le lien entre « ce » patrimoine et « la » conservation-restauration était bien établi.
13 Cette relation était prédominante et ne suscitait guère de questionnement.

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Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) 3

La lente patrimonialisation du « non-esthétique »


14 Les autres domaines scientifiques ne bénéficiaient que peu d’un écho institutionnel et d’une
dimension patrimoniale équivalents.
15 Les objets, artefacts, spécimens conservés dans les musées relevant du ministère de
l’Education étaient surtout considérés comme des sujets d’études avant d’être des objets à
conserver pour transmission7.
16 Georges-Henri Rivière et le Musée des Arts et Traditions populaires d’ailleurs, dénommé
«  musée laboratoire  » incluant chercheurs et conservateurs, étaient assez isolés au sein
des musées nationaux relevant du ministère de la Culture. Son ancrage plus provincial
que parisien, puis le lent renfermement du musée confronté au désintérêt ministériel des
années 1980, ne vont pas conférer au musée des ATP un rôle d’institution pilote en
terme de conservation-restauration pour ce type de patrimoine8. L’éclosion des écomusées
et le développement des musées ethnographiques à partir des années 1975 en France
seront perçus comme un champ expérimental par les autorités nationales9, et comme des
expressions plus sociales que patrimoniales par les porteurs de projet. Le phénomène est
identique pour le patrimoine scientifique, technique et industriel dans une France alors en
reconversion économique. Là encore, les implications pour une pérennisation matérielle de
ce «  patrimoine  » dans une démarche de conservation-restauration n’étaient pas vraiment
soulevées. Nous étions plus souvent dans une démarche de transmission par sauvegarde que
par conservation10
17 Un constat similaire, bien que d’une autre nature, peut être porté sur l’art contemporain.
Lorsque celui-ci commence à s’imposer dans les politiques culturelles des années Lang, après
l’impulsion donnée par le Centre Pompidou, la question « art contemporain, patrimoine de
demain ? » ne se pose pas. Artistes et acteurs officiels se démarquent volontairement et assez
radicalement de cette mise en perspective à connotation passéiste, voire antinomique, d’où,
sauf à de rares exceptions, la création de nouvelles structures spécifiques hors du giron des
musées : centres d’art, fonds régionaux d’art contemporain. En regard, nombre de responsables
d’institutions muséales nationales se trouvent, comme pour les domaines de l’ethnographie et
des sciences, globalement assez démunis et ne revendiquent guère cette vision « patrimoine
de demain » pour un art, à leurs yeux, relativement éloigné de leurs collections habituelles.
18 Ainsi se dessine un nouveau paysage culturel en France dans les années 1980 avec des
domaines anciens, d’autres émergeant, développant leurs dynamiques propres, avec des
acteurs assez peu tentés par des dialogues et des rapprochements, chacun cherchant, pour
ces secteurs émergeants à affirmer sa spécificité face aux champs traditionnels forts de leurs
références pluriséculaires.
19 Ce paysage culturel va évoluer dans les deux décennies qui suivent en intégrant
progressivement dans la notion de patrimoine ces nouveaux domaines11.
20 Les collections d’art contemporain vont de fait se «  patrimonialiser  » et gagner le rang
d’oeuvres historiques de référence au même titre que l’art ancien. La nécessité de les
pérenniser par le biais d’interventions en conservation-restauration se pose, avec l’apparition
d’un nouvel acteur qu’est l’artiste12, dans cette relation patrimoine/conservation-restauration.
Ainsi se déroulera en 1992 à l’Ecole du Patrimoine le premier colloque français sur:
« Conservation et restauration des oeuvres d'art contemporain »13.
21 De nombreuses collections ethnographiques, scientifiques et techniques issues de la période
«  expérimentale  » fondée sur la mémoire et l’héritage socio-économique des années
1970-1980 vont, elles aussi, de par la disparition de la génération d’usagers et de savoir-faire,
prendre une dimension plus patrimoniale auprès des acteurs locaux et des administrations
culturelles14. Là aussi émergeront, mais dix ans plus tard, des questions de conservation-
restauration du patrimoine industriel avec le colloque organisé par la Direction des Musées de
France au Centre Historique Minier de Lewarde en 2002.

