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Député-maire de Coulommiers,
Coprésident du Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des médias
Emmanuel HAMELIN
Conseiller municipal de Lyon,
Fondateur et Coprésident du Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des médias
La stratégie européenne
en matière de propriété intellectuelle
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Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des medias
« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011
Emmanuel HAMELIN, Coprésident du Club parlementaire sur l’avenir
de l’audiovisuel et des medias
Je m’associe bien évidemment aux remerciements formulés par Franck
RIESTER pour la présence de chacun. Je me réjouis plus particulièrement de
l’amitié que nous manifeste Michel BARNIER en participant pour la deuxième fois
à nos travaux. Certains d’entre vous ont pu participer à un dîner-débat consacré à
l’audiovisuel extérieur de la France, sous la présidence d’honneur de
Michel BARNIER. Nous nous intéresserons aujourd’hui à la stratégie européenne
en matière de propriété industrielle.
Bien évidemment, nous n’aborderons pas la question du rapport devant normalement être
rendu public le 5 mai prochain. Nous évoquerons en revanche un certain nombre de questions relatives
à la propriété intellectuelle. Cette dernière est l’un des socles soutenant la création intellectuelle en
Europe. Il s’agit donc d’une question importante.
Je demanderai aux participants de bien vouloir faire preuve de concision dans leurs
interventions, afin que nous puissions respecter notre contrainte horaire. Je laisse tout de suite la
parole à Michel BARNIER. Vous pourrez dans un second temps lui adresser vos questions.
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Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des medias
« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011
pas placée sous le signe de la mélancolie ou de la nostalgie. Il s’agira plutôt d’un anniversaire
dynamique, favorable à la croissance dont nous avons besoin.
J’en reviens à l’un des leviers que nous avons identifiés : la propriété intellectuelle. Il en est
d’autres, comme la mobilité, l’encadrement réglementaire des PME, la fiscalité ou les services. J’en
profite pour préciser que ma responsabilité de Commissaire européen porte sur l’ensemble des
services, soit davantage que les seuls services d’intérêt général ou les services publics. Ressort
notamment de mes attributions l’ancienne directive « BOLKESTEIN », devenue directive services. Ce
texte recouvre une grande part de vos activités et concerne globalement 40% de l’économie
européenne.
J’ai élaboré le plan d’action pour le marché intérieur animé par un certain nombre de
convictions. Ces convictions s’illustreront dans l’application que nous en ferons en matière de
propriété intellectuelle.
La première de ces convictions tient en un constat : le monde ne nous attend pas. La question
est donc de savoir si, dans ce monde composé notamment de grands pays dits « émergents », les
Européens souhaitent être spectateurs ou acteurs. Le positionnement en tant qu’acteur, qui a mon
suffrage, devra profiter du premier point d’appui qu’est le grand marché. J’étais il y a peu à Pékin. J’ai
pu y constater, comme aux Etats-Unis antérieurement, que la politique étrangère ou la défense
européenne, deux éléments en construction, suscitent moins le dialogue et le respect que le marché
européen. Ce marché regroupe 500 millions de consommateurs au pouvoir d’achat élevé et 22 millions
d’entreprises.
Ma deuxième conviction est que
nous ne sortirons pas de la crise économique
et financière qui nous éprouve depuis quatre
ans comme nous y sommes entrés. Je suis
convaincu que la croissance avec laquelle
nous devons renouer doit être différente.
Nous devrons faire une meilleure place aux
exigences liées à l’écologie et à une bonne
utilisation des ressources naturelles.
Ma troisième conviction est que l’Europe et le grand marché qu’elle représente doivent
participer aux échanges mondiaux et non se résoudre à n’être qu’une terre de consommation. Je
précise que Français, Allemands, Anglais ou Italiens exportent 60% de leurs produits ou services au
sein du grand marché européen. Les exportations extérieures ne représentent que 40% du total.
Comme je l’ai dit au Président BARROSO lors de ma nomination, je me battrai pour que l’Europe soit
une puissance politique en appui sur une capacité continentale de production. Cela vaut pour les
industries culturelles représentées ici aujourd’hui.
