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La laïcité en France est un principe qui distingue le pouvoir politique des organisations
religieuses — l’État devant rester neutre — et garantit la liberté de culte (les
manifestations religieuses devant respecter l’ordre public) ; il affirme parallèlement la
liberté de conscience et ne place aucune opinion au-dessus des autres (religion, athéisme,
agnosticisme ou libre-pensée), construisant ainsi l’égalité républicaine.
La création d’une école publique et laïque au XIX siècle est une étape essentielle de la
laïcité en France. Elle passe par le monopole public de la collation des diplômes
universitaires, sur critères non-religieux donc, depuis la loi du 18 mars 1880. L’école est
aujourd’hui encore le lieu où la laïcité est façonnée et mise à l’épreuve ; à la fois
laboratoire et lieu d’exercice de la laïcité, elle révèle les tensions, les paradoxes et les
réussites de l’idéal républicain.
Enseignement public
L’école publique gratuite et laïque est un service que l’État français met à disposition de
ses citoyens, quelles que soient leurs convictions ou leurs croyances ; ce principe garantit
le droit d’accès de chacun à l’éducation.
Sous diverses appellations (affaire du voile, du voile islamique, du foulard, etc.), un débat
portant sur la question du port du voile islamique dans les écoles est né en France au
milieu des années 1990.
Les partisans du port du voile — certains musulmans ainsi que des défenseurs des libertés
individuelles — invoquent à travers la laïcité la liberté de conscience, principe de la
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. Ceux qui prônent la
neutralité de la tenue des élèves en appellent eux aussi à la laïcité, voyant en elle le
caractères de neutralité et d’égalité indispensables selon eux à l’éducation :
« Il faut que les élèves aient le plaisir d’oublier leur communauté d’origine et de penser à
autre chose que ce qu’ils sont pour pouvoir penser par eux-mêmes. Si l’on veut que les
professeurs puissent les y aider, et l’école rester ce qu’elle est — un lieu d’émancipation
—, les appartenances ne doivent pas faire la loi à l’école. »
— Élisabeth Badinter, Régis Debray, Alain Finkielkraut, Élisabeth de Fontenay,
Catherine Kintzler — Le Nouvel Observateur — 2-8 novembre 1989
Ce débat s’est finalement conclu par le vote d’une loi le 15 mars 2004 qui interdit les
signes « manifestant ostensiblement une appartenance religieuse », dans les
établissements d’enseignement primaire et secondaire. Cette loi ne s’applique qu’aux
établissements publics et ne concerne pas les établissements privés, qui sont libres
d’autoriser le port de signes religieux ostentatoires, pouvant donner ainsi l’impression,
selon la Fédération des conseils de parents d’élèves, d’« une laïcité à deux vitesses ».
« Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par
lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. Le
règlement intérieur rappelle que la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire est
précédée d’un dialogue avec l’élève. »
La loi française est reconnue par la Cour européenne des droits de l'homme, qui affirme
dans un arrêt de décembre 2008 : « La laïcité est un principe constitutionnel, fondateur de
la République, auquel l'ensemble de la population adhère et dont la défense paraît
primordiale, notamment à l'école. »
La Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (la Halde) a été
saisie par un parent d’élève appartenant à la communauté sikhe d’une réclamation
relative à l’exclusion de son enfant d’un lycée, au motif qu’il porte un turban ou un sous-
turban. La Halde rappelle dans sa délibération que selon le Conseil d’État, le port d’un
sous-turban sikh ne peut être qualifié de signe discret et que le port de ce signe est
contraire aux dispositions de l’article L. 145-5-1 du Code de l’éducation. En
conséquence, le collège de la Haute autorité a constaté l’absence d’éléments permettant
d’établir l’existence d’une discrimination à l’encontre de cet élève.
Les parents d’élèves, en tant qu’usagers d’un service public, sont libres quant à eux
d’arborer la tenue qu’ils souhaitent dans l’enceinte de l’établissement (lorsqu’ils viennent
chercher leur enfant par exemple), dans les limites inhérentes au bon fonctionnement du
service public, et à condition de ne pas troubler l’ordre public.
On a voulu étendre la règle qui s’applique aux personnels de l’enseignement public aux
parents ayant une mission bénévole ponctuelle dans le cadre scolaire ; la frontière est
encore floue. En novembre 2006, en réponse à une question orale de la sénatrice Alima
Boumediene-Thiery, au sujet de discriminations de la part de représentants de l’État
envers des mères d’élèves voilées, Christian Estrosi, ministre délégué à l’Aménagement
du territoire, a répondu :
« Il semble que le parent encadrant une activité périscolaire, placé sous la responsabilité
de l’enseignant en charge de la classe, est assimilé à un collaborateur occasionnel du
service public, ce qui l’oblige au respect du principe de neutralité que doit observer tout
agent public dans le cadre de ses fonctions. »
La Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques affirme de son côté
que « le ministère a toujours confirmé que la loi n’est applicable qu’aux élèves des
établissements publics ».
Cette position a provoqué en décembre 2007 une réaction de la part d’un collectif (Licra,
Ni putes ni soumises, SOS Racisme, Grand Orient de France, Comité laïcité République,
Union des familles laïques…) dans une tribune publiée par Libération :
Pour Jean Boussinescq, de l’Union rationaliste, il faut préciser la façon dont la laïcité est
présentée dans la formation des maîtres. Selon lui, la laïcité recouvre trois ensembles : les
institutions, c’est-à-dire le cadre général dans lequel toutes les spiritualités, religieuses ou
non, peuvent s’inscrire ; les philosophies et idéologies laïques — lors de la première
affaire du foulard en 1989, deux philosophies laïques s’opposaient, une troisième
émanant du Conseil d’État — ; une mentalité diffuse laïque, autour de la notion de
« laïcité implicite ». Il fait en outre une mise en garde sur « des dérives possibles », telles
que la diffusion précipitée de fascicules scolaires « dans lesquels l’enseignement du fait
religieux verse dans un enseignement religieux ».