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Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) 4

22 Enfin, et c’est probablement le point le plus important, la notion de patrimoine a pris une
nouvelle dimension en écrivant d’une certaine manière un chapitre supplémentaire à l’ouvrage
de Jean Pierre Babelon et d’André Chastel15, que l’on pourrait intituler le « fait sociétal ».
La notion de patrimoine16 devient plus complexe avec non seulement son élargissement à
d’autres domaines que les arts «classiques », mais en intégrant des concepts jusqu’alors moins
abordés par les spécialistes, historiens, historiens d’art, scientifiques. Sa définition est somme
toute assez difficile à cerner mêlant mémoire et histoire, unique et multiple, création et savoir
faire, matérialité et immatérialité, intemporalité et quotidienneté, culture et société… dans une
démarche cherchant en quelque sorte à préserver ce que la mondialisation pourrait changer ou
menacer : un « tout patrimoine » à écho social au risque de banaliser cette notion17 jusqu’alors
réservée à des monuments et œuvres de référence. Cette évolution de « patrimoine » va aller
de pair avec un souci accru de sa conservation matérielle.

Changement de perspectives
23 Ce n’est pas tant l’élargissement en soi de la notion de patrimoine qui pose la question du lien
avec « conservation-restauration »18 que le fait que certaines composantes de ce « patrimoine
élargi » véhiculent d’autres valeurs que celles établies dans la relation traditionnelle fondée
sur un postulat artistique19 mis en place au milieu du XXe siècle et évoqué au début de l’article.
24 Dans le domaine des «  musées de société  », nombre d’objets ont des valeurs de sens,
d’usage, de fonction qui priment sur les valeurs d’esthétisme ou de passé d’ailleurs faiblement
présentes. L’objet est souvent plus éloquent par ce qu’il véhicule – et les registres peuvent
être multiples - que par ce qu’il est.
25 En art contemporain, le « message » de l’artiste peut s’affranchir du support. La pérennisation
de la matérialité de l’œuvre ne se pose pas forcément comme le point vital de sa transmission.
Les créations réalisées avec des supports technologiques industriels sont d’ailleurs vouées
à   dissocier contenu et support, problématique similaire aux objets techniques mentionnés
précédemment. L’évolution technologique ne permet pas de conserver matériellement l’œuvre
telle qu’elle fut à sa création, la retranscription sur d’autres supports peut même la dénaturer.
La nécessité de changer le support technique pour continuer à diffuser l’œuvre pose la question
de la conservation de tous ces supports intermédiaires qui, en tant que tels, ne représentent
qu’un maillon d’une évolution technique sans aucun lien avec la vie et le sens de l’œuvre
comme on pourrait le noter, par exemple, dans les phénomènes de repeint. Même la notion
d’histoire matérielle de l’œuvre peut prendre dans ce cas des distances avec celle dont nous
parlons communément. Cette matérialité de l’œuvre ne peut être qu’une contingence de
l’époque de sa création, l’artiste ayant utilisé les objets qui l’entourent. L’œuvre peut porter le
même message quelques années plus tard, sans être reproduite de la même façon. On pourrait
même aller à l’encontre de la volonté créatrice en conservant ou en restituant une matérialité
datée délivrant de fait une connotation temporelle non voulue par l’artiste.
26 D’autre part, l’affirmation depuis quelques années de la notion de patrimoine immatériel
et l’attention plus marquée aux patrimoines non-européens et à leurs relations avec leurs
populations 20 intègrent bien plus une dimension culturelle que simplement artistique
et matérielle. Ce nouveau regard doit nous interpeller. Dans les cultures occidentales,
l’approche patrimoniale est fondée sur une certaine distanciation voire sacralisation de
l’œuvre d’art,  «  sacralisation  » qui s’est transmise par la voie institutionnelle à tout objet
dit patrimonial21. Le lien sociétal et culturel est différent dans d’autres civilisations en Asie
ou en Afrique. Il pose d’ailleurs des questions particulières dans les pays où cohabitent
les populations indigènes et occidentales et suscite nécessairement une confrontation entre
l’objet, son usage et les modalités de sa transmission22. Comme pour la restauration de l’art
contemporain où est apparu l’artiste, à coté du binôme restaurateur – responsable de l’œuvre,
ne voit-on pas apparaître certains acteurs de la société  ? Comment confronter cette valeur