Une quatrième conviction est qu’il n’est pas de croissance possible sans ce grand marché.
Celui-ci doit assurer la cohésion sociale en son sein et faire preuve d’innovation.
La cinquième et dernière conviction qui m’anime est que la bataille de la compétitivité et de la
croissance ne pourra nous voir victorieux qu’à condition que nous regardions chaque citoyen, chaque
entreprise et chaque territoire comme nécessaires.
Ces convictions, simples mais fortes, sont celles qui ont présidé à nos travaux. Le marché
intérieur constitue la plateforme de l’économie européenne. Si celle-ci fonctionnait convenablement,
ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, l’ensemble des initiatives privées ou publiques, locales, nationales
ou européennes seraient fructueuses.
Je mobiliserai un exemple tiré de notre future stratégie en matière de propriété intellectuelle :
le brevet. J’ai proposé, au titre de l’un des leviers que j’évoquais précédemment, de débloquer la
question du titre unique du brevet européen. Cela fait maintenant 35 ans que nous attendons de
pouvoir disposer d’un système permettant de protéger l’innovation globalement, à l’échelle
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Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des medias
« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
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européenne. Une avancée est imminente sur ce point, notamment grâce au traité de Lisbonne qui
permet des coopérations renforcées. Celle que j’évoque regroupe 25 Etats membres sur 27.
J’en viens à l’état d’esprit qui a présidé à nos travaux relatifs à la propriété intellectuelle. Une
communication de la Commission interviendra au mois de mai. Nous avons déjà mené un débat
d’orientation interne sur ce sujet voilà quelques jours. Une fois cette stratégie adoptée, ce qui n’est pas
encore le cas, nous la déclinerons par des textes spécifiques qui suivront le cours normal de la
procédure législative européenne. Je tiens à saluer les parlementaires nationaux ici présents et les
assure que ma porte leur est autant ouverte que celle de ma collègue Nelly KROES. C’est ainsi que
nous pourrons user de leurs propositions pour améliorer les futurs textes.
La thématique de la propriété intellectuelle recouvre un grand nombre de domaines, qu’il
s’agisse notamment d’activités artistiques, commerciales ou industrielles. J’ai mentionné les brevets,
mais d’autres aspects sont concernés. Je pense aux trademarks, aux appellations géographiques ou
d’origine contrôlée, aux droits d’auteur ainsi qu’à leurs droits voisins, qui intéressent les artistes, les
musiciens et les producteurs de films. La question de la propriété intellectuelle ne concerne pas
seulement la définition de ces droits. Elle interroge également les conditions dans lesquelles nous
pouvons assurer leur respect. Ce champ très vaste repose sur le principe de l’exclusivité. L’exclusivité
du droit d’auteur ne doit cependant pas empêcher de trouver un équilibre avec le droit de l’information
ou la liberté d’expression.
Dans la préparation de cette stratégie, j’ai conçu les futures révisions législatives comme un
outil de gouvernance pour atteindre deux objectifs principaux et non contradictoires : celui d’assurer
une rémunération correcte aux auteurs et créateurs, et celui de favoriser la circulation la plus large
possible des contenus. Cet outil se situe donc au cœur du triangle de la connaissance qui lie les
créateurs, les utilisateurs et les consommateurs.
Pourquoi est-il nécessaire de refondre le cadre réglementaire de la propriété intellectuelle en
Europe ? Nous le devons parce que celui-ci, à l’ère du numérique, fait l’objet d’interpellations
multiples.
L’époque que nous vivons est d’abord caractérisée par l’imperfection des transactions. Il est
très difficile de faire valoir les droits musicaux sur internet sur une base multiterritoriale.
Nous devons ensuite composer avec des handicaps. Je citais tout à l’heure la question du
brevet. La protection d’une innovation industrielle coûte à ce jour dix fois plus cher en Europe qu’aux
Etats-Unis. Beaucoup de PME ne se protègent que dans un faible nombre de pays membres. Des
contrefaçons fabriquées dans d’autres pays peuvent ainsi ensuite circuler librement sur l’ensemble du
marché.