La place de l’étude du fait religieux dans les programmes scolaires (de la classe de
sixième à la classe de troisième) est donc matière à débats : certains courants laïques
craignent la réintroduction de l’enseignement religieux par ce biais tandis que d’aucuns
parmi les cléricaux regrettent que ce n’en soit pas un.
Plusieurs questions se posent aux enseignants : Comment ne pas déconsidérer les enfants
qui n’ont pas de religion, quand le programme porte essentiellement sur les
monothéismes ? Comment rester absolument neutre et ne pas faire passer ses propres
convictions (même inconsciemment) dans son exposé ? Comment éviter les dérives
communautaristes lors des cours ? Faut-il faire lire les textes d’une religion par celui ou
celle qui y adhère ?
Du côté des élèves, les appréciations semblent positives, même si la laïcité est plutôt
comprise comme une tolérance de la diversité religieuse. Pour Jean-Paul Willaime,
directeur de l’Institut européen en sciences des religions, cette « perception positive du
fait religieux doit être relativisée. Car seulement un tiers des élèves considèrent que la
religion est un thème important. »
Pour la Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques : « Il est […]
paradoxal [au regard des valeurs républicaines et laïques] de ne pas supprimer les
aumôneries dans les collèges et lycées qui sont une atteinte objective à la laïcité de
l’école et une manifestation avérée de prosélytisme. »
Fêtes religieuses ne figurant pas au calendrier scolaire
Les fêtes religieuses prévues par le calendrier scolaire sont le reflet de la tradition
historique catholique en France. La proposition de la commission Stasi d’ajouter à la liste
des jours fériés Yom Kippour et l’Aïd el-Kebir n’a pas été retenue, mais la possibilité
d’accorder de façon ponctuelle des autorisations d’absence est admise. Les textes
précisent que ces autorisations peuvent être accordées « aux élèves pour les grandes fêtes
religieuses qui ne coïncident pas avec un jour de congé et dont les dates sont rappelées
chaque année par une instruction publiée au Bulletin officiel ».
Cantines scolaires
En octobre 2007, la ville de Lyon annonce vouloir proposer des menus avec ou sans
viande aux enfants fréquentant les cantines scolaires, à compter de la rentrée 2008. Cette
« solution » a été trouvée pour satisfaire les parents musulmans dont les enfants suivent
des prescriptions alimentaires religieuses, ainsi que ceux qui s’opposent à la viande halal
dans les cantines, au nom de la laïcité.
Le directeur de SOS Racisme Rhône a accueilli cette décision comme « une victoire de la
laïcité sur la religion ». Pour le magazine Marianne, « c’est une question de point de
vue ».
Enseignement privé
Le statut de l’enseignement privé (majoritairement assuré par des établissements liés à
l’Église catholique) et notamment son financement par l’impôt, reste un sujet sensible.
Jusqu’à une époque récente, ce sujet a été l’objet de vifs débats entre les tenants du
monopole de l’enseignement public et les défenseurs de l’école libre , qui considèrent la
liberté d’enseignement comme une conséquence naturelle des libertés de conscience,
d’expression et d’association.
En 1951, sous la pression de l’Association des parents d’élèves de l’école libre (Apell),
les lois Marie et Barangé sont votées. La première, préparée par le ministre André Marie,
veut permettre à l’enseignement privé de bénéficier des bourses du secondaire. La
seconde loi, qui porte le nom de son premier signataire, Charles Barangé, souhaite
attribuer aux familles dont un enfant est scolarisé dans une école primaire privée une
indemnité de 3 000 francs par enfant et par an. Nombreux sont ceux qui voient dans ces
textes un coup porté à l’école gratuite et laïque.
Créationnisme à l’école
La question de l’enseignement du créationnisme ne semble pas se poser en France
(contrairement à la Serbie, à l'Italie, à l'Allemagne ou aux Pays-Bas, par exemple).
En février 2007, un ouvrage appelé l’Atlas de la création, est diffusé à des milliers
d’exemplaires auprès d’établissements scolaires et universitaires, ainsi qu’à des centres
de documentation pédagogique. La conclusion de ce volumineux ouvrage très illustré est
édifiante : « la création est un fait » et « l’évolution une imposture ». Son auteur, Adnan
Oktar (ou Harun Yahya), est une des figures centrales du créationnisme en Turquie. Le
ministère de l’Éducation nationale a immédiatement demandé le retrait de cet ouvrage
des établissements scolaires, « car aucune des qualités de rigueur exigées pour
l’enseignement n’était présente dans ce livre ».
Alsace-Moselle
Le statut scolaire local est régulièrement stigmatisé comme une aberration au regard des
principes de laïcité. La règle de l’égalité entre les élèves est contrariée, ce statut étant
facteur de discrimination pour les non-croyants et pour les élèves se référant à une autre
religion que les quatre cultes reconnus (catholique, protestant réformé, protestant
luthérien, israélite). De surcroît, les parents doivent faire une déclaration écrite de leur
appartenance ou non à l’un des quatre cultes, ce qui va manifestement à l’encontre du
principe constitutionnel de laïcité.
En 2003, la commission Stasi, sans revenir sur l’exception locale, propose des
aménagements :
Le rapport Stasi peut, sur ce point, être qualifié d’« ambivalent » : la dérogation dont
bénéficie l’Alsace-Moselle est considérée par Les Verts, par exemple, comme une
ambiguïté, quand Xavier Ternisien regrette qu’elle ne soit pas étendue à d’autres
religions.
Wallis-et-Futuna