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Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) 5

sociétale à l’objet patrimonial sans qu’elle prenne une place prédominante, sans pour autant
être ignorée ? Peut-on continuer à concevoir une conservation-restauration de l’objet en tant
que tel, hors contexte muséal23 ?
27 Ces questionnements nous semblent aujourd’hui d’actualité car ils s’appuient sur deux points
importants :
• le patrimoine s’est enrichi de domaines dont les valeurs ne se limitent pas, voire sont
totalement étrangères, à l’esthétisme et aux critères propres à l’histoire de l’art.
• on ne peut plus concevoir le patrimoine et sa transmission dans le seul cercle des initiés24
et dans la seule perspective absolue d’une transmission matérielle.
28 Face à cela, se pose la question des réponses déontologiques, méthodologiques que peut
apporter la conservation-restauration. Peut-elle se fonder sur les mêmes principes édictés en
1963 ? Faut-il la redéfinir à la lumière de ces évolutions ?
29 Les réponses apportées à ce jour ne semblent pas être satisfaisantes et ne se sont pas imposées
par défaut de théorisation.
30 Elles ont assez souvent consisté à examiner les problématiques de ces «  nouveaux
patrimoines  » à l’aune de la théorie de la restauration de C. Brandi en écartant du débat
certaines valeurs fondamentales des objets – fonctionnement, usage…- et à ne retenir que la
pérennité matérielle, soit, dans certains cas extrêmes, à mettre en cause la patrimonialité de
l’objet qui de fait ne possédait guère les valeurs « brandiennes » d’esthétisme et d’histoire.
31 Elles ont pu aussi s’exprimer dans des démarches isolées, au cas par cas, au risque d’apporter
des réponses mêlant déontologie et pur pragmatisme, voire subjectivité du responsable du bien
patrimonial, à défaut d’avoir des référents ou des modèles.
32 L’un des points de débat réside déjà dans la pertinence du postulat de l’œuvre d’art avec sa
dimension esthétique et historique qui n’est pas forcément celui de l’objet patrimonial voire
de l’objet mémoriel identifié par Pierre Nora.
33 A ce jour et depuis plusieurs années, les mêmes questions se posent sans qu’une autorité ait
lancé ce chantier. Cette attitude dont nous avons essayé d’expliquer les racines, est difficile
à maintenir car si la notion de « patrimoine » était en évolution dans les années 80, elle est
aujourd’hui stabilisée et de nombreuses questions, certes isolées, se sont fait jour et demeurent.
34 Outre ces questionnements conceptuels, on ne peut non plus ignorer dans ces sources de
dilemmes, une dimension économique et financière. Certes elle concerne essentiellement
le patrimoine scientifique, technique et ethnographique mais elle peut entraîner des prises
de position dramatiques de décideurs face à un décalage trop important entre le coût des
interventions dans une application déontologique de la conservation-restauration et la valeur
de l’objet.
35 Il faut donc mettre en place ce chantier de réflexion, non par domaine comme on le constate
avec la floraison de colloques sur la conservation de l’art contemporain ou d’autres, plus rares,
sur le patrimoine technique, scientifique ou naturel, démarche héritée des années 1980, mais
bien à partir de concepts transversaux et mesurer leur application à l’aune des valeurs et des
caractéristiques de ces patrimoines.

Réévaluer la théorie ?
36 Cette absence de réponse, par défaut d’une théorie de la restauration fondée sur un postulat
plus large répondant à l’objet patrimonial et pas seulement artistique, se manifeste dans bien
des cas.
37 Cette carence apparaît nettement en France avec la loi sur les musées (2002)25. Cette dernière
comporte deux points importants et emblématiques dont les conséquences n’avaient pas
vraiment été mesurées par la communauté scientifique à l’époque. D’une part elle régit tous
les musées et tous les types de collections appartenant à ces musées de France, plaçant ainsi
sous cette appellation aussi bien les beaux-arts, les sciences et techniques, l’ethnographie

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Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) 6