La circulation de l’information constitue un autre défi. L’accès aux biens
culturels est imparfait et fragmenté. Ainsi iTunes n’est-il pas accessible en Pologne
à ce jour.
La progression des saisies de contrefaçons aux douanes européennes, de
près de 1.000% entre 1999 et 2009, montre qu’il s’agit-là, avec le piratage, d’un
défi à part entière.
Nous entendons donc rénover le cadre européen de la propriété
intellectuelle pour adopter une législation qui facilite davantage qu’elle ne
contraint. Elle devra non seulement protéger et permettre une rémunération satisfaisante des créateurs,
mais aussi inciter les utilisateurs à développer des modèles commerciaux innovants et à créer des
emplois. La demande de contenus et de produits innovants devra bien évidemment dans le même
temps être encouragée.
Nous avons l’objectif, concernant les droits d’auteurs, de créer un cercle vertueux. La
diffusion et les revenus générés devraient augmenter en même temps que la protection s’améliorera. Il
conviendra à cette fin de moderniser la gestion collective des droits d’auteur en Europe. Je proposerai
dans cette perspective de créer une licence multiterritoriale pour encourager l’utilisation des droits sur
plusieurs territoires.
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Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des medias
« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
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L’intérêt de ce Club est de permettre de confronter différents points de vue. C’est peu de dire
que l’ère numérique a rebattu les cartes. Un grand nombre de medias convergent vers les contenus
digitaux. Internet bouscule beaucoup d’habitudes en rendant techniquement tout accessible à tous et
partout. Cette situation interpelle juridiquement la situation de celui qui possède et de celui qui crée.
Nous avons identifié cinq grandes tendances de convergence qui bouleversent l’économie de
la commercialisation de contenus. Les sociétés commercialisant du hardware vendent leurs produits
avec un accès aux contenus. Les acteurs de la grande distribution souhaitent pouvoir commercialiser
des contenus digitaux sur des supports virtuels. Les broadcasters entendent proposer des contenus
digitaux en différé à leurs spectateurs. Les opérateurs de télécommunication, comme BRITISH
TELECOM, aspirent également à rentabiliser de cette manière leurs investissements dans les réseaux.
Enfin, les plateformes et les moteurs de recherche comme GOOGLE entendent également proposer
des contenus. Ces cinq tendances laissent de côté un autre phénomène, l’apparition des agents
digitaux.
J’évoquerai, avant de conclure, un autre point intéressant cette stratégie : le piratage et la
contrefaçon. Il s’agit d’une des grandes faiblesses de l’Europe à l’heure actuelle. La stratégie
distinguera ce qui est lié en la matière à l’utilisation d’internet de ce qui ne l’est pas. J’ai mentionné
tout à l’heure l’augmentation massive des saisies en douanes. Nous pensons que la contrefaçon fait
perdre 2,5 millions d’emplois aux pays du G20. Les dangers que représentent les produits contrefaits
et notamment les médicaments sont connus. Ceux-ci posent également question en matière de sécurité.
Les conséquences sont non moins réelles en matière de diversité culturelle et de perte de revenus
fiscaux.
Nous avons donc décidé de consacrer un chapitre au sein de cette stratégie à la lutte contre le
piratage et la contrefaçon, le tout en nous gardant de criminaliser l’utilisateur. Je m’appuierai dans
cette perspective sur l’augmentation des moyens de l’Observatoire européen de la lutte contre le
piratage et la contrefaçon que je vais proposer. Cet Observatoire s’appuiera sur les moyens rendus
disponibles par l’intermédiaire de l’Office des marques d’Alicante.
J’en terminerai en évoquant rapidement les différents chapitres de cette
stratégie. Je précise que cette stratégie, comme le fait le Single Market Act et
comme je le fais en matière de régulation du marché des banques et des assurances,
s’emploie à aborder ensemble les sujets qui font cohérence. C’est seulement ainsi
que la matière produite à Bruxelles peut faire sens aux yeux des citoyens et des
entreprises.
Cette stratégie comprendra un premier chapitre consacré au brevet
européen. Il contiendra deux propositions de règlement que je dévoilerai dès
demain, en même temps que le Single Market Act. Ces textes permettront de mettre en œuvre la
coopération renforcée entre les 25 pays candidats. Nous parviendrons probablement à un vote au
Parlement et au Conseil des Ministres. Marie-Thérèse SANCHEZ-SCHMID et Marielle GALLO
veilleront, je n’en doute pas, à ce que le processus se déroule convenablement. Nous pourrons ainsi, je
l’espère, dépasser le blocage qui caractérise depuis 35 ans la question du brevet européen. Nous
ouvrirons ce premier chapitre dès demain, symboliquement en même temps que le cadre général de
relance du marché intérieur.
Le deuxième chapitre sera relatif à une directive sur les œuvres orphelines.
Le troisième chapitre concernera la gestion collective des droits d’auteur. Une proposition
pour faciliter les licences multiterritoriales.
Le quatrième chapitre s’attachera à réviser la politique des marques commerciales. Le système
fonctionne convenablement, mais nous souhaitons le faire vivre avec son temps, qui est celui
d’internet. Une proposition en cours d’examen entend modifier le régime de protection des marques de
produits autres qu’agroalimentaires. Cette protection, qu’elle concerne des produits comme les
couteaux, la verrerie, les dentelles ou d’autres produits traditionnels, est très disparate. A ces
productions correspondent un grand nombre d’emplois. Cette politique d’indication géographique et
d’appellation d’origine contrôlée, qui intéresse d’abord les produits agroalimentaires, commence à
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faire des émules chez ceux qui y étaient initialement opposés dans le cadre des négociations à l’OMC.
Aujourd’hui, la Chine, l’Amérique latine et même les Etats-Unis s’intéressent à cet outil.
Cette stratégie devra également aborder un sujet jusqu’à présent mal traité au niveau européen,
celui du secret industriel.
Enfin figureront dans cette stratégie la lutte contre le piratage et la contrefaçon.
Voilà ce que je peux vous dire aujourd’hui sans porter atteinte au principe de collégialité qui
prévaut au sein de la Commission. Chacun de mes collègues peut en effet donner son avis sur mes
actes, tout comme je peux me prononcer sur les actes de chacun d’entre eux. Nous devons donc
parvenir à un accord général avant de procéder à une présentation détaillée du contenu de cette
stratégie.
Je le répète, cette stratégie participe des douze leviers de modernisation du marché intérieur
que nous présenterons demain. Il s’agit d’un point important. Je pense en effet que l’avantage
compétitif que nous conservons pour l’heure est fragile. Certains pays émergents progressent
beaucoup plus vite que nous. Je pense notamment à la Chine, caractérisée par des taux de croissance
de 10% et plus. Nous ne conserverons notre avantage que si nous parvenons à concilier les objectifs de
protection de la propriété de ceux qui créent dans tous les domaines et de diffusion la plus large
possible des créations. Cette diffusion est importante d’un point de vue économique, mais elle est
également un déterminant de la diversité culturelle.
Je vous remercie de votre attention.
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Jack RALITE, sénateur de Seine-Saint-Denis
Je souhaite exprimer mon ressenti sur les
développements européens qui intéressent le droit d’auteur.
Toutes les questions abordées par Michel BARNIER au fil de
son exposé m’intéressent, notamment celles relatives à
l’industrie et non à la financiarisation. Mais la question du
droit d’auteur m’apparaît centrale.
Une discussion est actuellement en cours en France
sur le prix unique du livre. Une différence de rédaction oppose l’Assemblée nationale et le Sénat. Les
institutions européennes ont adressé une remarque au gouvernement, puis au Sénat, dans les mêmes
termes. La question est donc plus profonde que ne le suggèrent les échanges autour de l’amendement
proposé par Monsieur GAYMARD ou autour de la position du Sénat. Je pense personnellement que
les deux rapports que je mentionne, qui portent sur deux sujets différents, présentent un contenu
identique. Je m’interroge en conséquence. Le prix unique du livre n’est-il pas remis en cause dans le
silence des délibérations européennes ?