européenne et extra-européenne, les sciences naturelles… D’autre part, les pratiques dans ces
« musées de France » dans le domaine de l’inventaire, de la conservation, restauration …sont
– doivent être – identiques.
38 De fait, elle met sur un pied d’égalité toutes ces collections qui avaient connu des sorts
différents depuis la séparation initiée par A. Malraux. Elle uniformise – dans le principe –
les pratiques en imposant d’une certaine manière celles en vigueur dans les musées « de la
culture » , donc principalement des Beaux-Arts.
39  Ce dispositif a soulevé de manière concrète une certaine inadaptation entre une pensée et une
réalité nouvelle, il a rendu perceptible, au cours des commissions régionales de restauration
instaurées par la loi26, ce dilemme, cette confrontation entre des cultures et des pratiques
différentes. Il a montré que les relations établies ou conçues pragmatiquement au sein de
chaque domaine dans les années passées s’avèrent aujourd’hui difficiles à harmoniser et
soulignent l’absence manifeste d’une démarche globale par rapport aux enjeux patrimoniaux
et artistiques actuels en matière de conservation-restauration.
40 La question ne nous paraît pas devoir se porter sur l’actualité et la modernité de la théorie
de la restauration, mais sur la capacité, à partir des acquis et des connaissances des acteurs
des différentes composantes patrimoniales, de proposer des démarches respectueuses de leurs
valeurs. Il ne s’agit ni d’ériger une statue du Commandeur, ni d’imposer une Nouvelle Vague,
mais d’envisager des principes, des méthodes, peut-être des concepts plus évolutifs afin
d’élaborer une pensée et des outils capables d’accompagner la patrimonialisation à la fois dans
sa dimension culturelle mais aussi sociétale.
41 Doit-elle être synthèse, doit-elle être multiple ? Patrimoine(s), Conservation-restauration(s) ?
42 Elle doit en tout cas établir cette liaison fondamentale et permettre la transmission de ce que
la société et les institutions auront considéré comme patrimonial, artistique ou non : un bien
humain ou naturel, avec les valeurs de ce qu’il est, de ce qu’il représente ou de ce qu’il signifie,
à donner en héritage aux générations futures.

Notes
1  Nous entendons tout au long de cet article le mot « patrimoine » dans sa dimension de témoin du passé
mais aussi de création actuelle en tant que patrimoine en devenir
2  L’ouvrage a été traduit et édité en français : Théorie de la restauration. Paris, INP/Monum, Editions
du patrimoine 2001/ réédition 2007
3  E. Mognetti, « Histoire de la restauration », Musée et Patrimoine, Paris 1991 pp.114-160,
4  Nous entendons par « beaux-arts » l’ensemble des productions humaines, aussi bien des antiques que
des tableaux du XIXe siècle
5  Cette scission qui a entraîné des développements et des missions très différentes entre les deux types
d’établissement n’a été abolie qu’en 2002 avec la loi sur les musées de France
6  Ainsi vient de se tenir à l‘Institut National du Patrimoine, un colloque en hommage à Gilberte-Emile
Mâle intitulé « 30 ans d’histoire de la restauration de la peinture »
7  Cette différence d’approche et de traitement est apparue nettement lors de la création du musée du
Quai Branly lors du constat (inventaire, état de conservation…) des collections du musée d’art africain et
océanien (ministère de la Culture) et celles du musée de l’Homme (ministère de l’Education nationale)
 en vue de leur regroupement dans un même établissement
8  Bien que la politique de conservation au musée des ATP ait été exemplaire, elle est restée somme
toute assez isolée
9  Jean Clair qualifiera les écomusées d’ « antimusée »
10  Nous utilisons le mot de « conservation » dans sa dimension actuelle à savoir une démarche, une
pratique, une politique raisonnée visant à connaître et à réduire les facteurs de risques susceptibles
d’entrainer la détérioration voire la disparition de l’objet, la sauvegarde étant d’abord une soustraction
de l’objet à un danger immédiat de destruction et de disparition sans qu’elle ait intégré nécessairement
une réflexion à plus long terme

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Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) 7