Je relève ensuite que les réunions bilatérales qui se sont tenues aux Caraïbes, en Corée, au
Canada ou en Inde l’ont été sous le pilotage des instances en charge du commerce. La culture est ainsi
traitée comme un objet possible de marchandage à l’intérieur des délibérations commerciales. La copie
d’une lettre de l’Europe à une grande société française m’a été transmise. Cette lettre affirme que la
culture ne sera pas délaissée. Il reste pourtant que l’ouverture de chaque nouvelle discussion bilatérale
voit les discussions reprendre à leur point de départ. Comment envisagez-vous de procéder pour
redonner à la culture son autonomie ? La convention sur la diversité culturelle proposait de l’assurer.
A quelle échéance peut-on espérer que cette autonomie sera restaurée ? Il est éprouvant de voir la
culture et la création être traitées comme le parent pauvre des négociations.
Une troisième interrogation concerne la convention sur la diversité des expressions culturelles.
L’article 20 de ce texte énonce me semble-t-il une chose et son contraire. Les parties peuvent tout
aussi bien se prévaloir des dispositions de l’OMC que les ignorer. Cette situation fait peser un danger
sur la création et le droit d’auteur. Un haut fonctionnaire auprès de la Commissaire à la culture a
d’ailleurs récemment affirmé à une délégation de la coalition pour la culture qu’il était urgent de
modifier le régime de la propriété intellectuelle.
Je me permettrai ici de citer Bernard NOEL : « L’immatériel est l’envers du spirituel, comme
l’information est l’envers de l’œuvre de l’esprit. Leur utilité les épuise alors que l’inutilité des œuvres
sans cesse en recharge le sens ». Frédéric MITTERRAND, citant GRACQ, a pour sa part déclaré à
l’Assemblée nationale que le fait de légiférer sur la littérature imposait par courtoisie et prudence de
dire aux œuvres : « après vous ». La logique prévalant aujourd’hui au niveau européen est pourtant
exactement contraire. Il s’agit d’une véritable question de société, qui participe de « l’inaccompli qui
bourdonne d’essentiel », comme le disait René CHAR.
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Je reviendrai sur la question de
l’exclusivité des droits. Vous l’avez évoquée. Elle
n’apparaît pourtant pas dans les différents axes que
vous avez développés. La structure de production
en matière cinématographique et audiovisuelle est
fondée sur la territorialité des droits contractuels
cédés aux préfinanceurs que sont notamment les
chaînes de télévision. Je souhaiterais connaître,
Monsieur BARNIER, votre position sur ce thème
de la territorialité des droits, mis en question
notamment devant la Cour de justice de l’Union européenne par l’affaire Première Ligue. Cette affaire
qui concerne plus particulièrement le football pourrait avoir des répercussions en matière de droit
d’auteur. Il nous paraît nécessaire de préserver des jurisprudences comme Coditel qui posent le
principe de chronologie des medias. Sans cette jurisprudence, production et distribution indépendantes
disparaîtraient purement et simplement.
La territorialité des droits, la capacité des producteurs à concéder territorialement des
exclusivités à des opérateurs économiques nationaux qui financent les œuvres sont autant d’éléments
vitaux pour la production. La question des licences et du marché se pose seulement ensuite. Sans outil
de soutien à la production, il ne saurait y avoir de marché unique puisqu’il n’y aurait tout simplement
pas d’œuvre européenne. Nous avons donc besoin de votre appui en faveur du principe de droits
contractuels et d’exclusivité territoriale dans un contexte où la majorité des œuvres fait l’objet d’une
coproduction européenne.
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« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
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elle à ses spécificités sa position de second producteur mondial de films occidentaux. Nous nous
sommes battus pour cela. L’HADOPI compte au nombre des victoires que nous avons remportées. Il
importe de ne pas banaliser certains comportements comme le téléchargement illicite. La pédagogie
doit savoir s’appuyer sur des sanctions. Nous en avons tous fait l’expérience en étant amenés par la
menace d’une répression automatique à respecter les limitations de vitesse sur les routes.
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droits d’auteur. Nous tenons compte, dans nos réflexions sur l’évolution du droit européen, de celle de
la jurisprudence américaine. Je le répète, notre proposition sur les œuvres orphelines est en cours de
finalisation.
Je sais, Monsieur RALITE, que Bruxelles n’est pas votre destination favorite. Je vous
encourage pourtant à prendre le temps de vous y déplacer. Nous vous y montrerons qu’il n’y est aucun
bureau secret. Vous y trouverez uniquement des fonctionnaires de qualité et indépendants d’esprit. Il
importe que vous les aidiez à sortir de leur tour d’ivoire en venant exprimer vos convictions
directement auprès d’eux.
Je suis de très près le débat parlementaire sur le prix unique du livre. Je pense que la
loi LANG est une bonne loi. Nous observons une accélération de la diffusion du livre numérique.
Vous l’avez dit, Monsieur RALITE, cette question a fait l’objet de deux avis circonstanciés de la
Commission. Cette dernière vérifie en la matière qu’il n’existe pas de limitation à la liberté
d’établissement et de prestation de services. J’ai dit voilà quelques jours au ministre de la Culture que
la France doit démontrer précisément en quoi le prix unique est nécessaire à la préservation de la
diversité culturelle. Bruxelles croit ici déceler un objectif différent de celui de la protection
économique d’un secteur traditionnel. Je vous le dis très honnêtement, la clause d’extraterritorialité
peinera à être acceptée à Bruxelles. Je serai seulement l’un de ceux qui devront se prononcer sur cette
question.
Messieurs GOLDSMITH et SEYDOUX ont
évoqué la question de l’exclusivité des droits en
matière de production cinématographique. Eric
ALTMAYER m’entretient depuis assez longtemps de
ces questions. Nous n’envisageons pas de remettre en
question la territorialité des exclusivités des
distributeurs et diffuseurs. Nous travaillons à la mise
au point d’un cadre réglementaire qui permet les
licences multiterritoriales mais qui ne serait en aucun
cas imposée aux opérateurs. Les distributeurs seront
libres de déterminer le nombre de territoires concernés
dans une perspective d’optimisation de leurs revenus.
Il n’est pas question à mon sens, j’y insiste, de mettre sur pied une licence obligatoire. Notre souci est
seulement d’encourager une plus large diffusion. Cette question sera abordée à la fin de 2011 dans le
cadre du livre vert sur l’audiovisuel.
Les réflexions du député LEFAIT et de Pascal NEGRE sur la dimension économique de ces
sujets m’ont intéressé. Je n’ai pas d’a priori sur la manière d’associer privé et public pour mobiliser
davantage de crédits à l’appui du chantier de numérisation. Je sais simplement que les pouvoirs
publics, pas seulement en France, connaissent actuellement d’importantes restrictions budgétaires. Il
est donc nécessaire de susciter des effets de levier. C’est notamment l’objet de certaines propositions
contenues dans le projet d’acte pour le marché unique. Je suis ouvert aux propositions en la matière.
J’ai parfaitement conscience, Monsieur NEGRE, de la place prépondérante qu’occupent les
acteurs américains sur le marché numérique. Devons-nous tout attendre de Bruxelles et des pouvoirs
publics ? Là encore, je recevrai avec profit l’ensemble des demandes et idées. Je ne pense pas que
nous soyons confrontés à une quelconque fatalité sur ce point.
J’ai noté l’ensemble des remarques et contributions, et j’assure chacun de leurs auteurs que je
suis prêt à poursuivre le dialogue sur chacun de ces points, à Bruxelles comme à Paris. Je vous
remercie pour votre accueil. Je le répète, ma porte et celle de mes équipes vous sont ouvertes. Une fois
encore, je vous engage à ne pas négliger l’importance des échanges et des consultations. Je pourrais
mobiliser un grand nombre d’exemples, dans des domaines aussi variés que ceux des produits dérivés
ou du short selling, où les propositions ont été corrigées et améliorées grâce aux consultations. Il
importe donc que vous preniez le temps de répondre aux livres verts ou blancs.