11  Un aperçu de cette évolution et des implications en terme de politique culturelle : Pour une histoire
des politiques du patrimoine sous la direction de Ph. Poirrier et L. Vadelorge, Paris, Documentation
française, 2003
12   Cette présence de l’artiste se veut d’abord culturelle et de «  bon aloi  » mais elle est également
juridique : cf Cornu M., Mallet-Poujol N, Droit, œuvres d’art et musées, CNRS, 2001, La restauration
et l’intégrité de l’œuvre, pp.156-169
13  Ecole nationale du Patrimoine, Paris, 1992
14  Musées de société, colloque d’Ungersheim, 1991
15  J.P. Babelon – A. Chastel, La notion de patrimoine, Liana Levi 2008 (réédition)
16  Les lieux de mémoire, paru sous la direction de Pierre Nora entre 1984 et 1993 marque cette période
et avance ce concept de lieu de mémoire où « l’histoire s’écrit désormais sous la pression des mémoires
collectives » et qui cherche à « compenser le déracinement historique du social et l’angoisse de l’avenir
par la valorisation du passé qui n’était pas jusque-là vécu comme tel » (P.Nora, La nouvelle histoire,
1978)
17  Ainsi introduit-on la notion de « petit patrimoine » ou de patrimoine de 3e type identifiant celui
qui ne bénéficie d’aucune protection au titre des Monuments historiques (classement ou inscription à
l‘inventaire supplémentaire définis dans la loi de 1913, cf. livre VI, Code du patrimoine, 2005).
18   La notion de patrimoine évolue depuis plusieurs siècles et s’est progressivement enrichie, cf. F.
Choay, L’allégorie du patrimoine, Paris 1992, Musées et patrimoine (ouvrage collectif, CNFPT, 1997,
2è édition), Histoire des musées et du patrimoine en France (R.May), pp.11-45
19  La notion d’ustensilita (ustensilité dans l’édition française) considérée par Cesare Brandi comme la
moins signifiante dans le cas d’une œuvre d’art où prédominent l’esthétisme et l’histoire, est justement
l’une des références de cet « autre » patrimoine
20   On peut bien entendu citer l’impact du musée du Quai Branly en France et des campagnes de
restauration (cf. Techné, 23, 2006), mais on peut aussi évoquer, bien que le contexte soit autre, la
problématique des objets indigènes conservés dans des collections muséales en Amérique du Nord et
du Sud par exemple
21  On peut  penser que la théorisation de la conservation-restauration a contribué à cette approche
22  Plusieurs communications lors de dernières rencontres de l’ICOM-CC (Lyon 1999, Rio 2002, La
Haye 2005 et New Dehli 2008) ont porté ou relaté de telles opérations en Inde, Afrique, Amérique du
Nord…
23  La notion de contexte « muséal » et « non muséal » nous paraît également importante car dans le
premier cas l’objet est intégré dans un milieu factice où il n’aura plus son entière fonctionnalité d’origine,
la différence est faible pour une œuvre d’art, elle est fondamentale pour une machine. Dans le second
cas l’objet conserve totalement ou partiellement sa fonction d’origine (objets de procession et de culte,
machine de démonstration…). La notion de « contextualisation » et de « décontextualisation » devrait
participer à la réflexion.
24  Ces questions sont plus avancées dans le domaine de l’architecture confronté plus que celui des
biens mobiliers à l’intégration dans l’environnement social : cf. les travaux réalisés dans le cadre de
l’Advanced Research Centre of Cultural Heritage Interdisciplinary Projects (ARCCHIP) : vol. I : Social
and economic integration of cultural heritage within cities , Prague 2004
25  Livre IV, Code du patrimoine, 2005
26  Art. L 452-1, code du patrimoine, 2005

Pour citer cet article


Référence électronique
Roland May, « Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) »,  CeROArt [En ligne], 4 | 2009, mis en
ligne le 14 octobre 2009. URL : http://ceroart.revues.org/index1235.html

Roland May
Roland May, historien et archéologue de l’Antiquité, est conservateur en chef et directeur du CICRP
(Centre interrégional de conservation-restauration du patrimoine). Chargé de cours à l'Ecole du Louvre
(conservation préventive 2000-2006), à l'Université de Saint-Etienne (Histoire et administration des

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Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) 8

musées en France), à l'Université de Paris I (conservation et gestion des collections), il coordonne


régulièrement des séminaires de formation continue à L’INP ainsi qu’à l’étranger (Chine, Indonésie).
Roland May est membre de la commission Collection du Conservatoire National des Arts et Métiers,
ainsi que du comité européen de normalisation des biens culturels.

Droits d'auteur
© Tous droits réservés

Résumé / Abstract

 
L'évolution et l'élargissement de la notion de "patrimoine" à des domaines tel que l'art
contemporain, les sciences et techniques, l'ethnographie, depuis ces vingt cinq dernières
années  .... posent la question des relations avec la conservation-restauration dont les bases
ont été définies dans les années 1960 autour d'une notion patrimoniale centrée essentiellement
sur l'œuvre d'art et l'esthétisme. Face à l'affirmation d'autres valeurs et enjeux, ne faudrait-il
pas s'interroger sur leur place et leur intégration dans un processus qui permette de maintenir
le lien étroit et nécessaire entre conservation-restauration et pérennisation des biens culturels,
dans le respect des valeurs anciennes et nouvelles.
Mots clés :  patrimoine, musée, concept, théorie

 
Evolution and expansion of a cultural heritage concept applied to fields such as contemporary
art and, sciences, technology, ethnography...over the last twenty five years, raises questions
about its relationship with conservation, the bases of which were defined in the sixty's, then
essentially focused on artwork and aestheticism.
With respect to other values and stakes, messages, functions, use, isn't it the opportunity to
assess the suitability of these notions and, to some extent, their integration in a process which
preserves the narrow and compulsory link between conservation and the durability of cultural
heritage with respect to both ancient and new values?
Keywords :  concept, theory, heritage, museum

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