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Emmanuel HAMELIN, Coprésident du Club parlementaire sur
l’avenir de l’audiovisuel et des medias
Merci, Michel BARNIER, pour votre temps et vos réponses, au nom de
l’ensemble des membres du Club. Je précise que le texte sur la propriété
intellectuelle sera disponible; sitôt son adoption par le Collège, sur le blog du
Club parlementaire. Chacun y trouvera des éléments précis d’information.
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Liste des présents au déjeuner
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PRIEUR Guillaume SACD
QUINTARD Alexandre Secrétariat général du Premier ministre
RAFFALLI Hadrien Staut & associés
RALITE Jack Sénateur de Seine-Saint-Denis
RICHARD Dominique CSA
RIESTER Franck Député de Seine et Marne
ROBINET Arnaud Député de la Marne
ROGEMONT Marcel Député d'Ille-et-Vilaine
SANCHEZ-SCHMID Marie-Thérèse Parlement Européen
SANDELL Corinne Alcatel Lucent
SCHMITT Fabienne La correspondance de la presse
SELLIER Marie Vivendi
SEYDOUX Nicolas Gaumont
SOLIER Edouard CSA
SOLOVEICIK Frank M5 Europe Images
SORBIER Laurent Myskreen
SPIRI Jean Lysios Public Affairs
STAUT André Staut & associés
TALVAS Vincent SFR
TARDY Lionel Député de Haute-Savoie
THIBAULT Olivia Consultante
THIEC Yvon Eurocinéma
UBEDA Olivier Ubeda & Partners
VELLY Yann Sénat
VELTER Thomas Mairie de Coulommiers
VESQUE-JEANCART Valérie Grand Palais
VIRET Gérald-Brice NRJ
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Club parlementaire
sur l’avenir de l’audiovisuel et des médias
LE CLUB
Après avoir organisé, le 15 avril 2004, un important colloque sur le lancement de la Télévision
numérique terrestre, qui a permis de confronter les positions contribuant à faciliter le processus,
Emmanuel HAMELIN, alors député de Lyon et président du Groupe d’études sur la TNT à
l’Assemblée nationale, a souhaité en prolongement et dans le même esprit créer un lieu d’échanges qui
permette de faire un état des lieux permanent avec l’ensemble des acteurs concernés, en constituant un
Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des médias.
En cette période de pleine mutation dans les médias et en particulier la télévision et l’audiovisuel à
l’heure du numérique, le Club a depuis réuni régulièrement les acteurs majeurs du secteur autour des
sujets d’actualité, pour des échanges libres et riches en informations pour les parlementaires,
l’Administration et les professionnels.
En 2007 Frédéric LEFEBVRE, député des Hauts-de-Seine, est venu rejoindre le Club comme
coprésident et en septembre 2009 ayant quitté l’Assemblée il devient président d’honneur du Club,
avec l’arrivée de Franck RIESTER, député-maire de Coulommiers, spécialiste de ces questions à
l’Assemblée, renforçant ainsi la dynamique de cette plate-forme reconnue pour favoriser les échanges
mais aussi participer à l’aide à la décision.
Le cabinet staut&associés, cofondateur du Club avec Emmanuel Hamelin, a depuis l’origine reçu
délégation pour assurer l’organisation et la gestion du CPAA.
18 octobre 2004 : Dîner-débat du Club avec Dominique BAUDIS, président du Conseil supérieur
de l’audiovisuel, sur le thème « Télévision numérique terrestre, haute définition, et télévision sur
mobile. État des lieux et perspectives »
1er février 2005 : Débat du Club avec Michel BARNIER, ministre des Affaires étrangères,
Dominique BAUDIS, président du CSA, Patrick LE LAY, président de TFI, Marc TESSIER,
président de France Télévisions et Alain SEBAN, directeur des Médias, sur le thème « L’évolution de
notre audiovisuel extérieur : la chaîne d’information internationale et les chaînes
extracommunautaires »
22 mars 2005 : Dîner-débat du Club avec Marie-Laure DENIS et Philippe LEVRIER, membres du
Conseil supérieur de l’audiovisuel, ainsi que Patrick RAUDE, directeur de la DDM et les principaux
acteurs de la radio, sur le thème « Comment optimiser l’offre radio »
3 mai 2005 : Dîner-débat du Club avec Patrick DEVEDJIAN, ministre délégué à l’Industrie, sur le
thème « Télévision et mobilité »
20 octobre 2005 : Colloque sous l’égide du Groupe d’études TNT présidé par Emmanuel
HAMELIN - « TV mobile : quelle offre, quels usages, quel marché ? »
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« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011
6 décembre 2005 : « Couverture TNT à 100 % : quand et comment ? » avec Christian ESTROSI
28 mars 2006 : « Redevance publicité abonnement : quels nouveaux équilibres pour le financement
de la télévision numérique ? » avec Jean-François COPÉ, ministre délégué au Budget et à la Réforme
de l’État, porte-parole du Gouvernement
20 juin 2006 : « Les attentes pour une chaîne française d’information internationale » en présence
d’Alain de POUZILHAC, président du directoire de la CFII et Ulysse GOSSET et Jean-Yves
BONSERGENT, directeurs généraux
16 avril 2008 : « 3 ans de TNT, bilan et prospectives » en présence d’Eric BESSON, secrétaire
d’Etat chargé de la Prospective, de l’Evaluation des politiques publiques et du Développement de
l’économie numérique, auprès du Premier ministre et Michel BOYON, président du CSA
9 juillet 2008 : Dîner-débat du Club avec Jean-François COPÉ, Président de la Commission pour la
nouvelle télévision publique
4 mars 2009 : « Diffuser et protéger la création sur Internet », Christine ALBANEL, Ministre de la
Culture et de la Communication
7 avril 2009 : «Passage au tout numérique, perspectives et nouveaux usages (TMP, TNT, Radio
Numérique) Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, Secrétaire d'État à la prospective et au
développement de l'économie numérique, auprès du Premier Ministre
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« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011
1 juin 2010 «Téléviseurs connectés : du téléspectateur au télén@ute», Emmanuel GABLA,
CSA
19 octobre 2010 Petit-déjeuner « Le financement des médias dans le projet de loi de finances
2011 »
15 février 2011 dîner-débat « Etat des lieux des enjeux du paysage radiophonique »
8 mars 2011 petit-déjeuner « Le développement des services de vidéo à la demande et leur impact
sur la création » autour d’Eric GARANDEAU, Président du Centre National de la Cinématographie
(CNC)
22 mars 2011 dîner-débat «Télévision tout numérique : tous les enjeux » autour de Catherine
MORIN-DESSAILLY, Sénatrice de la Seine-Maritime, Présidente du groupe d’études « Médias et
Nouvelles Technologies, Louis de BROISSIA, Président du GIP France Télé Numérique et Alain
MEAR, membre du CSA
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Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des medias
« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011
Les membres CPAA 2010-2011
Députés
* déjà membres dans la précédente législature
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Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des medias
« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011
Olivier DASSAULT* Philippe MORENVILLIER
Député de l’Oise Député de Meurthe et Moselle
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Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des medias
« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011
Sénateurs
Pierre HERISSON
Sénateur de Haute Savoie
* déjà membres dans la précédente législature
Entreprises :
AB groupe LCP AN
ACCèS Mediametrie
Alcatel-Lucent Microsoft
APC SFR
APFP Simavelec
Astra Skyrock
Bolloré TDF
Eutelsat Technicolor
Forum TV Mobile TV Numeric
France Telecom Vivendi
France Télévisions WarnerBros France
Google
Kurt Salmon
Lagardère Active
Contact :
STAUT & ASSOCIES
33, rue de Tocqueville – 75017 Paris
Tél. : 01 43 80 62 26 - Fax : 01 43 80 35 54 - mail : cpaa@stautassocies.fr
http://cpaa.unblog.fr/
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« La stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle »
12 avril 2011